Article 6
I. - Afin d'améliorer le contrôle aux frontières et de lutter contre l'immigration clandestine, le ministre de l'intérieur est autorisé à procéder à la mise en oeuvre de traitements automatisés de données à caractère personnel, recueillies à l'occasion de déplacements internationaux en provenance ou à destination d'États n'appartenant pas à l'Union européenne, à l'exclusion des données relevant du I de l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :
1° Figurant sur les cartes de débarquement et d'embarquement des passagers de transporteurs aériens ;
2° Collectées à partir de la bande de lecture optique des documents de voyage, de la carte nationale d'identité et des visas des passagers de transporteurs aériens, maritimes ou ferroviaires ;
3° Relatives aux passagers et enregistrées dans les systèmes de réservation et de contrôle des départs lorsqu'elles sont détenues par les transporteurs aériens, maritimes ou ferroviaires.
Les traitements mentionnés au premier alinéa sont soumis aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée.
II. - Les traitements mentionnés au I peuvent également être mis en oeuvre dans les mêmes conditions aux fins de prévenir et de réprimer des actes de terrorisme. L'accès à ceux-ci est alors limité aux agents individuellement habilités des services spécialement chargés de ces missions et des services spécialement chargés de la sûreté des transports internationaux.
III. - Les traitements mentionnés aux I et II peuvent faire l'objet d'une interconnexion avec le fichier des personnes recherchées et le système d'information Schengen.
IV. - Pour la mise en oeuvre des traitements mentionnés aux I et II, les transporteurs aériens sont tenus de recueillir et de transmettre aux services du ministère de l'intérieur les données énumérées au 2 de l'article 3 de la directive 2004/82/CE du Conseil, du 29 avril 2004, concernant l'obligation pour les transporteurs de communiquer les données relatives aux passagers, et mentionnées au 3° du I.
Ils sont également tenus de communiquer aux services mentionnés à l'alinéa précédent les données du 3° du I autres que celles mentionnées au même alinéa lorsqu'elles les détiennent.
Les obligations définies aux deux alinéas précédents sont applicables aux transporteurs maritimes et ferroviaires.
V. - Est puni d'une amende d'un montant maximum de 50 000 € pour chaque voyage le fait pour une entreprise de transport aérien, maritime ou ferroviaire de méconnaître les obligations fixées au IV.
Le manquement est constaté par un procès-verbal établi par un fonctionnaire appartenant à l'un des corps dont la liste est définie par décret en Conseil d'Etat. Copie du procès-verbal est remise à l'entreprise de transport intéressée. Le manquement ainsi relevé donne lieu à une amende prononcée par l'autorité administrative compétente. L'amende est prononcée pour chaque voyage ayant donné lieu au manquement. Son montant est versé au Trésor public par l'entreprise de transport.
L'entreprise de transport a accès au dossier. Elle est mise à même de présenter ses observations écrites dans un délai d'un mois sur le projet de sanction. La décision de l'autorité administrative est susceptible d'un recours de pleine juridiction.
L'autorité administrative ne peut infliger d'amende à raison de faits remontant à plus d'un an.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, sur l'article.
M. Paul Girod. Avant de m'exprimer sur un point technique relatif à l'article 6, je ne voudrais pas laisser passer l'occasion de dire à M. le ministre que le texte que nous étudions va dans le bon sens, vu ce que j'ai entendu tout à l'heure à la radio.
D'après cette information, un important arsenal a été saisi cette nuit à Clichy-sous-Bois dans le cadre d'une enquête antiterroriste. Je ne sais si la vidéosurveillance a facilité l'enquête et permis de localiser l'arsenal en question, mais, quoi qu'il en soit, je me réjouis de ce succès qui devrait permettre d'empêcher des attentats, car c'est bien de cela qu'il s'agit : on n'accumule pas des explosifs, des armes de guerre, des munitions et des détonateurs pour le plaisir !
Ceci étant dit, monsieur le ministre, je reviens à l'article 6.
Nous allons examiner dans un instant un amendement de la commission des lois qui prévoit qu'un décret en Conseil d'État fixe les modalités de transmission des données mentionnées dans cet article.
Je voudrais simplement vous demander comment vous concevez les modalités pratiques de l'extension aux transports maritime et ferroviaire des obligations prévues actuellement pour le transport aérien.
Il n'est déjà pas simple d'organiser le suivi des passagers du transport aérien. Pourtant, les points de départ et d'arrivée ne sont pas extraordinairement nombreux et, si les flux sont parfois importants, les installations sont alors à la hauteur. Or les points de départ et les points d'arrivée sont infiniment plus nombreux s'agissant du transport ferroviaire et il en est de même pour le transport maritime.
Par conséquent, je voudrais attirer votre attention sur la préparation du décret d'application demandé par la commission des lois pour que soient prises en compte les difficultés particulières qui se posent dans les lieux d'embarquement maritime ou ferroviaire. Cela ne sera pas simple !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C'est vrai !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca.
Mme Catherine Tasca. Monsieur le ministre, l'article 6 nous éclaire bien sur votre projet.
La loi est une chose trop sérieuse et le terrorisme un crime trop grave pour que l'une et l'autre servent de prétexte à une véritable propagande qui attise les peurs et égare nos concitoyens.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non !
Mme Catherine Tasca. Il n'est pas acceptable qu'un ministre de la République opère une telle manipulation.
Le terrorisme est injustifiable, quelles que soient les situations économiques et sociales qui nourrissent parfois les extrémismes. Personne ne peut avoir la moindre tolérance à cet égard et, sur toutes les travées de cette assemblée, nous attendons l'action la plus ferme du Gouvernement pour protéger nos concitoyens.
Or le texte que vous nous présentez risque de manquer son objectif déclaré, car, le plus souvent, il amplifie des dispositifs existants et jusqu'ici inopérants face au terrorisme.
En revanche, ce texte opère une succession d'amalgames entre terrorisme et délinquance et un glissement constant du délinquant à l'étranger et de l'étranger à l'immigré dit « clandestin ».
Plusieurs dispositifs visent en fait ces populations dont vous faites depuis des mois vos cibles de prédilection à seule fin d'attiser les peurs et de creuser chaque jour un peu plus profond le sillon de la xénophobie et du racisme.
C'est le cas, nous l'avons vu, de l'article 3, qui étend les zones de contrôle à bord des trains internationaux, visant implicitement l'immigration irrégulière. C'est le cas aussi, nous le verrons, de l'article 11 sur la déchéance de la nationalité française.
L'article 6 est au moins explicite. C'est bien de lutte contre l'immigration irrégulière qu'il s'agit.
Nous ne contestons évidemment pas la nécessité de retranscrire dans notre droit interne la directive européenne d'avril 2004 relative à l'obligation pour les transporteurs de communiquer les données concernant les passagers en provenance de pays étrangers à l'Union européenne.
Néanmoins, il ne faudra pas sous-estimer les réserves émises par la CNIL sur la fourniture de ces données et les possibilités de création d'un fichier central unique de contrôle des déplacements. Il faudra, monsieur le ministre, en tenir compte dans les mesures d'application.
Mais le dispositif que vous proposez de mettre en place va bien au-delà de la stricte transposition, et surtout sa portée va au-delà de la lutte contre le terrorisme. Pourquoi, alors, ne pas l'intégrer dans le texte que vous avez déjà annoncé pour le début de l'année 2006 afin de débattre enfin clairement de votre politique de l'immigration ?
La seconde partie du titre même du texte que nous examinons aujourd'hui « ... portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers » suffit à nous alerter sur vos véritables intentions.
Vous pensez sans doute avoir trouvé là le moyen de détourner la colère sociale, attisée par la politique de votre gouvernement, vers l'éternel bouc émissaire : l'étranger.
Ce que nous refusons, c'est ce glissement que vous opérez en mots et en actions, et qui autorise dans les faits bien d'autres glissements dramatiques, comme on l'a vu récemment dans les banlieues.
Vous avez déclaré de manière péremptoire qu'il fallait expulser les étrangers, même en situation régulière, reconnus coupables de délits dans ces événements, rétablissant ainsi au passage la double peine que vous prétendiez pourtant avoir abrogée il y a peu de temps.
Or la commission ad hoc du tribunal de grande instance de Pontoise vient de rendre un avis défavorable concernant la procédure d'expulsion dont fait l'objet un jeune Mauritanien.
Vous avez vous-même déclaré le 4 décembre que, sur 785 personnes déférées pour participation aux violences urbaines récentes, sept procédures d'expulsion étaient en train d'aboutir. Cela représente un rapport de moins de 1 % et ne vous autorise assurément pas à viser prioritairement dans vos accusations les étrangers.
De tels amalgames, monsieur le ministre, flattent dangereusement l'extrême droite.
L'Australie, qui vient de renforcer son arsenal législatif contre le terrorisme, vit actuellement une flambée de violences racistes qui montrent combien il est dangereux de procéder à de tels amalgames.
Quand cesserez-vous d'agiter les peurs, de braquer l'opinion par vos amalgames, et d'opposer les unes aux autres les personnes vivant dans notre pays ?
C'est, au contraire, en les rassemblant et en résolvant leurs vrais problèmes économiques et sociaux que nous serons plus forts et mieux armés pour lutter contre toutes les violences, et notamment contre la menace terroriste.
En résumé, monsieur le ministre, si nous partageons la conviction qu'il faut combattre sans répit le terrorisme, ...
MM. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, et Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Mais sans moyens !
Mme Catherine Tasca. ... nous ne souscrirons jamais à votre obsession de l'étranger ou du Français d'origine étrangère qui serait coupable de tous nos maux.
A ce titre, l'article 6 est, pour nous, irrecevable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 70 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 91 rectifié est présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Cet article 6 est emblématique la volonté d'amalgame du Gouvernement et de sa majorité entre des situations qui n'ont aucun rapport les unes avec les autres.
Comme l'a indiqué M. le rapporteur, les traitements automatisés évoqués par les dispositions concernées « seraient utilisés aux fins de contrôle des frontières, de la lutte contre l'immigration clandestine, de la prévention et de la répression des actes terroristes ».
Je ne vous crois pas assez naïf, monsieur le ministre, pour glisser au milieu de mesures relatives à la lutte antiterroriste une disposition concernant l'immigration clandestine sans intention maligne.
Il s'agit toujours de cette stratégie de la peur, de cette défiance à l'égard de l'autre, stratégie qui s'échine à laisser penser que l'immigré est souvent musulman, donc un terroriste potentiel. Voilà le cheminement de pensée que vous suscitez !
Mais il y a un autre cheminement possible, tout aussi pernicieux : le jeune de cité est fils d'immigré, il est musulman, il est en colère et brûle des voitures ; il est déjà sur la voie du terrorisme.
Monsieur le ministre, quand vous englobez dans un seul et même projet relatif au terrorisme des dispositions sur la sécurité en général et sur la politique d'immigration, vous savez très bien que vous suggérez ce type d'amalgame. Vous allez sciemment sur un terrain déjà balisé par d'autres, et ce dans un but purement électoraliste.
Au nom de la lutte antiterroriste, vous proposez des dispositions qui brident encore plus les libertés individuelles, alors qu'une multitude de dispositifs légaux et réglementaires existent déjà et que les auteurs potentiels d'attentats utilisent des méthodes - voyez les attentats de New York, de Madrid ou de Londres - qui rendent inopérant ce type de dispositif.
Dans ces conditions, je crois nécessaire de demander un scrutin public sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Louis Mermaz, pour présenter l'amendement n° 91 rectifié.
M. Louis Mermaz. Mon intervention ira dans le même sens que celle de Mme Assassi.
J'ai déjà eu l'occasion de dire hier que nous étions très étonnés de la façon dont le texte de l'article 6 débutait : « Afin d'améliorer le contrôle aux frontières et de lutter contre l'immigration clandestine... »
Ce n'est pas un dérapage de plume, mais bien le résultat d'une volonté, relevée d'ailleurs par M. Courtois, qui écrit dans son rapport que plusieurs dispositions du projet de loi ne concernent pas directement la lutte contre le terrorisme. L'article 6 en est une parfaite illustration.
Du reste, c'est à l'honneur de notre rapporteur d'avoir lui-même, devant l'ampleur du dispositif qu'on voudrait mettre en place, déposé, au nom de la commission, un amendement visant précisément à encadrer ces inquiétantes dispositions.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il faut donc voter mon amendement !
M. Louis Mermaz. Loin de se concentrer sur la finalité principale du projet, la prévention et la répression du terrorisme, cet article 6 tend à instaurer des mesures qui relèvent d'une autre finalité, à savoir la lutte contre l'immigration irrégulière.
Le Gouvernement ne manquera pas d'invoquer de nouveau la nécessité de retranscrire dans notre droit interne la directive 2004/82/CE du Conseil du 29 avril 2004 concernant l'obligation pour les transporteurs de communiquer les données relatives aux passagers en provenance des pays étrangers à l'Union européenne et le fait que cette directive permette aux États membres de faire usage des données transmises par les transporteurs à d'autres fins que la lutte contre l'immigration clandestine.
Cependant, force est de constater que le dispositif mis en place va bien au-delà de la stricte transposition de la directive précitée.
Surtout, cette transposition n'a pas sa place dans un projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme. L'objet principal de la directive est en effet la lutte contre l'immigration dite clandestine et non la lutte contre le terrorisme. S'il convient d'éviter toute surenchère en matière sécuritaire, il est également souhaitable de ne pas créer d'amalgame entre ces deux sujets.
Nous nous trouvons ici face à une disposition qui relève beaucoup plus de la police des étrangers, et on sait les effets déplorables que ne manque jamais d'avoir sur l'opinion la présentation de telles dispositions au Parlement.
Il serait bon que le Sénat, qui s'est souvent honoré, à travers les différents groupes qui le composent, dans la défense des droits de l'homme, pose un jour le problème d'une vraie politique de l'immigration. Sur toutes les travées de cette assemblée, il y a des gens qui pensent que la police des étrangers telle qu'elle se pratique depuis fort longtemps - bien avant 2001 - ne tient pas lieu de politique de l'immigration. C'est un des sujets centraux pour l'avenir de notre pays et il me semble qu'il faudrait l'aborder autrement que dans un esprit purement sécuritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. L'amendement n° 42, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du I de cet article, supprimer les mots :
et de lutter contre l'immigration clandestine
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Dans la continuité de ce que viennent de dire nos collègues, j'insiste sur le fait que l'amalgame entre immigration clandestine et terrorisme opéré par l'article 6 est inacceptable et dangereux.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il n'y a pas d'amalgame !
Mme Alima Boumediene-Thiery. Le Gouvernement cache ses véritables intentions en invoquant la nécessité de transposer la directive 2004/82/CE du 29 avril 2004, qui vise, elle, au contrôle de l'immigration et prévoit un régime du traitement des données répondant à cette finalité.
En plaçant immigration et terrorisme côte à côte dans la loi et dans l'inconscient collectif des Français, le Gouvernement pratique un mélange des genres qui ne peut que se révéler dévastateur, non seulement pour les immigrés eux-mêmes, mais aussi et surtout pour les Français en général et pour notre République.
Si, par ces amalgames, vous souhaitez réaliser une opération électorale, sachez que vous faites courir de gros risques à notre démocratie.
Les Français doivent savoir que les personnes mêlées à des actes terroristes ne sont que rarement des immigrés et encore plus rarement des clandestins. Au cours de leur audition par la commission des lois, plusieurs procureurs en charge de la section antiterroriste au tribunal de grande instance de Paris nous ont confirmé que les terroristes étaient, dans leur grande majorité, des Français.
Les terroristes, ou les pseudo-terroristes, ne sont presque jamais en situation illégale. Ils prennent soin d'être en règle avec la loi du pays où ils vivent. Ils ne veulent pas prendre de risques.
La CNIL a estimé que ce projet de loi n'apportait pas de précisions satisfaisantes sur la destination des données transmises alors même qu'il rend possible leur transmission à une fin - la lutte contre le terrorisme - étrangère à celle de la directive transposée.
Vous le savez, ces règles ne permettront pas d'empêcher des terroristes de commettre des attentats, mais elles vont, hélas, entretenir de dangereux amalgames.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Alors, il ne faut rien faire ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le ministre, si votre refus de faire des amalgames est sincère, acceptez de retirer la notion d'immigration clandestine de cet article et attendons le projet de loi que M. Sarkozy a promis de présenter au Parlement en janvier 2006 pour aborder cette question.
M. le président. L'amendement n° 16, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du II de cet article, remplacer les mots :
individuellement habilités des services spécialement chargés de ces missions et des services spécialement chargés de la sûreté des transports internationaux.
par les mots :
individuellement désignés et dûment habilités :
- des services de la police et de la gendarmerie nationales spécialement chargés de ces missions ;
- des services de la police et de la gendarmerie nationales ainsi que des douanes, chargés de la sûreté des transports internationaux.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à préciser les modalités de désignation et d'habilitation des agents pouvant accéder aux traitements prévus à l'article 6.
La rédaction proposée tire notamment les conséquences des observations faites par la CNIL, qui, dans sa délibération du 10 octobre 2005, a souhaité que les modalités d'habilitation des agents apparaissent clairement dans le projet de loi.
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Au deuxième alinéa du IV de cet article, remplacer le mot :
elles
par le mot :
ils
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement est destiné à rectifier une erreur rédactionnelle.
M. le président. L'amendement n° 43, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Supprimer le dernier alinéa du IV de cet article.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Ces mesures sont présentées comme nécessaires au prétexte qu'il faut transposer la directive européenne du 29 avril 2004. Or les finalités invoquées et le régime retenu sont sensiblement différents.
Alors que la directive ne concerne que le trafic aérien, le projet de loi étend ce régime aux modes de transport ferroviaire et maritime.
Cette extension est d'autant plus choquante que, sur le fond, ces dispositions portent une atteinte grave à un des principes fondamentaux de notre droit, la liberté de circuler pour tous les citoyens, c'est-à-dire liberté d'aller et venir, à laquelle il convient d'ajouter le droit au respect de la vie privée.
Grâce à ces dispositions, les forces de l'ordre pourront, pratiquement sans aucun contrôle, déterminer l'ensemble des déplacements de chacun, au détail près : elles pourront savoir à quelle date, comment et avec qui Untel aura quitté le territoire de l'Union européenne, dans quel pays il se sera rendu, en effectuant quelle escale, pour combien de jours. En fait, nous allons être placés sous surveillance permanente.
Bien entendu, dans le viseur de ce gouvernement se trouve une catégorie particulière de citoyens, ceux qui se rendent vers tel type de pays, ceux qui présentent tel type de profil culturel ou religieux. Inutile, d'ailleurs, de préciser : chacun sait bien de qui je veux parler !
Il semble que nous sommes déjà assignés à résidence !
M. le président. L'amendement n° 18, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le IV de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés, fixe les modalités de transmission des données mentionnées au 3° du I.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
L'article 6 prévoit que les transporteurs doivent transmettre aux services du ministère de l'intérieur les données relatives aux passagers et aux réservations qu'ils détiennent.
L'amendement prévoit qu'un décret précisera les modalités de cette transmission, notamment le délai limite pour la transmission de ces données au ministère de l'intérieur.
M. le président. L'amendement n° 56 rectifié bis, présenté par MM. Türk, Portelli et Nogrix, Mme Malovry, MM. Mouly, Seillier et Cambon, est ainsi libellé :
Compléter le IV de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Les transporteurs aériens, maritimes et ferroviaires ont obligation d'informer les personnes concernées par le traitement mis en oeuvre au titre du présent article conformément aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
La parole est à M. Hugues Portelli.
M. Hugues Portelli. Conformément à l'article 6 de la directive du 29 avril 2004, il conviendrait que la loi prévoie l'obligation d'informer les personnes concernées et que cette obligation soit à la charge des transporteurs, donc le plus en amont possible.
M. le président. L'amendement n° 44, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - L'application des dispositions du présent article sera limitée dans le temps. Sa durée sera définie par le décret d'application de la loi.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. La mise en oeuvre d'un dispositif comme celui de l'article 6 ne saurait être pérenne. Il conviendrait donc de fixer une durée stricte d'application de ses dispositions.
La logique du Gouvernement est particulièrement dangereuse. Elle consiste, en tout domaine, à faire de l'exception la règle, à pérenniser ce qui ne devrait être que temporaire. Petit à petit, les Français sont conditionnés à accepter la perte progressive de leurs droits et libertés sous prétexte d'être protégés. Arrêtons, car cette mise sous surveillance permanente est inacceptable !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements autres que ceux qu'elle a déposés ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Les amendements identiques nos 70 et 91 rectifié vise à supprimer l'article 6. La commission ne peut être favorable à la suppression de ce dernier puisqu'elle propose elle-même de l'amender, ce qui démontre sa volonté de le conserver.
Je tiens à dire que, pour nous, il n'y a pas d'amalgame entre immigration clandestine et terrorisme. Je l'ai dit dans mon intervention liminaire et je l'ai écrit dans mon rapport, ce sont deux choses bien différentes, et le vice-procureur du tribunal de grande instance de Paris l'a confirmé, madame Boumediene-Thiery, lors de son audition par la commission des lois.
L'amendement n° 42 a pour objet de supprimer l'utilisation des traitements automatisés autorisée par cet article dans le but de lutter contre l'immigration clandestine.
Je rappelle que la directive de 2004 a été adoptée afin de lutter contre l'immigration clandestine. Il s'agit uniquement de transposer cette directive, et je répète qu'il n'y a aucun amalgame entre immigration et terrorisme. Certes, les mêmes données pourront servir dans les deux cas, mais les conditions d'utilisation de ces données seront différentes selon que la finalité sera la lutte contre l'immigration ou la prévention du terrorisme. D'ailleurs, les personnes qui auront accès à ces données ne seront pas les mêmes dans les deux cas.
La commission vous invite donc, mes chers collègues, à rejeter cet amendement.
Les auteurs de l'amendement n° 43 reprochent au projet de loi d'aller au-delà de la transposition de la directive. De fait, ce projet a pour objet de lutter contre le terrorisme et, à cette fin, prévoit le recueil d'un plus grand nombre de données relatives aux passagers, ce qui démontre encore une fois qu'il y a bien séparation entre terrorisme et immigration clandestine.
La commission émet donc un avis défavorable.
L'amendement n° 56 rectifié bis précise que les transporteurs ont l'obligation d'informer les personnes concernées que les données relatives aux passagers ou aux réservations sont transmises au ministère de l'intérieur pour faire l'objet d'un traitement automatisé.
La commission est favorable à cet amendement.
Enfin, l'amendement n° 44 prévoit que la durée d'application de l'article 6 sera limitée dans le temps et qu'un décret fixera le terme de cette application. Sur la forme, on peut trouver juridiquement étrange qu'un décret fixe la durée d'application d'une loi. Sur le fond, il n'est pas possible de prévoir la transposition provisoire d'une directive.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Quel que soit le terrain sur lequel certains voudraient l'entraîner, le Gouvernement, sur cet article 6 comme sur d'autres, se gardera de toute polémique, mais je voudrais amener chacun et chacune d'entre vous à réfléchir au fond au problème de la mobilité.
On peut tout de même s'interroger quand on constate que de plus en plus de nos jeunes partent de notre pays pour effectuer des séjours de quelques semaines ou de quelques mois en Afghanistan ou en Irak et reviennent ensuite chez nous.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Combien sont-ils ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Vont-ils dans ces pays pour y passer des vacances et s'y détendre ? Si je ne suis pas en mesure de dire quelle est la finalité de ces séjours, je suis en revanche certain qu'il est de notre devoir de nous interroger et de nous donner les moyens de vérifier dans quel but ces jeunes effectuent ces déplacements, car on sait qu'un certain nombre de ceux qui ont fait ces voyages ont ensuite été parfaitement identifiés comme étant intégrés à des groupes terroristes tels que Al-Qaida.
J'y insiste, le problème de la mobilité est tout à fait réel.
À cet égard, Paul Girod a évoqué l'actualité toute récente : la découverte d'explosifs et d'armes de guerre, à Clichy-sous-Bois, la nuit dernière, dans le prolongement des vingt-sept arrestations intervenues lundi. Je lis un extrait de la dépêche AFP :
« Le stock, qui pourrait provenir pour partie des Balkans, comprend des armes de guerre, dont deux fusils d'assaut, un français FA-MAS et un russe Kalachnikov, des armes de poing et un lot de munitions.
« La DST a également mis la main sur des cagoules, des gilets pare-balles, une tenue complète de gendarme et plusieurs combinaisons noires.
« Un des hommes interpellés, cité dans des affaires de terrorisme en Italie et en Grande-Bretagne, était surveillé depuis plus de deux ans par la direction centrale des renseignements généraux. Il est soupçonné d'avoir été actif dans le nord de la France. Un autre, de trente et un ans, a été condamné il y a quelques années dans une affaire de faux papiers et connaissait des membres du groupe de Francfort.
« Le groupe était surveillé depuis plusieurs mois. Son rôle "dans la répartition du travail terroriste international [est] de financer la cause pour notamment commettre des attentats terroristes à l'étranger", selon une source proche du dossier. »
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le dispositif actuel marche bien, alors !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Je me contente de faire référence à un document, accessible à tous, qui démontre bien que nous sommes dans un monde où la mobilité internationale exige que nous nous dotions, ne serait-ce qu'à titre préventif, des moyens législatifs nécessaires.
Je regrette sincèrement, non pas les amalgames que vous dénoncez, mais les amalgames que vous faites entre terrorisme et immigration clandestine.
Mme Éliane Assassi. Ils sont dans le texte, monsieur le ministre !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Nous ne trouvons cet amalgame que dans vos propos, l'outil législatif que nous vous proposons se limitant à reprendre les termes d'une directive européenne.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Vous ne savez pas lire !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Comme l'a précisé le Gouvernement lors de l'examen du projet de loi devant l'Assemblée nationale, il ne saurait être question de procéder à un amalgame entre la lutte contre l'immigration irrégulière et la lutte contre le terrorisme. Pour ces raisons, je vous invite à faire preuve de beaucoup plus de prudence dans votre mode d'expression.
Il serait inexact d'affirmer que la lutte contre le terrorisme est une finalité étrangère à la directive du Conseil du 29 avril 2004. En effet, le texte même de la directive, dans son article 6 ainsi que dans l'un de ses considérants, tend à permettre aux Etats membres de faire usage des données à des fins de lutte contre le terrorisme.
J'attire en outre votre attention sur le fait que l'adoption de cette directive est intervenue dans un contexte particulier : au lendemain des attentats de Madrid du 11 mars 2004.
Le projet de loi que nous vous soumettons constitue le vecteur législatif de la transposition de la directive au titre de sa double finalité de lutte contre le terrorisme et de lutte contre l'immigration irrégulière. Cette transposition doit être effectuée par les Etats membres au plus tard le 5 septembre 2006.
Vous, vous faites l'amalgame ! De notre côté, nous assumons pleinement la forme que prend la transposition de la directive européenne dans le droit français.
En outre, la nécessité opérationnelle et technique doit être ici prise en compte. Il s'agit des mêmes données relatives aux mêmes voyageurs dont le recueil est prévu dans les traitements automatisés aux fins tant de lutte contre le terrorisme que de lutte contre l'immigration irrégulière.
Les transporteurs ne sauraient par ailleurs être contraints de procéder à une double communication selon la finalité de l'exploitation des données par l'autorité publique.
Enfin, les traitements de données concernés sont, conformément à la loi du 6 janvier 1978, soumis au contrôle de la CNIL.
En conséquence, le Gouvernement réaffirme sa volonté d'agir avec toute l'efficacité qu'exigent la protection de nos concitoyens et le respect de nos engagements internationaux, tout en garantissant le respect des libertés. Je vous dis cela sans le moindre esprit polémique.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 70 et 91 ainsi qu'à l'amendement n° 42.
En revanche, il est évidemment favorable à l'amendement n° 16, qui tient compte des attributions des douanes dans le domaine de la sûreté des transports internationaux, de m^me qu'à l'amendement n° 17, purement rédactionnel.
L'amendement n° 43 recueille un avis défavorable. En effet, s'il est exact que la directive du Conseil du 29 avril 2004 n'impose aux Etats membres de prendre des dispositions dans leur droit interne qu'en ce qui concerne les obligations qu'ils doivent prescrire aux transporteurs aériens, il ressort toutefois, tant des discussions au sein du Conseil relatives à l'adoption de cette directive que du texte de la directive lui-même, que les Etats membres peuvent, à titre optionnel, étendre ces dispositions à d'autres catégories de transporteurs.
Le Gouvernement marque-t-il son attachement à l'exercice des compétences de la CNIL en matière de protection des données ? Bien sûr, et je vous remercie, monsieur le rapporteur, de renforcer cette démarche. Je suis donc favorable à votre amendement n° 18.
L'amendement n° 56 rectifié bis, présenté par M. Portelli, a pour objet l'obligation d'information des passagers, tirant ainsi les conséquences des dispositions de la loi du 6 janvier 1978. Nous y sommes évidemment favorables.
Enfin, madame Boumediene-Thiery, votre amendement n° 44 tend à limiter dans le temps l'application du présent article en renvoyant à un décret d'application le soin d'en déterminer la durée.
Les dispositions du projet de loi qui autorisent une application limitée dans le temps font l'objet d'une clause de rendez-vous au 31 décembre 2008. Or tel ne peut être le cas pour l'article 6, la directive du Conseil du 29 avril 2004, que le projet de loi transpose, étant elle-même pérenne. La limitation dans le temps des dispositions de l'article 6 pourrait apparaître comme une transposition incorrecte de la norme européenne. Il ne nous est donc pas possible de retenir votre amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 70 et 91 rectifié.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, par vos explications, vous nous donnez raison et vous nous demandez de faire un choix.
En premier lieu, vous nous donnez raison puisque vous confirmez que le champ d'application de l'article 6, comme celui de l'article 7, d'ailleurs, ne se limite pas au terrorisme, mais couvre bien d'autres domaines.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Eh bien oui !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous arguez de la transposition de la directive européenne. Ce faisant, vous nous faites la démonstration que vous allez bien au-delà du terrorisme. D'ailleurs, la première phrase de l'article 6 évoque bien la lutte « contre l'immigration clandestine ».
Vous nous parlez de « nos jeunes » qui vont en Afghanistan, en Irak ou ailleurs. De quelles nationalités sont-ils ? Qu'est-ce que cela a à voir avec l'immigration clandestine ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. En second lieu, vous nous demandez de faire un choix. Mais, pour nous, parlementaires, il est très délicat de faire ce choix dans la mesure où, chers collègues, vous avez décidé de diligenter une commission d'enquête sur l'immigration clandestine.
En général, les parlementaires participent activement aux commissions d'enquête, faisant en sorte d'auditionner les personnalités les plus variées de manière à être parfaitement éclairés. Or, avant même que cette commission d'enquête ait rendu ses conclusions, le Gouvernement nous demande, vous demande d'adopter le texte de l'article 6.
Dites-nous donc carrément que cette commission d'enquête ne sert à rien, et cela nous laissera du temps pour faire autre chose !
Alors, avez-vous, oui ou non, décidé de constituer une commission d'enquête pour savoir ce qu'il en était de l'immigration clandestine ? Qu'envisagez-vous de faire pour lutter contre l'immigration clandestine ? Allez-vous suivre le ministre dans le vote de l'article 6 qui nous met en présence, de fait, d'un amalgame insupportable entre immigration et terrorisme ?
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Madame Borvo, permettez-moi de vous dire respectueusement que la commission d'enquête n'est absolument pas remise en cause par le fait que l'on transpose une directive. De toute façon, nous avons l'obligation de la transposer.
Les grandes voix du parti socialiste qui siègent au Sénat, puisque c'est ainsi qu'on les appelle, savent très bien de quoi il s'agit : d'appliquer les dispositions de la directive, qui concerne effectivement l'immigration clandestine, au terrorisme. Et chacun sait très bien aussi que nous avons toujours beaucoup de retard dans cet exercice de transposition des directives européennes !
Franchement, je comprends de moins en moins la nature du débat !
Quant à l'objet de la commission d'enquête, madame Borvo Cohen-Seat, il est beaucoup plus large que celui du texte que nous examinons aujourd'hui. Et cette commission va couvrir tout son champ. Ce qui pourrait nous poser plus de problèmes au regard du champ de cette commission d'enquête, c'est que le futur projet de loi vienne très vite en discussion.
Mme Catherine Tasca. C'est pourtant ce qui nous a été annoncé !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais ce n'est pas le cas du présent texte, qui, encore une fois, transpose une directive relative aux données recueillies sur les documents des transporteurs aériens et autres.
Pourquoi hésiter à transposer dans notre droit ce qui a été décidé à l'échelon européen alors que cela nous permet de mieux prévenir, nous l'espérons, les actes de terrorisme ?
Les grands mots, cela finit par devenir fatigant !
M. le président. La parole est à M. Louis Mermaz, pour explication de vote.
M. Louis Mermaz. Le ministre a fait la démonstration que cet article traitait d'autre chose que de la lutte contre l'immigration clandestine.
Vous nous avez dit, de façon assez saisissante, qu'il fallait se préoccuper des jeunes qui partent en Irak ou en Afghanistan pour des motifs qui n'ont rien à voir avec le tourisme : je suis bien de votre avis ! Dans une telle hypothèse, il est évidemment tout à fait normal que les services de la DST exercent une surveillance accrue.
M. Louis Mermaz. Certes, mais cela ne concerne pas du tout l'immigration clandestine, cela n'a rien à voir !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Mais c'est vous qui établissez un rapport avec l'immigration clandestine !
M. Louis Mermaz. Excusez-moi, mais le texte de l'article 6 commence bien par ces mots : « Afin d'améliorer le contrôle aux frontières et de lutter contre l'immigration clandestine... » C'est tout de même bien le Gouvernement qui a rédigé le projet de loi !
M. Louis Mermaz. Parlons alors de la directive ! Rien ne vous faisait obligation d'introduire précisément dans ce projet de loi la transposition d'une directive européenne qui, elle, concerne l'immigration clandestine.
Lorsque du débat sur le droit d'asile, nous avons eu droit à une espèce de manoeuvre « noir, impair et passe » de la part de M. de Villepin, alors ministre de l'intérieur : selon lui, il fallait absolument adopter le texte relatif au droit d'asile avant la directive européenne ne soit elle-même adoptée, de manière à être en conformité avec ce qui allait être fait.
Mais, que je sache, les membres du Gouvernement qui s'expriment ici sont bien ceux qui s'expriment à Bruxelles au nom de la France !
Il serait souhaitable que la France se fasse davantage le défenseur des droits de l'homme lorsqu'on parle en notre nom à Bruxelles ! (Protestations sur les travées de l'UMP.) Car c'est trop facile de nous dire ici que l'on doit faire ceci pour plaire à Bruxelles et, lorsque l'on est à Bruxelles, de dire que l'on doit le faire parce que la France l'exige ! Il y a tout de même là quelque chose d'un peu bizarre !
En vérité, MM. Courtois, Türk, Portelli et quelques autres collègues ont tellement senti qu'il y avait là des risques pour les libertés, pour le droit d'aller et venir, qu'ils ont apporté un certain nombre de précisions en vue d'encadrer cette disposition.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est leur travail !
M. Louis Mermaz. Autrement dit, ils veulent améliorer quelque chose que nous considérons de toute façon comme très brutal.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 70 et 91 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 62 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 329 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 165 |
Pour l'adoption | 128 |
Contre | 201 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56 rectifié bis.