M. le président. Je vous indique, mes chers collègues, qu'à la demande de la commission, avec l'accord du Gouvernement, les amendements nos 96 et 152 rectifié sont réservés jusqu'après l'article 8.
L'amendement n° 54, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé
La France, par l'intermédiaire du ministre chargé de l'industrie, demande la renégociation des directives européennes impliquant l'ouverture à la concurrence du secteur postal.
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Monsieur le ministre, mes chers collègues, mesurons bien les enjeux : le projet de loi qui nous est soumis vise à faire franchir à la France un pas important dans la déréglementation du secteur postal.
Le dogme libéral est formel : la concurrence est la mère de la prospérité, de la baisse des prix et de la liberté. Les commissaires européens se chargent de la diffusion de ces principes et le gouvernement français, par ce projet de loi, les applique.
Comme l'a rappelé mon collègue et ami Gérard Le Cam, comment ne pas prendre en considération la situation du secteur postal en Suède ? Ce pays fut, nous le savons, un des premiers à privatiser sa poste, en 1993. Aussi disposons-nous aujourd'hui du recul nécessaire pour évaluer les bénéfices de cette déréglementation.
Cet exemple est d'autant plus éclairant que la Suède est, comme la France, un pays dans lequel la densité de la population est assez faible et où des régions très urbanisées côtoient des zones rurales beaucoup plus isolées.
Un article de presse paru en décembre dernier dans un journal que vous connaissez bien, Le Figaro Economie, a dressé un bilan catastrophique de cette déréglementation.
Sa conclusion était sans appel et nous y souscrivons : « Les politiciens ont commis la première erreur en libéralisant le monopole, en 1993, mais surtout, par la suite, l'Etat propriétaire n'a pas su justifier, défendre le service public ».
La concurrence est censée faire baisser les prix. En Suède, ils ont doublé, probablement parce que cette industrie de réseau constitue un monopole naturel.
La concurrence est censée inciter les opérateurs à améliorer leurs prestations de service. En Suède, elles se sont dégradées. Le service public n'y est plus qu'un lointain souvenir.
La concurrence n'est pas censée améliorer les conditions de travail des employés ou l'emploi dans les entreprises. C'est bien la seule promesse que la libéralisation de la poste en Suède a effectivement permis de respecter.
Je pourrais aussi évoquer l'exemple de l'Allemagne, auquel vous avez fait référence, monsieur le ministre, pays dans lequel un tiers des emplois ont été supprimés dans la poste. Nous ne nous en réjouissons pas et c'est pourquoi nous combattons ce type de déréglementation.
Nous sommes convaincus, nous tenons à le souligner, que des objectifs doivent être partagés sur le plan européen, par exemple la garantie d'une collecte et d'une distribution sur l'ensemble des territoires, une circulation du courrier rapide et sécurisée entre les pays. Constituer un réseau commun aux vingt-cinq États membres permettrait de faire de la présence postale un facteur de cohésion sociale sur l'ensemble des territoires. Il convient en d'autres termes d'élaborer une politique commune des services postaux reposant non pas sur l'idée de concurrence, mais sur celle de coopération.
Un tel objectif aurait toute sa place dans un projet de constitution européenne progressiste. C'est pourquoi, par cet amendement, nous proposons que soient renégociées les directives européennes sur la libéralisation du secteur postal.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Monsieur Bret, permettez-moi d'insister une nouvelle fois sur l'appartenance politique des gouvernements qui, en 1997 et 2002, ont négocié à Bruxelles les directives communautaires organisant l'ouverture à la concurrence du secteur postal. Ces gouvernements émanaient, je le rappelle, de la gauche plurielle !
Je considère qu'il est paradoxal que ceux qui ont participé à des gouvernements ayant accepté ces directives en demandent aujourd'hui la renégociation.
M. Robert Bret. Nous étions contre, relisez les comptes rendus de nos travaux !
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission ne peut donc qu'être défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. J'apporterai deux nuances à l'expérience de la poste suédoise, qui s'est conclue par un échec.
Tout d'abord, les Suédois ont commis la grossière erreur de vendre les activités de banque postale.
Mme Hélène Luc. D'abord parce qu'ils les ont privatisées.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Absolument !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Ensuite, les Suédois ont vendu l'activité colis qu'ils exerçaient non seulement en Suède, mais aussi dans les pays baltes, activité que La Poste française a achetée. (Sourires sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) Nous avons donc fait exactement le contraire des Suédois. C'est la raison pour laquelle La Poste va gagner des parts de marché. Faisons-lui confiance !
Mme Hélène Luc. Ce n'est pas qu'un problème de marché.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Par ailleurs, il est un peu lassant de vous rappeler sans cesse, mesdames, messieurs de l'opposition, que ce sont les gouvernements que vous souteniez qui ont signé les directives, mais que, pendant cinq années, soit de 1997 de 2002, ils n'ont eu le courage ni de les transposer ni de les renégocier.
M. Robert Bret. Vous l'avez déjà dit
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Certes, mais je me répète en écho à vos propos. De toute façon, vous ne viendrez pas à bout de ma patience : je recommencerai chaque fois que nécessaire. Je vous propose donc un modus vivendi : cessez d'en parler et je vous ficherai la paix. ! (Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.- Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. L'amendement n° 55, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Le gouvernement soumet à ses partenaires européens le projet d'insérer systématiquement une clause de réversibilité dans les directives européennes existantes et futures.
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. L'idée de réseaux postal, énergétique et ferroviaire à l'échelle européenne est ambitieuse. Garantir durablement les prestations de service public doit, en effet, constituer un objectif prioritaire dans la construction européenne.
Cependant, l'Union européenne et ses chefs d'État nous proposent comme unique solution la libéralisation de l'ensemble des activités humaines, renonçant de fait à l'intervention de la puissance publique pour la mise en oeuvre de politiques dans l'intérêt des peuples.
Les chemins de fer, le transport aérien, les télécommunications, le réseau électrique, tout y passe ! Non sans ratés ! Le scandale des pannes d'électricité, les accidents, parfois catastrophiques, des chemins de fer britanniques faute d'un entretien suffisant, les augmentations de prix incessantes dans tous les secteurs concernés, tout cela n'est guère réjouissant, ni pour les usagers ni pour les salariés.
Manifestement, votre ambition de construire un projet économique et social autour d'un grand marché est inadaptée. Il nous semble qu'il serait de bonne politique, pour construire une Europe qui aille dans le sens du maintien de la cohésion sociale et de l'amélioration concrète des services publics, de permettre de renégocier ce qui ne marche pas.
L'idée de la réversibilité de toute loi, et plus largement de tout texte juridique, est une évidence pour tout acteur politique : quand un élu, quel qu'il soit, décide de mettre en oeuvre un projet et qu'il réalise, quelque temps après, que les objectifs visés par ce projet n'ont pas été atteints ou qu'ils ont suscité des effets pervers inattendus, il doit pouvoir faire marche arrière.
Malheureusement, cette évidence n'en est pas une pour les représentants de la Commission européenne.
Jamais en effet nous n'avons vu la Commission européenne faire marche arrière sur les politiques qu'elle a pu mener ; jamais nous ne l'avons vu admettre qu'elle s'était trompée. Or, au vu de la situation économique et sociale qui prévaut en Europe, au vu de la croissance économique atone du vieux continent depuis l'adoption du traité de Maastricht, il y aurait beaucoup à dire sur le contenu de ces politiques européennes.
Nous sommes d'autant plus inquiets que le projet de constitution européenne, en débat depuis quelques mois dans notre pays, ne vise à rien d'autre qu'à institutionnaliser les principes de politique économique qui mènent l'Europe à la faillite. Loin d'accepter de porter un quelconque regard critique sur leur action et donc d'être en mesure de concevoir l'idée qu'un acte politique est réversible, les responsables communautaires ont choisi la fuite en avant.
Ainsi, l'achèvement du marché intérieur devient une fin en soi, quelles que soient ses conséquences économiques et sociales.
L'exemple de La Poste est, à ce titre, symptomatique du dogmatisme idéologique des responsables communautaires : les préceptes libéraux vous délivrent un message que vous cherchez à appliquer coûte que coûte.
Les faits sont pourtant parlants. Vous ne pouvez que constater la dégradation de la qualité des prestations de nos services publics, notamment en milieu rural, et avec elle celle des conditions de vie des peuples européens.
Cet amendement ne vise pas à vous obliger à reconnaître la nécessité de défendre les services publics à la française. Il est encore moins dicté par notre volonté de voir socialisés les moyens de production. Cet amendement n'est inspiré que par un état d'esprit que vous prétendez souvent partager : le pragmatisme.
Être pragmatique, c'est accepter de reconnaître ses erreurs, c'est ouvrir les yeux face à la réalité des faits, en d'autres termes, c'est accepter d'envisager la réversibilité des directives européennes.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Je rappellerai à M. Billout et à ses collègues du groupe communiste républicain et citoyen que le traité constitutionnel européen prévoit la possibilité pour les Etats membres de se retirer de l'Union, et donc de renoncer de facto à l'acquis communautaire. Peut-on estimer que cette disposition satisfait la demande exprimée par le groupe communiste ? A défaut, les engagements souscrits par notre pays dans le cadre des traités européens ne permettent guère l'introduction de telles dispositions dans notre droit.
De fait, la réversibilité des préconisations des directives dépend non pas d'un Etat membre isolé, qui ne peut, par un artifice juridique, se soustraire seul à ses obligations européennes, mais d'un accord majoritaire de nature politique entre l'ensemble des Etats membres.
L'avis de la commission est bien sûr défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. La proposition est amusante ! Cela dit, si nous réussissions à introduire une telle clause dans les directives, elle s'appliquerait selon le principe du parallélisme des formes : pour qu'elle soit retirée, il faudrait que soient réunies les mêmes conditions, par exemple de majorité, qui ont présidé à son adoption. C'est déjà le cas !
Votre proposition, monsieur le sénateur, est donc tout à fait inutile.
Mme Hélène Luc. Non, on ne peut pas dire cela !
M. le président. L'amendement n° 56, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« Le service public postal contribue à garantir la cohésion sociale, en assurant un égal accès de tous les citoyens aux services offerts par La Poste, en participant à la lutte contre les exclusions et au développement équilibré du territoire. »
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier. Cet amendement vise essentiellement à rappeler les principes fondateurs qui, de notre point de vue, doivent guider l'action publique pour la mise en oeuvre de nos services publics.
En effet, du fait du changement de statut vers la privatisation, du fait de l'alourdissement des contraintes financières liées à l'ouverture du secteur à la concurrence, l'objet social de ces services publics diminue progressivement.
Nous avons des services publics ; mais le Gouvernement les vide de leur contenu ; il démantèle les monopoles qui permettaient de les assurer dans des conditions satisfaisantes.
Ces monopoles étaient justifiés par l'objet même de leur activité : permettre la concrétisation des valeurs fondamentales de la République.
Pour la mise en oeuvre des services publics, un certain nombre de principes constitutionnels doivent être respectés : l'égalité de traitement, qui suppose la péréquation tarifaire ; l'accès de tous aux services, qui implique la continuité territoriale.
Une évolution des services publics doit effectivement être envisagée, mais plutôt pour permettre d'impliquer citoyens et élus locaux dans leur gestion afin de démocratiser les choix économiques pour des secteurs vitaux comme l'énergie, la poste, le transport, le crédit, l'eau, les déchets. Il s'agit en fait de permettre une évolution des services afin de mieux prendre en compte les besoins des citoyens.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Je relève que la rédaction proposée par M. Billout et ses collègues du groupe communiste républicain et citoyen pour définir les missions que doit assumer le service public postal s'inspire largement de celle de l'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques, dans lequel est défini le service postal universel. Cependant, la rédaction de l'article L. 1 s'ajuste plus étroitement que celle que proposent nos collègues aux choix terminologiques des textes européens.
C'est pourquoi, à choisir, il apparaît préférable de retenir la rédaction actuelle de l'article L. 1 et d'écarter celle que présente l'auteur de l'amendement n° 56.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 57, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« Avant le 1er octobre 2005, le gouvernement adresse au Parlement un rapport sur le bilan de la déréglementation dans le secteur postal.
« Ce rapport examine l'impact en termes d'emplois et d'aménagement du territoire de la transposition des directives européennes postales. Il comporte une étude prospective à l'horizon 2009 sur ces différents aspects. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. En Europe et dans le monde, le bilan de la libéralisation des services publics s'est révélé bien négatif, tant pour les usagers que pour les salariés. Les traits les plus marquants en sont les suppressions massives d'emploi chez les opérateurs historiques, peu compensées par les opérateurs privés ou remplacées par des emplois le plus souvent précaires, l'augmentation des prix pour les usagers, aussi bien dans le secteur des télécommunications ou de l'électricité que dans le secteur postal, la liquidation des dispositifs de péréquation, mais aussi la situation de faillite de certaines entreprises privatisées.
Face à certaines situations catastrophiques, l'Etat a dû venir à la rescousse d'opérateurs privés. Faut-il rappeler que la société Railtrack, chargée du réseau ferroviaire britannique et privatisée en 1996, a dû être reprise en main et recapitalisée par l'Etat en raison de son incapacité à financer les dispositifs de sécurité dont la carence avait entraîné la perte de dizaines de vies humaines ? (M. Gérard Delfau marque son approbation.)
Si de telles insuffisances ne risquent pas de prendre un tour aussi tragique dans le secteur postal, les conséquences en termes de cohésion sociale, d'égalité de traitement entre les usagers et d'aménagement du territoire seront inévitablement négatives, en raison de l'étranglement de l'opérateur historique provoqué par la libéralisation du secteur et l'absence d'obligation de service public pour les opérateurs privés. Les exemples suédois, allemand ou néerlandais donnent une idée du scénario qui nous attend.
L'effondrement des marchés, illustré notamment par les mésaventures de Vivendi ou d'Alcatel, est une raison supplémentaire pour s'opposer à la prise en main des services publics par des opérateurs privés. Le capital des entreprises chargées d'assurer le service postal aux usagers et aux entreprises sera entre les mains d'actionnaires dont l'objectif est une rentabilité assurée.
Le Gouvernement invite donc les nouveaux entrants à capter les segments les plus rentables du marché postal, par exemple les envois intra-urbains, ceux dont le coût unitaire est le plus faible, laissant à l'opérateur historique la charge de remplir l'ensemble des missions de service public.
La lutte de l'opérateur historique pour sa survie dans cet environnement concurrentiel l'amène déjà à se positionner sur les segments les plus rentables de ses activités et à faire de la hausse de la productivité et des suppressions d'emploi une de ses priorités.
Une fois de plus, donc, le Gouvernement impose une logique capitaliste : ouverture à la concurrence et privatisation des profits, socialisation des pertes.
Ce qu'il institue, à l'instar de ce qui a été mis en oeuvre dans le secteur des télécommunications, c'est donc un service public résiduel que l'opérateur historique sera contraint d'assurer a minima, s'alignant cependant sur la gestion des opérateurs privés pour soutenir la concurrence.
Cet étranglement organisé de l'opérateur historique ne sera cependant pas sans conséquences sur le réseau postal, qui structure l'ensemble du territoire national.
Pour toutes ces raisons, nous demandons un rapport détaillé sur les coûts de la libéralisation du secteur postal : coûts humains, coûts sociaux, coûts environnementaux et coûts pour la collectivité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Le suivi des conséquences de la transposition de la directive postale en termes d'emploi et d'aménagement du territoire est déjà assuré par la Commission européenne.
Celle-ci a publié deux rapports sur ce sujet en juillet 2004 ; j'imagine que vous en avez pris connaissance. L'un d'entre eux dresse notamment un premier bilan de l'ouverture à la concurrence du marché postal européen. Il estime d'ailleurs que le nombre total de personnes employées par les prestataires du service universel postal de l'Union européenne a augmenté, entre 2000 et 2002, de près de 5 %, essentiellement grâce aux acquisitions opérées par les cinq plus grands prestataires du service universel.
Nous ne pouvons donc accepter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. M. Hérisson a excellemment dit ce qu'il fallait dire : la Commission européenne publie régulièrement des études sur l'impact des directives. Deux d'entre elles sont particulièrement intéressantes : l'une porte sur les données fondamentales de l'économie postale, l'autre sur les pratiques des Etats membres en termes de régulation sectorielle.
Cet amendement est donc redondant ; le Gouvernement y est défavorable.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Je suis très étonné que M. le rapporteur et le représentant du Gouvernement nous expliquent que, désormais, c'est par des rapports de la Commission européenne qu'est évalué ce qui se passe en France.
M. Robert Bret. Il faut voter « non » au référendum !
M. Gérard Delfau. Cet argument est absolument déconcertant et me semble tout à fait hors de propos. Mais, puisqu'il est utilisé, mes chers collègues, allez donc voir ce que sont ces rapports, si vous ne l'avez déjà fait : ils dépeignent ce qui s'est passé dans nombre de pays européens de façon totalement idyllique et tout aussi faussée, si du moins on adopte le point de vue de la qualité du service rendu à la population et non pas celui des bénéfices réalisés par un certain nombre d'opérateurs privés.
Voilà pourquoi je dis vraiment à M. le ministre et à M. le rapporteur que je trouve, cette fois, leur position complètement idéologique, et je ne pense pas que ce soit l'intérêt de La Poste que nous nous engagions dans ce débat-là, sous cette forme-là.
M. Jean Desessard. Voilà qui est envoyé !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 1er
Le chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° Il est intitulé : « Le service universel postal et les obligations du service postal » et comprend les articles L. 1 à L. 3-2 ;
2° Au début de l'article L. 1, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Pour l'application du présent code, les services postaux sont la levée, le tri, l'acheminement et la distribution des envois postaux.
« Constitue un envoi postal tout objet destiné à être remis à l'adresse indiquée par l'expéditeur sur l'objet lui-même ou sur son conditionnement et présenté dans la forme définitive dans laquelle il doit être acheminé. Sont notamment considérés comme des envois postaux les livres, les catalogues, les journaux, les périodiques et les colis postaux contenant des marchandises avec ou sans valeur commerciale.
« L'envoi de correspondance est un envoi postal ne dépassant pas deux kilogrammes et comportant une communication écrite sur un support matériel, à l'exclusion des livres, catalogues, journaux ou périodiques. Le publipostage fait partie des envois de correspondance. » ;
3° Les trois derniers alinéas de l'article L. 2 sont remplacés par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Un décret en Conseil d'Etat, pris après consultation du prestataire du service universel, et après avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques, précise les caractéristiques de l'offre de service universel que La Poste est tenue d'assurer.
« Les services postaux relatifs aux envois de correspondance intérieure ou en provenance de l'étranger, y compris ceux assurés par courrier accéléré, sont réservés à La Poste lorsque leur poids ne dépasse pas 100 grammes et que leur prix est inférieur à trois fois le tarif de base. Constituent le secteur réservé, à compter du 1er janvier 2006, les services portant sur les envois de correspondance d'un poids ne dépassant pas 50 grammes et d'un prix inférieur à deux fois et demie le tarif de base. Les envois de livres, catalogues, journaux et périodiques sont exclus du secteur réservé à La Poste.
« Le tarif de base mentionné ci-dessus est le tarif applicable à un envoi de correspondance du premier échelon de poids de la catégorie normalisée la plus rapide. Tant qu'il sert de référence pour la délimitation des services réservés, sa valeur ne peut excéder 1 €.
« Par dérogation au troisième alinéa, la personne qui est à l'origine des envois de correspondance ou une personne agissant exclusivement en son nom peut assurer le service de ses propres envois.
« Un décret en Conseil d'Etat, pris dans les six mois suivant la publication de la loi n° du relative à la régulation des activités postales, détermine les conditions administratives et techniques dans lesquelles les envois recommandés utilisés dans le cadre de procédures administratives ou juridictionnelles sont susceptibles d'être confiés à des prestataires de services postaux. » ;
3° bis Supprimé ;
4° Après l'article L. 2, il est inséré un article L. 2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2-1. - Le prestataire du service universel peut conclure avec les expéditeurs d'envois de correspondance en nombre, les intermédiaires groupant les envois de correspondance de plusieurs clients ou les titulaires de l'autorisation prévue à l'article L. 3, des contrats dérogeant aux conditions générales de l'offre du service universel et incluant des tarifs spéciaux pour des services aux entreprises. Les tarifs tiennent compte des coûts évités par rapport aux conditions des services comprenant la totalité des prestations proposées.
« Le prestataire détermine les tarifs et les conditions de ces prestations selon des règles objectives et non discriminatoires.
« Ces contrats sont communiqués à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes à sa demande. » ;
5° L'article L. 3 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3. - Les prestataires de services postaux non réservés relatifs aux envois de correspondance, y compris transfrontalière, doivent être titulaires d'une autorisation délivrée dans les conditions prévues à l'article L. 5-1, sauf si leur activité se limite à la correspondance intérieure et n'inclut pas la distribution. » ;
6° Après l'article L. 3, sont insérés deux articles L. 3-1 et L. 3-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 3-1. - Les prestataires de services postaux mentionnés à l'article L. 3 ont accès, dans des conditions transparentes et non discriminatoires, selon des modalités techniques et tarifaires prévues dans le cadre de conventions signées à cette fin, aux moyens techniques détenus par le prestataire du service universel qui sont indispensables à l'exercice de leurs activités postales.
« Ces moyens techniques comprennent le répertoire des codes postaux, les informations collectées par La Poste sur les changements d'adresse, un service de réexpédition en cas de changement d'adresse du destinataire, un service de distribution dans les boîtes postales installées dans les bureaux de poste.
« Art. L. 3-2. - Toute offre de services postaux est soumise aux règles suivantes :
« a) Garantir la sécurité des usagers, des personnels et des installations du prestataire de service ;
« b) Garantir la confidentialité des envois de correspondance et l'intégrité de leur contenu ;
« c) Assurer la protection des données à caractère personnel dont peuvent être dépositaires le prestataire du service universel ou les titulaires de l'autorisation prévue à l'article L. 3, ainsi que la protection de la vie privée des usagers de ces services ;
« d) Exercer ses activités dans des conditions techniques respectant l'objectif de préservation de l'environnement. »
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, sur l'article.
M. Jean Desessard. Je soulignerai en préalable que les élus Verts et moi-même souscrivons totalement aux propos tenus par les membres du groupe socialiste qui sont intervenus cet après-midi, lors de la discussion générale. S'il a pu arriver, à propos de certains textes, que des divergences apparaissent sur les travées de ce côté-ci de l'hémicycle, ce n'est absolument pas le cas aujourd'hui. Et pourtant, nous n'avons pas mis huit ans pour travailler ensemble sur cette question ! (Sourires.)
Au moment d'examiner l'article 1er du projet de loi relatif à la régulation postale, je souhaite vous faire part, monsieur le ministre, de quelques remarques concernant votre façon de transposer les directives européennes.
Si, pour la majorité des Européens, le service universel est une notion claire, en France, nous appelons cela « service public ». De mon point de vue, il aurait été utile de reprendre ce terme et d'affirmer clairement dans la loi que La Poste exerce des missions de service public.
Pour nous, les Verts, il est des domaines où l'accès à un certain nombre de biens et de services doit être garanti pour tous. C'est là le caractère universel du service public : des prestations minimums garanties, avec exigence de qualité.
Poste, éducation, santé, énergie, transports ferroviaires, eau... : dans ces secteurs d'activité, les lois du marché, nous le savons bien, ne peuvent garantir à elles seules la solidarité entre les territoires et entre les citoyens.
Les directives postales de 1997 et de 2002, bien qu'elles soient orientées vers une approche libérale des services d'intérêt général, laissaient pourtant une certaine marge de manoeuvre aux gouvernements pour les transposer.
M. Jean Desessard. Aussi suis-je interloqué de constater que le Gouvernement a délibérément fait le choix de ne pas utiliser les garde-fous autorisés par la directive et de déréglementer au maximum l'ouverture du marché à la concurrence.
Je suis d'autant plus étonné de ce choix que nous nous trouvons aujourd'hui dans un contexte social fragile, notamment sur la question des services publics. Sur ce point, les crispations sont importantes de la part aussi bien des usagers que des élus, qui ne cessent de nous alerter à ce sujet.
Mme Hélène Luc. Le Gouvernement est sourd !
M. Jean Desessard. Je m'interroge en outre sur la logique de cette déréglementation excessive : pourquoi faire un usage restrictif du recours à l'autorisation ?
Dans le cas des envois en recommandé, par exemple, une entreprise pourra concurrencer La Poste sans que l'autorité de régulation ait son mot à dire. Cela signifie notamment que l'assermentation ne sera pas exigée. Dans ces conditions, pourquoi ne pas garder les envois recommandés sous monopole, puisque l'article 8 de la directive de 1997 ne l'interdit en aucune façon ?
Pourquoi ne pas proposer également une transposition claire sur la question du prix du timbre ? Nous devons garantir aux Françaises et aux Français un prix du timbre unique et le plus bas possible. La mention dans la loi d'un timbre à 1 euro maximum laisse entendre que son prix pourrait doubler très rapidement ! Ne trouvez-vous pas que nos concitoyens ont suffisamment de raisons de s'inquiéter pour ne pas en rajouter ?
Concernant la mise en place d'un fonds de compensation du service universel, il est inquiétant de constater que toutes les entreprises concurrentes de La Poste qui ne seront pas soumises au régime d'autorisation délivré par l'ART ne seront sans doute pas obligées d'abonder ce fonds. Ce serait tout de même un comble : les entreprises qui feraient du publipostage, par exemple - activité à forte rentabilité pour La Poste -, non seulement prendraient des parts de marché importantes à La Poste mais ne participeraient pas au fonds de compensation ! C'est là une illustration de l'idée que se fait le Gouvernement de la solidarité territoriale...
On peut d'ailleurs penser, aujourd'hui, que ce fonds de péréquation ne sera pas abondé par grand monde !
Ainsi, monsieur le ministre, vous facilitez la concurrence au lieu de préserver l'avenir de La Poste. D'un côté, vous souhaitez faire bonne figure en réclamant la suspension provisoire de la directive Bolkestein ; de l'autre, vous transposez la régulation postale de façon très libérale, de façon « idéologique », pour reprendre les termes de l'intervenant précédent, en faisant peser la faute exclusivement sur l'Europe.
Monsieur le ministre, ce n'est pas ainsi que vous donnerez envie aux Françaises et aux Français de ratifier le traité constitutionnel européen !
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, sur l'article.
M. Gérard Delfau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à formuler deux observations.
Ma première observation sera pour m'étonner que cette transposition soit unilatérale et si favorable aux entreprises privées. Je pense qu'elle posera à très court terme des problèmes majeurs d'équilibre financier des activités de La Poste.
Il est ainsi tout à fait étonnant que, s'agissant des envois de courrier recommandé, selon le texte qui nous est proposé, les entreprises privées n'auraient à fournir aucune garantie aux clients. Il y a vraiment deux poids deux mesures ; j'y vois les effets d'un « tropisme libéral », pour employer l'expression à la mode.
Ma deuxième observation portera sur la présence postale et l'évolution du réseau, sujets traités dans cet article 1er.
J'ai depuis très longtemps indiqué ma position en la matière. Une adaptation du réseau est nécessaire en fonction de l'évolution des besoins et de la démographie, à condition que cela se fasse dans le sens d'un approfondissement des missions de service public ou d'intérêt général. Or, dans la mutation rapide que je vois s'opérer sous mes yeux, il me semble déceler certains risques que je voudrais simplement énumérer pour prendre date.
D'abord, cette espèce de forcing qui est fait pour transformer des agences postales en agences postales communales m'amène à dire à mes collègues maires chaque fois que j'en ai l'occasion que, malgré la convention qu'ils signent, ils prennent des responsabilités, notamment en matière financière, qui risquent de les placer dans une situation délicate.
Evidemment, je suis réaliste et je conviens qu'il vaut mieux une agence postale communale plutôt que pas de service postal du tout, mais je voulais tout de même signaler cette difficulté.
Par ailleurs, je suis partisan des points Poste quand il n'y a pas de présence postale. Mais, s'il s'agit de transformer un point de contact, quelle que soit sa nature, en point Poste, je redoute les difficultés liées à la confidentialité. N'oublions pas la complexité de certaines opérations postales : quand on est boucher ou épicier, on n'est pas forcément prédisposé au métier de postier ! Il convient également d'évoquer à nouveau les problèmes de responsabilité.
Dès lors, pour ma part, je n'entrevois que deux possibilités : ou bien ces points Poste ou ces agences postales communales ne proposeront à la clientèle que très peu de services financiers et, dans ce cas, ils seront insuffisants, ou bien le service sera plus large et, très légitimement, les concurrents du secteur bancaire introduiront des recours.
Je ne dis pas qu'il ne faut pas aller dans ce sens, je souhaite simplement montrer les limites du système, parce que certains dirigeants de La Poste donnent l'impression d'avoir trouvé le moyen idéal de transférer, à un moindre coût, toute la charge du réseau.
En ce qui me concerne, je plaiderai pour une formule mixte qui n'a jamais été expérimentée jusqu'ici : des maisons de services au public, et non pas de service public, animées par un postier pourraient offrir des services se rattachant à d'autres entreprises publiques comme EDF ou la SNCF, tout en servant d'antennes de services de proximité, de soins à domicile par exemple, de syndicat d'initiative, etc. Ces structures liées plus ou moins formellement à la commune permettraient d'assurer une palette de services et de satisfaire des besoins qui ne sont pas satisfaits aujourd'hui et qui n'entrent pas, à mon avis, dans le strict domaine de la gestion communale.
Voici les idées que je verse au débat pour cette deuxième lecture. Il me semble que ces sujets reviendront en discussions, mais je voulais les évoquer dès aujourd'hui.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel sur l'article.
M. Pierre-Yvon Trémel. Nous avons déposé un amendement n° 96 qui nous semble essentiel dans la mesure où il définit ce que nous voulons pour La Poste et les moyens que nous voulons lui donner pour réaliser les missions qui doivent lui être confiées. C'est pourquoi nous souhaitions que cet amendement soit examiné avant les différents articles du projet de loi.
La commission des affaires économiques a demandé la réserve de cet amendement jusqu'après l'article 8. Je le regrette - même si je suis obligé de m'incliner - d'autant que nous n'avions pas fait référence à la loi de 1990 pour qu'il ne soit pas appelé en discussion commune avec l'article 8, qui modifie l'article 2 de la loi de 1990 définissant les missions de La Poste.
Cela dit, je souhaiterais expliquer notre position sur l'article 1er car il est nécessaire que nous ayons un débat de fond sur ces questions ; nous ne pouvons nous contenter de nous renvoyer à nos responsabilités respectives.
Il est important qu'un texte unique identifie clairement les missions de La Poste ainsi que leurs modalités de financement. Aujourd'hui, de trop nombreuses dispositions sont dispersées dans des textes différents : dans le texte qui nous est soumis, il est fait référence entre autres à des articles de la loi de 1990, à des articles du code des postes et télécommunications. Il est nécessaire de donner un peu plus de lisibilité et de cohérence à la mission de La Poste.
La Poste n'est pas une entreprise comme une autre : elle occupe une place particulière dans la société française et participe pleinement au pacte républicain.
Elle est la première sur de nombreux plans : c'est le premier employeur de France, employant 300 000 agents ; avec ses 17 000 points de contact, elle constitue un réseau de proximité sans équivalent en Europe. Enfin, avec ses 100 000 facteurs, elle incarne un service public de proximité très apprécié des Français.
Dans les communes rurales, La Poste est bien souvent le dernier service public présent après la fermeture de tous les autres. Pour nombre de personnes défavorisées ou à faibles revenus, elle représente le seul accès possible aux services bancaires et financiers.
Dès lors, nous voulons traduire sur le plan législatif cette place à part que La Poste occupe dans notre société.
Nous proposons donc de consacrer ses missions de service public et même de les enrichir. Nous en identifions trois : le service public des envois postaux constitué du service universel postal et de l'aide à la presse, comme c'est le cas aujourd'hui ; la participation à l'aménagement du territoire, ce qui justifie que l'Etat ne se désengage pas de ce secteur ; enfin, nouvelle mission que nous voulons confier à La Poste, le service bancaire universel.
Jusqu'à maintenant, le législateur - sous quelque législature que ce soit - n'a jamais souhaité créer une telle mission de service public. Les produits bancaires sont considérés comme de simples produits de consommation. Pourtant, l'accès aux services bancaires conditionne toute une série d'actes de la vie quotidienne.
La loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions qui a été adoptée sur l'initiative du gouvernement précédent a permis pour la première fois d'établir un droit au compte. Nous en avons reparlé à l'occasion du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale présenté par M. Borloo. Mais cela ne suffit pas : il faut tout à la fois combattre l'exclusion bancaire, qui ne cesse de progresser, et offrir un service universel bancaire, à l'image du service universel postal, c'est-à-dire un service qui offre à tous les usagers l'accès aux prestations bancaires à un coût abordable.
Or, ces derniers temps, nous avons constaté que les services bancaires de base devenaient payants et que les banques tentaient de remettre en cause certains services gratuits. Les associations de consommateurs se mobilisent et nous interpellent pour dénoncer cette offensive des banques. Les tarifications n'ont plus rien à voir avec le coût réel des services.
Nous proposons donc de créer un service bancaire universel afin que chacun puisse avoir accès aux prestations bancaires à un coût abordable et, dans certains cas, gratuitement, et ce sans discrimination de quelque nature que ce soit.
Ce service, qui n'est pas exhaustif, devra prévoir la signature d'une convention de compte, le retrait gratuit d'argent dans les distributeurs de billets, la délivrance de chéquiers gratuits et un accès gratuit à des moyens de consultation du compte à distance. Par cette proposition, non seulement nous confortons La Poste dans sa mission de cohésion sociale, mais aussi nous affirmons - ce à quoi nous sommes très attachés - que La Poste n'est pas une banque comme les autres.
Nous proposons ainsi qu'elle devienne un partenaire privilégié des collectivités locales en l'autorisant à offrir à ces dernières des outils spécifiques de financement.
Par ailleurs, il faut aussi que la puissance publique prenne en charge des missions d'intérêt général dont le surcoût n'est pas, aujourd'hui, totalement compensé à La Poste, ce qui la handicape très fortement. La règle devrait être simple : à chaque mission de service public correspondra un financement.
Nous considérons qu'il n'est pas sérieux de faire financer la présence postale par la taxe telle qu'elle est aujourd'hui prévue, nous y reviendrons.
Enfin, nous souhaitons que ces missions de service public soient assurées essentiellement dans les bureaux de La Poste, gérés directement par elle, et non dans des points Poste situés chez les commerçants, où seulement certains services seront rendus.
Bref, nous voulons une Poste au service de nos concitoyens, de tous les usagers. Nous voulons redonner du sens à la notion de service public : les postiers et tous les personnels de La Poste sont prêts à nous suivre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Paul Blanc, sur l'article.
M. Paul Blanc. J'ai entendu avec intérêt la suggestion de M. Gérard Delfau sur les maisons de services au public.
Il importe en effet d'offrir à nos populations, en particulier dans les zones de montagne, un ensemble de services, et je crois que ces maisons nous aideraient à y parvenir.
Cependant, je ne pense pas que La Poste ait vocation à être chef de file en la matière.
M. Bernard Piras. Vous préférez que ce soit le charcutier ou au boucher ?
M. Paul Blanc. C'est aux maires que l'on demande tous ces services. Ceux-ci doivent prendre leurs responsabilités, ce qu'ils ont l'habitude de faire, d'ailleurs.
Monsieur le ministre, j'espère vivement que vous pourrez être notre interprète auprès des dirigeants de La Poste, car le statut du personnel communal qui sera chargé de la gestion des agences postales communales nous pose problème.
A cet égard, je souhaite que, dans le cadre de la convention qui sera signée entre les communes et La Poste, la responsabilité des maires ne soit en aucun cas engagée pour des actions relatives à l'activité de ces agences. Il faudra être extrêmement vigilant sur ce point.
Avant tout, la mission des maires est d'assurer à nos concitoyens, sur l'ensemble du territoire national, les services qu'ils attendent.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 58 est présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 97 est présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Michel Billout, pour présenter l'amendement n° 58.
M. Michel Billout. Si, en cet instant, nous discutons plus particulièrement de l'activité postale, je tiens d'abord à faire remarquer que nous sommes parvenus aujourd'hui à une étape décisive concernant l'avenir de l'ensemble de nos services publics.
De ce point de vue, il me semble nécessaire de rappeler un certain nombre d'éléments avant d'entamer plus précisément la discussion sur chacun des articles de ce projet de loi, dont les conséquences pour notre service public postal et pour l'établissement public La Poste seront lourdes.
Aucun des grands services publics - qu'il s'agisse de la santé, de l'eau ou des services publics en réseau tels que les transports, l'énergie ou les télécommunications - n'est épargné par la vague de libéralisation engagée à l'échelle internationale et européenne
En vertu de l'Accord général sur le commerce des services, conclu en 1995, les pays membres de l'OMC sont contraints d'ouvrir à la concurrence les secteurs des services, autrement dit de soumettre au marché et à ses règles concurrentielles des pans entiers de l'économie qui, en France, depuis la Seconde guerre mondiale, avaient été exclus d'une gestion strictement marchande.
Ce processus d'ouverture à la concurrence est relayé au niveau européen par des directives visant à la déréglementation de nos services publics. Nous en avons un exemple concret, aujourd'hui, avec les transpositions des directives de 1997 et de 2002 pour le domaine des activités postales, directives que nous avons combattues à l'époque, monsieur le ministre, et que nous combattons encore aujourd'hui.
A l'échelle nationale, ce processus se traduit par un désengagement, un renoncement de l'Etat face à l'emprise progressive du marché.
Nos services publics ont joué un rôle fondamental en matière d'intégration et de correction des inégalités sociales et territoriales. Ils ont permis l'accès à des droits fondamentaux tel le droit à l'énergie. Devons-nous, aujourd'hui, nous priver de ces biens dits « collectifs », accessibles à tous, exclus du domaine marchand et garantissant des droits fondamentaux ?
Finalement, ces directives ont pour conséquence la dégradation de la qualité du service public postal. Les nouveaux impératifs de rentabilité et de concurrence vont légitimer la fermeture des bureaux de poste jugés peu ou pas assez rentables, ainsi que la hausse du prix du timbre.
Voilà à quoi nous condamne ce véritable désengagement de l'Etat, eu égard aux responsabilités qu'il assumait en matière d'aménagement du territoire et d'intégration sociale !
Devons-nous encore ajouter, comme cela ressort parfaitement dans ce texte de loi, qu'un tel désengagement se traduit aussi par un retrait de l'Etat du champ politique, notamment en ce qui concerne la définition d'une politique à visée véritablement industrielle ?
Que nous vaut cette remise en cause de nos services publics et de la conception particulière qui les fondait ? Quel type de société sommes-nous en train de construire pour les générations futures ?
Ce sont autant de questions qui justifient notre amendement de suppression et auxquelles, nous l'espérons, le Gouvernement apportera des réponses précises.
M. Jean Desessard. Il n'en apportera sûrement aucune !
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l'amendement n° 97.
M. Pierre-Yves Collombat. Si la transposition des directives européennes est une nécessité, voire un devoir, tout le monde s'accorde à dire qu'elle doit être compatible avec nos particularités, qui ne sont ni celles de l'Allemagne ni celles de la Pologne.
Or ces particularités me semblent être peu prises en compte dans la présente transposition. Je crains donc que, à tout moment, Colbert ou Turgot ne descendent de leur socle pour nous le rappeler...
M. Bernard Piras. Ils nous regardent !
M. Pierre-Yves Collombat. Certes, monsieur le ministre, mais ils appartiennent à la même tradition française - comme vous le voyez, je remonte tout de même plus loin que Lionel Jospin ! -, laquelle défend, par rapport à nos voisins, une conception spécifique du service public, qu'il ne faut pas confondre avec le service universel.
Or nous constatons que le Gouvernement va au-delà de ce qui est exigé dans les directives européennes, en profitant au maximum de la possibilité qui lui est donnée de prendre des mesures encore plus libérales.
Une telle attitude est regrettable et nourrit l'euroscepticisme qui se développe dans notre pays.
M. Pierre-Yves Collombat. Finalement, bien qu'il prétende le contraire, le Gouvernement ne tient pas compte des particularités nationales dans ses décisions. Or le présent projet de loi aurait pu être l'occasion, pour lui, de les prendre en considération.
Mes collègues l'ont déjà dit, l'article 1er contient des dispositions de transposition de la directive européenne, mais dans un sens beaucoup plus libéral que ce qui était nécessaire.
Ainsi, il aurait été tout à fait possible de conserver les recommandés et le publipostage à l'intérieur du périmètre des services réservés, ce qui n'est apparemment pas prévu.
S'agissant du régime d'autorisation, il a été conçu, en principe, pour sauvegarder le service universel et les exigences essentielles. Or, monsieur le ministre, vous en faites un usage très restreint, qu'il s'agisse de la définition des opérations postales ou du type de courriers ou de colis envoyés.
Les nouveaux entrants vont donc pouvoir s'emparer des marchés les plus lucratifs, ce qui rendra pratiquement impossible le financement du service universel.
Par ailleurs, les modalités d'accès aux installations et aux informations de La Poste constituent pour nous un autre motif d'inquiétude. En effet, ces informations sont libéralement consenties, au détriment, en particulier, de la confidentialité. Je doute qu'il soit tout à fait raisonnable de permettre, par un tel biais, un commerce des listes d'adresses. Je ne suis pas persuadé que les citoyens approuvent le fait que leurs adresses soient transmises à d'autres et fassent l'objet d'un commerce.
Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer cet article.
M. Pierre-Yvon Trémel. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La réponse est simple : ces amendements révèlent une certaine confusion entre la notion de service public et la notion de monopole.
L'ouverture à la concurrence du secteur postal n'entraîne pas mécaniquement la disparition du service public, bien au contraire. Ce texte a précisément pour objet d'organiser cette ouverture, tout en garantissant la continuité du service universel postal.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 58 et 97.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 59, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après le 2° de cet article insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° Dans la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 1, après les mots : « prix abordables », sont insérés les mots : « , identiques sur l'ensemble du territoire et »
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Historiquement, un modèle de service public en réseau s'est progressivement imposé en France. Son principe fondateur est l'égalité de traitement et d'accessibilité pour l'ensemble des citoyens. Le maillage postal de l'ensemble du territoire puis sa desserte ferroviaire l'ont incarné. Ce modèle appliquait une péréquation financière au sein de chaque réseau afin qu'il puisse être présent sur chaque partie du territoire. Ce maillage traitait à égalité les régions dont l'isolement ou l'enclavement géographique coûtaient cher.
Cette péréquation financière a pris une forme essentiellement tarifaire. Il s'agissait de garantir le même prix pour le même service en tout point du territoire, quels que soient les coûts de production. La péréquation tarifaire des services en réseau est un corollaire de la notion d'égalité devant le service public : il existe donc un lien très fort non seulement entre les notions de péréquation et d'aménagement du territoire, mais aussi avec celle de citoyenneté. Ce modèle est à l'origine du prix unique du timbre en France.
A l'opposé, la libéralisation entraînera, à terme, la fin de la péréquation tarifaire. En effet, les obligations de service universel sont de garantir l'existence, dans chaque Etat membre, d'un service postal offrant un ensemble de services de qualité du point de vue tant de la prestation fournie que de la présence territoriale, le tout à un prix abordable, mais sans la garantie d'un prix unique.
Il est donc important que la loi réaffirme le principe de péréquation tarifaire sur l'ensemble du territoire national. Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 98, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après le 2° de cet article, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
... - Dans la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 1, après les mots : « prix abordables » sont insérés les mots : « et au même tarif sur l'ensemble du territoire national, »
... - Le dernier alinéa de l'article L. 1 est supprimé.
La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. L'instauration d'un prix unique du timbre sur l'ensemble du territoire pour les services relevant du service universel postal est permis par l'article 12 de la directive de 1997, lequel dispose que « les Etats membres peuvent décider qu'un tarif unique est appliqué sur l'ensemble de leur territoire national ».
Il s'agit là de garantir l'égalité de traitement des citoyens devant le service public.
Plusieurs amendements ont été déposés à cet effet par l'opposition à l'Assemblée nationale. Ils ont été rejetés pour le motif suivant, que je reprends quasi intégralement : « Les tarifs ne peuvent être identiques (...) que pour les prestations de base égrenées, c'est-à-dire hors envoi en nombre, et que si le monopole est maintenu. »
Il est donc clair que le Gouvernement n'a pas l'intention de se battre au niveau européen pour maintenir sous monopole le courrier « de tous les jours ». Il a d'ailleurs affirmé sa position, considérant que 2009 sera l'année de la disparition du monopole. Il est tout aussi clair que, à ses yeux, le service public est un service au rabais pour les particuliers : aux grosses entreprises des tarifs compétitifs ; aux particuliers et aux petites entreprises le maintien d'un prix du timbre, certes homogène pour l'heure sur tout le territoire, mais qui ne cessera d'augmenter en raison du manque de ressources pour financer le service universel postal.
Monsieur le ministre, puisque vous avez fait référence tout à l'heure au gouvernement précédent, auquel je suis resté très attaché, je vous rappelle simplement que, sous le gouvernement Jospin, le prix du timbre n'a pas augmenté, ce qui a permis de préserver ainsi le pouvoir d'achat des ménages.
M. Michel Teston. Le gouvernement Raffarin aura, quant à lui, procédé à deux augmentations, faisant passer le prix du timbre de 0,46 euro en 2002, à 0,53 euro au 1er mars 2005.
Nous souhaitons donc ouvrir de nouveau le débat. Nous proposons la suppression de l'article 104 de la loi relative au développement des territoires ruraux, qui a instauré le prix unique du timbre pour les seuls courriers égrenés et sous monopole, soit, au 1er janvier 2006, les courriers de moins de 50 grammes et inférieurs à 1,25 euro.
Nous suggérons donc d'instituer le prix unique du timbre pour les prestations de service universel postal, qui doit être fourni dans le respect des principes du service public, parmi lesquels figurent les principes d'égalité et d'universalité. La péréquation tarifaire et le prix unique du timbre sont des moyens permettant de mettre en oeuvre ces principes.
Pour assurer l'égal accès de l'ensemble de nos concitoyens au service universel postal, quel que soit leur lieu de résidence, il est indispensable que le prix du timbre soit identique sur l'ensemble du territoire national pour les prestations relevant du service universel postal.
Puisque nous faisions référence au passé, intéressons-nous à un passé plus récent : un amendement similaire avait été déposé à l'Assemblée nationale et adopté, me semble-t-il, à l'unanimité.
Il est également vrai, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, que le Sénat l'avait supprimé, suivant en cela l'avis de la commission. J'ai donc envie de poser la question suivante : où est la sagesse sénatoriale ? (M. .Jean-Pierre Sueur applaudit.)
M. le président. L'amendement n° 99, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après le 2° de cet article, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
... ° - Dans la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 1, après les mots : « prix abordables » sont insérés les mots : « et au même tarif sur l'ensemble du territoire national et de l'Union européenne, »
... ° - Le dernier alinéa de l'article L.1 est supprimé.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Cet amendement a été déposé après la découverte d'une disposition nouvelle. En effet, jusqu'au 1er mars 2005, qu'il s'agisse d'un envoi à destination de la France ou de l'Union européenne, le tarif du timbre était identique.
Le Gouvernement vient de mettre fin à cette règle, en fixant le prix du timbre à 53 centimes d'euro pour la France et à 55 centimes d'euro pour l'Union européenne.
Or rien ne justifie une telle différence de prix, qui nous paraît même contraire à l'idée de construction européenne à laquelle nous sommes attachés.
Cet amendement vise donc à poser le principe suivant : le prix du timbre doit être proposé « au même tarif sur l'ensemble du territoire national et de l'Union européenne. »
A l'occasion de l'examen de cet amendement, je souhaite, monsieur le ministre, que vous nous expliquiez le choix de cette tarification, qui n'est pas « lisible » pour nous. Nous ne sommes d'ailleurs pas certains que cette décision soit conforme au droit européen. Par ailleurs, nous pensons qu'une telle disposition risque de handicaper La Poste.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Sur les amendements nos 59 et 98, la commission a émis un avis défavorable, tout simplement parce qu'ils sont satisfaits par l'article 104 de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, qui apporte la précision suivante : « Hormis les envois de correspondance en nombre, les services postaux constituant le secteur réservé sont proposés au même tarif de base sur l'ensemble du territoire national. »
S'agissant de l'amendement n° 99, la commission souhaite entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 99.
La question porte sur la distinction entre le tarif national et le tarif européen. Il est un fait que La Poste perd de l'argent sur le prix du timbre pour les envois à destination de l'Europe.
Tout d'abord, le courrier vers l'Europe ou vers l'international est ouvert à la concurrence. Les tarifs pratiqués relèvent donc de la responsabilité de La Poste et ne sont pas soumis à l'homologation du Gouvernement. Si j'approuve la décision prise par La Poste, elle n'est pas, je le répète, de ma responsabilité.
Ensuite, le tarif européen de La Poste est l'un des plus bas par rapport à celui qui est pratiqué par l'ensemble des opérateurs européens. En effet, la moyenne se situe à 0,70 euro. Parallèlement, les coûts de distribution en France, à productivité égale, sont les plus élevés d'Europe du fait des caractéristiques du territoire français, à savoir la superficie, la densité de la population et le relief.
Par ailleurs, l'application de tarifs nationaux et européens identiques étaient l'exception. En effet, seuls quelques opérateurs, dont les tarifs sont généralement élevés, appliquent encore ce principe : il s'agit de l'opérateur finlandais, avec un tarif fixé à 0,65 euro, et de l'opérateur allemand, avec un tarif fixé à 0,55 euro.
Dans ce domaine, la règle, fixée par les accords de Reims, est la suivante : le pays émetteur reçoit le tarif international payé par son client, à savoir le prix du timbre, et paie 75 % du tarif local du pays de destination. Il assume en outre les coûts de commercialisation, de traitement sur son territoire et de transport jusqu'à la plateforme de l'opérateur postal du pays de destination.
Par exemple, pour une lettre de 20 grammes de la France vers la Suisse, La Poste perçoit 0,55 euro, qui est le tarif du timbre. Elle paie à Swiss Post 0,44 euro puisque le tarif domestique en Suisse est de 0,68 euro. Par ailleurs, pour La Poste, le coût de commercialisation, qui comprend la collecte, le tri, le transport et le traitement, est de 0,30 euro. Donc, La Poste, pour envoyer une lettre de 20 grammes en Suisse, perd 0,19 euro.
En suivant le même raisonnement, on constate que La Poste perd 0,17 euro pour envoyer une lettre vers l'Italie et 0,16 euro pour envoyer une lettre vers l'Allemagne.
Il n'y a pas écrit La Poste ! (M. le ministre touche son front.)
M. Jean Desessard. Comment pouvez-vous compter ainsi ?
M. le président. Quel est, maintenant, l'avis de la commission sur l'amendement n° 99 ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Après ces explications, le bon sens et la réalité économique l'emportent : avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 99 est-il maintenu, monsieur Trémel ?
M. Pierre-Yvon Trémel. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 99 est retiré.
L'amendement n° 100, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après le 2° de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... ° - Dans l'avant-dernier alinéa de l'article L. 1, après les mots : « et de distribution » sont insérés les mots : « au domicile de chaque personne physique ou morale ou dans des installations appropriées à la demande du destinataire »
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Selon la directive européenne du 17 mars 1997, les Etats membres « prennent des mesures pour que le ou les prestataires du service universel garantissent tous les jours ouvrables et pas moins de cinq jours par semaine » - on fait mieux en France ! - « sauf circonstances ou conditions géographiques jugées exceptionnelles par les autorités réglementaires nationales, au minimum :
« - une levée,
« - une distribution au domicile de chaque personne physique ou morale ou, par dérogation, dans des conditions déterminées par l'autorité réglementaire nationale, dans des installations appropriées. »
Cet amendement vise à préciser que la distribution du courrier est bien effectuée au domicile des usagers, conformément à la directive que je viens de citer. En effet, il n'est pas souhaitable de s'appuyer sur la dérogation énoncée, qui serait source, pour l'usager, de grands risques.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement pourrait faire l'objet d'un avis favorable de la commission, sous réserve d'une rectification.
Il s'agit, en effet, d'apporter cette précision dans le dernier alinéa, et non pas dans l'avant-dernier alinéa, de l'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques.
En effet, pour être conforme au point 3 de l'article 3 de la directive du 15 décembre 1997 qui définit la distribution postale, il conviendrait de prévoir que la distribution dans les installations appropriées constitue une dérogation dont l'autorité de régulation détermine les conditions.
Sous réserve de cette rectification, la commission émettra un avis favorable.
M. le président. Monsieur Trémel, acceptez-vous de rectifier l'amendement dans le sens suggéré par M. le rapporteur ?
M. Pierre-Yvon Trémel. Outre le fait que nous avons déjà discuté de cette question en commission, je viens de relire la directive que vous venez d'évoquer, monsieur le rapporteur, et je maintiens en l'état la rédaction de cet amendement.
M. le président. Quel est donc l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Sans cette rectification, l'avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, car la notion de distribution, qui existe depuis longtemps dans notre droit postal, ne souffre d'aucune ambiguïté.
En effet, cette notion est largement définie comme la remise des envois au destinataire, dans le cadre aussi bien de l'UPU, l'Union postale universelle, que de la directive postale du 15 décembre 1997 elle-même.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Nous sommes très attachés à cet amendement, car, si la distribution semble banale et évidente, le refus opposé à la précision demandée par M. Pierre-Yvon Trémel, qui est totalement compatible avec la directive, peut ouvrir la voie à des pratiques, que l'on voit déjà se développer ici ou là, invitant fortement nos concitoyens à accepter que le courrier soit porté non plus à leur domicile, mais à proximité.
Or la rédaction proposée par cet amendement précise bien que de tels dispositifs dérogatoires ne peuvent exister que si les intéressés en sont d'accord, la règle étant que l'on continue de recevoir, chaque jour, la visite du facteur.
Cela peut paraître évident et banal. Pour ma part, je ne souhaite pas que l'on s'engage dans un système qui remette subrepticement en cause cette réalité, à laquelle les Français sont extraordinairement attachés. La distribution du courrier au domicile de chaque personne constitue un élément essentiel du service public.
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.
M. Gérard Le Cam. J'irai dans le même sens que M. Sueur.
Demain, au nom d'une hypothétique rentabilité, on peut s'attendre à ce que La Poste, ou d'autres opérateurs, exigent des regroupements de boîtes aux lettres, « au bout du chemin », quelquefois à 200, 300 ou 400 mètres des hameaux, ou bien exercent des pressions terribles dans ce sens, car, dans notre pays, le mitage est très important. Or nous n'acceptons pas une telle évolution.
A cet égard, je souhaite que le Gouvernement nous donne l'assurance que cela ne se produira pas et qu'il prendra des dispositions en ce sens. A défaut, nous connaîtrons, demain, une dégradation encore plus importante du service postal, liée à une inégalité de traitement, certaines personnes ne pouvant se déplacer que difficilement pour récupérer leur courrier.
M. Jean-Pierre Sueur. Quel dommage !
M. le président. Je suis saisi de quatorze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 61, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le 3° de cet article.
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. La directive européenne du 15 décembre 1997 comprend, dans son chapitre 2, des consignes relatives au service universel en matière d'activités postales. Les articles 3 à 6 de cette directive énumèrent, pour les Etats, une série d'obligations qui incombent, de fait, à l'opérateur historique.
Les ambitions affichées dans les textes de loi sont cependant relativement minimalistes, si l'on considère l'ensemble des missions que peuvent remplir les entreprises publiques.
Cohésion sociale, aménagement du territoire, égalité de traitement entre les usagers, respect de l'environnement, développement de la recherche sont autant de domaines qui déterminent en grande partie le bien-être de notre société et que les opérateurs publics ont eu pour habitude de promouvoir.
La course à la rentabilité, dans laquelle la décision des ministres et des chefs d'Etat européens « plonge » les opérateurs historiques, menace toutefois gravement ces missions.
En effet, le service universel est défini comme devant garantir l'existence, dans chaque Etat membre, d'un service postal offrant un ensemble de services de qualité, en termes tant de prestation que de présence territoriale, à un prix abordable.
Cette définition, nous l'avons dit, ne garantit pas un prix unique et remet de fait en cause la péréquation tarifaire. En outre, il s'agit d'une vision minimaliste des missions que peuvent remplir les services publics telles que l'aménagement du territoire ou la distribution de la presse.
Ainsi, l'ouverture à la concurrence du monopole rime naturellement avec une augmentation des tarifs : le timbre de base était à 46 centimes d'euro en 2003, il est à 53 centimes d'euro aujourd'hui, ce qui représente une « belle » inflation de 15 % en deux ans. Ce fut également le cas lors de la mise en concurrence dans le secteur de l'énergie, comme en témoigne la hausse du prix de l'électricité.
La Poste augmente donc les tarifs du secteur réservé pour baisser ceux des segments du marché qui seront ouverts à la concurrence et pour lesquels il n'y a aucune obligation de service public. C'est bien la preuve que les particuliers vont faire les frais de l'ouverture à la concurrence : ce sont eux qui vont payer ! Est-ce là votre vision de l'égalité devant le service public et donc de l'égalité des tarifs pour tous ?
Ainsi, le projet de loi prévoit la possibilité d'augmenter le tarif de base jusqu'à un euro, soit une augmentation possible de plus de 88 % !
Telles sont les raisons qui justifient le dépôt de cet amendement.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 60 est présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 101 est présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le premier alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et des communications électroniques.
La parole est à Mme Evelyne Didier, pour présenter l'amendement n° 60.
Mme Evelyne Didier. L'alinéa visé par cet amendement de suppression prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat, pris après consultation du prestataire universel, et après avis de l'Autorité de régulation, « précise les caractéristiques de l'offre de service universel ».
Une telle disposition prive la représentation nationale de ses responsabilités, et nous ne pouvons l'accepter. Il revient en effet au Parlement de déterminer le domaine du service public, a fortiori lorsqu'il s'agit d'un secteur d'activité aussi important pour l'aménagement du territoire et la cohésion nationale.
Nous proposons que la loi fixe les principes devant s'appliquer à la mise en oeuvre du service public dans le but de le garantir. Ce sont ceux de l'égal accès, de l'égalité de traitement, de la continuité territoriale et de la péréquation tarifaire.
La définition du service universel est un point fondamental de ce projet de loi. De cette définition dépend la qualité du service postal sur le territoire national. Il nous semble donc impossible de renvoyer la définition des caractéristiques du service universel à un décret en Conseil d'Etat, et cela sans même que soient précisés les délais.
Comme nous l'avons indiqué en défendant nos amendements précédents, nous tenons à ce que les services publics soient maintenus sur l'ensemble du territoire. C'est la raison pour laquelle nous nous opposons à ce que les caractéristiques de l'offre de service universel soient fixées par décret.
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour présenter l'amendement n° 101.
M. Thierry Repentin. Nous considérons qu'il convient d'alléger une procédure beaucoup trop lourde et qui ne permettra pas de modifier facilement les caractéristiques du service universel pour les adapter aux besoins des usagers.
Au demeurant, ce décret n'est pas nécessaire puisque les caractéristiques du service universel sont aujourd'hui précisées par ailleurs dans deux documents : le cahier des charges de La Poste et le contrat de plan.
Enfin, la définition même du contenu du service universel doit, selon nous, rester de la seule compétence du politique : c'est à lui qu'il revient d'arrêter la définition la plus cohérente au regard des attentes de nos concitoyens et de l'assumer. L'Autorité de régulation ne doit pas avoir à donner son avis dans cette affaire.
M. le président. L'amendement n° 63, présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Remplacer le premier alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et des communications électroniques par sept alinéas ainsi rédigés :
« La Poste est tenue d'assurer une offre de service public qui prenne en compte notamment :
« - le principe de péréquation tarifaire.
« - le principe de continuité du service public
« - le principe d'égalité devant le service public.
« - la sauvegarde et la promotion d'emplois de qualité.
« - la protection de l'environnement.
« - la sécurité et la rapidité de l'acheminement du courrier.
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Par cet amendement, nous entendons inscrire en exergue du présent texte un certain nombre de principes tels que l'universalité, l'égalité, la neutralité, la confidentialité, la continuité et l'adaptabilité, qui sont autant d'éléments indissociables et complémentaires du service public.
Je me permets de signaler au Sénat que cette disposition correspond à un paragraphe d'une résolution adoptée ici même en 1996 sur la proposition de directive n° E-474, relative au développement des services postaux communautaires et à l'amélioration de la qualité du service. D'ailleurs, le rapporteur de cette résolution était déjà notre collègue Pierre Hérisson.
En 1996, la majorité sénatoriale souhaitait donc que le gouvernement d'alors - M. Fillon était le ministre compétent - soit porteur de ces exigences auprès du Conseil des ministres de l'Union. Cette attitude sera-t-elle confirmée aujourd'hui par l'adoption de notre amendement ? Je l'espère, mais j'en doute fort, car comment ne pas constater que ce projet de loi de dérégulation postale tourne le dos aux objectifs affichés hier ici même ?
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et des communications électroniques, après les mots :
envois de correspondance
insérer les mots :
intérieure ou en provenance de l'étranger, y compris ceux assurés par courrier accéléré,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Cet amendement vise à lever l'imprécision des termes du projet de loi pour ce qui est du champ du domaine réservé après 2006.
En réalité, il n'est nullement question de réintroduire le courrier sortant dans le champ du monopole à compter de 2006. Le changement de périmètre du domaine réservé en 2006 se fera en fonction du poids et du prix des envois de correspondance, mais la nature des envois réservés restera la même qu'avant 2006, c'est-à-dire qu'il s'agira exclusivement de correspondance intérieure ou en provenance de l'étranger.
M. le président. Les trois amendements suivants sont présentés par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés,
L'amendement n° 103, est ainsi libellé :
Après la deuxième phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et des communications électroniques, insérer une phrase ainsi rédigée :
Le publipostage et les envois recommandés dont l'utilisation est prescrite par un texte légal ou réglementaire sont réservés à La Poste.
L'amendement n° 102 est ainsi libellé :
Après la deuxième phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et des communications électroniques, insérer une phrase ainsi rédigée :
Le publipostage est réservé à La Poste.
L'amendement n° 104 est ainsi libellé :
Après la deuxième phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et des communications électroniques, insérer une phrase ainsi rédigée :
Les envois recommandés utilisés dans le cadre de procédures administratives et juridictionnelles sont réservés à La Poste.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour défendre ces trois amendements.
M. Pierre-Yvon Trémel. L'amendement n° 103 a un double objet : prévoir de manière explicite que le publipostage fait partie des services réservés et maintenir les recommandés prescrits par les textes légaux et réglementaires sous le monopole de La Poste.
La législation européenne autorise le maintien sous monopole du publipostage afin d'assurer dans de bonnes conditions le financement du service universel. Or la rédaction retenue pour définir le périmètre des services réservés ne vise le publipostage que de manière implicite, par la référence à la notion d' « envois de correspondance ». La loi devant être claire et facilement compréhensible pour tous, il paraît souhaitable d'y inscrire expressément que le publipostage est un service réservé.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a mis fin au monopole de La Poste pour les envois de recommandés requis dans le cadre de procédures administratives et juridictionnelles. Par cet amendement, il est proposé de rétablir la législation actuelle, beaucoup plus protectrice des droits des citoyens, et donc de réserver à La Poste l'exclusivité des recommandés régis par un texte légal ou réglementaire.
L'amendement n° 102, qui est un amendement de repli, vise le maintien du publipostage dans les services réservés.
Quant à l'amendement n° 104, il concerne spécifiquement les plis recommandés, dont l'acheminement constitue un service d'intérêt général qui doit être maintenu sous monopole. Il y va de la sécurité juridique de nombre de relations entre les personnes.
Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous puissiez nous dire comment, avec le dispositif qui a été adopté à l'Assemblée nationale, le pouvoir réglementaire entend encadrer l'envoi de recommandés. Que se passera-t-il en cas de défaillance d'un opérateur ?
Mme Hélène Luc. Bonne question !
M. Pierre-Yvon Trémel. Qui sera responsable ? Quelles conséquences cela aura-t-il sur les procédures en cours ? Ces questions ont donné lieu à un long débat à l'Assemblée nationale. J'aimerais qu'il en aille de même ici, car il est très important qu'il y soit apporté des réponses parfaitement claires.
M. le président. L'amendement n° 105, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Supprimer la seconde phrase du troisième alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et des communications électroniques.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Cet amendement est justifié par la perplexité dans laquelle nous plonge la rédaction de cet alinéa :
« Le tarif de base mentionné ci-dessus est le tarif applicable à un envoi de correspondance du premier échelon de poids de la catégorie normalisée la plus rapide. Tant qu'il sert de référence pour la délimitation des services réservés, sa valeur ne peut excéder 1 euro. »
Pourquoi 1 euro ?
M. le président. L'amendement n° 46 rectifié, présenté par M. Desessard, Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery, est ainsi libellé :
A la fin du troisième alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code de la construction et de l'habitation par cinq alinéas, remplacer les mots :
excéder 1 euro
par les mots :
augmenter plus rapidement que 1 centime d'euro par an
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 46 rectifié est retiré.
L'amendement n° 106, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Supprimer le quatrième alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et des communications électroniques.
La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Le projet de loi organise une dérogation au régime général des services réservés pour les cas où une « personne qui est à l'origine des envois de correspondance ou une personne agissant exclusivement en son nom peut assurer le service de ses propres envois ».
L'exposé des motifs ne justifie pas cette dérogation, qui aurait pour objet d'autoriser la délivrance d'une lettre à l'occasion d'un portage à domicile d'un journal ou de permettre au sein des entreprises l'échange de documents, par systèmes de courriers internes et de casiers.
Les motivations du Gouvernement mériteraient d'être précisées d'autant que la rédaction retenue est peu claire : il n'est pas exclu qu'une entreprise puisse contourner le monopole postal dès lors qu'elle assure elle-même le service de ses envois ou qu'elle le confie à une autre « personne », une de ses filiales par exemple.
En outre, nous aimerions avoir connaissance des cas pratiques que recouvre cette dérogation.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 64 est présenté par MM. Billout et Le Cam, Mmes Demessine et Didier, M. Coquelle, Mme Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 107 est présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le dernier alinéa du 3° de cet article.
La parole est à Mme Hélène Luc, pour défendre l'amendement n° 64.
Mme Hélène Luc. Les envois recommandés utilisés dans les procédures juridictionnelles et administratives doivent demeurer dans le secteur réservé de La Poste.
En effet, il existe un lien indissoluble entre poste et prérogatives de souveraineté.
De plus, l'envoi de recommandés est prescrit par de nombreux textes légaux. Cette nouvelle disposition fait peser de gros risques, selon le prestataire choisi, sur la force juridique des actes concernés.
Les intérêts économiques ne sauraient justifier la remise en cause des moyens d'exercice de la justice.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, pour défendre l'amendement n° 107.
M. Pierre-Yvon Trémel. Par cet amendement, nous manifestons notre refus de la banalisation des envois de recommandés.
M. le président. L'amendement n° 108, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et des communications électroniques par deux phrases ainsi rédigées :
Ceux-ci doivent être titulaires de l'autorisation mentionnée à l'article L. 3, respecter les exigences mentionnées à l'article L. 3-2. A ce titre, leurs personnels doivent être assermentés.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Si le Gouvernement maintient sa volonté de banaliser le recommandé, il faut à tout le moins que les prestataires désignés soient titulaires d'une autorisation, respectent les exigences du service public en termes de confidentialité, de protection des données à caractère personnel et de la vie privée. Nous proposons en outre de prévoir que les personnels des entreprises prestataires soient assermentés.
Lorsque cet amendement a été évoqué en commission, une rectification a été suggérée. Je serais prêt à y procéder, mais je souhaiterais auparavant que M. le ministre veuille bien m'éclairer sur la manière dont on pourra vérifier que les règles de confidentialité sont respectées. Nous avions envisagé la solution de l'assermentation parce qu'elle aurait évidemment le mérite de soumettre les concurrents de La Poste aux mêmes exigences que celles auxquelles celle-ci doit se plier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 61. La notion de service universel recouvre la notion de service public et s'accompagne de garanties analogues pour la délivrance de prestations de qualité à nos concitoyens. Il ne s'agit donc, pour l'essentiel, que d'une substitution d'ordre terminologique qui s'impose à nous dans la mesure où elle résulte de nos engagements communautaires.
La commission est défavorable aux amendements identiques n°s 60 et 101. La loi n'a pas vocation à fixer dans le détail les caractéristiques de l'offre de service universel que La Poste est tenu d'assurer. Je ferai remarquer aux auteurs de cet amendement que, en tout état de cause, ces caractéristiques sont aujourd'hui déjà fixées dans le décret n° 90-1214 du 29 décembre 1990, relatif au cahier des charges de La Poste.
Elle est défavorable à l'amendement n° 63, qui vise non pas à préciser les caractéristiques de l'offre de service universel, mais plutôt à fixer les principes de ce service, qui relèvent effectivement de la loi.
Je ferai simplement observer aux auteurs de l'amendement que ces principes sont déjà fixés dans le code des postes et des communications électroniques, notamment en son article L. 1. Celui-ci prévoit, en effet, que le service universel postal est « assuré dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité ».
La commission est défavorable à l'amendement n° 103. Il résulte du 2° de l'article 1er du projet de loi que le publipostage fait partie des envois de correspondance. A ce titre, il sera donc inclus dans les services réservés, dans la limite des plafonds de poids et de tarif qui sont précisés au 3° de cet article 1er. Il est donc impossible d'inclure tout le publipostage, par principe, dans le secteur réservé.
Quant aux envois recommandés prescrits par les textes légaux et réglementaires, l'article 8 de la directive 97/67/CE laisse aux Etats membres la liberté d'organiser, à leur gré, le service de ces envois recommandés. Or il paraît utile d'introduire en ce domaine une concurrence afin d'améliorer la qualité du service
M. Jean-Pierre Sueur. Sa qualité est-elle en cause ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Sur l'amendement n° 102, la commission émet un avis défavorable, pour les raisons indiquées précédemment.
Elle est également défavorable aux amendements nos 104 et 105.
M. Jean-Pierre Sueur. Pour quelles raisons ?
M. Pierre Hérisson, rapporteur. M. le ministre vous donnera tout à l'heure des explications.
La commission est défavorable à l'amendement n° 106. La directive de 1997 prévoit la possibilité d'exclure du domaine réservé le cas de prestation de services postaux par la personne qui est à l'origine des envois ou le cas de la collecte et de l'acheminement de ces envois par un tiers agissant uniquement au nom de leur expéditeur.
Cette exception permet, par exemple, de ne pas faire jouer le monopole de La Poste pour la délivrance d'une lettre de l'éditeur d'un journal - offre d'abonnement, facturation - à l'occasion du « portage » à domicile de ce journal. C'est donc une exception de simplification.
La commission est défavorable aux amendements identiques n°s 64 et 107, pour les raisons qu'elle a indiquées à propos des amendements nos 103 et 104.
Quant à l'amendement n° 108, la commission y est favorable, sous réserve que M. Trémel accepte de le rectifier. Il est effectivement utile de prévoir que les prestataires de services postaux, auxquels sont susceptibles d'être confiés ces envois recommandés, soient titulaires de l'autorisation mentionnée à l'article L. 3 du code des postes et des communications électroniques.
En revanche, il est superflu de prévoir que ces prestataires respectent les règles mentionnées à l'article L. 3-2, puisque toute offre de services postaux y est soumise. A ce titre, toute offre de services postaux doit notamment garantir la confidentialité des envois et l'intégrité de leur contenu et assurer la protection des données à caractère personnel et celle de la vie privée des usagers.
C'est pourquoi la commission ne serait favorable à cet amendement que s'il tendait à préciser que les prestataires sont titulaires de l'autorisation, le reste en découlant logiquement.
M. le président. Monsieur Trémel, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans ce sens ?
M. Pierre-Yvon Trémel. Je suis prêt à accepter cette suggestion, mais je souhaiterais d'abord entendre M. le ministre sur un certain nombre de questions que j'ai posées.
Peut-il nous dire comment le pouvoir réglementaire compte s'y prendre pour que les règles de confidentialité soient effectivement respectées ? Nous estimions, pour notre part, que l'assermentation des personnels plaçait tous les concurrents sur un pied d'égalité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je commencerai pas donner l'avis du Gouvernement, amendement par amendement, sans argumenter. Je fournirai ensuite des explications plus détaillées sur les points délicats.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 61, pour les raisons invoquées par la commission, qui sont excellentes.
Il en est de même pour les amendements identiques nos 60 et 101, ainsi que pour l'amendement n° 63.
Le Gouvernement est, en revanche, favorable à l'amendement n° 1.
Sur les amendements nos 103 et 102, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Les amendements n° 104 et 105 ont également reçu un avis défavorable. J'y reviendrai pour apporter quelques explications.
Mme Hélène Luc. Vous ne donnez pas beaucoup d'arguments !
Mme Hélène Luc. Pour chacun des amendements ?
Mme Hélène Luc. Et les autres ?
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Les arguments qui ont été invoqués par la commission sont excellents. Pour ma part, je vais exposer le point de vue du Gouvernement en donnant des explications sur deux sujets qui me paraissaient plus délicats.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 106, ainsi qu'aux amendements identiques nos 64 et 107.
Quant à l'amendement n° 108, le Gouvernement y est favorable, sous réserve que M. Trémel accepte la rectification que M. le rapporteur a suggérée.
M. le président. Monsieur Trémel, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens souhaité par la commission et par le Gouvernement ?
M. Pierre-Yvon Trémel. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 108 rectifié, présenté par MM. Trémel et Collombat, Mmes Bricq, Durrieu et Khiari, MM. Piras, Repentin, Sueur et Teston, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste et apparentés, et ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour remplacer les trois derniers alinéas de l'article L. 2 du code des postes et des communications électroniques par une phrase ainsi rédigée :
Ceux-ci doivent être titulaires de l'autorisation mentionnée à l'article L. 3.
Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Sur l'amendement n° 104, je voudrais vous dire, monsieur Trémel, que les envois recommandés dépassent les plafonds de poids et de tarif pour être inclus dans le monopole. Ils relèvent donc d'ores et déjà du domaine concurrentiel.
Le droit en vigueur n'a pas défini une catégorie particulière de courriers recommandés à l'usage de la justice. Les services judiciaires utilisent le service des recommandés classique. Je crois qu'il faut sortir de cette situation si les utilisateurs le souhaitent, non pas en créant un monopole particulier pour ces futurs services, mais en consultant les utilisateurs et en répondant à leurs besoins.
Pour avoir exercé la profession d'avocat, j'ai très souvent constaté que les procédures s'éternisaient avant de s'effondrer, uniquement parce que la lettre recommandée n'avait pas été régulièrement délivrée et que ne figurait pas au dossier, pour des raisons inconnues, le talon comportant la signature du destinataire.
L'amendement qui a été adopté par l'Assemblée nationale a donc été inspiré par la Chancellerie. Pour des raisons de consolidation des procédures, il nous faudra veiller à ce que ceux qui offrent de tels services répondent bien aux exigences fixées par décret en Conseil d'Etat. Ce sera le rôle de l'Autorité de régulation. Il faut prévoir un encadrement très rigoureux et très exigeant du fonctionnement de la lettre recommandée : il y va de la validité d'un certain nombre de procédures et du fonctionnement même de l'institution judiciaire.
Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 104.
En ce qui concerne l'amendement n° 105, la fixation de la valeur du tarif de base à un euro s'explique pour des raisons juridiques. En effet, la directive prévoit que le plafond du tarif du secteur réservé ne pourra excéder deux fois et demie le tarif de base. Il suffirait donc d'augmenter indéfiniment le tarif de base pour pouvoir augmenter, par voie de conséquence, le tarif des services réservés. La limitation n'aurait alors aucune signification.
Pour éviter tout laxisme - c'est précisément l'intention du Gouvernement -, il faut bien poser une limite, quelle qu'elle soit - celle-ci est théorique - et nous l'avons fixée à un euro. Même s'il y a de la marge, cette limite permet, pour des raisons constitutionnelles, le fonctionnement du plafonnement.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 60 et 101.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 104.
M. Jean-Pierre Sueur. Nous n'avons pas été convaincus par les explications qui ont été apportées au sujet des envois recommandés.
M. Jean-Pierre Sueur. M. le rapporteur a dit qu'il était nécessaire de développer la concurrence pour assurer une meilleure qualité du service. Or, ce postulat ne va pas du tout de soi. Nous sommes attachés à une certaine conception du service public, dans laquelle La Poste est garante du traitement particulier qui est réservé aux courriers recommandés.
M. Jean-Pierre Sueur. Je tiens à dire que les salariés de La Poste accomplissent ce travail avec un soin tout particulier. Nous n'acceptons pas, pour notre part, ...
M. Jean-Pierre Sueur. Je le sais bien !
Nous n'acceptons pas, disais-je, que l'on mette en cause le monopole de La Poste concernant ces courriers recommandés, notamment pour les procédures administratives et juridictionnelles, car il est consubstantiel de l'idée que nous avons du service public.
Nous observons par ailleurs que la directive n'impose pas la banalisation du recommandé ! C'est pourquoi nous sommes très attachés à cet amendement n° 104.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 105.
M. Jean-Pierre Sueur. Je voulais simplement dire à M. le ministre que, là encore, nous n'avons malheureusement pas été convaincus. Si nous comprenons bien, la question se pose jusqu'au 1er janvier 2006. Est-il sérieux d'envisager que le prix du timbre passe de 0,53 euro à un euro d'ici à cette date ?
M. Jean-Pierre Sueur. Si tel n'est pas le cas, nous craignons que cette disposition, qu'il n'est pas nécessaire de prendre - la directive ne l'impose pas - , n'annonce, d'une manière ou d'une autre, la remise en cause des services réservés, autrement dit une ouverture totale à la concurrence pour le courrier.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 106.
M. Jean-Pierre Sueur. Le texte en question, à savoir le quatrième alinéa du texte proposé pour le 3° de l'article 1er, est très difficile à comprendre. Je félicite ceux qui, à l'instar de M. le ministre, en saisissent le sens !
Je le relis : « Par dérogation au troisième alinéa, la personne qui est à l'origine des envois de correspondance ou une personne agissant exclusivement en son nom peut assurer le service de ses propres envois. »
La formulation « la personne qui est à l'origine des envois de correspondance (...) peut assurer le service de ses propres envois » me semble étrange. Si chacun envoie lui-même ses lettres ou ses paquets, il n'y aura plus de service public !
Compte tenu de la rédaction de ce texte - « la personne qui est à l'origine des envois de correspondance ou une personne agissant exclusivement en son nom » - on ne sait pas qui est la première personne, celle qui a bénéficié de l'article défini, au nom de laquelle agit la seconde, qui a bénéficié, elle, de l'article indéfini...
Tout cela est extrêmement confus.
M. Jean-Pierre Sueur. Peut-être, monsieur le ministre, considérez-vous, vous, que ce n'est pas confus. C'est une opinion que vous avez le droit d'avoir.
M. Jean Desessard. Cela va faire travailler les avocats !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous craignons, nous, comme M. Desessard, que cette formulation quelque peu amphigourique ne suscite de nombreux contentieux et ne conduise à conforter toute une série de services privés qui enverront des correspondances et chargeront des personnes, définies simplement comme étant « une personne », d'envoyer en leur nom d'autres correspondances.
Autrement dit, nous demandons de la rigueur.
Mes chers collègues, il conviendrait qu'avant d'adopter cette disposition nous fassions preuve de prudence, en nous interrogeant sur la bonne lisibilité et la clarté que doit revêtir la loi, afin que nous n'ouvrions pas des brèches que nous regretterions par la suite.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Monsieur Sueur, si cet alinéa ne me semble pas confus, c'est parce qu'on m'en a expliqué le sens. A mon tour, je puis donc vous le rendre limpide.
Ce sont essentiellement les journaux régionaux qui seront concernés par cette disposition.
M. Jean-Pierre Sueur. Dites-le !
M. Jean-Pierre Sueur. Ecrivez-le dans la loi !
M. Jean Desessard. C'est la simplification administrative !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Ils demanderont à leurs réseaux de portage à domicile d'acheminer les relances d'abonnement ou les factures correspondantes.
La liberté de la presse étant un sujet qui vous passionne,...
M. Pierre Hérisson, rapporteur. Très bien !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ... vous n'allez certainement pas voter cet amendement liberticide ! C'est pour vous éviter de commettre cette erreur que j'ai cru devoir vous donner cette explication.
M. Jean-Pierre Sueur. S'il s'agit de la presse, il est facile de l'indiquer dans la loi !
M. Jean-Pierre Sueur. Oui, mais ce n'est pas écrit dans le projet de loi !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 64 et 107.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.