sommaire
Présidence de M. Philippe Richert
2. Assistants maternels et assistants familiaux. - Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixte paritaire
Discussion générale : MM. André Lardeux, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire ; Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ; Mme Muguette Dini, M. Guy Fischer, Mme Gisèle Printz.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire
M. Alain Gournac.
Adoption du projet de loi.
3. Petites et moyennes entreprises. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Amendements nos 395 de Mme Michelle Demessine, 177 et 178 de M. Christian Cambon, rapporteur pour avis. - MM. Gérard Le Cam, Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, en remplacement de M. Christian Cambon, rapporteur pour avis ; Gérard Cornu, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Renaud Dutreil, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales. - Rejet de l'amendement no 395 ; adoption des amendements nos 177 rectifié et 178.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 29
Amendement n° 347 de M. Jacques Valade. - MM. Jacques Valade, le rapporteur, le ministre, Louis de Broissia. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements identiques nos 396 de Mme Michelle Demessine et 419 de M. Richard Yung ; amendement no 59 de la commission. - MM. Gérard Le Cam, Richard Yung, le rapporteur, le ministre, Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. - Rejet des amendements nos 396 et 419 ; adoption de l'amendement no 59.
Adoption de l'article modifié.
MM. Daniel Raoul, le rapporteur, le ministre.
Amendements identiques nos 294 de M. Bernard Dussaut et 397 de Mme Michelle Demessine ; amendements nos 233 rectifié bis de M. Pierre Hérisson et 360 de M. Bruno Retailleau. - MM. Bernard Dussaut, Gérard Le Cam, Jacques Blanc, Philippe Darniche, le rapporteur, le ministre, Daniel Raoul. - Rejet des amendements nos 294 et 397 ; retrait des amendements nos 233 rectifié bis et 360.
Adoption de l'article.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
4. Conseil européen. - Débat sur une déclaration du Gouvernement
M. le président.
MM. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères ; Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères ; Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne ; Denis Badré, Robert Bret, Aymeri de Montesquiou, Bernard Frimat, Bruno Retailleau, André Dulait.
M. Dominique de Villepin, Premier ministre.
Clôture du débat.
présidence de M. Philippe Richert
5. Petites et moyennes entreprises. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Article additionnel après l'article 31
Amendements identiques nos 60 de la commission et 367 de M. Philippe Adnot. - MM. Gérard Cornu, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Philippe Adnot, Renaud Dutreil, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales. - Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.
Article additionnel après l'article 31 ou après l'article 32
Amendements nos 368 de M. Philippe Adnot et 111 rectifié de M. Bernard Barraux. - MM. Philippe Adnot, Yannick Texier, le rapporteur, le ministre. - Retrait des deux amendements.
Amendement no 132 rectifié ter de M. Dominique Mortemousque ; amendements identiques nos 61 de la commission et 102 rectifié de M. Dominique Mortemousque ; amendements nos 364 rectifié de M. Philippe Adnot, 182 rectifié de M. Jean-Pierre Vial, 97 rectifié de M. Gérard César, 297 de Mme Bariza Khiari, 62 rectifié, 63 rectifié de la commission, 295 et 296 de M. Bernard Dussaut. - MM. Yannick Texier, le rapporteur, Philippe Adnot, Jean-Pierre Vial, Bernard Dussaut, Daniel Raoul, le ministre, Mme Bariza Khiari. - Retrait des amendements nos 132 rectifié ter, 364 rectifié, 97 rectifié et 295 ; rejet des amendements nos 296 à 297 ; adoption des amendements nos 61, 102 rectifié, 182 rectifié, 62 rectifié et 63 rectifié.
Adoption de l'article modifié.
Article 26 (précédemment réservé)
Amendements nos 388 de Mme Michelle Demessine et 340 de M. Yannick Texier. - MM. Gérard Le Cam, Yannick Texier, le rapporteur. - Retrait des deux amendements.
Adoption de l'article.
Suspension et reprise de la séance
Articles additionnels après l'article 32
Amendement no 258 rectifié bis de M. Michel Mercier. - MM. Michel Mercier, le rapporteur. - Retrait.
Amendement no 430 rectifié de M. Jean Arthuis. - MM. Michel Mercier, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 432 rectifié de M. Jean Arthuis. - MM. Jean Arthuis, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement no 431 rectifié de M. Jean Arthuis. - MM. Jean Arthuis, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article additionnel après l'article 32 ou après l'article 35
Amendements nos 100 rectifié de M. Gérard César et 401 de Mme Michelle Demessine. - MM. Yannick Texier, Gérard Le Cam, le rapporteur, le ministre, Jean Desessard. - Retrait de l'amendement no 100 rectifié ; rejet de l'amendement no 401.
Articles additionnels après l'article 32
Amendements nos 103 rectifié de M. Bernard Barraux et 300 de M. Bernard Dussaut. - MM. Yannick Texier, Bernard Dussaut, le rapporteur, le ministre. - Retrait des deux amendements.
Article additionnel après l'article 32 ou après l'article 33
Amendements nos 146 rectifié de M. Dominique Mortemousque et 298 de M. Dussaut. - MM. Yannick Texier, Daniel Raoul, le rapporteur, le ministre, Jean Desessard, François Marc, Gérard Longuet. - Retrait de l'amendement no 146 rectifié ; rejet de l'amendement no 298.
Articles additionnels après l'article 32
Amendement no 299 rectifié de M. Bernard Dussaut. - MM. Jean Desessard, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement no 433 rectifié bis de M. Jean Arthuis. - MM. Jean Arthuis, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements nos 398 de Mme Michelle Demessine, 153 rectifié de M. de Henri de Richemont et 303 de M. François Marc ; amendements identiques nos 112 rectifié de M. Bernard Barraux et 247 rectifié de M. Claude Biwer ; amendements nos 441, 442 de la commission, 248 rectifié ter de M. Claude Biwer, 113 rectifié de M. Bernard Barraux, 304 de M. François Marc, 98 rectifié ter de M. Dominique Mortemousque, 302 rectifié de M. Bernard Dussaut, 399 de Mme Michelle Demessine et 301 de M. Bernard Dussaut. - MM. Gérard Le Cam, Patrice Gélard, François Marc, Yannick Texier, Claude Biwer, le rapporteur, Daniel Raoul, Bernard Dussaut, le ministre, Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. - Retrait de l'amendement no 98 rectifié ter ; rejet des amendements nos 398 et 303 ; adoption des amendements nos 153 rectifié, 112 rectifié, 247 rectifié, 441 et 442.
Suspension et reprise de la séance
Amendement no 248 rectifié quater de M. Claude Biwer. - MM. Claude Biwer, Daniel Raoul, le président de la commission des affaires économiques. - Adoption de l'amendement no 248 rectifié quater, les autres amendements devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 33
Amendement no 373 rectifié bis de M. Roland Courteau. - MM. Roland Courteau, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Article additionnel après l'article 34
Amendement n° 245 rectifié de M. Jean-Léonce Dupont. - MM. Christian Gaudin, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendements nos 99 rectifié de M. Gérard César, 400 de Mme Michelle Demessine et 305 de M. Bernard Dussaut. - M. Yannick Texier, Gérard Le Cam, Bernard Dussaut, le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement no 99 rectifié ; rejet des amendements nos 400 et 305.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 37
Amendements identiques nos 114 rectifié de M. Bernard Barraux et 249 rectifié de M. Claude Biwer. - MM. Yannick Texier, Christian Gaudin, le rapporteur, le ministre. - Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.
Amendement no 65 de la commission et sous-amendement no 309 de M. Bernard Dussaut. - MM. le rapporteur, Daniel Raoul, le ministre. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié insérant un article additionnel.
Amendements identiques nos 133 rectifié bis de M. Dominique Mortemousque et 308 de M. Bernard Dussaut ; amendement no 66 de la commission. - MM. Yannick Texier, Daniel Raoul, le rapporteur, le ministre. - Retrait des amendements nos 133 rectifié bis et 308 ; adoption de l'amendement no 66 modifiant l'intitulé.
Mme Bariza Khiari, M. le ministre.
Adoption de l'article.
Amendement no 252 rectifié bis de M. Denis Badré. - MM. Christian Gaudin, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 402 de Mme Michelle Demessine. - Mme Michelle Demessine, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement no 67 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 316 rectifié bis de M. Gérard César, repris par la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 68 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 199 rectifié de M. Christian Gaudin. - MM. Christian Gaudin, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 317 rectifié bis de M. Gérard César, repris par la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 70 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 69 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 200 de M. Christian Gaudin. - MM. Christian Gaudin, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 71 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 319 rectifié bis de M. César, repris par la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 72 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 73 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 74 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 320 rectifié bis de M. Gérard César, repris par la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 75 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 263 rectifié de M. Christian Gaudin. - MM. Christian Gaudin, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 76 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 77 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 78 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 79 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 80 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 81 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 82 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 83 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 84 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 85 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 86 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 44
Amendement no 87 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements nos 134 rectifié bis de M. Dominique Mortemousque et 307 rectifié de M. Bernard Dussaut. - MM. Yannick Texier, Bernard Dussaut, le rapporteur, le ministre. - Retrait des deux amendements.
Amendement no 135 rectifié bis de M. Dominique Mortemousque. - MM. Yannick Texier, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 306 de M. Bernard Dussaut. - MM. Bernard Dussaut, le rapporteur, le ministre,
Renvoi de la suite de la discussion.
7. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
9. Dépôt d'un rapport d'information
10. Ordre du jour
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert
vice-président
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Assistants maternels et assistants familiaux
Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux (n° 328, 2004-2005).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. André Lardeux, rapporteur pour la Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire, réunie le 10 mai dernier à l'Assemblée nationale, est parvenue à un accord sur la rédaction du projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux. Nous arrivons aujourd'hui, après une navette parlementaire commencée au Sénat en mai 2004, au terme d'un processus législatif exemplaire.
Je me félicite de constater que notre assemblée a largement contribué à rendre ce travail fructueux, tant par l'importance des amendements qui ont été adoptés que par la qualité de nos débats. A ce titre, je souhaite tout particulièrement rendre hommage à M. Fourcade, qui avait été le rapporteur de notre commission lors de l'examen du texte en première lecture. Le bilan positif que nous faisons aujourd'hui de cette année de travail lui doit beaucoup.
J'observe, enfin, avec satisfaction que l'intervention du ministre devant le Sénat en deuxième lecture a permis de lever les ambiguïtés que nous avions dénoncées dans l'interprétation de certaines dispositions de la nouvelle convention collective nationale des assistants maternels.
En réalité, le travail de la commission mixte paritaire s'est trouvé simplifié par le fait que la seconde lecture du texte avait déjà permis de rapprocher significativement les points de vue entre les deux assemblées. De ce fait, moins d'une dizaine de points restaient à clarifier.
Dans le premier volet du projet de loi, consacré aux conditions d'exercice de la profession, quelques choix devaient être opérés, car plusieurs amendements adoptés par l'Assemblée nationale entraient en contradiction avec les positions retenues par le Sénat.
Il s'agissait : de la suppression de l'ouverture des « relais assistants maternels » aux assistants parentaux, à l'article 1er B ; de la participation bénévole d'un ancien assistant maternel ou familial à la procédure d'agrément et au suivi des pratiques professionnelles, aux articles 5 et 9 bis ; des modalités d'encadrement de l'utilisation du bulletin n° 3 du casier judiciaire par le service de PMI, à l'article 5 ; de la possibilité, pour les assistants maternels vivant dans une zone urbaine sensible, de disposer d'un local hors de leur domicile pour garder les enfants, également à l'article 5.
D'une manière parfaitement équilibrée, la commission mixte paritaire s'est rendue aux arguments de l'Assemblée nationale s'agissant des deux premiers points, mais a suivi le Sénat sur les deux derniers.
Elle a ainsi mieux encadré l'utilisation du bulletin n° 3 du casier judiciaire lors de la procédure d'agrément et a supprimé la dérogation d'exercice de la profession hors du domicile, que l'Assemblée nationale avait accordée aux assistants maternels résidant en zone urbaine sensible.
Cette disposition posait en effet deux questions : celle du maintien des déductions fiscales accordées aux assistants maternels alors même que, dans ce cas, ils n'auraient pas utilisé leur domicile comme lieu de travail, et celle de l'engagement de la responsabilité des maires en cas d'incident dans le local agréé qui aurait été destiné à l'accueil des enfants.
Le compromis ainsi trouvé sur cette première partie me paraît pleinement satisfaisant, d'autant que les avancées initialement proposées par le Sénat n'avaient pas été remises en cause par l'Assemblée nationale : je pense notamment à la reconnaissance officielle des relais assistants maternels et à l'intégration des assistants maternels et familiaux dans les publics prioritaires pour l'accès à un logement locatif social.
Concernant le « volet droit du travail » du projet de loi, nous sommes aisément parvenus à une rédaction commune sur les trois points mineurs demeurant en discussion, reprenant d'ailleurs les positions défendues par le Sénat, qu'il s'agisse de la définition d'une norme nationale pour les indemnités et fournitures à remettre à l'assistant maternel, du régime juridique applicable en cas d'absence de l'enfant ou du mécanisme de « report de congés » créé au bénéfice des assistants familiaux.
Ces trois points s'ajoutent ainsi aux amendements d'origine sénatoriale qui avaient été adoptés en deuxième lecture et qui n'ont pas été remis en cause.
Notre assemblée aura donc amélioré le texte en créant une procédure d'annualisation du temps de travail des assistants maternels sur la base d'un plafond maximal de 2 250 heures ; en assurant la coordination de la loi avec les dispositions de la convention collective en matière de versement des indemnités et fournitures d'entretien et de modalités de prise de congé des assistants maternels ; enfin, en instituant un mécanisme de « report de congé » assimilable à un « compte épargne-temps » au bénéfice des assistants familiaux.
En définitive, votre commission des affaires sociales se félicite des avancées majeures permises par ce texte particulièrement attendu par les professionnels du secteur, comme par les familles. Je me réjouis de constater que, après les lois de 1977 et 1992, cette réforme fera date.
L'Assemblée nationale et le Sénat se sont finalement rejoints sur un point d'équilibre satisfaisant entre l'intérêt de l'enfant, les besoins des familles et l'amélioration nécessaire des conditions de travail des assistants maternels et familiaux.
C'est pourquoi la commission des affaires sociales vous invite à adopter ce projet de loi tel qu'il résulte des travaux de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre. (M. Francis Giraud applaudit.)
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous présenter le projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux en vue de son adoption définitive.
Je sais à quel point votre Haute Assemblée a contribué à enrichir ce texte au cours des différentes lectures, et je vous en remercie.
Je tiens à remercier tout particulièrement le président de la commission des affaires sociales, M. About, ainsi que les rapporteurs de ce texte, MM. André Lardeux et Jean-Pierre Fourcade.
Ce texte est très attendu par les professionnels et par tous les partenaires du secteur de la petite enfance.
Il est l'aboutissement d'un long travail de concertation et je tiens à remercier les nombreux acteurs qui ont participé aux travaux préparatoires, notamment les organisations syndicales et professionnelles représentant les assistants maternels et leurs employeurs, mais aussi l'Assemblée des départements de France, l'Association des maires de France et la Caisse nationale d'allocations familiales.
Il était du devoir du Gouvernement de faire en sorte que ces travaux de grande qualité puissent maintenant trouver un aboutissement rapide.
J'ai souhaité que la dernière lecture du projet de loi puisse avoir lieu dès la reprise des travaux du Parlement.
Il faut maintenant que les décrets d'application soient pris dans les meilleurs délais. Ils feront l'objet, eux aussi, d'une large concertation.
Le texte qui vous est soumis aujourd'hui reflète la volonté du Gouvernement d'agir en faveur de la petite enfance.
Dans la période récente, plusieurs mesures concrètes sont venues témoigner de l'engagement du Gouvernement au service de la politique familiale et, en particulier, de l'accueil des enfants.
Je citerai, par exemple, la mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant, qui est une aide très substantielle, notamment pour les familles disposant de faibles revenus.
Il convient de mentionner aussi le crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants. Cette disposition assure désormais une équité complète entre les familles, quel que soit le niveau de leurs revenus.
Enfin, comme vous le savez, le Gouvernement a décidé d'accroître le nombre de places de crèche. C'est pourquoi le Premier ministre vient d'annoncer la création de 15 000 places supplémentaires, qui s'ajouteront aux 28 000 places résultant des plans qui ont été lancés précédemment.
C'est dans le cadre de cette politique familiale que s'inscrit l'adoption de ce texte.
Il était important de reconnaître le rôle des assistants maternels et des assistants familiaux.
Le projet de loi qui vous est soumis redonne tout leur sens, toute leur importance à ces deux métiers qui offrent une solution de proximité humaine et bien adaptée aux exigences des parents.
Cette réforme vient compléter en profondeur un train de mesures qui ont été initiées dès 1977 et réactualisées en 1992.
Elle permet surtout de franchir une nouvelle étape. La reconnaissance de ces deux professions passe désormais par une redéfinition des modalités d'agrément ; les exigences en matière de formation sont renforcées dans de nombreux domaines ; le statut des assistants maternels et familiaux est amélioré, notamment en matière de rémunération, de temps de travail, de congés et de garanties en cas de licenciement.
Les assistants maternels occupent une place essentielle dans le processus de développement de la jeune enfance.
Les dispositions qui les concernent visent à assurer une meilleure qualité de service.
Premièrement, l'agrément : il fournit une garantie de sérieux et de sécurité. C'est le sens du formulaire que la loi met en place. Les candidats au métier d'assistant maternel seront agréés au vu de leurs aptitudes éducatives. La maîtrise de la langue française sera une condition.
Deuxièmement, l'accent est également mis sur la formation. La loi permettra de créer une nouvelle formation d'assistant maternel, plus longue et qui débouchera sur un certificat d'aptitude professionnelle « petite enfance ». En outre, les assistants maternels devront bénéficier d'une formation aux gestes de premiers secours. Il s'agira d'un préalable à tout début d'activité.
Troisièmement, les conditions de travail : elles sont améliorées, notamment en ce qui concerne le contrat de travail, la rémunération, ainsi que le temps de travail et les congés.
S'agissant des assistants familiaux, le texte apporte également des améliorations significatives. Les assistants familiaux sont un des piliers du système de l'aide sociale à l'enfance. Ils accueillent de façon permanente les enfants en difficulté. Ils viennent épauler les familles qui doivent affronter des moments difficiles.
Le texte permet d'améliorer leur formation, en distinguant deux temps : un stage de préparation à l'accueil des enfants et une formation d'adaptation à l'emploi qui sera délivrée au cours des trois premières années d'activité et qui conduira à un diplôme.
Le projet de loi améliore également leur statut professionnel. Plusieurs mesures ont été proposées, notamment la nouvelle structure de leur rémunération. Désormais, le revenu des assistants familiaux sera moins dépendant du nombre d'enfants accueillis.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement a cherché à apporter avec vous des réponses concrètes et justes aux attentes des professionnels.
Il a également souhaité satisfaire les aspirations des parents au regard de ce mode d'accueil.
En améliorant le statut des assistants maternels et des assistants familiaux, nous contribuerons à permettre aux parents de concilier plus facilement vie familiale et vie professionnelle. C'est essentiel pour que les couples puissent réaliser leur projet de vie. C'est également indispensable pour assurer le dynamisme de notre société et pour renforcer son activité et sa capacité à regarder l'avenir avec confiance. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, attendue, tant par les assistants maternels que par les familles, cette réforme s'inscrit dans deux logiques : l'amélioration de l'offre d'accueil complémentaire en crèche, annoncée par M. le Premier ministre lors de sa déclaration de politique générale et l'instauration d'un crédit d'impôt pour la garde des jeunes enfants.
S'il a été réformé au début des années quatre-vingt-dix, le statut des assistants maternels date néanmoins de 1977 et ne répond donc plus aux nécessités actuelles. Renforcé par la loi du 12 juillet 1992, il a, certes, rendu la formation initiale obligatoire, simplifié la procédure d'agrément et institué une mensualisation des rémunérations. Cependant, il reste bien en deçà des attentes et des évolutions nécessaires à la pérennisation de cette profession.
Face à l'insuffisance de l'offre de garde pour la petite enfance, il était urgent de réformer, de renforcer et de valoriser le mode de garde choisi par 55 % des familles. Avec la mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, l'offre de garde par les assistants maternels risque rapidement de devenir insuffisante face à l'augmentation des demandes des familles, notamment dans les grandes agglomérations.
Ce texte, en professionnalisant davantage les assistants maternels et en rapprochant leur statut juridique du droit commun du code du travail, devrait permettre de susciter de nouvelles vocations.
Toutefois, s'il était urgent de réformer le statut des assistants maternels, il était également indispensable, dans le même temps, de ne pas déséquilibrer le rapport contractuel avec les parents employeurs. Aussi était-il nécessaire de rendre obligatoire l'établissement d'un contrat de travail écrit et de redéfinir les modalités de rupture de celui-ci. Il fallait donc éviter l'instauration de mesures trop contraignantes, qui auraient eu pour effet de rendre ce mode de garde insupportable pour les familles et qui auraient sans doute entraîné une hausse de la « garde au noir ».
Ce projet de loi répond à de nombreuses questions. Comment faire pour que les professionnels soient mieux formés et pour que les familles puissent confier leur enfant, en étant pleinement rassurées sur les conditions de la garde, sans pour autant trop lourdement grever leur budget ? Comment trouver le parfait équilibre entre la protection de l'enfant et de sa famille, d'une part, et la sécurité professionnelle de l'assistant, d'autre part ?
Ce texte aborde les questions difficiles de la nécessaire clarification et de la délimitation entre le statut des assistants maternels permanents, désormais appelés assistants familiaux, et celui des assistants maternels, qui accueillent des enfants chez eux pour la journée. Il traite également de la rénovation du statut juridique des assistants maternels. Enfin, il amorce une amélioration de la qualité de l'accueil des enfants qui leur sont confiés.
Je me réjouis donc des résultats obtenus aujourd'hui, car nous avons réussi à élaborer un texte équilibré et consensuel.
Ce texte est équilibré, car il prend en compte les spécificités départementales dans l'attribution des agréments. Je remercie le président de commission des affaires sociales, M. Nicolas About, de sa proposition de synthèse formulée devant la commission mixte paritaire.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Merci !
Mme Muguette Dini. Ce texte est équilibré, également, car il place l'enfant, sa sécurité, sa santé et ses besoins au coeur des systèmes d'agrément. Il ne fait désormais plus supporter aux familles les coûts éventuels des retraits d'agrément, effectués et décidés par les conseils généraux.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Oui !
Mme Muguette Dini. Ce texte est équilibré, en outre, car il donne à tous les assistants maternels et familiaux la reconnaissance nécessaire, en refusant, par exemple, la précarisation de ceux qui travaillent dans des quartiers dits « sensibles » et en renforçant l'effort d'harmonisation réalisé par l'ensemble de ce projet de loi.
Ce texte est équilibré, enfin, car le mécanisme d'annualisation du temps de travail proposé par notre Haute Assemblée devrait offrir aux familles plus de souplesse et leur imposer moins de contraintes en termes d'organisation des temps de garde. Instaurer non pas une durée de travail hebdomadaire maximale mais un plafond annuel répond parfaitement à la nécessaire flexibilité demandée à cette profession.
Pour toutes ces raisons, le groupe UC-UDF est en accord avec ce texte, qui ouvre la voie à une meilleure prise en compte des enfants, tout en préservant le haut niveau d'exigence que les familles sont en droit d'attendre de ceux qui en ont la garde. C'est pourquoi il le votera. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. La reconnaissance des deux métiers d'assistant maternel et d'assistant familial est, comme nous l'avons déjà dit à maintes reprises, une mesure essentielle pour améliorer l'accueil de la petite enfance, mais elle n'est pas suffisante.
Cette reconnaissance a en effet des conséquences économiques et sociales importantes, sur lesquelles ce projet de loi reste muet.
Le temps n'a pourtant pas manqué : le parcours législatif de ce projet de loi aura été bien long, et ce alors même qu'il était urgent de donner un véritable statut aux 300 000 assistants maternels et aux 45 000 assistants familiaux qui vivent, depuis trop longtemps, dans un véritable flou juridique les maintenant à l'écart du droit commun du travail et contraignant la plupart d'entre eux à une précarité inadmissible.
Tout le monde s'accorde donc à dire qu'il était primordial d'accorder aux assistants familiaux et aux assistants maternels la reconnaissance et la considération auxquelles ils ont droit. Nous le reconnaissons et nous l'avons dit : le débat parlementaire aura permis quelques avancées positives.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ah !
M. Guy Fischer. Toutefois, les mesures que nous avons défendues et qui allaient dans le sens d'une plus grande reconnaissance et d'une meilleure protection de ces deux professions - elles avaient d'ailleurs trouvé un écho à l'Assemblée nationale - ont été supprimées par le Sénat. Je pense ainsi à l'uniformisation des salaires, à la formation professionnelle reconnue sur tout le territoire, ou encore à l'obtention de l'agrément à partir d'une grille nationale. Même si des avancées ont eu lieu, toutes les dispositions favorables aux assistants maternels et aux assistants familiaux ont été, non pas tout à fait abandonnées, mais insuffisamment précisées.
Cette régression est encore plus sensible s'agissant des dispositions relatives au droit du travail. En effet, sous le prétexte d'harmoniser les dispositions de ce projet de loi avec la convention collective nationale signée entre les assistants maternels et les particuliers employeurs, le Sénat a notamment modifié les mesures relatives à la rémunération des assistants familiaux en cas d'absence de l'enfant gardé et celles qui concernent les congés des assistants maternels et les indemnités à leur verser, ainsi que les fournitures à leur procurer.
Toutefois, même si l'on ne peut pas dire que la navette entre les deux assemblées a provoqué des dégâts dans ce projet de loi, les questions qui motivent notre abstention demeurent.
Ce texte ne permet pas, en effet, une reconnaissance pleine et entière des métiers d'assistant maternel et d'assistant familial, alors que les attentes de ces professionnels sont grandes. Or, en renvoyant sans cesse au domaine réglementaire, ce projet de loi risque, ce que nous ne souhaitons pas, de les décevoir. En effet, quel sera le contenu réel des formations ? Quel sera le taux de la rémunération ? La qualification aura-t-elle une valeur nationale ? Nous n'avons pas pu discuter de ces questions, qui sont renvoyées au domaine réglementaire. L'incertitude demeure donc.
Certes, le Sénat a adopté un amendement tendant à prévoir la consultation des principales associations d'élus sur les projets de décrets d'application. Cette garantie n'est pourtant que partielle, car rien ne vous obligera, monsieur le ministre, à suivre les avis desdites associations.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Heureusement !
M. Guy Fischer. Par ailleurs, les différents acteurs du secteur de la petite enfance auraient certainement préféré que le projet de loi soit dès aujourd'hui plus précis. D'ailleurs, un certain nombre d'associations, je pense à l'UNAFAM, l'Union nationale des familles de malades mentaux, ont vivement contesté plusieurs dispositions de ce texte.
Plus généralement, ce texte ne permet ni de répondre à la question des salaires de l'ensemble des accueillants, à titre permanent ou non, ni à celle de la réduction des inégalités de rémunération suivant les départements. Pourtant, le rapport d'avril 2002, qui reprenait les conclusions des groupes de travail animés par la direction générale de l'action sociale, avait mis en évidence les différences considérables de niveau de rémunération entre les départements.
Ainsi, selon ce rapport, les salaires peuvent varier du simple au double, par le biais de l'indemnité d'entretien, le salaire moyen se situant, à l'échelon national, entre 105 et 110 fois le SMIC horaire par mois. Dès lors, on ne peut que constater le manque cruel de dispositions relatives à l'indispensable revalorisation salariale de ces professions.
Par ailleurs - et c'est un comble ! - ce texte ne contient rien sur les droits syndicaux, les droits sociaux, les retraites, notamment la validation des périodes travaillées avant 1992. En réponse à ces questions, qui ont été soulevées avec force par les organisations syndicales représentant les deux professions, de réelles mesures sociales auraient pourtant grandement contribué à une véritable reconnaissance de ces métiers.
J'en viens au financement des réformes prévues dans ce projet de loi. Le problème reste entier. De nombreuses dispositions auront en effet des incidences financières sur les parents employeurs et sur les conseils généraux, sans que ces derniers soient à même de les quantifier, compte tenu du fait qu'aucune étude d'impact de ces mesures, aucun chiffrage du coût de leur application ne sont pour l'instant disponibles. Or les compensations prévues par l'Etat, si elles existent, sont totalement virtuelles.
En somme, ce texte, destiné à permettre le franchissement d'étapes décisives - ce dont nous nous réjouissons, monsieur le ministre - pour les assistants maternels et familiaux reste muet sur des questions aussi essentielles que la protection sociale, la durée du temps de travail, le salaire, la formation, ou encore la retraite. Je ne parlerai pas des passerelles.
Nous ne pouvons admettre le renvoi quasi systématique à des mesures réglementaires, s'agissant de dispositions ayant des incidences financières sur les départements ou sur les employeurs privés.
En conclusion, entre les dispositions que nous jugeons favorablement et celles dont la présence ou l'absence sont difficilement acceptables, le bilan reste...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Globalement positif ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. Ah ! Dirais-je qu'il est positif ? Non ! Le bilan est globalement négatif. (Nouveaux sourires.)
Les professionnels concernés par ce projet de loi attendaient un véritable statut, qui soit le signe de la reconnaissance et du respect auxquels ils ont droit. Au lieu de cela, ils doivent aujourd'hui se contenter d'un projet de loi qui fait de leur métier une profession aux contours encore mal définis et qui n'apporte pas de réponses satisfaisantes aux problèmes sociaux auxquels ils sont confrontés.
Nous n'avons donc pas d'autre choix que de nous abstenir sur un texte qui n'est pas à la hauteur des enjeux de la professionnalisation des assistants maternels et des assistants familiaux.
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la navette sur ce projet de loi très attendu a duré une année, avec tous les inconvénients que cela suppose. Nombreux sont les assistants maternels et familiaux qui, avec impatience, m'ont demandé des nouvelles de ce texte.
De plus, la convention collective nationale des assistants maternels du particulier employeur est entrée en vigueur entre temps. Les choses ont donc été faites dans le désordre. Nous le regrettons. Mais comment pouvait-il en être autrement devant un tel manque d'empressement de la part du Gouvernement ?
Nous constatons qu'au terme de son examen à l'Assemblée nationale et de son passage en commission mixte paritaire le texte final, malgré certaines avancées, ne fait toujours pas apparaître une volonté déterminée pour que les professions d'assistant maternel et d'assistant familial soient reconnues comme étant des métiers à part entière, avec des conditions égalitaires dans tout le pays.
Je ne reviendrai pas sur toutes les décisions de la commission mixte paritaire.
Nous regrettons que des amendements déposés par mon groupe en première lecture, qui n'avaient pas été adoptés par le Sénat mais l'avaient été par l'Assemblée nationale, puis qui avaient été repoussés par le Sénat et à nouveau adoptés par l'Assemblée nationale, aient finalement été rejetés par la Haute Assemblée.
Pourtant, ils étaient la traduction de demandes formulées par les nombreux assistants maternels et assistants familiaux que nous avons rencontrés. Ils concernaient, bien sûr, la définition de critères nationaux d'agrément. Je l'ai dit ici même lors de chaque examen du texte : nous restons convaincus qu'il fallait maintenir des critères nationaux pour la délivrance de l'agrément, afin de préserver l'égalité de traitement sur tout le territoire national et d'apporter des garanties aux familles. De tels critères auraient permis également de garantir l'objectivité totale de l'agrément.
Vous prétendez donner un véritable statut et une reconnaissance à cette profession, mais le texte accroît finalement le risque de dérives dans des départements.
Par ailleurs, la commission mixte paritaire a adopté un amendement tendant à supprimer le dernier alinéa de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles qui autorise les femmes à exercer la profession d'assistant maternel hors de leur domicile lorsqu'elles vivent dans des quartiers peu attractifs. Nous sommes favorables à cette suppression car une telle disposition n'allait dans l'intérêt ni des assistants maternels, ni des familles et des enfants, ni des élus locaux.
Enfin, la commission mixte paritaire a adopté, dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, l'article 36 visant la consultation des principales associations d'élus, pour avis, sur les projets de décrets d'application de la présente loi. Cette rédaction ne nous déplaît pas car elle ne réduit pas la portée de notre amendement adopté ici même le 31 mars dernier.
Nous avons souligné à maintes reprises que ce projet de loi faisait trop souvent référence à des décrets et nous nous sommes interrogés sur le contenu de ces textes d'application, notamment de ceux qui engagent les finances locales. Il nous semble important et indispensable que les associations d'élus, comme l'Assemblée des départements de France et l'Association des maires de France, puissent y apporter leur concours. Ainsi, l'expérience des élus locaux sera prise en compte.
Cela étant, ces quelques dispositions, pour intéressantes qu'elles soient, ne sont pas de nature à nous faire changer d'avis sur l'ensemble de ce texte. C'est pourquoi nous nous abstiendrons.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement, étant appelé à se prononcer avant l'Assemblée nationale, le Sénat se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte.
TITRE IER
DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE DE L'ACTION SOCIALE ET DES FAMILLES
CHAPITRE IER
DISPOSITIONS MODIFIANT LE LIVRE II DU CODE DE L'ACTION SOCIALE ET DES FAMILLES
Article 1er B
(Texte de l'Assemblée nationale)
Après l'article L. 214-2 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un article L. 214-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 214-2-1. - Il peut être créé, dans toutes les communes ou leurs groupements, un relais assistants maternels, qui a pour rôle d'informer les parents et les assistants maternels sur ce mode d'accueil en tenant compte des orientations définies, le cas échéant, par la commission départementale de l'accueil des jeunes enfants, et d'offrir aux assistants maternels un cadre pour échanger sur leur pratique professionnelle, sans préjudice des missions spécifiques confiées au service départemental de protection maternelle et infantile visé au chapitre II du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique. »
CHAPITRE II
DISPOSITIONS MODIFIANT LE TITRE II DU LIVRE IV DU CODE DE L'ACTION SOCIALE ET DES FAMILLES
Article 5
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
Les articles L. 421-2 à L. 421-5 du même code sont ainsi rétablis :
« Art. L. 421-2. - L'assistant familial est la personne qui, moyennant rémunération, accueille habituellement et de façon permanente des mineurs et des jeunes majeurs de moins de vingt et un ans à son domicile. Son activité s'insère dans un dispositif de protection de l'enfance, un dispositif médico-social ou un service d'accueil familial thérapeutique. Il exerce sa profession comme salarié de personnes morales de droit public ou de personnes morales de droit privé dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre ainsi que par celles du chapitre III du titre VII du livre VII du code du travail, après avoir été agréé à cet effet.
« L'assistant familial constitue, avec l'ensemble des personnes résidant à son domicile, une famille d'accueil.
« Art. L. 421-3. - L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil général du département où le demandeur réside.
« Les critères nationaux d'agrément sont définis par décret en Conseil d'Etat. Toutefois le président du conseil général peut, par décision motivée et à titre dérogatoire, adapter les critères d'agrément pour répondre à des besoins spécifiques.
« Au cours de la procédure d'instruction de la demande d'agrément, le service départemental de protection maternelle et infantile mentionné au chapitre II du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique peut solliciter l'avis d'un assistant maternel ou d'un assistant familial n'exerçant plus cette profession, mais disposant d'une expérience professionnelle d'au moins dix ans, et titulaire d'un des diplômes prévus par voie réglementaire.
« La procédure d'instruction doit permettre de s'assurer de la maîtrise du français oral par le candidat.
« L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne. Les modalités d'octroi ainsi que la durée de l'agrément sont définies par décret. Cette durée peut être différente selon que l'agrément est délivré pour l'exercice de la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial. Les conditions de renouvellement de l'agrément sont fixées par ce décret. Sans préjudice des dispositions de l'article L. 421-9, le renouvellement de l'agrément des assistants familiaux est automatique et sans limitation de durée lorsque la formation mentionnée à l'article L. 421-15 est sanctionnée par l'obtention d'une qualification.
« Un arrêté du ministre chargé de la famille fixe la composition du dossier de demande d'agrément ainsi que le contenu du formulaire de demande qui, seul, peut être exigé à ce titre. Il définit également les modalités de versement au dossier d'un extrait du casier judiciaire n° 3 de chaque majeur vivant au domicile du demandeur, à l'exception des majeurs accueillis en application d'une mesure d'aide sociale à l'enfance. L'agrément n'est pas accordé si l'un des majeurs concernés a fait l'objet d'une condamnation pour une infraction visée aux articles 221-1 à 221-5, 222-1 à 222-18, 222-23 à 222-33, 224-1 à 224-5, 225-12-1 à 225-12-4, 227-1, 227-2 et 227-15 à 227-28 du code pénal. Pour toute autre infraction inscrite au bulletin n° 3 du casier judiciaire, il revient au service départemental de protection maternelle et infantile de juger de l'opportunité de délivrer ou non l'agrément.
« Tout refus d'agrément doit être motivé.
« Les conjoints des membres des Forces françaises et de l'Elément civil stationnés en Allemagne qui souhaitent exercer la profession d'assistant maternel pour accueillir des mineurs à charge de personnes membres des Forces françaises et de l'Elément civil peuvent solliciter un agrément auprès du président du conseil général d'un département limitrophe sauf dans les cas, prévus par décret, où cette compétence est exercée par l'Etat. Les modalités de délivrance de l'agrément sont prévues par convention entre l'Etat et les départements concernés.
« Art. L. 421-4. - L'agrément de l'assistant maternel précise le nombre et l'âge des mineurs qu'il est autorisé à accueillir simultanément ainsi que les horaires de l'accueil. Le nombre des mineurs accueillis simultanément ne peut être supérieur à trois y compris le ou les enfants de moins de trois ans de l'assistant maternel présents à son domicile, dans la limite de six au total. Toutefois, le président du conseil général peut, si les conditions d'accueil le permettent et à titre dérogatoire, autoriser l'accueil de plus de trois enfants simultanément et six enfants au total pour répondre à des besoins spécifiques. Lorsque le nombre de mineurs fixé par l'agrément est inférieur à trois, le président du conseil général peut modifier celui-ci pour augmenter le nombre de mineurs que l'assistant maternel est autorisé à accueillir simultanément, dans la limite de trois mineurs et dans les conditions mentionnées ci-dessus.
« Les modalités du contrôle auquel sont soumis les assistants maternels sont définies par décret en Conseil d'Etat.
« Art. L. 421-5. - L'agrément de l'assistant familial précise le nombre des mineurs qu'il est autorisé à accueillir. Le nombre des mineurs accueillis à titre permanent et de façon continue ne peut être supérieur à trois, y compris les jeunes majeurs de moins de vingt et un ans. Toutefois, le président du conseil général peut, si les conditions d'accueil le permettent et à titre dérogatoire, autoriser l'accueil de plus de trois enfants pour répondre à des besoins spécifiques. »
Article 6
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - L'article L. 421-2 du même code, qui devient l'article L. 421-6, est ainsi modifié :
1° Les deux premiers alinéas sont ainsi rédigés :
« Lorsque la demande d'agrément concerne l'exercice de la profession d'assistant maternel, la décision du président du conseil général est notifiée dans un délai de trois mois à compter de cette demande. A défaut de notification d'une décision dans ce délai, l'agrément est réputé acquis.
« Lorsque la demande d'agrément concerne l'exercice de la profession d'assistant familial, la décision du président du conseil général est notifiée dans un délai de quatre mois à compter de cette demande. A défaut de notification d'une décision dans ce délai, l'agrément est réputé acquis, ce délai pouvant être prolongé de deux mois suite à une décision motivée du président du conseil général » ;
2° Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Tant que l'agrément reste suspendu, aucun enfant ne peut être confié. » ;
3° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :
« Toute décision de retrait de l'agrément, de suspension de l'agrément ou de modification de son contenu doit être dûment motivée et transmise sans délai aux intéressés. » ;
4° Supprimé ;
5° Au dernier alinéa, après les mots : « des assistants maternels », sont insérés les mots : « et des assistants familiaux ».
II. - L'article L. 421-3 du même code, qui devient l'article L. 421-7, est ainsi modifié :
1° Après les mots : « un assistant maternel », sont insérés les mots : « ou un assistant familial » ;
2° Il est complété par les mots : « et, s'agissant des assistants maternels, d'une vérification par le président du conseil général dans le délai d'un mois à compter de leur emménagement, que leurs nouvelles conditions de logement satisfont aux conditions mentionnées au troisième alinéa de l'article L. 421-3 ».
III. - L'article L. 421-4 du même code, qui devient l'article L. 421-8, est ainsi modifié :
1° A Dans le premier alinéa, après les mots : « le maire de la commune de résidence de l'assistant maternel », sont insérés les mots : « ainsi que le président de la communauté de communes concernée » et, après les mots : « il informe également le maire », sont insérés les mots : « ainsi que le président de la communauté de communes » ;
1° Au premier alinéa, les mots : « l'article L. 421-3 » sont remplacés par les mots : « l'article L. 421-7 » ;
2° Au second alinéa, les mots : « et, pour ce qui concerne chaque commune, de la mairie. » sont remplacés par les mots et une phrase ainsi rédigée : « , de la mairie pour ce qui concerne chaque commune, de tout service ou organisation chargé par les pouvoirs publics d'informer les familles sur l'offre d'accueil existant sur leur territoire et de tout service ou organisation ayant compétence pour informer les assistants maternels sur leurs droits et obligations. La liste de ces services et organisations est fixée par voie réglementaire. »
IV. - L'article L. 421-5 du même code, qui devient l'article L. 421-9, est ainsi rédigé :
« Art. L. 421-9. - Le président du conseil général informe du retrait, de la suspension ou de la modification du contenu de l'agrément de l'assistant maternel les organismes débiteurs des aides à la famille instituées par l'article L. 531-5 du code de la sécurité sociale et l'article L. 841-1 du même code dans sa rédaction antérieure à l'article 60 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 (n° 2003-1199 du 18 décembre 2003), les représentants légaux du ou des mineurs accueillis et la personne morale qui, le cas échéant, l'emploie.
« Le président du conseil général informe la personne morale qui l'emploie du retrait, de la suspension ou de la modification du contenu de l'agrément d'un assistant familial. »
V. - A l'article L. 421-6 du même code, qui devient l'article L. 421-10, les mots : « l'article L. 421-1 » sont remplacés par les mots : « l'article L. 421-3 ».
VI. - A l'article L. 421-7 du même code, qui devient l'article L. 421-11, les mots : « des articles L. 421-5 et L. 421-6 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 421-9 et L. 421-10 », et les mots : « l'article L. 421-6 » sont remplacés par les mots : « l'article L. 421-10 ».
VII. - A l'article L. 421-8 du même code, qui devient l'article L. 421-12, les mots : « l'article L. 421-6 » sont remplacés par les mots : « l'article L. 421-10 ».
VIII. - L'article L. 421-9 du même code, qui devient l'article L. 421-13, est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : « les dommages » sont remplacés par les mots : « tous les dommages, quelle qu'en soit l'origine » ;
2° Le second alinéa est ainsi rédigé :
« Les assistants maternels employés par des personnes morales, les assistants familiaux ainsi que les personnes désignées temporairement pour remplacer ces derniers sont obligatoirement couverts contre les mêmes risques par les soins des personnes morales qui les emploient. »
Article 9 bis
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
Après l'article L. 421-17 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un article L. 421-17-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 421-17-1. - Le suivi des pratiques professionnelles des assistants maternels employés par des particuliers est assuré par le service départemental de protection maternelle et infantile visé au chapitre II du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique. Cette mission incombe à la personne morale de droit public ou de droit privé employeur s'agissant des assistants familiaux et des assistants maternels exerçant dans une crèche familiale. Dans tous les cas, l'avis d'un ancien assistant maternel ou familial répondant aux critères fixés au deuxième alinéa de l'article L. 421-3 peut être sollicité. »
TITRE II
DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE
Article 10 bis A
(Texte de l'Assemblée nationale)
Après l'article L. 2112-3 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 2112-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2112-3-1. - Pour l'application de l'article L. 2111-2, les services du département en charge de la protection maternelle et infantile peuvent demander, en cas de présomption d'accueil par l'assistant maternel d'un nombre d'enfants supérieur à celui autorisé par l'agrément prévu à l'article L. 421-4 du code de l'action sociale et des familles, les informations nécessaires à l'organisme de recouvrement des cotisations sociales mentionné à l'article L. 531-8 du code de la sécurité sociale, qui est tenu de les leur communiquer.
« Les informations demandées se limitent aux données relatives au nombre d'aides allouées au titre de la prestation d'accueil du jeune enfant pour l'assistant maternel qui fait l'objet du contrôle. »
TITRE II BIS
DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE DE LA CONSTRUCTION ET DE L'HABITATION
TITRE III
DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE DU TRAVAIL
CHAPITRE IER
DISPOSITIONS MODIFIANT LE TITRE VII DU LIVRE VII DU CODE DU TRAVAIL
Section 1
DISPOSITIONS COMMUNES
Article 14
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - Au premier alinéa de l'article L. 773-6 du même code, qui devient l'article L. 773-4, les mots : « Les assistantes maternelles » sont remplacés par les mots : « Les assistants maternels et les assistants familiaux » et les mots : « L. 773-3, L. 773-3-1, L. 773-5 et L. 773-10 » sont remplacés par les mots : « L. 773-8, L. 773-9, L. 773-17 et L. 773-26 ».
II. - L'article L. 773-4 du même code, qui devient l'article L. 773-5, est ainsi rédigé :
« Art. L. 773-5. - Les éléments et le montant minimal des indemnités et fournitures destinées à l'entretien de l'enfant sont définis par décret.
« Pour les assistants maternels, les éléments et le montant minimal des indemnités et fournitures destinées à l'entretien de l'enfant sont fixés en fonction de la durée d'accueil effective de l'enfant. Les indemnités et fournitures ne sont pas remises en cas d'absence de l'enfant.
« Pour les assistants familiaux, les indemnités et fournitures sont dues pour toute journée d'accueil commencée. »
III. - L'article L. 773-4-1 du même code, qui devient l'article L. 773-6, est ainsi rédigé :
« Art. L. 773-6. - Pendant les périodes de formation des assistants maternels mentionnées à l'article L. 421-14 du code de l'action sociale et des familles et intervenant après l'embauche, ainsi que pendant les périodes de formation des assistants familiaux mentionnées à l'article L. 421-15 du même code, la rémunération de l'assistant maternel ou de l'assistant familial reste due par l'employeur. »
Section 2
DISPOSITIONS APPLICABLES AUX ASSISTANTS MATERNELS
Article 16
(Texte de l'Assemblée nationale)
I. - A l'article L. 773-3 du même code, qui devient l'article L. 773-8, les mots : « assistantes maternelles accueillant des mineurs à titre non permanent » sont remplacés par les mots : « assistants maternels », et le mot : « jour » est remplacé par le mot : « heure ».
II. - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Une convention ou un accord collectif étendu ou une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement peut prévoir que, dans le cas d'une répartition inégale des heures d'accueil entre les mois de l'année de référence, la rémunération mensuelle est indépendante des heures d'accueil réelles et est calculée dans les conditions prévues par la convention ou l'accord. A défaut de convention ou d'accord, le contrat de travail peut prévoir ce dispositif et en fixer les modalités. »
Article 17
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
L'article L. 773-5 du même code, qui devient l'article L. 773-9, est ainsi rédigé :
« Art. L. 773-9. - En cas d'absence d'un enfant pendant une période d'accueil prévue par le contrat, l'assistant maternel bénéficie, dans les conditions et limites de la convention collective nationale des assistants maternels, du maintien de sa rémunération, sauf si l'enfant ne peut être accueilli du seul fait de l'assistant maternel ou lorsque l'absence est due à une maladie de l'enfant attestée par un certificat médical.
« Dans ce dernier cas, l'assistant maternel a droit à une indemnité compensatrice dont le montant minimal est fixé par décret. »
Section 3
DISPOSITIONS APPLICABLES AUX ASSISTANTS MATERNELS EMPLOYÉS PAR DES PARTICULIERS
Section 4
DISPOSITIONS APPLICABLES AUX ASSISTANTS MATERNELSET AUX ASSISTANTS FAMILIAUX EMPLOYÉS PAR DES PERSONNES MORALES DE DROIT PRIVÉ
Section 5
DISPOSITIONS APPLICABLES AUX ASSISTANTS MATERNELS EMPLOYÉS PAR DES PERSONNES MORALES DE DROIT PRIVÉ
Section 6
DISPOSITIONS APPLICABLES AUX ASSISTANTS FAMILIAUX EMPLOYÉS PAR DES PERSONNES MORALES DE DROIT PRIVÉ
Article 28
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
L'article L. 773-11 du même code, qui devient l'article L. 773-28, est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « Lorsqu'elles accueillent des mineurs qui résident chez elles à titre permanent, les personnes relevant de la présente section ne peuvent s'en séparer à l'occasion de » sont remplacés par les mots : « Les assistants familiaux ne peuvent se séparer des mineurs qui leur sont confiés pendant les » ;
2° Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, sous réserve de l'intérêt de l'enfant, l'employeur doit autoriser l'assistant familial qui en a effectué la demande écrite à se séparer simultanément de tous les enfants accueillis pendant une durée minimale de jours de congés annuels et une durée minimale de jours à répartir sur l'année, définies par décret.
« L'employeur qui a autorisé l'assistant familial à se séparer de tous les enfants accueillis pour la durée de ses congés payés organise les modalités de placement de ces enfants en leur garantissant un accueil temporaire de qualité pour permettre à l'assistant familial chez qui ils sont habituellement placés de faire valoir ses droits à congés. » ;
3° Au troisième alinéa, les mots : « l'assistante maternelle qui l'accueille à titre permanent » sont remplacés par les mots : « l'assistant familial » ; les mots : « cette dernière » sont remplacés par les mots : « ce dernier » ; les mots : « celle-ci » sont remplacés par les mots : « celui-ci » et la référence : « L. 773-6 » est remplacée par la référence : « L. 773-4 » ;
4° Il est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Avec leur accord écrit, il est institué un report de congés au bénéfice des assistants familiaux qui n'ont pas utilisé la totalité des droits ouverts au cinquième alinéa. Ce compte permet à son titulaire d'accumuler des droits à congés rémunérés, par report des congés annuels.
« L'assistant familial voit alors sa rémunération maintenue pendant la période de congés annuels, sans que s'ajoutent à celle-ci les indemnités prévues à l'article L. 773-4. Les droits à congés acquis au titre du report de congés doivent être exercés au plus tard à la date à laquelle l'assistant familial cesse définitivement ses fonctions ou liquide sa pension de retraite. »
Article 29 bis A
(Texte de l'Assemblée nationale)
La première phrase du troisième alinéa de l'article L. 952-6 du code du travail est ainsi rédigée :
« La contribution est calculée sur l'assiette retenue en application, pour les employés de maison, de l'article L. 133-7 du code de la sécurité sociale et, pour les assistants maternels, de l'article L. 242-1 du même code. »
CHAPITRE II
DISPOSITIONS DIVERSES
TITRE IV
DISPOSITIONS DIVERSES ET TRANSITOIRES
Article 31 bis CA
(Texte de l'Assemblée nationale)
L'article L. 531-8 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'organisme mentionné au premier alinéa délivre au salarié une attestation d'emploi. La délivrance de cette attestation valant bulletin de paie se substitue à la remise du bulletin de paie par l'employeur prévue par l'article L. 143-3 du code du travail. »
Article 36
(Texte de l'Assemblée nationale)
Les principales associations d'élus sont consultées pour avis sur les projets de décret pris en application de la présente loi.
Article 38
(Texte de l'Assemblée nationale)
I. - L'article L. 323-29 du code du travail est ainsi rétabli :
« Art. L. 323-29. - Des emplois à mi-temps et des emplois dits légers sont attribués, après avis de la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel, aux travailleurs handicapés qui ne peuvent être employés en raison de leur état physique ou mental, soit à rythme normal, soit à temps complet.
« Ces emplois sont recensés par l'administration. »
II. - Le même article est abrogé à compter du 1er janvier 2006.
M. le président. Sur les articles 1er B à 38, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un des articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire ?
Je rappelle que le vote est réservé.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte proposé par la commission mixte paritaire, je donne la parole à M. Alain Gournac, pour explication de vote.
M. Alain Gournac. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les assistants maternels constituent le premier mode de garde de la petite enfance, avant les crèches et la garde à domicile. Ainsi, 740 000 enfants de moins de six ans sont accueillis par 300 000 assistants à titre non permanent. Parallèlement, 42 000 assistants à titre permanent accueillent 65 000 enfants dans le cadre de la protection de l'enfance. Ces professionnels attendaient de longue date une revalorisation du statut de la profession d'assistant maternel. C'est aujourd'hui chose faite !
Le texte, tel qu'adopté par la commission mixte paritaire, est équilibré. Il répond à la fois aux besoins des enfants - c'est important -, aux attentes des familles et aux revendications légitimes de personnes qui exercent leur métier avec beaucoup de dévouement. Ces métiers, dont l'utilité sociale est unanimement reconnue, sont enfin considérés comme des professions à part entière. Nous nous en félicitons.
Le premier objectif poursuivi consistait à distinguer nettement les assistants maternels des assistants familiaux. Cette distinction consacre ainsi la spécificité de chacune de ces professions.
La seconde étape avait pour but de répondre à la demande croissante des familles en rendant la profession des assistants maternels plus attractive : le rapprochement de leur statut juridique avec le droit commun du travail renforce ainsi l'assise de leur protection et améliore leurs conditions de travail, ce qui devrait permettre de susciter de nouvelles vocations, comme nous le souhaitons.
Ainsi, pour les salariés, l'établissement d'un contrat de travail écrit est rendu obligatoire et les modalités de sa rupture sont redéfinies précisément. L'équilibre dans les rapports contractuels entre les assistants maternels et les parents employeurs est également préservé. L'agrément des assistants maternels sera fixé en fonction de critères nationaux, ce qui était important pour eux, tout en respectant la liberté des présidents de conseil général d'introduire des règles spécifiques propres à leur département. (Marques d'approbation sur plusieurs travées de l'UMP.) J'avais d'ailleurs mené un combat à ce sujet.
Enfin, l'adoption du mécanisme d'annualisation du temps de travail sur la base d'une durée maximale de 2 250 heures, proposé par le Sénat, donnera aux familles des souplesses utiles.
Les partenaires sociaux ne pourront qu'être satisfaits : le texte proposé rejoint, en l'améliorant, le travail de la profession elle-même, puisqu'il est conforme à la convention collective conclue le 1er juillet 2004, étendue par arrêté ministériel en date du 17 décembre 2004.
Les propositions de notre excellent rapporteur, André Lardeux, dont je salue ici le travail, ont sensiblement enrichi le projet de loi tout au long de la navette parlementaire. (L'orateur se tourne vers M. le rapporteur.) Je tenais à vous en féliciter, mon cher collègue.
Enfin, je voudrais, monsieur le ministre, vous dire la satisfaction que nous avons de pouvoir travailler avec vous sur les dossiers de la politique familiale, qui nous tiennent tant à coeur. Je suis persuadé que vous serez à l'écoute des sénateurs dans ce domaine, qui est extrêmement important.
Pour toutes ces raisons, les membres du groupe de l'UMP voteront avec conviction ce texte, qui s'inscrit pleinement dans la politique volontariste destinée à améliorer la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, que mène le Gouvernement depuis trois ans. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte proposé par la commission mixte paritaire.
(Le projet de loi est adopté. - Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
3
Petites et moyennes entreprises
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises (nos 297, 333, 362, 363, 364).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'examen de l'article 29.
Article 29
Il est créé un article L. 470-4-1 du code de commerce ainsi rédigé :
« Art. L. 470-4-1. - Pour les délits prévus au titre quatrième du présent livre pour lesquels une peine d'emprisonnement n'est pas encourue, le chef du service d'enquête compétent a droit de transiger, après accord du procureur de la République, selon les modalités fixées par décret en Conseil d'Etat.
« L'acte par lequel le procureur de la République donne son accord à la proposition de transaction est interruptif de la prescription de l'action publique.
« L'action publique est éteinte lorsque l'auteur de l'infraction a exécuté dans le délai imparti les obligations résultant pour lui de l'acceptation de la transaction. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 395, présenté par Mme Demessine, MM. Coquelle, Billout et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
L'article L. 470-4 du code de commerce est ainsi rédigé :
« Art. L. 470-4 - Lorsqu'une personne morale ayant fait l'objet, depuis moins de deux ans, d'une condamnation pour l'une des infractions définies par les articles L. 441-3, L. 441-4, L. 441-5, L. 441-6, L. 441-6-1, L. 442-2, L. 442-3 et L. 442-4 commet la même infraction, le taux maximum de la peine d'amende encourue est égal à quinze fois celui applicable aux personnes physiques pour cette infraction ».
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 29 du projet de loi pose d'incontestables problèmes. En effet, il tend à favoriser la mise en oeuvre de procédures de transaction dans les cas où est commise une infraction aux règles posées par le chapitre IV du livre IV du code de commerce portant notamment sur les relations commerciales et sur la facturation des prestations de services ou des achats de biens.
La procédure de transaction pénale, qu'on le veuille ou non, revient, ni plus ni moins, à une justice qui ne prête qu'aux riches. En effet, moyennant quelques engagements, en l'occurrence le paiement d'une somme équivalant au montant de l'amende a priori encourue, les grands groupes de la distribution pourront persévérer dans leurs méthodes, si particulières, de marketing, si tant est d'ailleurs que ces dernières fassent l'objet d'un délit constaté.
Pour notre part, plutôt que de laisser cette faculté supplémentaire aux éventuels contrevenants, nous préférons relever quelque peu le quantum de la peine prévue par le droit actuel. Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 177, présenté par M. Cambon, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 470-4-1 du code de commerce, remplacer les mots :
le chef du service d'enquête compétent
par les mots :
l'autorité administrative chargée des prix et de la concurrence
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, en remplacement de M. Christian Cambon, rapporteur pour avis. Il s'agit d'un amendement de précision. Le projet de loi autorise le chef du service d'enquête compétent à procéder à une transaction. La commission estime qu'il vaut mieux viser le service. Elle avait proposé de donner cette compétence à l'autorité administrative chargée des prix et de la concurrence mais il semble préférable de l'octroyer à l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation. C'est pourquoi je rectifie en ce sens l'amendement n° 177.
Je me demande même s'il ne conviendrait pas d'ajouter la répression des fraudes puisque nous faisons en fait référence à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF. En effet, dans notre beau pays, depuis un certain temps, le contrôle des prix est une notion un peu dépassée.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 177 rectifié, présenté par M. Cambon, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 470-4-1 du code de commerce, remplacer les mots :
le chef du service d'enquête compétent
par les mots :
l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation
L'amendement n° 178, présenté par M. Cambon, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 470-4-1 du code de commerce, après les mots :
a droit,
insérer les mots :
, tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement,
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à interdire de proposer une transaction pénale si des poursuites ont déjà été engagées. Cette règle, explicitement prévue pour la composition pénale, permet d'encadrer plus rigoureusement la possibilité de négociations entre l'administration et l'auteur des faits délictueux. Il convient de suivre la règle commune des procédures pénales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. En visant à réécrire entièrement l'article 29 du projet de loi, l'amendement n° 395 revient à supprimer le mécanisme de transaction pénale institué pour certains des délits prévus par le code de commerce. Il va donc à l'encontre de l'objectif du projet de loi, que soutient la commission.
Sur le fond, il tend à porter le montant maximal de l'amende encourue par une personne morale récidiviste en matière d'infractions commerciales à quinze fois celui qui est applicable aux personnes physiques. Le taux actuel me paraît suffisamment important pour présenter un effet dissuasif, surtout si on le met en parallèle avec d'autres dispositions du projet de loi qui instaurent ou renforcent la pénalisation des pratiques commerciales illicites.
Compte tenu de ces explications, vous l'aurez compris, monsieur Le Cam, la commission ne peut qu'émettre un avis défavorable.
Quant à l'amendement n° 177, vous avez bien fait de le rectifier, monsieur Hyest, car j'étais prêt à lui donner un avis favorable s'il était rectifié. Comme vous l'avez rectifié avant que je vous le demande, l'avis est totalement favorable. (Sourires.)
M. Bernard Dussaut. Qu'est ce qu'il est bon !
M. Gérard Cornu, rapporteur. Enfin, la commission est favorable à l'amendement n° 178.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 395, pour les raisons évoquées par M. le rapporteur. Je rappelle que notre droit du commerce est déjà l'un de ceux qui pénalise le plus lourdement : il n'est pas nécessaire d'en rajouter.
En revanche, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 177 rectifié, car la rédaction proposée est meilleure. Comme vient de le dire Jean-Jacques Hyest, il est préférable de viser l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation.
Le Gouvernement est également favorable à l'amendement n° 178.
M. le président. Je mets aux voix l'article 29, modifié.
(L'article 29 est adopté.)
Article additionnel après l'article 29
M. le président. L'amendement n° 347, présenté par MM. Valade, de Broissia et Gaillard, est ainsi libellé :
Après l'article 29, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l'article L. 420-5 du code de commerce est complété par les mots : « et des vidéogrammes destinés à l'usage privé du public ».
La parole est à M. Jacques Valade.
M. Jacques Valade. Depuis une dizaine d'années, les phonogrammes et les disques bénéficient d'une protection spécifique contre la pratique des « prix abusivement bas », en application du dernier alinéa de l'article L. 420?5 du code de commerce.
L'émergence du secteur du DVD et des vidéocassettes n'était alors pas prévisible. Or, le marché de la vidéo est actuellement confronté au développement de pratiques de prix très bas qui entraînent non seulement une dévalorisation des oeuvres, notamment cinématographiques et audiovisuelles, mais également une déstabilisation du marché.
Par souci d'homogénéité, monsieur le ministre, le présent amendement a pour objet d'étendre aux supports vidéographiques - DVD et vidéocassettes - la prohibition des prix abusivement bas. Cette mesure vise à enrayer les pratiques commerciales préjudiciables aux intérêts légitimes des différents ayants droit et de restaurer une grille de prix cohérente et compréhensible pour le consommateur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. La commission des affaires économiques remercie la commission des affaires culturelles d'avoir évoqué ce dossier. Elle fait confiance au président de la commission des affaires culturelles et aux deux autres signataires de l'amendement, MM. de Broissia et Gaillard. Aussi, elle émet un avis favorable.
M. le président. Cette confiance mérite d'être signalée.
Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement?
Mme Nicole Bricq. On le pressentait !
M. Renaud Dutreil, ministre. Le marché français de la vidéo est en forte croissance. Pour la seule année 2004, ce marché récent et en pleine expansion a progressé de 16,9 % en valeur et de 32,1 % en volume. En 2004, les Français ont dépensé environ 2 milliards d'euros en achat de cassettes VHS et de DVD, ce dernier support captant à lui seul 94,2 % de ce marché. Les achats de DVD progressent à un rythme supérieur à 30 % par an.
Ces performances remarquables ont été atteintes sans dispositif spécifique d'encadrement des prix. M. Jean-Jacques Hyest disait voilà un instant que le contrôle des prix était un souvenir, mais c'est un souvenir qui a tendance à remonter à la surface.
Aujourd'hui, la question que nous devons nous poser est simple : faut-il restreindre l'accès à ces oeuvres cinématographiques qui font bien souvent parti du patrimoine ancien du septième art ou faut-il, au contraire, permettre un accès le plus large possible ? La culture populaire passe-t-elle par des prix bas permettant à chacun d'accéder aux oeuvres ou doit-elle être réservée à ceux qui ont des moyens financiers ?
Le Gouvernement considère que des prix bas permettent au plus grand nombre de nos concitoyens d'accéder à ces oeuvres cinématographiques. De plus, ces méthodes de vente ne portent pas préjudice aux auteurs, car la plupart de ces films sont libres de droits.
Ce marché dynamique, qui porte la diffusion de la culture cinématographique et des oeuvres de qualité, doit être encouragé.
S'il y a une chose à craindre, c'est plus le développement du piratage numérique sur Internet que des offres promotionnelles, qui sont conformes à la loi et favorisent la valorisation des oeuvres. Pour le Gouvernement, ce qui dévalorise les oeuvres, c'est l'absence de diffusion ; ce qui les valorise, c'est le fait qu'un plus grand nombre de nos concitoyens puissent y avoir accès.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, même s'il est reconnaissant aux auteurs de l'amendement d'avoir ouvert cet intéressant débat, qui mérite certainement d'être approfondi.
M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia, pour explication de vote.
M. Louis de Broissia. C'est un grand plaisir pour moi que de m'exprimer sous la présidence de M. Richert.
J'ai entendu avec plaisir la position de la commission des affaires économiques. Nous ne doutions pas de la bienveillance partagée de la commission des affaires économiques et de la commission des affaires culturelles. Je voudrais aussi y associer la commission des finances, car notre collègue Yann Gaillard est l'un de ses rapporteurs.
Si les signataires de cet amendement représentent trois commissions, cela prouve qu'il ne s'agit pas d'un amendement « subreptice », et que nous avons réfléchi à ses conséquences.
Monsieur le ministre, je reviens sur votre argumentation. Selon vous, tout se passe bien, la consommation est croissante et il faut donc laisser toute liberté au marché. Vous avez évoqué le piratage.
Il y a eu récemment un grand débat sur le libéralisme, à l'occasion d'une consultation électorale qui a eu lieu un certain dimanche. Nous, nous pensons qu'il existe une « économie sociale de marché » - c'est l'expression qui a été employée sur de nombreuses travées - et, dans ce cadre, les marchés qui se développent doivent être protégés au même titre que les marchés qui sont en péril.
Monsieur le ministre, vous ne revenez pas sur les dispositions du code du commerce qui protègent les phonogrammes et les disques. Autrement dit, ce qui est technologiquement dépassé est protégé, mais pas le reste. Il y a là une incohérence, que je ne m'explique pas.
Par ailleurs, et là je reprends ma casquette de membre de la commission des affaires culturelles, sous le contrôle bienveillant du président Valade, nous sommes sensibles à la protection des oeuvres. Certes, celle-ci est déjà encadrée par un grand nombre de textes, toutes les lois audiovisuelles que le ministre Renaud Dutreil connaît bien, et que le ministre Renaud Donnedieu de Vabres connaît particulièrement bien. Il existe une protection culturelle des oeuvres. Nous, nous souhaitons qu'il y ait aussi une protection du support des oeuvres, et il nous paraît aujourd'hui nécessaire d'encadrer cette industrie émergente du DVD et des vidéocassettes.
Nos approches respectives ne sont pas contradictoires : nous souhaitons la même protection des oeuvres, la même diffusion des oeuvres. Mais ; pour notre part, nous ne voulons pas d'un renard libre dans un poulailler libre.
M. le président. Je remercie notre collègue Louis de Broissia pour ce plaidoyer « inter-commission » qui confirme la position présentée par le président Valade.
La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Dutreil, ministre. Monsieur le sénateur, je sais que vos intentions sont tout à fait louables, et je ne les remets pas en cause.
Défendre une économie sociale de marché, c'est précisément s'appuyer sur ce qu'il y a de meilleur dans l'économie de marché, c'est-à-dire la possibilité d'ouvrir l'accès à des biens de qualité au maximum de consommateurs, à des prix les plus accessibles possibles.
Avec une certaine inquiétude, je ne vous cache pas, je vois monter dans notre pays - de tous les groupes sociaux, de tous les groupes de producteurs - une contestation systématique de l'économie de marché, au point que le traité de Rome lui-même vient parfois à être remis en cause. Ce n'est pas l'intérêt des producteurs.
Les producteurs protégés ne sont en effet pas nécessairement ceux qui survivront. Vous avez cité les phonogrammes, qui disposent de protections législatives très fortes. Ce n'est pas pour autant que ses produits ont survécu. A l'heure actuelle, un certain nombre de produits soi-disant protégés connaissent de grandes difficultés.
Je crois aux vertus de la concurrence. Je crois également que la culture doit être accessible au plus grand nombre. Chacun d'entre nous a pu acquérir avec son journal quotidien des DVD de films hollywoodiens des années trente. Aurions-nous acheté ces mêmes oeuvres cinématographiques chez un disquaire ? Certainement pas. Le fait de les avoir acquises à un très faible coût a peut-être permis - c'est le cas en ce qui me concerne - à nos enfants de les visionner, et cette transmission du patrimoine n'a été possible que grâce à des prix très bas.
Il faut faire attention à cette montée actuelle du protectionnisme en France, qui me paraît jaillir de tous les cotés et que nous devons regarder avec un peu de distance, même si certains groupes profitent du climat général pour faire avancer des intérêts particuliers.
M. le président. Nous allons pouvoir vérifier si le plaidoyer de M. le ministre a définitivement convaincu les indécis.
Je mets aux voix l'amendement n° 347.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 29.
Article 30
Il est créé un article L. 470-4-2 du code de commerce ainsi rédigé :
« Art. L. 470-4-2. - I. - Outre son application aux personnes physiques, la composition pénale prévue à l'article 41-2 du code de procédure pénale est applicable aux personnes morales qui reconnaissent avoir commis un ou plusieurs délits prévus au titre quatrième du présent livre pour lesquels une peine d'emprisonnement n'est pas encourue ainsi que, le cas échéant, une ou plusieurs contraventions connexes.
« Seule la mesure prévue par le 1° de l'article 41-2 du code de procédure pénale est applicable aux personnes morales.
« II. - Pour les délits mentionnés au I, le procureur de la République peut proposer la composition pénale à l'auteur des faits par l'intermédiaire d'un fonctionnaire mentionné au troisième alinéa de l'article L. 450-1. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 396 est présenté par Mme Demessine, MM. Coquelle, Billout et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 419 est présenté par MM. Yung, Frimat et Dreyfus-Schmidt.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour défendre l'amendement n° 396.
M. Gérard Le Cam. L'article 30 vise à étendre le champ juridique de ce que l'on a appelé le « plaider coupable », qui constitue, qu'on le veuille ou non, un manquement essentiel à la règle de l'égalité de chacun devant la loi.
Nul doute qu'un fournisseur - parfois une petite entreprise - ayant engagé une procédure judiciaire à l'encontre d'un groupe de la distribution qui aurait contrevenu aux règles du commerce accueillera avec plaisir une issue rapide de ladite procédure et sera ravi de voir ainsi ses droits plus vite reconnus.
Mais, ce qui est certain, c'est que les grands groupes de la distribution auront peu de scrupules pour avoir des pratiques discutables en matière de coopération commerciale, et resteront le plus souvent possible au plus près des limites de la légalité, quitte à se positionner parfois directement en dehors de cette légalité.
La faculté de composition pénale étendue aux délits en matière commerciale, c'est la mise en oeuvre de l'abus de position dominante consenti, accepté et faiblement réprimé. A cet effet, une provision comptable sera suffisante pour couvrir les risques calculés encourus. Pour les groupes de la distribution, l'impact financier de cette disposition sera du même ordre que la prise en compte des vols à l'étalage. Nous ne pensons pas que cela fasse avancer de quelque façon que ce soit la qualité des relations commerciales.
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons, chers collègues, à adopter cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l'amendement n° 419.
M. Richard Yung. La composition pénale, qui résulte de la loi Guigou, est une mesure alternative aux poursuites pénales : pour certaines infractions, le ministère public peut proposer à leur auteur d'exécuter une ou plusieurs obligations à titre de sanction pénale.
Nous estimons que cette procédure alternative, qui a pour objet de désengorger les tribunaux et d'alléger les délais de règlement des litiges, doit être utilisée avec précaution et uniquement dans certains cas limitativement énumérés par la loi.
La loi Perben II avait déjà largement détourné la composition pénale de ses objectifs en élargissant considérablement son champ d'application, ce à quoi le groupe socialiste s'était opposé.
Or l'article 30 du présent projet de loi étend la composition pénale aux personnes morales qui reconnaissent avoir commis un ou plusieurs délits prévus par le texte.
Cette nouvelle extension du champ d'application de la composition pénale aux personnes morales est à nos yeux abusive, car elle détourne cette procédure de son objectif initial.
Par ailleurs, à l'heure où l'on cherche à raffermir l'efficacité des actions en responsabilité contre les entreprises en tant que personnes morales, il n'est pas sain d'offrir à ces dernières la possibilité de transiger dans l'opacité des cabinets des procureurs.
Aussi importe-t-il de limiter étroitement le champ d'application de la composition pénale, raison pour laquelle nous proposons la suppression de l'article 30 du projet de loi.
M. le président. L'amendement n° 59, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le début du premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour insérer un article L. 470-4-2 dans le code de commerce :
La composition pénale prévue à l'article 41-2 du code de procédure pénale est applicable aux personnes physiques et morales...
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 59 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements identiques nos 396 et 419.
M. Gérard Cornu, rapporteur. L'amendement n° 59 est rédactionnel.
Les amendements identiques tendant à supprimer l'article 30, article dont elle soutient l'adoption, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements de suppression nos 396 et 419 : la composition pénale peut constituer une alternative tout à fait efficace aux poursuites pénales et elle est particulièrement bien adaptée au droit commercial.
Il est en revanche favorable à la nouvelle rédaction proposée à l'amendement n° 59.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis. Je veux d'abord corriger une erreur, en particulier au bénéfice de ceux qui, la semaine prochaine, auront à débattre de la procédure dite du « plaider coupable » : la composition pénale n'est pas un accord conclu dans « l'opacité des cabinets des procureurs » ; soumise à un magistrat du siège, c'est une décision judiciaire.
Je rappelle ensuite que le recours à la composition pénale pour les infractions économiques prévues par l'article a été recommandé par le président de la Cour de cassation, car, pour ces infractions, il n'y avait en fait de poursuites ni contre les personnes physiques, ni contre les personnes morales.
Le recours à la composition pénale est donc un progrès en termes d'efficacité de l'action publique et me paraît de beaucoup préférable à l'absence de sanction de délits ou de contraventions prévus par les textes, toujours regrettable dans un Etat de droit.
Je soutiens donc bien entendu le Gouvernement, dont les propositions sont cohérentes avec notre politique pénale, et je suis hostile aux amendements de suppression.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 396 et 419.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 30, modifié.
(L'article 30 est adopté.)
Article 31
I. - Le second alinéa de l'article L. 442-2 du code de commerce est remplacé par les dispositions suivantes :
« Le prix d'achat effectif est le prix unitaire net figurant sur la facture d'achat majoré des taxes sur le chiffre d'affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du prix du transport et minoré du montant de l'ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur exprimé en pourcentage du prix unitaire net du produit et excédant 20 %. »
II. - Au cours des six mois suivant la publication de la présente loi, pour l'application de l'article L. 442-2 du code de commerce, le montant minorant le prix unitaire net figurant sur la facture d'achat n'excède pas 50 % du montant total de l'ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur exprimé en pourcentage du prix unitaire net du produit.
III. - Par dérogation aux articles 112-1 et 112-4 du code pénal, l'infraction à l'article L. 442-2 du code de commerce commise avant l'expiration du délai de six mois suivant la publication de la présente loi est jugée, et l'exécution des sanctions prononcées se poursuit, selon la disposition en vigueur lors de sa commission.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, sur l'article.
M. Daniel Raoul. L'article 31 vise à définir un nouveau seuil de revente à perte, l'objectif, d'ailleurs annoncé tant dans l'exposé des motifs du projet de loi que dans le rapport de la commission saisie au fond, étant simplement de « baisser les prix ». On sait ce qu'il est advenu après l'accord de juin 2004, dit « accord Sarkozy », dont l'objectif était très voisin...
Le paragraphe I de l'article 31 modifie l'article L. 442-2 du code de commerce. La définition du seuil de revente à perte est globalement conservée, même si le « prix net unitaire » se substitue au « prix unitaire », mais le prix unitaire précédent est « minoré du montant de l'ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur » au fournisseur et au producteur, montant « exprimé en pourcentage du prix unitaire net du produit et excédant 20 % ».
Pour ma part, plutôt que d'avantages « consentis », je parlerai d'avantages « extorqués », et d'aucuns n'hésitent d'ailleurs pas à qualifier certaines des pratiques, non seulement opaques mais pour le moins douteuses, des cinq grandes centrales d'achat comme des acheteurs des hard discounters de véritable racket.
En tout état de cause, cette nouvelle définition aura le résultat prévisible suivant : les acheteurs auront tendance à porter à 20 % minimum ces avantages financiers, contestables sinon douteux sur le plan moral, que l'on dénonçait jusqu'à présent !
Je ferai simplement remarquer que l'on parle toujours du seuil de revente à perte et jamais du seuil de vente à perte non plus que du seuil d'achat à perte. Autrement dit, ce sont toujours le producteur et le fournisseur qui paient lesdits avantages financiers et, pour le moment, ce n'est jamais le consommateur qui en bénéficie.
Vous savez très bien, monsieur le ministre, que toucher à cet article L. 442-2 est d'une remarquable difficulté. Je me permets de vous rappeler qu'à la suite du rapport Canivet les membres de votre majorité à l'Assemblée nationale - ceux de l'UMP comme ceux de l'UDF - avaient suggéré au Gouvernement d'appliquer toute la loi Galland et de moraliser la pratique avant de légiférer.
En légiférant aujourd'hui, je crains, monsieur le ministre, que vous n'ouvriez la boîte de Pandore et que vous ne nous présentiez un texte dont vous ne mesurez pas très bien les effets secondaires. Je trouve en tout cas troublant que, dans un projet de loi visant à protéger les petites et moyennes entreprises, on déclenche, en modifiant la définition du seuil de revente à perte, un processus qui aura pour conséquence immédiate de mettre en situation de déséquilibre tous les commerces de détail et tous les commerces qui animent les centres de nos bourgs et nos quartiers. On ne jouera en effet plus à concurrence égale, car on sait de quels moyens de pression usent les grandes centrales d'achat.
C'est bien pourquoi mon collègue Bernard Dussaut défendra tout à l'heure un amendement de suppression de cet article et c'est aussi pourquoi nous demandons la création d'une commission d'enquête parlementaire capable, grâce aux moyens dont dispose ce type de commission, d'aller au fond des choses. Aujourd'hui en effet, les fournisseurs que nous auditionnons sont pris entre le marteau et l'enclume : s'ils se dévoilent nominativement, ils savent quelles mesures de rétorsion ils auront à subir.
Je souhaiterais donc qu'avant de légiférer il y ait une commission d'enquête parlementaire sur les pratiques pour le moins douteuses des grandes centrales d'achat.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Après la déclaration de M. Raoul, je souhaite également apporter quelques explications : cet article 31 qui concerne le seuil de revente à perte est au coeur de la « réforme » de la loi Galland et mérite donc que l'on y consacre un peu de temps.
Je souhaite, mes chers collègues, vous dire quelles ont été les préoccupations du rapporteur au fil des auditions auxquelles il a procédé sur ce sujet, extrêmement complexe il est vrai. J'ai ainsi reçu une cinquantaine de personnes qu'intéresse cette réforme, parmi lesquelles d'ailleurs certaines qui n'en veulent pas.
D'abord, monsieur Raoul, on ne peut pas dire qu'il n'y a pas eu de concertation. Vous avez vous-même cité le rapport Canivet et, à l'Assemblée nationale, il y a eu le rapport Chatel. On discute depuis longtemps de ce dossier, dossier d'autant plus difficile qu'il concerne quatre acteurs aux intérêts un peu contradictoires : les consommateurs, les distributeurs, les fournisseurs et les producteurs. Quand on écoute ces différents acteurs, on entend donc forcément des avis divergents.
M. Daniel Raoul. Monsieur le rapporteur, je n'ai jamais dit qu'il n'y avait pas eu de concertation !
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il m'a pourtant semblé que vous demandiez encore une commission en vue d'une nouvelle concertation...
M. Daniel Raoul. J'ai demandé, monsieur le rapporteur, la création d'une commission d'enquête parlementaire sur les pratiques des centrales d'achat disposant des moyens propres à ce type de commission !
M. Gérard Cornu, rapporteur. Dont acte ! Je n'avais donc pas tout à fait compris le sens de votre intervention.
Quoiqu'il en soit, la concertation a bien eu lieu et, quand il y a concertation, on écrit, et voilà comment pour ma part j'ai rapporté la position de la commission des affaires économiques : « Votre rapporteur tient à souligner l'extrême difficulté que représente la définition d'un nouveau seuil de revente à perte corrélé au niveau des marges arrière, la modification, même minime, d'un seul de ces paramètres impliquant des effets souvent aussi importants qu'imprévisibles. La multiplicité des dispositifs évoqués et étudiés au cours des auditions le conduit à juger celui proposé par le projet de loi globalement équilibré au regard des différents acteurs et objectifs pris en considération. »
J'ai déjà cité les acteurs. Pour ce qui est des objectifs pris en considération, il me semble que nous pouvons nous rejoindre, car tout le monde s'accorde à reconnaître qu'il faut arrêter la dérive des marges arrière et à considérer qu'il vaudrait mieux passer ces marges arrière dans ce que l'on appelle les marges avant. Nos collègues de l'opposition l'ont d'ailleurs eux-mêmes souvent déclaré.
J'ai donc étudié les différents cas de figure et, en effet, il y a deux cas extrêmes, dont l'un découle de ce qui va nous être proposé par M. Dussaut, à savoir la suppression de l'article 31, ce qui signifie en clair le maintien du statu quo puisque les marges arrière sont actuellement pratiquées. On donne parfois des moyennes, mais je peux vous dire qu'il y a de grandes différences par rapport à la moyenne, et aussi bien des différences inférieures que des différences supérieures.
M. Daniel Raoul. Sinon il n'y aurait pas de moyenne ! (Sourires.)
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il y a par ailleurs la coopération commerciale telle qu'on la connaît, mais il y a aussi la vraie coopération commerciale. Je cite souvent l'exemple du saucisson bien placé à hauteur du nez en tête de gondole, où, même si elle ne souhaite pas nécessairement l'acheter, la ménagère ne pourra pas ne pas le voir...
Mme Nicole Bricq. Il n'y a pas que des ménagères !
M. Gérard Cornu, rapporteur. En effet, et je fais moi aussi des courses, mais je ne trouve pas d'équivalent masculin à ménagère...
Mme Michelle Demessine. « Ménager » !
M. Gérard Longuet. L'acheteur, le client, le consommateur !
M. Gérard Cornu, rapporteur. A partir du moment où le produit bien placé dans les rayons incite le consommateur à l'acheter - placé normalement dans le linéaire, ce dernier ne l'aurait pas acheté -, on peut considérer que le fournisseur a fixé un prix attractif ou, en tout cas, qu'il a tout fait, au titre de la coopération commerciale, pour vendre ce produit, car tel est son objectif. Le produit proposé dans un catalogue s'inscrit lui aussi dans le cadre de la coopération commerciale puisqu'il incite le consommateur à l'acheter.
A vrai dire, ces différentes situations peuvent être considérées comme procédant d'une bonne coopération commerciale. Toutefois, des dérives existent ; je ne les citerai pas, car tout le monde les connaît.
Supprimer l'article 31 ne me paraît pas être une bonne chose.
L'autre position extrême est le seuil dit « triple net ». On met tout à l'avant : c'est une solution, mais on connaît parfaitement les dégâts collatéraux qu'elle peut occasionner. Nous avons tous conscience, et plus particulièrement ici au Sénat, des conséquences qu'une telle solution peut avoir au niveau de l'aménagement du territoire, des commerces de proximité ou du commerce de centre-ville.
M. Daniel Raoul. Eh oui !
M. Gérard Cornu, rapporteur. Je n'ai pas pu retenir ces deux solutions extrêmes.
Plusieurs autres solutions s'offraient à nous. Celle du Gouvernement est intéressante, qui consiste à écrêter les marges arrière à 20 %. C'est, à mes yeux, une première étape satisfaisante, car l'on sait que certaines marges arrière dépassent de loin ce pourcentage.
Toutefois, cette solution me semble quelque peu compliquée, monsieur le ministre, et mon travail de rapporteur est d'enrichir le texte gouvernemental.
A cette fin, j'ai souhaité trouver des solutions allant dans le sens d'une simplification. (M. Jacques Blanc hoche la tête.)
Eh oui, monsieur Blanc, vous êtes coauteur d'un amendement visant à introduire une simplification, tout comme M. Retailleau, dont l'amendement tend à diminuer le seuil de revente à perte de 10 %. Toutefois, son principal inconvénient est de consacrer et de figer les marges arrière au 31 janvier 2005. Or, manifestement, tout le monde souhaite que l'on diminue les marges arrière pour parvenir à un système plus normal. Comme cet amendement consacre de fait les marges arrière, il n'est pas acceptable en l'état.
Pour ma part, j'ai cherché à combiner les propositions de MM. Hérisson, Carle et Retailleau avec celles du Gouvernement.
J'ai fait hier une proposition à la commission des affaires économiques. Alors que je souhaitais simplifier le système, ma solution est malheureusement apparue encore plus compliquée que celle du Gouvernement.
Après avoir écouté les observations de mes collègues de la majorité, j'ai considéré en mon âme et conscience que le projet du Gouvernement n'est certes pas le meilleur système, car il n'existe pas de système idéal, mais il va dans le bon sens.
Pour toutes ces raisons, je le dis d'ores et déjà, j'émettrai un avis défavorable sur les amendements de suppression de l'article 31 du projet de loi. (Applaudissements sur quelques travées de l'UMP.)
M. Gérard Longuet. Très bien ! C'était très clair !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Dutreil, ministre. Les explications que vient de donner M. le rapporteur sont essentielles et très claires.
Au fond, après avoir exploré toutes les solutions - Dieu sait s'il y en a ! -, il ne faudrait pas que nous ayons le sentiment que le statu quo est la meilleure solution. En réalité, c'est une très mauvaise solution. Nous sortons d'ailleurs d'une période où tout le monde pensait qu'il fallait réformer la loi Galland, et ce pour cinq raisons, qui ont été largement exposées par les uns et par les autres.
Premièrement, la loi Galland a créé une sorte d'équilibre, ou plutôt un certain déséquilibre, au détriment du consommateur, ...
Mme Michelle Demessine. Pas seulement !
M. Renaud Dutreil, ministre. ... et donc du pouvoir d'achat des plus défavorisés des Français, madame Demessine !
Mme Michelle Demessine. Il n'y a pas que cela !
M. Renaud Dutreil, ministre. Il suffit d'examiner deux courbes : celle de l'évolution des prix depuis 1997, l'indice de l'INSEE, et celle du panier de la ménagère - chacun ici sait ce qu'il représente.
On constate, chaque année, en France, que les prix des produits de consommation courante, c'est-à-dire le panier de la ménagère, s'écartent de plus en plus de la tendance générale inflationniste, avec un différentiel qui ne cesse de croître. Les Français perdent donc du pouvoir d'achat sur des produits particulièrement sensibles. En effet, lorsque le prix des écrans plats diminue, personne ne s'en aperçoit ; mais lorsque celui des produits de consommation courante augmente, tous les Français s'en aperçoivent et ont le sentiment de connaître une inflation spécifique.
Deuxièmement, la hausse atypique du prix des produits de consommation courante a une explication très simple, et c'est ce qui nous réunit aujourd'hui. Elle procède du gonflement des marges arrière, c'est-à-dire de deux éléments : essentiellement, la coopération commerciale, et les ristournes conditionnelles non acquises au moment de la vente, ces éléments constituant ce que l'on appelle « l'arrière ».
Or, ce n'est pas le consommateur qui bénéficie de cet argent. Petit à petit, s'est donc créé un équilibre dont, monsieur Raoul, les bénéficiaires ont été les grands industriels et les grands distributeurs, et non pas les petits. Les PME et les commerçants de détail n'ont pas profité des marges arrière. Que l'on ne s'y trompe pas, les bénéficiaires de l'inflation de la coopération commerciale, des marges arrière, ce sont les plus puissants,...
M. Daniel Raoul. Les actionnaires !
M. Renaud Dutreil, ministre. ... ce ne sont pas du tout les faibles et les petits, que nous voulons protéger.
Troisièmement, alors que la loi Galland avait été conçue pour protéger le petit commerce, tel n'a pas été le cas. Au contraire, nous qui sommes attachés au petit commerce, notamment au petit commerce de centre-ville qui donne bien souvent à celui-ci de la couleur et y crée l'emploi, avons vu ce petit commerce disparaître. Cette loi n'a donc pas atteint son objectif. Il ne faudrait pas faire croire aujourd'hui que supprimer l'article 31 du projet de loi équivaut à défendre le petit commerce. C'est en effet l'inverse qui se produirait.
Quatrièmement, la France a la particularité d'élaborer des dispositifs législatifs particulièrement complexes, bureaucratiques. De temps en temps, il faudrait essayer de mettre en place des choses simples,...
M. Jean-Jacques Hyest. Très bien !
M. Renaud Dutreil, ministre. ...et c'est ce que nous faisons en grande partie avec ce texte.
En effet, nous améliorons les contrôles, nous proposons des définitions juridiques concernant notamment la coopération commerciale, nous permettons au juge et à l'administration, la DGCCRF, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, de faire leur travail dans des conditions beaucoup moins courtelinesques qu'aujourd'hui. A certaines époques, on parlait même de la facturologie : des agrégés en factures étaient nécessaires pour comprendre ce qui se passait derrière ces relations commerciales. Essayons donc de fixer des règles simples.
Enfin, cinquièmement, la loi Galland a bénéficié à une forme de commerce que l'on appelle le maxi discount, et on ne peut pas le considérer comme étant un progrès pour le commerce en France.
Au début de l'application de cette loi, le hard discount avait 2 % des parts de marché ; il en a aujourd'hui 15 %.
M. Daniel Raoul. Effectivement !
M. Renaud Dutreil, ministre. On compte environ 1 400 références chez un hard discounter, contre 7 000 à 8 000 dans une grande surface. Qui perd au change ? Les PME !
M. Gérard Longuet. C'est évident !
M. Renaud Dutreil, ministre. Si des magasins proposent un très faible nombre de références, alors il n'y a plus de place pour les PME. Il ne faudrait pas croire, monsieur Raoul, que vous allez faire le jeu du petit commerce ou des PME avec votre amendement de suppression ! En réalité, vous allez faire le jeu des hard discounters. Or, telle n'est certainement pas votre intention.
M. Daniel Raoul. Merci !
M. Renaud Dutreil, ministre. De plus, dans les hard discounts, vous ne trouvez pas beaucoup de produits français. Souvent, les produits sont fabriqués en dehors de nos frontières.
Mme Nicole Bricq. Des produits chinois !
M. Renaud Dutreil, ministre. Certes, le marché est ouvert, mais il faut tout de même défendre les PME françaises, car elles ont besoin d'avoir accès aux consommateurs. Gardons-nous d'opposer systématiquement la grande distribution aux PME, car ces dernières ont également besoin de la grande distribution pour mettre leurs produits à la disposition du consommateur.
A cet égard, certaines dispositions du projet de loi vont favoriser l'accès des PME aux linéaires ; je veux parler des accords de gamme.
Aujourd'hui, vous pouvez le constater, mesdames, messieurs les sénateurs, rien ne serait pire que le statu quo.
En revanche, nous devons trouver la bonne solution, mais cela pose problème parce que la matière est technique. En effet, dès que l'on déplace un tout petit peu le curseur, ce sont des milliards d'euros qui passent d'une poche à l'autre. Il faut donc être extrêmement prudent.
Depuis trois ans, nous avons beaucoup consulté. Que l'on ne vienne pas nous dire le contraire.
M. Daniel Raoul. Qui a dit cela ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Depuis l'accord ANIA-FCD, l'accord entre l'Association nationale des industries alimentaires et la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution, première tentative des professionnels eux-mêmes pour essayer de trouver une solution en matière de marges arrière, en passant par la circulaire du 16 mai 2003, l'accord relatif aux prix du 17 juin 2004 de Nicolas Sarkozy, le rapport Canivet, la commission Chatel, et le remarquable travail d'auditions réalisé par le rapporteur Gérard Cornu. Nous avons vraiment consulté la terre entière ! Vient un moment où il faut décider, et ce non pas au profit de tel ou tel groupe, aussi sympathique soit-il, mais dans l'intérêt général ! Telle est aujourd'hui notre tâche.
Le texte de l'article 31 est un point d'équilibre : il va nous permettre d'atteindre - peut-être, comme le disait M. le rapporteur, de façon provisoire, mais en tout cas pour une durée relativement stable - un équilibre, afin de résoudre les cinq problèmes que je viens d'exposer. Ce texte est aujourd'hui solide et nécessaire. C'est la raison pour laquelle je le défendrai et m'opposerai, par conséquent, à des rédactions beaucoup plus aventureuses, qui pourraient, comme vous l'avez dit tout à l'heure, ouvrir la boîte de Pandore.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux amendements premiers sont identiques.
L'amendement n° 294 est présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 397 est présenté par Mme Demessine, MM. Coquelle, Billout et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Dussaut, pour défendre l'amendement n° 294.
M. Bernard Dussaut. Je vais avoir du mal à faire changer d'avis M. le rapporteur et M. le ministre.
Vous avez dit, monsieur le ministre, qu'il s'agissait d'un point d'équilibre provisoire : il n'est donc pas certain que vous proposiez une solution satisfaisante.
Avant de proposer une solution durable, nous voulons, quant à nous, essayer de mieux connaître les pratiques actuelles.
M. Bernard Dussaut. Telle est la principale différence entre nous, monsieur le ministre. Gardons le système actuel et essayons de mieux appliquer les mesures existantes. Pourquoi se précipiter et prévoir aujourd'hui une solution intermédiaire, provisoire ?
M. Bernard Dussaut. Mais, j'y insiste, vous avez prononcé ce terme, monsieur le ministre !
L'objet de l'article 31 est de modifier le calcul du seuil de revente à perte. Nous tenons, pour notre part, à souligner que le grand mérite de la loi Galland a été d'interdire, à un moment donné, la vente à perte. Elle a permis de mettre fin à des pratiques prédatrices de prix d'appel abusivement bas. Or, en remettant en cause le seuil de revente à perte, on ouvre la porte à une déréglementation dont on ne maîtrise pas les effets, lesquels pourraient être désastreux sur le plan économique. On joue aux apprentis sorciers.
Qui plus est, faire basculer les marges arrière, donc 20 %, vers l'avant revient, de fait, à légaliser, pour ne pas dire blanchir, des pratiques interdites particulièrement opaques, déloyales sur le plan de la concurrence, que certains n'hésitent pas à qualifier de racket organisé.
Avant toute modification de l'article L. 442-2 du code de commerce, nous réclamons la constitution d'une commission d'enquête. Il faut en effet que nous connaissions parfaitement les pratiques commerciales pour mieux les réglementer.
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l'amendement n° 397.
M. Gérard Le Cam. Pour commencer, je souhaite adresser une remarque à M. le rapporteur. Ce n'est en rien un reproche. Sur un sujet aussi complexe, sans doute aurait-il été utile que nous bénéficiions d'une synthèse de l'ensemble des auditions auxquelles a procédé la commission, suivant ainsi la démarche adoptée par M. Bruno Sido, lorsqu'il était rapporteur du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, et qui consistait soit à convier l'ensemble des sénateurs aux auditions, soit à leur faire parvenir un rapport de synthèse. Je souhaite que notre assemblée retienne cette proposition pour l'examen des prochains textes.
L'article 31 vise à modifier la définition du seuil de revente à perte, telle qu'elle est fixée par la loi Galland. Par un mécanisme de vases communicants, vous souhaitez, monsieur le ministre, pouvoir déduire du seuil de revente à perte la facturation des services de coopération commerciale excédant 20 % du prix net du produit vendu.
Ainsi, le seuil de revente à perte serait fixé non plus en fonction du prix de vente convenu entre le fournisseur et le distributeur, mais en fonction des opérations publicitaires et marketing sur ce produit, qui restent largement définies par le distributeur.
Insidieusement, le prix du produit est totalement déconnecté du coût du travail qui a permis sa réalisation. Ainsi, le produit peut être vendu à un prix inférieur à celui auquel le distributeur l'a acheté.
Il s'agit là d'une mesure extrêmement grave, qui revient sur les fondements mêmes du droit du travail et du droit commercial. Ce qui fait la valeur d'un produit, c'est la force de travail nécessitée par sa réalisation et le montant de sa matière première. De la même manière, les salaires sont fixés au regard du travail fourni.
Pour les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, la notion de prix rémunérateur doit être la base de toute relation commerciale. En d'autres termes, le prix de vente doit être directement lié au coût de production. Au regard de cette approche, la notion même de revente à perte n'a plus de sens.
De plus, la tolérance sur les marges arrière, en permettant qu'un pourcentage soit déduit du seuil de revente à perte, contribue, ainsi que je l'expliquais hier soir, à une baisse tendancielle des prix : non pas du prix de vente aux consommateurs, car il s'agit là d'une simple faculté laissée aux distributeurs, mais bien du prix accordé aux fournisseurs !
En d'autres termes, l'article 31 permet aux distributeurs de faire baisser les prix d'achat aux fournisseurs. En revanche, pour ce qui est du prix de vente aux consommateurs, on s'en remet à la bonne volonté du distributeur, puisqu'il s'agit d'une simple possibilité.
Monsieur le ministre, pensez-vous sincèrement que l'intérêt de Carrefour, pour prendre cet exemple, soit de vendre ses produits moins chers ? Bien sûr que non ! Il est d'accroître son bénéfice, comme toute entreprise capitalistique.
Au mieux, cette réforme permettrait aux distributeurs non seulement de pratiquer des prix d'appel abusivement bas sur certains produits, laminant par là même le petit commerce de proximité, mais aussi d'exercer une forte pression sur leurs fournisseurs afin qu'ils alignent leurs prix sur ceux du distributeur revendant à perte.
Ainsi, ni les fournisseurs ni les consommateurs ne se verraient aidés par cette loi. Une nouvelle fois, il s'agit de permettre à la grande distribution d'augmenter ses profits, pourtant déjà considérables.
Selon nous, seule une revalorisation des salaires et du pouvoir d'achat des Français est susceptible de permettre le développement des PME, et non un cadre législatif qui entérine leur déclin économique et financier en permettant des prix de vente toujours plus bas.
Lamennais disait : « Entre le faible et le fort, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit. » S'agissant des prix, c'est particulièrement vrai.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la suppression de cet article et le retour aux critères définis par la loi Galland, mais soutenu par une réelle politique de prix rémunérateurs. Ce n'est pas le statu quo, loin s'en faut !
M. le président. L'amendement n° 233 rectifié bis, présenté par MM. Hérisson et J. Blanc, est ainsi libellé :
Remplacer le texte proposé par le I de cet article pour le second alinéa de l'article L. 442-2 du code de commerce par les dispositions suivantes :« Le prix d'achat effectif est le prix unitaire figurant sur la facture, majoré des taxes sur le chiffre d'affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du prix du transport.« A compter de l'année 2005, tout nouvel avantage financier consenti à un acheteur qui viendrait en supplément du niveau de coopération commerciale et des avantages financiers octroyés avant le 31 janvier 2005, à quelque titre que ce soit et sous quelque forme que ce soit, sera remis dans le prix d'achat effectif et de ce fait pris en compte par l'acheteur pour justifier de son seuil de revente à perte.« Ces dispositions s'appliquent sans préjudice de celles prévues à l'article L 441-2-1.
" Sera appliqué par voie réglementaire sur le seuil de revente à perte un coefficient inférieur à 1, pour tous les fournisseurs présents avant le 31 janvier 2005. »
La parole est à M. Jacques Blanc.
M. Jacques Blanc. Nous avons là un débat de fond. Permettez-moi de féliciter et de remercier M. le rapporteur et la commission des affaires économiques d'aborder ce texte avec la volonté de faire face à la réalité de la situation.
A nos collègues socialistes et communistes, je dirai que le « Courage, fuyons ! » n'a jamais été une solution !
M. Bernard Dussaut. Ce n'est pas le cas !
M. Jacques Blanc. Quand on laisse la France en panne, on voit ce que cela donne ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Il faut le dire ! Certes, on peut toujours trouver refuge dans l'inaction !
M. Bernard Dussaut. Des mesures existent !
M. Jacques Blanc. Il faut tout de même rappeler les mérites de la loi Galland. A l'époque, il s'agissait d'empêcher les reventes à perte, qui étaient une véritable gangrène. Après bientôt dix ans d'application, nous sommes en droit de faire un bilan de cette loi : force est de constater que la situation que vous voulez faire perdurer, mes chers collègues socialistes et communistes, présente deux effets pervers.
Le premier effet pervers est un effet inflationniste. Les prix des produits des grandes marques alimentaires ont augmenté d'une manière bien supérieure à l'inflation.
Monsieur le ministre, il ne faut pas dire que cela a bénéficié aux grandes entreprises.
M. Daniel Raoul. A la grande distribution !
M. Jacques Blanc. Les grandes entreprises agroalimentaires n'ont effectivement pas envie que leurs marques connaissent des augmentations trop fortes. Il est vrai que cet effet pervers s'est manifesté dans tous les secteurs, mais particulièrement dans celui-là - c'est important pour la France.
Le second effet pervers est le développement des marges arrière, chacun ici l'a rappelé. En effet, les sommes versées à la grande distribution et non répercutées sur les prix de vente sont passées de 17 % à 35 %. Une telle situation est difficilement supportable pour un industriel, qu'il soit petit ou grand.
Nous ne pouvons donc que soutenir et féliciter le Gouvernement de vouloir remédier à cette situation.
Pour autant, la solution retenue à l'article 31, qui consiste, d'une part, à plafonner les marges arrière à 20 % et, d'autre part, à faire en sorte- et c'est positif - que tout nouvel avantage commercial obtenu par un distributeur soit mis sur facture et donc répercuté au consommateur entraîne deux conséquences.
Premièrement, tous les concurrents de la grande distribution connaîtront les accords commerciaux intervenus entre des PME ou des grandes entreprises et la grande distribution. La tentation sera alors grande pour les entreprises de la grande distribution d'utiliser cette information pour exercer une pression sur les entreprises de production et ainsi obtenir des conditions similaires. Or les conditions varient - et c'est légitime - en fonction de critères, notamment le nombre de produits vendus. C'est pourquoi le coup de projecteur brutal qui est autorisé par le dispositif du Gouvernement pourra entraîner, de la part de la grande distribution, des comportements difficilement supportables pour les PME. Je me permets d'attirer votre attention sur cet aspect des choses.
Deuxièmement, l'effet anti-inflationniste de la mesure prévue à l'article 31 reste à démontrer.
C'est la raison pour laquelle mon collègue Pierre Hérisson et moi-même vous proposons, par cet amendement, de tenir compte de la situation actuelle. Ainsi, le seuil de revente à perte pourrait, par décret, être diminué d'un pourcentage qui dépendrait du niveau des marges arrière existant, ce qui permettrait un effet anti-inflationniste rapide.
Par ailleurs, grâce aux marges arrière corrigées par ce coefficient, il sera possible de construire une politique d'avenir sans que la transparence des conditions accordées par les entreprises aux distributeurs donne à la grande distribution l'occasion d'exercer sur les entreprises de production, en particulier sur les PME, une pression qui se révélerait vite insupportable.
Le dispositif alternatif que nous proposons a donc pour effet de prendre acte de la coopération commerciale au 31 janvier 2005, en considérant qu'il revient aux pouvoirs publics de poursuivre « la fausse coopération commerciale ». Il conduit pour l'avenir à « geler les marges arrière » avec le dispositif de rectification.
Cette réponse nous semble positive, car elle modifie la situation qui est dénoncée.
M. le président. L'amendement n° 360, présenté par MM. Retailleau et Darniche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour remplacer le second alinéa de l'article L. 442-2 du code de commerce :
« Le prix d'achat effectif est le prix unitaire figurant sur la facture, majoré des taxes sur le chiffre d'affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du prix de transport, affecté d'un coefficient multiplicateur de 0,90 et minoré de l'ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur, s'ajoutant à ceux constatés le 31 janvier 2005 en application du 4° du II de l'article 441-6-1 du code de commerce. »
La parole est à M. Philippe Darniche.
M. Philippe Darniche. Cet amendement vise à améliorer le dispositif proposé. En effet, non seulement celui-ci est difficilement applicable pour les professionnels concernés, mais surtout il rend difficile un contrôle administratif. Il suppose, en effet, de connaître en permanence le montant total des flux financiers affecté à chaque produit, alors que, on le sait, bon nombre des avantages sont différés et que leur montant exact n'est connu qu'a posteriori.
Le dispositif que tend à mettre en place cet amendement a pour effet de créer au préalable un volume d'avantages financiers clairement identifié, susceptible d'être transféré par le distributeur au consommateur, ce qui est, me semble-t-il, l'objectif que nous cherchons tous à atteindre. De ce fait, le montant concerné est facilement identifiable et contrôlable, et le distributeur retrouve la possibilité d'utiliser sa marge pour déterminer le prix de vente au consommateur, ce qui correspond à la logique économique de l'activité commerciale.
Toutefois, il est vrai que cette marge risque d'être rapidement effacée par une augmentation des flux financiers au profit du distributeur, entraînant mécaniquement une augmentation des tarifs, et donc du prix de vente net facturé. Pour remédier à cet inconvénient, nous proposons que toute augmentation des flux financiers vienne en déduction du seuil de revente à perte. Ainsi, toute négociation serait affectée systématiquement à la « marge avant », ce qui revient à « geler » les marges arrière.
Ce dispositif évite les inconvénients de la mesure prévue par le projet de loi. Il présente l'avantage de conserver la définition du seuil de revente à perte à partir du prix de vente net facturé, et donc d'être plus facilement contrôlable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Je serai bref, monsieur le président, car j'ai expliqué longuement la philosophie et la position de la commission.
Monsieur Dussaut, soyons clairs ! Il s'agit d'un écrêtement à 20 %. Il ne s'agit pas de prévoir un basculement obligatoire de 20 % des marges arrière vers l'avant.
En ce qui concerne le caractère provisoire du dispositif, ne nous méprenons pas ! Ce dispositif est provisoire car nous sommes en train de l'examiner au Sénat. Le projet de loi sera ensuite discuté à l'Assemblée nationale, avant, vraisemblablement, de faire l'objet d'une commission mixte paritaire ! (Sourires.)
M. Bernard Dussaut. C'est le ministre qui est provisoire !
M. Gérard Cornu, rapporteur. En revanche, en tant que législateur, j'estime que l'ensemble des acteurs a besoin de durée et j'espère que le texte sera adopté durablement ! Certes, c'est ce que nous pensions au moment de l'adoption de la loi Galland, en 1996. Force est de constater, toutefois, moins de dix ans après, qu'il faut la réformer.
C'est pourquoi, dans mon esprit, dire qu'il s'agit d'une mesure « provisoire » ne signifie pas qu'elle dure seulement six mois ou un an. Il faut proposer des lois durables.
La commission est donc défavorable aux amendements identiques nos 294 et 397.
En ce qui concerne votre remarque, monsieur Le Cam, je souhaite apporter une précision. J'ai procédé à de nombreuses auditions et ai remis un rapport qui me semble fourni et détaillé. Je sais d'ailleurs que vous y êtes très attentif. (M. Gérard Le Cam acquiesce.)
Si vous l'exigez, je peux vous remettre une synthèse de mon rapport. Mais il m'a demandé beaucoup de travail - deux mois. J'ai mis à profit les vacances parlementaires et la suspension de nos travaux à l'occasion du référendum afin de procéder à l'ensemble des auditions.
Il est vrai que, en raison du calendrier, je n'ai pas pu mettre en place pour le présent texte l'organisation très judicieuse retenue par notre collègue Bruno Sido lors de l'examen du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques. Cependant, monsieur Le Cam, le rapport de la commission des affaires économiques devrait vous satisfaire. Mais si vous souhaitez des précisions supplémentaires, je suis prêt à vous les apporter personnellement.
M. Gérard Le Cam. Ce n'était pas un reproche !
M. Gérard Cornu, rapporteur. Je l'avais bien compris ainsi !
Compte tenu de ces explications, vous comprendrez que j'émette un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
S'agissant des amendements nos 233 rectifié bis et 360, je remercie leurs auteurs de leur contribution car leurs propositions ont nourri ma réflexion. Mais, comme je l'ai dit précédemment, le gel des marges arrière au 31 janvier 2005 pose un problème. Il n'est donc pas possible de retenir ces amendements et j'en demande le retrait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Nous avons parfois besoin d'améliorer nos connaissances du sujet. Je voudrais rappeler la qualité du travail qui a été réalisé dans le rapport Canivet. S'il est bien un document qui explique la façon dont les prix sont aujourd'hui construits en France dans le cadre du système légal, c'est bien ce rapport. Il vient d'être publié à la Documentation française et j'en recommande vivement à tous la lecture... (Sourires.)
Monsieur Dussaut, il ne vous aura pas échappé que l'article 31 prévoit une période de transition de six mois parce que nous devons adopter une démarche progressive. On ne peut pas, comme certains le proposent, sortir brutalement du système dans lequel nous sommes depuis 1997. Nous entrerions alors dans une spirale déflationniste, qui pourrait être dévastatrice. Le Gouvernement ne le veut pas ! C'est la raison pour laquelle il a souhaité une application progressive des dispositions, afin que les acteurs puissent s'habituer à un système plus sain.
Quand vous dites que nous basculons 20 % de la coopération commerciale, vous commettez une erreur, monsieur Dussaut. Relisez l'article ! Il prévoit que seule sera prise en compte la partie qui excède 20 %. Peut-être s'agit-il de votre part d'une inadvertance. (M. Bernard Dussaut en convient.) Faisons attention à ce que nous disons, sinon nous marchons sur des sables mouvants, si je puis dire.
Monsieur Le Cam, vous avez dit que la bonne solution consisterait à augmenter les salaires.
Mme Michelle Demessine. Ce n'est pas du tout cela ! On a parlé du juste prix !
M. Renaud Dutreil, ministre. C'est un excellent argument, mais un peu loin du sujet, puisque nous traitons aujourd'hui de la mise en place de relations commerciales entre des fournisseurs et des distributeurs.
M. Gérard Le Cam. J'ai parlé aussi des prix réels !
M. Gérard Le Cam. Et voilà ! Le marché, c'est la loi de la jungle !
M. Renaud Dutreil, ministre. ...et nous sommes au coeur de cette construction.
Par conséquent, je suis défavorable aux amendements identiques nos 294 et 397.
J'en arrive aux différentes solutions techniques qui ont été proposées.
Il y a d'abord celle qui consiste à calculer le seuil de revente à perte de la manière actuelle, mais à en déduire toute hausse future de la coopération commerciale. Il y a là une contradiction : d'un côté, on dénonce le niveau particulièrement élevé de la coopération commerciale - elle représenterait en moyenne 35 % - et, de l'autre, on dit que la seule chose à faire est de déduire ce qui excède cette coopération.
De deux choses l'une : ou bien on veut réduire la coopération commerciale et il faut s'en donner les moyens ; ou bien on considère que 35 %, c'est parfait et, dans ce cas, on propose ce type d'amendement. Je suis donc défavorable à l'amendement n° 233 rectifié bis.
Une autre solution technique tend à calculer le SRP à partir du prix unitaire figurant sur la facture affecté d'un coefficient minoratif - il peut être de 0,90 %, de 0,85%, peu importe ! - qui stabilise les marges arrière. Quels sont les effets de cette proposition ?
Tout d'abord, ce système fige la négociation commerciale et les prix. En effet, les industriels pourront très rapidement combler le différentiel de prix que le nouveau seuil de revente à perte aura instauré, tandis que les distributeurs n'auront aucun moyen d'affecter dans leurs prix de revente aux consommateurs la coopération commerciale acquise par les distributeurs au 31 décembre 2004.
Ensuite, ce dispositif sera très difficilement applicable et il pourrait rendre inopérante l'interdiction de revente à perte. Il suppose, en outre, que l'on accepte de vendre sous le seuil de revente à perte : si l'on applique un coefficient minoratif, cela signifie que l'on consent à vendre sous le seuil de revente à perte, donc à vendre à perte. C'est quelque peu paradoxal dans un débat où nous réaffirmons l'interdiction de la revente à perte.
Enfin, ce système conduit à donner un avantage aux nouveaux produits et aux nouveaux fournisseurs, qui pourront fixer un SRP de nature à mettre en difficulté les produits et les fournisseurs présents sur le marché à la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
L'amendement n° 360 pose donc un véritable problème d'égalité de traitement, qui le rend inacceptable et dangereux.
Le dispositif proposé paraît avoir des inconvénients très supérieurs à celui du Gouvernement. Je ne dis pas que le texte du projet de loi est parfait, mais, au vu de leurs conséquences, les systèmes alternatifs ont bien souvent des inconvénients nettement supérieurs à ceux de l'article 31.
C'est la raison pour laquelle, monsieur Darniche, je vous demande de retirer cet amendement, tout en vous remerciant d'avoir contribué, par votre proposition, à un débat passionnant. Mais il faudra clore ce débat très rapidement, afin que les relations commerciales puissent être construites le plus tôt possible sur un système légal rassurant, stable et fructueux pour tous.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 294 et 397.
M. Daniel Raoul. J'ai bien entendu les explications de M. le rapporteur et de M. le ministre. Cela dit, je n'ai pas changé d'avis.
Je vous souhaite bien du plaisir, monsieur le ministre, car je ne suis pas persuadé que nos collègues députés soient aussi dociles que la majorité de la commission des affaires économiques, qui a modifié sa position en vingt-quatre heures : notre rapporteur ne souhaitait pas, vous le savez bien, adopter à la lettre l'article 31.
Je vous citerai la prise de position de l'UMP concernant ce fameux rapport : M. Charié considère que ce n'est pas la loi Galland qui est en cause ; il suffit d'avoir la volonté de la faire appliquer dans toute sa rigueur. Il estime donc que la priorité des pouvoirs publics devrait être l'application des lois existantes. Il s'agit du rapport de l'Assemblée nationale !
La deuxième intervention est du même ordre : M. Sauvadet, au nom du groupe UDF, considère qu'avant de légiférer il importe de conduire une commission d'enquête parlementaire, afin de connaître, au-delà du rapport Canivet, l'ensemble des pratiques, sous couvert de l'anonymat, bien sûr, ce que permet ce type de commission.
Nous demandons donc que cela soit fait avant de légiférer et nous maintenons notre amendement.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 294 et 397.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc, pour explication de vote sur l'amendement n° 233 rectifié bis.
M. Jacques Blanc. Je remercie M. le rapporteur d'avoir dit que notre action servait à la réflexion. Il me permettra de souhaiter que cela aille un peu plus loin et qu'elle serve aussi aux décisions que prendra la commission mixte paritaire, après le débat à l'Assemblée nationale.
Il s'agit, en effet, d'un sujet fondamental et je me réjouis de la volonté de déboucher sur un dispositif satisfaisant.
Monsieur le ministre, votre analyse de nos propositions n'est pas rigoureuse, car la rectification de notre amendement prévoit une possibilité de modulation par décret. Il s'agit non pas de favoriser les ventes à perte, mais de diminuer les marges arrière par l'application d'un coefficient plus ou moins important. On aboutirait donc à un processus qui ne présenterait pas de danger au regard de l'inflation.
Ensuite, nos propositions ne favorisent pas les nouvelles productions, puisqu'elles reprennent les mesures qui figuraient dans l'amendement de M. Hérisson : à partir du 1er janvier 2006, si de nouveaux produits apparaissent, ils relèveront du nouveau dispositif.
Le sujet mérite que vous approfondissiez votre proposition, monsieur le ministre, car il ne faudrait pas que le dispositif que vous nous proposez, qui consiste à plafonner à 20 % le montant des avantages financiers versés aux distributeurs, se retourne et soit coûteux pour les fournisseurs de la grande distribution.
Je souhaite donc vivement que vous vous fixiez deux objectifs.
Tout d'abord, il faudrait que le texte précise que le plafond de 20% ne concerne que ceux qui sont aujourd'hui au-dessus de ce seuil. Car si cette mesure était également appliquée à ceux qui sont aujourd'hui en dessous de 20 %, cela risquerait de les amener à ce plafond.
Ensuite, et surtout, je vous demande instamment, monsieur le ministre, d'éviter que le mécanisme proposé n'ait pour conséquence de rendre apparentes les différences de conditions commerciales qui ont été négociées avec chaque distributeur. En effet, cela ne manquerait pas de provoquer un alignement sur les conditions les plus désavantageuses pour les fournisseurs, ce qui serait particulièrement préjudiciable aux petites et moyennes entreprises. On ne peut pas reprocher à ces entreprises d'avoir négocié de manière différente avec la distribution parce que tel secteur leur achète plus ou moins de produits.
Je vous fais confiance, à vous, monsieur le ministre, et surtout à vous, monsieur le rapporteur. (Sourires.) Je souhaite que ce débat de fond nous permette non pas de nous défausser, c'est-à-dire de ne rien faire, mais de trouver une réponse positive, qui stabilisera la situation et qui permettra aux consommateurs de bénéficier de nos décisions et à l'ensemble des fournisseurs de disposer d'un cadre assaini et d'aller de l'avant pour que, demain, on puisse mieux payer tous ceux qui participent à la production.
Cela dit, monsieur le président, je retire l'amendement.
Mme Michelle Demessine. Tout cela pour ça !
M. le président. L'amendement n° 233 rectifié bis est retiré.
Monsieur Darniche, l'amendement n° 360 est-il maintenu ?
M. Philippe Darniche. Cet amendement est très voisin de l'amendement n° 233 rectifié bis et je partage l'analyse de notre collègue Jacques Blanc. Je considère, monsieur le ministre, que le texte proposé est supérieur au dispositif précédent.
Toutefois, je ne suis pas convaincu que les inconvénients de notre proposition soient supérieurs à ses avantages. Je m'associe à M. Jacques Blanc pour demander une observation précise des dispositions qui permettraient, au cours de la commission mixte paritaire ou à l'Assemblée nationale, d'améliorer le texte que vous nous proposez.
Dans ces conditions, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 360 est retiré.
Je mets aux voix l'article 31.
(L'article 31 est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants, l'heure étant venue d'écouter la déclaration du Gouvernement, qui sera, comme chacun le sait, suivie d'un débat.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures, est reprise à dix-sept heures cinq, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)
PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
M. le président. La séance est reprise.
4
Conseil européen
Débat sur une déclaration du Gouvernement
M. le président. L'ordre du jour appelle la déclaration du Gouvernement sur le Conseil européen, suivie d'un débat.
Mes chers collègues, avant de donner la parole à M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, je tiens à me réjouir avec vous tous de ce qu'un débat sur le Conseil européen soit organisé au Sénat comme à l'Assemblée nationale.
En votre nom à tous, j'en avais formulé le souhait et je dois remercier le Gouvernement et tout spécialement le Premier ministre M. Dominique de Villepin et le ministre des relations avec le Parlement d'avoir répondu favorablement à notre demande. Depuis longtemps, nous insistions pour que, préalablement à un débat du Conseil à Bruxelles, il y ait un débat au Parlement. C'est maintenant chose faite.
Avec cette première se trouve réalisée l'organisation d'un débat préalable à la tenue d'un conseil européen de telle manière que les commissions et les groupes puissent exprimer leurs points de vue et dialoguer avec le Gouvernement.
Nous le savons tous, le sommet de demain aura une très grande importance.
Aussi, il était indispensable que nous puissions débattre, comme nos collègues députés, des sujets essentiels qui seront traités par le Conseil demain et après-demain.
Place maintenant au débat.
Dans un premier temps, M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, lira la déclaration prononcée à l'Assemblée nationale par M. Dominique de Villepin.
Puis, en présence de M. le Premier ministre, nous entendrons successivement le président de la commission des affaires étrangères, le président de la délégation pour l'Union européenne ainsi qu'un orateur par groupe et un représentant des non inscrits.
M. le Premier ministre répondra à l'ensemble des intervenants.
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vais vous donner lecture de la déclaration de M. le Premier ministre.
« Les crises ne sont pas nouvelles en Europe. Elles ont rythmé la vie des institutions européennes depuis leur création.
« C'est naturel : un projet politique de cette envergure ne peut grandir qu'en franchissant une à une des étapes difficiles. Le succès est à ce prix : la mise en place de la monnaie unique ou notre capacité à garantir la paix dans les Balkans en sont deux témoignages exemplaires.
« L'Europe n'est jamais donnée : c'est le fruit d'un compromis entre des Etats liés par l'histoire et par la volonté, mais qui ne partagent pas toujours les mêmes intérêts ni la même vision. L'Europe ne se réinvente pas chaque jour : elle se construit sur la base d'accords et de traités qui engagent chacun de ses Etats membres. Elle est un destin négocié et voulu.
« Au cours des dernières années, nous avons voulu franchir trois étapes : l'étape de l'élargissement, l'étape de la réforme des institutions et l'étape des valeurs de l'Europe.
« Au regard des bouleversements historiques qu'a connus le continent européen depuis la chute du mur de Berlin, l'ambition était légitime. Au début des années quatre-vingt-dix, les peuples décidaient de leur destin. Ils affirmaient leur volonté de vivre ensemble dans un continent unifié, démocratique et en paix. II était de notre devoir de répondre à leurs attentes en repoussant les frontières vers l'Est.
« Cette réalité exigeait de doter l'Union européenne de nouvelles règles de fonctionnement : à vingt-cinq, nous ne pouvions continuer à travailler sur la base des mêmes textes. Nous avions besoin de dégager plus facilement des majorités et de prévoir des dispositifs appropriés pour permettre aux Etats qui l'auraient souhaité d'aller plus loin.
« Enfin, chacun mesurait que le nouvel ensemble européen devait entrer dans l'âge politique en définissant un corps de valeurs cohérent : la Charte des droits fondamentaux.
« Toutes ces étapes ont trouvé leur aboutissement dans le projet de traité constitutionnel soumis le 29 mai dernier à référendum. Ce projet a été rejeté : c'est le choix souverain des Françaises et des Français. Il doit nous conduire à répondre rapidement à leurs interrogations, en veillant à préserver l'unité européenne.
« Le Conseil européen est le premier rendez-vous. Deux questions sont à l'ordre du jour : les perspectives financières et l'avenir du processus de ratification du traité. Sur chacun de ces sujets, je voudrais vous faire part de la position qui sera défendue par la France.
« Aux difficultés politiques, nous ne devons pas ajouter une crise financière. Nous soutenons donc tous les efforts de la présidence luxembourgeoise en vue d'un accord sur les perspectives financières lors du Conseil européen tout en estimant que pour parvenir à un accord raisonnable et équitable, chacun doit faire une part du chemin.
« Dans cette négociation, comme l'a rappelé le Président de la République, nous défendons quatre principes.
« Premier principe : le respect de la discipline budgétaire, qui s'impose à tous.
« Deuxième principe : la solidarité, qui doit permettre de financer la modernisation et le décollage économique des nouveaux membres dans l'intérêt de chacun.
« Troisième principe : le respect des engagements. En octobre 2002, nous avons adopté une décision qui garantit le financement de la PAC jusqu'en 2013. C'est un acquis majeur pour nos agriculteurs, sur lequel personne ne saurait revenir.
« Quatrième principe : l'équité. Chacun doit contribuer à l'effort européen à hauteur de ses moyens. Le Royaume-Uni, notamment, doit prendre toute sa part au financement de l'Europe élargie.
« Sur la base de ces principes, je souhaite que nous parvenions à un accord satisfaisant pour tous.
« La deuxième question qui sera abordée à partir de demain à Bruxelles est l'avenir du projet de traité.
« Douze pays se sont déjà prononcés, dont trois par référendum. L'Espagne a largement dit oui, la France et les Pays-Bas ont dit non. Treize pays doivent encore rendre leur décision, dont certains ont déjà annoncé le report ou la suspension de leur procédure.
« Partant de ce constat, le premier choix porte sur la procédure à suivre : faut-il interrompre le processus de ratification ou le poursuivre ? La France s'est déjà prononcée. Il appartient désormais à chaque Etat de s'exprimer à son tour suivant les modalités qu'il aura choisies. C'est le respect de la démocratie. C'est aussi le signe le plus clair de notre volonté de préserver l'unité européenne et l'expression de chacun.
« Au-delà du Conseil européen, des questions importantes se posent auxquelles nous ne pouvons pas aujourd'hui apporter toutes les réponses. Devant la représentation nationale, je ne veux cependant rien éluder des difficultés et des choix qui se présenteront à nous dans un avenir proche. Nous Français, qui avons répondu non au projet de texte, nous portons une exigence particulière de vérité et de lucidité. Aujourd'hui, j'ouvre le débat avec vous.
« La première question est celle des institutions.
« A vingt-cinq, nous devons inventer de nouvelles règles de fonctionnement. En rester au compromis de Nice ne peut pas être une solution durable. Très vite nous nous heurterons à des difficultés majeures dans la prise de décision et dans la définition des grandes orientations de l'Union. J'ajoute que ce n'est pas l'intérêt de notre pays.
« Un travail considérable a été accompli sur ce sujet au cours de ces dernières années. Il doit contribuer à éclairer notre réflexion.
« La deuxième question est celle du modèle économique et social européen.
« La Charte des droits fondamentaux fixe un certain nombre de principes essentiels auxquels la France est particulièrement attachée : je pense à la défense des services publics, au respect de l'égalité hommes-femmes, à la reconnaissance de la diversité culturelle ou au rejet de toute forme de discrimination. Mais les Françaises et les Français n'y ont pas trouvé les réponses suffisantes à leurs interrogations sur le modèle de développement économique et social que nous leur proposons. L'Europe est-elle d'inspiration purement libérale, comme certains le craignent ? Doit-elle renforcer sa dimension sociale ? En France comme en Europe, je crois que la vérité est plutôt dans le dépassement de ce clivage, dans la fidélité à un héritage universaliste et humaniste. L'exigence d'initiative n'est pas contradictoire avec le besoin de solidarité. Elle est même complémentaire.
« L'insatisfaction qui s'est exprimée dans le non européen ne porte donc pas la marque d'une résignation. Elle exprime au contraire une certaine ambition européenne. Pour y répondre, il faudra rapidement avancer des propositions concrètes. Nous le ferons en étroite concertation avec nos partenaires, en particulier avec l'Allemagne car nos deux pays doivent continuer à coopérer étroitement au service du projet européen
« Renforcer la politique sociale, c'est un premier défi à la hauteur des enjeux. La mise en oeuvre sans délai de la clause sociale horizontale sera un moyen d'affirmer notre volonté d'avancer dans cette voie : aucun texte ne pourra être adopté sans que ses incidences dans le domaine social aient été évaluées et publiquement présentées.
« Coordonner les politiques budgétaires et économiques au sein de l'Eurogroupe, c'est un autre défi majeur : nous devons être plus forts, plus confiants dans nos capacités à fixer de grandes orientations économiques pour notre continent.
« Revenir à la préférence européenne,...
M. Michel Charasse. Ah ah !
M. Philippe Douste-Blazy, ministre. ...qui a toujours été au coeur de notre projet commun, c'est une troisième orientation fondamentale : pourquoi abandonnerions-nous aujourd'hui un principe fondateur qui est plus utile que jamais et que nos concurrents américains ou asiatiques appliquent largement ? Pourquoi hésiterions-nous à défendre nos intérêts dans le respect de nos engagements internationaux ?
« Développer les outils de l'innovation et de la connaissance grâce à des budgets de recherche conformes à la stratégie de Lisbonne et grâce à de grands projets industriels communs, c'est, enfin, une voie d'avenir qui touche à l'essence même du génie européen : génie de savoir, génie de curiosité, génie d'ouverture au bénéfice de tous.
« La troisième question est celle de l'élargissement.
« Nous savons tous que la rapidité de l'élargissement, si elle a répondu à un véritable impératif historique, n'en a pas moins heurté beaucoup de nos concitoyens. Ce sentiment s'est exprimé le 29 mai : nous devons en tenir compte.
« Les Françaises et les Français veulent savoir dans quelle Europe ils construiront leur avenir et quelles seront ses frontières. Pour répondre à leurs questions, nous devons en priorité apprendre à nous connaître et approfondir les relations avec les nouveaux Etats membres. Les engagements pris à l'égard de la Bulgarie et de la Roumanie seront tenus, en veillant avec une attention particulière au respect des critères fixés. Mais, au-delà, nous devons certainement ouvrir une réflexion avec nos partenaires, dans le respect de nos engagements, sur les modalités des élargissements futurs.
« En l'absence d'institutions adaptées pour faire fonctionner une Europe élargie, la question du lien entre élargissement et approfondissement est désormais posée. (Exclamations sur quelques travées du groupe socialiste.) Il appartiendra aux Européens d'en tirer ensemble les leçons au cours des prochains mois.
« Les progrès de la construction européenne seront d'autant mieux acceptés qu'ils auront été compris par nos concitoyens et qu'ils se les seront appropriés.
« L'association plus étroite des parlements nationaux à la prise de décision européenne me semble donc une priorité. Vous savez que l'article 88-4 de la Constitution fait obligation au Gouvernement de transmettre au Parlement toute proposition d'acte qui relèverait du domaine de la loi au sens national du terme. A l'entrée en vigueur du traité constitutionnel, il était prévu que ce dispositif soit élargi à toute proposition d'acte relevant du domaine de la loi au sens européen du terme. Je prendrai les dispositions nécessaires pour que cette clause soit appliquée dans les meilleurs délais. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. - MM. Didier Boulaud et Jean-Pierre Plancade applaudissent également.)
« Au-delà, toutes les Françaises et tous les Français doivent être mieux associés aux décisions européennes et à leur préparation. Je m'y emploierai.
« Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, le vote du 29 mai a fixé une double exigence : défendre les intérêts de notre pays en prenant en compte les inquiétudes et les aspirations des Françaises et des Français ; défendre l'unité et le rassemblement des Européens. J'en tiendrai le plus grand compte.
« Le débat référendaire a été un premier pas dans la voie d'une réappropriation de l'Europe par chacun de nos compatriotes. Il doit être poursuivi à l'échelle européenne pour tenir compte des attentes de tous les peuples. La France veut faire entendre sa voix et défendre une vision exigeante de l'Europe. Le Président de la République le fera bien sûr au prochain Conseil européen, mais aussi à l'occasion de tous les rendez-vous qui permettront la réconciliation de l'Europe et du citoyen. » (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UC-UDF et du RDSE.)
M. le président. Je salue au banc du Gouvernement M. le Premier ministre, qui répondra aux orateurs qui vont intervenir.
La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Mme Anne-Marie Payet applaudit également.)
M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, le rejet du traité constitutionnel par la France, puis par les Pays-Bas, a été une profonde déception pour tous ceux d'entre nous qui placent leurs espérances dans l'affirmation d'une Europe politique au service de la paix et de l'équilibre du monde. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Seule cette ambition est à même de donner un véritable sens à tout ce qui a déjà été patiemment construit depuis près de cinquante ans, depuis le marché commun au marché unique, puis à la monnaie unique - qui nous préserve aujourd'hui de bien des turbulences monétaires -, depuis aussi ce qui n'était qu'une simple « coopération politique » à une politique étrangère et de sécurité commune.
Cette ambition est aujourd'hui blessée, et la confusion qui entoure désormais l'avenir du traité constitutionnel va peser sur des négociations essentielles pour l'avenir. Pourra-t-on ainsi poursuivre, sur le même rythme et sur les mêmes bases, les élargissements futurs de l'Union, alors même que l'instrument juridique qui devait permettre de conjuguer élargissement et approfondissement est aujourd'hui, pour le moins, différé ; alors même aussi que nous nous retrouvons dans le cadre du traité de Nice, dont les résultats à cet égard avaient justifié la mise en place de la Convention pour l'avenir de l'Europe ?
C'est aussi dans ce climat délicat qu'à partir de demain va se tenir le Conseil européen où les responsables des Vingt-cinq devront prendre des décisions sur deux sujets majeurs : les perspectives financières de l'Union pour la période 2007-2013 et l'avenir du traité constitutionnel.
Le financement de l'Union pour 2007-2013 va commander le choix de ses priorités pour les années à venir : respecter les engagements souscrits pour l'intégration des nouveaux membres, étendre les politiques communautaires existantes et respecter l'accord conclu à l'unanimité, en 2002, sur la PAC. La position de six des Etats membres, dont la France, qui souhaitent limiter ce budget à hauteur de 1 % du revenu national brut, est cohérente avec les contraintes de dépense publique que chaque nation est tenue de respecter et auxquelles l'Union elle-même ne peut se soustraire.
Nous voyons bien aujourd'hui que chaque pays avance ses « lignes rouges », qui annoncent des négociations particulièrement difficiles et leur conclusion incertaine.
Au principe d'une limitation du montant du prochain budget européen s'ajoute la question du partage de son financement, auquel la France devra prendre sa part.
Sur ce point, c'est bien sûr le maintien en l'état du mécanisme du chèque britannique, décidé en 1984, qui doit être remis en question. A l'évidence, cette « correction » ne se justifie plus aujourd'hui : alors que le Royaume-Uni se situe à près de 20 % au-dessus de la moyenne communautaire des Vingt-cinq, ce sont les autres Etats membres qui financent le chèque britannique, y compris ceux dont le revenu atteint moins de la moitié de celui du Royaume-Uni ! Anachronique, coûteux, injuste, ce dispositif, qui représente 56 milliards d'euros pour la période 2007-2013, doit être revu.
A cet égard, la proposition du Premier Ministre britannique de lier ce dispositif à l'accord de 2002 sur le financement de la politique agricole commune n'est pas acceptable. La France, dans ce délicat dossier, est loin d'être isolée.
Au-delà du montant global du budget et de la part de chacun dans son financement se pose aussi la question de la destination des dépenses. Quel sera le niveau de répartition des ressources entre deux instruments de la politique structurelle : celui dit de l'objectif 1, qui va légitimement concentrer l'action budgétaire vers les Etats et régions les plus pauvres, et celui dit de l'objectif 2, visant la compétitivité et l'emploi, qui reste essentiel pour les régions françaises ? Quelle solution pourra intervenir pour des pays qui, comme l'Espagne, vont cesser de bénéficier du fonds de cohésion ?
Enfin, s'agissant des dépenses agricoles, qu'en sera-t-il, dans le cadre du plafonnement décidé en 2002, des 8 milliards d'euros sur sept ans liés à l'élargissement à la Bulgarie et à la Roumanie en 2007 ?
Je voudrais également rappeler ici la pertinence d'une démarche volontariste en matière de politique communautaire de recherche. Voilà un an, notre collègue député Marc Laffineur et moi-même avions préconisé de mettre l'accent sur la recherche liée à la sécurité et à la défense, dans le cadre de l'Agence européenne de défense ; il me semble important d'approfondir notamment cette voie.
Sur toutes ces questions, monsieur le Premier ministre, vous nous direz l'état d'esprit qui anime le Gouvernement français à la veille de ce rendez-vous capital.
Deuxième sujet sur lequel les responsables des Vingt-cinq devront aboutir à une position constructive : l'avenir du traité constitutionnel, celui de l'ambition qu'il porte et qui reste le seul moyen pour les peuples d'Europe de donner un sens et une orientation claire à ce qui, à défaut, ferait stagner l'ambition européenne au seul grand marché européen.
Il appartient à chaque pays membre de définir la suite qu'il entend donner à son processus de ratification. Mais la logique juridique est là : d'ores et déjà privé de deux approbations, atteint par la « suspension » britannique, et peut-être danoise, le traité constitutionnel ne pourra entrer en vigueur en l'état. Pour autant, ne pourrait-on pas envisager que les responsables européens donnent une nouvelle chance à celles des dispositions inscrites dans la première partie du traité qui sont relatives aux institutions, sur lesquelles un consensus général est sans doute possible ? Pourraient ainsi être préservées les avancées incontestables que constituent, par exemple, la présidence stable de l'Union - déjà acquise pour l'Eurogroupe -, la création du service d'action diplomatique, ou encore les coopérations en matière de défense. Après tout, l'Agence européenne de défense existe bel et bien aujourd'hui, les Vingt-cinq ayant décidé sa création lors du Conseil de Thessalonique de juin 2003 !
Ces dispositions relèvent finalement plus du bon sens que de l'idéologie. Elles peuvent répondre à un souci d'efficacité sans nécessiter des modifications institutionnelles majeures. Est-ce là, monsieur le Premier ministre, une voie que vous entendez promouvoir auprès de nos partenaires ?
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, lors des négociations qui s'ouvriront demain, l'Union va se trouver dans la position délicate de devoir décider de ses moyens d'agir pour l'avenir alors même que les turbulences qui touchent le traité constitutionnel viennent obscurcir son horizon politique. Il lui faut, dans l'immédiat, rassurer des populations inquiètes, s'interroger sur des méthodes souvent mal comprises - à tort ou à raison - et tenter de conforter, par-delà les crises, le projet qu'elle construit pour notre avenir collectif.
Dans cette atmosphère de doutes et d'interrogations, je vois trois raisons d'espérer.
D'abord, le projet européen n'en est pas à sa première crise, et son histoire démontre qu'il a su chaque fois se relever pour continuer de progresser. Sa force lui a donné, en quelque sorte, les « anticorps » qui lui permettent de dépasser les obstacles.
Ensuite, pour nous Français, l'ambition européenne doit continuer de se construire sur une communauté d'approche et d'action avec l'Allemagne. Demain comme hier, l'Europe pourra progresser grâce à cette solidarité franco-allemande, par-delà même les alternances politiques, on l'a vu par le passé.
La troisième raison d'espérer naît de l'enseignement tiré de la campagne qui a précédé le 29 mai, campagne qui a été l'occasion, pour chaque Français, peut-être de mieux apprendre l'Europe, d'en débattre et, finalement, d'en décider. Ce moment de démocratie aura été utile pour recréer le lien de légitimité entre l'Europe et ses citoyens.
Monsieur le Premier ministre, les deux prochains jours vont être longs et difficiles. Dans les circonstances présentes, notre pays a besoin de parler d'une voix forte, au nom d'une France rassemblée autour de ses intérêts nationaux. Sachez que vous trouverez aussi au sein de la Haute Assemblée le soutien indispensable à l'affirmation de notre idéal européen. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le président de la délégation du Sénat pour l'Union européenne.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'objet de notre débat d'aujourd'hui n'est pas de disserter sur les conséquences franco-françaises du « non ».
Il s'agit de tracer des pistes pour le Conseil européen, en nous tournant résolument vers l'avenir, et ce sans escamoter les questions les plus difficiles.
Je ne sous-estime pas l'importance du débat sur les perspectives financières, mais il ne doit pas en quelque sorte être l'arbre qui cache la forêt.
Si le Conseil européen devait se limiter à l'examen des perspectives financières, sur fond d'affrontement franco-britannique, quel message inquiétant serait adressé aux Européens !
Admettons même qu'un compromis soit trouvé. Nous aurons sauvé la face, mais après ? Il y a tout le reste, toutes les questions que vous avez évoquées dans votre déclaration de politique générale, monsieur le Premier ministre.
L'Europe est plus qu'en crise : elle est en danger. Il lui faut autre chose qu'un replâtrage.
A l'heure où chacun y va de son remède - il suffit pour s'en convaincre d'écouter la radio, de regarder la télévision et de lire les journaux -, le plus important serait d'abord que le Conseil européen pose un diagnostic ou organise un rendez-vous pour poser un diagnostic.
Qu'il décide ou non une pause dans les ratifications, il faut, d'une manière ou d'une autre, qu'il maintienne le rendez-vous prévu en 2006 et que, à ce moment-là, les Etats répondent enfin à la question : quelle Europe voulons-nous ensemble ? Une Europe à l'anglo-saxonne ou une Europe s'affirmant sur le plan politique à partir de ses valeurs, et donc dotée d'une vraie capacité de décision et d'action ?
Le Conseil européen doit nous envoyer le message non de la résignation, mais de la volonté d'agir. Pour que l'Europe retrouve son élan, il faut qu'elle sache se recentrer aujourd'hui sur des projets concrets. C'est ce que nous ont demandé les Françaises et les Français au cours de cette campagne. En d'autres termes, il faut que l'Europe fasse ses preuves.
Jacques Delors a remarqué un jour que l'Europe ne savait pas bien faire deux choses à la fois. Ces dernières années, elle s'est concentrée sur une seule chose ou presque : la réforme de son fonctionnement. Mais l'Europe n'a pas su occuper en même temps le terrain économique et social, où se trouvent les attentes les plus fortes de nos concitoyens.
Un seul exemple : la stratégie de Lisbonne, lancée il y a cinq ans, n'a donné jusqu'à présent à peu près aucun résultat tangible...
M. Jean Bizet. C'est exact !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. ... et nous attendons toujours la nomination du coordonnateur français sur la stratégie de Lisbonne.
Les citoyens comprennent que l'Europe doit s'organiser et s'unir pour être un acteur mondial, mais ils attendent aussi qu'elle aide à répondre à leurs préoccupations quotidiennes, dont les premières sont la croissance et l'emploi.
Bien sûr, l'action dans ce domaine relève en partie de mesures nationales, mais des responsabilités doivent également s'exercer à l'échelon européen. Nous ne pouvons nous satisfaire d'une situation où la léthargie de la zone euro contraste avec le dynamisme des économies nord-américaines et asiatiques.
Dès lors que la politique monétaire se décide à l'échelon européen et que l'Union coordonne les politiques des Etats membres, il est nécessaire que le dispositif européen place au centre de son action les objectifs de croissance et d'emploi.
Mais il faut aller plus loin.
En réalité, l'échec du processus de ratification, venant après la division des Européens sur l'Irak, montre que la solidarité entre Européens, qui est la base d'une union politique - l'affectio societatis, en quelque sorte - doit encore s'approfondir.
En situation de crise, il est toujours utile de revenir aux sources. L'esprit de la déclaration Schuman était de développer des solidarités concrètes en vue de préparer les voies d'une union politique. La Communauté à six étant devenue une Union à vingt-cinq et bientôt à vingt-sept, cette démarche doit retrouver toute sa valeur.
C'est autour de projets concrets comme le développement des réseaux transeuropéens ou la généralisation des échanges d'étudiants et d'enseignants, la recherche, que peut s'éprouver l'efficacité de la solidarité européenne.
De même, la construction de l'Europe de la défense ou encore la lutte commune contre la délinquance transfrontalière sont des domaines où nous pouvons avancer sur la base des traités actuels, et montrer les avantages tangibles de la construction européenne.
Si l'on veut réconcilier les citoyens avec l'Europe, il faut également sortir de l'ambiguïté dans certains domaines.
Certains discours laissent penser - ce fut particulièrement le cas pendant la campagne - que la construction européenne va résoudre tous les problèmes, d'autres en font l'alibi des difficultés nationales.
M. Alain Gournac. Oui !
M. Josselin de Rohan. Tout à fait :
M. Michel Charasse. Ce n'est pas faux !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Dans les deux cas, on fait tout reposer sur l'Europe, ce qui ne peut mener qu'à la confusion des esprits.
L'Europe est destinée non pas à se substituer aux Etats membres, mais à leur permettre d'agir en commun là où ils n'ont pas séparément la dimension nécessaire pour agir efficacement. L'Union doit être complémentaire des Etats membres - c'est le sens du principe de subsidiarité - et non chercher à les concurrencer. Elle doit apparaître comme une source de possibilités supplémentaires et surtout pas comme un carcan.
De même, peut-on espérer retrouver l'adhésion des citoyens en laissant constamment dans l'ambiguïté la réponse à la question des limites de l'élargissement ? Quelle que soit la réponse à cette question, il en faut une, si l'on veut que les citoyens aient des repères, ce qui est une absolue nécessité. Nos concitoyens n'ont pas voté contre l'élargissement : ils ont voté contre la confusion qui l'entoure, confusion propice à tous les mauvais procès et le fonds de commerce d'un certain nombre de tenants du « non ». Il faut dire aux Françaises et aux Français où nous allons.
Nous avons aujourd'hui pour la première fois - et c'est de bon augure - un débat avant la tenue d'un Conseil européen. C'est tout de même une première, ...
M. le président. En effet !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne.... qui mérite d'être soulignée et qui était réclamée.
M. Robert Badinter. Il n'était que temps !
Mme Hélène Luc. Oui !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. J'en remercie M. le président du Sénat ainsi que M. le Premier ministre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
C'est un progrès, car le Parlement est rarement sollicité, et plus rarement encore écouté, lorsqu'il s'agit des questions européennes. Je voudrais voir là, monsieur le Premier ministre, un premier pas dans l'adaptation de notre vie publique à la construction européenne.
Constitution ou pas, la construction européenne est en réalité d'ores et déjà au coeur de la vie nationale. Il faut désormais la mettre aussi au coeur de notre vie politique et administrative si nous voulons retrouver les bases d'une démocratie authentique.
C'est tout le fonctionnement de l'Etat qu'il faudrait revoir dans cette optique, monsieur le Premier ministre.
A l'échelon gouvernemental, un dispositif interministériel renforcé devrait prendre en compte dès le stade des négociations les difficultés éventuelles, au lieu de les découvrir une fois les décisions arrêtées. Une chaîne cohérente devrait relier les administrations aux négociateurs, ce qui supposerait que chaque ministère s'imprègne de la dimension européenne, et le fonctionnement du Parlement devrait également être revu.
L'Europe ne doit plus être le parent pauvre des activités parlementaires, qu'il s'agisse de législation - nos retards dans la transposition des directives sont devenus une habitude - ou, comme aujourd'hui, dans nos efforts de contrôle.
Si nous parvenons à rétablir le lien entre les citoyens et l'Europe, alors nous pourrons reprendre utilement, sous une forme ou sous une autre, tout ou partie du projet constitutionnel.
Jean Monnet disait que l'Europe était nécessairement appelée à connaître des crises et que son avenir dépendrait de la manière dont elle les résoudrait. Aujourd'hui, il faut que l'Europe mesure les dangers qui la menacent et puise dans ses propres forces de quoi se redonner un avenir.
Oui, il faut redonner de l'avenir à l'Europe. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame, messieurs les ministres, nous sommes ici unanimes, je pense, à saluer l'organisation de ce débat à la veille du Conseil européen.
Nous avons en effet demandé avec insistance que de tels débats deviennent une pratique ordinaire dans nos assemblées. Associer davantage le Parlement national à la préparation des Conseils et à la vie de l'Union est en effet nécessaire pour que les Européens s'approprient la démarche européenne.
De plus, le débat d'aujourd'hui est crucial en un temps de crise française et européenne.
Les membres du groupe UC-UDF souhaitent évidemment ardemment que le Conseil européen qui s'ouvre demain se tourne vers l'avenir et ouvre une ère où les chefs d'Etat mettent de nouveau une réelle volonté politique au service de la construction européenne.
Nos collègues des autres Etats de l'Union restent abasourdis devant notre capacité à jouer avec le rêve européen, ce rêve que, avec l'Allemagne, nous avions su offrir à notre continent, et ils nous jugent sévèrement.
Ils restent étonnés de nous voir rejeter une Constitution que nous avions voulue, que nous avons largement rédigée et qui nous était favorable. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
Face à ces réactions, nous avons perdu tout droit à donner des leçons, si tant est que nous n'en ayons jamais eu.
Notre arrogance ne nous a jamais servis. Au moins, désormais, sommes-nous condamnés à cultiver l'humilité.
Mais pour quoi faire ? Qu'attendent les Français ? Qu'attendent de nous nos partenaires, pour autant qu'ils attendent encore quelque chose de nous ?
Le rêve européen était fondamentalement un rêve de paix et de respect des droits de l'homme, nous l'avons dit et répété pendant la campagne, mais sans doute pas encore assez. Le génie de Robert Schuman s'est exprimé dans la méthode qui porte son nom et qu'il nous a proposée : « Si tu veux construire une paix durable, apprends aux hommes à travailler ensemble ».
C'était un vrai projet politique, à la fois inspiré et concret. Retrouvons son intuition et mettons le plus grand pragmatisme au service du rêve européen que nous allons nous attacher à retrouver !
Monsieur le Premier ministre, il nous faut proposer des avancées pratiques, concrètes et lisibles, tout en rappelant sans cesse le sens profond du projet dans lequel elles s'inscrivent. Pensons à l'agriculteur qui oriente sa charrue vers une étoile pour que son sillon soit droit.
M. Michel Charasse. Et qui demande des subventions !
M. Denis Badré. Il faut la charrue, mais il faut aussi l'étoile, les dispositions concrètes, mais aussi l'inspiration.
Nous attendons du Conseil qu'il adopte rapidement un calendrier d'approfondissement des institutions. Ne reportons pas aux calendes grecques ce qui est indispensable pour que l'Europe vive à vingt-cinq. A défaut d'une belle Constitution cohérente et complète, de plus petits traités à objet limité seraient au moins nécessaires pour offrir à l'Union certaines dispositions, par exemple celles qui figurent dans la partie I de la Constitution, je pense en particulier au président du Conseil ou aux conditions de désignation des membres et du président de la Commission, Commission dont il faut impérativement restaurer le rôle de « porteur de l'intérêt commun ».
Nous souffrons aujourd'hui d'un manque de revitalisation de l'intérêt commun ; il a disparu et il faut le restaurer.
Engager une telle démarche est nécessaire pour que ne se découragent pas ceux qui croient vraiment que l'Europe est notre destin, ceux qui ont compris que bien souvent la solution à nos problèmes est dans plus d'Europe.
Deux sujets font la une de l'actualité : la politique agricole commune et le chèque britannique, de manière assez désastreuse à mon sens. Le fait que deux grands Etats de l'Union se les opposent accrédite l'idée selon laquelle l'Europe serait d'abord un grand marchandage, un lieu où l'on tente de régler des conflits d'intérêts nationaux.
Derrière ce premier affrontement, c'est tout le débat sur les « retours nets » qui est rouvert. Où est l'intérêt commun dans le « J'en veux pour mon argent » ?
La paix, la libre circulation des personnes, le développement des échanges économiques ne sont pas des produits chiffrables et localisables dans tel ou tel Etat de l'Union. Il s'agit bien des fruits d'un intérêt commun. N'oublions jamais que cet intérêt commun parce qu'il est commun est bien aussi l'intérêt de chacun. Lorsque l'on perd de vue l'intérêt commun, l'Europe s'échoue, et ce sont les Etats qui souffrent.
La Convention a précisément été mise en place pour favoriser l'expression de l'intérêt commun mieux qu'au sein de la conférence intergouvernementale. Tentons de vivre la crise actuelle comme une opportunité nous appelant à retrouver le sens et l'importance de l'intérêt commun.
En ce qui concerne la PAC, rester sur l'accord de 2002 est à l'évidence justifié du point de vue de l'intérêt national. Pour l'instant c'est nécessaire, mais veillons, monsieur le Premier ministre, à ne pas payer très cher par d'autres concessions cette situation dans laquelle nous choisissons de nous installer.
Veillons à ne pas le payer cher non plus en nous interdisant de reprendre une réflexion de fond sur la PAC. Mettre des rustines sur une PAC à bout de souffle n'a plus grand sens. Plus personne d'ailleurs ne s'y retrouve. Rappelons que la PAC n'a pas été faite d'abord pour les agriculteurs français. Sortons de ce piège où nous nous sommes laissé enfermer : elle a été faite pour que les consommateurs européens disposent d'une alimentation garantie en quantité et en qualité et d'un espace rural vivant et harmonieux.
La PAC fut dévoyée par la mise en place d'aides directes. En 1992, n'aurait-il pas mieux valu généraliser aux grandes cultures un système de prix différenciés semblable à celui qui régit le marché du sucre ?
Avec l'élargissement et l'arrivée dans l'Union de pays qui avaient précisément besoin d'une PAC identique à celle que nous avions su mettre en place dans notre vieille Europe trente ans auparavant, nous avions l'occasion de revoir tout le système. Nous ne l'avons pas saisie. Nous avons une nouvelle occasion de réformer la PAC autour du principe de la préférence communautaire. Cette fois, saisissons-la. Monsieur le Premier ministre, nous sommes à votre disposition, car nous avons beaucoup réfléchi sur ce sujet.
Je le disais tout à l'heure, le « chèque britannique » est une absurdité du point de vue européen. C'est une absurdité coûteuse : plus de 5 milliards d'euros cette année, montant bien supérieur aux 400 millions d'euros consacrés dans le budget européen à l'aide humanitaire ou aux seuls crédits de recherche inscrits dans le cadre du PCRD, le programme cadre de recherche et développement. Que le « chèque britannique » coûte plus cher à l'Europe que la recherche est tout de même insensé ! De plus, ce « chèque » coûte 1,5 milliards d'euros à la France, c'est-à-dire presque 10 % de notre contribution au budget de l'Union.
Il s'agit donc non seulement d'un vrai problème de principe, mais aussi d'un vrai problème financier. Il ne sera pas traité isolément puisque la Grande-Bretagne y mettra toujours son veto. Nous ne progresserons pas non plus en nous cantonnant dans un face à face stérile, PAC et « chèque britannique ».
Il faut reprendre une vraie réflexion sur la forme, la structure et le contenu du budget européen. Je ne développe pas non plus ce point aujourd'hui, car je le fais chaque année, lors de l'examen de l'article du projet de loi de finances qui fixe le montant du prélèvement sur nos recettes au profit du budget européen.
Je rappelle simplement que nous n'irons pas loin avec un budget dont l'essentiel des recettes est voté par les Parlements nationaux et dont les dépenses sont adoptées par le Parlement européen. Où est alors le principe du consentement à l'impôt ? (M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.) Où est la démocratie ? Où les Européens peuvent-ils retrouver les choix qui sont faits ?
Nous n'irons pas loin avec un budget qui ouvre des possibilités pluriannuelles de dépenses sous plafond là où il serait préférable de financer des programmes ou des projets. Là non plus, personne ne s'y retrouve !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Eh oui !
M. Denis Badré. L'exercice de définition des perspectives financières n'incite pas aux vraies remises en cause. De perspective en perspective, on « ravaude », on continue, on va au fil de l'eau, sans réelles perspectives européennes au sens fort, c'est-à-dire au sens politique.
Pourtant, une révision profonde du contenu et de la forme du budget européen s'impose aujourd'hui.
S'agissant du contenu, je prendrai deux exemples : d'une part, les crédits de recherche du PCRD justifieraient une vraie réflexion ; d'autre part, l'accident du tunnel du Mont-Cenis, « renvoyant » sur le Mont-Blanc un trafic de camions dont plus personne ne veut, confirme la fécondité de l'idée des réseaux transeuropéens. Encore faut-il la mener au bout, en lançant, par exemple, comme nous l'avons déjà demandé, un programme de percées alpines de statut européen. Ne s'agit-il pas de protéger les Alpes, poumon de l'Europe et pas simplement de l'Autriche, de la France ou de l'Italie ? Car les poids lourds qui traversent les Alpes vont non seulement de Savoie en Lombardie, mais souvent aussi de Finlande en Grèce.
Je pourrais multiplier les exemples, en évoquant également la PESC, la politique étrangère et de sécurité commune, mais je m'arrête là.
Monsieur le Premier ministre, pour conclure, nous aimerions voir la France proposer aujourd'hui à l'Europe un vrai programme politique, organisé autour de trois priorités.
Première priorité : réussir l'élargissement.
A cet égard, tout n'a pas été fait le 1er mai 2004, loin s'en faut. Il convient aujourd'hui de réussir l'élargissement, dans l'intérêt des pays qui nous ont rejoints comme dans celui des anciens Etats de l'Union, ce qui constitue déjà une vaste entreprise.
Deuxième priorité : appeler l'Union et ses membres à mettre en oeuvre, ensemble, une vraie politique scientifique, nous permettant d'améliorer notre compétitivité et de rivaliser avec nos grands concurrents, actuels ou futurs, notamment les Etats-Unis, l'Inde et la Chine.
Troisième priorité : lancer une vraie politique d'aide aux pays les plus pauvres, politique nécessaire si nous voulons lutter contre les délocalisations, politique indispensable si nous voulons aller vers un monde de paix, respectueux de tout homme.
Dans ces deux dernières priorités, vous aurez retrouvé, monsieur le Premier ministre, une nouvelle présentation de la stratégie de Lisbonne. A mon sens, présenter la stratégie de Lisbonne en affirmant que nous voulons retrouver notre compétitivité par rapport à nos grands concurrents et aider ceux qui sont à la traîne est une conception dans laquelle tout le monde peut se retrouver beaucoup plus facilement, car cette conception est beaucoup plus lisible et a un sens beaucoup plus fort sur le plan politique.
N'est-ce pas sur de tels sujets - compétitivité de l'Europe et de chacun de ses Etats membres, aide aux pays en développement -, qui s'avèrent vitaux pour nous, pour l'Europe et pour le monde, que la France doit de nouveau savoir ouvrir des voies ?
Monsieur le Premier ministre, nous avons mal à la France, nous avons mal à l'Europe !
Nous voulons que la France retrouve sa fierté de servir avec autant d'humilité que d'ambition l'extraordinaire projet humaniste engagé voilà cinquante ans par la France et l'Allemagne, et que le monde attend.
Nous attendons de vous, monsieur le Premier ministre, que vous fassiez tout pour que les Français renouent avec le rêve européen et pour que les Européens reconnaissent de nouveau en la France le pays qui donne du souffle à l'Europe ! (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Monsieur le Premier ministre, pour se revendiquer de la démocratie, il faut que le peuple soit susceptible d'avoir le dernier mot.
En étant ainsi invité à se prononcer sur la ratification du traité constitutionnel européen, le peuple s'est littéralement emparé du texte dans un contexte passionné et, parfois, hostile.
Malgré la dictature du « oui » que tentaient d'imposer les médias, relayés en cela par la plupart des partis politiques, notamment par les deux partis dominants, nos concitoyens ont su se faire une opinion objective d'un texte qu'ils ont massivement rejeté.
Le peuple a tranché en connaissance de cause. Les Françaises et les Français ont dit non. Ils ont opposé courageusement un « non » massif et clair à la construction d'une Europe libérale, celle où règne la loi du marché, la loi du plus fort, la loi de la jungle.
M. Josselin de Rohan. C'est celle que vous allez avoir !
M. Robert Bret. Le dernier exemple en date, qui me touche de près, nous a été communiqué cet après-midi par une dépêche de l'AFP : la Cour de justice des Communautés européennes vient d'annuler une aide de 76 millions d'euros que Bruxelles devait verser à la Société nationale maritime Corse-Méditerranée. Cela risque de porter un coup mortel à la compagnie et à l'avenir même du service public de continuité territoriale avec la Corse.
Monsieur le Premier ministre, ce vote populaire sans équivoque est lourd de sens pour l'exécutif, en particulier pour le Président de la République, qui aura à représenter la France au sein du Conseil européen.
La question de la légitimité d'une telle représentation est posée, au lendemain d'un référendum qui sonne comme un revers cinglant à la position clairement affichée par le chef de l'Etat et à la politique économique et sociale dévastatrice menée par son gouvernement.
Dans ces circonstances, pour prétendre à une représentativité, si minime soit-elle, le Président de la République doit se présenter au Conseil européen en qualité de mandataire du peuple français. La logique démocratique exige donc que le Président se soumette à la volonté exprimée souverainement par nos concitoyens.
M. Josselin de Rohan. Le Pen et Buffet !
M. Jean-Pierre Plancade. Incroyable !
M. Robert Bret. Je le rappelle solennellement, le référendum du 29 mai dernier impose le choix du peuple aux dirigeants de notre pays : il ne s'agit pas d'un simple référendum consultatif, comme le souhaiterait bon nombre de partisans du « oui ».
Monsieur le Premier ministre, ce rôle de porte-parole de la stricte volonté populaire ne laisse donc nul choix au Président de la République. Il ne s'agit pas de faire le dos rond, ainsi que certains le proposent, comme si rien ne s'était passé le 29 mai dernier.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Qui a dit cela ?
M. Robert Bret. Sauf à défier la volonté populaire, le chef de l'Etat est ainsi contraint de revenir sur la signature du traité constitutionnel, irrémédiablement caduc, et d'exiger une renégociation de ce texte sur des bases nouvelles, inspirées par une conception rénovée du projet européen.
Pour sortir de la crise, il faut engager au plus vite des négociations afin de redéfinir les fondements de l'Union européenne.
Cette démarche constructive passe au préalable par le retrait définitif de certains textes, directives et règlements, et par l'arrêt immédiat du mouvement de privatisation des services publics, à commencer par celui qui frappe le fret ferroviaire.
La refondation de l'Union européenne sur un projet social et citoyen nécessite en effet le retrait des textes les plus controversés, notamment le projet de directive Bolkestein, celui sur l'aménagement du temps de travail ou encore celui sur la libéralisation des services portuaires.
Sur la directive Bolkestein, monsieur le Premier ministre, il n'est pas acceptable que Mme Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, ait participé la semaine dernière à la poursuite des négociations sur le projet de directive. Il ne faut plus biaiser avec la parole du peuple, il faut l'accepter.
Il convient également de réformer tous les dispositifs qui ont démontré leur inefficacité pour la construction d'une Europe sociale. Nous pensons notamment au carcan que constituent le pacte de stabilité et la politique monétaire menée librement par la Banque centrale européenne et à l'impasse auxquels ils mènent.
A la veille du Conseil européen de Bruxelles, il est donc nécessaire que votre gouvernement et le Président de la République en personne prennent la juste mesure du résultat du référendum du 29 mai.
Le peuple a repris la main, il s'est exprimé clairement.
Il a exprimé sa soif de démocratie et de citoyenneté.
La crise européenne que nous traversons doit trouver une porte de sortie par le haut, c'est-à-dire par la voie du peuple.
Le déficit démocratique qui résulte du fossé béant existant entre les décideurs et les citoyens européens doit être résorbé.
Le « non » du 29 mai, outre un formidable espoir d'Europe sociale, a été porteur d'une profonde aspiration démocratique.
Les citoyens l'ont constaté : lorsque l'autorité passe du niveau national au niveau européen, les décideurs sont bien loin et les choses leur échappent sur des points essentiels qui conditionnent leur vie.
Les citoyens ont ainsi constaté que la construction européenne a fait émerger une « Europe des gouvernements et des administrations », s'appuyant sur une lourde technocratie, puisque c'est cette Europe qui s'est révélée comme le principal détenteur du pouvoir normatif communautaire.
Monsieur le Premier ministre, l'urgence consiste donc à combler ce déficit démocratique. Pour cela, nous devons transformer l'Union européenne, la diriger vers toujours plus de démocratie. Pour y parvenir, les représentants des peuples et les citoyens eux-mêmes doivent se réapproprier le projet européen, en exerçant un nouveau contrôle sur la conduite de la construction européenne.
Il faut mettre en place un nouveau cadre de réflexion pour refonder l'Europe, cadre qui remédie à l'éloignement des principaux centres de décision.
Le débat européen doit se poursuivre et s'amplifier, en permettant aux peuples européens et à leurs forces politiques, syndicales et associatives de participer activement à une nouvelle construction européenne.
Les fondements de l'Union européenne doivent donc être redéfinis.
Les valeurs prônées par l'Europe ne peuvent plus être liées à l'économie de marché ouverte où la concurrence est libre.
Il convient désormais de s'engager dans une refondation de l'Europe. Pour cela, il s'agit d'abord de s'interroger sur les droits fondamentaux et sociaux de la personne, sur les valeurs qui rassemblent les peuples européens.
M. Jean-Pierre Plancade. Vous les avez refusés en votant « non » ! C'est incroyable !
M. Aymeri de Montesquiou. C'est incohérent !
M. Robert Bret. Au coeur des politiques européennes doivent être mis en place des systèmes de protection sociale harmonisés par le haut, des services publics étendus, des institutions plus démocratiques et plus proches des citoyens, une politique économique et monétaire au service de la croissance et de l'emploi.
Nous avons besoin d'orientations et de structures permettant de maîtriser les marchés financiers. C'est faisable, dès lors que l'on accepte de mobiliser de puissants leviers tels que la Banque centrale, la fiscalité sur le capital ou de grands pôles publics, dès lors que l'on accepte d'édicter des règles visant à responsabiliser les entreprises sur les plans social, environnemental ou démocratique, et d'orienter les crédits ainsi dégagés vers de grandes priorités politiques démocratiquement établies et évaluées régulièrement.
Cela nécessite l'abandon d'une politique monétariste au profit d'objectifs de développements ambitieux. Cela nécessite de mettre l'euro au service de cette perspective.
Le budget européen, dressé par le Président de la République et ses amis européens, qui masque la nécessité de changer les bases de la construction européenne, doit également tendre vers le retour au plein emploi en Europe.
Pourquoi ne pas envisager, dans ce cadre, la planification de grands travaux ? Je pense essentiellement au fret ferroviaire, pour lequel les politiques libérales menées à l'échelle européenne, mais aussi au niveau national, n'ont pas permis la mise en place d'un réseau transeuropéen des transports de qualité, respectueux de l'environnement et garant de la sécurité.
M. Josselin de Rohan. Ce n'est pas gentil pour Gayssot !
M. Alain Gournac. En effet !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Occupez-vous de vos propres lacunes !
M. Robert Bret. En outre, monsieur le Premier ministre, l'Europe doit assumer pleinement son rôle sur la scène internationale. Elle doit user de son poids pour faire émerger d'autres règles dans les relations internationales, en s'engageant notamment pour le désarmement nucléaire, pour exclure explicitement tout recours à la guerre comme moyen de régler les conflits mondiaux, pour faire prévaloir la force de la politique sur la politique de la force et pour une régulation équitable des échanges.
Mes chers collègues, le résultat du référendum a tracé les contours de ce nouveau projet, c'est-à-dire les contours de cette Europe sociale et démocratique.
Pour notre part, nous assumerons notre fonction de représentant de la souveraineté populaire, pour veiller au respect, par l'exécutif, de la parole sacrée du peuple souverain. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, le peuple s'est prononcé.
Le 29 mai dernier, à vingt-deux heures, le rideau du temple européen s'est déchiré.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Ensuite, vient la résurrection !
M. Aymeri de Montesquiou. Aux yeux d'une Europe interloquée, des Français exaltés par le triomphe du « non » et des Français atterrés par la défaite du « oui » ont-ils tourné la page toute neuve, mais déjà longue, de la construction européenne ? Ce fut un choix existentiel.
Tel Sisyphe, les tenants du « oui » ont vu l'Europe redescendre la pente, alors même que, petit à petit, elle se hissait vers les sommets en devenant une puissance politique à l'échelle mondiale.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vers les sommets de 20 millions de chômeurs ! Nous n'avons pas la même conception des sommets !
M. Aymeri de Montesquiou. Les tenants du « non », dans leur hétérogénéité, partageaient le même enthousiasme de leur refus triomphant d'une constitution européenne, mais manifestaient aussi soit le rejet d'une Europe dans laquelle ils ne reconnaissaient pas la France des siècles passés, soit le rejet d'un système économique qui avait pourtant partout démontré sa supériorité sur le collectivisme.
La tentation est grande de comparer cet enthousiasme du « non » à certaines heures de notre histoire où le sentiment et le verdict populaires ont préféré la facilité et n'ont pas été au rendez-vous du courage.
Mme Hélène Luc. Vous n'avez pas le droit de dire cela !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est une honte !
Mme Hélène Luc. Si vous croyez que vous allez gagner l'opinion ainsi, vous vous trompez !
M. Robert Bret. Vous comparer avec 1789 ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Oui, la nuit du 4 août !
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Il n'a pas donné de date !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie, la parole est à M. de Montesquiou et à lui seul !
M. Aymeri de Montesquiou. Un changement est indispensable pour changer d'attitude et préparer les années à venir. Cet échec du « oui », tous les partis de gouvernement en partagent la responsabilité. En effet, il n'y a pas un ministre qui ne soit revenu d'un Conseil européen sans s'attribuer les mérites d'une décision européenne facile à accepter par nos concitoyens ou sans rejeter sur l'Europe la faute d'une potion amère.
M. Michel Charasse. Ce n'est pas vrai !
M. Aymeri de Montesquiou. Nous, les parlementaires, nous avons le plus souvent relayé de telles attitudes dans nos départements. Comment l'Europe, dans ces conditions, ne serait-elle pas apparue comme contraire à l'intérêt propre des Français ?
Mme Hélène Luc. En tout cas, vous ne les avez pas convaincus !
M. Denis Badré. On pourrait sans doute aussi s'interroger sur le peu de cas fait à nos parlementaires européens par nos partis politiques et sur leur absence organisée lors du débat institutionnel.
Pour ce qui est de la construction européenne, comment avons-nous pu refuser l'évidence ? Nous savions tous que des structures mises en place pour six pays fonctionnaient de moins en moins bien au fur et à mesure des élargissements. La nécessité de l'approfondissement apparaissait à tous, mais nous préférions la fuite en avant. Comment avons-nous pu imaginer que les Français ne prendraient pas conscience de ce que l'Europe fonctionnait de plus en plus mal et qu'elle apparaissait comme de moins en moins attirante ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Quel aveu !
M. Aymeri de Montesquiou. J'ajoute que nous n'avons pas fait preuve de sens stratégique en ne ciblant pas dans l'organisation européenne des postes qui nous auraient permis d'influer fortement sur les décisions.
M. Jacques Pelletier. Très bien !
M. Aymeri de Montesquiou. Enfin, on peut s'interroger sur le mode de scrutin choisi. Lors de son élection, le chef de l'Etat avait été approuvé sur ses choix européens.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah bon ?
M. Aymeri de Montesquiou. Le risque était-il permis, pour une décision aussi importante, et alors que chacun avait conscience que l'affectif domine le rationnel quand un tel choix se présente ?
Mme Eliane Assassi. Cessez de prendre les gens pour des idiots !
M. Robert Bret. Quel mépris !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et les Pays-Bas ?
M. Aymeri de Montesquiou. Ce constat étant fait, nous ne pouvons rester inertes. Quels doivent être nos axes d'action ?
Après des condoléances - étaient-elles sincères ? - de tous les pays de l'Union européenne, la perte de l'autorité morale indéniable de la France dans l'Union européenne va libérer les tenants d'une politique tournée vers la prééminence économique, aux dépens d'une recherche d'équilibre entre efficacité et solidarité.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et que fait-on aujourd'hui ?
M. Aymeri de Montesquiou. Désormais, l'Europe pourrait, hélas ! se défaire. Le président de la Commission, M. Barroso, suggère une pause dans la poursuite des consultations nationales. Ce serait faire preuve d'un singulier manque de considération pour les pays qui se sont déjà prononcés - leurs choix ne peuvent être passés en pertes et profits - et pour ceux qui doivent encore se prononcer. Les pays de l'Union sont des démocraties, elles forment un espace démocratique et chacun a droit à la parole.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Beaucoup n'ont pas eu droit à la parole !
M. Aymeri de Montesquiou. Le futur président du Conseil européen, le Premier ministre britannique, entend bien remettre à plat le budget de l'Union. L'exécutif français qui, dans sa politique européenne, ne peut plus s'appuyer sur son opinion publique, trouvera-t-il chez nos partenaires suffisamment d'alliés pour s'y opposer ? Le signal donné par le vote français va certainement déliter la solidarité européenne. Il existe un risque réel qu'à cette solidarité ne se substitue le « chacun pour soi ». Que pèsera notre défense d'un budget agricole qui tient encore une place majeure face à la diversité et à la multiplicité des intérêts nationaux ?
L'Europe politique a subi un coup d'arrêt très sévère. Comment relancer sa marche en avant ?
Les étapes majeures de la construction européenne, la Communauté européenne du charbon et de l'acier, le marché unique, l'euro, ont entraîné des avancées politiques décisives. Renouons avec ce processus ! La Communauté européenne, pour naître et se construire, s'est appuyée sur des menaces, celle d'une troisième guerre mondiale, puis celle du danger soviétique ; aujourd'hui ce doit être la mondialisation. Donnons une place à l'Union européenne, non pas en la noyant dans la mondialisation, mais face à la mondialisation.
Pour créer un nouvel état d'esprit, nous devons défendre, même si c'est un jeu à somme nulle, une politique de préférence communautaire. Ce serait un véritable ciment pour l'Union européenne. Pourquoi l'Union serait-elle le seul espace mondial ouvert à tous les vents ?
Martelons que, face à l'hégémonie américaine, la montée en puissance chinoise et l'irruption de l'Inde, l'Union européenne doit présenter un front uni, c'est-à-dire devenir une puissance politique.
Le budget, symbole du choix politique de toute collectivité, peut être l'outil qui démontrera que tous les pays de l'Union partagent cette conviction et la réalité de ces enjeux.
Monsieur le Premier ministre, malgré nos contraintes budgétaires lourdes, un geste politique fort doit être fait en direction de l'Union européenne, afin de montrer que notre volonté européenne est intacte. Une augmentation, même légère, du budget apparaît aujourd'hui comme une affirmation nécessaire. Des économies dans notre budget national peuvent être trouvées. Cela permettrait aussi de modérer les frustrations de ceux qui seront exclus des fonds structurels et de concrétiser la stratégie de Lisbonne, en donnant toute sa place à la recherche. Cela démontrerait que nous voulons détenir la clé de notre futur.
Nous devons ainsi convaincre les citoyens de l'Union européenne que l'Europe a un avenir et que leur propre avenir est indissociable de cette Europe politique pour laquelle nous nous sommes battus. Faisons tous preuve d'écoute, d'imagination et, surtout, de courage. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur quelques travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, à cette même tribune, la semaine dernière, Jean-Pierre Bel demandait, au nom du groupe socialiste, qu'un débat soit organisé au Parlement avant le Conseil européen qui commence demain à Bruxelles.
Il nous semblait, en effet, inconcevable que la représentation nationale ne soit pas informée, avant ce rendez-vous décisif, des positions que la France va y défendre.
Monsieur le Premier ministre, nous enregistrons avec satisfaction votre initiative, qui constitue un progrès dans les rapports entre le Gouvernement et le Sénat. Sans vouloir diminuer vos mérites, il faut reconnaître qu'il était difficile de faire moins bien que votre prédécesseur. Tant sur l'adhésion de la Turquie que sur le projet de directive sur les services, le Gouvernement n'avait concédé au Sénat qu'un débat a posteriori, une fois intervenues les décisions du Conseil européen, ce qui limitait, c'est peu de le dire, son intérêt et réduisait à néant son éventuelle influence.
Je forme le voeu que notre séance ne revête pas un caractère exceptionnel dû à la gravité de la crise institutionnelle européenne et que chaque Conseil européen soit désormais systématiquement précédé d'un débat où le Gouvernement pourra, à la fois, présenter les positions européennes de la France et écouter les représentants de la nation.
M. Didier Boulaud. Très bien !
M. Bernard Frimat. Le Conseil européen de juin 2005 est confronté à un double défi. La volonté de la présidence luxembourgeoise d'aboutir à un accord sur les perspectives financières se heurte à des divergences considérables entre les positions réaffirmées par différents Etats membres. Le risque d'une grave crise financière guette toujours l'Union européenne. De plus, ce Conseil se déroule dans un contexte de crise institutionnelle et politique, après le double refus français et néerlandais du traité constitutionnel.
Quel budget pour l'Europe ? Quel devenir pour la construction européenne ? Ce sont les deux questions auxquelles il vous appartient de répondre.
Tout d'abord, quel budget pour l'Europe ? La position exprimée par le Président de la République et le Gouvernement nous semble marquée par la contradiction. D'un côté, l'on proclame une grande ambition pour l'Europe, alors que, dans le même temps, on lui refuse les moyens de l'assumer.
En décembre 2003, la France faisait partie, avec la Grande-Bretagne et l'Allemagne, du groupe des six pays signataires demandant la stabilisation du budget de l'Union européenne à 1 % du revenu national brut de l'Union européenne. Cette position, si elle est maintenue, aura dès 2007 des conséquences néfastes sur le niveau de la politique de cohésion économique et sociale. Avec un budget européen limité à 1% du revenu national brut, il est en effet impossible - personne ne le conteste - de réussir l'initiative en faveur de la croissance et de l'emploi, notamment d'augmenter les dépenses de recherche, de permettre le développement économique et social des dix nouveaux pays entrants d'Europe centrale et orientale et de maintenir la politique agricole commune au niveau atteint en 2006.
Mécaniquement, dans cette hypothèse, la seule variable d'ajustement sera le montant consacré aux fonds structurels. Maintenir le niveau du budget à 1 %, c'est programmer de manière inévitable la disparition des crédits du Fonds social européen et du FEDER, le Fonds européen de développement régional, dans de nombreuses régions de notre pays, notamment celles qui sont le plus en difficulté.
Or ces crédits européens sont indispensables sur notre territoire pour assurer le bouclage des plans de financement de nombreux investissements, et ce d'autant que la raréfaction des financements de l'Etat se confirme chaque jour davantage.
Ajoutez à cela la crainte vraisemblablement fondée que l'Etat ne préempte de manière significative les crédits européens qui subsisteraient pour financer ses propres politiques et vous aurez ainsi créé les conditions de la régression des investissements publics des collectivités territoriales et d'un rejet encore plus fort de l'Union européenne. (Très bien! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Si vous voulez réellement une Europe ambitieuse qui mette en oeuvre des stratégies d'avenir porteuses d'emplois, vous ne pouvez bloquer le budget de l'Union européenne.
Or même les dernières propositions de la présidence luxembourgeoise qui sont, au demeurant, bien en deçà de celles de la Commission et du Parlement européen, apparaissent, si j'en crois les déclaration du ministre des affaires européennes, encore trop coûteuses.
Il n'est pas cohérent d'attendre plus du budget européen et de refuser dans le même temps d'assumer sa part de financement.
La théorie du « juste retour », qui préconise que chaque Etat doit récupérer de l'Union européenne autant qu'il lui apporte, est la négation même d'une ambition commune puisqu'elle implique une hiérarchie des obligations où l'impératif national l'emportera toujours sur l'exigence européenne. Ce n'est pas notre conception de l'Europe !
Cette dernière n'est pas réductible à une étroite vision comptable. L'Europe est vouée à l'échec si elle n'a pour ambition que la somme des égoïsmes nationaux. Il revient à la France de ne pas ajouter une crise financière à la crise existante.
Au demeurant, avoir pour l'Europe une ambition forte qui oriente ses moyens financiers vers les dépenses construisant l'avenir ne signifie pas pour autant une augmentation systématique du budget sans remise en cause de certaines situations.
Le financement du budget européen doit obéir à des principes de justice qui entraînent pour chaque Etat membre une participation équitable compte tenu de sa richesse réelle.
A ce titre, la remise en cause du chèque britannique nous apparaît comme nécessaire. Justifié il y a vingt ans, il s'apparente aujourd'hui à une rente dans la mesure où les raisons qui ont conduit à sa création ont aujourd'hui en grande partie disparu.
Nous souhaitons que le prochain Conseil européen trouve les compromis nécessaires à un accord qui garantirait à l'Union européenne des perspectives financières assurant les moyens d'une politique qui ne sacrifie pas l'avenir aux médiocrités du présent.
Le Conseil européen, au-delà des questions budgétaires, est aussi confronté, nous le savons, après les refus français et néerlandais, à la question de son devenir.
En effet, quel devenir pour l'Europe ? Cette dernière a besoin d'une nouvelle dynamique, elle a besoin de retrouver la confiance des citoyens, de redevenir une espérance. Comment y parvenir ?
En démocratie, le peuple est souverain. Il faut l'entendre et essayer de comprendre son message, même quand celui-ci réunit dans une unique réponse des opinions opposées.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est le propre du référendum !
M. Bernard Frimat. La France n'est sans doute pas la mieux placée aujourd'hui pour imposer ses vues à ses partenaires, pour autant elle ne peut rester spectatrice.
Il revient au Président de la République et au Gouvernement de contribuer à dénouer une crise dont ils sont en grande partie responsables.
M. Josselin de Rohan. Et Fabius ?
M. Bernard Frimat. « La construction européenne est fragile », disait Jacques Delors.
M. Josselin de Rohan. Plan B !
M. Bernard Frimat. Les faits lui donnent, hélas, raison. L'on est impressionné par la vitesse à laquelle des acquis que l'on croyait définitifs sont l'objet de tentatives de remise en cause.
La paralysie décisionnelle guette l'Union européenne puisque toutes les raisons qui justifiaient la modification du traité de Nice demeurent.
Je pense qu'il est nécessaire de recréer un climat de confiance en Europe, et cela commence sans doute par le respect de la souveraineté de nos partenaires. Le peuple français est souverain, mais sa souveraineté s'arrête là où commence celle des peuples des autres Etats partenaires.
M. Michel Charasse. Et inversement !
M. Bernard Frimat. Au nom de quel principe la France imposerait-elle sa position ?
Dans cette construction originale qu'est l'Union européenne, il appartient à chaque Etat membre, dans sa souveraineté d'Etat libre, de fixer sa position par rapport au traité constitutionnel. Le « non » français n'est ni inférieur ni supérieur au « oui » espagnol ; ils sont tous les deux l'expression démocratique d'un peuple souverain. Ce droit dont les citoyens français ont usé, il m'apparaît impossible de le refuser à un Etat qui souhaiterait l'exercer.
M. Yannick Bodin. Très bien !
M. Bernard Frimat. Une fois cette étape accomplie dans le respect mutuel et parce que même les peuples qui ont dit non restent majoritairement favorables à un destin européen commun, il importera de trouver, en liaison avec le Parlement européen et les parlements nationaux, les moyens de retrouver un projet commun qui entraîne l'adhésion des citoyens européens et lève les blocages institutionnels.
Cette voie sera forcément longue et difficile. Dans l'immédiat, il appartient au Conseil européen de donner une perspective, de développer des initiatives concrètes qui restaurent la confiance. Le sort fait aux projets de directive sur les services et sur le temps de travail constitue, sans aucun doute, un excellent moyen de prouver aux citoyens européens que les gouvernements les écoutent et les entendent.
La mise en oeuvre de projets qui répondent aux préoccupations quotidiennes est une urgence pour donner une nouvelle crédibilité à l'utopie européenne. Cela exige des moyens incompatibles avec votre volonté de contraindre le budget européen. Votre discours a continué à cultiver ce paradoxe, affirmer de hautes ambitions pour l'Europe tout en refusant de lui en donner les moyens.
Les chefs d'Etat et de Gouvernement qui se réunissent demain sont coresponsables du devenir de l'Union européenne. Il leur appartient d'éviter que ce Conseil ne se réduise à la confirmation d'un échec annoncé.
François Mitterrand faisait de l'Europe l'avenir de la France. Au moment où la construction européenne est fragilisée, il est plus que jamais nécessaire de donner au peuple français et aux peuples européens des raisons d'espérer. Serez-vous à la hauteur de cet enjeu ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau.
M. Bruno Retailleau. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame, messieurs les ministres, je crois, comme l'un des intervenants précédents, que l'affaire du chèque britannique n'est rien à côté de la question de la ratification.
Dès demain, le Président de la République devra défendre la position de la France au Conseil européen. Il ne pourra le faire efficacement que s'il porte fidèlement et loyalement le message des Français.
M. Yannick Bodin. Lequel ?
M. Bruno Retailleau. Peut-on en effet faire comme si rien ne s'était passé ? Et pourtant, en France, on a parfois le sentiment que l'on refuse ou que l'on rechigne à tirer les leçons du référendum. Le peuple se serait trompé ou aurait été abusé. Et le scrutin du 29 mai serait une simple péripétie électorale ou encore un simple vote de protestation sans lendemain.
Une chose est certaine : vous ne pouvez pas, monsieur le Premier ministre, aborder le Conseil européen de demain et d'après-demain sans donner un sens, une signification au vote massif des Français. C'est d'ailleurs ce qu'a fait votre homologue néerlandais. Le résultat du référendum, mes chers collègues, n'appartient à personne, et quelles qu'aient été nos positions personnelles, il faut désormais le respecter. Pour cela, il faut accepter de changer de cadre, mais aussi de projet.
Un changement de cadre s'impose parce que les Français ont répondu à une question, et à une seule : oui ou non au traité constitutionnel ?
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Ce n'est pas sûr !
M. Bruno Retailleau. Cela signifie que, après deux votes négatifs et massifs, la Constitution n'a tout simplement plus de sens. Il va falloir en faire le deuil. Sinon, nous serons incapables d'inventer autre chose. Cela ne crée pas pour autant de vide juridique puisque la nouvelle Constitution était censée entrer en vigueur dès le mois de novembre 2009. Donc, nous avons le temps.
Cela signifie aussi que l'on ne peut pas « picorer » telle ou telle partie du traité constitutionnel. Juridiquement, le texte est un tout. De nombreux articles de la première partie renvoient, explicitement ou implicitement, à de nombreux articles de la troisième partie. D'un point de vue démocratique, il y aurait un paradoxe à retenir, par exemple, la première partie, qui est la plus neuve, et d'abandonner la troisième partie, qui représente, à 90 % ou 95 %, l'essentiel de l'acquis communautaire.
Voilà donc pourquoi il faut d'abord changer de cadre. Mais il nous faut aussi changer de projet, ce qui signifie proposer un pacte refondateur avec une ligne directrice : passer de l'Europe du rêve ou du mythe à l'Europe des projets et du concret. Ce pacte refondateur doit répondre explicitement aux trois préoccupations qu'ont exprimées les Français le 29 mai en proposant trois ruptures.
Première rupture : une Europe des démocraties nationales et des coopérations entre les Etats plutôt que l'intégration sans fin des peuples dans une purée de marrons !
Les Français - ils l'ont demandé - souhaitent retrouver la maîtrise de leur destin : ils ne sont pas prêts à abandonner leur démocratie nationale pour une démocratie européenne qui n'existera pas tant qu'il n'existera pas un seul peuple européen. Pour que la démocratie existe, il faut que le sentiment d'appartenance soit fort pour que la loi de la majorité soit acceptée par la minorité.
M. Valéry Giscard d'Estaing stigmatisait hier l'absence d'expérience fédérale des Français et la leur reprochait. Oui, les Français ont reproché le cadre fédéral que leur proposait la première partie avec cette révolution juridique majeure contenue dans l'article I-6 : la primauté du droit européen par rapport au droit français national, y compris constitutionnel. (Protestations sur certaines travées de l'UMP et du groupe socialiste.)
M. Michel Charasse. C'est la jurisprudence de la Cour !
M. Bruno Retailleau. L'Europe réaliste, mes chers collègues, c'est l'Europe des projets à géométrie variable, comme vous l'avez reconnu, monsieur le ministre des affaires étrangères, sans la nommer, dans une récente entrevue.
Deuxième rupture : une Europe qui nous protège et qui défende bec et ongles nos intérêts, comme le font si bien nos partenaires adversaires, américains ou concurrents.
Depuis les accords de Marrakech, nous avons fait du désarmement commercial unilatéral une sorte d'horizon indépassable, et nous n'avons de cesse que de devenir les bons élèves de l'OMC, quitte à affaiblir de plus en plus les barrières douanières. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
M. Alain Gournac. En voilà de l'analyse !
M. Jean Bizet. Tout cela est faux !
M. Alain Gournac. Archi-faux !
M. Bruno Retailleau. Par ailleurs, nous avons donné à la Banque centrale européenne un objectif divergent de celui de nos gouvernements - la stabilité des prix - au moment même où le monde économique changeait profondément et où la concurrence des pays émergents rendait nul le risque de l'inflation.
Il nous faut faire deux réformes économiques urgentes : rétablir la préférence communautaire, ce qui permettra d'améliorer le budget ; donner la priorité à la stabilité monétaire, mais aussi à la croissance et à l'emploi.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Bruno Retailleau. La troisième rupture, c'est une Europe vraiment européenne, sans la Turquie...
M. Yannick Bodin. C'est du réchauffé, tout cela !
M. Bruno Retailleau. ...et délimitée dans son espace géographique. (Protestations sur certaines travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mettez-vous tous d'accord sur la Turquie !
M. Jean-Pierre Plancade. La voilà, la préférence nationale !
M. Bruno Retailleau. Non, mon cher collègue, c'est la préférence européenne que nous demandons.
M. le président. Veuillez terminer, je vous prie !
M. Bruno Retailleau. Monsieur le Premier ministre, il faudra faire un choix. Je vous invite à entendre les Français pour leur proposer une autre direction pour une nouvelle Europe, plus conforme à leurs aspirations. (M. Philippe Darniche applaudit.)
M. Paul Girod. Vive la Vendée !
M. le président. La parole est à M. André Dulait. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. André Dulait. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, n'ayons pas peur des faits : les 16 et 17 juin prochains, c'est-à-dire dès demain, une grande partie de l'avenir de l'Union européenne va se jouer lors du Conseil européen de Bruxelles. Ebranlée par le rejet de la Constitution européenne lors des référendums organisés en France et aux Pays-Bas, affaiblie par de lourds désaccords et divergences sur le financement des politiques de l'Union, l'Europe traverse une passe à haut risque. Une fois encore, elle a un rendez-vous avec l'Histoire qu'il s'agit de ne pas manquer.
Le 29 mai dernier, une majorité de Français n'a pas souhaité que la France ratifie le traité établissant une Constitution pour l'Europe. Ce choix s'impose aujourd'hui à tous,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est vrai !
M. André Dulait. ... sans polémique ni contestation, et il nous impose, aujourd'hui, d'essayer d'en tirer les conséquences concrètes et positives pour la suite de la construction européenne.
Les citoyens français n'ont pas souhaité confirmer l'accord donné par les chefs d'Etat et de gouvernement des vingt-cinq pays membres, accord succédant à l'unanimité inattendue des membres de la Convention sur le projet de Constitution. En effet, un texte aussi novateur, établissant un pouvoir politique nouveau, contenant de réelles avancées institutionnelles, devait être soumis à la ratification référendaire. Ce fut l'honneur et la vitalité de notre démocratie, sur l'initiative du Président Chirac.
C'était aussi accepter un risque considérable, quand on sait d'expérience combien en France le référendum est vulnérable en ce que l'on peut facilement le détourner en plébiscite.
Sur la lancée du « non » français, trois jours plus tard, les Pays-Bas, animés d'un réel sentiment anticommunautaire, confirmaient par leur vote le sombre avenir de la Constitution européenne.
Dans ce contexte, très difficile et historiquement inédit pour la France et pour l'Europe, va se tenir le Conseil européen, les 16 et 17 juin. On doit aborder à cette occasion des questions majeures, l'avenir de la Constitution, les perspectives financières, l'élargissement de l'Union, la stratégie des réformes économiques, le développement durable, la justice et les affaires intérieures - notamment le terrorisme - et les relations extérieures.
A l'heure actuelle, la réussite de ce Conseil relève donc de la gageure, tant les positions des uns et des autres, malgré les efforts considérables de la présidence luxembourgeoise, sont divergentes.
Force est de constater que l'hypothèse du surplace et du blocage, envisagée au lendemain du 29 mai, s'avère déjà en deçà de la réalité. Le risque d'un véritable et prodigieux retour en arrière n'est plus à exclure. Chaque jour qui passe défait un peu plus l'oeuvre européenne commune. Il faut absolument éviter un commencement de « détricotage » des acquis. Nous assistons à une sorte de revanche des égoïsmes nationaux, stimulés par les difficultés économiques et sociales, oublieux de l'intérêt général européen, qui nous a tant apporté depuis cinquante ans.
Aujourd'hui, il semble que les Etats membres consacrent plus d'énergie à leur positionnement tactique à court terme qu'aux enjeux à long terme de la réunion. La survie du nouveau traité et l'accord sur le budget à moyen terme de l'Union sont des sujets centraux qui méritent pourtant une réflexion sérieuse.
A ce propos, j'ajoute que les spéculations récentes sur l'existence de l'euro me paraissent non seulement fantaisistes et irréalisables, mais susceptibles de semer un trouble préjudiciable tant dans l'esprit de tous les dirigeants que dans les opinions européennes.
En ce printemps 2005, l'un des partisans ambigus du traité, le Royaume-Uni, en quête d'une échappatoire au dilemme qu'il s'est posé à lui-même en proposant d'organiser un référendum national, s'attache à blâmer la France et les Pays-Bas de la situation où l'ont plongé les deux votes négatifs.
De tous côtés retentit l'affirmation que, si l'adversaire ne cède pas de terrain, il emmène toute l'équipe à la catastrophe. Quel que soit le sort du traité, personne ne conteste la pertinence des questions qu'il tente de résoudre : mieux outiller l'Union européenne pour qu'elle puisse continuer de répondre à ses aspirations internes et externes, et se relier à la vie de ses citoyens. A cet égard, le Conseil doit se concentrer sur la manière d'atteindre ces objectifs, sous peine d'offrir au monde une image dramatique consternante.
A l'heure actuelle, les priorités indispensables résident, me semble-t-il, dans l'adoption des perspectives financières pour la période 2007-2013, signal essentiel de la volonté de l'Union européenne de poursuivre son chemin en se donnant les moyens pour réaliser des programmes ambitieux à moyen terme, s'agissant, en particulier, de l'amélioration des programmes de recherche-développement, essentiels pour la compétitivité de l'Europe de demain.
Le revirement le plus important, parce que concret et perceptible pour l'opinion publique, est en effet celui qui est relatif aux perspectives financières. Or, sur ce point, le couple franco-allemand, moteur indispensable, semble prêt à un compromis constructif.
Ce compromis présuppose un certain rééquilibrage des contributions nettes des Etats membres : le gel, d'abord, et la réduction, ensuite du « chèque britannique », la diminution progressive des financements en faveur des principaux bénéficiaires actuels de la politique de cohésion et la réduction des dotations proposées par la Commission européenne dans plusieurs domaines.
Ce compromis reste inacceptable pour certaines délégations, dont avant tout le Royaume-Uni, qui s'oppose à la remise en cause de la ristourne budgétaire qui lui est accordée depuis 1984, à moins, éventuellement, de remettre à plat la PAC.
Nous sommes nombreux ici à estimer qu'il ne doit pas y avoir de remise en cause de l'accord sur la PAC dont le financement est sanctuarisé jusqu'en 2013. Nul n'ignore, au sein de la Haute Assemblée, combien la PAC, depuis des décennies, a assuré la modernisation de notre agriculture, la stabilisation sociale de la France rurale et l'aménagement du territoire, et ce malgré les pesanteurs bureaucratiques.
Mes collègues sénateurs du groupe UMP n'accepteraient pas que les entreprises agricoles soient fragilisées, voire mises à mal par des pratiques contraires au traité de Rome.
L'Italie a menacé d'user de son droit de veto pour bloquer la négociation, craignant de perdre des milliards d'euros pour ses régions du sud. La Suède et l'Espagne demandent également une réduction du « chèque britannique », ce qui, au passage, montre que la position de la France sur ce point n'est pas aussi isolée qu'on a bien voulu le dire.
Monsieur le Premier ministre, aujourd'hui, le blocage semble acquis et l'impasse certaine. Dès lors, comment éviter d'ajouter à la crise institutionnelle une crise financière, qui serait dramatique pour l'avenir du continent?
Nous attendons sur ce point, monsieur le Premier ministre, des signes d'une avancée qui pourraient nous faire espérer et croire que l'Union européenne saura retrouver, dans un avenir proche, la voie constructive qui fut la sienne depuis près de cinquante ans.
L'unification européenne n'apparaît plus comme le projet mobilisateur qui nous a donné pendant des décennies paix et prospérité avant de déboucher sur l'unification de notre continent. Or certains n'hésitent pas à se demander si l'espoir n'a pas changé de camp.
Dans ce contexte, un accord sur les perspectives financières prendrait une dimension toute particulière et son adoption dès maintenant donnerait à l'Europe l'impulsion politique dont elle a besoin.
A notre avis, le Conseil européen doit se donner les capacités d'émettre un message clair et convergent sur le processus de ratification de la Constitution européenne et sur un cadre financier stable pour l'avenir. Il est absolument nécessaire de faire émerger un nouveau consensus politique pour relancer l'Europe. Les Etats membres doivent réagir ensemble et éviter les réactions individuelles et dispersées.
Le Conseil doit rejeter deux solutions : d'une part, celle qui consiste à faire comme si rien ne s'était passé, et qui représenterait une attitude irresponsable et arrogante à l'égard du « non » tant néerlandais que français, et, d'autre part, celle qui consiste à abandonner le processus, ignorant en cela les dix Etats qui ont déjà ratifié et ceux qui ne se sont pas encore prononcés. Il faut donc chercher une autre solution, qui ne soit ni administrative, ni technocratique, ni bureaucratique, mais politique, purement politique.
Il reste le dialogue et le langage de la vérité qui devraient permettre d'approfondir le diagnostic sur la situation actuelle en évitant de faire de Bruxelles le bouc émissaire de toutes les difficultés.
En conclusion, il m'apparaît que le bon sens devrait nous imposer à l'avenir de subordonner tout élargissement à une véritable stabilisation institutionnelle.
A cet égard, la position de notre groupe concernant le refus de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne est pour moi l'occasion de souligner que nous pourrions créer un espace de partenariat et de voisinage développé qui permettrait à la Turquie et à d'autres pays méditerranéens, aux côtés de l'Union Européenne, de bénéficier des progrès de celle-ci.
C'est donc, au travers de mes propos, monsieur le Premier ministre, l'ensemble des sénateurs de mon groupe qui vous apporte son soutien dans ces heures difficiles. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. -M. Claude Biwer applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à vous remercier de vos propos. A travers eux, vous témoignez de votre attachement à l'Europe, et j'ai tenu à être personnellement présent pour écouter vos interventions de grande qualité et utiles à la réflexion de tous.
Si vous avez, certes, souligné la difficulté des circonstances actuelles, vous avez également insisté sur la nécessité pour la France et pour l'Europe de se tourner désormais vers l'avenir. Notre rêve d'une Europe forte et respectée reste bien vivant : il est plus nécessaire que jamais ; il est plus attendu que jamais.
Notre premier devoir aujourd'hui est de répondre à l'inquiétude de nos concitoyens, qui restent tous, j'en suis convaincu, profondément attachés à la construction européenne. Ils souhaitent que la France continue de jouer tout son rôle dans le projet européen. Ils savent qu'à l'heure de la mondialisation, alors que de nouveaux ensembles géopolitiques s'affirment, la France a plus que jamais besoin de l'Europe. En nous rassemblant aujourd'hui, à la veille du Conseil européen, nous leur avons apporté une première réponse.
Nous devons aussi rassurer nos partenaires européens, qui comptent sur la France et sur son engagement au sein de l'Union européenne. A cet égard, je veux leur dire une nouvelle fois que la France tiendra tous ses engagements.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Très bien !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. J'ai d'ailleurs demandé à tous les ministres de poursuivre et de renforcer, chacun dans leur domaine, la coopération avec les pays membres de l'Union.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Très bien !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Vous avez raison de souligner, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, que le Conseil européen qui se tiendra à Bruxelles en fin de semaine engage l'avenir de l'Union européenne. Il pose, en premier lieu, la question de la suite à donner au processus de ratification, après le « non » de deux pays fondateurs, la France et les Pays-Bas.
La position de la France est claire : il appartient à chaque pays de s'approprier le débat, de s'exprimer et de se prononcer. Tel sera le meilleur point de départ pour une Europe plus à l'écoute des peuples.
Beaucoup d'entre vous s'interrogent sur les discussions budgétaires qui auront lieu à Bruxelles. Plus que jamais, l'Europe doit montrer qu'elle sait répondre aux attentes, résoudre les problèmes et trouver un terrain d'entente. Comme l'a dit le président de l'Union, Jean-Claude Juncker, chacun devra faire un effort.
Cela dit, je tiens à rappeler, pour que chacun soit bien conscient de ce que cela engage, les montants qui sont en jeu : passer d'un budget représentant 1 % à 1,06 % du revenu national brut, ce n'est pas une augmentation minime. Cela constituerait pour la France un coût supplémentaire de 1,5 milliard d'euros par an pour la période 2007-2013, soit un coût total supplémentaire de 10 milliards d'euros par rapport à 2006. Vous le voyez, monsieur Frimat, il ne s'agit pas d'une somme négligeable ! (Mme Nicole Bricq s'exclame.)
Dans une période de contrainte budgétaire, nous ne pouvons pas nous engager à la légère sur des chiffres aussi importants.
Dans ces négociations, la France défendra les engagements qui ont été pris, notamment, la politique agricole commune.
Il n'est pas question de revenir sur un accord qui fut difficile à trouver et qui est aujourd'hui acceptable par tous. (Très bien ! sur les travées de l'UMP.) Les accords de Bruxelles de 2002 ont fixé jusqu'à 2013 le montant des dépenses agricoles de marché. Ce compromis doit être préservé.
La PAC est la politique la plus ancienne et la plus intégrée de l'Union européenne. Nous lui devons notre indépendance alimentaire et, aujourd'hui, la compétitivité de notre agriculture, l'une des premières au monde. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.- M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères, applaudit également.)
Vous avez raison de le souligner, monsieur Badré, nous n'avons pas besoin de « rustines » s'agissant de la PAC. Nous avons besoin d'ambition et de mouvement : cette politique n'est pas au bénéfice de la seule France, elle est au bénéfice de tous.
En revanche, nous pouvons nous interroger sur la légitimité du « chèque britannique », décidé, comme vous l'avez rappelé à juste titre, monsieur Dulait, dans des circonstances historiques et économiques très différentes.
Il est juste que chaque pays membre contribue à la solidarité financière avec les nouveaux pays membres. Il est juste que chacun porte sa part du fardeau. Il est juste que la richesse économique d'un pays soit exactement prise en compte dans le calcul de sa contribution.
Vous avez raison, monsieur Vinçon, d'insister sur la nécessité de tenir les deux objectifs de l'Union européenne dans l'utilisation du budget de l'Union, dont, en premier lieu, la cohésion et la solidarité. Il s'agit là de principes fondamentaux sur lesquels nous ne reviendrons pas. Mais il ne faut pas non plus oublier l'innovation, la recherche et les nouvelles technologies. Si nous voulons que l'Europe soit en mesure de défendre ses emplois et ses atouts économiques, si nous voulons qu'elle reste à la pointe du progrès technologique, si nous voulons qu'elle devienne un chef de file mondial dans le domaine des nanotechnologies et des biotechnologies, nous devons accentuer notre effort.
L'innovation ne se joue pas demain, mais aujourd'hui.
Comme vous, monsieur Haenel, ma conviction est que l'Europe a plus que jamais besoin d'avancer de manière pragmatique. A chaque crise politique, l'Europe a su trouver l'énergie nécessaire pour rebondir. Elle l'a fait sur la base de projets concrets qui pouvaient rassembler les peuples. Dans tous les domaines, la coopération européenne peut et doit aller plus loin.
Dans le domaine de l'éducation, il faut accélérer la reconnaissance mutuelle des diplômes, afin que les étudiants européens puissent profiter de toutes les opportunités.
Dans le domaine de la culture, de grands projets ont été lancés, comme la bibliothèque numérique européenne, qui nous permettront d'affirmer notre diversité et notre richesse.
Dans le domaine de la recherche, notamment dans le cadre de l'Agence européenne de défense, nous avons besoin d'une politique plus volontariste, afin d'atteindre dans les meilleurs délais les objectifs de Lisbonne.
La compétitivité de l'Europe en matière de haute technologie doit pouvoir s'appuyer sur de grands projets industriels dans lesquels la France a toute sa place, tels que ITER ou Galileo.
Dans le domaine des transports, enfin, l'Europe doit davantage encore valoriser ses atouts. Le rapprochement entre les peuples comme le dynamisme de notre économie dépendent des réseaux routiers ou ferroviaires, des canaux, des ports, des installations aéroportuaires que nous serons en mesure de construire.
Vous le voyez, monsieur Retailleau, contrairement à ce que vous prétendez, l'Europe du concret existe et nous allons la renforcer !
Il nous faut, pour ce faire, retrouver, comme l'a dit M. Dulait, le sens de l'intérêt général européen ; il nous faut donner une perspective claire aux Européens sur les grandes questions concernant l'avenir de l'Union.
Je pense d'abord ici à la question des institutions. Le projet de Constitution avait pour objectif de faciliter leur fonctionnement dans une Europe à vingt-cinq. Certes, nous pouvons nous appuyer sur les dispositions du traité de Nice, mais chacun voit bien qu'elles sont insuffisantes et qu'elles ne servent pas l'intérêt de notre pays. Il faudra donc, tôt au tard, engager une réflexion plus vaste si nous voulons que nos institutions gagnent en efficacité et en transparence. Je souhaite que la Haute Assemblée soit étroitement associée à cette réflexion.
Au-delà des institutions, nous devons nous interroger sur le contenu des politiques mises en oeuvre. Le message des Français est clair : ils ne veulent pas d'une Europe qui ne soit qu'un vaste marché de libre-échange.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. C'est vrai !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Ils veulent que soit mieux prise en compte leur aspiration à une Europe sociale, humaine, qui réponde à leurs préoccupations.
Le texte de la Constitution contenait des avancées indéniables à ce sujet, mais elles n'ont pas su convaincre nos concitoyens. A nous de trouver des réponses plus claires et plus efficaces, pour que l'Europe puisse défendre son modèle de société : une société qui mêle l'esprit d'initiative et l'exigence de solidarité, la volonté de conquête et le respect de chacun.
Les Françaises et les Français veulent que l'harmonisation sociale en Europe se fasse par le haut. Pour le faire, il faut, monsieur Bret, que nous occupions toute notre place dans l'Europe.
Je veux donc répondre à ceux qui, comme vous, monsieur Bret, s'interrogent sur la proposition de directive européenne sur les services.
Comme l'a demandé le Président de la République, cette directive a bien été remise à plat.
Le rapporteur de ce texte au Parlement européen a fait des propositions qui vont dans notre sens : sur la base des ces propositions, un débat aura lieu à l'automne prochain au Parlement européen.
La Commission devra ensuite soumettre des propositions au Conseil.
La France sera particulièrement exigeante sur cette directive. Elle le sera tout autant sur la directive relative au temps de travail : les régimes dérogatoires consentis à certains doivent disparaître.
Mais les citoyens européens attendent aussi que l'Europe s'affirme davantage sur le plan économique.
Monsieur le président de la délégation pour l'Union européenne, vous l'avez dit très justement, c'est la condition pour que l'Europe devienne un acteur mondial.
Nous avons mis en place un outil extraordinaire, l'euro, auquel les Français sont attachés. N'oublions pas que nous lui devons la stabilité monétaire et l'absence de dévaluation.
Nous avons besoin désormais d'une gouvernance économique plus forte et plus cohérente pour défendre notre économie et nos emplois.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Voilà !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Nous avons su le faire en parvenant à un accord avec les Chinois, pour limiter leurs exportations de textile. Nous devons savoir le faire pour défendre la préférence européenne, comme vous l'avez rappelé, monsieur de Montesquiou. Notre unité est notre meilleur atout.
La troisième préoccupation touche à l'élargissement.
Les Françaises et les Français ne contestent pas la légitimité historique de l'élargissement vers les pays de l'Est, mais ils souhaitent être davantage associés à des décisions qui engagent l'avenir de leur continent. Ils veulent en comprendre les raisons et les modalités. Ils veulent pouvoir veiller sur le respect des règles, qui valent pour tous, notamment dans le domaine des droits de l'homme.
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Très bien !
M. Dominique de Villepin, Premier ministre. Leur intérêt et leur vigilance sont respectables et compréhensibles. Nous devons mieux les prendre en compte dans les échéances à venir. Nous devons mieux écouter et mieux expliquer.
Mesdames, messieurs les sénateurs, dans ce travail de pédagogie, vous aurez tout votre rôle à jouer.
Les Françaises et les Français nous ont adressé un message : il sera entendu. Mais l'Europe ne peut avancer que dans l'unité : nous devons donc tout faire pour la préserver.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, l'Europe des Vingt-cinq est une chance pour la France : chacun doit pouvoir la saisir. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur quelques travées de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne. Très bien !
M. le président. Le débat est clos.
Acte est donné de la déclaration du Gouvernement qui sera imprimée et distribuée.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinquante, sous la présidence de M. Philippe Richert.)
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
5
Petites et moyennes entreprises
Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. Nous reprenons la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus aux amendements identiques nos 60 et 367 tendant à insérer un article additionnel après l'article 31.
Article additionnel après l'article 31
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 60 est présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 367 est présenté par M. Adnot.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 31, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l'article L. 442-6 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 8° De déduire d'office du montant de la facture établie par le fournisseur les pénalités ou rabais correspondant au non-respect d'une date de livraison ou à la non-conformité des marchandises, lorsque la dette n'est pas certaine, liquide et exigible, avant même que le fournisseur n'ait été en mesure de contrôler la réalité du grief correspondant.»
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 60.
M. Gérard Cornu, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. L'amendement n° 60 vise à permettre aux fournisseurs de disposer d'un moyen efficace pour s'opposer à une pratique trop fréquente des distributeurs, qui consiste à retenir sur les factures tout type de pénalité - retard de livraison, non-conformité des marchandises -, sans avoir obtenu au préalable l'accord des fournisseurs.
Cette pratique est inacceptable. Le caractère abusif en a été relevé par la Commission d'examen des pratiques commerciales.
Toutefois, force est de constater que les dispositions en vigueur sur la compensation, au regard aussi bien du code civil, dont les articles 1289 et suivants en établissent seulement le principe général, que des règles concernant les pratiques restrictives, sont insuffisantes pour sanctionner ce type de pratique.
C'est pourquoi il est proposé de viser expressément cette compensation au titre des pratiques restrictives encadrées par l'article L. 442-6 du code de commerce.
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour présenter l'amendement n° 367.
M. Philippe Adnot. Je fais miennes les explications de M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales. Le Gouvernement émet un avis favorable sur ces excellents amendements identiques présentés tant par M. le rapporteur que par M. Adnot.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 60 et 367.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 31.
Article additionnel après l'article 31 ou après l'article 32
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 111 rectifié, présenté par MM. Barraux, César, Mortemousque, Revet, Trillard, Houel, Texier, Murat et Vasselle, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le quatrième alinéa (c) du II de l'article L. 442-6 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « Est de même nulle, toute compensation effectuée en violation du 7° du I du présent article »
La parole est à M. Yannick Texier.
M. Yannick Texier. Cet amendement est similaire à l'amendement n° 60 présenté par M. le rapporteur. Je considère qu'il est défendu.
M. le président. L'amendement n° 368, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Après l'article 31, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le quatrième alinéa (c) du II de l'article L. 442-6 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « Est de même nulle, toute compensation effectuée en violation du 7° du I du présent article ».
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Nous savons tous que, dans ce domaine, les théories contradictoires sont nombreuses.
On s'amuse souvent de voir des distributeurs venir se plaindre des misères que leur font subir les grandes marques, en leur imposent de prendre la totalité de la gamme - un vrai scandale, en effet, puisque cela nuit à la liberté du commerce -alors que ces mêmes distributeurs, de temps à autre, imposent d'insupportables pratiques aux différents fournisseurs, les marges arrière, par exemple.
Il n'empêche que les accords de gamme peuvent très fortement contraindre les distributeurs et peuvent surtout empêcher un certain nombre de moyennes entreprises d'accéder au marché. Nous souhaitons donc réglementer ces pratiques.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Les amendements nos 111 rectifié et 368 étant satisfaits par l'amendement n° 60 de la commission, que le Sénat vient d'adopter, nous en demandons le retrait. S'ils n'étaient pas retirés, nous émettrions un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Texier, l'amendement n° 111 rectifié est-il maintenu ?
M. Yannick Texier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 111 rectifié est retiré.
Monsieur Adnot, l'amendement n° 368 est-il maintenu ?
M. Philippe Adnot. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 368 est retiré.
Article 32
I. - Le b du 2° du I de l'article L. 442-6 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le fait de subordonner, au titre d'un accord de gamme, l'exposition à la vente de plus d'un produit à l'octroi d'un avantage quelconque peut constituer un abus de puissance de vente ; »
II. - Le 5° du I de l'article L. 442-6 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque la rupture de la relation commerciale résulte d'une mise en concurrence par enchères à distance par voie électronique, le délai de préavis est au moins d'un an. »
III. - Le III de l'article L. 442-6 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « Dans tous les cas, il appartient au prestataire de services, producteur, commerçant, industriel ou artisan, qui se prétend libéré de justifier du fait qui a produit l'extinction de son obligation. »
M. le président. Je suis saisi de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 132 rectifié bis, présenté par MM. Mortemousque, Poniatowski, Braye, Carle et Hérisson, Mme Lamure, MM. Revet, Bertaud, Faure, Barraux, Leroy, Texier et Fouché, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Après l'article 2-21 du code de procédure pénale, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Les chambres consulaires et les organisations professionnelles concernées peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits constitutifs d'infractions aux prescriptions des titres I à IV du livre IV du code de commerce et portant un préjudice direct à l'un de leurs ressortissants. Les chambres consulaires peuvent exercer les mêmes droits en ce qui concerne les faits constitutifs de ces mêmes infractions et portant un préjudice direct ou indirect aux missions qui leur sont reconnues. »
La parole est à M. Yannick Texier.
M. Yannick Texier. Les pratiques prohibées par le code de commerce aux titres I à IV du livre IV sont essentiellement le fait de sociétés de tailles importantes et économiquement puissantes.
Aussi les victimes directes de ces infractions ne peuvent-elles pas poursuivre directement ces sociétés, pour ne pas courir le risque qu'il soit mis un terme à des relations commerciales essentielles à leur survie économique.
Conférer un doit d'ester en justice aux organes institutionnellement chargés de défendre les ressortissants victimes de ces pratiques permet d'assurer l'effectivité des prescriptions du livre IV du code de commerce, en évitant parallèlement une mise en oeuvre inconsidérée de poursuites.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 61 est présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 102 rectifié est présenté par MM. Mortemousque, Barraux, César, Revet, Texier, Murat et Vasselle.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Au début de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le a du 2° du I de l'article L. 442 - 6 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « Un tel avantage peut également consister en la globalisation artificielle des chiffres d'affaires, ou en demandes d'alignement sur les conditions commerciales obtenues par d'autres clients. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 61.
M. Gérard Cornu, rapporteur. La constitution de centrales d'achat ou de référencements, en France ou à l'étranger, aboutit à une transparence des conditions commerciales des fournisseurs à l'égard de leurs différents clients de la distribution regroupés dans la nouvelle centrale.
Le Conseil de la concurrence s'est toujours refusé à sanctionner ces pratiques sur la base du droit actuel.
Cet amendement tend à prohiber cette forme de transparence entre firmes en concurrence sur le marché.
M. le président. La parole est à M. Yannick Texier, pour présenter l'amendement n° 102 rectifié.
M. Yannick Texier. Cet amendement est défendu.
M. le président. L'amendement n° 364 rectifié, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux, MM. Masson, Türk, Baudot, Besse, Gaillard, Gouteyron, Karoutchi et du Luart, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le I de cet article :
I. - Après le quatrième alinéa du II de l'article L. 442-6 du code de commerce, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...) De subordonner directement ou indirectement, au titre d'un accord ou d'une contrainte de gamme, l'exposition à la vente de plus d'un produit à l'octroi d'un avantage quelconque. »
La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Le présent amendement a pour objet de lever toute insécurité juridique en prohibant les accords de gamme. J'aimerais connaître le sentiment de la commission.
M. le président. L'amendement n° 182 rectifié, présenté par MM. Vial, Hérisson, de Raincourt, Braye, Dulait, du Luart et Saugey, Mme Brisepierre, MM. Bailly, César, Carle, Faure, Emin et de Broissia, Mme Bout et M. Grillot, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le I de cet article pour compléter le b du 2° du I de l'article L. 442-6 du code de commerce, remplacer les mots :
peut constituer
par le mot :
constitue
La parole est à M. Jean-Pierre Vial.
M. Jean-Pierre Vial. L'article 32 est extrêmement important.
Nous avons eu de nombreux échanges en effet au sujet des marges arrière, qui ne sont que la partie immergée de l'iceberg. Il existe d'autres parties plus visibles, plus techniques, auxquels peuvent être rattachés les accords de gamme. Et ce n'est pas parce que c'est la partie émergée de l'iceberg, une partie plus « présentable », qu'elle en est pour autant plus glorieuse.
Si les marges arrière sont le lieu d'un combat entre la grande distribution et les fournisseurs, les accords de gamme, reconnaissons-le, monsieur le ministre, sont le lieu du combat entre fournisseurs.
Lorsque la grande distribution a imposé ce qu'elle entendait percevoir au titre des marges arrière, le fournisseur n'a plus qu'à tenter de négocier un certain nombre de conditions.
Les accords de gamme sont, pour les fournisseurs, une façon d'obtenir une compensation au travers.
Cela étant, soyons clair, ces avantages sont octroyés aux plus grands, au détriment des plus petits. Les accords de gamme reviennent donc purement et simplement à consentir des avantages au nom de ces accords, mais également à évincer de la présentation les fournisseurs de taille plus moyenne ou plus petite.
Nous faisions en France, naguère, l'éloge de la grande distribution. Aujourd'hui, que l'on reprenne l'exposé des motifs de la loi Galland ou que l'on écoute les débats actuels, tout le monde s'accorde à constater les effets dévastateurs de la grande distribution tant sur l'emploi que sur l'inflation.
Aujourd'hui, le combat contre les accords de gamme est mené par les plus petites entreprises, qui, demain, seront purement et simplement évincées si elles n'obtiennent pas de garanties suffisantes. Monsieur le ministre, cela produirait trois effets négatifs, qui s'ajouteraient à ceux que j'ai évoqués.
Je crains un premier effet négatif sur l'inflation, d'abord, puisque, par le biais des accords de gamme, les grands fournisseurs essaient bien évidemment d'imposer leur toute puissance face aux PMI-PME. Si celles-ci ont été défendues par la grande distribution, c'est, vous le savez très bien, parce qu'elles servent, en matière de prix, à établir une concurrence. Mais encore faut-il qu'elles survivent !
Je crains un deuxième effet négatif, en termes d'innovation, car les PMI-PME sont des facteurs importants de l'innovation.
Je vois enfin un troisième effet négatif possible, et sur l'emploi, car ces centaines d'entreprises représentent des milliers d'emplois.
L'objet de cet amendement est très simple : il consiste à substituer aux mots « peut constituer » celui de « constitue ». Il n'y a pas de mystère, monsieur le ministre, de même qu'un feu est rouge ou vert, les accords de gamme constituent ou non un danger pour les PMI-PME. Dans ce dernier cas, des mesures doivent être prises afin que des sanctions puissent effectivement être appliquées, ce que ne permettrait pas à coup sûr la formulation actuelle de l'article 32, qui manque singulièrement du caractère radical nécessaire.
J'espère que la commission soutiendra cet amendement, qui, à mon sens, est la seule solution possible pour que les dispositions de l'article 32 s'appliquent sans équivoque aux accords de gamme.
M. le président. L'amendement n° 97 rectifié, présenté par MM. César, Mortemousque, Barraux, Texier, Murat et Vasselle, est ainsi libellé :
I. Compléter le texte proposé par le I de cet article pour compléter le b du 2° du I de l'article L. 442-6 du code de commerce par une phrase ainsi rédigée :
Le fait d'exiger le versement de pénalités et/ou de procéder au refus ou retour de marchandises, dans des conditions non prévues au contrat ni justifiées, constitue un abus de puissance d'achat.
II. En conséquence, dans le I de cet article, remplacer les mots :
par une phrase ainsi rédigée
par les mots :
par deux phrases ainsi rédigées
La parole est à M. Yannick Texier.
M. Yannick Texier. Des lots entiers de marchandises sont retournés au producteur, sous prétexte que la qualité du produit ou les délais n'ont pas été respectés. Cette pratique a lieu sans que le producteur soit présent pour constater la réalité de l'éventuelle dégradation de la marchandise et ne s'appuie sur aucune disposition du cahier des charges ni aucune norme. Les producteurs doivent pourtant verser des pénalités.
Les producteurs de fruits et légumes l'ont souvent constaté, ce motif cache une mauvaise gestion des stocks par les centrales d'achat ou les magasins. Ces derniers renvoient la marchandise quand ils ne sont pas sûrs de vendre ce qu'ils ont commandé compte tenu des stocks existants. Or ce n'est pas aux producteurs de supporter les coûts de la mauvaise gestion des stocks de la centrale d'achat.
M. le président. L'amendement n° 297, présenté par Mme Khiari, MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le II de cet article.
La parole est à M. Bernard Dussaut.
M. Bernard Dussaut. Cet amendement a pour objet la suppression du paragraphe II, dont je rappelle les termes : « Lorsque la rupture de la relation commerciale résulte d'une mise en concurrence par enchères à distance par voie électronique, le délai de préavis est au moins d'un an. »
Il s'agit clairement d'une rupture d'égalité entre le traitement d'une négociation menée de manière traditionnelle entre un acheteur et un fournisseur - par courrier, par téléphone, à l'occasion de réunions dans des bureaux- et une négociation réalisée par une enchère sur internet.
Cet article tend donc à établir une règle discriminatoire au détriment des utilisateurs des nouvelles technologies d'information et de communication, les NTIC.
Cet amendement vise à rétablir le droit commun, quel que soit le mode de négociation choisi, sans pénaliser les nouvelles technologies.
M. le président. L'amendement n° 62 rectifié, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
A la fin du texte proposé par le II de cet article pour compléter le 5° du I de l'article L. 442-6 du code de commerce, remplacer les mots :
le délai de préavis est au moins d'un an
par les mots :
la durée minimale de préavis est double de celle résultant de l'application des dispositions du présent alinéa dans les cas où la durée du préavis initial est de moins de six mois, et d'au moins un an dans les autres cas.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Pour la bonne compréhension de cet article 32, je vous rappelle qu'il est composé de trois paragraphes visant, successivement, les accords de gamme pour le I, les enchères inversées pour le II et le renversement de la charge de la preuve pour le III.
L'amendement n° 62 rectifié porte sur le paragraphe II, et permet d'éviter que les enchères à distance ne soit le moyen, pour un distributeur, de congédier de façon brutale l'un de ses fournisseurs. Nous pouvons, je crois, nous entendre sur cet objectif.
Toutefois, la commission des affaires économiques estime que le délai prévu d'un an est insuffisamment souple et donc insuffisamment protecteur au regard de la diversité des relations commerciales. Elle a donc adopté un amendement distinguant deux hypothèses.
Pour un préavis initial inférieur à six mois, s'agissant de relations commerciales courtes, la durée minimale de préavis est double de celle qui est prévue par les dispositions actuelles du code de commerce. En revanche, pour un préavis initial supérieur à six mois, la durée minimale de préavis est d'au moins un an.
Ainsi, cet amendement permettrait tout à la fois d'introduire de la souplesse dans les relations commerciales, de donner plus de visibilité et de sécurité aux fournisseurs, et de protéger plus particulièrement le fabricant qui s'engage dans l'élaboration d'un produit ou d'une gamme de produits pour un distributeur spécifique.
M. le président. L'amendement n° 295, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le II de cet article, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
... - Le I de l'article L. 442-6 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° - De déduire d'office du montant de la facture, établie par le fournisseur, les pénalités ou rabais correspondant au non-respect d'une date de livraison ou à une non-conformité des marchandises, lorsque la dette n'est pas certaine, liquide et exigible, avant même que le partenaire ait pu contrôler ou tout au moins discuter la réalité du grief correspondant ».
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Cet amendement vise à interdire une pratique trop fréquente des distributeurs, laquelle consiste à retenir de manière abusive sur les factures tout type de pénalités, telles que les retards de livraison ou la non-conformité des marchandises, sans avoir obtenu, au préalable, l'accord des fournisseurs.
La Commission d'examen des pratiques commerciales a d'ailleurs fait état, dans son avis du mois d'avril 2004, du caractère abusif de cette pratique.
Les dispositions en vigueur sur la compensation, au regard tant des règles de droit civil que des règles concernant les pratiques restrictives, sont insuffisantes pour sanctionner ce type de compensation abusive.
Cet amendement vise donc à permettre d'interdire la déduction d'office du montant de la facture établie par le fournisseur des pénalités ou rabais correspondant au non-respect d'une date de livraison ou à une non-conformité des marchandises.
M. le président. L'amendement n° 296, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le II de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Avant la dernière phrase du second alinéa du III de l'article L. 442-6 du code de commerce, est insérée une phrase ainsi rédigée : « La juridiction civile et commerciale peut ordonner la publication intégrale ou par extraits de la condamnation dans le Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ainsi que dans les journaux désignés par elle ; les frais de la publication dont il s'agit sont intégralement à la charge du condamné. »
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Les enseignes soignent leur image vis-à-vis de leurs actionnaires pour certaines et vis-à-vis des consommateurs dans tous les cas. Or les récentes condamnations prononcées par les juges ont constitué une valeur d'exemple, parce qu'elles ont été relayées par la presse. Le seul poids financier des amendes infligées n'est pas un élément suffisant de dissuasion. On le constate dans d'autres domaines ; je pense au dégazage, par exemple, mais c'est un autre débat. C'est l'effet de répétition d'une publication systématique des jugements qui peut avoir un réel impact.
Le projet de loi laisse au juge pénal la possibilité de publier son jugement dans la presse sans en faire une obligation. Il s'agit pour nous de rendre obligatoire cette publication pour la majorité des pratiques visées au titre IV du code de commerce, lequel prévoit des amendes pénales et civiles, en particulier celles qui sont relatives au non-respect de l'article L. 442-6.
L'amendement proposé vise donc à rendre obligatoire la publication des décisions, à la fois pénales, civiles et commerciales.
M. le président. L'amendement n° 63 rectifié, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le troisième alinéa (III) de cet article, remplacer le mot :
artisan
par les mots :
personne immatriculée au répertoire des métiers
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. La commission souhaite que l'amendement n° 132 rectifié bis soit retiré ; dans le cas contraire, elle émettrait un avis défavorable.
Avec les amendements nos 364 rectifié et 182 rectifié, MM. Adnot et Vial posent un vrai problème, celui de la pratique des accords de gamme. Selon eux, les mesures prévues par le Gouvernement pour sanctionner les abus dans ce domaine sont insuffisantes. En effet, les abus étant difficiles à qualifier - à partir de quel seuil y a-t-il abus ? - il leur semble préférable d'interdire totalement ce genre d'accord.
A défaut d'aller jusqu'au bout de la logique on pénalise l'ensemble des PME que l'on veut défendre. Nous le savons très bien, les accords de gamme se font avec de grandes entreprises, dont les produits incontournables servent à remplir les linéaires, sur lesquelles les PME n'ont alors plus leur place !
La commission est donc très favorable à ces deux amendements. Toutefois, préférant la rédaction de l'amendement n° 182 rectifié, elle souhaite le retrait de l'amendement n° 364 rectifié.
M. Philippe Adnot. J'accepte de retirer mon amendement, qui est satisfait par celui de M. Vial !
M. le président. L'amendement n° 364 rectifié est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. La commission souhaite le retrait de l'amendement n° 97 rectifié, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Sa position est la même pour l'amendement n° 297. La disposition proposée va à l'encontre de la position de la commission, qui souhaite conserver le principe d'un délai renforcé, tout en l'adaptant afin de l'assouplir.
Ce problème des enchères inversées, qui est nouveau, est difficile à régler. C'est pourquoi il paraît nécessaire à la commission de renforcer la législation dans ce domaine.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 295, qui est satisfait par l'amendement n° 60 de la commission.
Enfin, s'agissant de l'amendement n° 296, la commission souhaite entendre le Gouvernement avant de se prononcer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. L'amendement n° 132 rectifié bis appelle deux observations.
En premier lieu, les dispositions prévues par l'amendement figurent déjà à l'article L. 411-11 du code du travail pour les organisations professionnelles. Seules les pratiques visées au titre IV du livre IV du code de commerce sont pénalement sanctionnées, à l'exception de l'article L. 420-6, qui ne semble pas visé ici.
En second lieu, il convient en tout état de cause de limiter la mesure aux seules chambres consulaires et au titre IV du livre IV du code de commerce.
Sous réserve de cette rectification, le Gouvernement s'en remettra à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
J'en viens aux amendements identiques nos 61 et 102 rectifié. Je comprends la préoccupation des parlementaires de tous horizons face aux différents abus de puissance de vente qui peuvent se rencontrer.
Cet ajout vise de manière spécifique les pratiques des « super centrales » constituées par les enseignes pour renforcer artificiellement leur capacité de négociation en s'alliant face aux fournisseurs.
Mesdames, messieurs les sénateurs, l'arsenal juridique existant suffit assez largement pour combattre de telles pratiques. Je doute que l'insertion, dans le projet de loi, d'articles visant un type d'abus déterminé constitue un moyen efficace de lutter contre ces pratiques.
C'est pourquoi le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat sur les amendements identiques nos 61 et 102 rectifié.
J'en arrive aux accords de gamme et à l'amendement n° 182 rectifié.
Ce sujet est très important. Lorsque l'on évoque les accords de gamme, on pense tout de suite aux grandes surfaces qui peuvent ainsi évincer les PME du linéaire, au détriment de l'emploi et de l'innovation que celles-ci peuvent porter.
Toutefois, la situation actuelle est complexe et, si l'on interdisait purement et simplement les accords de gamme, des PME se trouveraient pénalisées.
Il en est ainsi, par exemple, d'une entreprise implantée dans le sud de l'Aisne, pas très loin du village dans lequel j'habite, dont le produit phare est un filtre à café que l'on trouve dans pratiquement toutes les grandes surfaces.
Un jour, les responsables de cette entreprise, forts de leur expérience positive, ont décidé de fabriquer un filtre à thé. Puis, pour conforter leur position de leader sur le marché, ils ont décidé de fabriquer un filtre à tisane. Dans les deux cas, ils ont dû élaborer un produit adapté.
Ces deux produits étaient nouveaux et n'avaient donc pas de clients, pas de demande. Les responsables de l'entreprises ont alors passé des accords de gamme avec les grandes surfaces : elles continuaient de vendre les filtres à café à la condition de placer également en linéaire les filtres à thé et les filtres à tisane. C'est ainsi que ces produits innovants ont rencontré le consommateur, ce qui aurait été impossible sans les accords de gamme.
L'activité des PME s'articule souvent autour d'un produit phare. Pour qu'une PME puisse innover et élargir le nombre des produits qu'elle propose, il faut lui permettre d'accéder au consommateur ; l'accord de gamme est précisément un moyen d'y parvenir. Les sociétés de distribution ne recherchent pas des produits pour lesquels il n'y a pas de clients, pas de demande. Le client, il faut le créer, donc mettre le produit sur le linéaire.
Il faut aussi garder présent à l'esprit qu'une grande partie de l'activité de notre pays repose sur les réseaux de distribution intégrés, tels que les franchises de marque, en particulier dans le secteur de l'automobile.
Mesdames, messieurs les sénateurs, si vous adoptiez l'amendement n° 182 rectifié visant à interdire les accords de gamme, il vous faudrait, de retour dans vos départements, expliquer aux concessionnaires Renault ou Peugeot que, désormais, ils n'ont plus le droit de vendre toute la gamme du constructeur avec lequel ils travaillent.
M. Jean-Pierre Vial. Mais non !
M. Renaud Dutreil, ministre. Mais si, car votre texte interdit les accords de gamme, monsieur le sénateur. Or, c'est ce type d'accord qui unit un concessionnaire à un constructeur, c'est même la définition de l'accord de gamme.
Je prends un autre exemple. Nous possédons tous un téléphone mobile. Aujourd'hui, trois opérateurs sont bien connus en France : Orange, Bouygues et SFR.
Mme Nicole Bricq. Pas de publicité !
M. Renaud Dutreil, ministre. Ces opérateurs ont installé, partout en France, des boutiques à leur enseigne. Les gestionnaires de ces commerces vendent toute la gamme des produits distribués par l'opérateur avec lequel ils ont passé... un accord de gamme.
Si les accords de gamme étaient interdits, toutes les petites entreprises qui ont pu se développer sur ce marché se trouveraient confrontées à une difficulté majeure.
Lutter contre le recours abusif aux accords de gamme est un excellent principe, mais interdire complètement ce type d'accord, c'est mettre le doigt dans un dispositif qui aura des conséquences extrêmement lourdes que les auteurs de l'amendement n'ont peut-être bien mesurées ou appréciées.
La commission Canivet a, je le rappelle, travaillé sur cette seule question des accords de gamme pendant un mois entier. Ses membres ont rencontré des responsables de PME, des constructeurs automobiles, des représentants de tous les secteurs de la franchise. Ils se sont efforcés de cerner la nature de l'accord de gamme. Ils sont parvenus à la conclusion que cette forme d'accord ne pouvait pas être interdite mais qu'il fallait, et c'est l'intention du Gouvernement, réprimer les abus. En supprimant une liberté, veillons à ne pas aboutir à l'inverse de l'objectif fixé.
Mesdames, messieurs les sénateurs, il faut être vigilant. Je m'engage à diligenter des contrôles spécifiques pour lutter contre les abus. J'en rendrai compte devant le Sénat. Les abus relevés seront sur la place publique et nous pourrons en débattre à nouveau, car il s'agit d'une question essentielle.
Mais je vous en prie, mesdames, messieurs les sénateurs, n'adoptez pas des dispositions qui pourraient avoir des conséquences bien plus larges que vous le pensez sur des activités tout à fait légales qui sont nécessaires au dynamisme de nos entreprises et à l'emploi.
J'ajoute que l'interdiction des accords de gamme serait incompatible avec les textes communautaires. En effet, le règlement CE 1400/2002 autorise explicitement les accords de gamme dans le secteur de l'automobile.
Par ailleurs, interdire les accords de gamme reviendrait à mettre notre pays en contradiction avec le principe de la liberté du commerce, reconnu par la Constitution et par les traités européens. Cette interdiction serait donc probablement non constitutionnelle.
Tous ces arguments devraient vous conduire à conserver l'équilibre du texte qui vous est soumis et qui répond à vos souhaits de manière proportionnée. Comme vous, le Gouvernement s'efforce de lutter contre les abus. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, il fait de la lutte contre le recours abusif aux accords de gamme une des dispositions phares de la nouvelle réglementation qu'il souhaite mettre en place.
Mais n'allons pas au-delà du bon sens. Restons en à l'équilibre qui a été trouvé dans le projet de loi. Le Gouvernement vous démontrera, en s'appuyant sur les résultats des contrôles qu'il fera effectuer, que la disposition qu'il vous présente répond bien à vos souhaits.
Tels sont les arguments qui motivent l'avis défavorable du Gouvernement sur l'amendement n° 182 rectifié.
Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement n° 297, pour les raisons qu'a fort bien expliquées M. le rapporteur.
En revanche, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 62 rectifié.
L'amendement n° 295 pourrait, s'il était adopté, soulever des difficultés d'application du fait de l'obligation préalable d'identifier un abus au sens du 7° du I de l'article L. 442-6 du code de commerce.
En outre, il est superfétatoire, monsieur Raoul, puisque l'abus de puissance d'achat visé au 1° du II du même article permet déjà d'appréhender le cas des compensations abusives.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 296. Certes, il est sensible aux souhaits des sénateurs d'améliorer l'impact des décisions de justice en les faisant porter à la connaissance du public et des consommateurs, mais il convient d'être conscient des risques qui pourraient découler de la publication de décisions non définitives au regard des intérêts commerciaux si l'entreprise n'est finalement pas condamnée. C'est la raison pour laquelle je demande également le retrait de cet amendement.
Enfin, le Gouvernement a émis un avis favorable sur l'amendement n° 63 rectifié.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur le président, la brillante démonstration de M. le ministre concernant les accords de gamme ne peut qu'interpeller la commission. Certains arguments sont imparables.
M. Jean Desessard. Oui, les filtres à tisane !
M. Gérard Cornu, rapporteur. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, je suis favorable aux amendements de MM. Vial et Adnot et je souhaite que tous deux puissent s'exprimer, même si M. Adnot a accepté, sur ma demande, de retirer l'amendement n° 364 rectifié au profit de l'amendement n° 182 rectifié.
M. Philippe Adnot. J'ai retiré mon amendement un peu vite !
M. Gérard Cornu, rapporteur. Les arguments et la démonstration de M. le ministre nous éclairent incontestablement sur des difficultés réelles. J'avoue que je ne disposais pas de tous les éléments qu'il a évoqués.
M. le ministre a pris l'engagement de faire procéder à des contrôles et de tenir le Sénat informé des abus qui auront été constatés. Or notre démarche est motivée par la répression des abus. C'est la raison pour laquelle j'ai soutenu l'amendement n° 182 rectifié, qui vise à interdire les accords de gamme. Il semble toutefois que l'interdiction de ce type d'accord engendre des effets pervers que nous ne soupçonnions pas.
A ce point du débat, monsieur le président, il me paraît souhaitable que les auteurs des amendements nos 364 rectifié et 182 rectifié puissent s'exprimer.
M. le président. Je vous rassure, monsieur le rapporteur, ils pourront faire connaître leur position.
Monsieur Texier, acceptez-vous de rectifier l'amendement n° 132 rectifié bis dans le sens suggéré par M. le ministre ?
M. Yannick Texier. Oui, monsieur le président, je rectifie l'amendement pour tenir compte des observations de M. le ministre.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 132 rectifié ter, présenté par MM. Mortemousque, Poniatowski, Braye, Carle et Hérisson, Mme Lamure, MM. Revet, Bertaud, Faure, Barraux, Leroy, Texier et Fouché, et qui est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Après l'article 2-21 du code de procédure pénale, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Les chambres consulaires peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits constitutifs d'infractions aux prescriptions du titre IV du livre IV du code de commerce et portant un préjudice direct à l'un de leurs ressortissants. Elles peuvent exercer les mêmes droits en ce qui concerne les faits constitutifs de ces mêmes infractions et portant un préjudice direct ou indirect aux missions qui leur sont reconnues. »
Quel est l'ais de la commission sur cet amendement ainsi rectifié ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Cet amendement, monsieur Texier, pose problème.
En effet, on ne peut accepter que les chambres consulaires puissent ester en justice pour assurer la protection de ceux de leurs ressortissants qui sont victimes de pratiques commerciales interdites ou encadrées : ce rôle est celui des organisations professionnelles. Et certaines organisations professionnelles ne souhaitent pas que les chambres de commerce s'arrogent le droit de représenter les entreprises.
Les chambres de commerce représentent les entreprises ; les organisations professionnelles défendent les intérêts des entreprises et ont le pouvoir d'ester en justice. Je crains un mélange des genres qui prêterait vraiment à confusion.
Je vous demande donc instamment, monsieur Texier, de bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Texier, l'amendement n° 132 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Yannick Texier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 132 rectifié ter est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 61 et 102 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vial, pour explication de vote sur l'amendement n° 182 rectifié.
M. Jean-Pierre Vial. J'ai été très sensible à vos observations, monsieur le ministre, mais vous ne m'avez pas du tout convaincu. (M. le ministre sourit.)
Ainsi le fabricant de filtres à tisanes de l'Aisne que vous avez évoqué peut-il être tout à fait rassuré sur la disposition prévue à l'article 32 - « Le fait de subordonner, au titre d'un accord de gamme, l'exposition à la vente de plus d'un produit à l'octroi d'un avantage quelconque peut constituer un abus de puissance de vente ; ». Il est en effet question de « plus d'un produit ». S'agissant de ce type de produit, j'imagine mal que cela puisse poser une difficulté.
En ce qui concerne les concessionnaires automobiles, je n'ai pas du tout compris pourquoi un concessionnaire Citroën pourrait se voir reprocher un accord de gamme parce qu'il aurait proposé à la vente par accident une Toyota ! Il me faudrait donc un peu plus d'explications pour comprendre la logique du raisonnement, monsieur le ministre.
En ce qui concerne les opérateurs et les distributeurs de téléphonie mobile, la situation est simple. Certains distributeurs sont concessionnaires d'une marque. Ainsi les concessionnaires Telefónica ne vendent-ils que des produits certifiés Telefónica et fabriqués pour le compte de cet opérateur. D'autres vendent toutes les marques de téléphones portables.
Les exemples que vous avez donnés, monsieur le ministre, pourraient par exception relever de l'article 32, mais nous sommes loin de l'article 32, qui vise des situations très précises.
Monsieur le ministre, lorsque je l'ai lu pour la première fois le texte sur les marges arrière, j'avais une position radicale. En effet, tout le monde le reconnaît, les marges arrière constituent, qu'on le veuille ou non, un dévoiement de la loi Galland. Mais, lors de la discussion générale, monsieur le ministre, vous avez déclaré que, compte tenu de l'importance prise par les marges arrière - elles représentent de 30 % à 40 % des marges -, il fallait procéder de façon pragmatique et par étape, ce en quoi vous avez raison. Les expériences d'autres pays ont en effet montré que, en procédant brutalement, on déréglait le mécanisme au lieu de le réguler.
En revanche, pour les accords de gamme, qui sont, je le rappelle, des contreparties que se font concéder les fournisseurs, la position la plus radicale s'impose, car, à défaut, c'est la disparition de la concurrence. En effet, un fournisseur de produits frais à qui l'on demande des ristournes au titre des marges arrière - je ne citerai pas de nom - demandera des linéaires en compensation. Il sera tenté d'en obtenir le plus grand nombre possible afin de détruire la concurrence, celle des PMI - PME, et de se refaire une marge.
M. Daniel Raoul. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Vial. Pour récupérer les marges qu'on leur prend, les fournisseurs ont deux possibilités : soit dégrader leur produit, soit tenter de faire disparaître la concurrence.
Mme Michelle Demessine. C'est la loi de la jungle !
M. Jean-Pierre Vial. Le premier effet des accords de gamme est donc de tuer la concurrence.
Le deuxième effet de ces accords est de tuer l'innovation ; les chiffres sont dans le rapport. L'innovation relève plus des PMI-PME - et l'exemple que vous avez donné tout à l'heure le démontre, monsieur le ministre, - que des grands distributeurs.
En outre, troisième effet, monsieur le ministre, l'emploi est aussi dans les PMI-PME. Les grands distributeurs - on pourrait les citer - se comptent sur les doigts d'une main et sont tous des sociétés « OPAbles », qui peuvent donc, à tout moment, passer sous contrôle étranger. Les PMI-PME se comptent, elles, par centaines et représentent des milliers d'emplois français.
Quant à l'argument européen, j'avoue que nous avons appris à le relativiser. (Sourires.) Voyez plutôt : dans quelques jours, nous débattrons en commission mixte paritaire des industries électro-intensives. Je constate simplement que, en vertu des mêmes directives européennes que l'on nous oppose ici, les Allemands ont permis à tous leurs acteurs « électro-intensifs » de bénéficier de dérogations, ces dérogations que l'on ne veut pas nous accorder en France.
Je suis convaincu que mes collègues, notamment Philippe Adnot, pourraient vous donner d'autres exemples.
Il nous faut aujourd'hui défendre l'article 32, quitte, peut-être, à le compléter en commission mixte paritaire. J'en conviens, monsieur le ministre : cet article peut être enrichi, mais il ne peut en aucun cas être supprimé !
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques et du Plan. Belle démonstration !
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote sur l'amendement n° 182 rectifié.
M. Philippe Adnot. Je souscris aux excellents propos de mon collègue.
Monsieur le ministre, nous connaissons votre talent, mais pourquoi feindre de ne pas connaître le problème qui se pose à l'heure actuelle ?
Ce n'est pas parce qu'une commission n'est pas parvenue à trouver une solution à un problème réel, qui, tous les jours, se traduit par une somme de contraintes pour les PME et met leur existence même en danger, que nous allons attendre des mois avant de le régler !
Nous vous proposons aujourd'hui de voter l'amendement n° 182 rectifié. Nous aurons ensuite le temps, en commission mixte paritaire, de trouver des aménagements permettant de régler les problèmes des filtres à café et des voitures ! (Rires.)
M. le président. Monsieur le ministre, ces arguments vous ont-ils convaincu ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Je crains au contraire qu'ils ne m'aient renforcé dans ma conviction initiale, monsieur le président !
On tente en effet de faire croire que le Gouvernement n'aurait pas l'intention de lutter contre le abus en matière d'accords de gamme que M. Vial vient de dénoncer et dont nous avons tous des exemples en tête. Je pense notamment à une célèbre marque de fromage, très forte - aussi forte que ses fromages !- pour négocier des accords de gamme qui ont la particularité d'évincer des linéaires les autres marques de fromage. Et je pourrais citer bien d'autres exemples encore.
Sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement a bien l'intention d'empêcher de tels abus.
Permettez-moi de vous relire la phrase que nous insérons, par l'article 32, dans l'article L. 442-6 du code de commerce : « Le fait de subordonner, au titre d'un accord de gamme, l'exposition à la vente de plus d'un produit à l'octroi d'un avantage quelconque peut constituer un abus de puissance de vente ; ».
Dans ce « peut constituer », il y a tout le pouvoir d'appréciation du juge, qui est la règle aujourd'hui en France. Ce pouvoir n'est en rien choquant : le juge n'a pas compétence liée et doit apprécier s'il y a eu ou non abus de puissance de vente.
En outre, monsieur Vial, vous ne m'avez pas convaincu sur l'innovation et les PME.
Je le dis avec beaucoup de gravité, nous voulons que nos PME grandissent. La plupart du temps, une PME, c'est une idée et un produit phare. Ce produit se fraye un chemin jusqu'au consommateur et remporte un certain succès. Mais, si elle souhaite grandir, l'entreprise doit inventer d'autres produits. Faire figurer ces produits dans un accord de gamme est un très bon moyen de les faire connaître des consommateurs. Pourquoi pénaliser les PME innovantes ?
J'en suis certain, si l'amendement n° 182 rectifié était adopté, les organisations représentatives des PME elles-mêmes protesteraient, et nous en avons déjà rencontré un certain nombre.
Ensuite, vous me dites, monsieur le sénateur, s'agissant des voitures et des téléphones portables, qu'il n'y a pas de problème, qu'il est possible de vendre ce que l'on veut. Mais, pour un concessionnaire, l'accord de gamme est une obligation ! Le concessionnaire automobile est obligé de vendre l'ensemble d'une gamme. Dans le secteur de la téléphonie mobile, on peut, bien sûr, vendre ce que l'on veut, mais les accords de gamme prévoient des remises et donc un seuil de revente à perte plus bas. C'est ce qui permet de vendre des produits moins chers et d'ouvrir de nouveaux marchés aux consommateurs.
Pour lutter contre des pratiques abusives, que le texte du Gouvernement vise d'ailleurs à réprimer, vous utilisez un énorme marteau, monsieur le sénateur, et, en le laissant retomber, vous écraserez, par inadvertance, j'en suis convaincu, un assez grand nombre d'autres activités, qui, elles, méritent d'être protégées.
Je note d'ailleurs que M. Texier a déposé un autre amendement visant à ce que l'interdiction des accords de gamme ne s'applique pas aux constructeurs automobiles. Cela prouve bien qu'il partage mon raisonnement !
Je suis sans illusion sur la puissance de feu de la commission des affaires économiques et des sénateurs, mais je souhaite attirer votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, sur les conséquences de l'adoption d'une interdiction radicale de tout accord de gamme dans notre pays, ne serait-ce qu'au regard du droit européen, qui garantit la liberté du commerce et de la concurrence. (M. Jean Desessard s'esclaffe.) Notre pays ne va tout de même pas revenir à une économie dirigiste !
Je suis vraiment inquiet, et je vous le dis non pas en tant que ministre mais en tant qu'élu, de voir à quel point le corporatisme et le protectionnisme sont, dans notre pays, en train de gagner du terrain, des « parts de marché » pourraient-on dire. Partout, aujourd'hui, les acteurs économiques, qu'ils soient ou non producteurs, défendent leurs parts de marché comme s'il fallait les protéger, les « cartelliser », les enfermer dans le droit de façon à éviter la concurrence.
Nous avons construit la prospérité de l'Union européenne, de notre pays, sur la concurrence libre et non faussée. Nous partageons ces valeurs. Aujourd'hui, elles sont partout attaquées et battues en brèche.
Que certains, attachés à un modèle ancien,...
Mme Michelle Demessine. Ce n'est pas vrai ! Interrogez-vous !
Mme Michelle Demessine. Ne cherchez pas un épouvantail parce que vous n'avez pas de solution !
M. Renaud Dutreil, ministre. ... dans lequel il y avait des magasins d'Etat, défendent ce système, libre à eux !
Mme Michelle Demessine. Ne cherchez pas à vous défausser ! Vous êtes en panne d'idées !
M. Renaud Dutreil, ministre. En revanche, pour ce qui est de notre économie, il faut lui laisser de la liberté, en particulier pour nos PME, qui ont besoin de pouvoir disposer d'outils commerciaux adaptés à leur développement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. M. le ministre est très brillant dans ses explications, mais il me faut tout de même le contredire sur ce dossier capital.
Mme Nicole Bricq. Ce n'est pas parce qu'il est brillant qu'il dit la vérité !
M. Gérard Cornu, rapporteur. Vous avez fait référence, pour en tirer argument, monsieur le ministre, à un amendement de M. Texier, mais, et j'en suis désolé, nous ne devons pas avoir la même lecture d'un amendement que j'ai quelque raison de connaître. Je suis en effet président du groupe d'études sur l'automobile et M. Texier, vice-président.
M. Jean Desessard. Ah !
M. Gérard Cornu, rapporteur. Vous ne pouvez donc pas me suspecter d'être hostile aux concessionnaires automobiles et à l'industrie automobile ! (Sourires.)
M. Gérard Cornu, rapporteur. J'ai bien vérifié que l'amendement n° 182 rectifié ne pouvait en aucun cas s'appliquer aux constructeurs automobiles.
J'ai étudié la réglementation communautaire : elle soustrait déjà les produits commercialisés dans le cadre de réseaux intégrés aux dispositions nationales relatives aux accords de gamme.
En vertu d'un double principe de droit, la norme particulière l'emporte sur la norme générale ; la norme de droit communautaire prévaut sur celle de droit interne.
Monsieur le ministre, nous vous aimons bien, vous êtes brillant, mais vous ne pouvez pas agiter l'épouvantail des concessionnaires automobiles.
Je souhaitais également rassurer M. Texier : si M. Vial ne retire pas l'amendement n° 182 rectifié, je précise de nouveau que la commission y est favorable.
M. Jean Desessard. Pour vous en sortir, monsieur le ministre, il faut que vous sous-amendez pour le secteur automobile !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 182 rectifié.
(L'amendement est adopté à l'unanimité.)
Mme Michelle Demessine. On a gagné du terrain !
M. le président. Monsieur Texier, l'amendement n° 97 rectifié est-il maintenu ?
M. Yannick Texier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 97 rectifié est retiré.
La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 297.
M. Daniel Raoul. Je voudrais simplement attirer l'attention de M. le ministre et de M. le rapporteur sur la relation du paragraphe II de l'article 32 du projet de loi avec le droit européen. Une neutralité technologique devrait être absolument préservée. D'ailleurs, lors de la transposition de la directive concernant le « paquet Télécom » et l'économie numérique, ce problème avait déjà été abordé.
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote.
Mme Bariza Khiari. En déposant l'amendement n° 297, nous souhaitions défendre la neutralité du support technologique. En le rejetant, vous condamnez l'avenir en pénalisant le support lui-même. L'inconvénient majeur sera de dissuader les opérateurs d'utiliser les outils de la modernité.
Par ailleurs, je n'ai pas très bien compris la rédaction de l'amendement n° 62 rectifié, qui porte sur le même sujet : elle me semble ambiguë. Je ne sais pas si cette disposition durcit ou assouplit la position initiale. Monsieur le rapporteur, pouvez-vous me fournir des explications sur ce point ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Comprenons bien la rectification qui a été apportée à l'amendement n° 62.
La commission avait initialement fixé la durée minimale du préavis en cas de rupture de la relation commerciale au double de celle résultant de l'application des dispositions de le II de l'article 32, ce qui faisait, en cas de rupture des relations commerciales entre un distributeur et un fournisseur au terme d'une coopération de deux ans, un préavis de quatre ans !
Aux termes de l'amendement n° 62 rectifié, cette durée est ramenée à un an. En revanche, si le préavis initial est de moins de six mois, la durée minimale de préavis sera alors du double.
Une telle mesure assouplit donc le dispositif et correspond plus à la réalité.
M. le président. Monsieur Raoul, l'amendement n° 295 est-il maintenu ?
M. Daniel Raoul. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 295 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 296.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Nous en revenons à l'article 26, précédemment réservé.
Article 26 (précédemment réservé)
La dernière phrase du second alinéa de l'article L. 420-2 du code de commerce est remplacée par les dispositions suivantes :
« Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées, en pratiques discriminatoires visées au 1° du I de l'article L. 442-6 ou en accords de gamme. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 365 rectifié, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux, MM. Masson, Türk, Baudot, Besse, Gaillard, Gouteyron, Karoutchi et du Luart, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 388, présenté par Mme Demessine, MM. Coquelle, Billout et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Après le deuxième alinéa (1°) du I de l'article L. 442-6 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° de conclure des accords de gamme ; ».
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. L'article 26 du projet de loi vise à considérer les accords de gamme comme étant de potentiels abus de position dominante, répréhensibles par le juge de la concurrence.
Nous souscrivons à l'objectif du Gouvernement qui est de limiter ces pratiques constituant de véritables entorses à la libre concurrence, comme nous venons de le voir. En effet, les accords de gamme permettent à un fournisseur de faire une remise au distributeur s'il consent à acheter l'ensemble ou la majeure partie de ses produits. Ces pratiques favorisent essentiellement les fournisseurs les plus importants, ceux qui disposent effectivement d'une gamme de produits avec un produit phare.
Cependant, la majeure partie des PME, qui ont aujourd'hui du mal à imposer leurs produits face aux géants de l'agroalimentaire, ne peuvent pas prétendre à ce type d'accord, n'ayant pas une gamme de produits ou, en tout cas, le même rapport de force.
Ainsi, alors que ce projet de loi prétend permettre le développement des PME, cette mesure apparaît contestable parce qu'elle entérine ce type de pratiques jugées répréhensibles, sauf si elles présentent un caractère abusif.
Cependant, la mise en oeuvre de cet article serait extrêmement délicate. En effet, le juge saisi d'un recours devrait déterminer si l'abus de position dominante est caractérisé au regard de deux critères : l'exploitation abusive, par une entreprise vendeuse, de l'état de dépendance économique d'une entreprise acheteuse, et l'affectation de fonctionnement ou de la structure de la concurrence par cette exploitation abusive.
Ces deux critères étant pour le moins évasifs, on laisse ainsi une marge d'appréciation très importante au juge de la libre concurrence. De plus, qui ira devant le juge pour contester ces pratiques ?
Dans le rapport de la commission des affaires économiques, il est indiqué que chacun des cocontractants trouve son avantage dans ce type de pratique.
Effectivement, il existe un intérêt commun entre les fournisseurs les plus importants et la grande distribution : la création d'un monopole privé. Le fournisseur vend plus de produits et l'acheteur peut à son tour les revendre moins cher.
Face à cette situation, quelle PME ira contester cet état de fait en engageant une procédure longue et coûteuse au cours de laquelle elle devra apporter la preuve de l'abus de position dominante ?
De surcroît, le juge de la concurrence, comme l'on s'en doute, apprécie de manière extrêmement limitative cette entorse au droit de la concurrence.
D'autre part; ces pratiques, loin d'encourager la diversité des fournisseurs dans les rayons des grandes surfaces, permettent une uniformisation des grandes surfaces, où seulement quelques marques phares proposeraient l'ensemble des produits.
Le distributeur qui, grâce à cette pratique, pourrait obtenir des prix préférentiels, n'aurait pas intérêt à solliciter d'autres fournisseurs. Au surplus, ces prix préférentiels feront inévitablement baisser l'ensemble des prix sur une même catégorie de produits en faisant baisser le seuil de revente à perte.
Pour toutes ces raisons, nous préférons à un encadrement juridique peu contraignant l'interdiction pure et simple des accords de gamme, seule à même de garantir l'égalité entre l'ensemble des fournisseurs.
M. le président. L'amendement n° 340, présenté par M. Texier, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour remplacer la dernière phrase du second alinéa de l'article L. 420-2 du code de commerce par un alinéa ainsi rédigé :
« Ne sont pas constitutifs d'abus au titre du présent alinéa les accords de gamme qui résultent de l'application de catégories d'accords ou d'accords autorisés au titre de l'article L. 420-4 ou au titre de l'article 81, paragraphe 3, du traité instituant la Communauté européenne ».
La parole est à M. Yannick Texier.
M. Yannick Texier. L'article 26 vise à mieux encadrer les pratiques dites des « accords de gamme » en sanctionnant celles qui présentent un caractère abusif. Il mentionne explicitement les accords de gamme potentiellement abusifs, que le juge est habilité à prohiber.
En effet, certaines dérives ont cours dans la grande distribution, des grands fournisseurs limitant ou interdisant même l'accès de leurs concurrents aux linéaires, c'est-à-dire la présentation des produits à la vente, en particulier ceux des PME.
Toutefois, il convient de préciser la notion d'accord de gamme et de tenir compte de la spécificité de produits particuliers comme les produits des réseaux intégrés, tels que les franchises de marques ou la distribution automobile - voitures et équipements -, régis par le règlement 1400/2002, évoqué par M. le ministre, qui interdit d'imposer l'exposition de la gamme complète lorsque le concessionnaire est multimarque. En revanche, ce règlement autorise d'imposer aux concessionnaires l'obligation de proposer à la vente toute la gamme du constructeur.
On comprend que les réseaux intégrés ne souhaitent pas que l'adoption de l'article 26 puisse modifier ce dispositif, qui doit rester en vigueur. Il importe donc de rappeler l'exclusion du champ d'application de l'article 26 des accords de gamme résultant de l'application de catégories d'accords ou d'accords autorisés au titre de l'article L. 420-4 du code de commerce et au titre de l'article 81, paragraphe 3, du traité instituant la Communauté européenne.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur Le Cam, l'amendement n° 388 est satisfait en raison du vote, à l'unanimité, qui est intervenu précédemment. Je vous demande donc de le retirer.
M. Gérard Le Cam. J'ai en effet satisfaction, et je retire l'amendement.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur Texier, je vous remercie de vous préoccuper du secteur automobile, très important dans votre département, et de le défendre. Mais, l'amendement n° 340 que vous avez déposé étant satisfait, je vous demande également de bien vouloir le retirer.
M. le président. Monsieur Texier, l'amendement n° 340 est-il maintenu ?
M. Yannick Texier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 340 est retiré.
Je mets aux voix l'article 26.
(L'article 26 est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises.
Articles additionnels après l'article 32
M. le président. L'amendement n° 258 rectifié bis, présenté par MM. Mercier, Deneux et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 420-2 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Est punie d'une amende correspondant à trois fois le montant du contrat de fourniture en cours l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupement d'entreprises de l'état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard une entreprise fournisseur. »
La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Si j'ai bien compris ce que nous a dit précédemment M. le ministre, il faut garantir la liberté et réprimer les abus. Eh bien, cet amendement a précisément pour objet de réprimer les abus de position dominante.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Cet amendement aboutit à sanctionner les distributeurs coupables de pratiques illicites moins sévèrement que ne le prévoit actuellement la législation commerciale. Or ce n'est manifestement pas ce que souhaitent les auteurs de l'amendement, si l'on en croit l'exposé des motifs de M. Mercier. Je lui suggère donc de le retirer.
M. Michel Mercier. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 258 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 430 rectifié, présenté par MM. Arthuis, Deneux et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la première phrase du troisième alinéa (2°) du I de l'article L. 420-4 du code de commerce, les mots : « y compris par la création ou le maintien d'emplois » sont remplacés par les mots : « notamment par la création ou le maintien d'emplois ou par le renforcement de la compétitivité des entreprises en cause au regard de la concurrence internationale ».
La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier. Il s'agit d'un amendement auquel tient particulièrement M. Arthuis, mais ce dernier n'ayant pas encore eu le temps de rejoindre l'hémicycle, je vais m'efforcer de le défendre de mon mieux. (Sourires.)
Le présent amendement vise à adapter le droit des ententes et des positions dominantes aux enjeux actuels de l'économie. En alignant la rédaction de l'article L. 420-4-I-2 et celle de l'article L. 430?6, il améliore en outre la cohérence d'ensemble du droit de la concurrence.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Cet amendement est intéressant. Vous avez tout à fait raison, monsieur Mercier, toutes les ententes et positions dominantes ne sont pas condamnables : certaines assurent un progrès économique et doivent être autorisées. Elles le sont déjà lorsqu'elles permettent de maintenir ou de créer des emplois, en application de l'article L. 420-4 du code de commerce. En revanche, elles ne le sont pas lorsqu'elles visent à renforcer la compétitivité des entreprises sur le marché mondial, alors que les concentrations sont, très logiquement, autorisées dans un tel cas, afin de permettre à nos entreprises de faire face à la concurrence internationale.
Cet amendement aligne utilement les régimes des ententes, des abus de position dominante et des concentrations sur ce point.
S'étant cependant demandée si le critère de la compétitivité n'était pas trop large et n'aboutirait pas à justifier un nombre important d'ententes et d'abus de position dominante, la commission n'est pas allée jusqu'à donner un avis favorable : elle s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Le Gouvernement rappelle aux auteurs de l'amendement - mais M. Arthuis le sait bien - que la compétitivité internationale n'est pas oubliée dans l'examen des dossiers de concurrence puisqu'elle est déjà prise en compte dans l'article L.420-4.
On peut, de plus, craindre une moindre cohérence avec les dispositions du droit communautaire, en particulier avec l'article 81 du traité de l'Union européenne.
Toutefois, compte tenu de l'intérêt de la question soulevée par M. Arthuis, le Gouvernement, suivant en cela la commission, s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 32.
L'amendement n° 432 rectifié, présenté par MM. Arthuis, Deneux et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l'article L. 420-4 du code de commerce est complété par la phrase : « Il peut en être de même des catégories d'accords ou accords ayant pour objet de permettre à des entreprises de s'adapter à une situation de crise, à condition que ces accords soient temporaires. »
La parole est à M. Jean Arthuis.
M. Jean Arthuis. Vous l'avez compris ces amendements ont pour objet de redonner un espace à ceux qui produisent sur le territoire national. Nous avons voulu mettre en cohérence les textes et tenter de rééquilibrer le rapport de force entre producteurs et centrales d'achat.
Nous constatons que, bien souvent, on s'accommode de la concentration des forces d'achat. Durant la discussion générale, j'ai rappelé, avec d'autres, que les centrales d'achat se comptaient aujourd'hui sur les doigts d'une main et que, face à ces centrales, qui sont souvent en situation d'abus de position dominante, les producteurs éprouvent les plus grandes difficultés pour tenter de rassembler leurs moyens et parvenir à obtenir des conditions qui leur permettent encore de produire, de participer à la croissance et d'employer.
L'amendement n° 432 rectifié et celui qui vient d'être défendu par mon collègue Michel Mercier procèdent de la même inspiration.
Le paragraphe II de l'article 420-4 du code de commerce prévoit que des accords ou catégories d'accords entre entreprises peuvent être reconnus par décret comme satisfaisant aux conditions requises pour échapper à la prohibition des pratiques anticoncurrentielles prévue par les articles L. 420?1 et 420?2 du même code.
Le texte précise qu'il s'agit notamment d'accords ayant pour objet d'améliorer la gestion des moyennes ou petites entreprises. Sur la base de cet article, sont intervenus en 1996 deux décrets d'exemption en matière agricole, dont l'un visait les accords conclus pour faire face à des crises agricoles. Pour les autres types d'activités, s'agissant des accords visant à faire face à des crises, la jurisprudence est demeurée restrictive.
L'objet du présent amendement est de demander au juge, lorsqu'il est saisi, de manifester la même compréhension à l'égard d'autres secteurs d'activité que l'agriculture, à condition qu'il s'agisse de situations de crise et que ces accords soient temporaires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu. Il est vrai, monsieur Arthuis, que la logique de cet amendement est identique à celle de l'amendement précédent qui a recueilli un avis de sagesse de la part du rapporteur et du Gouvernement et qui a été adopté à une très large majorité par le Sénat. Il s'agit, dans les deux cas, d'autoriser par décret les seuls accords ou ententes ayant une justification économique.
Pour ce qui est de l'amendement n° 432 rectifié, la justification d'autoriser le décret découle de la nécessité de faire face à une situation de crise. Je pense bien comprendre l'objectif des auteurs de l'amendement : faire en sorte que des entreprises puissent s'entendre provisoirement pour surmonter une crise conjoncturelle.
Toutefois, accepter cela, ce serait prendre le risque de voir ces entreprises ou organisations sanctionnées par les institutions communautaires. On se souvient de ce qui s'est récemment passé dans le secteur de la viande bovine.
De plus, une telle disposition justifierait de nombreux accords ou ententes, et les différents secteurs industriels qui sont en situation difficile seraient amenés à l'invoquer.
C'est pourquoi la commission s'est résignée à vous demander, monsieur Arthuis, de bien vouloir retirer cet amendement. A défaut, l'avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Cet amendement semble effectivement contraire au droit communautaire, et en particulier à l'article 81 du traité, qui exclut toute entente, même temporaire, sur les prix, en dehors des exceptions déjà transposées à l'article L. 420-4 du code de commerce.
Il semble donc que l'amendement est redondant par rapport aux dispositions de cet article, qui prévoit dores et déjà que ne sont pas soumises aux règles de prohibition des pratiques anticoncurrentielles les pratiques « dont les auteurs peuvent justifier qu'elles ont pour effet d'assurer un progrès économique [...] et qu'elles réservent aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, sans donner aux entreprises intéressées la possibilité d'éliminer la concurrence pour une partie substantielle des produits en cause ».
Pour ces raisons, qui sont identiques à celles qu'a évoquées le rapporteur, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur Arthuis, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jean Arthuis. Encore une fois, je voudrais plaider la cause des petites et moyennes entreprises qui vous sont si chères, monsieur le ministre.
J'ai bien entendu que la priorité du Gouvernement était de gagner la bataille de l'emploi, et je vous ai dit à quel point j'étais perplexe quant à la compatibilité entre cette priorité et une autre que vous vous êtes donnée : faire baisser les prix dans la grande distribution.
Il m'arrive de penser que ces deux préoccupations peuvent être contradictoires,...
M. Bernard Dussaut. Eh oui !
M. Jean Arthuis. ...car on sait très bien que, chaque fois que la grande distribution baisse ses prix, elle répercute cette baisse sur ses fournisseurs. Dans ces conditions, nombre d'entre eux sont condamnés à s'exiler du territoire national pour se libérer de l'enclume réglementaire à laquelle ils y sont soumis.
Je ne veux naturellement pas mettre dans l'embarras la commission et son excellent rapporteur, non plus que le Gouvernement, mais je lance un appel : cette invocation du droit européen s'agissant des petites et moyennes entreprises garde, à mon avis, un caractère formel et je doute que l'Europe ait ici matière à instruire un recours contre la France.
Les situations sont aujourd'hui particulièrement difficiles sur le terrain et il ne serait pas extravagant que, à l'image de ce qui s'opère dans le secteur de l'agriculture, on puisse, momentanément, admettre de telles exceptions au bénéfice d'autres secteurs d'activité en crise.
Tel est l'objet de cet amendement n° 432 rectifié, que je maintiens, monsieur le président. Je trouverais dommage que le Sénat le rejette, car, l'urgence ayant été déclarée, il ne serait pas superflu que les députés puissent, à leur tour, donner leur point de vue sur la disposition proposée.
Les quatre amendements que j'ai présentés avec les membres de mon groupe visent, je le répète, mes chers collègues, à redonner un espace à ceux qui produisent. Il ne vous a en effet pas échappé que, dans la hiérarchie des rémunérations, on retrouve au niveau le plus élevé les revenus de ceux qui distribuent alors que ceux qui produisent ont moins de raisons d'être satisfaits, quand ils ne sont pas franchement dans la désespérance.
Si nous voulons recréer de l'emploi et susciter de la croissance, veillons donc à être encore capables de produire dans des quantités substantielles les produits que nous consommons.
Mme Michelle Demessine. C'est bien : nous ne sommes plus seuls !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 432 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 431 rectifié, présenté par MM. Arthuis, Deneux et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 430-6 du code de commerce est complété par les mots : « et de la création ou du maintien de l'emploi ».
La parole est à M. Jean Arthuis.
M. Jean Arthuis. Cet amendement s'inspire de la même philosophie que l'amendement n° 430 rectifié : il vise les concentrations en permettant que la création ou le maintien de l'emploi puissent exonérer des foudres du Conseil de la concurrence et des sanctions prévues les entreprises qui procéderaient à de telles opérations.
L'article L. 430-6 du code de commerce précise la nature de l'analyse qu'effectue le Conseil de la concurrence lorsqu'il est saisi par le ministre de l'économie pour avis sur une opération de concentration. Cet article prévoit que le Conseil de la concurrence tient compte de la compétitivité des entreprises en cause au regard de la concurrence internationale.
En revanche, et contrairement au I, 2°, de l'article L. 420-4 du même code, qui indique à quelles conditions une entente ou un abus de position dominante n'est pas soumis à la prohibition des pratiques anticoncurrentielles prévue par les articles L. 420-1 et L. 420-2, l'article L. 430-6 ne prévoit pas que l'impact sur l'emploi est pris en compte dans l'appréciation de la concentration par le Conseil de la concurrence.
Dans le souci d'affirmer la priorité de l'emploi, l'amendement proposé tend à aligner la rédaction de l'article relatif au contrôle des concentrations sur celle de l'article relatif au contrôle des pratiques anticoncurrentielles. Il améliore ainsi, me semble-t-il, la cohérence d'ensemble du droit de la concurrence.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Cet amendement, monsieur Arthuis, a une logique symétrique, mais inverse, de l'amendement n° 430 rectifié, sur lequel la commission s'en était remise à la sagesse du Sénat et que ce dernier a adopté. Il aligne en effet le régime des concentrations sur celui des ententes et positions dominantes.
En matière de pratiques anticoncurrentielles, le Conseil de la concurrence tient compte de l'impact social des actes qui lui sont soumis. En revanche, pour ce qui est des concentrations, il n'est pas prévu qu'il puisse en tenir compte. Dans un contexte économique où le chômage reste un problème majeur, il semble utile de lui donner cette possibilité.
Cependant, on peut aussi se demander quelle serait la portée concrète d'une telle mesure puisque toute opération de concentration se traduit généralement par des pertes d'emplois et non par des gains.
La commission s'en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Le Gouvernement s'en remet, lui aussi, à la sagesse de la Haute Assemblée, mais il tient néanmoins à rappeler que, dans la période qui est derrière nous, c'est non une baisse des prix que nous avons constatée dans la grande distribution, mais tout au contraire une hausse supérieure à l'inflation enregistrée dans l'ensemble de l'économie française. Et c'est bien parce que les prix ont plus augmenté dans la grande distribution que partout ailleurs - soit 2,3 % d'augmentation annuelle contre une inflation moyenne de 1,5 % - ...
M. Jean Desessard. Il a bien fallu payer les indemnités du PDG de Carrefour !
M. Renaud Dutreil, ministre. ... que nous avons été conduits à légiférer.
Le problème tient précisément au fait que ce ne sont pas les prix qui ont baissé, mais les marges arrière qui ont gonflé.
Il s'agit donc bien aujourd'hui de retrouver non pas un processus de surenchère à la baisse des prix, processus qui serait, j'en suis tout à fait convaincu, dévastateur pour l'emploi, mais un régime normal, dans lequel les prix pratiqués dans les grandes surfaces évolueraient à peu près comme les prix pratiqués dans les autres secteurs de l'économie, car il n'y a aucune raison pour que seuls les prix des produits de consommation courante pratiqués dans la grande distribution augmentent plus que les autres.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 431 rectifié.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 32.
Article additionnel après l'article 32 ou après l'article 35
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 100 rectifié, présenté par MM. César, Mortemousque, Barraux, Revet, Texier, Murat et Vasselle, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La deuxième phrase du second alinéa du III de l'article L. 442-6 du code de commerce est complété par les mots : « et demander la publication de la décision rendue ».
La parole est à M. Yannick Texier.
M. Yannick Texier. Les enseignes soignent leur image, parfois vis-à-vis de leurs actionnaires, mais dans tous les cas vis-à-vis des consommateurs. Or, si les récentes condamnations prononcées par les juges ont eu valeur d'exemple, c'est parce qu'elles ont été relayées par la presse : le poids financier des amendes prononcées n'a pas à lui seul un effet dissuasif. C'est l'effet de répétition d'une publication systématique des jugements qui peut avoir un réel impact.
Le projet de loi laisse seulement au juge pénal la possibilité de publier son jugement dans la presse. Il s'agit en fait de rendre obligatoire cette publication pour la majorité des pratiques visées au titre IV du code de commerce, qui prévoit des amendes pénales et civiles.
L'amendement proposé vise donc à rendre obligatoire la publication des décisions tant pénales que civiles ou commerciales.
M. le président. L'amendement n° 401, présenté par Mme Demessine, MM. Coquelle, Billout et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 35, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La deuxième phrase du second alinéa du III de l'article L. 442-6 du code de commerce est complétée par les mots :
« et demander la publication de la décision rendue ».
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Notre amendement a exactement le même objet que celui de M. Texier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Je ne sais si je dois me tourner vers M. Texier ou vers M. Le Cam, car ces deux amendements sont pratiquement identiques. Il n'est pas si fréquent qu'un amendement du groupe communiste républicain et citoyen et un amendement déposé par des sénateurs de l'UMP convergent à ce point ! (Sourires.)
M. Gérard Le Cam. C'est la Bretagne qui nous rassemble ! (Nouveaux sourires.)
M. Gérard Cornu, rapporteur. Ce serait donc amendement breton... J'avais tendance à penser qu'il s'agissait plutôt d'un amendement agricole ! (Nouveaux sourires.)
M. Gérard Le Cam. Ce n'est pas incompatible !
M. Gérard Cornu, rapporteur. C'est vrai !
En tout cas, le principe de la séparation des pouvoirs s'applique en France et, dès lors, il me paraît un peu osé de confier au ministre chargé de l'économie le soin de demander la publication des décisions condamnant un opérateur pour non-respect de la réglementation sur les relations commerciales. Cette initiative doit être réservée au seul juge, qui apprécie en fonction des circonstances particulières de l'espèce.
Je demande donc aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Le Gouvernement considère que le principe de la séparation des pouvoirs doit être respecté et que le pouvoir de publier une décision de justice appartient au juge. Donner ce pouvoir au ministre chargé de l'économie serait probablement préjudiciable aux fournisseurs, qu'on entend protéger.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.
M. le président. Monsieur Texier, l'amendement n° 100 rectifié est-il maintenu ?
M. Yannick Texier. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 100 rectifié est retiré.
Monsieur Le Cam, l'amendement n° 401 est-il maintenu ?
M. Gérard Le Cam. Oui, monsieur le président !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. L'argument utilisé par M. le ministre et par M. le rapporteur me laisse perplexe.
Je sais bien que presque aucune usine ne pollue, mais imaginons un instant qu'un certain nombre d'entre elles le fassent... (Sourires.) Impossible de toutes les poursuivre en justice ! Il ne serait donc pas anormal de considérer comme relevant du rôle de l'Etat le soin d'assurer l'information en cas de problème de ce type. A partir de là, que l'Etat se refuse à intervenir lorsqu'une entreprise est « en délicatesse » avec la loi ou au regard de la morale économique pose problème.
En fait, vous êtes en train de construire une société où tout passe par le juridictionnel. De votre part, monsieur le ministre, cela revient quasiment à dire que le ministre de l'économie est le défenseur des patrons. Eh bien non ! Le ministre de l'économie a pour rôle de réguler l'économie, et cela implique qu'il tienne aussi compte des consommateurs.
Normalement, dans une équipe gouvernementale « resserrée, efficace et solidaire », le ministre de l'économie devrait être chargé de mettre en oeuvre la politique du Gouvernement, et non pas seulement de défendre les intérêts des entrepreneurs, surtout quand ces derniers sont indélicats. Il me paraît donc difficile d'admettre que l'Etat se désintéresse de la moralité des relations économiques.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Dutreil, ministre. Il ne faut pas confondre deux choses : la publication des décisions de justice, qui relève de la compétence du juge, et le fait de poursuivre en justice des entreprises qui pourraient avoir commis des infractions, rôle qui est celui du Gouvernement, comme il l'a montré à de nombreuses reprises depuis quelques années.
Mme Michelle Demessine. Sans grand succès !
M. Renaud Dutreil, ministre. De nombreuses décisions de justice ont ainsi été rendues, de sorte que s'est progressivement constituée une jurisprudence.
La responsabilité du Gouvernement est de veiller à ce que la loi soit respectée et, lorsqu'il constate une infraction, de saisir le juge, à charge pour celui-ci, au vu des circonstances de l'espèce, de décider éventuellement que la décision rendue devra être publiée.
L'obligation systématique de publication, telle qu'elle est ici proposée, serait tout à fait contraire à ce schéma.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 401.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article additionnel après l'article 32
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 103 rectifié, présenté par MM. Barraux, César, Mortemousque, Revet, Texier, Murat et Vasselle, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 442-6 du code de commerce, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Un rapport des décisions rendues sur le fondement du titre IV du livre IV du présent code sera adressé chaque année au Parlement ».
La parole est à M. Yannick Texier.
M. Yannick Texier. Il est indispensable de pouvoir suivre l'évolution des décisions rendues sur le fondement du titre IV du code de commerce, concernant les pratiques commerciales. La publication de ces résultats aura un effet pédagogique et dissuasif.
M. le président. L'amendement n° 300, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 442-6 du code de commerce, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Un rapport de la Commission d'examen des pratiques commerciales sur les décisions rendues sur le fondement du titre IV du livre IV du présent code sera adressé chaque année au Parlement ».
La parole est à M. Bernard Dussaut.
M. Bernard Dussaut. Le titre IV du livre IV du code de commerce est relatif à la transparence, aux pratiques restrictives de concurrence et aux pratiques prohibées. En outre, il prévoit un certain nombre de sanctions.
Il est donc essentiel que le Parlement soit informé chaque année des sanctions prononcées à l'encontre des comportements abusifs. Il nous paraît tout à fait opportun que la Commission d'examen des pratiques commerciales puisse être chargée d'établir ce rapport.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Cette fois-ci, nous avons affaire à deux amendements qui témoignent d'une convergence entre des sénateurs de l'UMP et du groupe socialiste. Mon argumentation vaudra pour ces deux amendements.
Ces amendements rejoignent l'amendement n° 65, présenté par la commission, ainsi que les amendements n°s 114 rectifié et 249 rectifié, qui tendent à insérer des articles additionnels après l'article 37.
En effet, l'amendement n° 65 prévoit que le Gouvernement remettra avant le 1er octobre 2007 un rapport dressant un bilan de l'application des différentes dispositions du titre VI du projet de loi quant aux décisions rendues sur son fondement et présentant les adaptations réglementaires paraissant nécessaires.
Les amendements nos 114 rectifié et 249 rectifié, sur lesquels la commission a émis un avis favorable, visent quant à eux à confier à la Commission d'examen des pratiques commerciales le soin d'établir dans son rapport annuel un recensement des décisions juridictionnelles rendues sur la base du titre IV du livre IV du code de commerce.
Par conséquent, les deux amendements actuellement en discussion sont satisfaits par le jeu des trois amendements que je viens d'évoquer et dont la formulation paraît plus complète. Je demande donc à M. Texier et à M. Le Cam de bien vouloir les retirer.
M. le président. Monsieur Texier, l'amendement n° 103 rectifié est-il maintenu ?
M. Yannick Texier. Je le retire, monsieur le président.
M. Bernard Dussaut. Je retire également le mien, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 103 rectifié et 300 sont retirés.
Article additionnel après l'article 32 ou après l'article 33
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 146 rectifié est présenté par MM. Mortemousque, Carle, Barraux, Vial, Trillard et Houel, Mme Lamure et M. Texier.
L'amendement n° 372 est présenté par M. Adnot.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 33, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 443-1 du code de commerce est ainsi rédigé :
« 1° - A trente jours après la fin de la décade de livraison pour les achats de tout produit alimentaire, à l'exception des achats des produits visés aux 2°, 3° et 4° de cet article et des achats de produits saisonniers effectués dans le cadre de contrats dits de culture, visés aux articles L. 326-1 à L. 326-3 du code rural. »
La parole est à M. Yannick Texier, pour défendre l'amendement n° 146 rectifié.
M. Yannick Texier. A l'heure actuelle, seuls certains types de produits alimentaires - produits alimentaires périssables, viandes congelées ou surgelées, poissons surgelés, plats cuisinés et conserves fabriqués à partir de produits alimentaires périssables - sont soumis à des délais de paiement fixés de manière réglementaire au titre de l'article L. 443-1 du code de commerce.
En dehors de ces exceptions, les délais de paiement peuvent être fixés contractuellement par les parties. Or, dans la pratique, les délais de paiement fixés sont souvent supérieurs à trente jours, au détriment des producteurs qui ne sont pas couverts par les dispositions actuelles.
Cet amendement vise donc à harmoniser les délais de paiement à trente jours pour l'ensemble des produits alimentaires, en conservant simplement les règles spécifiques prévues aux 2°, 3° et 4° de l'article L. 443-1.
M. le président. L'amendement n° 372 n'est pas soutenu.
L'amendement n° 298, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 443-1 du code du commerce est ainsi rédigé :
« 1° A trente jours après la fin de la décade de livraison pour les achats de tout produit alimentaire, à l'exception des achats des produits visés aux 2°, 3° et 4° de cet article et des achats de produits saisonniers effectués dans le cadre de contrats dits de culture visés aux articles L. 326-1 à L. 326-3 du code rural ».
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Notre collègue a brillamment démontré l'opportunité de cet amendement ; je me rallie donc à ses arguments.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Je comprends parfaitement l'objectif visé par les auteurs de ces amendements : prévenir les cas où les fournisseurs doivent attendre de nombreux jours, voire parfois plusieurs semaines, avant que leurs partenaires commerciaux leur paient les produits alimentaires qu'ils leur ont livrés.
S'agissant des produits périssables, la limitation du délai de paiement à trente jours qui est actuellement prévue par le code de commerce est justifiée. En revanche, elle ne l'est pas s'agissant des produits transformés non périssables. Dans ce cas, la fixation du délai de livraison doit relever de la liberté de négociation entre les parties. J'ajoute même que globaliser l'ensemble des produits alimentaires pourrait avoir des effets nocifs.
Pour ces raisons, la commission demande aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. On peut facilement imaginer les conséquences que pourrait avoir l'adoption de l'amendement n° 146 rectifié : par exemple, aucune épicerie ne pourrait plus s'installer en zone rurale puisque la plupart d'entre elles vivent précisément grâce au fonds de roulement que leur procure le délai entre le moment où elles reçoivent la marchandise et celui où elles la paient, à condition de l'écouler, bien sûr.
Mais j'imagine, monsieur Texier que vous n'avez pas déposé cet amendement pour empêcher les petites épiceries de s'installer en zone rurale. Vous visez probablement la grande distribution. Cependant, là encore, l'application brutale d'un raccourcissement des délais de paiement pourrait avoir un effet dévastateur. Le commerçant serait mécaniquement conduit à trouver une compensation financière soit en amont soit en aval, c'est-à-dire soit en réduisant considérablement les prix d'achat soit en augmentant les prix de vente. Or, je ne pense pas que vous ayez l'intention, monsieur Texier, de faire payer le raccourcissement des délais de paiement au fournisseur par le biais d'une pression extrêmement forte sur les prix d'achat ou, au contraire, au consommateur à travers une augmentation sensible des prix.
Cela dit, il est vrai que la France pratique, comme la plupart des pays du sud de l'Europe, des délais de paiement supérieurs à ceux des pays du nord de l'Europe, ...
M. Roland Courteau. Alors, acceptez cette proposition !
M. Renaud Dutreil, ministre. ... ce qui présente de nombreux inconvénients non seulement dans la distribution, mais également dans l'industrie, car les relations entre les grands donneurs d'ordre et leurs sous-traitants connaissent le même inconvénient : certaines entreprises sont obligées de supporter dans leur trésorerie des délais de paiement assez longs.
Ces situations ne sont pas saines mais, progressivement, grâce à une pression mesurée, graduée, la France rejoint le groupe des pays qui pratiquent, en Europe, des délais de paiement plus raisonnables.
M. Roland Courteau. C'est une occasion de faire un pas !
M. Renaud Dutreil, ministre. C'est ce rythme modéré qu'il faut suivre, sous peine de provoquer des bouleversements qui seraient insupportables tant pour les fournisseurs que pour les consommateurs.
M. le président. Monsieur Texier, l'amendement n° 146 rectifié est-il maintenu ?
M. Yannick Texier. Les explications de M. le rapporteur et de M. le ministre m'ont convaincu. Dans ces conditions, je retire mon amendement, monsieur le président. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Roland Courteau. Il n'est pas possible que vous ayez été convaincu !
M. Jean Desessard. Quelles explications ? Trouvez d'autres arguments, monsieur Texier ! Dites simplement que vous aimez le Gouvernement ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 146 rectifié est retiré.
Monsieur Raoul, j'ai cru comprendre tout à l'heure que vous vous étiez rallié à l'amendement n° 146 rectifié ?
M. Daniel Raoul. Je me suis rallié aux arguments présentés par M. Texier.
En vérité, les explications avancées par M. le ministre me poussent au contraire à maintenir mon amendement. La France ayant des délais de paiement supérieurs à la moyenne européenne, nous voulons corriger le tir et aider notre pays à se situer dans la moyenne.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Puisque M. Dussaut connaît bien les problèmes de la viticulture, je prendrai un exemple des effets pervers que pourrait avoir l'adoption d'un tel amendement.
Il est clair que les vignerons veulent également vendre leur production dans la grande distribution. Si les délais de paiement étaient contraints, il est clair que les distributeurs achèteraient le vin moins cher.
Il faut savoir ce que veulent les vignerons : préfèrent-ils stocker leur marchandise dans leur cave, ce qui a d'ailleurs un coût, en attendant de l'écouler à un bon prix, ou la vendre au plus vite, avec des délais de paiement raccourcis, quitte à en tirer un prix moins intéressant ?
La mesure que vous proposez peut avoir des effets pervers que vous ne mesurez pas bien, monsieur Dussaut. Vous prendrez vos responsabilités, mais je pense que vous devriez retirer votre amendement.
M. Roland Courteau. Les négociants ont toujours raison ! C'est la loi du plus fort !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. J'avais cru comprendre qu'il existait une harmonie entre la position du rapporteur et celle du ministre.
Mais, d'un côté, le ministre souligne que le délai de paiement est très court dans les autres pays européens et que la France doit tendre à suivre cet exemple. C'est en tout cas ce que souhaite le Gouvernement, mais celui-ci ne veut pas introduire une mesure coercitive parce que ce serait excessif. Et, d'un autre côté, le rapporteur indique qu'une telle mesure aurait des effets pervers. Qui faut-il croire ? Soit on s'achemine vers un raccourcissement des délais en suivant les autres pays européens, qui semblent s'en porter plutôt bien, soit ce raccourcissement a de redoutables effets pervers ! Mais où sont-ils donc cachés ? Soyez un peu plus cohérents !
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. M. le rapporteur a évoqué le secteur de la viticulture. Le vin étant un produit à rotation lente, j'évoquerai pour ma part l'exemple inverse des produits frais, qui, eux, ne peuvent évidemment pas être stockés longtemps, sauf à perdre leur caractère de produits frais.
Dans cette filière, les producteurs sont obligés de gérer dans le court terme, ce qui induit aujourd'hui un déséquilibre tout à fait aberrant. Si nous voulons rééquilibrer les relations entre les industries agroalimentaires et les grandes et moyennes surfaces, il faut apporter une réponse à la situation suivante : on achète à vingt et un jours alors que les charcuteries et les produits finis sont vendus dans un délai de trente-huit jours à quarante jours. De nombreuses industries agroalimentaires sont aujourd'hui confrontées à cette situation de déséquilibre majeur.
Cet amendement apporte un début de réponse pour ce qui concerne les produits frais, qui représentent une grande partie du secteur agroalimentaire, et ce n'est pas négligeable dès lors que l'on joue sur des marges de plus en plus restreintes.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Je voudrais soutenir la position du Gouvernement et du rapporteur, qui est très pertinente.
La situation française est, en effet, parfois jugée insupportable, notamment par les industriels de l'agroalimentaire. Mais, c'est la contrepartie d'une force et d'une faiblesse française.
Un jour, nous devrons traiter cette faiblesse française qui tient à l'absence de capitaux dans nos entreprises capitalistes : celles-ci n'ont pas assez de fonds propres, pas assez de trésorerie.
La force, c'est la liberté. A partir du moment où l'on se situe dans un système d'économie libre où chacun peut créer et développer son entreprise, rechercher de nouveaux clients et trouver d'autres atouts commerciaux pour s'imposer sur un marché, il est évident qu'une telle liberté trouve sa contrepartie dans la négociation contractuelle relative aux conditions de règlement. Certains font, en effet, des offres plus attractives pour pouvoir l'emporter !
Si l'on décide une fois pour toutes que l'économie est figée, il est possible de fixer des règles et de les imposer aux uns et aux autres ; mais si l'on considère que la liberté de s'installer, dans le commerce et dans l'industrie, comme distributeur ou producteur existe, il faut en accepter les contreparties. Autrement dit, il faut admettre le jeu de la négociation commerciale à l'occasion de laquelle on cherche à tirer un avantage d'une offre nouvelle.
M. François Marc. On va tuer les coopératives !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 298.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles additionnels après l'article 32
M. le président. L'amendement n° 299 rectifié, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 2-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Les organisations professionnelles concernées peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits constitutifs d'infractions aux prescriptions des titres I à IV du livre IV du code de commerce et portant un préjudice direct à l'un de leurs ressortissants. »
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Il s'agit d'un amendement lisse, de bon sens, sans effet pervers ; il devrait donc être adopté par cette assemblée ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
Les pratiques prohibées par les titres I à IV du livre IV du code de commerce sont principalement le fait de sociétés de taille importante, économiquement puissantes. Aussi les victimes directes de ces infractions ne peuvent-elles pas les poursuivre directement, de peur qu'il soit mis un terme à des relations commerciales essentielles à leur survie économique. Il s'agit bien d'une situation où le faible est confronté au fort ! En cas d'infraction, par peur de représailles futures, la victime ne porte pas plainte.
Conférer un droit d'ester en justice aux organes institutionnellement chargés de défendre les ressortissants victimes de ces pratiques permettrait d'assurer l'effectivité des prescriptions du livre IV du code de commerce, tout en évitant la mise en oeuvre inconsidérée de poursuites.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. La commission émet un avis défavorable pour les mêmes raisons que celles qui ont été exposées à propos de l'examen de l'amendement n° 132 rectifié ter.
En vertu de l'article L. 411-11 du code du travail, les organisations professionnelles peuvent déjà engager, au lieu et place d'un de leurs adhérents, une action en justice en matière de pratiques commerciales. Votre amendement, monsieur Desessard, est donc déjà satisfait, et il ne paraît pas nécessaire de préciser cette faculté dans le code de procédure pénale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Monsieur le rapporteur, je souhaiterais que vous m'apportiez une petite précision : la disposition que vous évoquez figure dans le code du travail ou dans le code de commerce ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Dans le code du travail.
M. Jean Desessard. Ne pensez-vous pas qu'il serait intéressant d'insérer également une telle mesure dans le code de commerce afin de tout clarifier ?
Allez, monsieur le rapporteur, un petit geste ! (Rires.)
M. Gérard Longuet. Un geste commercial ! (Sourires.)
M. Gérard Le Cam. Une petite ristourne ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 299 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président. L'amendement n° 433 rectifié bis, présenté par MM. Arthuis, Deneux et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 32, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 430-9 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsqu'une entreprise ou un groupe d'entreprises a, de manière répétée, usé de pratiques contraires au I de l'article L. 441-6-1, à l'article L. 442-2, aux I et II de l'article L. 442-6 ou à l'article L. 443-1, le ministre chargé de l'économie peut, après avis du Conseil de la concurrence ou à sa demande, et conjointement avec le ministre dont relève le secteur, enjoindre par arrêté à une entreprise ou un groupe d'entreprises de mettre fin dans un délai déterminé à tous accords ou actes qui ont contribué à sa puissance économique ou de céder une part de ses actifs ».
La parole est à M. Jean Arthuis.
M. Jean Arthuis. Cet amendement vise à accroître les moyens mis à la disposition du ministre de l'économie pour combattre les abus de position dominante.
L'article L. 430-9 du code de commerce a instauré un dispositif tendant à mettre un terme à des pratiques contestables, qui ressortissent clairement à des abus de position dominante. Toutefois, il est impossible d'exiger du ministère et de la direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes, la DGCCRF, une présence permanente sur le terrain, pour veiller au respect de ces injonctions.
L'amendement n° 433 rectifié bis tend à donner un supplément de moyens au conseil de la concurrence et au ministre de l'économie ou au ministre délégué à ce secteur afin que soit respecté l'esprit de la loi.
Les abus de position dominante sont manifestes. Je sais bien que nombreux sont les fournisseurs qui n'osent pas saisir le conseil de la concurrence, craignant d'être immédiatement exclus du jeu économique. Cependant, il est de la responsabilité de la DGCCRF et du Gouvernement de veiller à l'équilibre des forces en présence.
Monsieur le ministre, lorsque quatre enseignes exigent de leurs fournisseurs, sur le montant des approvisionnements vers les centres de distribution en France, l'acquittement d'une cotisation variant de 1 % à 2 % de leur chiffre d'affaires - cela représente, pour le moment du moins, 500 millions, voire 600 millions d'euros par an ! -, versée auprès d'une officine domiciliée en Suisse, ne sommes-nous pas ici en présence d'un abus de position dominante ?
Prenons maintenant l'exemple d'un groupe qui souhaiterait accroître le nombre d'ouvertures d'hypermarchés dans un grand pays émergent - hypothèse d'école, bien sûr ! - et qui, afin d'y parvenir, s'engagerait sans doute à s'approvisionner davantage dans ce pays. Peut-il décemment, d'un point de vue social et d'un point de vue commercial, exiger de ses fournisseurs en France, qui vont perdre progressivement leur position au profit des producteurs de ce pays émergent, qu'ils participent au financement de ceux qui vont, au moins partiellement, se substituer à eux ? Il s'agit bien là de pratiques que l'on peut manifestement qualifier d'abus de position dominante.
Lorsque je mesure la place qu'occupent, dans la presse quotidienne, les annonces de la grande distribution, il m'arrive également de penser que celle-ci se trouve aussi vis-à-vis des médias en situation d'abus de position dominante...
La vigilance des pouvoirs publics doit donc pouvoir s'exercer pleinement. Dans les cas extrêmes, il doit être possible d'exiger de ceux qui sont responsables de telles pratiques de se séparer d'une partie de leurs actifs.
L'équilibre du commerce ne réside pas seulement dans la régulation des mètres carrés, monsieur le ministre ! L'équilibre consiste à examiner d'un peu plus près le poids respectif des centrales d'achat. Ce sont elles qui exercent la plus violente pression sur les fournisseurs.
Telles sont les raisons pour lesquelles je souhaite que nous puissions donner aux pouvoirs publics les moyens de faire respecter leur autorité et de rétablir un équilibre plus harmonieux entre les forces en présence, afin qu'il y ait moins d'abus de position dominante.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. L'article L. 430-9 du code de commerce permet déjà au ministre chargé de l'économie et au ministre intéressé, à l'initiative du Conseil de la concurrence, d'exiger d'entreprises s'étant concentrées qu'elles reviennent sur les actes de concentration lorsqu'ils sont abusifs. Une telle mesure n'a, jusqu'à présent, presque jamais été mise en oeuvre. C'est pourquoi l'amendement n° 433 rectifié bis tend utilement à la renforcer.
Un tel amendement vise à attribuer aux ministres une nouvelle compétence : ces derniers, de leur propre initiative, pourraient exiger certaines mesures de la part des entreprises s'étant rendues coupables d'abus répétés, telles que la suppression des accords abusifs ou la cession d'une partie de leur capital. Des dispositions si contraignantes devraient inciter les entreprises concernées à respecter la réglementation figurant dans le code de commerce tel que modifié par le projet de loi.
La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable.
Cet amendement a, tout d'abord, ceci de particulier qu'il donne au ministre un pouvoir supérieur à celui du juge, alors même qu'il s'agit de prendre une sanction puisqu'il s'agit, ni plus ni moins, de démanteler une entreprise ! Cet amendement paraît donc contraire au principe de proportionnalité des sanctions par rapport aux comportements réprimés, qu'il s'agisse de comportements répétés ou non.
Alors que l'article actuel L. 430-9 vise à défaire les actes qui ont permis un abus de position dominante, l'amendement tend à permettre de démanteler des entreprises ayant commis des infractions pour lesquelles elles ont déjà été sanctionnées pénalement ou civilement : cela signifie bien que la pratique douteuse a fait l'objet d'une plainte, que le fournisseur lésé ait pris la décision de porter devant le juge l'infraction qu'il pressentait, ou que l'administration ait elle-même saisi la justice.
Par ailleurs, monsieur Arthuis, il y a effectivement des groupes de distribution implantés dans des pays émergents ; toutefois, leur façon de financer ces nouvelles implantations reste assez classique : ils font des profits, généralement en France, avec lesquels ils investissent dans ces pays émergents. C'est le cas de la plupart des entreprises françaises qui ont ouvert des établissements dans d'autres pays ; il n'y a rien là d'extraordinaire... Ce sont tout de même des mécanismes beaucoup plus simples que ceux que vous venez de décrire. Après tout, le fait de s'implanter dans des pays étrangers, sur de nouveaux marchés, n'a rien de répréhensible !
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.
M. Jean Arthuis. Monsieur le ministre, je ne voudrais viser aucun groupe en particulier. Toutefois, comment imaginez-vous que tel groupe puisse obtenir, chaque mois, une nouvelle autorisation d'ouverture d'un hypermarché ? C'est nécessairement parce qu'il s'oblige à faire du sourcing dans ce pays ! Et, de ce fait, il importe davantage de produits provenant de ce pays vers les marchés européens.
Je voudrais que l'on cesse de se payer de mots ! Y a-t-il une logique à faire payer par les consommateurs français, et finalement à faire payer aux producteurs français qui vont perdre leur activité, le développement qui s'opère dans des pays où l'on ne sera autorisé à vendre qu'à condition d'accroître le flux de produits exportés vers les marchés européens et notamment le marché français ?
Nous sommes ici au coeur d'un débat crucial, monsieur le ministre, et nous ne devons pas faire montre de candeur : dans la grande distribution, certaines pratiques s'apparentent à de véritables violences à l'égard des fournisseurs. Il est de notre devoir, dès lors que nous proclamons avec force et conviction que nous entendons gagner la bataille de la croissance et de l'emploi, de rechercher un meilleur équilibre dans les relations entre les uns et les autres.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Dutreil, ministre. On a un peu l'impression que, lorsqu'il s'agit de la grande distribution, tout est critiquable, mais que, lorsqu'il s'agit de l'industrie, tout est louable.
Le raisonnement que vous développez, monsieur le sénateur, pourrait tout à fait être transposé au secteur de l'automobile. Que font les constructeurs automobiles français qui s'implantent dans des pays émergents, sinon du sourcing ? Ils recourent soit à la main-d'oeuvre locale - ce qui semble assez logique lorsqu'ils produisent sur place - soit à des sous-traitants locaux. Personne ne déplore cette situation, qui profite d'ailleurs grandement à nos constructeurs automobiles : ils trouvent de nouveaux consommateurs et, dans le même temps, développent leurs propres installations, leurs centres de recherche et mobilisent leurs ingénieurs en France même, là où les projets sont conçus.
Nous devons autant que possible faire preuve d'une certaine neutralité vis-à-vis des stratégies des grands groupes français et non sombrer dans la facilité en faisant systématiquement de la grande distribution l'éternel mouton noir.
Nous sommes ici pour sanctionner des pratiques de la grande distribution lorsque c'est nécessaire. Faisons-le avec réserve et reconnaissons que notre pays a bénéficié du développement de ce modèle de commerce : si, aujourd'hui, un certain nombre de PME accèdent à des marchés nouveaux, c'est parce qu'elles sont entraînées dans le sillage de commerçants qui y sont déjà installés.
C'est tout particulièrement le cas en Chine. Monsieur le sénateur, peut-être avez-vous eu l'occasion d'y visiter une grande surface dont l'enseigne n'était pas sans vous rappeler une enseigne familière : vous y aurez alors découvert des produits français. Sans cette enseigne, ces produits, surtout s'ils proviennent de PME, n'auraient pu ni être exportés ni atteindre aussi facilement les consommateurs locaux !
En France, on désigne facilement le commerçant comme le coupable. Il l'est parfois et, dans ce cas-là, il faut le sanctionner. Pour autant, il ne faut pas faire deux poids deux mesures et approuver la stratégie des groupes français qui essaient de s'installer dans des pays émergents quand il s'agit de groupes industriels et la désapprouver lorsqu'il s'agit de la grande distribution.
Notre intérêt est d'avoir, dans tous les secteurs, des groupes français dynamiques, entreprenants, qui favorisent l'exportation des marques françaises, des produits français, y compris ceux des PME.
Monsieur le sénateur, vous le savez bien, nous n'exportons pas assez. C'est même notre problème ! Ne laissons pas les Français croire qu'il n'est pas bon qu'une entreprise française s'installe à l'étranger. Au contraire, aujourd'hui, notre économie doit développer tout ce qui favorise l'exportation des produits français.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 32.
Article 33
Après l'article L. 442-9 du code de commerce, il est inséré un article L. 442-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 442-10. - I. - Est nul le contrat par lequel un fournisseur s'engage envers tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers sur une offre de prix à l'issue d'enchères à distance, organisées notamment par voie électronique, lorsque les règles suivantes n'ont pas été respectées :
« 1° Préalablement aux enchères, l'acheteur ou la personne qui les organise pour son compte communique de façon transparente et non discriminatoire à l'ensemble des candidats admis à présenter une offre les éléments déterminants des produits ou des prestations de services qu'il entend acquérir, ses conditions et modalités d'achat, ses critères de sélection ainsi que les règles selon lesquelles les enchères vont se dérouler ;
« 2° Au cours de la période d'enchères, l'acheteur ou la personne qui les organise pour son compte n'a aucune relation directe ou indirecte avec les candidats ;
« 3° À l'issue de la période d'enchères, l'identité du candidat retenu est révélée à l'ensemble des autres candidats. Si l'auteur de l'offre sélectionnée est défaillant, nul n'est tenu de reprendre le marché au dernier prix ni à la dernière enchère.
« II. - L'acheteur ou la personne qui organise les enchères pour son compte s'assure de la réalité des offres présentées. Il effectue un enregistrement du déroulement des enchères qu'il conserve pendant un an et qu'il présente s'il est procédé à une enquête dans les conditions prévues au titre cinquième du livre quatrième du présent code.
« III. - Le fait de ne pas respecter les dispositions des I et II engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé. Les dispositions du III et du IV de l'article L. 442-6 sont applicables aux opérations visées au I et II. »
M. le président. Je suis saisi de seize amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 398, présenté par Mme Demessine, MM. Coquelle, Billout et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet article est particulièrement représentatif de la philosophie de ce projet de loi. Malgré son intitulé, celui-ci vise non à favoriser le développement des PME, mais à les intégrer dans le cadre du marché et de la libre concurrence.
L'objectif est simple : il s'agit encore une fois de réduire les droits des travailleurs en organisant un dumping social généralisé.
Comme pour les accords de coopération commerciale, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen pensent qu'il faudrait interdire purement et simplement ces pratiques plutôt que de tenter de les moraliser. En effet, de manière anodine, elles constituent pour les distributeurs une formidable opportunité de se fournir à moindre coût puisque le principe est celui du moins-disant, sans aucun autre critère de choix entre les différents fournisseurs.
Ainsi, on comprend mieux le succès des enchères inversées, qui tient aux avantages incontestables en termes de réduction du coût de l'approvisionnement : baisse des prix et diminution du coût des transactions.
Les enchères inversées suscitent pourtant des inquiétudes chez les fournisseurs - elles sont d'ailleurs partagées par les consommateurs - sur l'inévitable baisse de la qualité du produit, puisque la seule chose qui compte, c'est le prix.
Par ailleurs, les enchères inversées permettent la pratique du « lièvre » : un « faux » fournisseur, en accord avec le distributeur, lance les enchères à un prix excessivement bas pour faire diminuer le prix des offres des « vrais » fournisseurs.
Si ces pratiques se généralisent - l'Etat lui-même utiliserait cette méthode pour se fournir en papier ! -, ...
M. Gérard Longuet. C'est pour vendre son bois ! (Sourires.)
M. Gérard Le Cam. ...cela consacre effectivement la baisse des prix, mais surtout la baisse des revenus des fournisseurs, a fortiori des PME, qui n'ont pas les moyens matériels et financiers de faire face à une concurrence aussi rude. Une nouvelle fois, il s'agit d'un nivellement par le bas !
Ainsi, ces pratiques font peser un risque important sur la survie même des PME. De plus, contrairement à la négociation classique, le procédé de l'enchère électronique inversée empêche de négocier une contrepartie au faible montant des prix concédés.
Les sénateurs du groupe CRC émettent en outre de sérieux doutes sur les conséquences de ces pratiques en termes de droit du travail. Si les prix des fournisseurs baissent, il leur faudra évidemment compenser ce manque à gagner quelque part. Or, nous en avons l'habitude, ce sont les salariés qui en font les frais par la déréglementation du travail !
La généralisation de ces pratiques fait craindre une nouvelle fois une réduction des garanties sociales. Ainsi, on pourrait très bien imaginer que la pratique des enchères inversées s'étende aux embauches : serait engagé serait celui qui concéderait le plus sur son salaire, sur son temps de travail, sur ses droits sociaux !
La mise en concurrence comme modèle pour toutes les relations humaines ne nous satisfait pas, car elle porte en elle les conditions de tous les reculs économiques et sociaux.
Pour toutes ces raisons, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen s'opposent aux enchères inversées et vous proposent d'adopter cet amendement de suppression.
M. le président. L'amendement n° 153 rectifié, présenté par MM. de Richemont et Gélard, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code de commerce, remplacer les mots :
lorsque les
par les mots :
lorsque l'une au moins des
La parole est à M. Patrice Gélard.
M. Patrice Gélard. Il s'agit d'un amendement de précision.
M. le président. L'amendement n° 303, présenté par MM. Marc, Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code de commerce, insérer un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« ... ° Préalablement aux enchères, l'acheteur ou la personne qui les organise pour son compte communique de façon transparente le nom des enchérisseurs ; »
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. L'article 33 apporte une réponse utile à une situation qui a récemment posé des difficultés à de nombreuses PME. Certains responsables de PME m'ont fait part de leur état d'esprit face à ces enchères inversées : ils évoquent l'image de la diligence qui s'engage dans un canyon sans savoir ce qui l'attend puisqu'elle ignore tout des forces en présence !
Cet amendement vise à améliorer les dispositions de l'article 33 en prévoyant une plus grande transparence quant à l'identité des enchérisseurs.
En effet, les enchères inversées sont présentées par leurs promoteurs et leurs organisateurs comme le mécanisme par excellence propre à faire jouer la concurrence, en particulier parce que les participants ignorent l'identité de l'ensemble des compétiteurs. La rétention d'identité semble donc, de prime abord, constituer un avantage, dans la mesure où les enchérisseurs sont placés sur un pied d'égalité.
Mais ce mécanisme peut provoquer des dérives qui faussent le jeu de la libre concurrence des enchères. S'assurer de la fiabilité des fournisseurs est par conséquent non seulement légitime - cela renforce le libre jeu concurrentiel -, mais opportun : le refus de contracter avec n'importe quel offreur reste la manifestation de la liberté contractuelle du demandeur de biens ou de services, dont le libre choix contribue à la vitalité de la concurrence.
Par ailleurs, dans le cas précis d'enchères inversées réalisées dans le secteur agroalimentaire, où le raisonnement économique s'applique à la chaîne du vivant, le fait de connaître son interlocuteur constitue un élément important dans l'optique du renforcement de la sécurité alimentaire, qui demeure une préoccupation forte de nos concitoyens depuis les crises avicole et bovine que nous avons connues ces dernières années.
Afin que les règles traditionnelles de la concurrence s'appliquent véritablement aux nouvelles formes de négociation que sont les enchères inversées - comme c'est le cas pour n'importe quel autre type de marché -, il est nécessaire de faire connaître de manière transparente l'ensemble des enchérisseurs qui y participeront.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 112 rectifié est présenté par MM. Barraux, César, Mortemousque, Revet, Texier, Murat et Vasselle.
L'amendement n° 247 rectifié est présenté par MM. Biwer, Soulage, Deneux et les membres du groupe Union centriste - UDF.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans le deuxième alinéa (1°) du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code de commerce, après les mots :
de sélection
insérer le mot :
détaillés
La parole est à M. Yannick Texier.
M. Yannick Texier. Cet amendement vise à apporter quelques éléments de précision sur les critères de sélection : celui qui fait appel aux enchères devra préciser par écrit ses critères de choix.
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, pour présenter l'amendement n° 247 rectifié.
M. Claude Biwer. L'article 33 a pour objet d'encadrer la pratique des enchères électroniques inversées : il en propose une définition, en régit le déroulement et prévoit la mise en jeu de la responsabilité civile de la personne ne respectant pas la réglementation.
Le premier alinéa du I de cet article établit notamment la nullité de principe de tout contrat d'enchères à distance, réalisé notamment par voie électronique, passé entre un fournisseur et un producteur - commerçant, industriel ou toute personne immatriculée au répertoire des métiers - ne respectant pas certaines conditions.
Cet amendement vise à introduire une condition supplémentaire : la partie qui fait appel aux enchères est tenue de préciser de façon détaillée les critères de sélection qui sont les siens.
Cette mesure devrait permettre de mieux protéger les PME répondant aux enchères puisqu'elles disposeront d'un cahier des charges précis avant de soumissionner à l'offre.
M. le président. L'amendement n° 441, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Compléter le troisième alinéa (2°) du I du texte proposé par cet article pour insérer un article L. 442-10 dans le code de commerce par le membre de phrase suivant :
au titre de cette négociation sauf, le cas échéant, pour résoudre les problèmes techniques survenant lors du déroulement des enchères
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Le projet de loi interdit toute communication entre l'organisateur des enchères et les entreprises candidates. Or une telle communication peut être nécessaire ou inévitable dans deux cas : d'une part, lorsqu'une partie du personnel de l'organisateur des enchères est détachée auprès de l'une des entreprises candidates - c'est le cas des constructeurs automobiles, ainsi que M. Texier le sait (Sourires) - ; d'autre part, lorsque surviennent des problèmes techniques.
Cet amendement tend à introduire ces deux dérogations.
M. le président. L'amendement n° 442, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
À la fin de la première phrase du dernier alinéa (3°) du I du texte proposé par cet article pour insérer un article L. 442-10 dans le code de commerce, remplacer les mots :
à l'ensemble des autres candidats
par les mots :
au candidat qui, ayant participé à l'enchère, en fait la demande
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Le projet de loi prévoit que l'identité du candidat retenu à l'issue des enchères est communiquée à l'ensemble des autres candidats. Cette mesure se heurte au principe de confidentialité en matière de négociation commerciale. Elle risque, de surcroît, de stigmatiser le candidat retenu auprès de ceux qui ont été évincés.
Aussi cet amendement vise-t-il à réserver aux seuls candidats qui en font expressément la demande le droit de connaître l'identité du candidat retenu.
M. le président. L'amendement n° 248 rectifié bis, présenté par MM. Biwer, Soulage, Deneux et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Remplacer les II et III du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code de commerce par trois paragraphes ainsi rédigés :
« II. Un tiers certificateur s'assure, dans des conditions fixées par décret, de la réalité des offres présentées lors de ces enchères qui doivent avoir pour objet de déboucher sur un contrat. Il effectue un enregistrement du déroulement des enchères qu'il conserve pendant un an. Ce rapport est communiqué à toute personne ayant participé aux enchères. Il est présenté s'il est procédé à une enquête dans les conditions prévues au titre cinquième du livre quatrième du présent code.
« III. Les enchères à distance inversées, organisées par voie électronique, sont interdites pour les produits agricoles bruts non marketés, visés au premier alinéa de l'article L. 442-2-1 ci-dessus.
« IV. Le fait de ne pas respecter les dispositions des I, II et III engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé. Les dispositions du III et du IV de l'article L. 442-6 sont applicables aux opérations visées au I, II et III ».
La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Cet amendement tend à préciser qu'un tiers certificateur doit veiller au bon déroulement des enchères et s'assurer de leur réalité et de leur fiabilité. Un décret précisera le fonctionnement de ce dispositif. Ce tiers devrait être rémunéré par celui qui déclenche l'offre et par ceux qui participent à l'enchère.
En outre, nous proposons de préciser que sont exclus du champ des enchères inversées les produits agricoles périssables ou issus de cycle court, afin de ne pas alimenter des spirales de prix à la baisse qui détériorent profondément la production agricole et menacent sa pérennité en France.
M. le président. L'amendement n° 113 rectifié, présenté par MM. Barraux, César, Mortemousque, Revet, Houel, Texier, Murat et Vasselle, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code de commerce :
« II. - Un tiers certificateur s'assure, dans des conditions fixées par décret, de la réalité des offres présentées lors de ces enchères qui doivent avoir pour objet de déboucher sur un contrat. Il effectue un enregistrement du déroulement des enchères qu'il conserve pendant un an. Ce rapport est communiqué à toute personne ayant participé aux enchères. Il est présenté s'il est procédé à une enquête dans les conditions prévues au titre cinquième du livre quatrième du présent code. »
La parole est à M. Yannick Texier.
M. Yannick Texier. Cet amendement répond pour une large part aux mêmes préoccupations que celles que vient d'exprimer M. Biwer.
M. le président. L'amendement n° 304, présenté par MM. Marc, Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code du commerce :
« II - Un tiers certificateur est chargé d'assurer le bon déroulement des enchères et le respect des règles définies au paragraphe I.
« Il s'assure, dans les conditions fixées par décret, de la réalité des offres présentées lors de ces enchères qui doivent avoir pour objet de déboucher sur un contrat.
« Il effectue un enregistrement du déroulement des enchères qu'il conserve pendant un an. Ce rapport est communiqué à toute personne ayant participé aux enchères. Il est présenté s'il est procédé à une enquête dans les conditions prévues au titre cinquième du livre quatrième du présent code. »
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Le développement de la pratique des enchères inversées, en l'absence d'un cadre législatif et réglementaire établi, a eu des effets dramatiques sur de nombreux fournisseurs de la distribution. Ces derniers, par crainte de perdre un client, ont été contraints d'accepter des baisses de prix parfois déraisonnables.
Le projet de loi tend certes, à juste titre, moraliser ces nouvelles formes d'enchères. Cependant, les règles qu'il prévoit seront difficilement contrôlables compte tenu de la nature particulière de ces enchères. En particulier, leur déroulement pourra se trouver faussé par des pratiques émanant de l'initiateur ou des participants.
L'article L. 321-3 du code de commerce introduit une distinction entre, d'une part, les opérations de courtage aux enchères, caractérisées par l'absence d'adjudication et d'intervention d'un tiers dans la conclusion de la vente et, d'autre part, les ventes aux enchères publiques qui se réalisent par l'intermédiaire d'un mandataire.
Il s'agit ici de considérer que, comme dans le cas des enchères publiques, on doit pouvoir disposer d'un tiers pour s'assurer de la régularité du dispositif.
Il convient, par conséquent, d'ouvrir à adjudication par un tiers le processus d'enchères inversées, surtout lorsqu'elles se déroulent par voie électronique, parce qu'il existe une quantité non négligeable de risques pouvant fausser une enchère : prolongement de la durée de l'enchère, introduction de « lièvres » pour fausser le jeu de la concurrence, instrumentalisation d'un fournisseur, etc.
Il est donc à nos yeux primordial, au regard de la loyauté des pourparlers, que les participants à l'enchère soient en mesure d'honorer l'appel d'offres et qu'ils aient l'intention de conclure un contrat avec le demandeur.
Ce n'est pas une contrainte pesant sur le processus de marché dans la mesure où la plupart des transactions effectuées au moyen d'enchères inversées sont réalisées sur des premiers prix, particulièrement sur des produits frais à flux « poussés », qui seront de toute façon écoulés, même à bas prix.
Selon les informations récoltées auprès de participants à ces enchères, appartenant notamment au secteur des industries agroalimentaires, ils ont trop souvent le sentiment que les enchères en question relèvent plus du bluff ou d'une mascarade que d'un processus objectif de formation du prix par le mieux-disant.
Afin d'assurer une plus grande transparence, nous proposons de rendre obligatoire le recours à une tierce personne, qui sera garante du bon déroulement des enchères.
M. le président. L'amendement n° 98 rectifié ter, présenté par MM. Mortemousque, César, Barraux, Revet, Texier, Murat et Vasselle, est ainsi libellé :
I. - Après le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code du commerce, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« II bis - Les enchères à distance inversées, organisées par voie électronique, sont interdites pour les produits agricoles bruts non marketés visés au premier alinéa de l'article L. 441-2-1.
II. - En conséquence, dans le III du même texte, remplacer deux fois les mots :
I et II
par les mots :
I, II et II bis
La parole est à M. Yannick Texier.
M. Yannick Texier. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 98 rectifié ter est retiré.
L'amendement n° 302, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I - Après le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code de commerce, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« II ter - Les enchères à distance, organisées par voie électronique, sont interdites pour les produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production, d'animaux vifs, de carcasses ou pour les produits issus de l'aquaculture, figurant sur une liste établie par décret.
II - En conséquence, dans le III du même texte, remplacer deux fois les mots :
I et II
par les mots :
I, II et II ter
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, dans un souci de cohérence, je souhaite rectifier cet amendement en remplaçant les mots : « à distance » par le mot : « inversées » et en supprimant les mots : « organisées par voie électronique, ».
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 302 rectifié, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, et ainsi libellé :
I - Après le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code de commerce, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« II ter - Les enchères inversées sont interdites pour les produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production, d'animaux vifs, de carcasses ou pour les produits issus de l'aquaculture, figurant sur une liste établie par décret.
II - En conséquence, dans le III du même texte, remplacer deux fois les mots :
I et II
par les mots :
I, II et II ter
Veuillez poursuivre, monsieur Raoul.
M. Daniel Raoul. Comme vient de l'expliquer notre collègue François Marc, les enchères inversées sont fondées sur une logique de course sans fin à la baisse des prix. Il n'est donc pas envisageable de cautionner un dispositif où les producteurs agricoles seraient contraints de baisser indéfiniment leurs prix, alors qu'ils vendent déjà très souvent leurs produits en dessous de leurs coûts de production. On pourrait ici parler du seuil de revente à perte sur ces produits périssables.
Par ailleurs, une baisse perpétuelle des prix est incompatible, à terme, avec la qualité et la sécurité des aliments.
Une telle baisse de prix remet également en cause le revenu des producteurs. Elle contribue à accroître plus encore la concentration du secteur agricole, et conduit donc à la disparition des petites et moyennes exploitations.
C'est la raison pour laquelle nous proposons d'interdire ce type d'enchères pour les produits agricoles périssables.
M. le président. L'amendement n° 399, présenté par Mme Demessine, MM. Coquelle, Billout et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Remplacer le III du texte proposé par cet article pour insérer un article L. 422-10 dans le code de commerce par deux paragraphes ainsi rédigés :
« III - Les enchères à distance, organisées par voie électronique, sont interdites pour les produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production, d'animaux vifs, de carcasses ou pour les produits issus de l'aquaculture, figurant sur une liste établie par décret. Sont également interdites les enchères à distance portant sur les prestations de service de travail temporaire.
« IV - Le fait de ne pas respecter les dispositions des I, II et III engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé. Les dispositions du III et du IV de l'article L. 442-6 sont applicables aux opérations visées au I, II et III ».
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Je constate que nous sommes nombreux à intervenir sur cette procédure scandaleuse que sont les enchères inversées dans le secteur agricole.
Par cet amendement, nous souhaitons interdire les enchères inversées pour les produits agricoles périssables ou issus du cycle court de production, d'animaux vifs, de carcasses, pour les produits issus de l'aquaculture, mais aussi pour les prestations de service de travail temporaire. En effet, les enchères inversées sont fondées sur une logique de course sans fin à la baisse des prix.
Ce système pernicieux a même fait l'objet de dérives en Allemagne, où il a été transposé en matière d'emploi : est embauché celui qui accepte le salaire le moins élevé.
Il n'est pas envisageable de cautionner un dispositif où les producteurs agricoles seraient contraints de baisser indéfiniment leurs prix, alors qu'ils vendent déjà en majorité leurs produits en dessous de leurs coûts de production.
Cette pratique des enchères inversées remet aussi directement en cause la définition du seuil de revente à perte. Celui-ci est sans arrêt tiré vers le bas.
Par ailleurs, une baisse perpétuelle des prix est incompatible, à terme, avec la qualité et la sécurité des aliments.
Enfin, si les prix des produits vendus par les agriculteurs baissent tandis que ceux-ci sont confrontés à des charges croissantes en matière sociale et environnementale, la survie des exploitations agricoles françaises est en jeu et laisse craindre une délocalisation de la production agricole hors de France ; même si celle-ci paraît difficile, on l'a déjà vu pour les volailles de chair, notamment. Malheureusement, nous craignons fortement, en particulier dans une région comme la Bretagne, que d'autres productions phares, telle la production porcine, ne suivent cette même logique.
M. le président. L'amendement n° 301, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
A- Après le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code de commerce, insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« II bis - Les enchères salariales à distance, organisées par voie électronique, sont interdites.
B- En conséquence, dans le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code de commerce, remplacer deux fois les mots :
I et II
par les mots :
I, II et II bis
La parole est à M. Bernard Dussaut.
M. Bernard Dussaut. Cet amendement a pour objet d'interdire les enchères inversées salariales, qui n'ont d'autre but que de mettre des chômeurs directement en concurrence.
Ce type de pratique créerait, dans un contexte de chômage massif, un déséquilibre du rapport de force au profit de l'employeur.
Un tel dispositif d'enchères par Internet aurait pour première cible les emplois peu ou non qualifiés. Il risquerait de tirer encore plus vers le bas des rémunérations déjà faibles et de générer ainsi un mécanisme de trappe à bas salaires. Ce n'est pas bon pour la consommation !
Rien ne permet de croire que de telles pratiques respecteraient les dispositions relatives au salaire minimum qui existe en France. Elles pourraient par ailleurs contrevenir au principe même « à travail égal, salaire égal ».
Le risque d'une spirale à la baisse des salaires n'est pas négligeable. Celle-ci aurait, en termes de croissance, des conséquences négatives et elle contribuerait par ailleurs à l'éclatement de la cohésion de notre société par le biais d'un creusement des inégalités.
A cela s'ajoute le fait que, sur le plan strictement moral, de telles pratiques sont contestables. Nous considérons donc qu'il est du ressort du politique de les interdire tant sur le plan national que sur le plan européen.
M. le président. L'amendement n° 369, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Après le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code de commerce, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« II bis - Un tiers certificateur doit être désigné par l'acheteur ou la personne qui organise les enchères en vue d'en assurer le bon déroulement, le respect des règles ci-dessus et leur contrôle. ».
L'amendement n° 370, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Dans le III du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code de commerce, remplacer deux fois les mots :
I et II
par les mots :
I, II et II bis
Ces deux amendements ne sont pas soutenus.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements autres que ceux qu'elle a présentés ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. L'amendement n° 398 tend à restreindre la pratique des enchères électroniques inversées en ce qu'elle favoriserait des prix abusivement bas. Pour ce faire, il prévoit la suppression de l'article 33 du projet de loi. Or c'est justement en adoptant cet article 33, qui encadre la pratique des enchères électroniques inversées, qu'il sera possible de les réguler et d'en prévenir les excès.
Cet amendement va donc à l'encontre de la volonté même de ses auteurs. Aussi, je leur demande de bien vouloir le retirer, d'autant qu'ils ont présenté un amendement tendant à modifier l'article : si l'article 33 est supprimé, cet amendement n'aura plus objet.
M. Gérard Le Cam. Il s'agit d'un amendement de repli !
M. Gérard Cornu, rapporteur. L'amendement n° 153 rectifié fait bien ressortir tout le talent de M. Gélard : cette précision était nécessaire pour que le texte puisse s'appliquer. J'émets donc un avis favorable sur cet amendement.
Monsieur Marc, les spécificités de la négociation commerciale n'obligent en rien un acheteur à communiquer à chacun de ses cocontractants potentiels l'identité des autres candidats. Cela vaut de façon générale comme en matière d'enchères. On pourrait même dire a fortiori en matière d'enchères : le principe de base des enchères veut que chaque candidat surenchérisse sans connaître l'identité des autres candidats.
Au surplus, la loyauté du déroulement des enchères est assurée par diverses dispositions prévues par le projet de loi, dont celle qui permet aux candidats non retenus de connaître l'identité du candidat finalement choisi.
Enfin, la divulgation de l'identité de chaque candidat serait un moyen pour ceux-ci de s'entendre sur le déroulement de l'enchère, ce qui est strictement prohibé au titre de l'article L. 443-2 du code de commerce.
La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 303.
Les amendements identiques n°s 112 rectifié et 247 rectifié précisent utilement les obligations auxquelles est soumis l'organisateur d'une enchère inversée et apportent davantage de visibilité aux entreprises y prenant part. J'y suis donc naturellement tout à fait favorable.
L'amendement n° 248 rectifié bis prévoit, d'une part, l'exclusion des produits agricoles du mécanisme des enchères inversées et, d'autre part, la présence d'un tiers certificateur.
Il est vrai que l'application aux produits agricoles du système d'enchères inversées organisées par voie électronique risquerait d'avoir des effets très néfastes sur l'équilibre économique des producteurs concernés. Ceux-ci seraient en effet entraînés dans une guerre des prix sur des produits pour lesquels les marges sont déjà le plus souvent très faibles. Il semble donc opportun de les préserver d'une telle procédure d'achat.
Par ailleurs, l'idée de garantir la loyauté et le bon déroulement des enchères inversées par la présence d'un tiers certificateur semble a priori judicieuse. Les industriels auditionnés lors de l'examen du texte ont d'ailleurs précisé qu'ils étaient prêts - j'y insiste - à financer l'intervention de ce tiers.
Cependant, l'application concrète de ce système suscite des interrogations. Qui désignerait ce tiers et comment son indépendance serait-elle garantie ? Où serait-il placé matériellement ?
Par conséquent, sur cet amendement, la commission a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat.
Pour les mêmes raisons, la commission s'en remet aussi à la sagesse du Sénat sur les amendements nos 113 rectifié et 304, qui concernent également la présence d'un tiers certificateur.
L'amendement n° 302 rectifié, de même que l'amendement n° 399, est partiellement satisfait par l'amendement n° 248 rectifié bis.
Enfin, la commission demande le retrait de l'amendement n°301, car l'objet du présent projet de loi est sans rapport direct avec les enchères salariales, qui relèvent du droit du travail et du code correspondant. A défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Je formulerai tout d'abord une observation générale.
Je comprends le souci d'accorder des garanties supplémentaires aux entreprises qui se portent candidates à des enchères inversées organisées par voie électronique. Mais je voudrais mettre en garde contre cette perpétuelle tentation française d'instaurer des législations tellement lourdes qu'elles finissent par créer les effets inverses à ceux qui étaient escomptés lorsqu'elles ont été adoptées.
Nous voulons encadrer les enchères inversées, mais nous ne voulons pas transposer à des transactions privées les règles du code des marchés publics. Il ne faudrait pas soumettre dans notre pays les enchères inversées à des contraintes si lourdes et à des règles si compliquées que toutes les enchères inversées pratiquées par des Français se dérouleraient à l'étranger avec des opérateurs étrangers. Ce qu'il faut, c'est que les enchères inversées soient encadrées de telle manière qu'elles contribuent au développement de notre économie.
Sachons, ensemble, garder les pieds sur terre et mettre en place des règles acceptables et réalistes !
Nous avons vu, avec la loi Galland, en 1997, ce qu'il en coûtait de sur-administrer : si des avocats y ont trouvé des occasions de déployer tout leur talent, d'autres y ont vu des opportunités de fraude et d'innombrables infractions ont été commises.
Ce qui a inspiré le présent texte, c'est le pragmatisme et la volonté de moraliser des pratiques qui, jusqu'à présent, ne faisaient l'objet d'aucune législation.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement sera défavorable à un certain nombre d'amendements, qui lui paraissent aller dans le sens d'une sur-administration du système des enchères inversées.
Je précise au passage que la pratique des enchères inversées, loin d'être une innovation liée aux nouvelles technologies, est au contraire très ancienne : elle remonte au moins à la création des marchés au cadran du Sud-Ouest, que connaissent bien les agriculteurs. Cette pratique a simplement, grâce à Internet, trouvé un nouvel essor.
Le Gouvernement est défavorable l'amendement n° 398, pour les raisons qui ont été évoquées par M. le rapporteur.
Il est, en revanche, favorable à l'amendement n° 153 rectifié.
Il est défavorable à l'amendement n° 303. Il ne faut pas perdre de vue que, à l'heure actuelle, 7 millions de Français naviguent sur Internet et que toutes les dispositions que nous allons mettre en oeuvre pourraient très bien s'appliquer à eux.
Prenons l'exemple d'un restaurateur souhaitant commander sur Internet sept longes de porc : pour cette simple commande, aura-t-il vraiment besoin d'un tiers certificateur ? Devra-t-il vraiment communiquer l'identité de tous ceux à qui il va avoir affaire et mobiliser ainsi toute une administration ?
Essayons de nous mettre à la place de ceux qui vont être concernés par ces dispositions législatives !
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 112 rectifié ainsi qu'à l'amendement n° 247 rectifié.
Il est défavorable aux amendements nos 441 et 442, pour toutes les raisons que j'ai évoquées. Nous sommes là assez proches du système des marchés publics.
Il est également défavorable à l'amendement n° 248 rectifié bis, qui est, d'une manière générale, très radical.
J'y ai fait allusion, la présence d'un tiers certificateur me semble relever d'une procédure excessivement lourde s'agissant des enchères inversées.
En ce qui concerne la proposition d'interdire ces enchères pour les produits agricoles périssables, je rappellerai que la modernisation des marchés, en Europe et ailleurs, passe notamment par le développement d'enchères par voie électronique. Il est important que la France ne passe pas à côté de cette mutation, sauf à rester à l'écart des grands marchés internationaux, ce qui n'est absolument pas l'intérêt de notre agriculture.
Permettez-moi de rappeler aussi que, grâce à l'article L. 441-2-1 du code de commerce, nouvellement introduit par la loi sur le développement des territoires ruraux, en date du 23 février 2005, les producteurs de produits agricoles périssables sont désormais protégés contre le risque d'une baisse des prix, du fait, notamment, de la possibilité laissée à l'interprofession d'adopter des contrats-types, qui s'imposent alors dans les rapports commerciaux avec la grande distribution, s'agissant en particulier des modalités de fixation des prix. Les éventuels effets négatifs des enchères inversées sur les prix seront, de ce fait, neutralisés.
Le Gouvernement est, de même, défavorable aux amendements nos 113 rectifié, 304, 302 rectifié, 399 et 301.
M. le président. Monsieur Le Cam, l'amendement n° 398 est-il maintenu ?
M. Gérard Le Cam. J'ai bien compris l'intervention de M. le rapporteur. Il est vrai qu'en supprimant cet article, on ne supprime pas le danger ! Je serais tenté de proposer que les enchères électroniques inversées sont interdites en France et, à l'étranger, par procuration, pour les entreprises françaises !
M. Gérard Le Cam. Vous pouvez bien faire de l'ironie, monsieur le ministre, mais ce qui se passe à l'heure actuelle est proprement scandaleux. C'est l'OMC qu'il faudrait réformer complètement !
M. Gérard Le Cam. On vit dans un monde de fous, monsieur le ministre ! Nous allons tous crever de ce système ! C'est cela qui est en train de se produire, et vous le soutenez !
M. le président. J'ai cru comprendre que l'amendement était maintenu. (Sourires.)
Je mets aux voix l'amendement n° 398.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 112 rectifié et 247 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 248 rectifié bis.
M. Daniel Raoul. Je me permettrai de demander à M. Biwer s'il veut bien rectifier cet amendement de manière que, dans le paragraphe III, les mots « organisées par voie électronique » soient supprimés, ce qui me permettrait de retirer mon amendement n° 302 rectifié.
M. le président. Monsieur Biwer, acceptez-vous la rectification qui vous est proposée ?
M. Claude Biwer. Oui, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 248 rectifié ter.
La parole est à M. le président de la commission
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Je demande une suspension de séance de quelques minutes, afin que la commission puisse examiner cet amendement ainsi rectifié.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures quarante, est reprise à vingt-trois heures cinquante.)
M. Claude Biwer. Monsieur le président, sensible aux arguments qu'a fait valoir la commission au cours de la réunion qu'elle vient de tenir, je souhaite rectifier une nouvelle fois mon amendement pour revenir à sa version précédente.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 248 rectifié quater, présenté par MM. Biwer, Soulage, Deneux et les membres du groupe Union centriste - UDF, qui est ainsi libellé :
Remplacer les II et III du texte proposé par cet article pour l'article L. 442-10 du code de commerce par trois paragraphes ainsi rédigés :
« II. - Un tiers certificateur s'assure, dans des conditions fixées par décret, de la réalité des offres présentées lors de ces enchères qui doivent avoir pour objet de déboucher sur un contrat. Il effectue un enregistrement du déroulement des enchères qu'il conserve pendant un an. Ce rapport est communiqué à toute personne ayant participé aux enchères. Il est présenté s'il est procédé à une enquête dans les conditions prévues au titre cinquième du livre quatrième du présent code.
« III. - Les enchères à distance inversées, organisées par voie électronique, sont interdites pour les produits agricoles bruts non marketés, visés au premier alinéa de l'article L. 442-2-1 ci-dessus.
« IV. - Le fait de ne pas respecter les dispositions des I, II et III engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé. Les dispositions du III et du IV de l'article L. 442-6 sont applicables aux opérations visées au I, II et III. »
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés sur cette rédaction.
La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 248 rectifié quater.
M. Daniel Raoul. Je m'abstiendrai, par cohérence avec la position que j'ai précédemment prise sur la question de la « voie électronique ». Cela dit, l'objectif visé est atteint par cet amendement.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 113 rectifié, 304, 302 rectifié, 399 et 301 n'ont plus d'objet.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques. Je tiens à préciser, monsieur le président, que plusieurs des amendements qui viennent de perdre leur objet sont en réalité satisfaits du fait de l'adoption de l'amendement n° 248 rectifié quater.
M. le président. Je mets aux voix l'article 33, modifié.
(L'article 33 est adopté.)
Article additionnel après l'article 33
M. le président. L'amendement n° 373 rectifié bis, présenté par M. Courteau, Mme Alquier, MM. Besson, Courrière, Dussaut, Journet, Madrelle, Pastor, Piras, Rouvière, Sutour, Vézinhet, Raoul, Domeizel et Miquel, est ainsi libellé :
Après l'article 33, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le dernier alinéa de l'article L. 441-3 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les boissons alcooliques passibles des droits de circulation prévus à l'article 438 du code général des impôts, un acompte représentant au moins 15 % du montant du prix de la commande doit être réglé par l'acheteur au vendeur ou à son subrogé dans un délai de dix jours francs suivant la signature du contrat. »
II. - Dans le cinquième alinéa (4°) de l'article L. 443-1 du code de commerce, les mots : « soixante-quinze jours » sont remplacés par les mots : « cinquante jours ».
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Cet amendement traite des conditions de paiement qui sont faites, notamment, aux producteurs de vin par les négociants.
Je souhaite en effet évoquer devant le Sénat deux points qui posent problème : le premier concerne les délais de paiement que subissent les viticulteurs, de manière parfois exagérément longue, et qui ajoutent aux graves difficultés que rencontre actuellement notre viticulture ; le second est relatif aux pratiques de certains négociants qui, entre la conclusion du contrat et la date de livraison du produit, imposent aux vignerons des réductions de prix, voire résilient unilatéralement les contrats au prétexte que, dans l'intervalle, les prix du marché ont sensiblement baissé.
Concernant les délais de paiement, je rappelle que, voilà quelques années, j'avais ici même défendu un amendement portant sur l'article L. 443-1 du code de commerce - la Haute Assemblée l'avait adopté à l'unanimité - et visant, dans le cadre des transactions portant notamment sur le vin, à fixer des délais de paiement qui ne pouvaient être supérieurs à 30 jours après la fin du mois de livraison, ce qui, en moyenne, pouvait correspondre à un délai maximal d'environ 40 à 60 jours.
Cependant, au cours de la navette parlementaire, nous avions abouti à une rédaction modifiée qui précisait que, à peine d'amende - elle s'élève à 75 000 euros aujourd'hui -, le délai de paiement ne pouvait être supérieur à 75 jours. Même ainsi, l'avancée était réelle, surtout si l'on se rappelle que, à l'époque, les délais pouvaient être de 90 jours, voire dépasser les 120 jours : admettons-le, ce n'était pas tolérable !
Aujourd'hui, dans le contexte de crise de la viticulture que nous connaissons et face aux difficultés que rencontrent les vignerons, nous proposons que, sauf accord interprofessionnel contraire, le délai maximum de paiement soit fixé à 50 jours à compter du jour de livraison, et non plus à 75, ce qui représente malgré tout un délai supérieur à un mois et demi.
Par ailleurs, et c'est le second point de notre amendement, nous souhaitons qu'il soit mis fin aux pratiques de certains négociants qui, je le rappelais à l'instant, ne respectent pas les engagements pris lors de la conclusion du contrat, en matière de prix notamment.
Je viens d'expliquer que sont parfois imposées aux vignerons des réductions de prix auxquelles ces derniers ne peuvent que difficilement se soustraire, et chacun ici en comprendra les raisons. Mais il y a pis : comme dans le cas précédent, au prétexte qu'entre la conclusion du contrat et la date de livraison les cours auraient baissé, certains négociants résilient les contrats, n'hésitant pas à laisser les producteurs dans la situation que l'on imagine : cela entraîne en effet une lourde perte financière.
Voilà pourquoi nous proposons qu'un acompte représentant au moins 15 % du montant du prix de la commande soit réglé par l'acheteur au vendeur dans un délai de dix jours francs suivant la signature du contrat.
Chacun l'aura bien compris, il s'agit de protéger nos producteurs contre de telles pratiques, particulièrement condamnables. En fait, l'objectif est de fidéliser les parties contractantes et d'inciter ainsi certains négociants à honorer, c'est la moindre des choses, leurs engagements.
Mes chers collègues, je ne vois pas d'autre moyen susceptible de mettre un terme à de tels comportements ou revirements. Je réponds par avance à ceux qui seraient tentés de conseiller aux victimes de ces pratiques d'engager une procédure judiciaire qu'une telle démarche est, à l'évidence, particulièrement risquée. D'abord, le négociant saurait, par la suite, s'en souvenir : peu de vignerons s'y risqueraient donc. Ensuite, engager une procédure judiciaire coûte du temps, de l'argent. Et pour quel résultat ? On peut s'interroger.
Nous nous heurtons là à un vrai problème, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre. En fait, ce que je demande, c'est que la loi protège les producteurs puisqu'il leur est souvent difficile de se défendre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur Courteau, votre objectif est louable puisqu'il s'agit de rééquilibrer les relations commerciales entre les viticulteurs et les négociants ou grossistes en vins.
Cependant, on peut s'interroger sur la pertinence du mécanisme. En effet, comme je l'indiquais tout à l'heure à M. Dussaut, l'obligation de verser un acompte et la réduction des délais de paiement risquent d'inciter les négociants, confrontés à des frais de trésorerie plus importants, à faire pression sur les viticulteurs pour qu'ils baissent les prix de leurs produits. Le risque est donc réel que cet amendement se retourne contre ceux qu'il est censé protéger.
La question est de savoir ce que préfèrent les viticulteurs : être payés plus rapidement, mais moins, ou bien être payés plus, mais moins rapidement. Ne pouvant me mettre à leur place, je n'ai pas de réponse précise à apporter sur ce point.
Il me semble en outre, monsieur Courteau - et vous êtes un grand spécialiste de ces questions -, que les dossiers de ce type sont généralement traités dans des textes relatifs à l'agriculture, si bien que je me demande si votre amendement a véritablement sa place dans un projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises.
Cependant, dans la mesure où, sur le fond, vous posez un véritable problème, la commission des affaires économiques a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, car la réduction du délai de paiement des boissons alcooliques, compte tenu de ses implications, nécessite une concertation préalable beaucoup plus approfondie avec la profession et avec les distributeurs.
Une réduction des délais, le rapporteur l'a très bien exposé, pourrait créer des tensions sur les prix. Imaginez le cas d'un cafetier qui ouvre un établissement : lui aussi se trouverait soumis à ces dispositions !
Cet exemple montre bien que nous ne pouvons pas, par un simple amendement, modifier des relations aussi complexes ni en régler les implications sur les besoins de fonds de roulement des différents acteurs de la filière.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.
M. Roland Courteau. Tout le monde convient que le problème est réel et qu'il nous faut le résoudre. Or je vous ai écouté, monsieur le ministre, mais j'attends toujours que vous nous fassiez des propositions : leur absence semble signifier que vous êtes prêt à laisser perdurer ledit problème !
Que chacun ici prenne ses responsabilités, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Dutreil, ministre. Monsieur le sénateur, comme vous le savez, un débat portant sur toutes les questions qui touchent à la production agricole, en particulier aux productions vinicoles, doit prochainement avoir lieu.
Je propose donc que, aujourd'hui, vous retiriez votre amendement et que nous mettions à profit le temps qui nous sépare du débat pour réfléchir à ces questions, éventuellement en constituant un groupe de travail. Vous auriez ainsi la possibilité de trouver une solution dans le cadre de la discussion, dans ce même hémicycle, d'un texte de loi beaucoup plus approprié que celui qui nous occupe aujourd'hui, puisqu'il s'agit bien de questions agricoles.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Si j'ai l'assurance, d'une part, qu'un groupe de travail se réunira pour étudier ce problème et, d'autre part, que cette question sera traitée dans le cadre du projet de loi d'orientation agricole, j'accepte de retirer mon amendement.
Monsieur le ministre, vous engagez-vous ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Monsieur le sénateur, je ne peux pas m'engager sur le texte lui-même. Mais, à de nombreuses reprises, dans le cadre de ce débat qui porte sur les PME, nous sommes convenus que, dès qu'il s'agissait de questions agricoles, celles-ci seraient traitées dans le texte sur l'agriculture ; cela me paraît de bon sens.
Comme nous avons du temps avant l'examen de ce texte, je me propose de saisir mon collègue chargé de l'agriculture de cette question et de lui demander d'engager les concertations qui pourront peut-être éclairer vos débats, lorsque le texte viendra devant vous.
M. le président. Monsieur Courteau, l'amendement n° 373 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Roland Courteau. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 373 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 34
Le I de l'article L. 443-2 du code de commerce est remplacé par les dispositions suivantes :
« I. - Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende le fait d'opérer la hausse ou la baisse artificielle soit du prix de biens ou de services soit d'effets publics ou privés, notamment à l'occasion d'enchères à distance :
« 1° En diffusant, par quelque moyen que ce soit, des informations mensongères ou calomnieuses ;
« 2° En introduisant sur le marché ou en sollicitant soit des offres destinées à troubler les cours soit des sur-offres ou sous-offres faites aux prix demandés par les vendeurs ou prestataires de services ;
« 3° Ou en utilisant tout autre moyen frauduleux.
« La tentative est punie des mêmes peines. » - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 34
M. le président. L'amendement n° 245 rectifié, présenté par M. J.L. Dupont et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la section 3 du Chapitre Ier du Titre II du Livre Ier du code de la consommation est insérée une section ainsi rédigée :
« Section ...
« Ventes dans les foires et salons
« Art. L. 121-33-1 - Les dispositions de la présente section s'appliquent à toute opération visant à proposer la vente, la location vente ou la location avec option d'achat de biens ou fournitures de services délivrés à l'occasion d'une foire ou d'un salon tel que défini par le décret n° 69-948 du 10 octobre 1969.
« Art. L. 121-33-2 - Ne sont pas soumises aux dispositions de la présente section les ventes de denrées ou de produits de consommation courantes faites par des professionnels.
« Art. L. 121-33-3 - Sans préjudice des informations prévues par les articles L. 111-1 à L. 111-3 ainsi que celles prévues pour l'application de l'article L. 214-1, les opérations visées à l'article L. 121-33-1 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion du contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
« 1° Le nom du vendeur du produit ou du prestataire de service, son numéro de téléphone, son adresse ou, s'il s'agit d'une personne morale, son siège social et, si elle est différente, l'adresse de l'établissement responsable de l'offre ;
« 2° La désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ;
« 3° Le cas échéant, les frais de livraison ;
« 4° Les modalités de paiement, de livraison ou d'exécution ;
« 5° L'existence d'un droit de rétractation prévu à l'article L. 121-33-5 ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-33-3, L. 121-33-4, L. 121-33-5.
« Art. L. 121-33-4 - Le contrat visé à l'article L. 121-33-3 doit comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de la faculté de rétractation dans les conditions prévues à l'article L. 121-33-5. Un décret en Conseil d'Etat précisera les mentions devant figurer sur ce formulaire.
« Tous les exemplaires du contrat doivent être signés et datés de la main du même client.
« Art. L. 121-33-5 - Le consommateur dispose d'un délai de sept jours francs à compter de la commande ou de l'engagement d'achat pour exercer son droit de rétractation sans avoir à justifier de motifs ni à payer de pénalités, à l'exception, le cas échéant, des frais de retour. Il exerce cette faculté par lettre recommandée avec accusé de réception.
« Toute clause du contrat par laquelle le consommateur abandonne son droit de renoncer à sa commande ou son engagement d'achat est nulle et non avenue.
« Lorsque le délai de sept jours expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.
« Art. L. 121-33-6 - Lorsque le droit de rétraction est exercé le professionnel est tenu de rembourser sans délai le consommateur et au plus tard dans les trente jours suivant la date à laquelle ce droit a été exercé. Au-delà, la somme due est, de plein droit, productive d'intérêts au taux légal en vigueur.
« Art. L. 121-33-7 - Toute infraction aux dispositions des articles L. 121-33-3 à 121-33-6 sera punie d'une peine d'emprisonnement d'un an et d'une amende de 3 750 euros ou de l'une de ces deux peines seulement.
« Art. L. 121-33-8 - Des décrets en Conseil d'Etat pourront régler, en tant que de besoin, les modalités d'application de la présente section. »
La parole est à M. Christian Gaudin.
M. Christian Gaudin. Les foires et les salons en tous genres se sont singulièrement développés ces dernières années et les associations de consommateurs sont confrontées à un nombre croissant de litiges liés à l'acquisition de produits lors de ces manifestations. Ces litiges portent le plus souvent sur des biens d'équipement onéreux et qui constituent pour les ménages de véritables investissements.
Le consommateur croit disposer d'un délai de sept jours, prévu par la loi de 1972 sur le démarchage, pour se rétracter.
Or, partant de l'hypothèse que, lors de ces salons, c'est le consommateur qui sollicite le professionnel, et non l'inverse, il n'existe pas de protection particulière pour le consommateur. Ce dernier subit ainsi le risque d'une vente forcée sans possibilité de se raviser. Ce risque identifié par le législateur en cas de démarchage est à l'origine de la protection organisée par la loi de 1972 qui laisse au consommateur la possibilité de se rétracter dans les sept jours.
C'est pourquoi nous proposons de créer une nouvelle section au sein du code de la consommation, afin de réglementer toute opération visant à proposer la vente, la location-vente ou la location avec option d'achat de biens ou fournitures de services, délivrés à l'occasion d'une foire ou d'un salon, tel que défini par le décret n° 69-948 du 10 octobre 1969.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur Gaudin, il s'agit d'un amendement dont j'avais eu à connaître il y a quelques mois, lors de la discussion du projet de loi tendant à conforter la confiance et la protection du consommateur, dont j'étais le rapporteur. La commission avait alors émis un avis défavorable.
Donc, par cohérence avec cette position, la commission émet également un avis défavorable et vous demande de retirer l'amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Cet amendement traite non pas des relations commerciales entre les fournisseurs et les distributeurs, mais des relations entre les consommateurs et les distributeurs. Il serait plus à sa place dans un texte sur la consommation. D'ailleurs, il modifie le code de la consommation et non pas le code du commerce. Par conséquent, monsieur le sénateur, je vous demande également de bien vouloir le retirer.
M. le président. Monsieur Gaudin, l'amendement n° 245 rectifié est-il maintenu ?
M. Christian Gaudin. Au vu des informations apportées par M. le ministre, je retire mon amendement, avec l'espoir que cette question sera traitée dans un texte portant sur la consommation.
M. le président. L'amendement n° 245 rectifié est retiré.
Article 35
L'article L. 470-2 du code de commerce est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 470-2. - En cas de condamnation au titre d'un délit prévu au titre IV du présent livre, la juridiction peut ordonner que sa décision soit affichée ou diffusée dans les conditions prévues par l'article 131-10 du code pénal. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 99 rectifié, présenté par MM. César, Mortemousque, Barraux, Revet, Texier, Murat et Vasselle, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 470-2 du code de commerce par deux alinéas ainsi rédigés :
« En cas de condamnation au titre des articles L. 441-3, L. 441-4, L. 441-5, L. 441-6, L. 441-6-1, L. 442-2, L. 442-3, L. 442-5 et L. 443-1, elle en ordonnera dans tous les cas la publication intégrale ou par extraits dans le Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ainsi que dans les journaux désignés par elle. Les frais de la publication dont il s'agit sont intégralement à la charge du condamné.
« En cas de condamnation au titre de l'article L. 442-6, la juridiction civile et commerciale en ordonne la publication intégrale ou par extraits dans le Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ainsi que dans les journaux désignés par elle. Les frais de la publication dont il s'agit sont intégralement à la charge du condamné. »
La parole est à M. Yannick Texier.
M. Yannick Texier. L'objet de cet amendement est le même que celui de l'amendement n° 100 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 400, présenté par Mme Demessine, MM. Coquelle, Billout et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 470-2 du code de commerce par deux alinéas ainsi rédigés :
« En cas de condamnation au titre des articles L. 441-3, L. 441-4, L. 441-5, L. 441-6, L. 441-6-1, L. 442-2, L. 442-3, L. 442-5 et L. 443-1, elle en ordonnera dans tous les cas la publication intégrale ou par extraits dans le Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ainsi que dans les journaux désignés par elle. Les frais de publication dont il s'agit sont intégralement à la charge du condamné.
« En cas de condamnation au titre le l'article L. 422-6, la juridiction civile et commerciale ordonne la publication intégrale ou par extraits dans le Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ainsi que dans les journaux désignés par elle. Les frais de publication dont il s'agit sont intégralement à la charge du condamné ».
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Nous avons déjà expliqué notre position sur l'effet dissuasif de la publication du jugement à l'égard de la grande distribution, lors de la défense de l'amendement n° 401.
L'amendement proposé ici va dans le même sens en prévoyant une publication systématique des jugements de condamnation prononcés sur le fondement d'une violation des articles L. 441-1 et L. 442-2 et suivants du code de commerce.
M. le président. L'amendement n° 305 rectifié, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 470-2 du code de commerce par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de condamnation au titre du titre IV du présent livre, elle ordonnera la publication intégrale ou par extraits dans le Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ainsi que dans les journaux désignés par elle. Les frais de la publication dont il s'agit sont intégralement à la charge du condamné. »
La parole est à M. Bernard Dussaut.
M. Bernard Dussaut. Cet article permet au juge d'ordonner que sa décision de condamnation au titre d'un délit prévu au titre IV du livre IV du code de commerce soit affichée ou diffusée soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique.
C'est déjà un progrès, mais, à mon avis, si l'on veut être réellement efficace, il faut aller plus loin encore, avec des moyens véritablement dissuasifs.
Nous savons tous que certaines enseignes soignent leur image vis-à-vis de leurs actionnaires et, dans tous les cas, vis-à-vis des consommateurs.
Or les récentes condamnations édictées par les juges ont eu valeur d'exemple parce qu'elles ont été relayées par la presse.
Les sanctions financières sont certes utiles, mais elles ne suffisent pas à elles seules à dissuader. C'est l'effet de répétition d'une publication systématique des jugements qui peut avoir un réel impact.
Le projet de loi laisse la possibilité seulement au juge pénal de publier son jugement dans la presse.
L'amendement proposé vise à rendre obligatoire cette publication dans le bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ainsi que dans les journaux désignés par la juridiction.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Ces trois amendements, émanant respectivement du groupe communiste, du groupe socialiste et d'une partie de l'UMP, sont assez proches. La commission demande à leurs auteurs de les retirer. A défaut, elle émettra un avis défavorable
J'ai déjà précisé dans mon rapport que la commission n'était pas favorable à une publication systématique des décisions juridictionnelles intervenant en matière de relations commerciales. Il appartient en effet au juge de décider selon les circonstances de l'opportunité d'une telle publication.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements, qui semblent puiser à la même source d'inspiration. Une obligation générale de publication des décisions pénales, civiles et commerciales n'est pas souhaitable. Il revient au juge d'apprécier dans chaque cas la nécessité d'ordonner ou non la publication de ces décisions et de décider des modalités de cette publication.
Ne l'oublions pas, rendre la publication automatique, c'est ignorer la confidentialité qui, sous la seule appréciation du juge, doit parfois entourer certaines affaires.
M. le président. Monsieur Texier, l'amendement n° 99 rectifié est-il maintenu ?
M. Yannick Texier. Non, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 99 rectifié est retiré.
La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote sur l'amendement n° 400.
M. Gérard Le Cam. Monsieur le ministre, quand un pauvre type a bu un coup de trop et a eu un accident sur la route, son nom est dans le journal. Mais quand les agents de la grande distribution volent le peuple, leur nom n'est pas dans le journal. Je trouve qu'il y a deux poids deux mesures.
M. le président. Je mets aux voix l'article 35.
(L'article 35 est adopté.)
Article 36
L'alinéa premier de l'article 495 du code de procédure pénale est remplacé par les dispositions suivantes :
« Peuvent être soumis à la procédure simplifiée prévue à la présente section :
« 1° Les délits prévus par le code de la route et les contraventions connexes prévues par ce code ;
« 2° Les délits en matière de réglementations relatives aux transports terrestres ;
« 3° Les délits prévus au titre quatrième du livre quatrième du code de commerce pour lesquels une peine d'emprisonnement n'est pas encourue. » - (Adopté.)
Article 37
Il est créé un article L. 470-4-3 du code de commerce ainsi rédigé :
« Art. L. 470-4-3. - Pour les délits prévus au titre quatrième du présent livre pour lesquels une peine d'emprisonnement n'est pas encourue, vaut citation à personne la convocation en justice notifiée au prévenu, sur instruction du procureur de la République, par un fonctionnaire mentionné au troisième alinéa de l'article L. 450-1.
« Les dispositions de l'article 390-1 du code de procédure pénale sont applicables à la convocation ainsi notifiée. » - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 37
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 114 rectifié est présenté par MM. Barraux, César, Mortemousque, Revet, Texier, Murat et Vasselle.
L'amendement n° 249 rectifié est présenté par MM. Biwer, Soulage, Deneux et les membres du groupe Union centriste - UDF.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 37, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'avant dernier alinéa de l'article L. 440-1 du code de commerce est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Il comprend notamment les infractions au titre IV ayant fait l'objet de sanctions pénales prononcées par les tribunaux. Il comprend également les décisions rendues en matière civile sur les opérations engageant la responsabilité de leurs auteurs. »
La parole est à M. Yannick Texier, pour présenter l'amendement n° 146 rectifié.
M. Yannick Texier. Il est proposé de préciser que le rapport public de la commission d'examen des pratiques commerciales doit comprendre un inventaire des décisions civiles et pénales rendues en matière d'infraction au titre IV du livre IV du code de commerce.
La portée de la publicité de telles décisions est un élément de nature à inciter les distributeurs à entretenir avec leurs fournisseurs des rapports plus équilibrés.
M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin, pour présenter l'amendement n° 249 rectifié.
M. Christian Gaudin. J'ajouterai que le rapport ici visé ne comprend à l'heure actuelle que les comptes rendus sur les saisines de la commission d'examen des pratiques commerciales, la CEPC. Si l'on y ajoutait la disposition proposée, cela permettrait de leur donner plus de poids vis-à-vis du public, ce qui devrait inciter les distributeurs à entretenir avec les fournisseurs des rapports plus équilibrés, ne serait-ce que pour préserver une certaine image de marque.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Je comprends cette volonté de mettre sur la place publique le bilan des sanctions qui sont prises par les juridictions. J'avais d'ailleurs moi-même, lorsque j'étais ministre de la consommation, rendu public un état très précis des sanctions qui avaient été prononcées, sans évidemment donner les noms des contrevenants. Les statistiques que j'avais publiées avaient permis d'éclairer ceux qui s'intéressaient à ces sujets.
En revanche, il me semble que la CEPC n'a pas pour mission de faire ce travail de publication et les deux amendements dénaturent son rôle.
Le Gouvernement est prêt - et il peut s'y engager - à faire régulièrement un bilan analytique et statistique des sanctions qui sont prononcées par les juridictions de façon que l'on puisse y voir plus clair dans la jurisprudence et en tirer toutes les leçons.
M. le président. Monsieur Texier, l'amendement n° 114 rectifié est-il maintenu ?
M. Yannick Texier. Oui, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Gaudin, l'amendement n° 249 rectifié est-il maintenu ?
M. Christian Gaudin. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 114 rectifié et 249 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 37.
L'amendement n° 65, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après l'article 37, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er octobre 2007, un rapport relatif à l'application des dispositions du titre VI de la présente loi analysant leurs conséquences sur les différents partenaires des relations commerciales ainsi que sur le consommateur. Ce rapport présente, en tant que de besoin, les adaptations législatives et réglementaires paraissant nécessaires en vue de corriger les déséquilibres éventuellement constatés. Il recense par ailleurs l'ensemble des infractions aux dispositions dudit titre VI relevées depuis l'entrée en vigueur de ladite loi.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. L'impact des dispositions du titre VI du projet de loi sur les acteurs concernés est extrêmement délicat à apprécier, s'agissant notamment de celles qui sont relatives à la redéfinition du seuil de revente à perte.
Afin de procéder éventuellement aux réajustements législatifs et réglementaires nécessaires, il serait donc tout particulièrement utile que le Parlement puisse disposer, dans les deux années suivant l'entrée en vigueur de la loi, d'un rapport analysant cet impact pour chacun des partenaires commerciaux concernés, mais aussi pour les consommateurs. Le recensement des infractions commises permettrait par ailleurs de juger de leur degré d'effectivité.
M. le président. Le sous-amendement n° 309, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 65 pour insérer un article additionnel après l'article 37, insérer une phrase ainsi rédigée :
Il en analyse également les conséquences en termes d'emploi et l'impact sur la structuration du tissu industriel, commercial et artisanal des petites et moyennes entreprises (PME) et des très petites entreprises (TPE).
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Nous avons déjà eu l'occasion de souligner combien, dans le contexte actuel, la remise en cause du seuil de revente à perte était dangereuse. Nous aurions préféré qu'une étude d'impact soit réalisée avant toute réforme de la loi Galland.
Les enjeux économiques sont en effet énormes. La montée au créneau des divers groupes d'intérêt est d'ailleurs tout à fait significative à cet égard. Certains n'ont pas hésité à exercer un véritable chantage pour que l'on aille plus loin encore dans le processus de déréglementation.
Pensez-vous, monsieur le ministre, que la légalisation des marges arrière à hauteur de 20 % contentera ceux qui, d'emblée, veulent pouvoir s'aligner sur les pratiques des hard discounters ? Permettez-moi d'en douter.
La boîte de Pandore est ouverte, et nous sommes bien incapables aujourd'hui de savoir quelles seront les conséquences du mouvement de déréglementation dont vous avez pris l'initiative.
Dans certains pays européens, aux Pays-Bas par exemple, le processus de déréglementation s'est bien traduit par une baisse des prix dans la grande distribution. Cependant, en termes d'emplois, l'impact a été particulièrement négatif : 10 000 emplois équivalents temps plein ont ainsi été supprimés. Depuis, les industriels, les distributeurs et les représentants du monde agricole ont lancé des appels pour qu'un nouvel encadrement réglementaire des prix soit mis en oeuvre.
Nous sommes donc bien évidemment tout à fait favorables à ce que, comme le propose M. le rapporteur, le Gouvernement remette au Parlement, deux ans après l'entrée en vigueur de la loi, un rapport analysant l'impact de son titre VI sur les différents partenaires des relations commerciales ainsi que sur le consommateur.
Nous considérons cependant que les conséquences en termes d'emplois doivent également être analysées.
De la même façon, nous estimons que l'impact sur la structuration de notre tissu de PME et de TPE doit être mesuré.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. La commission est favorable à ce sous-amendement.
M. Daniel Raoul. Tout arrive ! (Sourires.)
M. Gérard Cornu, rapporteur. Ce projet de loi ayant pour objet les PME, il serait en effet utile que le Gouvernement, dans son rapport, traite de l'impact de l'application du titre VI sur la situation des PME.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Raoul. J'ai des doutes, tout à coup ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 37.
TITRE VII
DES DISPOSITIONS DU CODE DE COMMERCE RELATIVES AUX CHAMBRES DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE
Intitulé du titre VII
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 133 rectifié bis est présenté par MM. Mortemousque, Poniatowski, Braye, Carle et Hérisson, Mme Lamure, MM. Revet, Bertaud, Faure, Barraux, Leroy, Texier et Fouché.
L'amendement n° 308 est présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger comme suit l'intitulé de ce titre :
DISPOSITIONS RELATIVES AUX CHAMBRES DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE ET AUX CHAMBRES DE METIERS ET DE L'ARTISANAT
La parole est à M. Yannick Texier, pour présenter l'amendement n° 133 rectifié bis.
M. Yannick Texier. Dans la mesure où le secteur des métiers est défini par une liste limitative, fixée par décret, il est nécessaire que sa modification puisse intervenir de la façon la plus simple possible pour répondre aux évolutions de notre économie. Nous assistons en effet à la disparition de certains métiers, tandis qu'apparaissent de nouveaux métiers susceptibles d'appartenir au secteur de l'artisanat.
Une liste établie par simple arrêté présenterait plus de souplesse.
Par ailleurs, il est nécessaire, dans les consultations, d'inclure seulement l'APCM, l'Assemblée permanente des chambres de métiers, et les organisations professionnelles représentatives concernées.
Enfin, il convient de laisser explicitement aux professionnels qui le souhaitent la liberté de s'immatriculer volontairement au répertoire des métiers.
M. le président. La parole est à M. Bernard Dussaut, pour présenter l'amendement n° 308.
M. Bernard Dussaut. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 308 est retiré.
L'amendement n° 66, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans l'intitulé de cette division, supprimer les mots :
du code de commerce
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 133 rectifié bis.
M. Gérard Cornu, rapporteur. L'amendement n° 66 est un amendement rédactionnel.
En ce qui concerne l'amendement n° 133 rectifié bis, je demande à M. Texier de bien vouloir le retirer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Le Gouvernement demande également le retrait de l'amendement n° 133 rectifié bis. En revanche, il est favorable à l'amendement n° 66 de la commission.
M. le président. Monsieur Texier, l'amendement n° 133 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Yannick Texier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 133 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 66.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé du titre VII est ainsi modifié.
Article 38
L'intitulé du titre Ier du livre VII du code de commerce : « Des chambres de commerce et d'industrie » est remplacé par l'intitulé suivant : « Titre Ier - Du réseau des chambres de commerce et d'industrie ».
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, sur l'article.
Mme Bariza Khiari. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec ce titre VII, le Gouvernement poursuit la réforme des CCI, les chambres de commerce et d'industrie. C'est donc l'occasion de réfléchir en profondeur sur le rôle et le mode de fonctionnement des CCI.
Malheureusement, monsieur le ministre, vous n'abordez pas un point qui me paraît pourtant essentiel. J'insisterai donc, non pas sur le contenu de l'article 38 et de la suite du titre VII, mais sur ce qui y est omis, à savoir les modalités des élections aux CCI.
Le 18 mars dernier, prenant acte des déclarations du gouvernement Raffarin en faveur de la lutte contre les discriminations, j'avais interrogé le Premier ministre sur un décret du 24 août 2004, décret qui lui semblait bien embarrassant. Ce texte, signé en catimini en plein été, a eu pour effet de priver de vote aux élections des chambres de métiers les artisans ressortissants de pays autres que les pays membres de l'Union, droit qui leur avait été accordé par le gouvernement Jospin en 1999.
A ma question il a été répondu que le décret visait à harmoniser les règles de vote pour les chambres de métiers et les chambres de commerce et d'industrie, vote réservé aux Français et aux ressortissants communautaires. Techniquement, c'est indéniable, ce décret procédait effectivement à un tel alignement. Mais y aurait-il une fatalité à ce que l'harmonisation se fasse toujours par le bas ? C'est au contraire à un élargissement du corps électoral des chambres de commerce et d'industrie qu'il aurait fallu procéder. C'est ce que nous aimerions trouver dans le texte que nous examinons aujourd'hui.
C'est pourquoi ce titre VII, dans lequel le Gouvernement s'attache à réorganiser le fonctionnement des CCI, est une formidable occasion manquée de donner aux ressortissants non communautaires la juste reconnaissance qu'ils méritent. En effet, les élections aux CCI sont en lien direct avec l'activité économique, qui est la raison de l'existence de ces chambres. Les conditions d'élection et d'éligibilité devraient donc également dépendre du rôle économique.
Dans l'exposé des motifs du projet de loi que vous nous présentez, monsieur le ministre, vous écrivez que les chambres de commerce et d'industrie sont les « représentantes et porte-parole des acteurs économiques et des entreprises ». Il est temps d'en tirer toutes les conséquences : si les CCI sont effectivement les représentantes des acteurs économiques et des entreprises, alors, il ne peut y avoir de discrimination fondée sur la nationalité.
Un tel droit de vote serait non seulement un signe de reconnaissance et de confiance, mais aussi un facteur puissant d'intégration pour des personnes vivant sur notre sol et qui, de surcroît, sont des moteurs dans la vie économique de notre pays en y créant de l'emploi.
Au moment où la grande majorité des pays européens se sont conformés à la résolution du Parlement européen en donnant le droit de vote aux étrangers pour les élections locales, le Gouvernement réduit les droits des étrangers.
En définitive, un tel droit de vote ne serait que justice. Vous-même, monsieur le ministre, avez mené de nombreuses actions pour faciliter l'insertion par la création de micro-entreprises dans les quartiers et avez valorisé ces générateurs de croissance et d'emploi venus d'ailleurs. Vous avez reconnu, à de nombreuses occasions, la contribution des ressortissants non communautaires au tissu économique et à son dynamisme.
Rien qu'avec le décret du 27 août dernier privant du droit de vote à la chambre de métiers les artisans et commerçants étrangers non européens, ce sont 50 000 artisans, représentant plus de 250 professions, qui ont été privés de leur légitime droit de vote, alors qu'ils continuent de payer leurs cotisations et la taxe professionnelle et de travailler au dynamisme de notre économie.
Puisque les CCI sont, comme vous l'affirmez, les « représentantes et porte-parole des acteurs économiques et des entreprises », il est injuste d'exclure une partie de ces acteurs du corps électoral qui désigne les représentants en question.
Vous auriez pu, à l'occasion de ce texte, pousser le raisonnement jusqu'au bout et instaurer également, au-delà du droit de vote, l'éligibilité dans les instances consulaires pour les ressortissants non communautaires. De plus, vous auriez pu arguer de la nécessaire harmonisation entre les modalités de vote, pour étendre cette mesure aux chambres de métiers.
C'est cette injustice, monsieur le ministre, que vous avez l'occasion de réparer. Le Gouvernement s'honorerait en présentant un amendement sur ce point.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Renaud Dutreil, ministre. Madame le sénateur, vous connaissez tous les efforts que je déploie depuis 2002 pour que la réussite économique soit un vrai facteur d'intégration, non seulement pour nos concitoyens issus de l'immigration, mais également pour des étrangers résidant régulièrement sur notre territoire et qui doivent s'intégrer dans notre pays par des projets économiques.
Je m'engage donc à remettre sur l'établi le texte que vous venez d'évoquer.
Mme Bariza Khiari. Bravo et merci, monsieur le ministre !
M. le président. Je mets aux voix l'article 38.
(L'article 38 est adopté.)
Article 39
I. - L'article L. 711-1 du code de commerce est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. L. 711-1. - Le réseau des chambres de commerce et d'industrie se compose des chambres de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie, des groupements inter consulaires que peuvent former plusieurs chambres entre elles, et de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie. Il contribue au développement économique des territoires en remplissant en faveur des acteurs économiques, dans des conditions fixées par décret, des missions de service public, des missions d'intérêt général et, à son initiative, des missions d'intérêt collectif. Les établissements qui le composent ont auprès des pouvoirs publics une fonction de représentation des intérêts de l'industrie, du commerce et des services.
« Ces établissements sont des établissements publics placés sous la tutelle de l'État et administrés par des dirigeants d'entreprise élus. Leurs ressources proviennent des impositions qui leur sont affectées, de la vente ou de la rémunération de leurs activités ou des services qu'elles gèrent, des dividendes et autres produits des participations qu'elles détiennent dans leurs filiales, des subventions, dons et legs qui leur sont consentis, et de toute autre ressource légale entrant dans leur spécialité.
« Dans des conditions définies par décret, ils peuvent transiger et compromettre. Ils sont soumis pour leurs dettes aux dispositions de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968.
« Ils peuvent, avec l'accord de l'autorité compétente, participer à la création et au capital de sociétés civiles et de sociétés par actions dont l'objet social entre dans le champ de leurs compétences. »
II. - Le chapitre Ier du titre Ier du livre VII du code de commerce qui comprend les articles L. 711-2 à L. 711-10, est remplacé par les dispositions suivantes :
« CHAPITRE IER
« DE L'ORGANISATION ET DES MISSIONS DU RÉSEAU
« DES CHAMBRES DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE
« Section 1
« Les chambres de commerce et d'industrie
« Art. L. 711-2. - Les chambres de commerce et d'industrie sont créées par un décret qui fixe notamment leur circonscription et leur siège. Toute modification est opérée dans les mêmes formes ;
« Art. L. 711-3. - Les chambres de commerce et d'industrie représentent auprès des pouvoirs publics les intérêts de l'industrie, du commerce et des services de leur circonscription.
« À ce titre :
« 1° Elles sont consultées par l'État sur les règlements relatifs aux usages commerciaux ;
« 2° Elles peuvent être consultées par les collectivités territoriales et leurs établissements publics sur leurs projets de développement économique, de création d'infrastructures et de dispositifs d'assistance aux entreprises et sur leurs projets en matière de formation professionnelle ;
« 3° Elles peuvent également être consultées par l'État, les collectivités territoriales, et leurs établissements publics sur toute question relative au commerce, à l'industrie, aux services, au développement économique, à la formation professionnelle, à l'aménagement du territoire et à l'environnement dans leur circonscription ;
« 4° Elles peuvent, de leur propre initiative, émettre des avis et des voeux sur toute question intéressant le développement économique de leur circonscription ;
« 5° Dans les conditions précisées à l'article L. 121-4 du code de l'urbanisme, les chambres de commerce et d'industrie sont associées à l'élaboration des schémas de cohérence territoriale et des plans locaux d'urbanisme et peuvent, à leur initiative, réaliser les documents nécessaires à la préparation des documents prévisionnels d'organisation commerciale.
« Art. L. 711-4. - Les chambres de commerce et d'industrie ont une mission de service aux entreprises industrielles, commerciales et de services de leur circonscription.
« Pour l'exercice de cette mission, elles créent et gèrent des centres de formalités des entreprises et apportent à celles-ci toutes informations et tous conseils utiles pour leur développement.
« Elles peuvent également créer et assurer directement d'autres dispositifs de conseil et d'assistance aux entreprises.
« Art. L. 711-5. - Les chambres de commerce et d'industrie contribuent au développement économique du territoire.
« À ce titre :
« 1° Elles peuvent, pour des considérations d'intérêt général ou en cas de carence de l'initiative privée, assurer la maîtrise d'ouvrage ou la maîtrise d'oeuvre de tout projet d'infrastructure ou d'équipement et gérer tout service concourant à l'exercice de leurs missions ;
« 2° Elles peuvent également recevoir délégation de l'État, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, pour gérer tout équipement, infrastructure ou service qui intéresse l'exercice de leurs missions.
« Sauf, le cas échéant, pour les services correspondants à une délégation de service public, ces missions sont exercées dans le cadre de structures juridiques distinctes dans des conditions définies par décret.
« Pour la réalisation d'équipements commerciaux, elles peuvent se voir déléguer le droit de préemption urbain et être titulaires du droit de préemption institué dans les zones d'aménagement différé.
« Art. L. 711-6. - Les chambres de commerce et d'industrie peuvent créer et administrer, à titre principal ou en association avec d'autres partenaires, tout établissement de formation professionnelle, initiale ou continue, dans les conditions prévues notamment aux articles L. 443-1 et L. 753-1 du code de l'éducation.
« Elles peuvent, en liaison avec les organisations professionnelles, créer des fonds d'assurance formation dans les conditions prévues par l'article L. 961-10 du code du travail.
« Section 2
« Les chambres régionales de commerce et d'industrie
« Art. L. 711-7. - Les chambres régionales de commerce et d'industrie sont créées par un décret qui fixe notamment leur circonscription et leur siège. Toute modification est opérée dans les mêmes formes.
« Art. L. 711-8. - Les chambres régionales de commerce et d'industrie représentent auprès des pouvoirs publics les intérêts de l'industrie, du commerce et des services pour toute question dont la portée excède le ressort d'une des chambres de leur circonscription.
« À ce titre :
« 1° Les chambres régionales de commerce et d'industrie sont consultées par la région sur le schéma régional de développement économique et, plus généralement, sur tout dispositif d'assistance aux entreprises dont la région envisage la création ;
« 2° Elles peuvent également être consultées par l'État, par les organes de la région et par les autres collectivités territoriales ou par leurs établissements publics, sur toute question qui intéresse le développement économique régional ;
« 3° Elles sont associées à l'élaboration du schéma régional d'aménagement du territoire et du plan régional de développement des formations professionnelles ;
« 4° Elles peuvent, de leur propre initiative, émettre des avis et des voeux sur toute question intéressant le développement économique de la région.
« Art. L. 711-9. - Les chambres régionales de commerce et d'industrie ont une mission d'animation du réseau des chambres de commerce et d'industrie de leur circonscription.
« À ce titre :
« 1° Elles veillent à la cohérence des actions et des avis des chambres de commerce et d'industrie dans leur circonscription ;
« 2° Elles établissent un schéma directeur qui définit le réseau consulaire dans leur circonscription en prenant en compte la viabilité économique, la justification opérationnelle et la proximité des électeurs, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État ;
« 3° Elles élaborent des schémas sectoriels dans des domaines définis par décret.
« Art. L. 711-10. - Les chambres régionales de commerce et d'industrie veillent à la mise à disposition des ressortissants des chambres de commerce et d'industrie de leur ressort de services et prestations dont la nature et les modalités sont fixées par décret.
« Elles peuvent également créer, assurer directement ou coordonner des dispositifs de conseil et d'assistance aux entreprises et des actions de formation professionnelle, dont l'objet excède le ressort d'une chambre de commerce et d'industrie de leur circonscription ou d'un groupement de plusieurs d'entre elles.
« Art. L. 711-11. - Les chambres régionales de commerce et d'industrie contribuent à l'animation économique du territoire régional.
« À ce titre :
« 1° Elles peuvent assurer au titre de leurs missions propres, pour des considérations d'intérêt général ou en cas de carence de l'initiative privée, la mise en oeuvre de tout projet de développement économique. Elles le peuvent également, par délégation de l'État en son nom propre ou au nom de l'Union européenne, de la région ou d'autres collectivités territoriales, ou de leurs établissements publics ;
« 2° Elles peuvent également recevoir délégation de l'État, agissant en son nom propre ou au nom de l'Union européenne, de la région ou d'autres collectivités territoriales ou de leurs établissements publics, pour réaliser ou gérer des équipements, des infrastructures ou des services.
« Sauf, le cas échéant, pour les services correspondants à une délégation de service public, ces missions sont exercées dans le cadre de structures juridiques distinctes dans des conditions définies par décret.
« Section 3
« L'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie
« Art. L. 711- 12. - L'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie représente, auprès de l'État et de l'Union européenne ainsi qu'au plan international, les intérêts du commerce, de l'industrie et des services.
« À ce titre, elle donne des avis, soit à la demande des pouvoirs publics, soit de sa propre initiative, sur toutes les questions relatives au commerce, à l'industrie, aux services, au développement économique, à la formation professionnelle, à l'aménagement du territoire et à l'environnement.
« Art. L. 711-13. - L'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie assure l'animation de l'ensemble du réseau des chambres de commerce et d'industrie.
« À ce titre :
« 1° Elle définit, sous forme de cahier des charges des normes d'intervention pour les établissements membres du réseau ; elle s'assure du respect de ces normes ;
« 2° Elle apporte au réseau son appui technique, juridique et financier ;
« 3° Elle définit la politique générale du réseau en matière de gestion des personnels des chambres ; elle négocie et signe les accords nationaux en matière sociale applicables aux personnels des chambres ;
« 4° Elle coordonne les actions du réseau avec celles des chambres de commerce et d'industrie françaises à l'étranger. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 315 rectifié, présenté par MM. César, Leroy et Goujon et Mme Malovry, est ainsi libellé :
Remplacer les deux dernières phrases du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 711-1 du code de commerce par une phrase ainsi rédigée :
Dans le respect du principe de subsidiarité, les établissements qui constituent ce réseau, d'une part, contribuent au développement économique des territoires en remplissant en faveur des acteurs économiques, dans des conditions fixées par décret, des missions de service public, des missions d'intérêt général et, à leur initiative, des missions d'intérêt collectif, d'autre part représentent auprès des pouvoirs publics les intérêts de l'industrie, du commerce et des services.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 252 rectifié bis, présenté par MM. Badré, Deneux et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
Dans la dernière phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 711-1 du code de commerce, après les mots :
qui le composent ont
insérer les mots :
, dans le respect de leurs compétences respectives,
La parole est à M. Christian Gaudin.
M. Christian Gaudin. La constitution en réseau des chambres régionales de commerce et d'industrie, des groupements interconsulaires et de l'Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie implique que les actions entreprises et les avis rendus par ces instances entrent strictement dans les champs des compétences que leur attribuent la loi, les règlements et les accords internes au réseau, afin d'éviter tout chevauchement et d'assurer une bonne articulation entre le niveau national et le niveau local, notamment régional.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Monsieur Gaudin, il s'agit d'une très bonne observation : la commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 402, présenté par Mme Demessine, MM. Coquelle, Billout et Le Cam, Mme Didier et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 711-1 du code du commerce, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ces ressources sont retracées dans un budget communiqué, à leur demande, aux collectivités territoriales et aux organisations représentatives des salariés. »
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Mme Michelle Demessine. Les organismes consulaires jouissent dans notre pays d'un statut particulier étant donné qu'il s'agit d'organismes exerçant des missions essentielles de service public et disposant de maintes prérogatives en matière de concertation, d'aménagement du territoire et de formation professionnelle, notamment.
Ainsi, les deux lois de décentralisation dont nous avons débattu depuis 2002 ont fait la part belle à l'implication des organismes consulaires, et singulièrement aux chambres de commerce et d'industrie, dans la définition des schémas de services, ou de formation et de développement économique des territoires.
Comme on le sait, les chambres de commerce et d'industrie disposent de ressources financières importantes, essentiellement fondées sur la perception de l'impôt additionnel à la taxe professionnelle, l'IATP, impôt dont le produit augmente d'ailleurs de manière assez mécanique avec le relèvement de la valeur de la matière imposable.
Aux dernières nouvelles, le montant global du produit de l'IATP dépasse aujourd'hui le milliard d'euros sur l'ensemble du territoire français, ce qui donne aux CCI des ressources inégalées au regard, par exemple, de ce dont disposent les organisations syndicales représentatives de salariés chargées de défendre les intérêts des salariés de l'agriculture, de l'industrie, du commerce et des services.
Les CCI ajoutent à cette ressource particulièrement importante le produit de leurs prestations de services, notamment la perception d'une part non négligeable des obligations fiscales des entreprises adhérentes au titre de la taxe d'apprentissage ou de la contribution à la formation professionnelle continue, les chambres exerçant, entre autres, des missions de formation.
De fait, il nous semble particulièrement important que la plus grande transparence soit faite sur la gestion budgétaire des CCI, eu égard aux missions de service public dont elles sont investies.
Nul doute qu'un des objectifs du présent titre consiste, en effet, à favoriser la concentration des chambres de commerce, la question se posant notamment en province où certains organismes consulaires ne disposent plus tout à fait d'une légitimité, dans un contexte de crise économique territoriale plus ou moins profonde.
Pour autant, il nous semble que les collectivités locales doivent pouvoir être plus complètement informées de la situation réelle des CCI. Nous proposons donc d'insérer dans le texte une faculté d'information sur leur situation budgétaire.
Ce n'est d'ailleurs finalement qu'une sorte de parallélisme des formes. Les collectivités locales ne sont-elles pas obligées de publier leur propre budget, alors même qu'elles assument des missions de service public ?
Les organismes consulaires ayant, eux aussi, des missions de service public à accomplir, c'est en vertu d'un principe d'égalité de traitement que nous vous invitons à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Les auteurs du présent amendement entendent contribuer à la transparence budgétaire du fonctionnement des CCI.
Or les chambres de commerce et d'industrie sont des établissements publics administratifs. Elles sont donc naturellement soumises à l'ensemble des règles de contrôle et de transparence relevant de la comptabilité publique.
Pourquoi faudrait-il créer pour elles un régime d'exception auquel ne serait soumis aucun autre établissement public administratif ? Font-elles l'objet d'une suspicion particulière de la part de nos collègues du groupe CRC ? Je ne veux pas le croire ! Par conséquent, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 67, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le cinquième alinéa (3°) du texte proposé par le II de cet article pour le l'article L. 711-3 du code de commerce, remplacer les mots :
au commerce, à l'industrie,
par les mots :
à l'industrie, au commerce,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 316 rectifié, présenté par MM. César, Leroy et Goujon et Mme Malovry, est ainsi libellé :
I. - Compléter le cinquième alinéa (3°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-3 du code de commerce par une phrase ainsi rédigée:
Elles peuvent, de leur propre initiative, émettre des avis et des voeux sur ces mêmes questions ;
II. - En conséquence, supprimer le sixième alinéa (4°) du même texte.
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Je le reprends, au nom de la commission, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 316 rectifié bis.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de clarification sur le rôle des différents échelons consulaires, local, régional et national.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 68, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa (5°) du texte proposé par le II de cet l'article L. 711-3 du code de commerce, remplacer les mots :
les chambres de commerce et d'industrie
par le mot :
elles
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 333 rectifié bis, présenté par MM. Longuet, Adnot et Zocchetto, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-4 du code de commerce, remplacer les mots :
de conseil
par les mots :
d'information
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 199 rectifié, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-4 du code de commerce par les mots :
, dans le respect du droit de la concurrence et sous réserve de la tenue d'une comptabilité analytique,
La parole est à M. Christian Gaudin.
M. Christian Gaudin. Le troisième alinéa du nouvel article L. 711-4 du code de commerce fait référence au « service indirect » aux entreprises que les chambres de commerce et d'industrie peuvent proposer aux entreprises de leur ressort. Ce « service indirect » recouvre des activités de conseil et d'assistance, en tout état de cause non obligatoires, contrairement aux centres de formalités des entreprises.
Or ce type de missions d'assistance et d'accompagnement est déjà souvent assuré par des entreprises privées, qui peuvent être basées dans le ressort des CCI. Afin de ne pas créer de distorsion de concurrence, cet amendement a pour objet de soumettre les chambres de commerce et d'industrie aux mêmes règles de concurrence que les entreprises.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 199 rectifié de M. Gaudin, qui, avec beaucoup de perspicacité, a bien compris la situation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 317 rectifié, présenté par MM. César, Leroy et Goujon et Mme Malovry, est ainsi libellé :
Dans le quatrième alinéa (2°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-5 du code de commerce, après le mot :
pour
insérer les mots :
créer ou
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Je le reprends au nom de la commission, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 317 rectifié bis.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de clarification sur le rôle des différents échelons consulaires, local, régional et national.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 70, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Compléter le 2° du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-5 du code de commerce par une phrase ainsi rédigée :
Elles peuvent notamment se voir confier dans ce cadre des délégations de service public en matière d'aéroports, de ports maritimes et de voies navigables.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision rédactionnelle, pour permettre la dérogation prévue par l'article 11 de la loi Sapin aux procédures de mise en concurrence préalables à la délégation d'une activité par une collectivité publique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 69, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-5 du code de commerce, remplacer le mot :
elles
par les mots :
les chambres de commerce et d'industrie
et après le mot :
titulaires
insérer les mots :
ou délégataires
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement de précision rédactionnelle.
M. le président. L'amendement n° 200, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-6 du code de commerce par les mots :
et, pour la formation continue, dans le respect du droit de la concurrence et sous réserve de la tenue d'une comptabilité analytique
La parole est à M. Christian Gaudin.
M. Christian Gaudin. La formation est l'un des services aux entreprises les plus anciens assurés par les CCI, dont l'origine remonte à la loi du 9 avril 1898.
Suivant l'avis rendu par le Conseil de la concurrence le 12 décembre 2000, afin de mettre fin aux distorsions de concurrence sur le marché de la formation continue, cet amendement a pour objet de soumettre les CCI aux mêmes règles de concurrence que les organismes privés de formation et de les astreindre à tenir une comptabilité analytique comme toute entreprise, ce qui permettra en particulier de vérifier si les moyens dont elles bénéficient dans le cadre de leurs missions d'intérêt général ne sont pas sollicités pour leurs activités tombant dans le champ concurrentiel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. M. Gaudin a tout a fait raison. En conséquence, et par cohérence avec sa position sur l'amendement n° 199 rectifié, la commission a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 318 rectifié, présenté par MM. César, Leroy et Goujon et Mme Malovry, est ainsi libellé :
Après les mots :
et des services
rédiger ainsi la fin du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-8 du code de commerce :
de leur région
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 71, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Au début du troisième alinéa (1°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-8 du code de commerce, remplacer les mots :
Les chambres régionales de commerce et d'industrie
par le mot :
Elles
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 319 rectifié, présenté par MM. César, Leroy et Goujon et Mme Malovry, est ainsi libellé :
I - Après les mots :
sur toute question
rédiger comme suit la fin du quatrième alinéa (2°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-8 du code de commerce :
relative au commerce, à l'industrie, aux services, au développement économique, à la formation professionnelle, à l'aménagement du territoire et à l'environnement dans leur région dès lors que la portée excède le ressort d'une des chambres de leur circonscription ; elles peuvent, de leur propre initiative, émettre des avis et des voeux sur ces mêmes questions.
II - En conséquence, supprimer le dernier alinéa (4°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-8 du code de commerce.
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Je le reprends au nom de la commission, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 319 rectifié bis.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de clarification sur le rôle des différents échelons consulaires, local, régional et national.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 72, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. - Au début du quatrième alinéa (2°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-9 du code de commerce, après les mots :
Elles établissent
insérer les mots :
, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat,
II. En conséquence, à la fin du même texte, après les mots :
des électeurs
supprimer les mots :
, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 73, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-10 du code de commerce, remplacer le mot :
ressort
par le mot
circonscription
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement de cohérence rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 334 rectifié bis, présenté par MM. Longuet, Adnot et Zocchetto, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-10 du code de commerce, remplacer les mots :
de conseil
par les mots :
d'information
Cet amendement n'est pas défendu.
L'amendement n° 74, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du troisième alinéa (1°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-11 du code de commerce, après les mots :
délégation de l'Etat
insérer le mot :
, agissant
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 320 rectifié, présenté par MM. César, Leroy et Goujon et Mme Malovry, est ainsi libellé :
Dans le quatrième alinéa (2°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-11 du code de commerce, remplacer le mot :
réaliser
par le mot :
créer
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Je le reprends au nom de la commission, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 320 rectifié bis.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s'agit de nouveau d'un amendement de clarification.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 75, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Compléter le quatrième alinéa (2°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-11 du code de commerce par une phrase ainsi rédigée :
Elles peuvent notamment se voir confier dans ce cadre des délégations de service public en matière d'aéroports, de ports maritimes et de voies navigables.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 321 rectifié, présenté par MM. César, Leroy et Goujon et Mme Malovry, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-12 du code de commerce, remplacer les mots :
de l'Etat et de l'Union européenne ainsi qu'au plan international
par les mots :
des pouvoirs publics
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 263 rectifié, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-12 du code de commerce, après le mot :
intérêts
insérer le mot :
nationaux
La parole est à M. Christian Gaudin.
M. Christian Gaudin. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 76, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-12 du code de commerce, remplacer les mots :
du commerce, de l'industrie
par les mots :
de l'industrie, du commerce
II. - En conséquence, dans le second alinéa du même texte, remplacer les mots :
au commerce, à l'industrie,
par les mots :
à l'industrie, au commerce,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 77, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans les troisième (1°) et cinquième (3°) alinéas du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-13 du code de commerce, remplacer le mot (deux fois) :
; elle
par le mot :
et
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement de cohérence rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 78, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le quatrième alinéa (2°) du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 711-13 du code de commerce, après les mots :
son appui
insérer les mots :
dans les domaines
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement de cohérence rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de l'article 39, modifié.
(L'article 39 est adopté.)
Article 40
I. - L'intitulé du chapitre II du titre Ier du livre VII du code de commerce : « De l'administration financière » est remplacé par l'intitulé suivant : « Chapitre II - De l'administration des établissements du réseau des chambres de commerce et d'industrie ».
II. - Ce chapitre comprend les articles L. 712-1 à L. 712-10 dans leur rédaction résultant des articles 41, 42 et 43 ci-après. - (Adopté.)
Article 41
I. - Les articles L. 712-1, L. 712-2 et L. 712-3 du code de commerce deviennent respectivement les articles L. 712-2, L. 712-3 et L. 712-6 du code du commerce.
II. - À l'article L. 712-6, les mots : « Les chambres de commerce et d'industrie visées à l'article L. 711-1, les chambres régionales de commerce et d'industrie, les groupements inter consulaires, l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie » sont remplacés par les mots : « les établissements du réseau ».
M. le président. L'amendement n° 79, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
III. - Le deuxième alinéa et la seconde phrase du troisième alinéa de l'article L. 712-6 sont supprimés.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement de cohérence rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 41, modifié.
(L'article 41 est adopté.)
Article 42
I. - Il est créé un nouvel article L. 712-1 du code de commerce ainsi rédigé :
« Art. L. 712-1. - Dans chaque établissement, l'assemblée générale des membres élus détermine les orientations et le programme d'action de l'établissement. À cette fin elle délibère sur toutes les affaires relatives à l'objet de l'établissement, notamment le budget, les comptes et le règlement intérieur. Elle peut déléguer aux autres instances de l'établissement public des compétences relatives à son administration et à son fonctionnement courant.
« Le président assure la direction de l'établissement et est responsable de sa gestion. Il est l'ordonnateur et le représentant légal de l'établissement. Les fonctions de trésorier sont exercées par un membre de l'assemblée générale. »
II. - Après l'article L. 712-3 sont ajoutés les articles L. 712-4 et L. 712-5 ainsi rédigés :
« Art. L. 712-4. - Un établissement public du réseau des chambres de commerce de la région qui n'a pas délibéré favorablement pour mettre en oeuvre le schéma directeur prévu à l'article L. 711-9 du présent code ou dont l'autorité compétente constate qu'il n'a pas respecté les dispositions prévues audit schéma, ne peut contracter d'emprunts.
« Art. L. 712-5. - Une chambre régionale de commerce et d'industrie peut abonder le budget d'une chambre de commerce et d'industrie de son ressort pour subvenir à des dépenses exceptionnelles ou faire face à des circonstances particulières dans des conditions définies par décret. »
M. le président. L'amendement n° 80 rectifié, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. - Dans la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 712-1 du code de commerce, remplacer les mots :
l'établissement
par le mot :
celui-ci
II. - Dans la dernière phrase du même texte, supprimer le mot :
public
III. - Remplacer les deux premières phrases du second alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 712-1 du code de commerce par quatre phrases ainsi rédigées :
Le président est le représentant légal de l'établissement. Il en est l'ordonnateur et est responsable de sa gestion. Il en préside l'assemblée générale et les autres instances délibérantes. Le règlement intérieur de l'établissement détermine les conditions dans lesquelles lui sont appliquées les dispositions de l'article 7 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction et le secteur public.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Outre des modifications rédactionnelles, l'amendement n° 80 rectifié vise, d'une part, à procéder à la clarification et à la présentation logique des responsabilités du président de l'établissement consulaire et, d'autre part, à renvoyer au règlement intérieur de chaque établissement le soin de déroger, si ses organes dirigeants le souhaitent, à l'âge limite de soixante-cinq ans fixé par l'article 7 de la loi du 13 septembre 1984 dans sa nouvelle version résultant de l'article 3 du projet de loi Breton pour la confiance et la modernisation de l'économie.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 81, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 712-4 du code de commerce, après les mots :
de commerce
insérer les mots :
et d'industrie
et supprimer les mots :
du présent code
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 82, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 712-5 du code de commerce :
I. - Après le mot :
peut
insérer les mots :
, dans des conditions définies par décret,
II. - Remplacer les mots :
son ressort
par les mots :
sa circonscription
III. - Supprimer in fine les mots :
dans des conditions définies par décret
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement de cohérence rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 42, modifié.
(L'article 42 est adopté.)
Article 43
Après l'article L. 712-6 du code de commerce, sont ajoutés les articles L. 712-7 à L. 712-10 ainsi rédigés :
« Art. L. 712-7. - L'autorité compétente veille au fonctionnement régulier des établissements du réseau. Elle assiste de droit aux instances délibérantes de ces établissements. Certaines délibérations, notamment celles mentionnées au 2° de l'article L. 711-9, sont soumises à son approbation, dans des conditions fixées par voie réglementaire.
« Art. L. 712-8. - Dans les cas où le budget prévisionnel d'un établissement ou le budget exécuté au cours de l'exercice écoulé fait apparaître un déficit non couvert par les excédents disponibles, où des dépenses obligatoires n'ont pas été inscrites au budget ou n'ont pas été mandatées, ou bien lorsque des dysfonctionnements graves, mettant en péril l'équilibre financier de la chambre, sont constatés, l'autorité compétente, après application d'une procédure contradictoire, arrête le budget et peut confier au trésorier-payeur général les fonctions de trésorier de l'établissement.
« Art. L. 712-9. - Tout membre élu d'un établissement public du réseau peut être suspendu ou déclaré démissionnaire d'office par l'autorité compétente, après procédure contradictoire, en cas de faute grave dans l'exercice de ses fonctions.
« Lorsque les circonstances compromettent le fonctionnement d'un établissement public du réseau, l'autorité compétente peut prononcer la suspension de ses instances et nommer une commission provisoire.
« Au besoin, il est recouru à la dissolution des instances de l'établissement public par décision de l'autorité compétente.
« Art. L. 712-10. - Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du chapitre II du présent livre, en particulier les règles de fonctionnement administratif et financier des établissements du réseau ainsi que les modalités de la tutelle exercée par l'État. »
M. le président. L'amendement n° 83, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la deuxième phrase du le texte proposé par cet article pour l'article L. 712-7 du code de commerce :
Elle assiste de droit à leurs instances délibérantes.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement de cohérence rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 84, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. - Au début du texte proposé par cet article pour l'article L. 712-8 du code de commerce, remplacer les mots :
Dans les cas où
par le mot :
Lorsque
II. - Dans le même texte, après les mots :
excédents disponibles,
remplacer le mot :
où
par le mot :
que
III. - Dans le même texte, après les mots :
été mandatées,
remplacer les mots :
ou bien lorsque
par les mots :
ou que
IV. - Dans le même texte, remplacer les mots :
la chambre
par les mots :
l'établissement
V. - A la fin du même texte, supprimer les mots :
de l'établissement
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement de cohérence rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 85, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. - Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 712-9 du code de commerce, supprimer les mots :
public du réseau
II. - Dans le troisième alinéa du même texte supprimer le mot :
public
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement de cohérence rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 43, modifié.
(L'article 43 est adopté.)
Article 44
Le II de l'article 1600 du code général des impôts, est ainsi rédigé :
« II. - Les chambres de commerce et d'industrie autres que les chambres régionales de commerce et d'industrie votent chaque année le taux de la taxe mentionnée au I. Ce taux ne peut excéder celui de l'année précédente.
« Toutefois, pour les chambres de commerce et d'industrie qui ont délibéré favorablement pour mettre en oeuvre un schéma directeur régional prévu par l'article L. 711-9 du code de commerce, ce taux peut être augmenté dans une proportion qui ne peut être supérieure à celle fixée chaque année par la loi. Lorsque le taux de 2004 défini au V de l'article 53 de la loi de finances rectificative pour 2004 (n° 2004-1485 du 30 décembre 2004) est inférieur au taux moyen constaté la même année au niveau national pour l'ensemble des chambres de commerce et d'industrie, le taux de l'année d'imposition ainsi déterminé peut également, au titre des cinq années qui suivent celle de l'adoption de la délibération de la chambre approuvant le schéma directeur régional, être majoré du dixième de la différence entre le taux moyen précité et le taux de 2004.
« À compter des impositions établies au titre de 2011, le taux de la taxe mentionnée au I ne peut excéder 95 % du taux de l'année précédente pour les chambres de commerce et d'industrie qui n'ont pas, au 31 décembre de l'année précédant celle de l'imposition, délibéré favorablement pour mettre en oeuvre un schéma directeur régional prévu par l'article L. 711-9 du code de commerce ou dont l'autorité de tutelle a constaté, à la même date, qu'elles n'ont pas respecté les dispositions prévues audit schéma. Si la chambre n'a pas voté son taux dans les conditions prévues au présent alinéa, elle est administrée selon les dispositions de l'article L. 712-8 du code de commerce.
« Dans un département où il n'y a qu'une chambre de commerce et d'industrie le rôle comprend les redevables de la taxe pour frais de chambres de commerce de tout le département. S'il y a dans le département plusieurs chambres de commerce et d'industrie, le rôle de chacune d'elles comprend les redevables de la taxe qui sont imposés dans sa circonscription.
« Un décret détermine les conditions d'application de la taxe prévue au présent article. »
M. le président. L'amendement n° 86, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du quatrième alinéa du texte proposé par cet article pour le II de l'article 1600 du code général des impôts, remplacer les mots :
de la taxe pour frais de chambres de commerce
par les mots :
visés au I
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Amendement de cohérence rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 44, modifié.
(L'article 44 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 44
M. le président. L'amendement n° 87, présenté par M. Cornu, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après l'article 44, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa de l'article L. 70 du code du domaine de l'Etat est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces dispositions ne sont pas applicables aux établissements composant le réseau des chambres de commerce et d'industrie mentionné au titre Ier du livre VII du code de commerce. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il s'agit d'autoriser la vente des matériels et objets mobiliers, tels les meubles de bureaux ou les ordinateurs périmés, appartenant aux établissements du réseau des CCI, sans passer par le service des domaines.
Il s'agit donc d'un amendement de simplification.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. A l'instar de l'ensemble des établissements publics administratifs, les chambres de commerce et d'industrie doivent faire vendre leurs biens mobiliers par l'intermédiaire du service des domaines.
Dans le cas particulier des CCI, rien ne justifie qu'elles soient dispensées de recourir au service des domaines pour procéder à ces cessions.
Le recours à un service de l'Etat spécialisé dans ce type de vente constitue une véritable garantie apportée à ces établissements publics de pouvoir céder l'ensemble de leurs matériels et biens mobiliers dans les conditions les plus appropriées, et surtout lorsque les chambres de commerce et d'industrie doivent céder des matériels techniques difficiles à vendre.
Sous le bénéfice de cette explication, monsieur le rapporteur, je vous demande de bien vouloir retirer l'amendement n° 87.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement est-il maintenu ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il est toujours difficile de simplifier, monsieur le ministre ! (Sourires.)
Je crois que l'on pourrait commencer par les chambres de commerce pour amorcer cet exercice de simplification que nous souhaitons voir diffusé à tous les établissements publics. En effet, recourir systématiquement au service des domaines pour des ordinateurs périmés risquerait d'engorger leurs services. Commençons par les chambres de commerce et généralisons l'expérience à l'ensemble des établissements publics : nous aurons accompli tous ensemble, monsieur le ministre, une grande oeuvre de simplification. Par conséquent, je maintiens mon amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 87.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 44.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 134 rectifié bis, présenté par MM. Mortemousque, Poniatowski, Braye, Carle et Hérisson, Mme Lamure, MM. Revet, Bertaud, Faure, Barraux, Leroy, Texier et Fouché, est ainsi libellé :
Après l'article 44, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa du I de l'article 19 de la loi n°96-603 du 5 juillet 1996 est ainsi rédigé :
« Les personnes physiques ou morales qui exercent à titre principal ou secondaire une activité professionnelle indépendante de production, de transformation ou de prestation de service figurant sur une liste établie par arrêté après consultation de l'assemblée permanente des chambres de métiers et des organisations professionnelles représentatives concernées doivent être immatriculées au répertoire des métiers. Les personnes physiques ou morales qui exercent une activité indépendante de production, de transformation ou de prestation de service ne figurant pas sur cette liste peuvent s'immatriculer à ce répertoire. »
La parole est à Yannick Texier
M. Yannick Texier. Dans la mesure où le secteur des métiers est défini par une liste limitative fixée par décret, il est nécessaire que sa modification puisse intervenir de la façon la plus simple possible pour répondre aux évolutions de notre économie.
Nous assistons en effet à la disparition de certains métiers tandis qu'apparaissent de nouveaux métiers susceptibles d'appartenir au secteur de l'artisanat. Une liste établie par simple arrêté aurait plus de souplesse.
Par ailleurs, il est nécessaire, dans les consultations, d'inclure seulement l'Assemblée permanente des chambres de métiers, l'APCM, et les organisations professionnelles représentatives concernées.
Enfin, il convient de laisser explicitement aux professionnels qui le souhaitent la liberté de s'immatriculer volontairement au répertoire des métiers.
M. le président. L'amendement n° 307 rectifié, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 44, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I- Le premier alinéa du I de l'article 19 de la loi n°96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat est ainsi rédigé :
« Les personnes physiques ou morales qui exercent à titre principal ou secondaire une activité professionnelle indépendante de production, de transformation ou de prestation de service figurant sur une liste établie par arrêté après consultation de l'assemblée permanente des chambres de métiers, de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie et des organisations professionnelles représentatives concernées doivent être immatriculées au répertoire des métiers. »
II- En conséquence, dans le deuxième alinéa du I du même article, les mots :« Ce décret » sont remplacés par les mots : « un décret en conseil d'Etat ».
La parole est à M. Bernard Dussaut
M. Bernard Dussaut. Cet amendement répond à une demande des chambres de métiers. Nos économies connaissent depuis plusieurs années une évolution technologique sans précédent qui se traduit par la disparition d'un certain nombre de métiers tandis que d'autres font leur apparition.
Or le répertoire des métiers est défini par une liste limitative fixée par décret. Pour répondre aux évolutions de notre économie, il est nécessaire que sa modification puisse intervenir de la façon la plus simple possible : une liste établie par simple arrêté après consultation de l'Assemblée permanente des chambres des métiers, de l'Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie et des organisations professionnelles représentatives concernées donnerait plus de souplesse et permettrait une plus grande réactivité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. M. Dussaut a révélé la source de ces deux amendements presque identiques ; je constate que les chambres de métiers ont des relais dans tous les groupes parlementaires !
M. Bernard Dussaut. Cela vous gène-t-il ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Pas du tout ! Je formulais une simple observation. Cela explique que certains amendements du groupe communiste républicain et citoyen, du groupe socialiste et parfois du groupe de l'UMP soient quasiment identiques.
Cela dit, ces deux amendements ne peuvent recevoir un avis favorable de la commission, pour trois raisons essentielles.
En premier lieu, ils contreviennent aux obligations communautaires auxquelles est soumise la France en matière d'immatriculation : l'inscription au registre du commerce et des sociétés des artisans qui se livrent à une activité commerciale, même à titre accessoire, est en effet obligatoire, et il n'est pas possible de la refuser sous prétexte que l'artisan concerné est également inscrit au registre des métiers.
En conséquence, la consultation de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, l'ACFCI, préalable à la modification de la liste des activités artisanales, que proposent également de supprimer les deux amendements, demeure nécessaire.
En second lieu, je ne conteste pas que l'avis préalable du Conseil d'Etat alourdisse la procédure. Mais si le législateur a préféré le décret en Conseil d'Etat au simple arrêté, c'est précisément parce que l'existence même d'une liste définissant les métiers relevant de l'artisanat est dérogatoire à un principe de base, celui de la liberté du commerce. Cette dérogation est, de notre point de vue, légitime puisque sont en particulier concernées des activités touchant à la sécurité des personnes et des biens.
A contrario, il est normal que cette dérogation soit encadrée par un minimum de mesures de précaution. Laisser le champ entièrement libre au pouvoir réglementaire sans exiger, en la matière, le contrôle du Conseil d'Etat serait dès lors excessif.
Enfin, dernier élément, ces amendements suppriment la limite de dix salariés qui figure dans le texte actuel pour définir le droit commun de l'artisanat. Certes, il ne s'agit que d'un seuil auquel, en pratique, il peut être dérogé dans certains cas définis par voie réglementaire, en l'espèce, le décret en Conseil d'Etat. Reste qu'il indique tout de même quel est le champ normal du secteur des métiers qui n'est pas celui des grandes entités. Aussi sa suppression ne me semble-t-elle pas opportune.
Pour ces trois raisons principales, la commission souhaiterait que les auteurs de ces deux amendements acceptent de les retirer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à ces amendements aimablement prêtés par l'APCM à quelques groupes du Sénat, pour les raisons qui ont été très bien expliquées par M. le rapporteur.
M. le président. Monsieur Texier, l'amendement n° 134 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Yannick Texier. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 134 rectifié bis est retiré.
Monsieur Dussaut, l'amendement n° 307 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Dussaut. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 307 rectifié est retiré.
L'amendement n° 135 rectifié bis, présenté par MM. Mortemousque, Poniatowski, Braye, Carle et Hérisson, Mme Lamure, MM. Revet, Bertaud, Faure, Barraux, Leroy, Texier et Fouché, est ainsi libellé :
Après l'article 44, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les cotisations des présidents de chambres de métiers et présidents de chambres régionales de métiers au régime de l'indemnité compensatrice des anciens présidents de chambres de métiers, géré par l'Assemblée Permanente des Chambre de Métiers, et les contributions des chambres à ce régime sont obligatoires.
La parole est à M. Yannick Texier
M. Yannick Texier. Le fonds ICAP est une indemnité compensatrice par répartition qui a été établie par une décision de l'assemblée générale de l'APCM des 11 et 12 juin 1981.
Cependant, ce système d'allocation manque de base légale. En effet, ni l'article 2 du décret du 7 mars 1966, qui énumère les pouvoirs conférés à l'APCM, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ne prévoient une pareille compétence pour cet établissement public.
A cet égard, la prise en considération de l'indemnité ICAP d'un point de vue fiscal, par décision du ministre de l'économie, des finances et du budget en date du 25 février 1985, confirmée par instruction du 19 janvier 1987 et figurant au bulletin officiel de la direction générale des impôts du 5 février 1987 - l'indemnité compensatrice versée par le fonds ICAP bénéficie d'un abattement de 30 % sous réserve de respecter une limite déterminée par l'administration fiscale - ne suffit pas.
Ce régime doit être assimilé, de par sa nature et son organisation, à un régime spécial complémentaire de vieillesse institué au bénéfice d'artisans ou d'anciens artisans, ainsi que certains de leurs ayants droit ayant occupé des emplois au sein des chambres de métiers.
Le texte proposé a pour objet de rendre obligatoire le régime existant actuellement au profit des anciens présidents de chambres de métiers et de l'artisanat pour compenser la diminution de retraite entraînée par le temps passé à l'exercice de leurs fonctions et lui assurer un support légal.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Cet amendement présente un intérêt certain, mais comme j'ai du mal à me prononcer, je souhaite entendre l'avis du Gouvernement.
M. Daniel Raoul. Courageux, mais pas téméraire !
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, ministre. Comme vous l'avez justement souligné, le système actuel souffre d'une absence de base légale sans que cela préjuge de son opportunité.
Votre amendement, monsieur le sénateur, propose de légaliser un système d'indemnité compensatoire sui generis qui ne ressortit à aucune catégorie, ni régime de retraite ni système d'assurance.
Par ailleurs, son équilibre financier de long terme n'est pas assuré, le nombre d'ayants droit croissant plus rapidement que celui des cotisants.
Conscient de ces difficultés qui ne sont pas minces, je souhaite qu'une concertation avec l'ensemble des parties concernées, les chambres de métiers et l'administration, puisse s'engager dans les meilleurs délais afin qu'une solution pérenne puisse être dégagée. C'est en effet une nécessité afin de préserver les intérêts tant des artisans que des chambres de métiers.
Néanmoins, dans la mesure où cet amendement permet de trouver une réponse provisoire sur un sujet que je sais sensible pour le monde artisanal, le Gouvernement donne un avis favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 44.
L'amendement n° 306, présenté par MM. Dussaut, Raoul, Courteau, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 44, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Des groupements d'intérêt public, dotés de la personnalité morale et de l'autonomie financière, peuvent être constitués entre des personnes morales de droit public, et notamment les collectivités territoriales et les établissements publics qui en dépendent, les chambres de commerce et d'industrie et les chambres de métiers, ou de droit privé pour exercer ensemble, pendant une durée déterminée, des actions en faveur de la création ou du développement local des entreprises, ou de la formation, ainsi que la gestion de ces actions
Le groupement d'intérêt public ne donne pas lieu à la réalisation ni au partage de bénéfices. Il peut être constitué sans capital. Les droits de ses membres ne peuvent être représentés par des titres négociables. Toute clause contraire est réputée non écrite.
Les personnes morales de droit public et les personnes morales de droit privé chargées de la gestion d'un service public doivent disposer ensemble de la majorité des voix dans l'assemblée du groupement et dans le conseil d'administration qu'elles désignent.
Le directeur du groupement, nommé par le conseil d'administration, assure, sous l'autorité du conseil et de son président, le fonctionnement du groupement. Dans les rapports avec les tiers, le directeur engage le groupement pour tout acte entrant dans l'objet de celui-ci.
Les délibérations du conseil d'administration et de l'assemblée générale sont communiquées dans les quinze jours suivant leur adoption au préfet du département où se trouve le siège du groupement. Il en est de même des comptes annuels.
La convention par laquelle est constitué le groupement doit être approuvée par le préfet du département du siège du groupement, qui en assure la publicité. Elle détermine les modalités de participation des membres et les conditions dans lesquelles ils sont tenus des dettes du groupement. Elle indique notamment les conditions dans lesquelles ceux-ci mettent à la disposition du groupement des personnels rémunérés par eux.
Le groupement d'intérêt public est soumis au contrôle de la chambre régionale des comptes compétente au regard du siège du groupement dans les conditions prévues par le livre II titres Ier et IV du code des juridictions financières.
La transformation de toute autre personne morale en groupement d'intérêt public n'entraîne ni dissolution ni création d'une personne morale nouvelle.
La parole est à M. Bernard Dussaut
M. Bernard Dussaut. Nous arrivons au terme de l'examen du titre VII consacré pour l'essentiel à une réécriture des dispositions du code de commerce qui concernent le réseau des chambres de commerce et d'industrie.
Les chambres de commerce et d'industrie ont un rôle important à jouer en matière d'expertise et de veille économique et devraient être, aux côtés des chambres de métiers, les partenaires privilégiés des collectivités locales.
Or aucune référence n'est faite dans ce projet de loi aux relations entre les chambres de commerce et d'industrie et les collectivités territoriales, notamment régionales, alors que celles-ci ont un rôle majeur dans le développement économique.
Rien n'est dit non plus sur les nécessaires relations avec les autres chambres consulaires alors que cette coopération est également essentielle.
M. Jean Desessard. Exact !
M. Bernard Dussaut. Nous estimons qu'on ne peut concevoir de développer l'économie et créer des emplois sans organiser une réelle coopération entre les différents noeuds de décision et de compétences à l'échelle du territoire.
Cet amendement a donc pour objet de permettre la constitution de groupements d'intérêt public pouvant associer les collectivités territoriales, les chambres de commerce et d'industrie, les chambres de métier afin qu'elles exercent ensemble, pendant une durée déterminée, des actions en faveur de la création ou du développement local des entreprises, des actions en faveur de la formation, ainsi que la gestion de ces actions.
Cette démarche de contractualisation nous semble d'autant plus pertinente que l'autonomie financière leur a été donnée dans la loi de finances rectificative pour 2004 : les soumettre à une sorte de cahier des charges et d'obligation de résultat en contrepoint à cette autonomie nous paraît tout à fait justifié.
Cet amendement précise par ailleurs les règles de fonctionnement des groupements d'intérêt public.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Il est dommage de finir cette soirée sur un avis défavorable après les nombreux avis favorables qui ont été émis, y compris à l'égard d'amendements du groupe socialiste. (Sourires.) Mais je vais vous expliquer la raison de celui que je vais émettre maintenant. Cela vous incitera peut-être à retirer votre amendement, mon cher collègue.
En fait, l'objet de cet amendement est de permettre la création de groupements d'intérêt public destinés à mettre en oeuvre des actions en faveur de la création ou du développement local des entreprises ainsi que de la formation.
Or l'article 236 de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux autorise déjà la création de GIP entre les mêmes personnes publiques et privées que celles qui sont visées par l'amendement et dans des domaines qui sont tout à fait proches : développement économique, études, recherche et formation, prospection des investissements étrangers, et j'en oublie sûrement...
Il n'y a pas trois mois que ces GIP peuvent être créés et vous en souhaitez déjà d'autres ! Mes chers collègues, voyons quels seront les résultats à moyen terme de l'application de cette loi dans ce domaine avant de proposer la création de nouvelles structures aux compétences semblables !
C'est pourquoi la commission a donné un avis défavorable sur cet amendement, qui semble très largement redondant avec le dispositif que le législateur a créé il y a quelques mois, sur l'initiative du Gouvernement, il convient de le rappeler.
J'espère donc qu'après toutes ces explications, mon cher collègue, vous allez retirer votre amendement et m'éviter, sinon de gâcher cette soirée, du moins de donner un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Dussaut, l'amendement est-il maintenu ?
M. Bernard Dussaut. Cette disposition existe sans doute, mais elle n'est pas encore utilisée.
Quoi qu'il en soit, pour bien terminer la soirée, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 306 est retiré.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
6
DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-303 du 31 mars 2005 portant simplification des règles de transfert de propriété des instruments financiers admis aux opérations d'un dépositaire central ou livrés dans un système de règlement et de livraison.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 403, distribué et renvoyé à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
7
TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Avant-projet de budget rectificatif n° 5 au budget général 2005 : État général des recettes.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2823 (annexe 5) et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Avant-projet de budget général de la Commission européenne pour l'exercice 2006. Aperçu général.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2902 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CEE) n° 1210/90 relatif à la création de l'agence européenne pour l'environnement et du réseau européen d'information et d'observation pour l'environnement en ce qui concerne le mandat du directeur exécutif. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CEE) n° 337/75 portant création d'un centre européen pour le développement de la formation professionnelle en ce qui concerne le mandat du directeur. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CEE) n° 1365/75 concernant la création d'une Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail en ce qui concerne le mandat du directeur et du directeur adjoint. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CEE) n° 1360/90 portant création d'une Fondation européenne pour la formation en ce qui concerne le mandat du directeur. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CEE) n° 302/93 portant création d'un Observatoire européen des drogues et des toxicomanies en ce qui concerne le mandat du directeur. Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 40/94 en ce qui concerne le mandat du président de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur. Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2100/94 en ce qui concerne le mandat du président de l'Office communautaires des variétés végétales. Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2965/94 portant création d'un Centre de traduction des organes de l'Union européenne en ce qui concerne le mandat du directeur. Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1035/97 portant création d'un Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes en ce qui concerne le mandat du directeur. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 178/2002 en ce qui concerne le mandat du directeur exécutif de l'Autorité européenne de sécurité des aliments. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 851/2004 instituant un Centre européen de prévention et de contrôle des maladies en ce qui concerne le mandat du directeur. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 726/2004 en ce qui concerne le mandat du directeur exécutif de l'Agence européenne des médicaments. Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1321/2004 en ce qui concerne le mandat du directeur exécutif de l'Autorité européenne de surveillance GNSS. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2062/94 instituant une Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail en ce qui concerne le mandat du directeur. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1406/2002 instituant une Agence européenne pour la sécurité maritime en ce qui concerne le mandat du directeur. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1592/2002 en ce qui concerne le mandat du directeur exécutif et des directeurs de l'Agence européenne de la sécurité aérienne. Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 881/2004 instituant une Agence ferroviaire européenne en ce qui concerne le mandat du directeur exécutif. Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2007/2004 en ce qui concerne le mandat du directeur exécutif et du directeur exécutif adjoint de l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des Etats membres de l'Union européenne.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2903 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil concernant la mobilisation du Fonds de solidarité de l'Union européenne, en application du point 3 de l'accord interinstitutionnel du 7 novembre 2002 entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission sur le financement du Fonds de solidarité de l'Union européenne, complétant l'accord interinstitutionnel du 6 mai 1999 sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2904 et distribué.
8
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président. J'ai reçu de M. François Zocchetto un rapport, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la justice (n° 330, 2004-2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 392 et distribué.
J'ai reçu de Mme Monique Cerisier-ben Guiga un rapport, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'entente en matière de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec (n° 349, 2004-2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 393 et distribué.
J'ai reçu de M. André Dulait un rapport, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, modifiant diverses dispositions relatives à la défense (n° 289, 2004-2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 394 et distribué.
J'ai reçu de M. André Rouvière un rapport, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sur le projet de loi autorisant la ratification de la convention des Nations unies contre la corruption (n° 356, 2004-2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 395 et distribué.
J'ai reçu de M. André Vantomme un rapport, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la Mesure relative à l'institution du secrétariat du Traité sur l'Antarctique (n° 344, 2004-2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 396 et distribué.
J'ai reçu de M. André Rouvière un rapport, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation du protocole établi conformément à l'article 34 du traité sur l'Union européenne, modifiant en ce qui concerne la création d'un fichier d'identification des dossiers d'enquêtes douanières, la convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes (n° 184, 2004-2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 397 et distribué.
J'ai reçu de M. Alain Milon un rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant réforme de l'adoption (n° 300, 2004-2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 398 et distribué.
J'ai reçu de M. Alain Vasselle un rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi organique, modifié par l'Assemblée nationale, relatif aux lois de financement de la sécurité sociale (n° 391, 2004-2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 399 et distribué.
J'ai reçu de M. André Trillard un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif à la procédure simplifiée d'extradition et complétant la Convention européenne d'extradition du 31 décembre 1957 (n° 345, 2004-2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 400 et distribué.
J'ai reçu de Mme Monique Cerisier-ben Guiga un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne signée à Tunis le 26 juin 2003, ainsi que de l'avenant n° 1 à cette convention signé à Tunis le 4 décembre 2003 (n° 347, 2004-2005).
Le rapport sera imprimé sous le n° 401 et distribué.
9
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président. J'ai reçu de M. Pierre André un rapport d'information fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan sur l'avenir des contrats de ville.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 402 et distribué.
10
ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, jeudi 16 juin 2005 :
A dix heures :
1. Discussion des conclusions du rapport (n° 381, 2004-2005) de M. Claude Biwer fait au nom de la commission des affaires économiques sur :
- la proposition de loi (n° 441, 2003-2004) de MM. Claude Biwer, Philippe Arnaud, Marcel Deneux, Jean-Léonce Dupont, Mmes Gisèle Gautier, Anne-Marie Payet, MM. François Zocchetto, Laurent Béteille et Michel Houel, tendant à considérer comme les effets d'une catastrophe naturelle les mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse ou à la réhydratation des sols quelle que soit leur intensité ;
- et la proposition de loi (n° 302, 2004-2005) de Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Pierre Sueur, Daniel Reiner, Yannick Bodin, Bernard Piras, Bertrand Auban, Jean Besson, Mme Claire-Lise Campion, MM. Jean-Noël Guérini, Claude Haut, Mme Sandrine Hurel, MM. Alain Journet, Serge Lagauche, Jacques Mahéas, François Marc, Mme Gisèle Printz, M. René-Pierre Signé, Mme Catherine Tasca, MM. Jean-Marc Todeschini, Richard Yung, Roland Courteau et des membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, tendant à assurer la transparence du régime de l'assurance des risques de catastrophes naturelles ;
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
À quinze heures et le soir :
2. Questions d'actualité au Gouvernement ;
3. Discussion des conclusions du rapport (n° 382, 2004-2005) de M. Alain Fouché fait au nom de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi (n° 174, 2004-2005) de MM. Alain Fouché, Pierre André, Philippe Arnaud, Gérard Bailly, José Balarello, Bernard Barraux, René Beaumont, Claude Belot, Claude Bertaud, Roger Besse, Joël Billard, Jean Bizet, Dominique Braye, François-Noël Buffet, Christian Cambon, Jean-Pierre Cantegrit, Jean-Claude Carle, Auguste Cazalet, Gérard César, Marcel Pierre Cléach, Christian Cointat, Mme Isabelle Debré, MM. Robert Del Picchia, Christian Demuynck, Marcel Deneux, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Michel Doublet, André Dulait, Jean-Paul Émin, Michel Esneu, Mme Françoise Férat, MM. André Ferrand, Bernard Fournier, Christian Gaudin, Mme Gisèle Gautier, MM. François Gerbaud, Georges Ginoux, Philippe Goujon, Daniel Goulet, Mme Adeline Gousseau, MM. Louis Grillot, Michel Guerry, Hubert Haenel, Mme Françoise Henneron, M. Michel Houel, Mmes Christiane Hummel, Elisabeth Lamure, M. André Lardeux, Mme Colette Melot, MM. Michel Mercier, Dominique Mortemousque, Philippe Nogrix, Mmes Anne-Marie Payet, Catherine Procaccia, MM. Henri Revol, Henri de Raincourt, Henri de Richemont, Bernard Saugey, Daniel Soulage, Yannick Texier, André Vallet, François Zocchetto, Louis de Broissia, Mme Valérie Létard, MM. Philippe Darniche et Georges Mouly, tendant à garantir l'équilibre entre les différentes formes de commerce ;
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
4. Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 297, 2004-2005) en faveur des petites et moyennes entreprises.
Rapport (n° 333, 2004-2005) de M. Gérard Cornu, fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan.
Avis (n° 362, 2004-2005) de Mme Catherine Procaccia, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Avis (n° 363, 2004-2005) de M. Auguste Cazalet, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation.
Avis (n° 364, 2004-2005) de M. Christian Cambon, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délai limite pour les inscriptions de parole et pour le dépôt des amendements
Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale (n° 391, 2004 2005) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 20 juin 2005, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 20 juin 2005, à seize heures.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant réforme de l'adoption (n° 300, 2004 2005) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 21 juin 2005, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 21 juin 2005, à dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la justice (n° 330, 2004 2005) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 22 juin 2005, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 22 juin 2005, à seize heures.
Proposition de loi de M. Laurent Béteille précisant le déroulement de l'audience d'homologation de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (n° 358, 2004 2005) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 22 juin 2005, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 22 juin 2005, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 16 juin 2005, à une heure.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD