PRÉSIDENCE DE Mme Michèle André
vice-présidente
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, s'il était encore besoin de prouver l'utilité et l'importance du travail parlementaire en ces temps d'ordonnances, la navette de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale pourrait être citée en exemple. En effet, nous voici presque arrivés à l'issue de l'examen de ce texte, qui est un texte technique mais un texte clef.
Nous pouvons d'ores et déjà faire le constat suivant : le texte initial de ce projet de loi représentait déjà une avancée significative dans le contrôle par la représentation nationale des comptes sociaux. Il répondait à une nécessité urgente.
Si les lois de financement de la sécurité sociale sont entrées dans notre paysage juridique, il faut bien admettre qu'après huit exercices elles n'ont pas atteint les objectifs qui leur étaient assignés. Elles n'ont pas permis d'éviter les dérives effrayantes auxquelles nous devons aujourd'hui faire face, et ce pour deux raisons principales. D'abord, leurs prescriptions en matière de dépense sont largement restées lettre morte : l'ONDAM n'a été respecté qu'une seule fois ; ensuite, les lois de financement de la sécurité sociale étaient structurées de telle sorte que la représentation nationale ne pouvait pas exercer un contrôle pleinement éclairé. L'absence de solde dans les lois de financement de la sécurité sociale empêchait de se prononcer en toute connaissance de cause sur les comptes sociaux.
C'est ce qu'entendait corriger ce projet de loi. En rapprochant la structure des lois de financement de celle des lois de finances, il a substantiellement amélioré la lisibilité et la transparence de ces lois.
Dorénavant, la présentation de la loi de financement permettra au législateur de se prononcer en toute connaissance de cause sur les comptes de la sécurité sociale puisque, d'une part, les prévisions de dépenses retracées en loi de financement de la sécurité sociale couvriront, à l'instar des prévisions de recettes, tous les régimes obligatoires de base et les organismes concourant au financement de la sécurité sociale, et que, d'autre part, les recettes seront présentées par agrégats, en fonction de leur affectation à telle ou telle branche. Nous bénéficierons ainsi de tableaux d'équilibre fiables ; nous pourrons enfin nous prononcer sur des soldes.
Il est un autre progrès, déjà contenu dans le projet initial de loi organique : l'introduction d'une dose de pluriannualité grâce au rapport prévisionnel de recettes et de dépenses.
Enfin, le projet de loi organique initial constituait une avancée en matière de sincérité et d'efficacité.
Nous constatons donc que le texte qui nous est soumis aujourd'hui est bien meilleur que celui qui nous avait été présenté en mars.
Déjà, lors de l'adoption de ce projet de loi en première lecture, la Haute Assemblée pouvait s'enorgueillir de l'avoir substantiellement amélioré. Elle en avait renforcé la transparence et la sincérité en insérant un volet « règlement » pour permettre au Parlement de se prononcer sur les comptes de l'année écoulée. Elle avait également explicité le principe de sincérité et renforcé le pouvoir de contrôle des commissions compétentes à l'Assemblée nationale et au Sénat.
Toutefois, faisant suite à nos travaux, nos collègues députés ont effectué un travail remarquable, allant dans le sens d'une plus grande simplification et d'une meilleure efficacité.
Je tiens ici à saluer les modifications importantes apportées au projet de loi organique par l'Assemblée nationale.
D'abord, la présentation générale des lois de financement est aujourd'hui incomparablement plus lisible. La quadripartition est limpide : une première partie est consacrée à l'année écoulée, une deuxième partie est dédiée à l'année en cours, une troisième et une quatrième partie traitent des recettes et des dépenses à venir. Voilà qui est tout à fait cohérent !
Ensuite, le renforcement du contrôle et de la limitation de la dette sociale nous paraissait une nécessité. L'intégration des comptes de la CADES et du Fonds de réserve des retraites dans les lois de financement de la sécurité sociale est une excellente chose. Le fait que tout nouveau transfert de dette à la CADES doive être accompagné d'une augmentation de ses recettes est un principe élémentaire d'équité intergénérationnel. L'UDF réclame de longue date une diminution de la durée d'amortissement de la dette afin de ne pas faire peser sur les générations futures nos propres errements. Au moins la présente loi organique garantit-elle que la durée de remboursement ne s'allonge pas.
En outre, la subdivision de l'ONDAM en sous-objectifs était l'une de nos revendications en première lecture. Nous nous félicitons que le principe en soit acquis. L'ONDAM ne pourra que gagner en efficacité.
Enfin, l'interdiction que toute exonération ou réduction de cotisations sociales soit décidée en dehors du cadre des lois de financement de la sécurité sociale est une amélioration clef pour un contrôle effectif des comptes sociaux.
Alors, mes chers collègues, monsieur le ministre, monsieur le ministre délégué, encouragés par ces constats optimistes, continuons sur notre lancée. Le projet de loi organique est encore perfectible sur certains points et les propositions de notre commission des affaires sociales remédient à ces imperfections.
Nous souscrivons à sa volonté de réaffirmer clairement le principe de la séparation financière des branches. Nous souscrivons aussi à sa suggestion d'abandonner le débat d'orientation des finances sociales et de supprimer le mécanisme, introduit à l'Assemblée nationale, de correction des comptes sociaux par ordonnances. Cette dernière technique nous paraît en effet en contradiction avec la philosophie même des lois de financement.
C'est pourquoi nous appuierons les propositions de la commission des affaires sociales, dont nous tenons à féliciter le rapporteur, Alain Vasselle, et le président, Nicolas About, pour l'excellence de leur travail. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Je voudrais d'abord vous remercier, monsieur le président et monsieur le rapporteur de la commission des affaires sociales, de la qualité des travaux préparatoires de la Haute Assemblée sur ce projet de loi organique : vous y avez de nouveau apporté une impulsion déterminante à l'occasion de cette deuxième lecture.
Je voudrais également remercier chacune et chacun des intervenants qui se sont succédé à la tribune au nom des différents groupes pour le très grand intérêt de leur réflexion et la richesse de leurs propositions, qui ne font d'ailleurs que confirmer l'image que je me fais depuis longtemps des travaux de la Haute Assemblée.
Je remercie aussi le rapporteur et la commission du souci qu'ils ont eu de ne retenir pour cette deuxième lecture qu'un nombre limité d'amendements. Je veux leur dire que le Gouvernement partage la plupart, pour ne pas dire la totalité, des objectifs qui sont les leurs, en particulier en matière de compensation des exonérations de charges sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Votre démarche n'est pas seulement cohérente avec les termes mêmes de la loi Veil de 1994, que vous avez rappelée, monsieur le rapporteur,...
M. Alain Vasselle, rapporteur. Tout à fait !
M. Philippe Bas, ministre délégué....elle correspond aussi à notre volonté commune de garantir que la sécurité sociale continuera à assurer le haut niveau de protection sociale qui est le sien, ce qui est bien notre objectif fondamental.
Cela suppose des ressources dynamiques affectées en permanence à nos régimes sociaux, en évitant les transferts de charges en provenance de l'Etat. C'est dire que vos propositions en la matière, mesdames, messieurs les sénateurs, seront examinées avec faveur par le Gouvernement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Vasselle, rapporteur. Merci d'avance !
M. Paul Blanc. Bravo !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Vous avez rappelé, monsieur le rapporteur, le rendez-vous « à demi manqué » de la première lecture. Nous aurons l'occasion, avec cette deuxième lecture, de renforcer encore l'effectivité de ce principe de compensation auquel tous les acteurs de la sécurité sociale sont attachés, comme vous l'êtes vous-même avec le Sénat tout entier. Nous y reviendrons au cours du débat, mais je souligne d'ores et déjà que le Gouvernement est, lui aussi, profondément attaché à la préservation des recettes de la sécurité sociale.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Très bien !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Je salue la démarche « largement pragmatique » - je vous cite encore - que vous suggérez d'adopter. En effet, la plupart des modifications apportées par l'Assemblée nationale répondent, me semble-t-il, aux préoccupations du Sénat.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Tout à fait !
M. Philippe Bas, ministre délégué. En particulier, c'est la Haute Assemblée qui avait introduit une partie relative à l'exercice clos. Sur cette base, l'Assemblée nationale a restructuré la loi de financement en quatre parties : une partie relative à l'exercice clos, une autre partie relative à l'exercice en cours, une partie relative aux recettes et à l'équilibre général en ce qui concerne l'exercice à venir, et une partie relative aux dépenses.
S'agissant de la possibilité de prendre des mesures par ordonnances, comme vous le savez, le Gouvernement partage vos interrogations. C'est en effet un choix de l'Assemblée nationale, et je suppose que le Sénat souhaitera en délibérer à nouveau.
Monsieur Fischer, vous avez évoqué la brièveté des délais entre l'examen de ce texte par l'Assemblée nationale et la deuxième lecture au Sénat
Les délais ont été effectivement courts, mais vous connaissez notre objectif - que vous devez partager -, de faire en sorte que le présent projet de loi organique soit adopté à l'issue de cette session parlementaire, afin de nous permettre de l'appliquer dès le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale.
M. Paul Blanc. C'est normal !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Nous discuterons d'ailleurs tout à l'heure d'un amendement du Gouvernement visant à préciser les modalités d'entrée en vigueur de ce projet de loi organique ainsi que les conditions de son application dès le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Enfin, je rappelle que, comme nous nous y étions engagés, nous avons déposé ce projet de loi organique en premier lieu sur le bureau du Sénat, qui en a donc eu la primeur.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement a ainsi veillé à ce que le Sénat soit associé de manière privilégiée à la délibération parlementaire de ce texte.
Monsieur Fischer, vous avez également évoqué les pouvoirs confiés au directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie. Nous avons en effet souhaité renforcer les responsabilités dévolues à l'assurance maladie et lui donner les moyens de les exercer en dotant les directeurs généraux de la CNAM et de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie de pouvoirs nouveaux.
J'ajoute que, en concertation avec les partenaires sociaux, le rôle des caisses a été redéfini, accru même, et recentré sur des priorités stratégiques qui ont été réaffirmées. Leur mise en oeuvre et leur gestion incombent, quant à elles, au directeur général de chaque organisme.
Vous avez souligné, par ailleurs, la situation des hôpitaux.
Je vous rappelle que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour 2005 dégageait déjà des moyens importants pour les hôpitaux, avec 2 milliards d'euros supplémentaires par rapport à l'exercice précédent, soit une progression de 3,6 %, alors que l'ONDAM global augmentait de 3,2 % pour la même période. J'ajoute que la progression de l'ONDAM hospitalier entre 1997 et 2002 avait été limitée à 2,5 % en moyenne.
Si des erreurs d'évaluation de la base de départ pour 2005 sont constatées, il nous faudra, bien sûr, en tenir compte. Afin de faire la lumière sur ce problème, Xavier Bertrand et moi-même avons lancé une mission conjointe de l'inspection générale de l'affaire sociale et de l'inspection générale des finances, dont les conclusions nous seront rendues très prochainement.
Enfin, monsieur le sénateur, vous avez exprimé votre inquiétude quant aux taux de remboursement. Je veux vous rassurer : aucune disposition de la réforme de l'assurance maladie ne vient modifier la frontière entre la couverture de base et la couverture complémentaire. Bien au contraire, par cette réforme structurelle, nous voulons sauver l'assurance maladie et préserver notre système de sécurité sociale, afin précisément que les droits des assurés sociaux continuent d'être garantis.
Nous avons pleinement tiré la conséquence des déficits que l'assurance maladie accumulait. Vous n'avez certainement pas oublié, monsieur le sénateur, les longues heures de débat qui ont eu lieu l'an dernier sur le projet de loi relatif à l'assurance maladie !
La réforme repose sur la maîtrise médicalisée des dépenses de santé. Elle vise à garantir un haut niveau de protection sociale, l'égal accès aux soins, le financement du progrès médical, en dépensant mieux. Il s'agit d'administrer la preuve que chaque euro dépensé par l'assurance maladie sera réellement utile à la santé et il importe d'éviter les actes inutiles ou redondants, qui ont été estimés entre 5 milliards et 6 milliards d'euros par l'assurance maladie.
Notre objectif national de dépenses d'assurance maladie a vu sa crédibilité renforcée : les caisses transmettront leurs propositions. Le pilotage en cours d'année par les partenaires conventionnels et l'assurance maladie a été amélioré : nous avons institué une surveillance à mi-année de l'évolution de la réalisation de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, par le biais du comité d'alerte, instance indépendante.
Je remercie M. Gilbert Barbier du soutien que son groupe apporte à ce texte. Je le remercie également d'avoir souligné l'intérêt à la fois de l'inscription du financement de la sécurité sociale dans une perspective désormais pluriannuelle - c'est, en effet, une évolution très importante - et du renforcement de la démarche objectifs-résultats.
S'agissant de l'élèvement au rang organique de la disposition relative à la compensation, le Gouvernement a bien compris combien de nombreux sénateurs et sénatrices, sur toutes les travées - dont vous-même, monsieur le sénateur, ainsi que le rapporteur Alain Vasselle et tous les membres de la commission des affaires sociales -, étaient attachés au principe de la compensation. Le Gouvernement l'est également, vous le savez.
Quant à l'habilitation à procéder à des mesures de rééquilibrage par ordonnances, vous avez pu constater que, lors des débats qui se sont déroulés au Palais-Bourbon, le Gouvernement ne s'était pas prononcé en faveur de cette solution, que l'Assemblée nationale a tout de même retenue. Le Gouvernement respecte ce choix, mais il continue d'émettre des réserves, tout comme vous, monsieur le sénateur.
Mme Alquier, qui s'exprimait au nom du groupe socialiste, a salué le patrimoine commun que constitue la sécurité sociale, dont nous fêterons cette année le soixantième anniversaire. Croyez bien, madame la sénatrice, que nous y sommes attachés autant que vous. Mais la différence avec vous, c'est que nous nous donnons les moyens de la sauvegarder, de préserver ce à quoi nous sommes attachés.
M. Paul Blanc. J'en suis persuadé !
M. Philippe Bas, ministre délégué. C'est pour sauver notre sécurité sociale, qui est confrontée à une situation extrêmement préoccupante, que nous mettons en oeuvre ces réformes structurelles, et nous le faisons en préservant son esprit.
La réforme de l'assurance maladie repose sur une maîtrise médicalisée, et non pas comptable, des dépenses de santé.
S'agissant de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, je le répète, le présent texte renforcera sa transparence et sa crédibilité.
En ce qui concerne les compensations, vous l'avez entendu, madame la sénatrice, nous partageons votre souci. Ce projet de loi organique marque une grande avancée pour assurer la garantie des ressources de la sécurité sociale. A l'occasion de cette deuxième lecture, nous irons encore plus loin, grâce à la solution proposée par votre rapporteur.
La situation de l'assurance maladie se redresse : alors que le déficit prévisionnel était estimé à 13,2 milliards d'euros en 2004, une fois la réforme de l'assurance maladie engagée, il est tombé à 8,3 milliards d'euros pour 2005, selon les estimations de la commission des comptes de la sécurité sociale qui s'est réunie ce matin même.
C'est dire que nous sommes sur la bonne voie et que nous devons persévérer dans cette direction afin de réduire davantage le déficit de l'assurance maladie en 2006. Tel est l'objet de la maîtrise médicalisée que nous voulons mettre en oeuvre et du projet de loi de financement de la sécurité sociale que nous vous présenterons pour l'année 2006.
Permettez-moi d'ailleurs de vous rappeler que c'est entre 1997 et 2002 que la dérive des dépenses d'assurance maladie s'est amplifiée. En 1997, la hausse des dépenses était supérieure à 2 % ; en 2002, l'augmentation que vous nous avez laissée s'est, hélas ! élevée à 7 % pour les soins de ville et à 7,2 % au total. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. François Autain. Il est agressif !
M. Paul Blanc. Voilà un bon chiffre !
M. Philippe Bas, ministre délégué. Je vous remercie, madame Payet, du soutien que vous apportez à ce texte. Vous l'estimez bon. C'est aussi, bien sûr, notre avis, d'autant que, je le répète, le Gouvernement n'a pas de droits d'auteur en la matière. En effet, c'est le Parlement, et en particulier le Sénat, qui a été à l'origine de la réflexion sur la réforme des lois de financement de la sécurité sociale, et le Gouvernement a largement bénéficié du travail parlementaire sur ce sujet.
Vous notez avec satisfaction l'intégration dans le périmètre des lois de financement de la sécurité sociale de la caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES, et du fonds de réserve des retraites. C'est un point important. Effectivement, nous avons voulu renforcer le contrôle du Parlement sur l'ensemble du champ de la sécurité sociale, en y incluant des éléments relatifs non seulement aux organismes concourant au financement de la sécurité sociale, mais également à ceux qui amortissent la dette ou mettent en réserve des ressources à son profit.
Madame la présidente, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le présent projet de loi organique tire les leçons de près de dix années de lois de financement de la sécurité sociale.
Cette grande innovation de la Ve République a donné à la représentation nationale le pouvoir de voter les recettes et les objectifs chiffrés de la sécurité sociale. Elle méritait d'être perfectionnée, notamment pour renforcer la transparence, pour inscrire l'examen par le Parlement dans un cadre pluriannuel et pour renforcer l'effectivité des objectifs votés par le Parlement.
Cette grande réforme, qu'il vous est proposé de mettre à jour, revêt une signification très importante pour nos institutions. Le Parlement est devenu le garant de la pérennité de notre protection sociale et il assume désormais le contrôle, comme depuis les premiers temps du parlementarisme, de recettes et de dépenses aujourd'hui supérieures à celles de l'Etat.
Je remercie, une fois encore, votre Haute Assemblée de son engagement en faveur des évolutions que le Gouvernement a proposées pour renforcer le rôle du Parlement dans le cadre de la réforme de notre assurance maladie, engagement manifesté tant lors de la première lecture que par les travaux de la commission des affaires sociales pour préparer cette deuxième lecture et par la qualité de la discussion générale qui s'achève. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Question préalable
Mme la présidente. Je suis saisie, par Mme Demontes et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, d'une motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 3 du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi organique, modifié par l'Assemblée nationale, relatif aux lois de financement de la sécurité sociale (n° 391, 2004-2005).
Je rappelle que, en application de l'article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Gisèle Printz, auteur de la motion.
Mme Gisèle Printz. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons aujourd'hui la deuxième lecture du projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale.
Ce projet de loi organique est le dernier élément du triptyque cohérent et complémentaire constitué par la réforme des retraites et par celle de l'assurance maladie. Il est effectivement, monsieur le ministre, un texte clef pour la conduite de la politique de sécurité sociale.
Cette deuxième lecture intervient alors que nous célébrons le soixantième anniversaire de la création de la sécurité sociale, dont les bases avaient été jetées par le Conseil national de la Résistance.
Ce système, qui met en oeuvre le principe de la solidarité nationale et intergénérationnelle, constitue le fondement le plus important de notre pacte républicain, et nos concitoyens y sont attachés « comme à la prunelle de leurs yeux ».
La première lecture - c'est encore dans toutes les mémoires - avait donné lieu à un cas de conscience au sein de la majorité puisque le président de la commission des affaires sociales avait retiré l'ensemble des amendements de la commission à la suite du refus du Gouvernement et de la commission des finances d'accepter une disposition tendant à instaurer, comme le prévoyait déjà la loi Veil de 1994, la compensation intégrale des exonérations de cotisations sociales. Les élus socialistes, quant à eux, restent sur la position critique qui fut la leur lors de la première lecture.
Malgré les aspirations à une plus grande transparence qui se sont faites jour lors de l'examen de ce texte par l'Assemblée nationale et malgré les quelques améliorations de forme qui ont été apportées, nous n'avons pas trouvé, à la différence de M. le rapporteur, de motif de satisfaction déterminant.
Une décennie après la loi organique de 1996, et au regard des atouts et des faiblesses avérés, il était nécessaire de procéder au renforcement d'un plus strict contrôle parlementaire, d'une réelle transparence des lois de sécurité sociale, bref d'une nouvelle gouvernance.
Ces objectifs sont ceux que le Gouvernement affiche. Pourtant, ce projet de loi organique n'est pas à la hauteur des enjeux qui ont été fixés, ni même de l'engagement parlementaire en faveur du contrôle parlementaire, de la transparence et de l'instauration d'une nouvelle gouvernance.
Cette loi organique, nous disait-on, devait être à la sécurité sociale ce qu'avait été la LOLF, la loi organique relative aux lois de finances, au budget de l'Etat : elle permettrait de mieux organiser le débat démocratique et politique et d'améliorer notoirement le pilotage de notre système de protection sociale. Or il n'en est rien, ou si peu.
Le troisième volet de ce projet de loi organique, relatif à la protection sociale de nos concitoyens, est présenté dans un contexte économique et social plus qu'inquiétant, et avec une précipitation qui lui sied mal. N'aurait-il pas fallu engager une réelle négociation avec les partenaires sociaux, voire avec l'ensemble des acteurs du système ?
L'adoption d'une centaine d'amendements par l'Assemblée nationale ne légitime-t-elle pas le fait que nous procédions à une réelle concertation ? Faut-il encore une fois, comme pour la réforme des retraites ou celle de l'assurance maladie, que le Gouvernement et sa majorité demeurent sourds aux attentes et aux besoins de nos concitoyens ? Et n'est-il pas grotesque de voir un gouvernement organiser sciemment la faillite de notre système de sécurité sociale tout en demandant une gestion plus transparente, plus rigoureuse et plus efficace ?
Depuis 2002, nous assistons à un dérapage financier sans précédent : l'ensemble des branches sont déficitaires et les réformes de l'assurance maladie et des retraites n'y ont rien changé. Il suffit de songer au parcours de soins toujours inopérant, aux difficultés immenses que les établissements de santé connaissent pour mettre en oeuvre la réforme de la tarification à l'activité, la T2A, ou bien encore au retard incompréhensible pris pour la publication des décrets d'application pour se convaincre du bien-fondé de notre demande. Dès lors, comment y voir « des réformes décisives pour le redressement du pays » ?
A nos yeux, déficit abyssal et régression des droits des assurés sociaux n'ont jamais été et ne seront jamais l'illustration d'un quelconque redressement.
Les travaux de l'Assemblée nationale ont modifié l'architecture des lois de financement. Ces dernières devront être présentées en quatre parties distinctes, la première portant sur le règlement de l'année n-1, la deuxième sur la rectification de la loi de financement de l'année n et les deux dernières correspondant respectivement aux prévisions de recettes et de dépenses de l'année à venir.
Par ailleurs, compte tenu du fait que les amendements relatifs au droit d'information du Parlement que nous avions déposés en première lecture ont été satisfaits et que les missions d'assistance et de certification des comptes par la Cour des comptes sont précisées, la question de la déclinaison concrète du principe de la compensation intégrale des exonérations de cotisation demeure crûment posée.
En effet, les annonces faites par le Premier ministre en matière de politique de l'emploi nous laissent craindre que le Gouvernement ne raréfie, une fois encore, les ressources financières de la sécurité sociale.
Alors que nous comptabilisons d'ores et déjà des exonérations pour un montant de plus de 17 milliards d'euros, auxquels s'ajoutent les 2 milliards dus à la sécurité sociale, qu'en sera-t-il du poids des nouvelles exonérations de cotisations sociales patronales accordées sur le SMIC, sur les contrats d'avenir ou sur les « contrats nouvelle embauche » ?
M. Jean-Pierre Godefroy. Très bien !
Mme Gisèle Printz. L'Etat continuera-t-il à faire financer ses échecs en matière de politique de l'emploi en ponctionnant la protection sociale nationale ? Cela est inacceptable, et M. le rapporteur semble d'ailleurs également en convenir.
Ainsi, il est mis fin au temps où certains - ils se reconnaîtront... - reprochaient la création du FOREC, parlaient de détournement de fonds sociaux, alors même que des centaines de milliers d'emplois étaient créés par le gouvernement Jospin.
Qu'en est-il aujourd'hui ? N'est-ce pas cette logique, si violemment décriée hier par la majorité, qui aujourd'hui est à l'oeuvre ?
Certes, avec la destruction de 40 000 emplois et une hausse du nombre de demandeurs d'emplois de 180 000, les résultats sont bien distincts, et nos concitoyens ne s'y trompent pas !
Que penser du caractère sincère des prochains projets de loi de financement de la sécurité sociale lorsque, au détour d'un article de presse, les parlementaires découvrent que, selon les experts de l'IGAS, l'inspection générale des affaires sociales, et de l'IGF, l'inspection générale des finances, le coût du renouvellement du parc informatique de la sécurité sociale devrait être supérieur de moitié à ce qu'avait annoncé, quelques jours auparavant, le nouveau directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie ?
En effet, 1 milliard d'euros sur quatre ans ne sera définitivement jamais égal à 1,5 milliard d'euros, et les 200 millions d'économies escomptés risquent fort de se métamorphoser en un déficit de 300 millions d'euros ! Voilà de quoi légitimement nous inquiéter.
Enfin, qu'en est-il du déficit abyssal de la sécurité sociale ?
Certes, le comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie estime, dans son dernier rapport, que l'objectif des dépenses d'assurance maladie pourrait être respecté, mais il ajoute que, si la croissance des remboursements de soins de ville reste limitée à 3 % au cours du premier trimestre de 2005 et si un certain ralentissement est constaté en matière de remboursement des indemnités journalières et des médicaments, ce cercle vertueux risque d'être mis à mal.
En outre, l'inconséquence avec laquelle la politique économique est menée depuis trois ans a fait considérablement augmenter le nombre de chômeurs et de travailleurs précaires. Elle s'illustre aussi par un ralentissement économique qui devrait se solder par une augmentation de la masse salariale de 3 % et non pas de 4 %, comme prévu par le gouvernement précédent. De fait, cela devrait entraîner une minoration des recettes de l'ordre de 1 milliard à 1,5 milliard d'euros.
S'y ajoutent les effets produits par la convention médicale qui a été signée en janvier dernier et qui prévoit des revalorisations d'honoraires, alors même que s'expriment de fortes inquiétudes quant aux risques financiers qui pèsent sur les établissements de santé du fait que les budgets hospitaliers ont été fondés sur des objectifs fixés en 2004 et qui sont déjà dépassés.
Enfin, s'agissant de la branche famille, il faut s'attendre à un déficit de 1 milliard d'euros au moins, alors que le Gouvernement avait annoncé un retour à l'équilibre.
Dans la même logique, et bien que les comptes de la Caisse d'amortissement de la dette sociale ainsi que ceux du Fonds de réserve des retraites soient désormais intégrés dans la loi de financement de la sécurité sociale, force est de constater que, depuis la loi du 30 juin 2004, la dette sociale est organisée « à tombeau ouvert ». Et ce n'est pas ce texte qui octroiera au Parlement davantage de pouvoir pour contrôler les dépenses de l'assurance maladie ou l'ONDAM qui, malgré les dénégations gouvernementales, n'est que l'illustration d'une stricte maîtrise comptable et non pas médicalisée.
En outre, la transparence de nos comptes demeurera insuffisante, et la possibilité donnée au Gouvernement de procéder par ordonnances dès lors que des dérapages significatifs des comptes sociaux auront été observés renforce un peu plus cette conviction.
Ce texte relève de l'opération de ravalement de façade. Il n'offre aucune perspective crédible, il entretient l'opacité et conforte l'absence totale de pilotage. Nous le savons, vous le savez, et les débats de l'Assemblée nationale en témoignent : la majorité et ce gouvernement des Cent-Jours manquent d'ambition.
En lieu et place d'une réorientation politique indispensable, le cap libéral des gouvernements Raffarin est maintenu. Il est évident que la question de la maîtrise médicalisée n'est plus à l'ordre du jour. Il s'agit bel et bien de l'instauration d'une véritable maîtrise comptable. Cette politique fondée sur une stricte orthodoxie financière exclut toute prise en compte des besoins - de plus en plus importants - de nos concitoyens. Elle mène à l'instauration d'une médecine à deux vitesses qui est inacceptable et dangereuse pour la cohésion sociale.
Dans ce contexte grave, il eût fallu procéder à une grande concertation avec les partenaires sociaux et tous les acteurs de notre sécurité sociale. Par cet indispensable préalable, nous aurions pu effectivement oeuvrer en faveur de l'instauration d'une réelle transparence des comptes sociaux, d'un véritable contrôle du Parlement et des instruments certifiant la sincérité, bref d'une nouvelle gouvernance.
Mais le Gouvernement ne semble pas capable de mesurer l'importance des enjeux. Il organise et pérennise cette politique de l'échec et de la régression sociale. Il nie les exigences d'une politique rationnelle de santé publique aux objectifs annoncés.
C'est pour l'ensemble de ces raisons que nous considérons qu'il y a tout lieu de retirer ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Les initiés à la procédure parlementaire que vous êtes, mes chers collègues, auront compris les raisons pour lesquelles le groupe socialiste a usé de cette procédure.
Les éléments d'opposition qui ont été avancés par Mme Printz ont prouvé qu'il s'agissait non pas de prendre une revanche, mais du moins de développer à nouveau toutes les critiques qui ont déjà été émises lors de l'examen du projet de loi relatif à l'assurance maladie. Nous sommes donc très largement éloignés et de l'esprit et de la lettre du projet de loi organique qui nous est soumis.
En la matière, la commission des affaires sociales n'a pas été dupe, et je pense que vous ne l'êtes pas non plus, mes chers collègues.
C'est la raison pour laquelle la commission vous propose de rejeter la motion tendant à opposer la question préalable qui vient d'être défendue avec beaucoup d'ardeur et de passion par Mme Printz.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien!
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement partage entièrement l'avis émis par M. le rapporteur.
Nous avons souligné l'attachement de tous les Français à la sécurité sociale issue du programme proposé par le Conseil national de la Résistance au lendemain de la Libération ; nous en fêterons d'ailleurs, comme je l'ai déjà indiqué tout à l'heure, le soixantième anniversaire cette année.
Le projet de loi organique est, à l'évidence, à la hauteur des enjeux qui sont fixés, et la motion tendant à opposer la question préalable ne peut pas dissuader la Haute Assemblée d'en discuter. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme la présidente. Je mets aux voix la motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi organique.
En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 183 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Demande de renvoi à la commission
Mme la présidente. Je suis saisie, par MM. Fischer, Muzeau et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, d'une motion n° 35, tendant au renvoi à la commission du projet de loi organique.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des affaires sociales le projet de loi organique, modifié par l'Assemblée nationale, relatif aux lois de financement de la sécurité sociale. (n° 391, 2004-2005).
Je rappelle que, en application de l'article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
Aucune explication de vote n'est admise.
La parole est à M. François Autain, auteur de la motion.
M. François Autain. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ne pouvons pas dire que les conditions dans lesquelles nous travaillons soient bonnes. Elles sont même difficilement acceptables et elles nuisent à la qualité et à la sérénité de nos débats. Il en est ainsi depuis déjà quelques années et, si ce fut particulièrement le cas l'année dernière lors de l'examen du projet de loi relatif à l'assurance maladie, c'est pis encore cette année.
Jugez-en plutôt, monsieur le ministre, même si vous n'avez pas encore été parlementaire : lorsque nous avons commencé à examiner ce texte en commission, il n'avait pas encore été voté à l'Assemblée nationale. Hier, il n'était toujours pas disponible à la distribution, ce qui a empêché la commission des affaires sociales de se réunir. Cet après-midi, cette dernière n'a disposé que d'un petit quart d'heure pour examiner les amendements,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Quelques amendements !
M. François Autain. ... ce qui, naturellement, n'a pas été suffisant, si bien qu'il lui faudra poursuivre cet examen ce soir, pendant la suspension de séance.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Oui !
M. Guy Fischer. Nous sacrifierons le repas !
M. François Autain. Monsieur le ministre, un jeune parlementaire qui ne serait pas habitué à ces pratiques ne comprendrait pas que des textes de cette importance - celui que nous examinons porte sur un budget de plus de 350 milliards d'euros ! - puissent être élaborés dans des conditions aussi peu satisfaisantes.
Nous savons tous que, au regard de la situation pour le moins inconfortable dans laquelle il se trouve, le nouveau gouvernement cherche à expédier tous les dossiers législatifs en cours. D'ailleurs, monsieur le ministre, vous avez vous-même déclaré très récemment que le Gouvernement souhaitait que la deuxième lecture de ce projet de loi organique intervienne « très rapidement ». Vous en avez expliqué les raisons, et je les comprends. Mais sans doute aurait-il fallu s'y prendre plus tôt et ne pas attendre aussi longtemps avant de proposer cette réforme !
Quels que soient les motifs que vous invoquez pour justifier cette précipitation, monsieur le ministre, l'avenir de notre protection sociale aurait mérité que l'on s'y attarde un peu plus.
Chacun aura compris l'objectif du Gouvernement avec ce calendrier précipité : son souci premier est d'esquiver le débat, comme si la représentation nationale constituait pour lui une gêne, au moment où surviennent les premières échéances douloureuses du processus qu'il a engagé.
Déjà, le comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie s'est montré plus que réservé sur l'évolution des mois à venir, et le Haut Conseil de l'assurance maladie a fait part de ses craintes sur les effets paradoxaux du parcours coordonné de soins, qui, du moins d'ici à la fin de l'année, aggravera les inégalités. En effet, le Gouvernement persiste à ne pas publier les deux décrets indispensables au remboursement des patients qui suivront ce parcours. Et, aujourd'hui même, le comité des comptes de la sécurité sociale a posé un diagnostic très sombre sur les prévisions pour 2005.
Mais le pire reste à venir ! Il n'est qu'à citer la crise budgétaire sans précédent que traverse l'hôpital public. Certes, vous l'avez délibérément niée lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 en limitant de manière irréaliste le taux de l'ONDAM, mais vous devrez en assumer la pleine responsabilité et vous en expliquer à la fin de l'année, et peut-être même dès aujourd'hui, si vous le souhaitez, monsieur le ministre.
Vous préférez parler de votre réforme avant qu'un bilan complet ne puisse vous être opposé, multiplier les déclarations d'autosatisfaction et avancer des arguments chiffrés sans véritable objet. C'est bien compréhensible, monsieur le ministre, compte tenu du bilan à venir.
Toutefois, nous ne sommes pas dupes ! Nous trouvons même pour le moins étonnant de voir ce gouvernement s'attacher aujourd'hui à proposer des dispositions pour améliorer la gestion de la sécurité sociale, alors même qu'il organise sa faillite par les déficits dans lesquels il la laisse se débattre, par la dette qui enfle et menace notre avenir social. Avec la réforme de l'assurance maladie, le Gouvernement a décidé non seulement de transformer en dette sociale les déficits accumulés depuis son arrivée au pouvoir - ce qui est une première ! -, mais aussi - c'est également inédit - d'anticiper les déficits à venir en les transférant à la CADES.
En réalité, l'enjeu réel du débat relatif au financement de la sécurité sociale est celui de la compensation par l'Etat de l'exonération des charges consécutives à la mise en oeuvre des différentes politiques, notamment en matière d'emploi. Or il est pour le moins paradoxal que le Gouvernement prétende assumer la sanctuarisation des finances de la sécurité sociale alors même qu'il s'apprête à s'en affranchir en grande partie - par exemple dans le cadre des contrats d'avenir prévus dans le projet de loi relatif au développement des services à la personne et à diverses mesures en faveur de la cohésion sociale -, en ne restituant pas à la sécurité sociale les recettes qui lui sont soustraites.
Pourtant, en première lecture, nous avions formulé plusieurs propositions qui, si elles étaient adoptées, changeraient fortement la donne et feraient reculer la logique d'étatisation qui est en marche depuis trop longtemps.
Ainsi, le projet de loi organique devrait, selon nous, prévoir une négociation interprofessionnelle obligatoire entre les organisations syndicales et les organisations patronales portant sur le financement de la sécurité sociale et concernant à la fois les structures et les taux de prélèvement affectés à la sécurité sociale et aux fonds de financement.
Une élaboration conjointe des projets de loi de financement de la sécurité sociale serait, en effet, un gage de démocratie sociale. Compte tenu du rôle qui a été confié aux conseils d'administration des différentes caisses de sécurité sociale - désormais appelés conseils d'orientation -, force est de constater que nous sommes loin du compte ! Il conviendrait donc que les dispositifs de gouvernance soient rééquilibrés au profit des conseils d'administration des caisses d'assurance maladie, en particulier en renforçant leurs prérogatives et en asseyant leur légitimité par le retour à l'élection des représentants des assurés sociaux et des allocataires. Pourquoi ce qui est vrai pour la mutualité sociale agricole - tout du moins dans l'esprit - ne le serait-il pas pour la Caisse nationale d'assurance maladie ?
S'agissant des ressources de la protection sociale, ce projet de loi organique devrait clairement s'écarter des politiques de fiscalisation des ressources, qui sont aujourd'hui largement développées et se traduisent par un abaissement des garanties collectives.
C'est pourquoi il est grand temps d'envisager une réforme du financement de la sécurité sociale, qui tende notamment à la modulation des cotisations versées par l'entreprise et favorise la création d'emplois et de richesses. Elle s'inscrirait ainsi à l'opposé des stratégies fondées sur la recherche de la rentabilité financière à court terme, qui entraînent des dégâts sociaux à l'origine, dans une large mesure, de l'insuffisance des recettes de notre protection sociale. En effet, nous assistons à l'explosion de la précarité et du nombre de travailleurs pauvres !
L'objet d'un tel projet de loi organique devrait donc être, selon nous, le démantèlement des mesures d'exonération, qui coûtent si cher à la sécurité sociale.
Le Gouvernement n'a pas tenu son engagement d'inscrire dans le projet de loi organique le principe de la compensation intégrale des exonérations. Nous nous en inquiétons : nous dénonçons ce renoncement et plaidons de nouveau pour une réelle réforme du financement de la sécurité sociale qui permette de dégager des ressources supplémentaires pour faire face aux besoins de santé et de retraite, dont nous savons tous qu'ils iront grandissant.
Ce sont de tels paramètres qu'une réforme des lois de financement de la sécurité sociale devrait prendre en compte, et non uniquement des impératifs comptables et budgétaires. Au lieu de cela, le texte que vous nous soumettez aujourd'hui, monsieur le ministre, et qui n'est que le résultat d'un débat chaotique, se révèle d'une obscure complexité.
Un véritable débat démocratique sur les enjeux de notre protection sociale aurait été plus que nécessaire. En effet, réformer la nomenclature des lois de financement de la sécurité sociale, c'est revenir sur dix années de pratique qui ont montré, par bien des aspects, leurs limites et leurs effets pervers.
Il faut en effet revenir aux lois Juppé de 1996 pour juger de l'opportunité d'examiner le texte en discussion et apprécier son efficacité. A cet égard, il nous paraît essentiel de rappeler les termes des débats de l'époque et la réalité qui a suivi pour mieux comprendre l'inefficacité des lois de financement de la sécurité sociale. Souvenons-nous que les finances de la sécurité sociale suscitaient déjà des inquiétudes et que les mesures qui s'imposaient ont été ignorées !
A cette époque, pour répondre à la crise de la sécurité sociale, le gouvernement d'alors avait lancé une politique de protection sociale et de santé fondée sur deux piliers : la maîtrise médicalisée et la fixation d'objectifs de dépenses. Pour ce faire, il voulait s'appuyer sur trois axes : « transparence, responsabilité, démocratie », selon les termes qu'avait alors employés le ministre du travail et des affaires sociales, M. Jacques Barrot, lors de son intervention à l'Assemblée nationale, le 24 avril 1996. Vous le voyez, j'ai de bonnes références, monsieur le ministre !
Or, près de dix ans plus tard, le constat est plus qu'amer : ces trois axes, loin de préserver le système, l'ont entraîné vers son déclin.
Ainsi, en matière de transparence, les critiques à faire sont très nombreuses. Je ne prendrai pourtant, ici, que deux exemples.
J'évoquerai, tout d'abord, la structure de la répartition de l'ONDAM, jusqu'à présent totalement opaque et qui ne sera pas rendue plus claire par ce projet de loi - au contraire ! -puisque la définition et la gestion des sous-objectifs de l'ONDAM dépendront désormais du tout-puissant directeur de l'UNCAM, l'Union nationale des caisses d'assurance maladie.
Je signalerai, ensuite, que, même si, dans ce texte de loi, est prévue une consultation des commissions- je veux bien le reconnaître - il n'empêche que c'est le directeur de l'UNCAM, sous le contrôle, je l'imagine, du Gouvernement - ce dernier n'aura pas de problèmes avec le directeur actuel ! - qui fixe les sous-enveloppes, et ce sans possibilité de fongibilité entre ces enveloppes, comme nous l'avons déjà fait remarquer à plusieurs reprises tout à l'heure.
J'en viens au deuxième axe, relatif à la responsabilité. Les dernières années ont montré sur qui elle reposait principalement : exclusivement sur les assurés sociaux, rendus coupables du déficit chronique de la sécurité sociale. N'avons-nous pas entendu, tout au long de l'élaboration de la réforme de l'assurance maladie, les termes de « fraude », de « surconsommation de soins » ou encore de « nomadisme médical », alors que - on le sait - toutes ces dérives ne contribuent que pour une part infime au déficit de la sécurité sociale ?
Le Gouvernement n'a fait, pourtant, que multiplier les mesures réelles et symboliques pour condamner les assurés sociaux : que ce soit le forfait d'un euro, l'insertion d'une photo d'identité sur la carte Vitale, ou encore l'envoi régulier d'un relevé des dépenses de santé propre à chaque assuré social, toute ces mesures vexatoires n'ont aucun effet et ne tendent qu'à mieux faire porter aux citoyens, en les culpabilisant, la responsabilité de la situation désastreuse de la sécurité sociale.
En revanche, on n'a jamais évoqué la responsabilité des gouvernements qui ont multiplié les mesures grevant les comptes de la protection sociale par des exonérations de cotisations sociales, ni la responsabilité de ceux qui ont préféré augmenter les cotisations à la charge des ménages plutôt que d'actionner les recettes sur la valeur liée au travail.
J'aborde, enfin, le dernier axe : comment peut-on décemment parler de démocratie à propos d'une étatisation de l'assurance maladie qui a spolié les salariés de leur droit de vote ? Les textes de 1996 visaient à organiser une réforme structurelle des caisses en accordant un rôle majeur aux gouvernements en matière de nomination des directeurs et en instaurant des taux de remboursement négociés et pilotés par ces mêmes gouvernements.
Ceux qui ont mis en place toutes ces mesures ont oublié que la sécurité sociale est le bien commun des assurés ! Ce sont eux qui la financent, par les cotisations sociales ; c'est donc à eux que doit revenir la gestion de la part des richesses qu'ils créent et qu'ils réservent à la sécurité sociale.
Cependant, aux termes des ordonnances de 1996, qui tendaient à conférer un rôle pivot aux gouvernements, a été introduit un nouveau paritarisme donnant une place prépondérante au patronat. Comment, alors, décemment parler de « démocratie sanitaire et sociale » ? Celle-ci nécessite, en effet, au minimum, une co-élaboration des projets de financement de la sécurité sociale par les conseils d'administration des caisses nationales de sécurité sociale.
Or on ne trouve nulle trace de cela dans le présent texte, qui va encore plus loin dans cette logique d'étatisation et de déni de la démocratie sociale. En effet, comme nous l'avons déjà dit, ce projet de loi organique tend non seulement à conférer au directeur de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie des « super pouvoirs », mais, de plus, le contrôle parlementaire de la sécurité sociale devra être accru du fait de l'abandon du caractère annuel de l'examen par le Parlement des projets de loi de financement de la sécurité sociale.
Enfin, un amendement de la majorité, à l'Assemblée nationale, est venu donner au Gouvernement le droit de légiférer par ordonnances en ce qui concerne les dispositions relatives aux recettes, aux dépenses et à l'équilibre général pour l'année à venir. Mais je crois savoir que le Gouvernement n'y était pas très favorable : si tel était bien le cas, nous ne pourrions que nous en féliciter.
Nous l'avons vu, ce projet de loi ne fait qu'aller dans le sens des lois de financement de la sécurité sociale telles qu'elle existent depuis près de dix ans. C'est pourtant d'une réelle rupture avec ce schéma que nous avons besoin aujourd'hui ! En cette période d'incertitude économique, la qualité de notre système de sécurité sociale est déterminante pour renforcer et consolider le lien social, prévenir les exclusions et assurer, pour chacun, le plein exercice de ses droits.
Voilà donc où cette politique de gestion comptable de la sécurité sociale nous a menés ! On a fixé des objectifs et, dans le même temps, multiplié les sanctions à l'égard de ceux qui ne s'y conformaient pas. En réalité, ce sont les dépenses de santé qui en ont fait les frais et qui ont été sévèrement limitées.
Pourtant, ces différentes lois annuelles, à en croire ceux qui les portaient, devaient donner une véritable orientation au financement de la sécurité sociale et en préserver la spécificité. Il n'en aura rien été.
Compte tenu de ces différentes raisons, il nous paraît donc essentiel que ce texte retourne devant la commission, afin que nous puissions l'examiner en pleine sérénité et qu'ensuite se déroule le débat qu'il mérite. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. M. Autain n'a pas résisté à la tentation à laquelle avait déjà cédé Mme Printz, à savoir user de procédures pour pouvoir tenir des propos qui eussent été davantage à leur place dans la discussion générale.
M. Guy Fischer. Mais non !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Cependant, il a quand même fait valoir le trop court délai dont il avait disposé pour examiner ce texte.
M. Guy Fischer. Est-ce faux ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je me contenterai de lui signaler, au cas où il l'aurait ignoré - peut-être, d'ailleurs, devrais-je chercher à améliorer la circulation de l'information avec les membres de son groupe de manière qu'elle parvienne jusqu'à lui - que, le texte adopté par l'Assemblée nationale étant disponible depuis le 12 mai dernier, soit depuis plus d'un mois, il aurait pu l'étudier à loisir, et qu'il ne me semble par conséquent pas nécessaire de le renvoyer devant la commission.
M. Guy Fischer. On a fait campagne !
M. Robert Bret. Le référendum nous a pris du temps !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Quant au rapport de la commission, il est à votre disposition sur le site Internet du Sénat depuis jeudi dernier.
Chacun, ici, aura donc bien compris que cette demande de renvoi en commission n'était, en réalité, qu'un prétexte pour renouveler, en faisant fi des redondances, des critiques déjà exprimées à l'occasion de l'examen du texte sur l'assurance maladie comme lors de la première lecture du présent projet de loi.
C'est pourquoi la commission des affaires sociales n'a pas jugé opportun d'accéder à la demande de M. Autain et des membres du groupe CRC : j'en suis désolé, monsieur le sénateur, mais ce texte ne sera pas renvoyé devant la commission !
M. Guy Fischer. On a l'habitude !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Il va sans dire que je partage entièrement l'avis exprimé par M. le rapporteur : le texte adopté par l'Assemblée nationale était disponible depuis le 12 mai. De plus, chacun convient qu'il est utile que ce projet de loi organique soit adopté avant que le Gouvernement ne dépose le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006. Par conséquent, je remercie le Sénat d'en avoir inscrit à son ordre du jour d'aujourd'hui la deuxième lecture.
Le Gouvernement est donc défavorable à la demande de renvoi à la commission formulée par M. Autain.
Mme la présidente. Je mets aux voix la motion n° 35, tendant au renvoi à la commission du projet de loi organique.
Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 184 :
Nombre de votants | 328 |
Nombre de suffrages exprimés | 328 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 165 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 208 |
Le Sénat n'a pas adopté.
En conséquence, nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.
Articles additionnels avant l'article 1er
Mme la présidente. L'amendement n° 36, présenté par Mmes Demontes et Alquier, MM. Cazeau et Godefroy, Mme Printz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I- Les articles 2, 3, 4, 5 et 6 de la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées sont abrogés.
II- Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application de cette disposition sont compensées à due concurrence par le relèvement des tarifs prévus à l'article 885 U du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Cet amendement vise à supprimer les mesures concernant la journée de solidarité contenues dans la loi relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
En effet, l'institution de cette journée, seule réponse du Gouvernement après le drame de la canicule de l'été 2003, avait été adoptée dans la précipitation et sans concertation avec les partenaires sociaux : ni les organisations syndicales, salariales ou patronales, ni les grandes associations qui interviennent dans le domaine de la dépendance, ni même les organismes de sécurité sociale n'avaient été consultés.
Il s'agissait pourtant de compléter les interventions des branches maladie et vieillesse de la sécurité sociale sur le terrain de l'accompagnement social des personnes âgées ou handicapées ! De surcroît, les dispositions préconisées portaient une atteinte grave au droit du travail en légalisant le travail salarié non rémunéré.
Rappelons également que divers organismes, dont, notamment la CNAM ou la CNAV, s'étaient élevés très vivement contre les dangers d'un texte qui, selon leurs propres termes, « portait en germe une rupture du pacte de solidarité », puisque s'engageant « vers une partition insupportable dans la prise en charge des soins ».
Certaines associations de personnes handicapées avaient dénoncé le principe de cette journée et fait valoir que leurs membres et leurs familles refuseraient d'être tributaires de la charité publique obligatoire organisée par la suppression d'un jour férié.
Aujourd'hui, la suppression d'un jour férié pour financer la politique en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées apparaît toujours tout à la fois insuffisante et stigmatisante pour les bénéficiaires - elle est, d'ailleurs, symptomatique de l'absence de vision à long terme des problématiques du vieillissement et de la dépendance - et injuste et autoritaire pour les personnes mises à contribution.
Comment pourrait-il en être autrement, dès lors que son mode de financement n'est pas universel et que seuls certains Français, certains revenus, sont mis à contribution ?
Qu'est-ce donc que cette solidarité qui repose principalement sur une inégalité entre les travailleurs salariés et les autres ?
Par ailleurs, la première application de ce dispositif - on ne peut l'ignorer, et chacun s'en souvient - s'est accompagnée d'une forte mobilisation de la population à son encontre, et ce malgré la politique de culpabilisation menée par le Gouvernement.
Déjà, au lendemain de la canicule meurtrière, le Gouvernement, de retour de congés, n'avait rien trouvé de mieux à faire que de montrer du doigt le manque de solidarité intergénérationnelle de la population. Récemment, pour susciter l'adhésion à ce premier lundi de Pentecôte travaillé, il s'est lancé dans une vaste campagne de publicité. En termes de solidarité, on peut se demander s'il n'aurait pas été préférable de dépenser ces fonds promotionnels pour les personnes dépendantes. Le Gouvernement ne devrait-il pas, en la matière, montrer l'exemple ?
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous vous demandons d'adopter cet amendement et de reposer devant le Parlement la question du mode de financement de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. La commission émet un avis défavorable. Chacun comprend qu'une telle disposition n'a pas sa place dans le texte de la loi organique. Vous essayez de revenir à la charge, et toutes les occasions sont bonnes.
M. Jean-Pierre Godefroy. Il faudra bien y revenir !
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Cet amendement est sans rapport avec l'objet du texte : avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Nous soutenons cet amendement, car il fait obligation au Gouvernement de répondre au problème du jour férié travaillé. D'ailleurs, le précédent Premier ministre s'était engagé à trouver une solution. Nous attendons un véritable débat parlementaire. Si vous envisagez de laisser les choses en l'état, il faut le dire tout de suite, monsieur le ministre !
Vous vous rendez bien compte que cette journée de solidarité a suscité un mécontentement très vif, de la colère, et a généré un grand désordre.
Les organisations syndicales ont constaté qu'elle avait permis d'allonger la durée du travail. Je rappelle que c'est en effet par ce biais que, pour la première fois depuis longtemps, la durée légale du travail a été accrue, puisqu'elle est passée de 1 600 heures à 1 607 heures.
Pour sa part, le groupe communiste républicain et citoyen avait proposé - et cela reste d'actualité - la création d'une branche au sein de la sécurité sociale, car les conseils d'administration, qu'il s'agisse de la branche vieillesse ou de la branche assurance maladie, avaient vivement réagi par un vote négatif.
Ce qui suscite un mécontentement très vif, que vous ne prenez pas en compte à sa juste valeur, c'est l'inégalité de traitement ainsi créée. En effet, cette mesure est financée essentiellement par les salariés. Ce n'est pas parce que l'on a augmenté un peu la C3S pour les entreprises que la mesure apparaît égalitaire !
Aussi, nous demandons la suppression de ce jour férié travaillé et de la CNSA. Nous demandons également un nouveau débat sur l'APA, l'allocation personnalisée d'autonomie, d'autant que les conseils généraux eux-mêmes poseront à leur tour le problème du financement de cette allocation, puisque la participation de l'Etat, qui aurait dû s'élever à 50 %, est de l'ordre de 37 %. Un problème va donc se poser, comme pour la compensation du RMI.
Monsieur le rapporteur, loin d'être hors sujet, nous sommes au coeur du problème. Il était de notre devoir d'évoquer ce point aujourd'hui.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Et vous ne vous en êtes pas privés !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Vous me répondez, monsieur le ministre, que cet amendement est sans rapport avec l'objet du texte ; nous pourrions en débattre. Cette question est en tout cas d'actualité, même si des événements se sont produits depuis qui ont peut-être fait que cette question a pris plus d'importance.
Le problème du financement de la CNSA demeure. En effet, les contributions continuent à être versées. Permettront-elles de financer la dépendance tel que c'était prévu ? Non, et nous le savons bien. Il sera donc nécessaire de débattre à nouveau et prochainement de cette question.
Puisque vous nous avez dit que ce sujet n'est pas d'actualité aujourd'hui, pouvez-vous nous dire quand il le sera ? Dans les « cent jours », qui ne sont d'ailleurs plus que quatre-vingts et quelque ? Ou bien, malgré ce qu'ont dit les Français à ce moment-là, malgré l'échec patent de cette mesure, envisagez-vous de persister jusqu'à l'année prochaine, pour que cela recommence dans les mêmes conditions ? Permettez-moi de vous le dire : cela ne serait ni responsable ni raisonnable !
Mme la présidente. L'amendement n° 37, présenté par Mmes Demontes et Alquier, MM. Cazeau et Godefroy, Mme Printz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'Etat compense intégralement les exonérations ou les réductions de cotisations ou contributions de sécurité sociale affectées aux régimes obligatoires de base ou aux organismes concourant à leur financement ainsi que les réductions de l'assiette ou les abattements sur l'assiette de ces cotisations ou contributions.
II. Le montant de ces compensations est retracé dans les lois de financement de la sécurité sociale.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le rapporteur, peut-être allons-nous réussir à trouver un terrain d'entente sur le présent amendement.
La loi du 25 juillet 1994, dite loi Veil, stipulait dans son titre III que « toute mesure d'exonération totale ou partielle de cotisations de sécurité sociale instituée à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale donne lieu à compensation intégrale au régime concerné par le budget de l'Etat pendant toute la durée de son application ». Cette compensation s'effectuait sans préjudice des compensations appliquées à la date d'entrée en vigueur de ladite loi.
Cet amendement tend donc à revenir à l'esprit de ce texte, qui n'est plus en vigueur depuis le 17 août dernier. Il s'agit de permettre à l'Etat de respecter ses engagements.
Lors des débats sur la réforme de l'assurance maladie, M. Douste-Blazy, alors ministre des affaires sociales et de la santé, avait pris l'engagement, devant notre assemblée, de donner une valeur quasi constitutionnelle à la compensation intégrale des exonérations de cotisations décidées par l'Etat dans le cadre d'une loi ordinaire. Il avait déclaré, et nous l'avons rappelé au cours de la discussion générale: « Ce projet de loi organique contiendra des mesures de nature à garantir l'autonomie financière de la sécurité sociale, comme le Sénat en a déjà exprimé le souhait. Il doit permettre notamment de donner une valeur juridique supérieure aux mesures prévues à l'article 39 de la présente loi et à celles de la loi de 1994 de Mme Veil. Ainsi, l'autonomie financière de la sécurité sociale aurait une valeur quasiment constitutionnelle. »
Certains de nos collègues de la majorité - et notre rapporteur de la commission des affaires sociales en est un des plus illustres représentants -, connaissant bien le sujet, mettaient un point d'honneur, comme nous le faisons actuellement, à dénoncer le fait que certains financements qui auraient dû être versés au profit de la sécurité sociale allaient à l'Etat.
Depuis trois ans, la situation n'a malheureusement pas changé. Qui plus est, l'Etat comptabilise un arriéré de plus de 2 milliards d'euros à l'endroit de la sécurité sociale. Or l'Etat devrait être exemplaire !
En tout état de cause, il s'agit bien de ne pas renvoyer ces opérations à une des annexes que compte ce projet de loi organique. Il est indispensable que l'Etat assume ses décisions, au moins devant la représentation nationale.
Plus concrètement, il me semble que nous sommes en droit de nous interroger sur les incidences financières sur la sécurité sociale des contrats d'avenir, des contrats de service à la personne, des contrats de nouvelle embauche de M. Borloo.
Il me semble que procéder ainsi est un impératif de tout premier ordre. Comme je l'ai dit voilà quelques instants, le Gouvernement doit donner l'exemple.
Ce gouvernement ne peut, comme son prédécesseur, exiger, par le biais de l'instauration d'un jour férié travaillé, des sacrifices aux salariés, il ne peut demander des efforts à nos concitoyens en procédant à l'augmentation du forfait hospitalier et à des déremboursements massifs si, dans le même temps, il se refuse à compenser des pertes de ressources sciemment organisées.
Cette situation est d'autant plus choquante que, depuis trois ans, ces exonérations sont accordées sans contrepartie et s'avèrent totalement inefficaces. Ainsi, l'inefficacité est couplée avec une mise en péril du régime de protection sociale, notre bien commun. Cela est injuste.
Cette question renvoie directement à l'objet de ce texte : la transparence des lois de financement de la sécurité sociale, et au renforcement du contrôle du Parlement. Elle est, pour nous, un préalable nécessaire à l'amélioration de l'architecture des lois de financement de la sécurité sociale.
C'est pourquoi nous vous invitons à adopter cet amendement, sur lequel nous demandons un scrutin public.
Mme Gisèle Printz. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Monsieur Godefroy, vous savez ce qu'en pensent le rapporteur, le président et la commission.
M. Guy Fischer. Non, on ne le sait pas ! (Sourires.)
M. Alain Vasselle, rapporteur. Il n'est donc pas nécessaire que je m'étende à nouveau sur le sujet.
A l'intention de celles et de ceux d'entre vous qui n'avaient pu participer au débat au cours duquel la commission des affaires sociales avait, par ma voix, défendu cet amendement, je ferai un bref rappel : après l'avis exprimé par le Gouvernement, après l'avis exprimé par nombre de nos collègues, et non des moindres, le Sénat s'était prononcé et avait rejeté l'amendement prévoyant la compensation intégrale. La commission des affaires sociales en a pris acte et n'a pas pris à nouveau d'initiative dans ce domaine, mais elle vous proposera tout à l'heure toute une série d'amendements qui permettent de s'approcher le plus possible de la compensation intégrale.
J'en conviens, monsieur M. Godefroy, les annexes n'ont pas de caractère normatif.
Quoi qu'il en soit, s'agissant du présent amendement, nous nous en remettons à l'avis du Gouvernement, que j'ai été chargé de solliciter.
Je prends date pour l'avenir, et je ne sais pas le sort que nos concitoyens réserveront à la majorité actuelle.
M. Guy Fischer. Vous le savez !
M. Robert Bret. C'est bien compromis !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Si, d'aventure, une alternance devait se produire en 2007, j'espère, monsieur Godefroy, que vous-même et vos amis sauriez prendre vos responsabilités, peut-être en prenant l'initiative que vous jugez aujourd'hui bonne. Mais il s'agit là d'une appréciation tout à fait personnelle, qui n'engage en rien la commission des affaires sociales.
Madame la présidente, l'avis de la commission sera donc celui du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement partage, bien sûr, la préoccupation qui a été exprimée de clarifier les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale et de garantir à la sécurité sociale l'intégralité de ses recettes.
Cette préoccupation a inspiré un grand nombre d'amendements, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale. Le présent amendement comporte cependant deux difficultés : d'abord, il prévoit que la compensation s'applique au dispositif existant avant l'entrée en vigueur de la loi organique ; ensuite, il peut soulever un problème de constitutionnalité.
Pour assurer le respect du principe de la compensation, le projet de loi organique qui vous est soumis prévoit déjà, d'une part, une annexe retraçant de manière transparente les dispositifs à compenser et, d'autre part, le vote du montant de la compensation financière prévue par cette annexe. Enfin, une autre disposition proposée par votre rapporteur va renforcer puissamment ce dispositif.
Sous le bénéfice de ces explications, vous comprendrez que le Gouvernement ne peut qu'être défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. M. Douste-Blazy nous avait dit qu'il s'agissait de sanctuariser les recettes de la sécurité sociale, que nous allions voir ce que nous allions voir, et que le gouvernement agirait différemment des socialistes.
Il nous avait dit qu'une valeur constitutionnelle allait être donnée à ce texte et, pour une fois, nous avons soutenu -de manière unanime - la proposition de compensation intégrale qui avait été faite en première lecture.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cela nous avait d'ailleurs inquiétés ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. Nous avons alors vu les membres les plus éminents de la commission des finances - notamment notre collègue Yves Fréville, qui y a mis toute sa compétence - tomber à bras raccourcis sur le président About et sur le rapporteur de la commission des affaires sociales. Nous avons bien compris qu'un problème se posait !
Par ailleurs, rappelez-vous, monsieur le rapporteur, de vos propos selon lesquels vous entendiez procéder de manière absolument différente. Je ne rappellerai pas ici le nombre de fois où vous avez parlé des « tuyaux du FOREC », qui vous obsédaient au point de vous empêcher de dormir !
Le FOREC a donc été supprimé, même si nous constatons qu'au travers des futurs projets de loi dont nous allons commencer l'examen pas plus tard que lundi prochain, qu'il s'agisse du contrat d'avenir, du contrat de nouvelle embauche, etc., le problème reste tout à fait d'actualité.
Par conséquent, nous ne sommes pas convaincus que ce projet de loi organique apporterait plus de transparence, en particulier s'agissant de cet arriéré de 2 milliards d'euros qui court toujours. Nous reviendrons d'ailleurs, à l'occasion d'un amendement ultérieur, sur cette compensation intégrale, mais je tiens à dire, d'ores et déjà, que nous voterons cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Je souhaite simplement rassurer notre rapporteur : il est clair que si, par chance, le vent tournait, je puis dire, à titre personnel - mais je n'aurai, je pense, aucun mal à convaincre mes collègues de la commission des affaires sociales - que nous mettrions autant d'acharnement que M le rapporteur à obtenir satisfaction. Encore faudrait-il que ce dernier nous vienne en aide, et pas simplement dans cet hémicycle.
Je tiens à rappeler, monsieur le ministre, qu'il s'agit d'un sujet d'importance. En effet, l'on ne peut se contenter de manchettes de presse faisant état du gouffre de la sécurité sociale, etc., lorsqu'on sait que les mesures prises par le Gouvernement mettent ladite sécurité sociale en grande difficulté et qu'il faut, là aussi, trouver une solution.
Vous nous dites que cela pose un problème constitutionnel. Nous pouvons en discuter ! En revanche, concernant les mesures à venir, qui ne sont pas anodines, figurant dans un texte dont l'examen interviendra après le vote du projet de loi dont nous discutons aujourd'hui, nous aimerions obtenir l'assurance que la compensation entrera bien dans le cadre des annexes. Nous sommes loin d'en être certains et nous aimerions vous entendre à ce sujet.
Mme la présidente. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Je soutiens, bien entendu, cet amendement, d'autant que j'ai l'impression, ce faisant, de soutenir aussi le président et le rapporteur de la commission, ce qui n'est pas si fréquent ! J'en suis personnellement très heureux et j'espère qu'ils recevront le même soutien de la part de leurs amis.
Si cet amendement nous paraît opportun, c'est parce que le Gouvernement s'est montré par le passé assez peu rigoureux en ce qui concerne le remboursement des créances du régime général sur l'Etat.
Sur ce point, la commission des comptes de la sécurité sociale avait, comme elle le fait chaque année, dressé, au 31 décembre 2003, un état selon lequel les créances du régime général sur l'Etat s'élevaient à 5,1 milliards d'euros : 2,4 milliards d'euros au titre des mesures en faveur de l'emploi et 2,7 milliards d'euros au titre des remboursements des prestations et autres cotisations publiques.
Il existe également, chacun le sait, même s'il en fait moins souvent état, des créances, anciennes pour la plupart, dont le remboursement n'est jamais intervenu et dont le montant est d'environ 1,3 milliard d'euros, dont 1,2 milliard d'euros au titre d'exonérations de cotisations.
Le remboursement de ces créances par l'Etat s'étale habituellement dans le temps en fonction des disponibilités des crédits de l'Etat. Or, par les temps qui courent, on sait que ces disponibilités sont particulièrement réduites et peuvent parfois être reportées sur l'année suivante, voire au-delà.
La somme de 1,2 milliard d'euros de créances anciennes correspond aux exonérations de cotisations relatives, d'abord au plan textile - il s'agit là d'un problème très ancien - soit 320 millions d'euros, ensuite aux allocations familiales, soit 135 millions d'euros, enfin au FOREC, soit 772 millions d'euros. (M. le président de la commission s'exclame.) Je suis désolé, monsieur le président, mais il s'agit là de chiffres incontestables et je crois qu'il est bon de les mentionner au moment où, précisément, le Gouvernement n'entend pas assumer ses responsabilités en rejetant l'amendement proposé : celui-ci permettrait, une fois pour toutes, de mettre un terme à ces errements qui ont coûté beaucoup d'argent à la sécurité sociale.
Il me paraît nécessaire de rappeler ces faits, même s'ils sont désagréables non seulement pour le Gouvernement actuel, mais également pour les différents gouvernements qui se sont succédé.
Il convient, selon moi, de mettre un terme à cette situation. Cet amendement, s'il était adopté, permettrait d'ouvrir une ère nouvelle.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Bas, ministre délégué. M. Autain a souligné que le Gouvernement s'était montré, par le passé, assez peu rigoureux concernant le remboursement à la sécurité sociale des créances détenues sur l'Etat. J'imagine très bien de quel passé il s'agit, puisque la proportion des exonérations non compensées est passée de plus de 50 % en 1991 à 10 % aujourd'hui.
C'est ainsi que les recettes sur le tabac et l'alcool ont été, dans un passé dont vous vous souvenez aussi certainement, monsieur Autain, détournées de la sécurité sociale pour financer les 35 heures - c'est la loi Aubry de 2000 - et le FOREC.
Par conséquent, monsieur le sénateur, permettez-moi de vous dire que nous n'avons pas de leçon à recevoir à cet égard. En effet, les recettes non compensées étaient autrefois beaucoup plus importantes, et ce dans des proportions d'ailleurs gigantesques,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Absolument !
M. Philippe Bas, ministre délégué. ... qu'elles ne le sont aujourd'hui.
Je tiens donc à affirmer une nouvelle fois l'attention très rigoureuse que porte le Gouvernement aux recettes de la sécurité sociale, afin de préserver leur dynamisme et d'éviter les recettes non compensées.
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.
M. Yves Fréville. Je voudrais simplement rappeler que le principe de la compensation est tout à fait raisonnable et que je n'ai rien contre. La seule question qui se pose est de savoir dans quel type de texte il doit être inscrit.
Je prendrai un exemple, mes chers collègues : lorsqu'il nous a fallu régler le problème de la compensation des transferts de charges aux collectivités locales, nous avons tout simplement modifié la Constitution et nous avons inscrit ce principe de compensation dans son article 72-2.
M. Robert Bret. Sans offrir toutes les garanties !
M. Yves Fréville. Pour ce qui est de la sécurité sociale, pouvons-nous, dans le cadre d'une loi organique, créer un principe constitutionnel ? La réponse apportée en première lecture et que je considère, du point de vue juridique, comme parfaitement fondée, est négative, car la loi organique n'a d'autre raison d'être que d'expliciter la Constitution.
Par conséquent, mes chers collègues, si vous souhaitez que le principe de compensation des exonérations soit introduit dans le bloc de constitutionnalité, la démarche est très simple : il convient de demander une révision constitutionnelle ; c'est d'ailleurs la seule méthode que le Conseil constitutionnel acceptera.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 37.
Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 185 :
Nombre de votants | 328 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 127 |
Contre | 200 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 38, présenté par Mmes Demontes et Alquier, MM. Cazeau et Godefroy, Mme Printz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er , ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Précédemment à tout examen de tout projet de loi instituant des mesures de réduction ou d'exonération de cotisations ou contributions de sécurité sociale affectées aux régimes obligatoires de base ou aux organismes concourant à leur financement, de réduction de l'assiette ou d'abattement sur l'assiette de ces cotisations et contributions :
1) Une étude de l'impact de ces mesures sur les finances de la sécurité sociale est menée. Les conclusions de cette étude sont adressées au Parlement.
2) Les caisses nationales de sécurité sociale concernées par ces mesures sont obligatoirement consultées. Dans ce cadre, elles transmettent leur avis au Parlement.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Cet amendement se situe dans le même esprit que le précédent.
Il vise à permettre au Gouvernement de respecter son engagement solennel d'inscrire dans la loi organique le principe de la compensation intégrale par l'Etat des mesures d'exonérations et de réductions de recettes de la sécurité sociale.
Tout examen d'un projet de loi instituant des mesures de réduction ou d'exonération de cotisations ou contributions de sécurité sociale, et ayant des conséquences sur les régimes obligatoires de base ou sur les organismes affectés aux régimes obligatoires de base ou aux organismes concourant à leur financement, devra nécessairement être précédé d'une étude d'impact faisant état des effets escomptés sur les finances de la sécurité sociale.
Aussi est-il proposé, au travers de cet amendement, de ne pas se contenter, comme le fait le Gouvernement dans le présent projet de loi, d'une annexe aux projets de loi de financement de la sécurité sociale constatant a posteriori que des mesures de réduction ou d'exonération de cotisations sont intervenues. Notre souhait est, au contraire, de garantir au Parlement une information aussi complète que possible, permettant de mettre en perspective l'état des finances sociales.
Ce faisant, le Parlement pourra juger de l'opportunité d'adopter ces dispositions fiscales au regard de leur effet social direct ou du niveau d'affaiblissement de notre protection sociale induit.
Au-delà de la prise en compte du Parlement, nous estimons qu'au regard des conséquences importantes des politiques d'exonération de cotisations sociales il est indispensable que les caisses nationales concernées directement puissent être saisies de cette volonté de légiférer : elles doivent pouvoir rendre un avis éclairé non seulement sur les effets, mais également sur la mise en oeuvre de ces exonérations, les autres réductions de l'assiette ou abattement sur l'assiette. Ces dispositions permettront également de redimensionner le rôle des partenaires sociaux dans la gestion prévisionnelle des caisses.
Par cet amendement, nous entendons participer à la mise en oeuvre du principe d'exonération intégrale.
Notre voeu est non pas de confiner le Parlement dans un rôle comptable a posteriori, comme l'instaure ce projet de loi organique, mais de renforcer son information et son contrôle.
Il s'agit également de prendre en compte l'expertise que peuvent fournir les caisses nationales qui gèrent au plus près notre système de sécurité sociale. En effet, de par leur position de réceptacles des demandes et de prestataires, elles sont en position de mesurer les évolutions les plus subtiles de notre corps social.
Les caisses nationales sont en mesure d'apprécier l'impact de telles décisions sur le quotidien de nos concitoyens en tenant compte des évolutions que peut connaître la société.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. La demande de M. Godefroy est légitime, mais elle est satisfaite à la fois par les mesures qui ont été adoptées par l'Assemblée nationale et par les amendements de la commission tendant à les renforcer.
Une fois que la loi organique aura été adoptée, tous les éléments liés à la compensation devront être retracés dans les annexes. Par conséquent, au moment où le Gouvernement présentera la loi de financement de la sécurité sociale, il sera tenu d'exposer dans une annexe l'effet de toute mesure d'allègement sur les finances de la sécurité sociale.
Je rappelle également qu'un amendement adopté par l'Assemblée nationale vise à confier au Parlement le vote du montant de la compensation.
Quant aux partenaires sociaux, ils seront, de fait, saisis pour avis. Ils auront connaissance de toutes les informations concernant la compensation, puisque le conseil d'administration de la CNAMTS sera consulté sur chacune des lois de financement de la sécurité sociale. Et ces lois comprendront l'annexe qui retracera les divers éléments touchant à la compensation.
La commission vous invite donc, monsieur Godefroy, à retirer cet amendement. A défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement partage, naturellement, les intentions des auteurs de cet amendement. Mais ces intentions me semblent satisfaites par l'annexe 4 du projet de loi de financement, qui permettra au Parlement de connaître non seulement l'ensemble des mesures de réduction et d'exonération de cotisations sociales, mais aussi leur impact financier et les modalités de compensation de ces mesures.
Si l'amendement que la commission défendra tout à l'heure est adopté, monsieur Godefroy, vos intentions seront pleinement satisfaites.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Godefroy, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Godefroy. Je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 61, présenté par MM. Fischer, Muzeau et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Avant l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L.O. ... - Tous les quatre ans, les représentants des organisations syndicales de salariés et les représentants des organisations d'employeurs sont invités à négocier sur la structure et les taux des cotisations et prélèvements affectés à la sécurité sociale. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Ce projet de loi est censé mettre en application les principes politiques, sociaux et économiques qui sont au coeur de notre système de protection sociale. Or force est de constater qu'il ne tend à instaurer que des outils comptables pour résorber un déficit, sans chercher la cause réelle de ce déficit.
Chacun sait que la sécurité sociale a besoin de recettes supplémentaires et pérennes pour mettre en place une véritable politique de santé publique, assurer les retraites et réduire les inégalités. Or les besoins de prévention, l'allongement de la durée de vie et les progrès technologiques entraînent un accroissement justifié des dépenses. Il faut donc répondre à ce besoin sans cesse grandissant de moyens financiers.
Depuis son origine, notre modèle de financement de la protection sociale est fondé sur le travail. Par conséquent, les difficultés de financement de la protection sociale sont fondamentalement liées à la baisse du taux d'emploi et du rythme de croissance économique.
Aussi, pour augmenter les ressources de la sécurité sociale, il faut combattre le chômage, créer des emplois qualifiés et correctement rémunérés et accélérer la croissance économique.
Au-delà des aspects financiers, le mode de prélèvement doit favoriser l'emploi et responsabiliser les entreprises.
Dans cette perspective, il est indispensable de rééquilibrer la contribution du travail et du capital au financement de la protection sociale. Il convient également de rééquilibrer la contribution des différentes catégories d'entreprises, car l'importance de la main d'oeuvre diffère d'un secteur à un l'autre. De tels rééquilibrages sont indispensables pour faire du plein-emploi un objectif crédible.
Vous connaissez nos propositions : il faut réformer le système des cotisations patronales. Aujourd'hui, de plus en plus d'acteurs sociaux et de décideurs politiques pensent que ces cotisations devraient être rééquilibrées.
On pourrait ainsi procéder à une modification des taux de cotisations patronales en fonction du niveau des salaires.
Il serait également possible de différencier les taux de cotisation selon les performances des entreprises en matière d'emploi ou l'évolution de leur masse salariale.
On pourrait aussi élargir l'assiette à la valeur ajoutée, qui est plus large que la masse salariale.
On pourrait encore élargir l'assiette aux revenus financiers qui ne sont pas compris dans la valeur ajoutée.
Enfin, on pourrait intégrer à l'assiette certains éléments de rémunération qui échappent actuellement à la cotisation, comme les stock-options.
Or la possibilité de mener à bien ces réflexions n'est pas prévue par le présent projet de loi - vous allez donc me dire que je suis hors sujet ! -, qui n'institue aucun système démocratique permettant aux organisations de salariés de s'exprimer sur ce sujet qui les concerne pourtant au premier chef.
C'est pourquoi nous demandons, par cet amendement, que tous les quatre ans les représentants des organisations syndicales de salariés et les représentants des organisations d'employeurs soient invités à négocier sur la structure et les taux des cotisations et prélèvements affectés à la sécurité sociale.
M. le rapporteur aura saisi l'évolution de notre pensée : nous ne décidons plus, nous ne suggérons pas de taux ; nous proposons de nouvelles responsabilités qui permettraient, par la négociation, de trouver des solutions à la question du financement ou, du moins, de faire évoluer cette question.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Monsieur Fischer, vous le savez, ce n'est pas la voie qui a été choisie lors de la réforme de l'assurance maladie.
En outre, je ne vous surprendrai pas en vous faisant remarquer que cet amendement constitue une véritable injonction à l'égard Gouvernement, ce qui n'est pas acceptable eu égard aux textes.
Enfin, vous avez vous-même indiqué que cette disposition n'avait pas sa place dans le présent projet de loi.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 62, présenté par MM. Autain et Fischer, Mme Hoarau, M. Muzeau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le quatrième alinéa de l'article L. 114-4-1 du code de la sécurité sociale, après les mots : « objectif national de dépenses d'assurance maladie » sont insérés les mots : « ou l'un de ses sous-objectifs ».
La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. La rédaction actuelle de l'article L. 114-4-1 du code de la sécurité sociale ne prévoit la mise en place de la procédure d'alerte qu'en cas de dépassement de l'ONDAM et non pas de l'un de ses sous-objectifs. Nous ne pouvons que le déplorer.
Si nous constatons avec une satisfaction sans doute égale à celle du Gouvernement que les dépenses de soins de ville ont tendance à progresser beaucoup moins vite que par le passé - la hausse est de 3,1 % -, nous constatons également, hélas ! que les dépenses relatives à l'hospitalisation publique, quant à elles, connaissent une hausse de l'ordre de 5 % à 6 % par an, ce qui se situe très au-dessus de ce que prévoyait le sous-objectif, soit 3,6 %. C'est un véritable problème !
Il n'est pas possible, aujourd'hui, de répondre à l'appel unanime des acteurs de l'hôpital public. Ceux-ci se sont d'ailleurs récemment manifestés en nous adressant une lettre sollicitant notre intervention afin d'obtenir du comité d'alerte une réponse à leurs sollicitations.
Le taux prévu cette année par l'ONDAM ne permettra pas de couvrir les dépenses de l'hospitalisation publique. Si la procédure d'alerte pouvait être déclenchée lorsque l'un des sous-objectifs est menacé, on pourrait notamment remédier cette année aux difficultés que rencontre l'hospitalisation publique.
Les hôpitaux publics traversent une crise sans précédent, marquée par un sous-financement que la modicité de la somme accordée au titre de l'ONDAM ne fera qu'aggraver. Cela ne manquera pas d'avoir des conséquences sur la qualité des soins dispensés. Il s'agit d'un vrai problème de santé publique et il y a donc lieu de s'en préoccuper.
Notre proposition n'est sans doute pas la seule susceptible de remédier à cette situation. Mais si le dépassement d'un sous-objectif pouvait conduire le Gouvernement à déposer un projet de loi de financement rectificative - ce serait la première fois depuis que cette possibilité existe - cela permettrait à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 de se présenter dans de meilleures conditions.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Mon cher collègue, la majorité parlementaire et le Gouvernement ne peuvent que partager votre préoccupation quant à l'évolution des dépenses de l'hôpital. C'est l'une des raisons qui ont conduit le Gouvernement, lorsque Jean-François Mattei assumait les fonctions de ministre de la santé, à proposer le plan « Hôpital 2007 ».
Il est vrai qu'aujourd'hui nous n'avons pas le recul nécessaire pour apprécier les incidences de cette réforme et en tirer les enseignements.
Multiplier les procédures d'alerte en cas de dépassement des sous-objectifs conforterait une certaine inertie du fonctionnement liée aux procédures. Cela ne nous paraît pas judicieux.
Vous avez raison, mon cher collègue, de sensibiliser ceux qui sont chargés du suivi de ces dépenses. Les dépenses de l'hôpital ont augmenté de 5 % sur l'exercice 2004 et la tendance actuelle est à peu près équivalente. Mais on ne peut pas dire que les dépenses de l'hôpital ont explosé d'un seul coup par rapport aux exercices précédents, même si elles n'ont pas régressé comme on l'aurait souhaité.
Il a été dit ce matin, devant la commission des comptes de la sécurité sociale, que les prévisions de progression des dépenses pour les soins de ville se situeraient autour de 2,8 %, ce qui constitue un très net recul par rapport aux exercices précédents.
M. François Autain. Non, 3,1 % !
M. Alain Vasselle, rapporteur. M. le ministre pourra vous le confirmer si vous le désirez, monsieur Autain : les prévisions de progression des dépenses de soins de ville pour 2005 sont de 2,8 % !
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Bas, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
La procédure d'alerte a été définie par la loi du 13 août 2004. Laissons cette loi s'appliquer ! On ne va pas modifier les dispositions législatives tous les ans ! D'une certaine façon, trop d'alerte tue l'alerte. Il faut donc être raisonnable. La procédure d'alerte ne doit être mise en oeuvre qu'en cas de dépassement important de l'ONDAM.
Mme la présidente. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Cet amendement a pour objet non pas de revenir sur un texte qui a déjà été voté, mais de tenter de l'améliorer pour mieux prendre en compte la crise financière et budgétaire que traverse l'hospitalisation publique. Cette situation n'est pas nouvelle, je le conçois, mais elle a tendance à s'aggraver de façon inquiétante cette année.
Ce n'est pas la seule solution qui s'offre à nous, je le concède. On pourrait aussi envisager une certaine forme de fongibilité des crédits affectés à chaque sous-objectif. Malheureusement, cette possibilité ne semble recueillir l'adhésion ni de la commission ni du Gouvernement ; il faut donc y renoncer.
Nous nous trouvons dans une impasse : le déficit de l'hospitalisation publique augmente et, face à cette crise, le Gouvernement reste passif. C'est cela que nous dénonçons ! Du reste, nous avons été sollicités à ce sujet à plusieurs reprises, tout comme le comité d'alerte, par les représentants des hôpitaux : le président de la Fédération hospitalière de France, la FHF, les directeurs de CHU, et d'autres encore. C'est un véritable problème qui, nécessairement, se posera à nouveau dans les mois qui viennent et auquel il faudra bien nous intéresser de plus près.
L'apparente augmentation modérée des dépenses de soins de ville est due en grande partie à l'effet placebo qui suit chaque mise en oeuvre d'un plan de réforme de la sécurité sociale. Le même phénomène a été observé après le plan Juppé et le plan Aubry. Malheureusement, il s'agit, d'un effet éphémère.
Il faut ajouter qu'en période de crise économique les gens se soignent moins ; la consommation médicale est donc moindre.
Ne nous méprenons pas : le freinage des dépenses de soins de ville est dû beaucoup plus à ces éléments-là qu'à la réforme elle-même, d'autant que celle-ci n'entrera en vigueur qu'à partir du 1er juillet prochain.
Monsieur le rapporteur, selon vous, les prévisions de progression des dépenses de soins de ville seraient, pour 2005, de 2,8 %. Dans la presse - car je n'ai pas eu le temps de lire le rapport, et pour cause ! - j'ai lu qu'elles seraient plutôt de 3,1 %. Cela n'a rien de miraculeux, puisqu'il s'agit sensiblement du taux qui a été voté lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
De plus, globalement, je ne pense pas que le déficit de 2005 donne au Gouvernement l'envie de faire du triomphalisme. Il doit au contraire rester très modeste ; c'est d'ailleurs ce qu'il a tendance à faire et c'est très bien.
Mme la présidente. L'amendement n° 59, présenté par MM. Fischer, Muzeau et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les élections à la sécurité sociale sont rétablies.
II. - En conséquence, les dispositions contraires des articles L. 211-2, L. 212-2, L. 213-2, L. 215-2 et L. 215-3 du code de la sécurité sociale sont abrogées.
III. - La perte de recettes est compensée par le relèvement à due concurrence des contributions sociales visées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. On va encore nous dire que c'est un amendement hors sujet !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous faites preuve de bon sens !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Vous faites les questions et les réponses !
M. Guy Fischer. Selon M. Juilhard, avec qui je participe régulièrement à des réunions à la mutualité sociale agricole, ou même M. le rapporteur, qui a, ne l'oublions pas, des liens avec l'agriculture, les agriculteurs tiennent comme à la prunelle de leurs yeux à la possibilité de pouvoir s'exprimer, notamment lors des élections de leurs administrateurs. Cette proximité concourt à la responsabilisation.
Pour notre part, nous considérons que les assurés sociaux sont systématiquement mis à l'écart des orientations et des choix qui, à l'échelon tant local que national, déterminent leur couverture sociale et la gestion de cette couverture.
Au moment où l'on ferme des permanences de la sécurité sociale, où la tendance est à la concentration et où l'on est obligé de faire des kilomètres sans transports en commun, tout cela pour faire des économies de gestion - car tel était l'objectif de la réforme de l'assurance maladie -, le fossé se creuse entre les aspirations, les besoins des assurés sociaux dans des domaines aussi essentiels que l'accès aux soins, la compensation des charges familiales ou les retraites, et un système politique qui met en oeuvre des politiques de régression et d'abaissement des droits.
On peut être d'accord ou non, mais le réel déficit démocratique qui existe dans les régimes généraux - je le constate régulièrement, et encore récemment lors de la dernière assemblée générale de la mutualité sociale agricole du Rhône - apparaît bien comme le corollaire d'une certaine régression. L'un ne va d'ailleurs pas sans l'autre !
Le report, plusieurs fois renouvelé, des élections à la sécurité sociale et la succession simultanée des plans gouvernementaux illustrent terriblement l'érosion des fondements démocratiques de l'héritage du CNR.
Les mesures Balladur - Veil ont été assorties, en 1994, d'une loi portant réforme de l'organisation administrative et financière de la sécurité sociale, qui renforçait les pouvoirs de l'Etat et rétablissait le paritarisme dans la branche accidents du travail et maladies professionnelles.
Le plan Juppé étayait les prétendus dispositifs de « maîtrise comptable » par de nouvelles mesures d'élagage des règles démocratiques : suppression des élections, réforme de la composition et du rôle des conseils d'administration, extension des prérogatives de l'Etat et du Parlement.
Plus près de nous encore, la réforme de l'assurance maladie a définitivement - c'est notre interprétation - dépouillé les conseils d'administration de tout pouvoir en les transformant en simples « conseils d'orientation ».
L'exigence démocratique n'est pas un voeu pieux qui se désagrège au contact d'un quelconque principe de réalité revenu à la mode, et la gestion n'est pas, par définition, froide et austère quand elle épouse des décisions politiques soumises aux exigences de préservation de l'être humain. La sécurité sociale est un choix de gestion sociale de la santé publique de toute une nation, proche des aspirations et des besoins de la population.
Il conviendrait que les dispositifs de gouvernance soient rééquilibrés au profit des conseils d'administration des caisses nationales de sécurité sociale, notamment en renforçant leurs prérogatives et en asseyant leur légitimité par le retour à l'élection de leurs représentants, c'est-à-dire les représentants des assurés sociaux.
Il suffit de participer au petit-déjeuner organisé par la CNAMTS pour constater combien les choses ont changé. Vous me direz qu'il n'y en a eu qu'un pour l'instant - le deuxième aura lieu demain matin -, mais c'est suffisant pour être édifié sur le superpouvoir du directeur général !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je pourrais m'abstenir d'intervenir, madame la présidente, car, en présentant ses amendements, M. Fischer donne en même temps l'avis de la commission !
Comme il l'a dit lui-même, cet amendement n'a effectivement rien à voir avec le texte de loi organique. C'est pourquoi la commission y est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Tout d'abord, monsieur Fischer, les mesures que vous proposez ne relèvent pas de la présente loi organique, vous en avez bien conscience.
Ensuite, je suis tenté de vous poser une question : avez-vous pratiqué la concertation avec l'ensemble des partenaires sociaux sur le point précis que vous évoquez au travers de cet amendement ?
M. Guy Fischer. Je m'attendais à cette question !
M. Xavier Bertrand, ministre. J'aurais été désolé de vous décevoir ! (Sourires.)
En tout état de cause, pour avoir beaucoup de goût pour le dialogue social, auquel nous sommes attachés l'un et l'autre, chacun à notre façon, je peux vous dire que la position que vous défendez n'est absolument pas consensuelle, loin s'en faut. Pour préserver la qualité de ce dialogue, je demande donc le retrait de cet amendement ou son rejet.
M. Guy Fischer. Pourquoi ce qui est vrai pour les agriculteurs ne peut-il l'être pour d'autres catégories ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Parce qu'il n'y a pas d'accord consensuel !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On y viendra un jour !
M. Alain Vasselle. Il n'y a pas de légitimité !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il faudra plus de légitimité, c'est sûr.
Mme la présidente. L'amendement n° 60, présenté par MM. Fischer, Muzeau et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I - L'article L. 221-3 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 221-3 - Sous réserve des dispositions de l'article L. 221-4, la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés est administrée par un conseil d'orientation de trente-trois membres, comprenant :
« 1°) Treize représentants des assurés sociaux désignés par les organisations syndicales de salariés interprofessionnelles représentatives au plan national ;
« 2°) Treize représentants des employeurs désignés par les organisations professionnelles nationales d'employeurs représentatives ;
« 3°) Trois représentants désignés par la Fédération nationale de la mutualité française ;
« 4°) Quatre personnes qualifiées dans les domaines d'activité des caisses d'assurance maladie et désignés par l'autorité compétente de l'Etat ;
« Siègent également, avec voix consultatives :
« 1°) Une personne désignée par l'Union nationale des associations familiales ;
« 2°) Trois représentants du personnel élus dans des conditions fixées par décret. »
II - En conséquence, le dernier alinéa de l'article L. 221-2 du code de la sécurité sociale est supprimé.
La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Je ne vais pas faciliter le travail du rapporteur ! Avec cet amendement, nous voulons manifester notre opposition au modèle de gouvernance instauré par la loi du 13 août 2004 et proposer de recentrer le pouvoir sur le conseil d'administration de la CNAMTS.
En effet, avec la réforme de 2004, aussi bien la gestion de l'assurance maladie des régimes obligatoires de la sécurité sociale que l'organisation du système de soins échappent complètement à tout contrôle démocratique des assurés et tendent à s'affranchir de l'idéal républicain d'égal accès pour tous à des soins de qualité.
Certes, nous en conviendrons tous, c'est à la représentation nationale de définir et de conduire la politique de santé de la nation. Il est toutefois également nécessaire qu'un organisme représentant les assurés sociaux puisse faire des propositions et interpeller la représentation nationale. C'est précisément la fonction que devraient avoir les représentants des assurés sociaux qui gèrent l'assurance maladie, élus au suffrage universel.
Monsieur le ministre, il est sans doute difficile, je le conçois, de faire admettre une telle proposition à l'ensemble des forces syndicales de notre pays, mais il n'est pas inutile de continuer à faire porter le dialogue social sur ce problème. En effet, l'essentiel du dialogue que le Gouvernement actuel peut avoir avec les organisations syndicales ne porte pas sur les élections au suffrage direct à l'assurance maladie. Au contraire, tout est fait pour dissuader les organisations syndicales d'imaginer que l'on pourrait un jour avoir recours à un mode de désignation démocratique conduisant non plus à des conseils d'orientation, mais à des conseils d'administration qui joueraient un rôle actif, ce qui n'est effectivement pas le cas aujourd'hui en matière de sécurité sociale.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Ce n'est pas la voie qui a été choisie par le Gouvernement, avec le soutien de la commission des affaires sociales et de la majorité au moment de l'examen du texte de loi sur la réforme de l'assurance maladie, concernant la gouvernance. Je serais donc assez surpris que le Gouvernement et le Sénat changent d'avis.
En tout cas, la commission des affaires sociales, dont la majorité des membres n'a pas changé d'avis, a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
Encore une fois, cet amendement n'a pas sa place dans la présente loi organique. Par ailleurs, le Gouvernement a mis en place de nouveaux dispositifs à partir du 1er janvier. Il convient de ne pas en changer.
Mme la présidente. L'amendement n° 58, présenté par MM. Fischer, Muzeau et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I. Le second alinéa de l'article L. 432-1 du code de la sécurité sociale est supprimé.
II. La perte de recettes est compensée par le relèvement à due concurrence des contributions sociales visées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Le présent amendement est une façon d'interpeller directement le Gouvernement sur une question importante relevant de l'équité : l'application de la franchise d'un euro aux victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles.
Cette fameuse contribution forfaitaire, proportionnellement rattachée à l'état de santé des assurés sociaux, ajoute des inégalités sociales et financières aux péripéties diverses d'une vie et à son injustice naturelle.
Vous connaissez les arguments qui ont été avancés à l'occasion de la réforme de l'assurance maladie à l'encontre de cette anomalie législative. Nous continuons de penser aujourd'hui qu'une telle contribution est uniquement une mesure de régulation financière.
La signature de l'agrément de la convention nationale organisant les rapports entre les médecins libéraux et l'assurance maladie a entériné votre conception univoque de l'esprit de responsabilité dont chacun doit faire preuve : les assurés sociaux sont incités, pour ne pas dire contraints, à changer leurs habitudes pour sauver notre système d'assurance maladie et à participer à l'effort général, tandis que les médecins, les spécialistes en particulier, seront gratifiés, au sens financier du terme, pour ne pas respecter le parcours médical et déontologique des soins. Je ne vais pas me lancer en cet instant dans un débat, mais, s'agissant des spécialistes, il y aurait beaucoup à dire.
Quelle valeur symbolique et pédagogique pouvons-nous donner à la franchise d'un euro par consultation médicale quand le civisme des parties concernées est mis en doute par nos concitoyens ?
Les Français savent déjà que la santé a un coût : comme le montrent les statistiques, 15 % d'entre eux, notamment les plus défavorisés, renoncent à se soigner. La CMU ou la CMU complémentaire ne suffisent pas : si l'on veut qu'il y ait un égal aux soins, il faut aussi prévoir des mesures d'accompagnement, monsieur le ministre. Demain, ils seront encore plus nombreux à différer une simple visite de prévention chez le généraliste ou le spécialiste de leur choix en raison du coût financier restant à leur charge, d'autant qu'à la franchise d'un euro viendront s'ajouter les dépassements tarifaires.
Les assurés qui pourront éviter l'exclusion des soins assumeront 11 % des dépenses et je pense que cette participation ne pourra qu'augmenter.
Les victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles seront aussi responsabilisées - et même culpabilisées - alors qu'elles sont largement pénalisées par le caractère forfaitaire de la réparation qui leur est servie et qu'elles supportent par ailleurs une large part des frais ainsi que les contraintes de soins et d'appareillage.
Ne vous trompez-vous pas une nouvelle fois de cible en rendant le salarié responsable de son état et en exonérant l'employeur de sa responsabilité !
La Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés, la FNATH, parle de pratique de « la solidarité à l'envers ». Tout cela nous semble intolérable.
Nous maintenons notre demande d'exonération de la franchise d'un euro pour les victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles censées bénéficier d'une législation spécifique prévoyant, notamment, la gratuité des soins.
Cette demande, légitime, intervient au moment où le Gouvernement, d'un côté, s'engage dans un plan de santé au travail et, d'un autre côté, vient de faire part de sa volonté d'exonérer de l'euro forfaitaire certains actes de prévention, dont ceux de dépistage du cancer du sein et du cancer colorectal.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, nous vous demandons de faire un pas de plus. Il me paraît possible et nécessaire que vous preniez des engagements de nature à satisfaire les préoccupations des auteurs de cet amendement et que vous n'opposiez pas à ce dernier une irrecevabilité indécente.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Le propos de M. Fischer me laisse penser qu'il s'agit d'un amendement d'appel qui sera retiré après que M. le ministre aura donné les explications souhaitées.
Cela dit, la commission réserve à cet amendement un sort identique à celui des amendements précédents.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Guy Fischer. Donc, pas de réponse !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si, la même que celle de M. le rapporteur !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Je soutiens cet amendement. Nous avons d'ailleurs défendu des amendements semblables à maintes reprises.
Monsieur le ministre, permettez-moi d'insister sur un point : est-il normal que les travailleurs victimes de maladies professionnelles ou d'accidents du travail acquittent la franchise d'un euro ? Je ne vois quel intérêt direct en retire la caisse d'assurance maladie.
Une mission commune d'information sur le bilan et les conséquences de la contamination par l'amiante vient d'être créée au Sénat. Les maladies professionnelles sont la cause de nombreux préjudices. Comment expliquer aux personnes concernées qu'elles doivent s'acquitter d'une franchise d'un euro, monsieur le ministre, alors que la faute inexcusable de l'employeur a été reconnue ? N'y a-t-il pas là une injustice ? Il est navrant que nous ne puissions pas obtenir de réponse à cette question.
Tout à l'heure, M. Guy Fischer a fait état d'un certain nombre d'exonérations tout à fait justifiées. Lors de la Journée des femmes, nous avons eu droit à une déclaration du ministre en charge de la santé à l'époque sur l'exonération de la franchise d'un euro pour le dépistage du cancer du sein. Pourquoi ne pas avoir annoncé le 1er mai, jour de la fête du travail, l'exonération de la franchise d'un euro pour les personnes victimes d'un accident du travail ?
L'exonération de la franchise d'un euro pour le dépistage du cancer du sein est une bonne mesure. Faites un geste moins médiatique en ce qui concerne les maladies professionnelles et les accidents du travail, monsieur le ministre, et les personnes concernées seront satisfaites.
Mme la présidente. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Monsieur le ministre, je profite du dépôt de cet amendement pour vous transmettre une question qui m'a été posée par un malade et à laquelle je n'ai pas pu répondre.
Je préside une association dont l'objet est de prendre en charge les malades atteints d'une insuffisance rénale chronique en phase terminale et qui sont obligés de subir des dialyses plurihebdomadaires. Lors de la dernière réunion du conseil d'administration de cette association, un représentant des malades m'a interrogé sur les modalités de perception, par leur caisse d'assurance maladie, de la contribution forfaitaire de 50 euros à laquelle les malades sont assujettis.
En effet, ces malades, atteints d'une affection de longue durée, une ALD, bénéficient tous du tiers payant et ne consultent souvent que leur néphrologue, qui est aussi leur médecin traitant. Ils ne versent donc aucune somme d'argent sur laquelle retenir leur contribution forfaitaire. Cette contribution va-t-elle se transformer en impôt, en taxe ou encore en redevance annuelle ? J'espère, monsieur le ministre, que vous pourrez me répondre.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. François Autain. Non !
M. Xavier Bertrand, ministre. Si, monsieur le sénateur ! Vous avez refusé toute mesure de sensibilisation.
M. François Autain. Je n'ai fait que vous transmettre une question qui m'a été posée.
M. Xavier Bertrand, ministre. Dans les majorités que vous avez soutenues à différentes reprises, seules deux logiques étaient mises en avant pour tenter de sauvegarder l'assurance maladie : soit les prélèvements massifs, soit les déremboursements.
M. François Autain. Patience !
M. Xavier Bertrand, ministre. La réforme qui a été votée, et qui est aujourd'hui la loi de la République, ne prévoyait ni prélèvements massifs, car l'effort porte avant tout sur les dépenses, ni déremboursements.
Certes, les efforts que nous demandons ne sont pas faciles, y compris en matière de sensibilisation. Mais il faut savoir, monsieur Autain, que les Français ont accepté ces mesures parce qu'ils savent bien que c'est la seule façon de sauvegarder la sécurité sociale à la française, et c'est ce point qui est important.
Comme vous l'avez rappelé, la question peut aussi se poser pour les personnes qui sont atteintes d'une ALD. C'est dans cet esprit, et afin de préserver l'accès aux soins dans notre pays, que nous avons souhaité le plafonnement de la franchise d'un euro.
Je reconnais que le Gouvernement demande des efforts, mais ceux-ci permettent, je le répète, de garantir l'accès aux soins et de préserver la sécurité sociale à la française. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. François Autain. Vous n'avez pas répondu à ma question, monsieur le ministre !
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Roland du Luart.)