compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE Mme Michèle André
vice-présidente
1
PROCÈS-VERBAL
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Retour à l'emploi
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, pour le retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux (nos 118, 161).
J'informe le Sénat que la commission des affaires sociales m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour le retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.
Dans la discussion des articles de ce projet de loi, nous en sommes parvenus à l'amendement n° 107 rectifié tendant à insérer un article additionnel après l'article 9.
Articles additionnels après l'article 9 (suite)
Mme la présidente. L'amendement n° 107 rectifié, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, les mots : « qui est âgé de plus de vingt-cinq ans » sont remplacés par les mots : « qui est âgé de plus de dix-huit ans ».
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Cet amendement vise à permettre aux jeunes âgés de dix-huit à vingt-cinq ans de bénéficier du revenu minimum d'insertion, le RMI.
La discrimination qui prive du RMI les jeunes âgés de dix-huit à vingt-cinq ans est sans fondement. Cet amendement tend à leur assurer, à l'instar de leurs aînés, les moyens de mener une vie décente. Alors que la majorité politique est à dix-huit ans, le législateur repousse la majorité sociale à vingt-cinq ans, considérant implicitement que les jeunes peuvent compter sur leur famille ou trouver un emploi, sous réserve de faire quelques efforts.
Or le taux de chômage des jeunes de moins de vingt-cinq ans est supérieur à la moyenne, en raison de leur manque d'expérience : 22,8 % des jeunes actifs sont au chômage selon l'INSEE, soit 618 000 personnes !
Suffit-il de faire des efforts pour trouver un travail ? Non ! Dans l'immense majorité des cas, le chômage est une situation subie, très douloureuse socialement et psychologiquement. Ce n'est pas un choix de vie.
De quoi vivent ces jeunes chômeurs sans RMI, alors que, bien souvent, à cet âge-là, ils n'ont pas assez travaillé pour toucher des allocations chômage ? Nombre d'entre eux ne peuvent compter sur une famille assez aisée pour subvenir à leurs besoins. Par ailleurs, on peut comprendre que ceux qui pourraient le faire aspirent légitimement à l'indépendance.
Vivre aux crochets de ses parents, quand on a vingt-trois, vingt-quatre ou vingt-cinq ans, ce n'est pas normal !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. D'emblée, madame la présidente, j'invoque l'article 40 de la Constitution.
Mme la présidente. L'article 40 de la Constitution est-il applicable, monsieur Mercier ?
M. Michel Mercier, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Oui, madame la présidente, il l'est.
Mme la présidente. L'article 40 de la Constitution étant applicable, l'amendement n° 107 rectifié n'est pas recevable.
M. Guy Fischer. On accélère !
Mme la présidente. L'amendement n° 103, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au début de l'article L. 262-8 du code de l'action sociale et des familles, les mots : « Les personnes ayant la qualité d'élève, d'étudiant ou de stagiaire » sont remplacés par les mots : « Les personnes ayant la qualité d'élève ou d'étudiant »
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Michel Mercier, au nom de la commission des finances. C'est le même cas !
M. Jean Desessard. Les dépenses engagées par la droite sont toujours bonnes. En revanche, elles ne le sont pas quand c'est l'opposition qui les propose !
M. Christian Demuynck. Il le reconnaît ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. J'espère que M. le rapporteur prendra en compte cette disposition en faveur des jeunes âgés de dix-huit à vingt-cinq ans lors du prochain débat sur les minima sociaux.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous verrons !
M. Jean Desessard. L'amendement n° 103 vise à permettre aux stagiaires d'avoir droit au RMI.
En effet, dans la situation actuelle, les stagiaires peuvent n'obtenir aucune « gratification » de la part de leur employeur. La plupart d'entre eux reçoivent environ 300 euros par mois. Tous en sont donc réduits à payer pour travailler. On le sait bien, le stage inclut généralement l'accomplissement de tâches productives et se caractérise souvent par un mélange de formation et de véritable travail.
Cette situation a pour conséquence d'empêcher les personnes sans ressources, notamment sans soutien financier familial, d'effectuer des stages, alors que ces derniers constituent souvent un passage obligatoire vers l'emploi.
Assurer aux stagiaires les moyens de subvenir à leurs besoins élémentaires serait donc un outil pour favoriser l'égalité des chances et l'accès ou le retour à l'emploi.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Nous sommes exactement dans le même cas de figure que précédemment, madame la présidente. J'invoque donc une nouvelle fois l'article 40 de la Constitution.
Mme la présidente. L'article 40 de la Constitution est-il applicable, monsieur Mercier ?
M. Michel Mercier, au nom de la commission des finances. Oui, madame la présidente, il l'est.
Mme la présidente. L'article 40 de la Constitution étant applicable, l'amendement n° 103 n'est pas recevable.
M. Jean Desessard. Vous aviez donc peur que cet amendement soit adopté !
Mme la présidente. L'amendement n° 104, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article L. 262-9 du code de l'action sociale et des familles est supprimé.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Cet amendement vise à supprimer le deuxième alinéa de l'article L. 262-9 du code de l'action sociale et des familles, qui exclut, dans la prise en compte pour la détermination du montant du revenu minimum d'insertion, certains enfants étrangers, à savoir ceux qui ne sont pas nés en France mais y sont entrés après 1988 ou ceux qui séjournent sur le territoire dans des conditions irrégulières.
Concrètement, cette condition se traduit par le fait que les caisses d'allocations familiales exigent un certificat médical de l'Office des migrations internationales, l'OMI, pour les enfants nés hors de France qui sont à la charge d'allocataires étrangers.
Aujourd'hui, cette législation empêche l'exercice du droit fondamental des enfants à être protégés de la misère. En effet, la charge d'un enfant, qu'il soit entré sur le territoire régulièrement ou non, à quelque date que ce soit, est toujours une charge financière. Refuser de le reconnaître dans la détermination du montant du RMI revient à condamner ces enfants à la pauvreté.
Je vous rappelle que le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel fait référence le préambule de la Constitution de 1958, stipule que la nation « garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ».
Je pourrais également citer la convention C118 de l'Organisation internationale du travail, l'OIT, la Convention européenne des droits de l'homme, les accords conclus entre l'Union européenne et des États tiers, les conventions bilatérales de sécurité sociale ou la Convention internationale des droits de l'enfant.
Je rappelle par ailleurs que la défenseure des enfants, Mme Claire Brisset, dans le rapport qu'elle a remis, au mois de mai 2004, au comité de suivi des droits de l'enfant des Nations unies, ainsi que dans une proposition de réforme du 9 juin 2004 adressée au ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, déplorait le refus par les autorités françaises d'accorder des prestations familiales à tous les enfants d'allocataires étrangers. Elle demandait également la suppression de la condition de régularité de séjour de l'enfant en ne conservant que celle du séjour de la personne qui en a la charge.
C'est ce principe qui devrait également prévaloir pour l'attribution du RMI.
J'attends donc que le Gouvernement nous fournisse des explications sur cette disposition législative, qui semble pénalisante et discriminatoire pour certains enfants, lesquels ne sont pas responsables de ces problèmes strictement administratifs et n'ont pas à en souffrir.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Madame la présidente, j'invoque encore l'article 40 de la Constitution.
Mme la présidente. L'article 40 de la Constitution est-il applicable, monsieur Mercier ?
M. Michel Mercier, au nom de la commission des finances. Oui, madame la présidente, il l'est.
Mme la présidente. L'article 40 de la Constitution étant applicable, l'amendement n° 104 n'est pas recevable.
M. Roland Muzeau. Et voilà !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous voilà revenus au bon vieux temps ! (Sourires.)
TITRE III
CONTRÔLE ET SUIVI STATISTIQUE
Article 10
I. - L'article L. 262-33 du code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Dans le deuxième alinéa, après les mots : « en vue de l'attribution de l'allocation et », sont insérés les mots : « de la prime forfaitaire instituée par l'article L. 262-11 ainsi que » ;
2° Le quatrième alinéa est complété par les mots : « ou une prime forfaitaire ».
I bis. - Après l'article L. 262-33 du même code, il est inséré un article L. 262-33-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 262-33-1. - Lorsqu'il apparaît, au cours d'un contrôle accompli dans l'entreprise par l'un des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 325-1 du code du travail, que le salarié a, de manière intentionnelle, accepté de travailler sans que les formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320 du même code aient été accomplies par son ou ses employeurs, cette information est portée à la connaissance du président du conseil général, afin de mettre en oeuvre les dispositions prévues aux articles L. 262-23, L. 262-27, L. 262-41, L. 262-46 et L. 262-47-1 du présent code. »
II. - L'article L. 262-34 du même code est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, après les mots : « de l'allocation », sont insérés les mots : « ou de la prime forfaitaire instituée par l'article L. 262-11 » ;
2° Dans le deuxième alinéa, après les mots : « une allocation de revenu minimum d'insertion », sont insérés les mots : « ou une prime forfaitaire ».
III. - Dans le premier alinéa de l'article L. 262-48 du même code, après les mots : « à l'allocation de revenu minimum d'insertion, », sont insérés les mots : « à la prime forfaitaire instituée par l'article L. 262-11, ».
IV. - Dans le premier alinéa de l'article L. 262-49 du même code, après les mots : « revenu minimum d'insertion et », sont insérés les mots : « à la prime forfaitaire instituée par l'article L. 262-11 ainsi qu' ».
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 51 est présenté par M. Cazeau, Mmes Printz, Le Texier, Demontès et Schillinger, MM. Desessard, Godefroy, Sueur, Guérini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 75 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le I bis de cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour présenter l'amendement n° 51.
M. Jean-Pierre Godefroy. Il souffle sur ce paragraphe I bis ajouté par l'Assemblée nationale au texte initial un vent d'optimisme que nous ne pouvons manquer de souligner.
L'article L. 262-33-1 du code de l'action sociale et des familles commence ainsi : « Lorsqu'il apparaît, au cours d'un contrôle accompli dans l'entreprise par l'un des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 325-1 du code du travail... »
Cette rédaction témoigne de la ferme conviction que des contrôles en entreprise sont effectués, continueront à l'être et seront peut-être même développés par un corps d'inspecteurs et de contrôleurs du travail que l'on imagine de plus en plus pléthorique. C'est du moins le souhait qui sous-tend cet article.
Je rappelle que les 155 postes mis au concours pour 2006 annoncés par le ministre ne font que couvrir le déficit des années précédentes, qui est dû au report des dates de concours. Par ailleurs, comme d'habitude, cette annonce n'a pas été suivie d'effets financiers, ni même d'un projet de chiffrage.
Une autre question qui n'est pas anodine se pose. Ces nouveaux agents seront-ils affectés au contrôle sur le terrain ou bien se consacreront-ils à ce que le ministre appelle des enjeux nationaux et locaux, comme l'animation du dialogue dans les branches, les entreprises et les territoires ?
Si j'aborde le problème par ce biais, c'est parce que nous voyons se dessiner une réforme en profondeur de la fonction de l'inspection du travail, sans que cela soit jamais mentionné explicitement.
Déjà aujourd'hui, les agents sont mobilisés autour de la recherche de travailleurs clandestins, que l'on présume le plus souvent étrangers, bien entendu. J'ouvre ici une parenthèse pour souligner que les statistiques sont formelles : le travail clandestin, dissimulé ou illégal - peu importe le nom qu'on lui donne -, est très largement le fait de citoyens de nationalité française.
Or la mission première du corps de contrôle est de faire respecter le droit du travail dans les entreprises. Dans le cadre du travail dissimulé, selon le code du travail, c'est d'ailleurs l'optique qui prévaut, puisque le salarié est d'abord considéré comme une victime et l'employeur comme le délinquant.
Avec ce paragraphe I bis, nous assistons donc à une double dérive, qui touche non seulement le rôle de l'inspection du travail, mais aussi, plus formellement, le salarié victime de travail dissimulé. C'est, en effet, méconnaître la situation des allocataires de minima sociaux qui, souvent, ont encore moins que d'autres le choix, s'ils veulent travailler.
Proposer la transmission d'informations et le croisement des fichiers, en vue de prendre des sanctions d'une extraordinaire sévérité, particulièrement en direction de gens qui sont en difficulté, est une mesure de stigmatisation dont on aurait pu se passer !
Sur le plan pratique, on peut également s'interroger sur le véritable intérêt de cette mesure. En effet, la plupart des salariés qui retrouvent un emploi après avoir bénéficié de minima sociaux ont un contrat aidé, parce que c'est d'abord l'intérêt de leur employeur, qui bénéficie ainsi d'aides substantielles. Il est également de l'intérêt des allocataires d'être déclarés, s'ils veulent bénéficier du dispositif d'intéressement. C'est même automatique aux termes de cette procédure.
Ce paragraphe ne semble donc viser que les fraudeurs conscients. Or, pour eux, des dispositions pénales relatives à l'escroquerie, dont l'application se justifie pleinement, existent déjà.
C'est pourquoi le paragraphe I bis de l'article 10 est, à notre sens, tout à fait superflu. Nous en demandons, par conséquent, la suppression.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 75.
M. Guy Fischer. Je partage tout à fait le point de vue que vient d'exposer notre collègue.
Nous abordons, avec cet article 10, la partie la plus inqualifiable de ce projet de loi, monsieur Mercier, celle qui est relative au contrôle des bénéficiaires de minima sociaux.
J'ai rappelé hier que M. Nicolas Sarkozy a fait contrôler 25 000 des 28 000 allocataires dans son département. Parmi eux, 4 500 ont été suspendus.
Nous aurons l'occasion de revenir sur cette politique de suspicion à l'égard non seulement des bénéficiaires de minima sociaux, mais aussi des chômeurs ou bien encore des étrangers. Notre collègue Jean Desessard a rappelé la suppression des allocations familiales pour les enfants en situation irrégulière. Certains départements font même des difficultés pour attribuer le RMI à des ressortissants de l'Union européenne ! Voilà l'un des points qu'il s'agira d'élucider.
Le paragraphe I bis, ajouté par l'Assemblée nationale, franchit une étape supplémentaire dans cette véritable « chasse aux pauvres ». Il introduit l'idée que le « salarié a, de manière intentionnelle, accepté de travailler sans que les formalités prévues [...] aient été accomplies... », c'est-à-dire sans déclaration préalable à l'URSSAF.
Il s'agit là d'un retournement sémantique, déjà engagé avec la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 et lourd de conséquences.
Vous faites peser sur les travailleurs, et non sur les employeurs, la responsabilité du travail dissimulé. C'est oublier très vite à qui il profite !
Les personnes travaillant sans être déclarées le font dans des conditions difficiles et sont contraintes par la nécessité d'accepter n'importe quel emploi, parfois même en mettant en danger leur propre sécurité.
En revanche, certains employeurs abusent largement de ces situations de précarité extrême pour contraindre leurs salariés à travailler clandestinement, de façon à ne pas payer les cotisations sociales. Personne ne sera dupe ici des véritables intentions qui poussent au travail dissimulé.
L'intentionnalité doit porter sur les entrepreneurs qui contournent la loi pour réaliser quelques économies et abusent de leur pouvoir, et non l'inverse.
Par ailleurs, laissez-moi faire une remarque complémentaire. L'inspection du travail, telle que nous la connaissons aujourd'hui, née de la loi du 2 novembre 1992, est sinistrée. Les chiffres sont éloquents : alors qu'en 1910 il y avait 110 inspecteurs pour trois millions de salariés, en 2004, ils étaient 427 pour 15,5 millions de salariés.
Comment peut-on croire que 427 inspecteurs du travail, assistés de 813 contrôleurs, soit 1 240 agents pour 1,2 million d'entreprises, peuvent de manière satisfaisante remplir leurs missions, notamment renforcer l'efficacité de la lutte contre le travail au noir ? Cette situation appelle des réponses autres que celles que l'on nous donne aujourd'hui.
Historiquement, les inspecteurs du travail avaient pour vocation la préservation des droits des salariés dans leur entreprise, alors que ces derniers sont soumis à une relation de pouvoir inégalitaire en leur défaveur.
Tout en réduisant les effectifs et les moyens des inspections du travail, vous souhaitez faire basculer leur fonction vers le contrôle des travailleurs. C'est intolérable !
M. Roland Muzeau. Très bien !
Mme la présidente. L'amendement n° 52, présenté par M. Cazeau, Mmes Printz, Le Texier, Demontès et Schillinger, MM. Desessard, Godefroy, Sueur, Guérini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après les mots :
du président du conseil général
supprimer la fin du texte proposé par le I bis de cet article pour l'article 262-33-1 du code de l'action sociale et des familles.
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement de repli a pour objet de supprimer la fin du paragraphe I bis de l'article 10, qui enjoint aux présidents de conseils généraux de mettre en oeuvre les sanctions prévues.
Nous estimons que le président du conseil général doit garder toute latitude d'apprécier les mesures, et éventuellement les sanctions, appropriées à chaque cas précis. Ce point est particulièrement important compte tenu du montant exorbitant pour les personnes concernées des amendes et pénalités que vous prévoyez.
Les difficultés dans lesquelles, pour une fraude relativement minime, risquent de se trouver plongées les personnes, peuvent conduire à des situations finalement plus coûteuses pour la collectivité que les amendes qui seraient infligées. Il convient donc d'apprécier si la seule récupération des indus est opportune, et même possible, ou s'il faut aller au-delà. C'est précisément le rôle des élus qui connaissent les dossiers.
C'est porter atteinte aux prérogatives du président du conseil général que de rédiger ce texte d'une manière aussi directive. Nous proposons donc de supprimer la fin de ce paragraphe.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur de la commission des affaires sociales. Les amendements nos 51 et 75 ont pour objet de supprimer les dispositions relatives à la transmission au président du conseil général des informations concernant les bénéficiaires du RMI convaincus d'avoir accepté en toute connaissance de cause de travailler au noir.
Il est évident que le travail au noir ne constitue pas la situation majoritaire des allocataires du RMI. Cependant, quelques cas mis au jour jettent le discrédit sur l'ensemble du dispositif et alimentent un courant de suspicion dans l'opinion publique.
Le dispositif prévu n'a pas pour effet d'accroître les sanctions existantes, mais simplement d'en permettre la mise en oeuvre en mettant à la disposition des présidents de conseils généraux chargés du versement du RMI des informations auxquelles ils n'ont accès aujourd'hui que difficilement. Il leur revient ensuite de décider en opportunité de la suite à donner à ces informations et donc de la mise en oeuvre ou non des sanctions prévues.
Ce dispositif contribue à assurer l'équilibre général de toutes les dispositions concernant le RMI. Tel est d'ailleurs l'un des arguments que j'ai invoqué contre l'amendement présenté par M. Philippe Adnot et tendant à insérer un article additionnel après l'article 8. En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.
L'amendement n° 52 vise à supprimer la référence aux sanctions pouvant être mises en oeuvre par les présidents de conseils généraux à la suite de l'information qui leur est transmise concernant les RMIstes convaincus d'avoir travaillé volontairement au noir.
Le projet de loi n'enjoint en aucune façon aux présidents de conseils généraux de prendre telle ou telle sanction. Il ne fait que rappeler, dans un souci de lisibilité, les sanctions éventuellement applicables à charge pour les autorités concernées de décider en opportunité d'engager ou non des poursuites ou de mettre en oeuvre les procédures de suspension des allocations.
L'équilibre et la sérénité du développement de l'aide au retour à l'emploi et à l'insertion passent par cette harmonie, en tout cas, par cette affirmation tranquille, et non par l'élimination de cette partie du dispositif. C'est pourquoi la commission a également émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. La lutte contre le travail illégal est une des priorités du Gouvernement et cela ne vise pas seulement les minima sociaux.
Les sanctions pénales sont d'ores et déjà prévues par le code pénal. Elles s'appliquent, avant tout, à l'employeur qui ne respecte pas les obligations qui sont prévues par le code du travail et ne concernent pas exclusivement les salariés !
En outre, chacun connaît l'implication des inspecteurs du travail dans leur mission. Malheureusement, on sait qu'elle peut avoir des conséquences dramatiques. À cette occasion, je souhaiterais rendre hommage à l'ensemble de ces professionnels et saluer la mémoire des deux fonctionnaires qui sont morts victimes de leur devoir en Dordogne au mois de septembre dernier.
Concernant les amendements nos 51 et 75, il nous semble indispensable de donner au président du conseil général des informations résultant des opérations de contrôle qui sont effectuées par les inspecteurs du travail et qui permettent de révéler des faits constitutifs du travail dissimulé. En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
En ce qui concerne l'amendement n° 52, présenté par Mme Gisèle Printz, j'ajouterai que le président du conseil général peut mettre en oeuvre toute une gamme de sanctions : la suspension, la révision de l'allocation, l'indu, la sanction administrative ou la sanction pénale. Ces mesures constituent une faculté et, en aucun cas, une obligation.
Pour cette raison, la rédaction actuelle, du fait qu'elle n'introduit, pour le président du conseil général, aucune obligation, devrait être satisfaisante. En conséquence, je demanderai le retrait de l'amendement, sinon j'émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Article 40 !
M. Michel Mercier. À ce sujet, plusieurs problèmes sont posés, le premier étant celui du travail illégal.
Les sanctions doivent d'abord frapper le chef d'entreprise qui ne fait pas les déclarations auxquelles il est soumis.
Par ailleurs, certains bénéficiaires de minima sociaux ne déclarent pas à l'autorité administrative qu'ils ont repris un emploi et sont en contravention avec la loi sur les minima sociaux. En l'occurrence, ce n'est pas seulement le problème de l'URSSAF qui est posé !
Le second problème, madame le ministre, est celui des paiements indus, notamment du RMI, qui, dans notre pays, s'élèvent à plusieurs milliards d'euros. Dans mon département, le Rhône, les indus résultent, semble-t-il, de la mauvaise organisation du système du paiement des prestations. Il arrive que la caisse d'allocations familiales continue à verser le RMI, pendant un, deux ou trois mois, à un allocataire qui n'y a plus droit. Tant que la situation n'est pas revue, cela génère des indus.
Or, dans mon département, le montant des indus a dépassé, l'an dernier, dix millions d'euros, soit trois points d'impôts. Voilà pourquoi la centralisation des informations s'impose.
Les dispositions de l'article 10 sont un moyen de renseigner l'autorité administrative de façon qu'elle puisse agir efficacement. À mon sens, elles ne créent pas une compétence liée pour le président du conseil général, qui conserve toute sa faculté d'appréciation de la situation de la personne, comme cela a toujours été le cas.
Il ne s'agit pas de faire des procès aux pauvres ; il s'agit de gérer au mieux les minima sociaux dont nous devons en permanence assurer la crédibilité vis-à-vis de nos concitoyens qui sont contribuables.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je voterai ces amendements. Mais je souhaitais réagir aux remarques de M. Mercier.
Il y a eu, selon lui, beaucoup d'erreurs administratives. Pourtant, je ne crois pas que le projet de loi que nous allons voter aujourd'hui en réduise le nombre. J'irais même jusqu'à dire que les éventuelles créations d'emplois viseront seulement à assurer le traitement des dossiers de recours.
Selon M. Mercier, il y a eu des indus, il a cité des chiffres et les a même comparés aux recettes du département.
Signalons que les sommes, même indues, que l'on verse aux RMIstes ne sont destinées ni à l'épargne, ni à des comptes à l'étranger ! Elles sont directement consommées et profitent à l'économie locale. Ce n'est pas de l'argent perdu ! Au contraire, ces personnes pourront payer leurs factures d'électricité, d'eau ou de gaz.
Je dirais même que ces indus ont un aspect économique puisqu'ils empêchent l'intervention des services sociaux. Ils ne sont pas négatifs ; ils sont positifs non seulement pour les RMIstes eux-mêmes, mais aussi pour l'économie du pays. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et protestations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. Michel Mercier. Heureusement que j'ai le soutien de M. Fischer ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. S'agissant des indus, je tiens à dire que les agents de cette administration travaillent bien en s'impliquant dans un immense travail de gestion et en assurant le traitement de nombreux dossiers.
Cet article a précisément pour objet, sans créer une obligation, de fournir des moyens supplémentaires pour obtenir une meilleure information et éviter les erreurs, qui restent exceptionnelles.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 51 et 75.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10.
(L'article 10 est adopté.)
Article 10 bis
Le code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L'article L. 262-46 est ainsi rétabli :
« Art. L. 262-46. - Sans préjudice de la constitution éventuelle du délit défini et sanctionné aux articles 313-1 et 313-3 du code pénal, le fait de bénéficier frauduleusement ou de tenter de bénéficier frauduleusement de l'allocation de revenu minimum d'insertion ou de la prime forfaitaire instituée par l'article L. 262-11 est passible d'une amende de 4 000 €. En cas de récidive, ce montant est porté au double. » ;
2° Dans l'article L. 262-47, après les mots : « allocation de revenu minimum d'insertion », sont insérés les mots : « ou la prime forfaitaire instituée par l'article L. 262-11 » ;
3° Après l'article L. 262-47, il est inséré un article L. 262-47-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 262-47-1. - Sans préjudice des actions en récupération de l'allocation indûment versée et des poursuites pénales, l'inexactitude ou le caractère incomplet, lorsqu'ils sont délibérés, des déclarations faites pour le bénéfice de l'allocation ou de la prime forfaitaire instituée par l'article L. 262-11, ainsi que l'absence de déclaration d'un changement dans la situation justifiant ce bénéfice, ayant abouti à des versements indus, peuvent être sanctionnés par une amende administrative prononcée par le président du conseil général et dont le montant ne peut excéder 3 000 €.
« Le président du conseil général informe préalablement l'intéressé des faits qui lui sont reprochés et de l'amende envisagée. Il l'invite à présenter ses observations écrites ou orales, le cas échéant assisté d'une personne de son choix, dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois. L'amende peut être prononcée à l'issue de ce délai et est alors notifiée à l'intéressé.
« Cette décision est susceptible de recours devant le tribunal administratif. Le produit de l'amende est versé aux comptes du département. Aucune amende ne peut être prononcée à raison de faits remontant à plus de deux ans. »
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 53 est présenté par M. Cazeau, Mmes Printz, Le Texier, Demontès et Schillinger, MM. Desessard, Godefroy, Sueur, Guérini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 76 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Madame la présidente, avec votre autorisation, je défendrai en même temps les amendements nos53, 54 et 55, qui relèvent de la même logique puisqu'ils visent à supprimer trois articles analogues, les articles 10 bis, 10 ter et 10 quater, ajoutés au texte initial par amendement du rapporteur à l'Assemblée nationale. Je note d'ailleurs que le texte initial du Gouvernement n'était pas aussi violent que celui qui nous arrive de l'Assemblée nationale, mais cela est peut-être concerté.
Nous sommes en présence de la création d'une nouvelle sanction pénale sous la forme d'une amende de 4 000 euros, qui double en cas de récidive, et d'une pénalité administrative de 3 000 euros.
Il est bien évident que des contrôles sont indispensables et qu'ils doivent être faits avec sérieux. Ils existent déjà et sont réalisés notamment par les caisses d'allocations familiales. Ils font apparaître un niveau de fraude extrêmement faible, ce qui est logique si l'on veut bien admettre que nos concitoyens ne sont pas chômeurs de longue durée et allocataires de minima sociaux par plaisir.
Nous ne croyons pas, comme le font nos collègues Michel Mercier et Henri de Raincourt dans leur fort intéressant rapport, que remettre en cause la qualité de ces contrôles soit un élément positif dans le débat, surtout si l'on observe que les moyens dont disposent les CAF sont réduits par les choix budgétaires du Gouvernement.
L'augmentation du nombre des contrôles implique que les institutions et les organismes qui y procèdent y consacrent davantage de moyens. Je crois que nous ne devons pas négliger ce paramètre.
Mais ces articles posent des problèmes d'une autre ampleur. Tout d'abord, sont-ils applicables ?
Ces mesures témoignent d'une méconnaissance, ou peut-être d'une volonté de méconnaissance, de la situation réelle des allocataires de minima sociaux. Comme nous l'a dit un représentant d'une grande association, « ces personnes se demandent à partir du 10 du mois comment elles vont manger jusqu'à la fin du mois. S'il n'y avait pas la banque alimentaire et les Restos du coeur, on ne sait pas ce qui se passerait ».
Les allocataires de minima sociaux sont en situation de nécessité de manière quasi permanente, parce que le niveau des allocations qui leur sont servies ne leur permet pas de couvrir les besoins en nourriture, logement, habillement et transport. Je parle là des besoins de base, sans même citer l'aide à l'éducation des enfants - comment acquérir un ordinateur ? - ou les loisirs.
Il arrive donc, et nous le savons tous, que les allocataires de minima sociaux acceptent de temps à autre un petit boulot au noir ou qu'ils « oublient » de se précipiter auprès de l'organisme payeur pour signaler qu'ils ont retrouvé un travail à temps très partiel, ce qui leur permettra de « gratter » un mois de RMI, par exemple. Cela démontre d'ailleurs que le présent projet de loi est incomplet et qu'il aurait fallu attendre le rapport de Mme Létard, car nous sommes là en plein dans le problème des droits connexes.
Bien sûr, cette attitude ne peut être approuvée, et nous devons dès lors tout faire afin de récupérer les indus, pour les finances publiques, dont nous sommes responsables, et pour nos concitoyens qui sont dans le contexte difficile dans lequel nous vivons.
Or, récupérer les indus, nous le savons tous d'expérience, n'est pas facile. Combien d'allocataires sont capables de rembourser, alors que les sommes frauduleusement acquises, c'est indéniable, ont déjà été dépensées pour couvrir les besoins familiaux ?
Comment va-t-on parvenir à percevoir des sommes de 3 000 ou de 4 000 euros, voire de 8 000 euros, qui représentent pour les allocataires une véritable fortune et qui excèdent largement le bénéfice qu'ils auront réalisé ?
Les sanctions que vous proposez sont tout à fait inapplicables et disproportionnées. J'oserai dire que ces amendes constituent une condamnation à très long terme. En effet, soit nous nous trouvons en présence de fraudes de petite ampleur, qui justifient une récupération des indus et éventuellement une sortie du bénéfice de l'allocation, soit nous nous trouvons devant une véritable escroquerie organisée, parfois en réseau, et l'application des sanctions pénales se justifie alors pleinement, puisque des ressources destinées à l'exercice de la solidarité sont frauduleusement captées.
À quoi servent donc ces articles nouveaux ? Nous voyons deux objectifs majeurs.
Le premier objectif est, bien sûr, de réaliser des économies sur les budgets sociaux. Le second objectif, dans un contexte de chômage, de précarité et de bas salaires, consiste à envoyer un signal à tous les Français modestes qui peinent à vivre des ressources de leur travail. Ce signal, c'est que l'on va remettre au travail tous ces gens qui sont supposés se complaire dans l'inactivité et l'assistance, ce qui est complètement faux !
On divise en quelque sorte les victimes d'une politique de régression sociale pour, sans améliorer le sort des salariés, aggraver celui des chômeurs de longue durée. On ajoute la stigmatisation à la misère, tout en sachant pertinemment que l'on ne parviendra jamais à obtenir des allocataires de minima sociaux des sommes aussi importantes.
Comme le reste du texte qui nous est parvenu de l'Assemblée nationale, madame la ministre, on est là dans un effet d'annonce. C'est pourquoi nous demandons la suppression de ces trois articles. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° 76.
M. Roland Muzeau. La défense de l'amendement n° 76 vaudra également, si vous le voulez bien, madame la présidente, pour les amendements nos77 et 78 puisque les articles 10 bis, 10 ter, et 10 quater sont la déclinaison d'un même principe.
Ces trois articles créent deux catégories de sanctions pour chacune des allocations de minima sociaux. Introduits par le rapporteur, M. Wauquiez, à l'Assemblée nationale, ils visent une fois encore à mener la chasse aux fraudeurs tout en poursuivant votre projet d'uniformisation des minima sociaux. Rappelons, car la répétition n'est jamais inutile du point de vue pédagogique, que les fraudeurs ne représentent selon les statistiques que de 0,008 % à 0,04 % du nombre des allocataires, c'est-à-dire 0 %. Les propos tenus par le rapporteur à l'Assemblée nationale et retenus par cette dernière sont donc avant tout des propos politiques qui visent à stigmatiser une catégorie de nos concitoyens.
Ces articles visent à mettre en place un dispositif de sanctions pénales en cas de fraude aux trois allocations, l'API, l'allocation de parent isolé, l'ASS, l'allocation de solidarité spécifique, et le RMI, ainsi qu'à autoriser le président du conseil général à prononcer une amende administrative en cas de fausse déclaration.
Les sanctions du premier type s'élèvent à 4 000 euros et peuvent être doublées en cas de récidive. Les sanctions du second type, ce qui est une nouveauté, sont destinées à punir « l'inexactitude ou le caractère incomplet » des déclarations faites en demande d'ouverture de droit aux allocations, ainsi que l'absence de communication d'un changement de situation du titulaire.
Cette multiplication des procédures de sanction n'est pas justifiée et reste dans tous les cas disproportionnée. Quelle est la crédibilité d'une sanction pour fraude qui représente près de dix fois le montant mensuel du RMI pour une personne seule et celle d'une amende administrative pouvant atteindre sept fois ce même montant ?
La population des bénéficiaires du RMI est déjà la plus contrôlée. Dans mon département, les Hauts-de-Seine, sur 28 106 allocataires du RMI, 24 310 contrôles ont été effectués. La machine tourne à fond, et je ne doute pas, monsieur Mercier, qu'elle tourne également à fond dans le département du Rhône !
Toutes les enquêtes estiment à moins de 1 % - et de loin, comme je viens de le rappeler - la part des fraudes dans l'attribution des allocations sociales. Pourquoi dès lors un tel acharnement de la part de ce gouvernement et une telle médiatisation politicienne ?
Par ailleurs, ces articles impliquent de fait les services sociaux dans des missions de contrôle et de répression. Il est à craindre que, suivant les velléités des présidents des conseils généraux, les contrôles ne se multiplient encore, ainsi que les radiations, au détriment des missions premières des services sociaux.
Les travailleurs sociaux seront ainsi chargés d'instruire les demandes d'allocation et de détecter l'inexactitude et le caractère incomplet, ou présumé incomplet, des déclarations.
Ce détournement du travail des services sociaux vers des actions de contrôle en vue de radiation est une dérive que l'on connaît déjà aujourd'hui. Elle est dénoncée actuellement par les employés des services des ASSEDIC, qui, mardi 24 janvier, ont manifesté devant le ministère du travail. Ces employés dénoncent l'augmentation de la pression pesant déjà sur eux pour les obliger à augmenter le nombre de contrôles et à opérer un nombre plus important de radiations.
Cette même dérive se constate déjà dans certains départements français, où les présidents des conseils généraux trouvent une sortie à leur impasse de financement par l'augmentation des radiations, alors qu'ils feraient mieux de réclamer le remboursement à l'euro près !
De telles dispositions sont intolérables : l'orientation du texte est en totale opposition avec le rôle d'interlocuteur de proximité et de soutien aux personnes fragilisées normalement dévolu aux services sociaux.
M. Guy Fischer. Très bien !
Mme la présidente. L'amendement n° 17, présenté par M. Seillier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour l'article L. 262-47-1 du code de l'action sociale et des familles, après les mots :
président du conseil général
insérer les mots :
, après avis de la commission locale d'insertion mentionnée à l'article L. 263-10,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Les articles 10 ter et 10 quater prévoient, pour l'allocation de parent isolé et pour l'allocation de solidarité spécifique, que les nouvelles sanctions administratives sont précédées de l'avis d'une commission, au sein de laquelle siègent des représentants des organismes payeurs mais aussi des usagers. Il semble logique qu'une garantie identique soit apportée aux bénéficiaires du RMI.
C'est ainsi que cet amendement prévoit qu'une sanction ne peut être prononcée qu'après avis de la commission locale d'insertion.
Le choix de la commission locale d'insertion pour émettre cet avis est tout aussi naturel, puisque celle-ci est déjà consultée sur les décisions de suspension du versement de l'allocation.
Je sais bien que la commission locale d'insertion a aujourd'hui essentiellement pour vocation de définir la stratégie et la politique départementale de l'insertion. Mais, sur ces deux points, qu'il s'agisse de la suspension du versement du RMI prévue par la loi ou de la sanction pour fraude que la commission propose d'ajouter, il nous a semblé nécessaire d'équilibrer le dispositif et de l'harmoniser avec celui qui existe pour les autres minima sociaux.
Mme la présidente. L'amendement n° 113, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour insérer un article L. 262-47-1 dans le code de l'action sociale et des familles par une phrase ainsi rédigée :
Le montant total des sanctions pécuniaires administratives et pénales prononcées à raison des faits prévus au premier alinéa ne peut excéder le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Cet amendement a pour objet de rendre cet article issu d'une lecture à l'Assemblée nationale conforme à la jurisprudence constitutionnelle.
M. Michel Mercier. Eh oui !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. En conséquence, cet amendement limite le cumul des sanctions administratives et pénales, qui ne peut excéder le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues.
Mme la présidente. L'amendement n° 18, présenté par M. Seillier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
4° Après le huitième alinéa (7°) de l'article L. 263-10, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 8° De donner un avis sur les amendes administratives envisagées au titre de l'article L. 262-47-1. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur les amendements nos 53, 76 et 113.
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'amendement n° 18 est un amendement de coordination, qui vise à inscrire les avis sur les sanctions administratives parmi les compétences des commissions locales d'insertion.
En ce qui concerne les amendements identiques nos 53 et 76, la suppression de l'article 10 bis conduirait en réalité à majorer les sanctions applicables en cas de fraude au RMI. Les dispositions applicables resteraient en effet les dispositions prévues dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale en vigueur, qui prévoit une amende de 5 000 euros, au lieu des 4 000 euros prévus par le présent projet de loi. Je doute que telle soit réellement l'intention des auteurs de ces amendements.
S'agissant de l'argumentation développée par ces derniers, on ne peut pas dire qu'un signal de stigmatisation des pauvres soit lancé par ce texte qui, certes, tend d'abord à une harmonisation des dispositifs applicables aux minima sociaux, mais, comme je viens de le rappeler, pour le RMI, cette harmonisation joue dans le sens de la baisse du niveau de la sanction.
J'estime que, pour la protection de la dignité des titulaires de ces minima sociaux, il importe de donner à l'ensemble de la population l'assurance que les allocations sont gérées et attribuées en toute légitimité et en toute justice. Il ne faut pas faire une apologie de la fraude.
J'ajoute que le président du conseil général n'a pas l'obligation d'appliquer stricto sensu ces amendes.
Mme Raymonde Le Texier. Alors ce ne sera pas appliqué !
M. Jean-Pierre Godefroy. C'est seulement un affichage destiné à la presse !
M. Bernard Seillier, rapporteur. À lui d'apprécier les circonstances atténuantes. C'est d'ailleurs dans cette optique que la commission présente l'amendement que je viens de défendre puisque l'avis qu'il prévoit permettra au président du conseil général d'être totalement informé sur les circonstances dans lesquelles la présomption de fraude est soulevée à l'encontre d'un bénéficiaire.
La commission est donc défavorable aux deux amendements de suppression.
Elle est évidemment favorable à l'amendement n° 113 du Gouvernement puisqu'il apporte une précision non seulement utile mais aussi indispensable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Je souscris pleinement, mesdames, messieurs les sénateurs, aux explications données par votre rapporteur sur les amendements nos 53 et 76 et je me bornerai à ajouter quelques éléments supplémentaires.
Les articles 10 bis, 10 ter et 10 quater visent, bien sûr, à l'harmonisation des régimes de répression de la fraude en matière de minima sociaux, mais ils ont aussi pour objet une atténuation de la sanction, car il faut tout de même voir d'où nous partons.
Aujourd'hui, le dispositif est, d'une part, complexe, d'autre part, hétérogène d'une allocation à l'autre. Je rappelle que la sanction était de 4 500 euros pour l'API, de 375 000 euros et cinq ans de prison pour le RMI, de 3 750 euros et deux mois de prison pour l'ASS.
Les approches retenues par l'Assemblée nationale ont au moins le mérite d'être homogènes et les deux plafonds prévus, à savoir 4 000 euros pour la sanction pénale et 3 000 euros pour la sanction administrative, constituent bien des plafonds.
Enfin, la fraude, nous ne cessons de le souligner depuis le début de la discussion, est en effet exceptionnelle. Il s'agit de cas spécifiques et limités, qui, pour autant, doivent être condamnés.
Je rappellerai, en outre, qu'est prévue une autre option à la sanction pénale, je veux parler de la sanction administrative, et que le montant de ces pénalités constitue vraiment un plafond maximum.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 53 et 76.
En ce qui concerne l'amendement n° 17, les commissions locales d'insertion étant compétentes pour les questions touchant à l'insertion des bénéficiaires, les procédures de sanction pour fraude ne relèvent donc pas strictement de leur compétence.
L'article 10 bis prévoit certaines garanties des droits de la défense. C'est ainsi que, lorsqu'une sanction est envisagée, l'intéressé dispose d'un délai d'un mois pour présenter ses observations et peut, bien sûr, se faire assister des personnes de son choix.
Cependant, je comprends fort bien le souci de M. le rapporteur consistant à favoriser la communication et l'échange et à disposer d'avis supplémentaires.
Cet amendement peut ainsi se justifier par la volonté d'appliquer aux allocataires du RMI les mêmes conditions d'examen que celles qui s'appliquent aux bénéficiaires de l'API et de l'ASS, pour lesquels la sanction est prononcée après l'avis d'une commission.
Par conséquent, l'intérêt manifesté par la commission de conserver une certaine homogénéité entre les différentes procédures me paraît, je le répète, tout à fait compréhensible.
Au vu de ces différentes explications, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Cette explication vaut d'ailleurs pour l'amendement n° 18, qui, par définition, est un amendement de coordination.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Pour ma part, je voterai l'amendement n° 17, présenté par M. Seillier, au nom de la commission.
Je connais son expérience sur ce sujet pour avoir travaillé avec lui sur les problèmes posés par la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions.
En conséquence, je soutiens cet amendement, qui prévoit de demander l'avis de la commission locale d'insertion, quitte à m'opposer à M. Mercier.
En effet, dans le rapport de MM. de Raincourt et Mercier, figure une petite phrase, certes sibylline, mais qui veut bien dire ce qu'elle veut dire, et je dois avouer que je me suis senti quelque peu visé par celle-ci ! (Oh ! sur les travées de l'UMP.) Je ne sais si M. Mercier l'a écrite de sa main, mais pour le moins il a validé ce rapport (Sourires), d'où il ressort en substance que, dans certains cas, les commissions locales d'insertion constituent un frein et apparaissent, en fin de compte, comme une remise en cause des politiques qui peuvent être menées par le président du conseil général.
C'est la raison pour laquelle je voterai l'amendement n° 17.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.
M. Michel Mercier. Si vous le permettez, madame la présidente, je m'exprimerai sur l'ensemble de ces amendements ainsi que sur l'article 10 bis.
J'ai longtemps hésité pour savoir si je devais me déclarer favorable ou non à l'instauration de sanctions administratives envers les titulaires du RMI qui bénéficient à tort de cette prestation.
Or il est apparu, que le nombre de fraudeurs est très faible. (Murmures sur les travées du groupe socialiste.) Il faut dire les choses telles qu'elles sont.
En effet, après avoir, personnellement, en tant que responsable local, fait procéder à des contrôles portant sur plus de 6 000 personnes, seuls quelques dizaines de cas de fraude sont apparus.
C'est donc au vu de cette situation que je suis devenu favorable à une sanction administrative.
Les fraudeurs sont déférés au procureur de la République, ce qui donne lieu à des poursuites et à une sanction pénale inscrite au casier judiciaire.
Or si, pour des raisons x, y ou z qui peuvent s'expliquer à un moment donné, le bénéficiaire de minima sociaux a commis une faute, au moment où il devra rechercher un emploi, il restera en quelque sorte entaché de cette sanction pénale, qui, dès lors, constituera pour lui un handicap.
En revanche, si une simple sanction administrative est prononcée en cas de fraude, le bénéficiaire de minima sociaux, une fois le paiement effectué, n'aura pas à souffrir de la faute qu'il a commise. Il n'aura pas à supporter par la suite les conséquences de la sanction prononcée à son encontre.
C'est la raison pour laquelle je suis désormais favorable à la sanction administrative.
Je remarque d'ailleurs, madame la ministre, que, dans le texte que vous nous proposez, cette sanction administrative répond aux règles de base de notre droit, puisque y figure, notamment, la mise en oeuvre du principe de l'audi alteram partem, qui permet, d'une part, à la personne intéressée de faire valoir ses arguments et d'être assistée éventuellement d'un conseil ou d'une personne de son choix et, d'autre part, aux droits de la défense d'être respectés.
Il s'agit là, selon moi, d'une mesure favorable aux titulaires de minima sociaux. Il est, me semble-t-il, préférable de prévoir une sanction administrative plutôt qu'une sanction pénale qui empêcherait l'intéressé de retrouver un travail, et ce d'autant plus que cette décision administrative est prise sous le contrôle du juge.
Dès lors, je ne puis malheureusement pas suivre M. le rapporteur. En effet, lorsque la commission locale d'insertion donnera son avis, la situation du bénéficiaire du RMI qui fraude sera révélée au niveau local, ce que permettra d'éviter la sanction administrative.
Concernant le montant de la sanction, aucun président de conseil général ne prononcera une sanction de 3 000 euros à l'encontre d'une personne dont le revenu moyen mensuel est de 375 euros. Il y a là, selon moi, une disproportion évidente, la somme de 3 000 euros représentant un maximum qui n'est absolument pas significatif.
Je rappelle, en outre, que le maximum de la sanction pénale est de 4 000 euros et qu'aucun juge n'applique cette peine.
Telles sont les raisons pour lesquelles je suis défavorable aux amendements n°s 53, 76, 17 et 18.
En revanche, je voterai l'amendement n° 113, présenté par le Gouvernement, en ce qu'il constitue l'application du principe de notre droit non bis in idem, selon lequel l'on ne peut être condamné deux fois pour les mêmes faits.
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Le début du propos de M. Mercier était bien meilleur que la fin, ce qui est bien dommage !
Comme mon ami Guy Fischer, je voterai l'amendement n° 17, même si nous aurions préféré un avis conforme de la commission locale d'insertion.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Surtout pas !
M. Michel Mercier. Elle deviendrait un tribunal !
M. Roland Muzeau. Les avis ne sont, par définition, que des avis et, dès lors, le président du conseil général n'est pas obligé de les suivre. Les commissions locales d'insertion sont composées de personnes responsables dont le souci n'est pas, fort heureusement d'ailleurs, de répandre sur la place publique la situation personnelle des individus ; si tel était le cas, cela se saurait.
Par conséquent, il convient, selon moi, de faire confiance aux membres qui composent ces commissions locales et de cesser de nourrir des craintes telles que celles que vous avez évoquées à la fin de votre propos, monsieur Mercier.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous soutiendrons l'amendement n° 17. Nous le ferons d'autant plus volontiers qu'il constitue une réponse aux ultras de la droite de l'Assemblée nationale. (Exclamations.) Quand, de temps en temps, un rassemblement majoritaire voit le jour dans cet hémicycle, cela fait plaisir !
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je voudrais rappeler à M. Mercier que c'est après mûre réflexion que j'ai proposé cet amendement à la commission, qui a bien voulu l'adopter.
Il existe d'ores et déjà une consultation de la commission locale pour la suspension du RMI, et l'information concernant tout motif de suspension fait l'objet d'une diffusion. Or l'on ne suspend le RMI, et, a fortiori, on ne le supprime pas, pour des motifs anodins. Quel président de conseil général pourrait-il prendre une telle décision ? Une exigence de discrétion et de secret professionnel s'impose nécessairement aux membres de la commission.
. J'ai apprécié le raisonnement de M. Mercier qui le conduit à soutenir la sanction administrative et qui est conforme aux lois qu'il convient de respecter en matière de lutte contre l'exclusion.
Cela dit, si le président du conseil général est amené à prendre une décision, il faut éviter qu'il n'apparaisse comme un homme isolé prenant seul une sanction, même si cela a lieu après consultation pour avis de la commission locale d'insertion. Je ne parle pas d'avis conforme, je n'irai pas jusque-là.
La responsabilité reste bien celle du président du conseil général, et c'est dans son intérêt que j'ai souhaité déposer cet amendement, afin de montrer que l'on ne pouvait considérer que c'était une personne seule qui était chargée de prendre des décisions à l'encontre des bénéficiaires de minima sociaux.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 53 et 76.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme Gisèle Printz. Grâce à qui ? Grâce aux socialistes !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10 bis, modifié.
(L'article 10 bis est adopté.)
Article 10 ter
Après l'article L. 524-4 du code de la sécurité sociale, sont insérés deux articles L. 524-6 et L. 524-7 ainsi rédigés :
« Art. L. 524-6. - Sans préjudice de la constitution éventuelle du délit défini et sanctionné aux articles 313-1 et 313-3 du code pénal, le fait de bénéficier frauduleusement ou de tenter de bénéficier frauduleusement de l'allocation ou de la prime forfaitaire instituée par l'article L. 524-5 est passible d'une amende de 4 000 €. En cas de récidive, ce montant est porté au double.
« Art. L. 524-7. - Sans préjudice des actions en récupération des allocations indûment versées et des poursuites pénales, l'inexactitude ou le caractère incomplet, lorsqu'ils sont délibérés, des déclarations faites pour le bénéfice de l'allocation ou de la prime forfaitaire instituée par l'article L. 524-5, ainsi que l'absence de déclaration d'un changement dans la situation justifiant ce bénéfice, ayant abouti à des versements indus, peuvent être sanctionnés par une pénalité prononcée par le directeur de la caisse concernée, après avis d'une commission composée et constituée au sein de son conseil d'administration. Le montant de cette pénalité ne peut excéder 3 000 €.
« Le directeur de la caisse informe préalablement l'intéressé des faits qui lui sont reprochés et de la pénalité envisagée. Il l'invite à présenter ses observations écrites ou orales, le cas échéant assisté d'une personne de son choix, dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois. La pénalité peut être prononcée à l'issue de ce délai et est alors notifiée à l'intéressé. Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'État. »
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 54 est présenté par M. Cazeau, Mmes Printz, Le Texier, Demontès et Schillinger, MM. Desessard, Godefroy, Sueur, Guérini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 77 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
Ils ont déjà été défendus.
L'amendement n° 114, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 524- 7 du code de la sécurité sociale par une phrase ainsi rédigée :
Le montant total des sanctions pécuniaires administratives et pénales prononcées à raison des faits prévus au premier alinéa ne peut excéder le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Cet amendement nous est imposé par la jurisprudence. Il va dans le même sens que celui que j'ai défendu précédemment concernant le cumul des amendes administratives et des amendes pénales qui ne peut dépasser le montant de l'amende le plus fort.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. En ce qui concerne les amendements identiques nos 54 et 77, comme sur l'amendement n° 53, la commission y est défavorable.
En revanche, s'agissant de l'amendement n° 114, par coordination avec l'amendement n° 113, la commission y est favorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 54 et 77 pour les raisons précédemment évoquées.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 54 et 77.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 10 ter, modifié.
M. Guy Fischer. Le groupe communiste vote contre.
(L'article 10 ter est adopté.)
Article 10 quater
Le code du travail est ainsi modifié :
1° L'article L. 365-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 365-1. - Sans préjudice de la constitution éventuelle du délit défini et sanctionné aux articles 313-1 et 313-3 du code pénal, le fait de bénéficier frauduleusement ou de tenter de bénéficier frauduleusement des allocations d'aide aux travailleurs privés d'emploi définies au titre V du présent livre, y compris la prime instituée par l'article L. 351-20, des allocations visées à l'article L. 322-4 et de la prime instituée par l'article L. 322-12 est passible d'une amende de 4 000 €. En cas de récidive, ce montant est porté au double. » ;
2° Après l'article L. 365-2, il est inséré un article L. 365-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 365-3. - Sans préjudice des actions en récupération des allocations indûment versées et des poursuites pénales, l'inexactitude ou le caractère incomplet, lorsqu'ils sont délibérés, des déclarations faites pour le bénéfice des allocations et primes visées à l'article L. 365-1, ainsi que l'absence de déclaration d'un changement dans la situation justifiant ce bénéfice, ayant abouti à des versements indus, peuvent être sanctionnés par une pénalité prononcée par le représentant de l'État après consultation de la commission visée au troisième alinéa de l'article L. 351-18. Cette décision est susceptible de recours devant le tribunal administratif.
« Le montant de la pénalité ne peut excéder 3 000 € et son produit est versé à la personne morale ou au fonds à la charge duquel ont été les versements indus, en conséquence soit aux organismes visés au premier alinéa de l'article L. 351-21, soit aux employeurs visés au septième alinéa de l'article L. 351-12 qui n'ont pas adhéré au régime de l'article L. 351-4, soit au fonds de solidarité institué par l'article 1er de la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982 relative à la contribution exceptionnelle de solidarité en faveur des travailleurs privés d'emploi, soit à l'État. Aucune pénalité ne peut être prononcée à raison de faits remontant à plus de deux ans.
« Les personnes concernées sont informées préalablement des faits qui leur sont reprochés et de la pénalité envisagée, afin qu'elles puissent présenter leurs observations écrites ou orales, le cas échéant assistées d'une personne de leur choix. Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article. »
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 55 est présenté par M. Cazeau, Mmes Printz, Le Texier, Demontès et Schillinger, MM. Desessard, Godefroy, Sueur, Guérini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 78 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
Ils ont déjà été défendus.
L'amendement n° 115, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par le 2° de cet article pour l'article L. 365- 3 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :
Le montant total des sanctions pécuniaires administratives et pénales prononcées à raison des faits prévus au premier alinéa ne peut excéder le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme la présidente. L'amendement n° 19, présenté par M. Seillier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par le 2° de cet article pour l'article L. 365- 3 du code du travail par les mots :
, dans un délai qui ne saurait être inférieur à un mois
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur les amendements nos 55,78 et 115.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Par coordination avec les dispositions prévues pour le RMI et l'API, l'amendement n° 19 vise à préciser que les allocataires de l'ASS envers lesquels une amende administrative est envisagée disposent d'un délai minimum d'un mois pour présenter leurs observations.
Les amendements nos 55 et 78, s'ils étaient adoptés, laisseraient subsister pour l'allocation de solidarité spécifique un régime de sanction différent de celui qui est applicable aux deux autres minima sociaux d'insertion.
Les sanctions prévues évoluent peu par rapport au dispositif actuel, puisqu'elles atteignent 4 000 euros au lieu de 3 750 euros. Or cet alourdissement de 50 euros ne semble pas de nature à empêcher la recherche d'une harmonisation des sanctions entre les trois minima sociaux.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 55, 78 et 19 ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Pour les raisons précédemment invoquées, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 55 et 78 et favorable sur l'amendement n° 19.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 55 et 78.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix, modifié, l'article 10 quater.
(L'article 10 quater est adopté.)
Article 10 quinquies
Dans le huitième alinéa de l'article 50 de la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité, la date : « 1er octobre » est remplacée par la date : « 1er décembre ».
Mme la présidente. L'amendement n° 20, présenté par M. Seillier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
L'article 50 de la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité est ainsi modifié :
1° Dans le huitième alinéa, la date : « 1er octobre » est remplacée par la date : « 1er décembre » ;
2° Le neuvième alinéa est complété par les mots : «, ainsi que celles concernant les primes forfaitaires mentionnées à l'article L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles » ;
3° Dans le dixième alinéa, les mots : « ou du revenu minimum d'activité » sont remplacés par les mots : «, du revenu minimum d'activité ou des primes forfaitaires mentionnées à l'article L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles » ;
4° Dans le dernier alinéa, les mots : « et du revenu minimum d'activité » sont remplacés par les mots : «, du revenu minimum d'activité et des primes forfaitaires mentionnées à l'article L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement vise à élargir l'objet du rapport annuel d'évaluation du RMI décentralisé au nouveau dispositif d'intéressement mis en place par le présent projet de loi.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 109 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit les 2°, 3° et 4° de l'amendement n° 20 :
2° Dans le neuvième alinéa :
a) les mots : « et de contrat insertion - revenu minimum d'activité » sont remplacés par les mots : «, au contrat insertion - revenu minimum d'activité et aux contrats d'avenir » ;
b) il est ajouté les mots : « ainsi que celles concernant les primes forfaitaires mentionnées à l'article L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles ».
3° Dans le dixième alinéa, les mots : « ou du revenu minimum d'activité » sont remplacés par les mots : «, du contrat insertion - revenu minimum d'activité, du contrat d'avenir ou des primes forfaitaires mentionnées à l'article L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles ».
4° Dans le dernier alinéa, les mots : « et du revenu minimum d'activité » sont remplacés par les mots : « et des primes forfaitaires mentionnées à l'article L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles, le nombre de titulaires du contrat insertion - revenu minimum d'activité et du contrat d'avenir ».
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Il s'agit d'introduire des données relatives au contrat d'avenir, identiques à celles demandées pour le CI-RMA, ainsi que des informations sur les primes forfaitaires, dans le rapport annuel qui présente, pour chaque département, des éléments comptables et statistiques relatifs au revenu minimum d'insertion.
Ce sous-amendement s'inscrit dans la suite logique de l'amendement n° 20 présenté par M. le rapporteur.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission émet un avis favorable : il s'agit simplement d'un sous-amendement de coordination, comme Mme la ministre vient de le souligner.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 109 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur l'amendement n° 20.
M. Jean-Pierre Godefroy. Nous voterons cet amendement, mais nous tenons à faire remarquer que le présent projet de loi n'a pas été précédé par une étude d'impact. Le Parlement se trouve donc amené à demander un rapport d'évaluation, qu'il n'obtiendra que quand le dispositif sera déjà en place ! Une fois encore, me semble-t-il, nous ne travaillons pas avec ordre.
Mme la présidente. En conséquence, l'article 10 quinquies est ainsi rédigé.
TITRE IV
DISPOSITION TRANSITOIRE
Article 11
Les personnes qui, à la date de l'entrée en vigueur des articles L. 322-12 et L. 351-20 du code du travail, L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles et L. 524-5 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction issue de la présente loi, perçoivent à la fois des revenus tirés d'une activité professionnelle ou de stages de formation et l'une des allocations instituées par les articles L. 351-10 du code du travail, L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles et L. 524-1 du code de la sécurité sociale, et bénéficient des dispositions applicables avant cette date autorisant un cumul des revenus tirés d'une activité professionnelle ou d'un stage de formation avec leur allocation, continuent de bénéficier de ces mêmes dispositions pour les durées et selon les conditions qu'elles prévoient. - (Adopté.)
TITRE V
DISPOSITIONS RELATIVES À LA COHÉSION SOCIALE
Article 12
Le code du travail est ainsi modifié :
1° Le quatrième alinéa du I de l'article L. 322-4-7 est complété par les mots : «, ou trois mois pour les personnes bénéficiant d'un aménagement de peine » ;
2° La deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 322-4-11 est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Il peut prévoir une durée minimale de trois mois pour les personnes bénéficiant d'un aménagement de peine. La durée totale de la convention ne peut, compte tenu du ou des renouvellements, excéder trente-six mois. » - (Adopté.)
Article 13
I. - Le I de l'article L. 322-4-12 du code du travail est ainsi modifié :
1° La deuxième phrase du deuxième alinéa est ainsi rédigée :
« La durée totale du contrat ne peut, compte tenu du ou des renouvellements, excéder trente-six mois. » ;
2° Dans le dernier alinéa, après les mots : « sous réserve de clauses contractuelles », sont insérés les mots : « ou conventionnelles ».
II. - Par dérogation au deuxième alinéa du II de l'article L. 322-4-7 du même code, les pertes de recettes supplémentaires subies par les organismes de sécurité sociale par application du présent article sont intégralement compensées par le budget de l'État.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 79, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. L'article 13 du présent projet de loi supprime la limitation du nombre de renouvellements du contrat d'avenir, dans une durée maximale de 36 mois. Il permet donc à un salarié embauché dans ce cadre d'occuper successivement plusieurs emplois de six mois.
Lors des débats relatifs au projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, nous avons eu l'occasion de mettre en doute l'efficacité de tels contrats, qui confinent dans la précarité les bénéficiaires de minima sociaux. En particulier, nous avons dénoncé la dérive libérale du Gouvernement dans le traitement de l'emploi.
En effet, en contrepartie des minima sociaux qu'ils percevront, les allocataires seront redevables d'une activité ou de travaux au profit de la collectivité. La pratique connue dans les pays anglo-saxons sous le vocable de workfare se trouve ainsi transposée en France. Au passage, vous rompez l'équilibre entre le droit au revenu et l'implication effective dans une démarche d'insertion.
Madame la ministre, si votre prédécesseur chargé initialement de ce dossier, ou vous-même qui le portez aujourd'hui, aviez eu vraiment la volonté de permettre aux titulaires de minima sociaux de devenir autonomes et d'échapper à toute forme d'exclusion, vous auriez choisi d'autres voies pour les intégrer dans la vie économique et sociale.
Or la convention de contrat d'avenir, en elle-même, ne prévoit pas de mesures impératives d'accompagnement, pas plus qu'elle ne se fonde sur les souhaits ou les motivations de la personne concernée, dont elle est pourtant censée définir le projet professionnel !
Avec le contrat d'avenir, l'État se désengage totalement de la gestion de la politique de réinsertion au profit des communes, sous prétexte d'apporter une réponse de proximité - l'air est connu ! -, tout en sachant très bien que celles-ci ne disposent pas des moyens humains, matériels et financiers nécessaires pour remplir leur mission et suivre les intéressés.
En ce qui concerne plus spécifiquement la durée des contrats, lorsque nous avons créé le contrat d'avenir, nous nous étions déjà demandé si un même travailleur pouvait enchaîner dans ce cadre plusieurs emplois de courte durée, pendant au plus 36 mois. Or cette éventualité avait été écartée. Par qui ? Le devinerez-vous ? Par le Gouvernement, qui avait d'ailleurs présenté force arguments en ce sens !
Madame la ministre, pourquoi un tel revirement ? Pour ma part, je défends la position que j'ai toujours soutenue : que nous le voulions ou non, une succession de plusieurs emplois de courte durée accroît la précarité du travailleur.
Alors que l'intégration sociale, professionnelle et familiale passe largement par la possibilité d'une projection dans le temps, une suite de contrats de six mois maintiendra le salarié dans un entre-deux des plus inconfortables.
Cette nouvelle disposition est à l'image de votre politique de l'emploi : vous multipliez les statuts intermédiaires entre le chômage, l'inactivité et l'emploi, mais toujours au détriment de ce dernier.
C'est pourquoi nous demandons, par cet amendement, la suppression de l'article 13, qui, dans tous les cas, ne rendra pas le dispositif des contrats d'avenir plus attrayant, et j'aurai l'occasion d'y revenir lors de l'examen de l'article 14.
Mme la présidente. L'amendement n° 21, présenté par M. Seillier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Supprimer le 1° du I et le II de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer une partie de l'article 13.
Ce n'est pas l'assouplissement des conditions de renouvellement du contrat d'avenir - aujourd'hui, il ne peut être réitéré qu'une seule fois - qui nous pose problème dans cet article. Au contraire, je suis tout à fait d'accord sur le fond, et trouve même cette disposition excellente.
En réalité, c'est la mesure de compensation des allégements de charge prévue au paragraphe 2 de l'article qui gêne la commission des affaires sociales, compte tenu de l'attachement de celle-ci à la légalité et la régularité des compensations dans ce domaine.
En effet, l'interprétation de la clause de compensation nous paraît difficile. Nous ne discernons pas aisément quand la sécurité sociale recevra, ou non, une compensation de l'État au titre des allégements de charge liés aux contrats d'avenir.
Je rappelle que ce contrat constitue, en principe, un dispositif non compensé, et que l'article 13 du projet de loi propose d'introduire une exception.
Cet amendement de suppression a donc pour objet d'inviter le Gouvernement à préciser quand, concrètement, la sécurité sociale recevra de l'État une compensation des allégements de charge consentis sur les contrats d'avenir. Il est destiné à obtenir une clarification de l'ensemble du dispositif.
Mme la présidente. L'amendement n° 90 rectifié, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - Dans la seconde phrase du premier alinéa du II de l'article L. 322-4-12 du code du travail, les mots : « de revenu minimum d'insertion garanti à une personne isolée en application de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles », sont remplacés par les mots : « perçue à la date de signature du contrat ».
... Les pertes de recettes pour l'État résultant du paragraphe I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Cet amendement a pour objet de conforter le financement du contrat d'avenir. Force est de constater que, jusqu'ici, ce contrat n'a pas rencontré un franc succès auprès des départements (Marques d'ironie sur les travées socialistes),...
M. Roland Muzeau. C'est le moins que l'on puisse dire ! D'ailleurs, nous l'avions prévu lors de sa création !
M. Michel Mercier. ...pour une raison assez simple, qui tient aux dispositions prévues pour son financement : un RMIste qui perçoit en moyenne 375 euros par mois d'un département « coûte » à ce dernier environ 50 euros de plus lorsqu'il conclut un contrat d'avenir.
M. Henri de Raincourt. Voilà !
M. Michel Mercier. Madame la ministre, il est anormal que le département assume l'essentiel du financement du contrat d'avenir et qu'il existe de tels obstacles au passage entre le RMI et ce contrat destiné à ramener les intéressés dans le monde du travail : un tel retour ne peut coûter plus cher !
Tous, ici, nous défendons l'idée que le travail est une bonne chose. Mais, si tel est le cas, il faut qu'il soit rétribué (Mme Gisèle Printz opine) et que l'employeur assume une part de son coût ! L'idée que le retour à l'activité de gens exclus ne devrait rien coûter est mauvaise, car le travail est une valeur en soi et doit être rémunéré. (Mme Gisèle Printz applaudit.)
Je ne propose pas que l'État compense les 50 euros que le département doit débourser en plus pour chaque RMIste qui conclut un contrat d'avenir : l'État n'a pas d'argent et, en outre, il doit déjà un milliard d'euros aux départements pour le financement du RMI ! Je propose seulement que la différence soit payée par l'employeur et que le département, afin de financer le contrat d'avenir, continue à verser aux personnes intéressées les sommes qu'il versait auparavant aux RMIstes.
Certes, ces versements seront plus importants lorsqu'il s'agira, par exemple, d'une femme seule ayant des enfants et un RMI familiarisé. Cependant, il est tout de même normal que les personnes qui éprouvent le plus de difficultés à revenir dans le monde du travail soient davantage aidées.
Mon amendement ne coûte rien à l'État et rappelle que le travail constitue une valeur et qu'il faut le rémunérer. Celui qui travaille doit être payé, mais celui qui bénéficie de cette activité doit également verser sa part.
Il s'agit donc, me semble-t-il, d'un amendement de justice et d'efficacité, qui est essentiel si nous voulons donner au contrat d'avenir son vrai sens et toute sa place.
M. Henri de Raincourt. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 79 et 90 rectifié ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 90 rectifié, il a pour objet de fixer l'aide versée par le département à un employeur, au titre du contrat d'insertion-RMA, au niveau du montant du RMI perçu par l'allocataire au moment de la signature du contrat. Cette aide équivaut aujourd'hui au RMI garanti à une personne seule, soit 425 euros par mois.
Cet amendement soulève selon nous plusieurs questions.
Quelles seront les conséquences financières de cette mesure pour les départements ? L'aide qu'ils versent à l'employeur serait minorée dans certains cas mais majorée dans d'autres, par exemple lorsque l'allocataire du RMI a des enfants à charge.
Si l'aide versée à l'employeur est inférieure à 425 euros, l'État devra-t-il payer la différence ? L'objet de l'amendement le laisse entendre, mais le texte proposé ne le dit pas expressément. L'allocataire du RMI perdrait, semble-t-il, le bénéfice de la part familialisée de ce revenu. Dès lors, la signature du contrat d'insertion-RMA deviendrait moins intéressante pour lui.
Enfin, cette mesure risque d'inciter les employeurs à sélectionner parmi les titulaires du RMI ceux pour lesquels ils peuvent escompter l'aide la plus élevée. Ces considérations amènent la commission à exprimer des réserves sur cet amendement. Nous souhaitons, néanmoins, connaître l'avis du Gouvernement avant d'émettre un avis définitif.
Bien sûr, notre commission n'est pas insensible à la proposition de Michel Mercier relative à la compensation par l'État des dépenses mises à la charge des départements. Il lui semble, toutefois, que la mesure proposée ne constitue pas le moyen le plus simple d'atteindre cet objectif.
Quant à l'amendement n° 79, il est pour l'essentiel satisfait par l'amendement n° 21 de la commission. Je demande donc son retrait.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. S'agissant de l'amendement n° 79, ses auteurs, en proposant la suppression de l'article 13 du projet de loi, souhaitent faire disparaître, me semble-t-il, les dispositions qui permettent le renouvellement des contrats d'avenir dans la limite d'une durée de 36 mois.
Ils entendent également remettre en cause les mesures qui soumettraient la rémunération de ces salariés à des clauses conventionnelles plus favorables, permettant aux signataires de contrats d'avenir de bénéficier des mêmes droits et avantages que les autres salariés.
Par ailleurs, en limitant le nombre de renouvellements sans prendre en considération ni les situations particulières, alors qu'il s'agit toujours de cas individuels, ni les besoins des salariés et des employeurs, nous susciterions un « effet de couperet » contraire à l'impératif d'adaptation des parcours d'insertion des bénéficiaires.
L'article 13 du projet de loi vise en fait à permettre le prolongement du contrat d'avenir sur une durée limitée, soit trente-six mois, voire soixante mois pour les personnes âgées de plus cinquante ans et les travailleurs handicapés. Vous l'aurez donc compris, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Sur l'amendement n° 21, le Gouvernement a bien entendu la position de la commission. Cependant, la suppression proposée du 1° du I de l'article 13 lui pose problème. En effet, comme je viens de le dire, la limitation du nombre de renouvellements du contrat d'avenir limiterait l'adaptabilité aux besoins individuels d'accompagnement de ce contrat. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cette disposition.
En revanche, concernant le II de cet article, le Gouvernement partage les doutes exprimés par M. le rapporteur sur le caractère opérationnel d'une telle proposition et, finalement, sur la réalité de l'impact financier des mesures envisagées. L'article 13 n'a pas pour objet de créer ou de modifier les mesures de réduction ou d'exonération de cotisations de sécurité sociale non compensées. C'est pourquoi le Gouvernement est favorable à la suppression du II de cet article.
J'en viens à l'amendement n° 90 rectifié. Monsieur Mercier, chacun sait combien, depuis de nombreux mois, les présidents de conseils généraux discutent sur ce point avec le Gouvernement. En effet, dans le cadre du contrat d'avenir, un certain nombre d'aménagements sont aujourd'hui réalisés au fur et à mesure que ce contrat entre dans les faits, ce qui est d'ailleurs bien compréhensible.
Pour autant, l'adoption de votre amendement conduirait inéluctablement le débiteur concerné à verser à l'employeur une aide d'un montant égal à celui de l'allocation - RMI, ASS, AAH ou API - que percevait le bénéficiaire au moment de la signature de son contrat d'avenir. En fait, cela reviendrait à modifier les règles en vigueur sur cinq points, que je voudrais préciser pour que chacun comprenne bien les conséquences induites par cet amendement, tel qu'il est rédigé.
Premièrement, le montant de l'aide versée à l'employeur cesserait d'être fixe et varierait selon le montant effectivement perçu par la personne qui conclut le contrat de travail. De plus, il dépendrait de la situation familiale, ce qui veut dire que l'aide à l'employeur serait plus élevée pour les familles avec enfants que pour les personnes isolées. Cette inégalité est parfaitement injustifiée et soulève assurément un risque d'inconstitutionnalité. (M. Michel Mercier récuse ouvertement cet argument.)
Deuxièmement, dans de nombreux cas, le titulaire du contrat d'avenir ou du CI-RMA ne percevrait plus aucune allocation pendant la durée du contrat. Son incitation à travailler s'en trouverait donc diminuée, ce qui est totalement contraire à l'objet du texte que nous discutons aujourd'hui.
Troisièmement, le coût résultant de l'aide versée à l'employeur diminuerait pour les départements.
Quatrièmement, le montant de l'aide versée à l'employeur deviendrait fixe pendant toute la durée du contrat alors que, aujourd'hui, il fait l'objet de revalorisations chaque année.
Enfin, cinquièmement, la dépense budgétaire pour l'État serait accrue puisque, pour les bénéficiaires du RMI, il compenserait la diminution de l'aide versée par le département à l'employeur pour maintenir le caractère attractif du contrat.
Nous le voyons bien, un certain nombre d'éléments posent donc une difficulté et me conduiront logiquement, monsieur Mercier, à vous demander de bien vouloir retirer l'amendement n° 90 rectifié. Je vous précise toutefois que je ne méconnais absolument pas les problèmes de financement plus globaux qui se posent aux conseils généraux en matière de RMI.
L'Assemblée des départements de France, dont vous êtes membre, a tenu des réunions de travail, qui doivent se conclure par une réunion avec le Premier ministre. Comme vous le savez tous, cette réunion est déjà programmée et aura lieu le 9 février prochain. Il serait donc, à mon sens, quelque peu regrettable de préjuger des résultats de cette rencontre en adoptant un tel amendement, alors même que nous sommes aujourd'hui entrés dans la phase d'aboutissement des négociations. Au reste, je connais votre implication, comme celle, d'ailleurs, de l'ensemble des présidents de conseils généraux sur la prise en charge des RMIstes et l'objectif, qui nous rassemble, d'essayer d'aider ces personnes à sortir de la situation de précarité dans laquelle elles se trouvent.
Telles sont les raisons pour lesquelles, monsieur Mercier, je vous invite à retirer votre amendement, faute de quoi je serais conduite à émettre un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. J'ai bien entendu l'avis de Mme la ministre sur l'amendement n° 21 de la commission. Compte tenu des explications qu'elle a données sur le II de cet article et sur l'analyse de la compensation initialement prévue, sur laquelle nous nous étions interrogés et qui nous posait problème, puisque, selon le Gouvernement, il n'y a pas matière à une telle compensation, nous rectifions l'amendement n° 21, pour ne viser que la suppression du II de l'article 13.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d'un amendement n° 21 rectifié, présenté par M. Seillier, au nom de la commission, et ainsi libellé :
Supprimer le II de cet article.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Mercier, acceptez-vous de retirer l'amendement n° 90 rectifié ? (Non ! sur les travées du groupe socialiste.)
M. Michel Mercier. Madame la ministre, monsieur le rapporteur, à mon sens, il y a dans vos observations une confusion relativement grave et quelques inexactitudes. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.)
En effet, dans cet amendement, il ne s'agit pas du tout pour moi d'évoquer le problème de la compensation, pour les départements, des dépenses liées au RMI. La raison en est toute simple, monsieur le rapporteur : la loi qui a créé le contrat d'avenir a expressément exclu de la compensation la différence de cinquante euros constatée par rapport au RMI. Par conséquent, tout ce que vous avez dit sur le fait que je veuille obtenir une compensation de la part de l'État est faux ! (M. le rapporteur est dubitatif.) Monsieur le rapporteur, je vous écoute toujours très attentivement et je suis souvent d'accord avec vous, mais, en l'occurrence, je ne veux pas faire supporter cette charge par l'État !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Par l'employeur !
M. Michel Mercier. Je vous le répète, si le Gouvernement, dans cette loi, a admis une charge supplémentaire pour les départements, il a exclu toute compensation au titre du contrat d'avenir. Ici même, je m'en souviens très bien, M. Borloo a refusé cette compensation, en nous expliquant d'ailleurs que, grâce au contrat d'avenir, les conseils généraux constateraient, en quelques semaines, une diminution de deux tiers des bénéficiaires du RMI.
M. Jean-Pierre Godefroy. Exactement !
M. Michel Mercier. Selon lui, puisque le dispositif avait fonctionné à Valenciennes, il fonctionnerait dans tous les départements ; il n'était donc pas nécessaire de prévoir une compensation étant donné que nous allions être, grâce au contrat d'avenir, extrêmement bénéficiaires sur le plan financier,...
M. Roland Muzeau. C'est pour cela que vous avez voté pour ! Vous vous êtes fait rouler, monsieur Mercier !
M. Michel Mercier. ...ce dont je ne doute pas, dès que nous pourrons mettre en oeuvre ce contrat.
En définitive, dans cet amendement, il ne s'agit pas de prévoir un principe de compensation du RMI par l'État et, donc, une dépense nouvelle. Certes, madame la ministre, il est tout à fait exact que nous discutons avec le Premier ministre et avec l'ensemble du Gouvernement de la compensation du RMI au titre de 2005. L'écart constaté par les départements, entre l'allocation qu'ils versent et les sommes qu'ils perçoivent, représente près de 1 milliard d'euros. Effectivement, nous rencontrerons le Premier ministre le 9 février.
En l'occurrence, nous souhaitons rendre le contrat d'avenir efficace. Si, aujourd'hui, il n'y a pas assez de contrats d'avenirs signés, c'est parce que cela coûte plus cher aux départements de faire employer les personnes en contrat d'avenir plutôt que de les laisser au RMI !
Je n'ai pas du tout l'intention d'exiger de l'État une contribution supplémentaire, pas même le moindre centime, car je sais bien qu'il n'a pas d'argent. Je souhaite simplement que le nouveau dispositif ne coûte pas plus cher aux départements. Sinon, ces derniers préféreront laisser les gens au RMI. Comment voulez-vous d'ailleurs qu'ils fassent autrement, puisque le versement de l'allocation de RMI coûte cinquante euros de moins par mois que le contrat d'avenir ? Comment voulez-vous que le dispositif du contrat d'avenir puisse fonctionner, quand, en plus, il nous a manqué un milliard d'euros pour financer la totalité de l'allocation du RMI ?
Pour que le contrat d'avenir ne coûte pas plus cher et puisse fonctionner, la solution que je propose est toute simple. En effet, l'employeur va bénéficier du travail d'un nouveau salarié sans n'avoir pratiquement rien à payer, l'État versant l'aide temporaire et le département l'équivalent du RMI. Il faut tout de même que la valeur travail soit reconnue !
M. Roland Muzeau. C'est ce que nous disions ! Vous devenez gauchiste, monsieur Mercier !
M. Michel Mercier. De ce point de vue, il est tout à fait exact que ma solution favorise la personne qui a des enfants par rapport à celle qui n'en a pas. Mais je trouve cela juste !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Voilà !
M. Michel Mercier. Lorsque quelqu'un est en situation d'exclusion, il est encore plus difficile pour lui de retrouver un travail s'il a des enfants.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Exactement !
M. Michel Mercier. Monsieur le rapporteur, vous nous l'avez expliqué hier, il nous faut faire des efforts pour assurer la garde des enfants dont les parents sont en situation d'exclusion. Puisqu'il faudra bien payer de toute manière, mieux vaut que ces personnes soient au travail plutôt qu'au RMI. À cet égard, il est tout à fait normal de rendre plus attractif, aux yeux de l'employeur, quelqu'un qui a des enfants, parce que sa situation est plus difficile que celle de quelqu'un qui n'en a pas.
Sans rien demander à l'État, nous essayons d'atteindre cet objectif. Par conséquent, madame la ministre, monsieur le rapporteur, je ne comprends vraiment pas pour quelle raison vous m'opposez ce type d'arguments, sauf à refuser que le contrat d'avenir fonctionne ! (Très bien ! et applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.)
M. Roland Muzeau. C'est pour cela que l'UDF a voté pour le contrat d'avenir !
M. Michel Mercier. J'ai voté pour parce que j'y crois !
M. Roland Muzeau. Mais cela ne marche pas !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cela va marcher !
M. Roland Muzeau. C'est sûr...
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Monsieur Mercier, la présentation de votre amendement m'a conduit à m'interroger sur une éventuelle compensation par l'État. Je reconnais que mon interprétation était fausse, étant donné qu'une telle compensation n'est pas possible.
Cela étant, je reste perplexe par rapport à la situation des personnes qui sont chargées de famille. Par votre amendement, il y a effectivement une incitation...
M. Michel Mercier. Plus forte !
M. Bernard Seillier, rapporteur. ...plus forte, certes, mais il y a aussi une perte de ressources au titre de l'intéressement, dont le montant serait moindre puisque la part familiale est versée à l'employeur.
M. Michel Mercier. Monsieur le rapporteur, il n'y a pas d'intéressement pour le contrat d'avenir ! C'est vous-même qui l'avez fait voter !
M. Bernard Seillier, rapporteur. Certes, monsieur Mercier, mais je me place aussi dans le cadre du contrat d'insertion-RMA.
En définitive, il y a dans votre amendement plusieurs aspects à analyser, dont certains sont à nuancer. C'est la raison pour laquelle, après avoir entendu l'avis du Gouvernement, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 90 rectifié.
Mme la présidente. La parole est à M. Henri de Raincourt, pour explication de vote.
M. Henri de Raincourt. Il serait tout de même paradoxal que je reste muet sur cet amendement déposé par Michel Mercier, puisque sa rédaction tire naturellement sa substance d'une proposition qui se trouve à la page 10 du rapport que nous avons l'un et l'autre rédigé.
M. Roland Muzeau. Signé !
M. Henri de Raincourt. Monsieur Muzeau, ce que vous dites n'est pas très amical, car nous y avons énormément travaillé !
M. Roland Muzeau. C'est sûr, sinon vous ne l'auriez pas signé !
M. Henri de Raincourt. Cette proposition porte sur l'un des points que nous avons justement voulu éclaircir, pour rendre le contrat d'avenir un peu plus incitatif. Finalement, tout le démontre, le système que nous avons construit petit à petit, avec des mesures différentes adoptées à des moments divers, aboutit à une complexité et à des effets pervers qui motivent notre discussion d'aujourd'hui.
Mes chers collègues, quand Michel Mercier affirme que la valeur travail doit être reconnue, personne ne peut évidemment remettre en cause cette notion absolument déterminante. Quand il assure que la mesure proposée ne coûte rien à l'État, il a complètement raison. Quand il prétend que l'allocation sera plus favorable aux familles avec enfants qu'aux familles sans enfants, je nous vois mal, ici, sur de tels dispositifs, émettre un avis défavorable. (Mme Gisèle Printz applaudit.)
Par conséquent, en cohérence, bien évidemment, avec ce que j'ai écrit et avec ce que je crois, si nous voulons que le contrat d'avenir soit un peu mieux utilisé pour remettre les gens dans le circuit du travail, il faut tout naturellement adopter l'amendement de Michel Mercier. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes à un moment charnière. En effet, nous examinons ce projet de loi alors que les missions parlementaires, présidées respectivement par Mme Valérie Létard et par MM. Michel Mercier et Henri de Raincourt, travaillent encore sur le sujet. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Pierre Godefroy. Et bien voilà !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Il serait prématuré de commencer au détour d'un amendement à appliquer l'un des éléments fournis par une mission alors que nous nous retrouverons à l'occasion de l'examen législatif du travail de ces missions.
M. Roland Muzeau. Il faut arrêter l'examen de ce texte !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Nous avons deux rendez-vous. Le premier, c'est la réunion du 9 février prochain avec le Premier ministre pour une discussion globale. En effet, monsieur Mercier, lorsque vous revenez sur le contrat d'avenir vous faites immédiatement référence au RMI tant les fonctionnements sont imbriqués.
Mme Raymonde Le Texier. Lavage de cerveau en permanence !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Nous devons donc avoir une approche globale. La discussion avec le Premier ministre et l'Assemblée des départements de France permettra de trouver une issue et un accompagnement. Je comprends votre appel, monsieur Mercier, nous connaissons la volonté des présidents de conseils généraux d'aboutir, mais les discussions prendront fin le 9 février. De plus, le prolongement législatif des missions présidées par Mme Létard et par MM. Mercier et de Raincourt nous permettra de revenir sur le sujet.
C'est pourquoi, monsieur Mercier, si vous ne le retirez pas, je serais contrainte d'émettre un avis défavorable sur votre amendement, qui est prématuré.
M. Raymond Courrière. Ils ne veulent pas faire payer les patrons !
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. À titre personnel, je ne pourrai pas voter l'amendement de M. Mercier, car hier j'ai fait voter le refus d'intégrer la prime forfaitaire au titre de l'intéressement des bénéficiaires du RMI et du contrat d'avenir,...
M. Roland Muzeau. Absolument !
M. Bernard Seillier, rapporteur. ...au motif qu'ils ont un régime d'intéressement spécifique.
M. Roland Muzeau. Nous avons d'ailleurs voté contre !
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cette disposition va supprimer le régime d'intéressement spécifique des bénéficiaires du CI-RMA et du contrat d'avenir. Je serais donc en contradiction avec ce que j'ai fait voter hier.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 90 rectifié.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Je m'abstiens, madame la présidente.
Mme la présidente. Mes chers collègues, en raison de la réunion de la conférence des présidents, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures quinze, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)