compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert
vice-président
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Assistants maternels et assistants familiaux
Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux (n° 328, 2004-2005).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. André Lardeux, rapporteur pour la Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire, réunie le 10 mai dernier à l'Assemblée nationale, est parvenue à un accord sur la rédaction du projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux. Nous arrivons aujourd'hui, après une navette parlementaire commencée au Sénat en mai 2004, au terme d'un processus législatif exemplaire.
Je me félicite de constater que notre assemblée a largement contribué à rendre ce travail fructueux, tant par l'importance des amendements qui ont été adoptés que par la qualité de nos débats. A ce titre, je souhaite tout particulièrement rendre hommage à M. Fourcade, qui avait été le rapporteur de notre commission lors de l'examen du texte en première lecture. Le bilan positif que nous faisons aujourd'hui de cette année de travail lui doit beaucoup.
J'observe, enfin, avec satisfaction que l'intervention du ministre devant le Sénat en deuxième lecture a permis de lever les ambiguïtés que nous avions dénoncées dans l'interprétation de certaines dispositions de la nouvelle convention collective nationale des assistants maternels.
En réalité, le travail de la commission mixte paritaire s'est trouvé simplifié par le fait que la seconde lecture du texte avait déjà permis de rapprocher significativement les points de vue entre les deux assemblées. De ce fait, moins d'une dizaine de points restaient à clarifier.
Dans le premier volet du projet de loi, consacré aux conditions d'exercice de la profession, quelques choix devaient être opérés, car plusieurs amendements adoptés par l'Assemblée nationale entraient en contradiction avec les positions retenues par le Sénat.
Il s'agissait : de la suppression de l'ouverture des « relais assistants maternels » aux assistants parentaux, à l'article 1er B ; de la participation bénévole d'un ancien assistant maternel ou familial à la procédure d'agrément et au suivi des pratiques professionnelles, aux articles 5 et 9 bis ; des modalités d'encadrement de l'utilisation du bulletin n° 3 du casier judiciaire par le service de PMI, à l'article 5 ; de la possibilité, pour les assistants maternels vivant dans une zone urbaine sensible, de disposer d'un local hors de leur domicile pour garder les enfants, également à l'article 5.
D'une manière parfaitement équilibrée, la commission mixte paritaire s'est rendue aux arguments de l'Assemblée nationale s'agissant des deux premiers points, mais a suivi le Sénat sur les deux derniers.
Elle a ainsi mieux encadré l'utilisation du bulletin n° 3 du casier judiciaire lors de la procédure d'agrément et a supprimé la dérogation d'exercice de la profession hors du domicile, que l'Assemblée nationale avait accordée aux assistants maternels résidant en zone urbaine sensible.
Cette disposition posait en effet deux questions : celle du maintien des déductions fiscales accordées aux assistants maternels alors même que, dans ce cas, ils n'auraient pas utilisé leur domicile comme lieu de travail, et celle de l'engagement de la responsabilité des maires en cas d'incident dans le local agréé qui aurait été destiné à l'accueil des enfants.
Le compromis ainsi trouvé sur cette première partie me paraît pleinement satisfaisant, d'autant que les avancées initialement proposées par le Sénat n'avaient pas été remises en cause par l'Assemblée nationale : je pense notamment à la reconnaissance officielle des relais assistants maternels et à l'intégration des assistants maternels et familiaux dans les publics prioritaires pour l'accès à un logement locatif social.
Concernant le « volet droit du travail » du projet de loi, nous sommes aisément parvenus à une rédaction commune sur les trois points mineurs demeurant en discussion, reprenant d'ailleurs les positions défendues par le Sénat, qu'il s'agisse de la définition d'une norme nationale pour les indemnités et fournitures à remettre à l'assistant maternel, du régime juridique applicable en cas d'absence de l'enfant ou du mécanisme de « report de congés » créé au bénéfice des assistants familiaux.
Ces trois points s'ajoutent ainsi aux amendements d'origine sénatoriale qui avaient été adoptés en deuxième lecture et qui n'ont pas été remis en cause.
Notre assemblée aura donc amélioré le texte en créant une procédure d'annualisation du temps de travail des assistants maternels sur la base d'un plafond maximal de 2 250 heures ; en assurant la coordination de la loi avec les dispositions de la convention collective en matière de versement des indemnités et fournitures d'entretien et de modalités de prise de congé des assistants maternels ; enfin, en instituant un mécanisme de « report de congé » assimilable à un « compte épargne-temps » au bénéfice des assistants familiaux.
En définitive, votre commission des affaires sociales se félicite des avancées majeures permises par ce texte particulièrement attendu par les professionnels du secteur, comme par les familles. Je me réjouis de constater que, après les lois de 1977 et 1992, cette réforme fera date.
L'Assemblée nationale et le Sénat se sont finalement rejoints sur un point d'équilibre satisfaisant entre l'intérêt de l'enfant, les besoins des familles et l'amélioration nécessaire des conditions de travail des assistants maternels et familiaux.
C'est pourquoi la commission des affaires sociales vous invite à adopter ce projet de loi tel qu'il résulte des travaux de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre. (M. Francis Giraud applaudit.)
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous présenter le projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux en vue de son adoption définitive.
Je sais à quel point votre Haute Assemblée a contribué à enrichir ce texte au cours des différentes lectures, et je vous en remercie.
Je tiens à remercier tout particulièrement le président de la commission des affaires sociales, M. About, ainsi que les rapporteurs de ce texte, MM. André Lardeux et Jean-Pierre Fourcade.
Ce texte est très attendu par les professionnels et par tous les partenaires du secteur de la petite enfance.
Il est l'aboutissement d'un long travail de concertation et je tiens à remercier les nombreux acteurs qui ont participé aux travaux préparatoires, notamment les organisations syndicales et professionnelles représentant les assistants maternels et leurs employeurs, mais aussi l'Assemblée des départements de France, l'Association des maires de France et la Caisse nationale d'allocations familiales.
Il était du devoir du Gouvernement de faire en sorte que ces travaux de grande qualité puissent maintenant trouver un aboutissement rapide.
J'ai souhaité que la dernière lecture du projet de loi puisse avoir lieu dès la reprise des travaux du Parlement.
Il faut maintenant que les décrets d'application soient pris dans les meilleurs délais. Ils feront l'objet, eux aussi, d'une large concertation.
Le texte qui vous est soumis aujourd'hui reflète la volonté du Gouvernement d'agir en faveur de la petite enfance.
Dans la période récente, plusieurs mesures concrètes sont venues témoigner de l'engagement du Gouvernement au service de la politique familiale et, en particulier, de l'accueil des enfants.
Je citerai, par exemple, la mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant, qui est une aide très substantielle, notamment pour les familles disposant de faibles revenus.
Il convient de mentionner aussi le crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants. Cette disposition assure désormais une équité complète entre les familles, quel que soit le niveau de leurs revenus.
Enfin, comme vous le savez, le Gouvernement a décidé d'accroître le nombre de places de crèche. C'est pourquoi le Premier ministre vient d'annoncer la création de 15 000 places supplémentaires, qui s'ajouteront aux 28 000 places résultant des plans qui ont été lancés précédemment.
C'est dans le cadre de cette politique familiale que s'inscrit l'adoption de ce texte.
Il était important de reconnaître le rôle des assistants maternels et des assistants familiaux.
Le projet de loi qui vous est soumis redonne tout leur sens, toute leur importance à ces deux métiers qui offrent une solution de proximité humaine et bien adaptée aux exigences des parents.
Cette réforme vient compléter en profondeur un train de mesures qui ont été initiées dès 1977 et réactualisées en 1992.
Elle permet surtout de franchir une nouvelle étape. La reconnaissance de ces deux professions passe désormais par une redéfinition des modalités d'agrément ; les exigences en matière de formation sont renforcées dans de nombreux domaines ; le statut des assistants maternels et familiaux est amélioré, notamment en matière de rémunération, de temps de travail, de congés et de garanties en cas de licenciement.
Les assistants maternels occupent une place essentielle dans le processus de développement de la jeune enfance.
Les dispositions qui les concernent visent à assurer une meilleure qualité de service.
Premièrement, l'agrément : il fournit une garantie de sérieux et de sécurité. C'est le sens du formulaire que la loi met en place. Les candidats au métier d'assistant maternel seront agréés au vu de leurs aptitudes éducatives. La maîtrise de la langue française sera une condition.
Deuxièmement, l'accent est également mis sur la formation. La loi permettra de créer une nouvelle formation d'assistant maternel, plus longue et qui débouchera sur un certificat d'aptitude professionnelle « petite enfance ». En outre, les assistants maternels devront bénéficier d'une formation aux gestes de premiers secours. Il s'agira d'un préalable à tout début d'activité.
Troisièmement, les conditions de travail : elles sont améliorées, notamment en ce qui concerne le contrat de travail, la rémunération, ainsi que le temps de travail et les congés.
S'agissant des assistants familiaux, le texte apporte également des améliorations significatives. Les assistants familiaux sont un des piliers du système de l'aide sociale à l'enfance. Ils accueillent de façon permanente les enfants en difficulté. Ils viennent épauler les familles qui doivent affronter des moments difficiles.
Le texte permet d'améliorer leur formation, en distinguant deux temps : un stage de préparation à l'accueil des enfants et une formation d'adaptation à l'emploi qui sera délivrée au cours des trois premières années d'activité et qui conduira à un diplôme.
Le projet de loi améliore également leur statut professionnel. Plusieurs mesures ont été proposées, notamment la nouvelle structure de leur rémunération. Désormais, le revenu des assistants familiaux sera moins dépendant du nombre d'enfants accueillis.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement a cherché à apporter avec vous des réponses concrètes et justes aux attentes des professionnels.
Il a également souhaité satisfaire les aspirations des parents au regard de ce mode d'accueil.
En améliorant le statut des assistants maternels et des assistants familiaux, nous contribuerons à permettre aux parents de concilier plus facilement vie familiale et vie professionnelle. C'est essentiel pour que les couples puissent réaliser leur projet de vie. C'est également indispensable pour assurer le dynamisme de notre société et pour renforcer son activité et sa capacité à regarder l'avenir avec confiance. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, attendue, tant par les assistants maternels que par les familles, cette réforme s'inscrit dans deux logiques : l'amélioration de l'offre d'accueil complémentaire en crèche, annoncée par M. le Premier ministre lors de sa déclaration de politique générale et l'instauration d'un crédit d'impôt pour la garde des jeunes enfants.
S'il a été réformé au début des années quatre-vingt-dix, le statut des assistants maternels date néanmoins de 1977 et ne répond donc plus aux nécessités actuelles. Renforcé par la loi du 12 juillet 1992, il a, certes, rendu la formation initiale obligatoire, simplifié la procédure d'agrément et institué une mensualisation des rémunérations. Cependant, il reste bien en deçà des attentes et des évolutions nécessaires à la pérennisation de cette profession.
Face à l'insuffisance de l'offre de garde pour la petite enfance, il était urgent de réformer, de renforcer et de valoriser le mode de garde choisi par 55 % des familles. Avec la mise en place de la prestation d'accueil du jeune enfant, la PAJE, l'offre de garde par les assistants maternels risque rapidement de devenir insuffisante face à l'augmentation des demandes des familles, notamment dans les grandes agglomérations.
Ce texte, en professionnalisant davantage les assistants maternels et en rapprochant leur statut juridique du droit commun du code du travail, devrait permettre de susciter de nouvelles vocations.
Toutefois, s'il était urgent de réformer le statut des assistants maternels, il était également indispensable, dans le même temps, de ne pas déséquilibrer le rapport contractuel avec les parents employeurs. Aussi était-il nécessaire de rendre obligatoire l'établissement d'un contrat de travail écrit et de redéfinir les modalités de rupture de celui-ci. Il fallait donc éviter l'instauration de mesures trop contraignantes, qui auraient eu pour effet de rendre ce mode de garde insupportable pour les familles et qui auraient sans doute entraîné une hausse de la « garde au noir ».
Ce projet de loi répond à de nombreuses questions. Comment faire pour que les professionnels soient mieux formés et pour que les familles puissent confier leur enfant, en étant pleinement rassurées sur les conditions de la garde, sans pour autant trop lourdement grever leur budget ? Comment trouver le parfait équilibre entre la protection de l'enfant et de sa famille, d'une part, et la sécurité professionnelle de l'assistant, d'autre part ?
Ce texte aborde les questions difficiles de la nécessaire clarification et de la délimitation entre le statut des assistants maternels permanents, désormais appelés assistants familiaux, et celui des assistants maternels, qui accueillent des enfants chez eux pour la journée. Il traite également de la rénovation du statut juridique des assistants maternels. Enfin, il amorce une amélioration de la qualité de l'accueil des enfants qui leur sont confiés.
Je me réjouis donc des résultats obtenus aujourd'hui, car nous avons réussi à élaborer un texte équilibré et consensuel.
Ce texte est équilibré, car il prend en compte les spécificités départementales dans l'attribution des agréments. Je remercie le président de commission des affaires sociales, M. Nicolas About, de sa proposition de synthèse formulée devant la commission mixte paritaire.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Merci !
Mme Muguette Dini. Ce texte est équilibré, également, car il place l'enfant, sa sécurité, sa santé et ses besoins au coeur des systèmes d'agrément. Il ne fait désormais plus supporter aux familles les coûts éventuels des retraits d'agrément, effectués et décidés par les conseils généraux.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Oui !
Mme Muguette Dini. Ce texte est équilibré, en outre, car il donne à tous les assistants maternels et familiaux la reconnaissance nécessaire, en refusant, par exemple, la précarisation de ceux qui travaillent dans des quartiers dits « sensibles » et en renforçant l'effort d'harmonisation réalisé par l'ensemble de ce projet de loi.
Ce texte est équilibré, enfin, car le mécanisme d'annualisation du temps de travail proposé par notre Haute Assemblée devrait offrir aux familles plus de souplesse et leur imposer moins de contraintes en termes d'organisation des temps de garde. Instaurer non pas une durée de travail hebdomadaire maximale mais un plafond annuel répond parfaitement à la nécessaire flexibilité demandée à cette profession.
Pour toutes ces raisons, le groupe UC-UDF est en accord avec ce texte, qui ouvre la voie à une meilleure prise en compte des enfants, tout en préservant le haut niveau d'exigence que les familles sont en droit d'attendre de ceux qui en ont la garde. C'est pourquoi il le votera. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. La reconnaissance des deux métiers d'assistant maternel et d'assistant familial est, comme nous l'avons déjà dit à maintes reprises, une mesure essentielle pour améliorer l'accueil de la petite enfance, mais elle n'est pas suffisante.
Cette reconnaissance a en effet des conséquences économiques et sociales importantes, sur lesquelles ce projet de loi reste muet.
Le temps n'a pourtant pas manqué : le parcours législatif de ce projet de loi aura été bien long, et ce alors même qu'il était urgent de donner un véritable statut aux 300 000 assistants maternels et aux 45 000 assistants familiaux qui vivent, depuis trop longtemps, dans un véritable flou juridique les maintenant à l'écart du droit commun du travail et contraignant la plupart d'entre eux à une précarité inadmissible.
Tout le monde s'accorde donc à dire qu'il était primordial d'accorder aux assistants familiaux et aux assistants maternels la reconnaissance et la considération auxquelles ils ont droit. Nous le reconnaissons et nous l'avons dit : le débat parlementaire aura permis quelques avancées positives.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ah !
M. Guy Fischer. Toutefois, les mesures que nous avons défendues et qui allaient dans le sens d'une plus grande reconnaissance et d'une meilleure protection de ces deux professions - elles avaient d'ailleurs trouvé un écho à l'Assemblée nationale - ont été supprimées par le Sénat. Je pense ainsi à l'uniformisation des salaires, à la formation professionnelle reconnue sur tout le territoire, ou encore à l'obtention de l'agrément à partir d'une grille nationale. Même si des avancées ont eu lieu, toutes les dispositions favorables aux assistants maternels et aux assistants familiaux ont été, non pas tout à fait abandonnées, mais insuffisamment précisées.
Cette régression est encore plus sensible s'agissant des dispositions relatives au droit du travail. En effet, sous le prétexte d'harmoniser les dispositions de ce projet de loi avec la convention collective nationale signée entre les assistants maternels et les particuliers employeurs, le Sénat a notamment modifié les mesures relatives à la rémunération des assistants familiaux en cas d'absence de l'enfant gardé et celles qui concernent les congés des assistants maternels et les indemnités à leur verser, ainsi que les fournitures à leur procurer.
Toutefois, même si l'on ne peut pas dire que la navette entre les deux assemblées a provoqué des dégâts dans ce projet de loi, les questions qui motivent notre abstention demeurent.
Ce texte ne permet pas, en effet, une reconnaissance pleine et entière des métiers d'assistant maternel et d'assistant familial, alors que les attentes de ces professionnels sont grandes. Or, en renvoyant sans cesse au domaine réglementaire, ce projet de loi risque, ce que nous ne souhaitons pas, de les décevoir. En effet, quel sera le contenu réel des formations ? Quel sera le taux de la rémunération ? La qualification aura-t-elle une valeur nationale ? Nous n'avons pas pu discuter de ces questions, qui sont renvoyées au domaine réglementaire. L'incertitude demeure donc.
Certes, le Sénat a adopté un amendement tendant à prévoir la consultation des principales associations d'élus sur les projets de décrets d'application. Cette garantie n'est pourtant que partielle, car rien ne vous obligera, monsieur le ministre, à suivre les avis desdites associations.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Heureusement !
M. Guy Fischer. Par ailleurs, les différents acteurs du secteur de la petite enfance auraient certainement préféré que le projet de loi soit dès aujourd'hui plus précis. D'ailleurs, un certain nombre d'associations, je pense à l'UNAFAM, l'Union nationale des familles de malades mentaux, ont vivement contesté plusieurs dispositions de ce texte.
Plus généralement, ce texte ne permet ni de répondre à la question des salaires de l'ensemble des accueillants, à titre permanent ou non, ni à celle de la réduction des inégalités de rémunération suivant les départements. Pourtant, le rapport d'avril 2002, qui reprenait les conclusions des groupes de travail animés par la direction générale de l'action sociale, avait mis en évidence les différences considérables de niveau de rémunération entre les départements.
Ainsi, selon ce rapport, les salaires peuvent varier du simple au double, par le biais de l'indemnité d'entretien, le salaire moyen se situant, à l'échelon national, entre 105 et 110 fois le SMIC horaire par mois. Dès lors, on ne peut que constater le manque cruel de dispositions relatives à l'indispensable revalorisation salariale de ces professions.
Par ailleurs - et c'est un comble ! - ce texte ne contient rien sur les droits syndicaux, les droits sociaux, les retraites, notamment la validation des périodes travaillées avant 1992. En réponse à ces questions, qui ont été soulevées avec force par les organisations syndicales représentant les deux professions, de réelles mesures sociales auraient pourtant grandement contribué à une véritable reconnaissance de ces métiers.
J'en viens au financement des réformes prévues dans ce projet de loi. Le problème reste entier. De nombreuses dispositions auront en effet des incidences financières sur les parents employeurs et sur les conseils généraux, sans que ces derniers soient à même de les quantifier, compte tenu du fait qu'aucune étude d'impact de ces mesures, aucun chiffrage du coût de leur application ne sont pour l'instant disponibles. Or les compensations prévues par l'Etat, si elles existent, sont totalement virtuelles.
En somme, ce texte, destiné à permettre le franchissement d'étapes décisives - ce dont nous nous réjouissons, monsieur le ministre - pour les assistants maternels et familiaux reste muet sur des questions aussi essentielles que la protection sociale, la durée du temps de travail, le salaire, la formation, ou encore la retraite. Je ne parlerai pas des passerelles.
Nous ne pouvons admettre le renvoi quasi systématique à des mesures réglementaires, s'agissant de dispositions ayant des incidences financières sur les départements ou sur les employeurs privés.
En conclusion, entre les dispositions que nous jugeons favorablement et celles dont la présence ou l'absence sont difficilement acceptables, le bilan reste...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Globalement positif ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. Ah ! Dirais-je qu'il est positif ? Non ! Le bilan est globalement négatif. (Nouveaux sourires.)
Les professionnels concernés par ce projet de loi attendaient un véritable statut, qui soit le signe de la reconnaissance et du respect auxquels ils ont droit. Au lieu de cela, ils doivent aujourd'hui se contenter d'un projet de loi qui fait de leur métier une profession aux contours encore mal définis et qui n'apporte pas de réponses satisfaisantes aux problèmes sociaux auxquels ils sont confrontés.
Nous n'avons donc pas d'autre choix que de nous abstenir sur un texte qui n'est pas à la hauteur des enjeux de la professionnalisation des assistants maternels et des assistants familiaux.
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la navette sur ce projet de loi très attendu a duré une année, avec tous les inconvénients que cela suppose. Nombreux sont les assistants maternels et familiaux qui, avec impatience, m'ont demandé des nouvelles de ce texte.
De plus, la convention collective nationale des assistants maternels du particulier employeur est entrée en vigueur entre temps. Les choses ont donc été faites dans le désordre. Nous le regrettons. Mais comment pouvait-il en être autrement devant un tel manque d'empressement de la part du Gouvernement ?
Nous constatons qu'au terme de son examen à l'Assemblée nationale et de son passage en commission mixte paritaire le texte final, malgré certaines avancées, ne fait toujours pas apparaître une volonté déterminée pour que les professions d'assistant maternel et d'assistant familial soient reconnues comme étant des métiers à part entière, avec des conditions égalitaires dans tout le pays.
Je ne reviendrai pas sur toutes les décisions de la commission mixte paritaire.
Nous regrettons que des amendements déposés par mon groupe en première lecture, qui n'avaient pas été adoptés par le Sénat mais l'avaient été par l'Assemblée nationale, puis qui avaient été repoussés par le Sénat et à nouveau adoptés par l'Assemblée nationale, aient finalement été rejetés par la Haute Assemblée.
Pourtant, ils étaient la traduction de demandes formulées par les nombreux assistants maternels et assistants familiaux que nous avons rencontrés. Ils concernaient, bien sûr, la définition de critères nationaux d'agrément. Je l'ai dit ici même lors de chaque examen du texte : nous restons convaincus qu'il fallait maintenir des critères nationaux pour la délivrance de l'agrément, afin de préserver l'égalité de traitement sur tout le territoire national et d'apporter des garanties aux familles. De tels critères auraient permis également de garantir l'objectivité totale de l'agrément.
Vous prétendez donner un véritable statut et une reconnaissance à cette profession, mais le texte accroît finalement le risque de dérives dans des départements.
Par ailleurs, la commission mixte paritaire a adopté un amendement tendant à supprimer le dernier alinéa de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles qui autorise les femmes à exercer la profession d'assistant maternel hors de leur domicile lorsqu'elles vivent dans des quartiers peu attractifs. Nous sommes favorables à cette suppression car une telle disposition n'allait dans l'intérêt ni des assistants maternels, ni des familles et des enfants, ni des élus locaux.
Enfin, la commission mixte paritaire a adopté, dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, l'article 36 visant la consultation des principales associations d'élus, pour avis, sur les projets de décrets d'application de la présente loi. Cette rédaction ne nous déplaît pas car elle ne réduit pas la portée de notre amendement adopté ici même le 31 mars dernier.
Nous avons souligné à maintes reprises que ce projet de loi faisait trop souvent référence à des décrets et nous nous sommes interrogés sur le contenu de ces textes d'application, notamment de ceux qui engagent les finances locales. Il nous semble important et indispensable que les associations d'élus, comme l'Assemblée des départements de France et l'Association des maires de France, puissent y apporter leur concours. Ainsi, l'expérience des élus locaux sera prise en compte.
Cela étant, ces quelques dispositions, pour intéressantes qu'elles soient, ne sont pas de nature à nous faire changer d'avis sur l'ensemble de ce texte. C'est pourquoi nous nous abstiendrons.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement, étant appelé à se prononcer avant l'Assemblée nationale, le Sénat se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte.
TITRE IER
DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE DE L'ACTION SOCIALE ET DES FAMILLES
CHAPITRE IER
DISPOSITIONS MODIFIANT LE LIVRE II DU CODE DE L'ACTION SOCIALE ET DES FAMILLES