M. Philippe Bas, ministre délégué. Je réitère la totale ouverture d'esprit du Gouvernement : il faut évaluer les progrès nécessaires qui peuvent être apportés au régime du PACS. Mais, encore une fois, je le répète, cette question mérite un vrai débat portant sur tous ses aspects.
C'est pourquoi le Gouvernement, je le confirme, est défavorable à l'amendement n° 254 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc, rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Monsieur Desessard, soit on refait un débat sur le PACS, comme M. le ministre vient de le proposer, soit on aborde cette question, comme aujourd'hui, à l'occasion de sujets annexes.
La commission des affaires sociales estime que cette question mérite un débat spécifique, afin de resituer le dispositif dans la réalité d'aujourd'hui. Or tel n'est pas l'objet, aujourd'hui, de la présente discussion.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 254 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 45
Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
I. - L'intitulé du chapitre II du titre VIII du livre III est ainsi rédigé : « Personnes rattachées au régime général pour l'ensemble des risques » ;
II. - L'intitulé de la section 1 du même chapitre est ainsi rédigé : « Artistes auteurs » ;
III. - Il est inséré, au début de la section 1, une sous-section 1 intitulée : « Champ d'application » et comprenant l'article L. 382-1 ;
IV. - Les sections 2 à 7 du même chapitre deviennent, respectivement, les sous-sections 2 à 7 de la section 1 ;
V. - Le chapitre est complété par une section 2 intitulée : « Ministres des cultes et membres des congrégations et collectivités religieuses ». Cette section comporte quatre sous-sections constituées dans les conditions suivantes :
A. - La sous-section 1 est intitulée : « Dispositions générales ». Elle comprend les articles L. 381-12, à l'exception de ses cinq derniers alinéas, L. 721-15-1, L. 721-2, L. 721-8-1, L. 381-14 et L. 381-15, qui sont ainsi modifiés :
1° L'article L. 381-12, à l'exception de ses cinq derniers alinéas, devient l'article L. 382-15 et est ainsi modifié :
a) Les mots : « le chapitre Ier du titre II du livre VII » sont remplacés par les mots : « la présente section » ;
b) Les mots : « d'un autre régime d'assurance maladie » sont remplacés par les mots : « d'un autre régime de base de sécurité sociale » ;
c) La référence : « L. 721-2 » est remplacée par la référence : « L. 382-17 » ;
2° L'article L. 721-15-1 devient l'article L. 382-16. Dans cet article, la référence : « L. 721-1 » est remplacée par la référence : « L. 382-15 » et les mots : « aux régimes prévus aux articles L. 381-12 et L. 721-1 » sont remplacés par les mots : « au régime prévu par la présente section » ;
3° L'article L. 721-2 devient l'article L. 382-17. Dans le deuxième alinéa de cet article, après le mot : « sociale », sont insérés les mots : «, de l'intérieur » ;
4° L'article L. 721-8-1 devient l'article L. 382-18. Dans cet article, la référence : « L. 712-3 » est remplacée par la référence : « L. 382-25 » ;
5° Les articles L. 381-14 et L. 381-15 deviennent respectivement les articles L. 382-19 et L. 382-20. Dans l'article L. 381-14, la référence : « L. 381-12 » est remplacée par la référence : « L. 382-15 » ;
B. - La sous-section 2 est intitulée : « Assurance maladie ». Elle comprend les cinq derniers alinéas de l'article L. 381-12 et les articles L. 381-17 et L. 381-18, qui sont ainsi modifiés :
1° Les cinq derniers alinéas de l'article L. 381-12 deviennent l'article L. 382-21. Dans cet article, les mots : « du présent article » sont remplacés par les mots : « de l'article L. 382-15 » ;
2° Les articles L. 381-17 et L. 381-18 deviennent les articles L. 382-22 et L. 382-23, respectivement. Dans ces articles, les mots : « de la présente section » sont remplacés par les mots : « de la présente sous-section » ;
3° Dans la dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 381-17, la référence : « L. 381-12 » est remplacée par la référence : « L. 382-15 ». Dans le dernier alinéa du même article, la référence : « L. 721-3 » est remplacée par la référence : « L. 382-25 » ;
C. - La sous-section 3 est intitulée : « Assurance invalidité ». Elle comprend l'article L. 381-18-1, qui devient l'article L. 382-24. Dans cet article, la référence : « L. 381-12 » est remplacée par la référence : « L. 382-15 » et le troisième alinéa de cet article est ainsi rédigé :
« La pension d'invalidité est remplacée, à l'âge fixé en application du premier alinéa de l'article L. 351-1, par la pension de vieillesse prévue à la sous-section 4 de la présente section. » ;
D. - La sous-section 4 est intitulée : « Assurance vieillesse ». Elle comprend les articles L. 721-3, L. 721-5-1, L. 721-6, L. 721-7, L. 721-8 et L. 721-15, qui sont ainsi modifiés :
1° L'article L. 721-3 devient l'article L. 382-25. Dans cet article, la référence : « L. 721-2 » est remplacée par la référence : « L. 382-17 », et les mots : « de la présente section et de la section 4 » sont remplacés par les mots : « de la présente sous-section ». Le 3° du I de ce même article est abrogé ;
2° L'article L. 721-5-1 devient l'article L. 382-26. Dans cet article, les mots : « visés au 3° de l'article L. 721-5 » sont remplacés par les mots : « atteints d'une incapacité totale ou partielle d'exercer dans les conditions prévues à l'article L. 382-24 » et les mots : « à l'article L. 381-18-1 » sont remplacés par les mots : « au même article » ;
3° L'article L. 721-6 devient l'article L. 382-27. Le premier alinéa de cet article est ainsi rédigé :
« Les personnes qui exercent ou qui ont exercé des activités mentionnées à l'article L. 382-15 reçoivent une pension de vieillesse dans les conditions définies aux articles L. 351-1 à L. 351-1-3, au premier alinéa de l'article L. 351-2, aux 4°, 5° et 6° de l'article L. 351-3, aux articles L. 351-4, L. 351-4-1, L. 351-6, L. 351-8 à L. 351-13, L. 352-1, L. 353-1 à L. 353-5 et L. 355-1 à L. 355-3. »
La première phrase du dernier alinéa du même article est complétée par les mots : « sous réserve d'adaptation par décret » ;
4° L'article L. 721-7 devient l'article L. 382-28. Dans cet article, les mots : « de la présente section » sont remplacés par les mots : « de la présente sous-section » ;
5° L'article L. 721-8 devient l'article L. 382-29. Dans cet article, les mots : « du présent chapitre » sont remplacés par les mots : « de la présente section » et les mots : « audit chapitre » sont remplacés par les mots : « à la présente section » ;
6° L'article L. 721-15 devient l'article L. 382-30. Dans cet article, les mots : « l'article L. 721-1 » sont remplacés par les mots : « la présente sous-section » ;
VI. - L'article L. 134-14, la section 4 du chapitre Ier du titre VIII du livre III et le chapitre Ier du titre II du livre VII sont abrogés ;
VII. - Le premier alinéa de l'article L. 921-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces dispositions sont applicables aux personnes mentionnées à l'article L. 382-15 qui bénéficient d'un revenu d'activité perçu individuellement. » - (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 45
M. le président. L'amendement n° 253 rectifié, présenté par MM. Madec et Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, MM. Lagauche et Yung et Mme Demontès, est ainsi libellé :
Après l'article 45, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le premier alinéa de l'article L. 353-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « conjoint survivant » sont remplacés par les mots : « conjoint ou partenaire au titre des articles respectifs 144 et 515-1 du code civil, survivant »
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Nous proposons que la pension de réversion s'applique tant à une personne liée par un contrat de mariage qu'à une personne liée par un pacte civil de solidarité.
Ainsi, de même que les dispositifs d'aides sociales publiques prennent en compte, dans leurs conditions de ressource, la réalité sociale de l'existence de couples de personnes unies soit par contrat de mariage soit par pacte civil de solidarité, le bénéfice d'une pension de réversion après la mort d'un conjoint s'appliquera à ces situations.
Il s'agit d'une mesure de justice sociale anti-discriminatoire à l'égard des couples stables unissant deux personnes de même sexe pour lesquelles il n'est pas prévu l'accès au mariage.
Les éventuelles pertes pour les comptes sociaux publics seraient elles-mêmes limitées, compte tenu de l'impossibilité juridique de cumuler les statuts de marié au titre de l'article 144 et de partenaire de pacte civil de solidarité au titre de l'article 515-1.
Je tiens au passage à signaler que je ne m'inscris pas dans la logique de ceux qui demandent un débat sur le PACS : ce débat a déjà eu lieu, et nous avons retenu le principe selon lequel tous les couples doivent bénéficier de droits identiques, que les personnes soient mariées ou pacsées.
Comme pour les autres textes législatifs, si des imperfections apparaissent dans le texte relatif au PACS, elles doivent être corrigées au fur et à mesure. Renvoyer à un débat d'ordre général l'examen de tous les problèmes relatifs au PACS serait vraiment une perte de temps et signifierait que, contrairement à ce que vous dites, monsieur le ministre, alors que le Gouvernement prétend faire preuve d'ouverture, il se montre, en fait, fermé et a du mal à appliquer ce principe d'égalité.
Le droit étant le même pour les personnes mariées et pour les personnes pacsées, il nous appartient de toiletter la législation pour faire en sorte que, dans chaque secteur, cette égalité soit respectée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet, pour explication de vote.
Mme Dominique Voynet. Monsieur le ministre, votre affirmation, tout à l'heure, de la totale ouverture d'esprit du Gouvernement en ce qui concerne les améliorations à apporter au dispositif du PACS équivalait-elle à un engagement de votre part de rouvrir ce chantier ?
Par ailleurs, je ne suis pas certaine que l'argument selon lequel ce qui est proposé par l'amendement n° 253 rectifié entraînerait des dépenses supplémentaires soit recevable. En effet, soit on est marié, soit on ne l'est pas. On ne peut bénéficier deux fois d'une pension de réversion !
On ne peut pas non plus mettre en place un régime qui se solderait par deux poids, deux mesures : contester l'accès à des dispositifs de solidarité au nom des ressources du couple pacsé et, en cas de coup dur, en cas de décès, contester l'accès à un dispositif de solidarité, à savoir la pension de réversion, qui est liée, justement, à l'existence de ce couple.
L'argumentation de M. le rapporteur me semble être un peu bancale et ne pas aller au bout du raisonnement : soit on est dans l'égalité des droits, soit on ne l'est pas.
M. Jean Desessard. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 268 rectifié, présenté par M. About, est ainsi libellé :
Après l'article 45, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 106 de la loi de finances pour 1982 (n° 81-1160 du 30 décembre 1981) est ainsi modifié :
I - Au troisième alinéa (b), les mots : « De cinquante-sept ans révolus, » sont remplacés par les mots : « De cinquante-six, cinquante-sept ou cinquante-huit ans révolus, »
II - Dans le sixième alinéa, après les mots: « poursuivre son activité » sont insérés les mots : « ou qui est éligible aux dispositions de l'article L. 634-3-2 du code de la sécurité sociale ».
La parole est à M. Nicolas About.
M. Nicolas About. La loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites ainsi que le décret du 30 octobre 2003 relatif à l'abaissement de l'âge de la retraite permettent à des artisans ayant commencé à travailler jeunes, avant seize ou dix-sept ans, de faire valoir leur droits à une retraite pour longue carrière.
Les intéressés devraient théoriquement pouvoir bénéficier également de l'indemnité de départ, organisée par un arrêté du 13 août 1996, mais, pour l'instant, en raison d'un certain nombre de textes contradictoires, ils ne peuvent toucher cette indemnité de départ qu'à l'âge de soixante ans révolus.
Versée trois ou quatre ans après la cessation d'activité, elle perd son rôle de compensation et devrait, en tout cas, être réévaluée.
L'harmonisation proposée par cet amendement permet d'éviter cette réévaluation et de réaliser ainsi une économie pour les caisses concernées.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Cette disposition aurait une incidence sur la dépense publique de l'État et, j'en suis désolé, je suis condamné à émettre un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Nicolas About, pour explication de vote.
M. Nicolas About. L'ombre de l'article 40 plane sur cet amendement ! Sachant la commission des finances prête à considérer que cet article est applicable, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 268 rectifié est habilement retiré. (Sourires.)
L'amendement n° 126, présenté par M. Domeizel, est ainsi libellé :
Après l'article 45, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les modalités d'intégration ou d'adossement entre régimes de retraites sont déterminées par la loi.
La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Cet amendement revêt une certaine importance.
La pluriactivité tout au long de la carrière professionnelle, la notion de durée d'assurance instituée par la loi du 21 août 2003 et la solidarité entre les régimes, qui se traduit par des compensations généralisées et spécifiques, sont autant d'éléments qui lient les régimes de retraite, qu'il s'agisse du régime général ou des régimes spéciaux, spécifiques ou complémentaires.
Cette imbrication, souvent complexe, impose une vue d'ensemble, et seul le législateur peut modifier un tel système.
C'est dans cet esprit que les rédacteurs de la loi du 9 août 2004 ont adossé le régime des retraites des industries électriques et gazières au régime général et que ceux du présent projet de loi veulent intégrer le régime des cultes dans le régime général.
Il paraît donc normal que toute intégration ou tout adossement se fasse de cette manière.
Je tiens à souligner que le conseil d'administration de la CNAV a demandé, le 5 octobre dernier, que l'adossement, tout particulièrement celui de la RATP, fasse l'objet d'une disposition spécifique dans la loi de financement de la sécurité sociale : en effet, la CNAV souhaite que la représentation nationale ait son mot à dire et puisse bénéficier de toutes les garanties nécessaires pour que la neutralité financière de l'opération soit assurée et que le financement de l'opération d'adossement soit garanti.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je tiens à dire à M. Domeizel, que j'ai écouté avec attention pour ne pas perdre un seul mot de son intervention, que nous avons la volonté, au sein de la commission des affaires sociales, de bien asseoir notre régime global par répartition, qui est fondé sur une certaine solidarité, tant entre les générations qu'entre les divers régimes les uns par rapport aux autres.
Cela étant, nous ne pouvons pas aller à l'encontre de l'article 34 de la Constitution, qui délimite le domaine législatif.
Par ailleurs, au nom de la commission, j'ai déposé plusieurs amendements qui reposent sur des principes simples, fondés sur la neutralité et la transparence des opérations effectuées dans le cadre de ces adossements.
Confrontés aujourd'hui à l'adossement de la RATP, nous avons tous le même objectif : la représentation nationale doit être au coeur du processus de décision dans ces dossiers, car nous sommes tous convaincus de leur importance non seulement actuelle, mais aussi future.
Vous avez cité le conseil d'administration de la CNAV, mais l'ensemble des régimes sont concernés - vous y avez fait allusion en évoquant la compensation - et, dans la continuité de la réforme de 2003 ainsi que dans l'optique du rendez-vous de 2008, nous maintenons notre volonté de conforter, dans une réforme continuelle, notre régime de retraite par répartition.
Je vous demande donc, monsieur Domeizel, de retirer votre amendement et d'appuyer ceux de la commission, qui vont être examinés dans quelques instants.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Le problème des régimes spéciaux, auquel nous avons déjà eu l'occasion de faire allusion, est l'un des plus importants qui vont se poser dans les décennies à venir.
Pour notre part, nous soutenons la proposition de M. Domeizel : tout doit se faire dans la transparence et par voie législative.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 126.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 46
I. - Le chapitre V ter du titre Ier du livre VIII du code de la sécurité sociale issu de l'ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004 simplifiant le minimum vieillesse est abrogé.
II. - Dans le 1° de l'article L. 135-2 du même code, dans sa rédaction issue du II de l'article 1er de l'ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004 précitée, les mots : « aux chapitres V et V ter ; » sont remplacés par les mots : « au chapitre V ; ».
III. - L'article L. 816-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 816-1. - Le présent titre est applicable aux personnes de nationalité étrangère sous réserve qu'elles répondent aux conditions prévues aux articles L. 262-9 et L. 262-9-1 du code de l'action sociale et des familles. »
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, sur l'article.
Mme Bariza Khiari. La simplification du droit est une nécessité, nous en convenons tous. C'est ce qui a conduit le Gouvernement à réaliser, par l'ordonnance du 24 juin 2004, le « toilettage » d'un certain nombre de textes, dont celui qui porte sur le minimum vieillesse. Ces dispositions devaient entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 2006.
Aujourd'hui, le Gouvernement revient sur ce texte. Pourquoi ?
Il semble que seules des contingences financières le poussent dans cette direction : M. Alain Vasselle, dans son rapport écrit, annonce que le régime du minimum vieillesse « comporte encore une disposition qui s'avère être une faille coûteuse pour les finances sociales ».
Par ce projet de loi, le Gouvernement essaie de combler le déficit de la sécurité sociale par une multitude de « recettes de poche » que je ne vais pas énumérer ici, puisque mes autres collègues les ont déjà dénoncées.
Les dispositions de l'article 46 en sont une illustration des plus flagrantes : il s'agit ici de supprimer une disposition du code de la sécurité sociale permettant aujourd'hui d'« exporter » le minimum vieillesse.
Ce dispositif touche principalement une population particulière, celle des travailleurs immigrés qui, arrivés chez nous dans les années soixante ou soixante-dix à la demande du patronat français, n'envisageaient pas de faire souche en France et souhaitaient retourner au pays.
Ces travailleurs ont construit la France au même titre que les autres mais, aujourd'hui, ils n'ont pas les mêmes droits.
Pourquoi les travailleurs français auraient-ils le droit de vivre leur retraite là où ils sont nés et pas les travailleurs immigrés ?
Ces derniers ont le choix entre rentrer dans leur pays d'origine et ne percevoir que 150 euros, qui représentent la moyenne de la pension contributive des bénéficiaires, soit rester en France et percevoir 589 euros.
Il s'agit là de la même problématique que celle de la « cristallisation » des pensions militaires, qui sont réduites pour les anciens combattants retournant vivre chez eux. Le sang versé ou l'engagement au service de notre pays n'ont pas le même prix au regard de l'endroit où l'on se trouve !
Cet article 46 me conduit à faire le parallélisme entre travailleurs immigrés et anciens combattants : ils ont fourni le même travail que les Français, mais ne toucheront pas la même retraite.
Comment se résoudre à ce que ces vieux travailleurs immigrés continuent à vivre misérablement et seuls dans les foyers SONACOTRA, où ils traînent leur désarroi et leur nostalgie alors qu'ils pourraient prétendre, après une vie de dur labeur dans les emplois les plus éprouvants, à une retraite paisible auprès des leurs. Ils subissent là une « double peine », et c'est insupportable !
À l'évidence, nous en convenons, il y a une différence entre la personne qui, ayant cotisé, touche une pension contributive et celle qui n'a pas constitué suffisamment de droits à retraite. Mais à cela s'ajoute une discrimination puisque, dans le deuxième cas, la personne est contrainte de vivre sur le territoire français de manière ininterrompue pendant huit mois.
Copinage fiscal pour les patrons du CAC 40 d'un côté, comportement indigne vis-à-vis de ceux qui sont à la marge de tout de l'autre, et ce pour des raisons d'équilibre des comptes, ce n'est pas acceptable. Mais il est vrai que ces derniers ne sont pas des électeurs !
Les jeunes, dans les banlieues, lancent actuellement un cri de révolte contre l'étendue des discriminations dont ils sont l'objet. Ils regarderont avec la plus grande attention le sort que la République réservera à leurs chibani, c'est-à-dire à leurs aînés. Dans le contexte actuel, je vous invite à réfléchir sur les conséquences psychologiques et sociales d'un tel dispositif !
Pour ces raisons, nous voterons l'amendement de Mme Létard qui, tout en développant des arguments différents, vise le même objectif que nous : la sécurisation du dispositif existant. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le ministre, cet article 46 cache bien, encore une fois, vos véritables intentions.
Derrière une apparente simplification législative - le texte prévoit en effet de faire entrer le complément de retraite dans le droit commun des minima sociaux -, vous opérez une réduction du champ des prestations sociales au détriment des anciens travailleurs étrangers, ces chibani que je croise chaque dimanche matin au marché de ma ville, à proximité duquel est installé un foyer SONACOTRA.
Ce qui peut sembler anodin à la lecture signifie en réalité la mise en place d'un dispositif cynique, indigne d'un pays démocratique. Sous prétexte d'économiser « une cinquantaine de millions d'euros », pour reprendre les termes de M. le rapporteur Alain Vasselle, vous décidez de priver les travailleurs étrangers à la retraite d'un minimum de droits à pension.
Les personnes sur lesquelles ce gouvernement décide de s'acharner, ce sont les travailleurs immigrés qui, pendant des dizaines d'années, ont travaillé sur le sol français, le plus souvent dans des emplois non qualifiés et dans les conditions les plus pénibles.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si c'est pendant des dizaines d'années, leur situation n'est pas mauvaise !
M. Guy Fischer. Seuls quelques-uns parmi eux sont retournés dans leur pays d'origine. Mais ce n'est pas une raison pour les priver de leurs droits à la retraite car, au regard des conditions de vie et d'emploi que la France leur a malheureusement réservées, ils sont plus que méritants.
Je sais de quoi je parle car, dans ma ville, au moment de la réindustrialisation de la France, pas moins de dix foyers ont été construits, pour l'essentiel par la SONACOTRA, afin d'accueillir tous ces travailleurs que le patronat français, notamment Renault Véhicules Industriels et Berliet, avait fait venir et qui continuent à y vivre, dans des conditions terribles.
Je ne crois pas que nous puissions parler en ce qui les concerne d'effet d'aubaine. Comme les anciens combattants de la France coloniale qui, à travers les problèmes de « cristallisation », touchent une retraite calculée sur le pouvoir d'achat de leur pays d'origine, ces travailleurs ont, la plupart du temps, non seulement donné leur vie de travail à la France mais aussi combattu pour elle et représenté l'honneur de ce pays.
Une fois encore, ce Gouvernement s'en prend aux plus démunis. C'est sur leur compte qu'il souhaite faire des « économies de bout de chandelle », en épargnant toujours les entreprises et les grands patrons. Tout ce projet de loi de financement de la sécurité sociale en témoigne !
Il faut oser dire qu'un nouveau pas a été franchi, puisque ce sont désormais les étrangers qui sont directement visés. Cela fait tristement écho à l'actualité !
Vous remettez en cause, par cette disposition, les principes démocratiques les plus élémentaires, notamment le respect dû à chacun, quelles que soient son origine ethnique ou ses convictions religieuses.
Malheureusement, ce n'est pas la seule disposition de cet ordre, comme nous le verrons à l'occasion de l'examen des amendements du Gouvernement sur les allocations familiales, ou de l'article 57, relatif aux sanctions à l'encontre des assurés sociaux.
Je ne peux évidemment pas obtenir de votre part le retrait de cet article, mais j'espère au moins avoir éclairé quelque peu vos intentions cachées, qui sont cyniques et indignes d'un pays comme le nôtre ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais non !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 265 est présenté par M. Alduy.
L'amendement n° 267 rectifié est présenté par Mme Létard et les membres du groupe Union centriste-UDF.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par trois paragraphes ainsi rédigés :
IV. Après l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 815-1-1.- De même, toute personne résidant encore sur le territoire métropolitain ou dans un département mentionné à l'article L. 751-1, au jour de l'ouverture du droit, ayant cotisé plus de soixante trimestres tous régimes confondus, et ayant atteint un âge minimum bénéficie d'une allocation de solidarité aux personnes âgées dans les conditions prévues par le présent chapitre. Cet âge minimum est abaissé en cas d'inaptitude au travail.
V. L'article L. 815-12 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 815-12. - Le service de l'allocation de solidarité aux personnes âgées est supprimé aux personnes qui ne remplissent plus les conditions mentionnées aux articles L. 815-1 et L. 815-1-1. »
VI. L'article L. 815-24 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 815-24. - Dans les conditions prévues au présent chapitre, toute personne réunissant les conditions définies à l'article L. 815-1 ou L. 815-1-1, titulaire d'un avantage viager servi au titre de l'assurance invalidité ou de vieillesse par un régime de sécurité sociale résultant de dispositions législatives ou réglementaires peut, quel que soit son âge, bénéficier d'une allocation supplémentaire dont le montant est fixé par décret et dans la limite du plafond de ressources applicable à l'allocation de solidarité aux personnes âgées prévu à l'article L. 815-9 :
« - si elle est atteinte d'une invalidité générale réduisant sa capacité de travail ou de gain dans des proportions déterminées ;
« - ou si elle a obtenu cet avantage en raison d'une invalidité générale au moins égale, sans remplir la condition d'âge pour bénéficier de l'allocation aux personnes âgées prévue à l'article L. 815-1.
« Le montant de l'allocation supplémentaire peut varier selon la situation matrimoniale des intéressés. »
L'amendement n° 265 n'est pas soutenu.
La parole est à M. Adrien Giraud, pour présenter l'amendement n° 267 rectifié.
M. Adrien Giraud. L'objet de notre amendement n° 267 rectifié est de rétablir l'exportabilité d'une partie du minimum vieillesse, supprimée par l'article 46 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.
Le minimum vieillesse est constitué de deux allocations.
La première majore la pension contributive du bénéficiaire, afin que celle-ci s'élève à 290 euros par mois. La seconde est de 299 euros mensuels. Le bénéficiaire résidant en France touche donc 589 euros par mois.
Jusqu'ici, la première partie du minimum vieillesse était exportable, c'est-à-dire qu'elle pouvait être perçue par un bénéficiaire installé hors du territoire national. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 revient sur cette possibilité.
La raison invoquée est la possibilité de réaliser une économie annuelle de 10 millions d'euros sur les 8 152 personnes qui choisissent de rentrer chaque année dans leur pays d'origine.
Cela revient à proposer à ces personnes deux possibilités. La première consiste à rentrer dans leur pays d'origine et à ne percevoir que 150 euros mensuels, ce qui est la moyenne constatée de la pension contributive des bénéficiaires. La seconde consiste à rester en France et à percevoir 589 euros mensuels, avec un hébergement qui ne coûte que 30 euros par mois, aide personnalisée au logement déduite.
Il est évident que plus de 80 % des bénéficiaires vont choisir la deuxième solution et continuer à coûter plus à l'État que ces 254 euros mensuels destinés à leur hébergement.
Le présent amendement consiste à rendre exportable la totalité du minimum vieillesse pour tous les nouveaux bénéficiaires ayant cotisé plus de quinze années au jour de l'ouverture de leurs droits : nous évitons ainsi de créer un effet d'aubaine.
Pour ceux d'entre eux qui choisissent malgré tout de ne pas rentrer, c'est-à-dire les 20 % restants, la SONACOTRA a mis en place un dispositif de chambres partagées qui fonctionne : le retraité rentre neuf mois dans son pays d'origine et revient trois mois en France, selon un planning établi. Il ne perçoit pas l'APL pendant ces trois mois, et l'État réalise donc une économie de 250 euros par mois et par personne. La SONACOTRA, elle, divise ainsi le nombre de chambres occupées par quatre !
Or les bénéficiaires du minimum vieillesse ne peuvent pas utiliser ce dispositif puisque la loi les oblige à rester de manière ininterrompue pendant huit mois sur le territoire français, sous peine de voir suspendre leurs prestations.
Le présent amendement tend donc à abaisser la condition de résidence à trois mois au lieu de huit. (MM. Georges Othily et Jean Desessard applaudissent.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Cet amendement est incompatible avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Même avis.
Je précise, car cela me semble important, qu'il n'est pas question dans l'article 46 de pensions de retraite mais de minima sociaux.
Une fois que vous avez acquis vos droits à la retraite, vous pouvez jouir de votre pension partout dans le monde. Mais il n'en est pas de même avec les minima sociaux.
Le bénéficiaire du revenu minimum d'insertion, le RMI, de l'allocation aux adultes handicapés, l'AAH, ou de n'importe quel autre minimum social, n'a pas le droit d'aller vivre à l'étranger. Il est obligé de rester en France, et ce pour une raison très simple : le montant du minimum social a été calculé pour lui permettre de vivre sur le territoire national dans des conditions minimales - et, en l'occurrence, je le reconnais, difficiles - de subsistance.
Entre ce minimum de subsistance, calculé en fonction du pouvoir d'achat français, et celui qui serait applicable dans le pays d'origine de ces travailleurs, il existe évidemment une différence qui peut aller du simple au décuple. Cela n'aurait donc aucun sens de permettre l'exportation d'un minimum vieillesse calculé pour vivre en France, même dans des conditions tout à fait minimales.
Il s'agissait d'une anomalie, ...
M. Guy Fischer. Il y en a d'autres !
M. Philippe Bas, ministre délégué. ... d'une lacune de notre législation que nous avons eu à coeur de corriger dès que nous en avons eu connaissance, afin justement qu'il ne soit plus possible d'exporter le minimum vieillesse à l'étranger.
Si les bénéficiaires de cette prestation possèdent un titre de séjour régulier et veulent rester en France, elles sont naturellement les bienvenues ! En revanche, si elles décident de partir à l'étranger, elles ne peuvent « l'emmener » avec elles.
M. François Autain. C'est inacceptable !
M. Philippe Bas, ministre délégué. J'ajoute qu'actuellement moins le travailleur étranger a passé de temps et travaillé en France plus son minimum vieillesse est important. Et ce sont les personnes qui n'ont effectué que quelques séjours saisonniers au milieu des années soixante-dix qui touchent dans leur pays, une fois à la retraite, les prestations les plus élevées.
Heureusement, ayant pris conscience de ce vide juridique, nous avons pu corriger cette lacune, ce qui est tout de même la moindre des choses !
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Monsieur le ministre, vous a rappelé qu'il n'était question dans l'article 46 que des minima sociaux, ce qui est exact. Cependant, au cours de ces cinq jours de débat, vous avez « retoqué » plusieurs de mes amendements au motif qu'une réforme des minima sociaux était en cours, à l'occasion de laquelle Mme Valérie Létard était chargée de faire des propositions.
Si je comprends bien, quand il s'agit des petits, des travailleurs, de ceux qui ont gagné leur vie à la sueur de leur front, on anticipe la réforme, car il ne faut pas perdre de temps : les dispositions doivent entrer en vigueur immédiatement ! Mais, pour la réforme des minima sociaux, sur laquelle réfléchit Mme Létard, on prend son temps !
Il faut regarder la réalité en face : vous montrez les travailleurs étrangers du doigt et vous leur dites de retourner dans leur pays !