Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Ma question s'adresse à M le ministre de l'éducation nationale.
Après les fermetures de bureaux de poste, celles des perceptions, ou les fermetures de subdivisions de l'équipement, la casse des services publics continue avec l'éducation nationale. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Mme Hélène Luc. Exactement !
M. Jean-Marc Todeschini. Les décisions de fermetures de classes et de suppressions de postes d'enseignants tombent comme à Gravelotte.
M. Josselin de Rohan. Il n'y a plus d'élèves !
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le ministre, vous évoquez toujours les résultats et les performances du système éducatif en stigmatisant le taux d'encadrement. Vous dénoncez l'opposition, qui, selon vous, ne proposerait « qu'une addition de moyens ». Mais c'est un habillage pour éviter de répondre sur l'essentiel.
La liste des classes fermées, des filières d'enseignement professionnel supprimées, des établissements occupés par les parents d'élèves, des actions entreprises par les lycéens s'allonge de jour en jour.
M. Roland Courteau. C'est la vérité !
M. Jean-Marc Todeschini. Les académies qui connaissent des situations économiques difficiles au niveau de l'emploi et de la réindustrialisation sont les grandes perdantes, comme Lille - 1000 suppressions de postes - et Nancy-Metz - 600 postes supprimés.
Mais toutes les académies sont touchées : plus de 300 postes supprimés à Dijon et Orléans ; plus de 250 suppressions de postes à Reims, Rennes et Rouen.
Même les académies qui connaissent une croissance démographique sont victimes d'une hémorragie de postes, comme Aix-Marseille, avec plus de 200 suppressions.
En dénonçant, au moment du vote de votre projet de budget pour 2005, ce qui allait nous attendre sur le terrain, j'étais loin du compte.
Aux milliers de postes supprimés s'ajoute aujourd'hui la déscolarisation des enfants de deux ans.
M. Josselin de Rohan. L'école n'est pas une garderie !
M. Jean-Marc Todeschini. Après toutes les fermetures de postes non visibles directement, aujourd'hui on ne prend plus en compte dans les effectifs les enfants de deux ans, sauf dans les ZEP, et cela sans aucune concertation avec les élus locaux !
Les maires des communes concernées sont, avec le plus profond mépris, mis devant le fait accompli et les problèmes liés à l'accueil de la petite enfance.
Ces maires avaient accepté des fusions d'écoles, consenti des efforts financiers importants pour le bon fonctionnement de celles-ci. Aujourd'hui, ils se rendent compte qu'il s'agissait d'un marché de dupes !
Si, sur le terrain, recteurs et inspecteurs d'académie sont jugés responsables de ce grand chantier de démolition, il vous incombe, à vous, monsieur le ministre, en tant que maître d'ouvrage, d'assumer votre politique et celle du Gouvernement !
Votre politique, c'est de laisser les enseignants, les parents, les élus et les élèves dans le désarroi. Aujourd'hui, ils sont ensemble, ici où là et sur l'ensemble du territoire, dans les rues, devant les rectorats, pour manifester leur colère afin de se faire entendre.
M. Josselin de Rohan. Allons !
M. Jean-Marc Todeschini. Ma question est simple : allez-vous enfin les écouter, et cesser cette « sourde attitude » ?
Entendez-vous revenir sur ces mesures de suppressions de postes, de classes, de filières ?
Allez-vous enfin entendre le malaise profond que les jeunes lycéens expriment en ce moment dans la rue ?
M. Dominique Braye. Mensonges !
M. Jean-Marc Todeschini. Allez-vous enfin cesser de les considérer comme des écervelés ou des manipulés, ainsi que l'a toujours fait la droite ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur Todeschini, je pense que chacun doit faire preuve de beaucoup d'humilité.
M. René-Pierre Signé. La question dérange !
M. François Fillon, ministre. S'agissant des manifestations de lycéens, je vous rappelle qu'ils étaient 500 000 dans les rues en 1998 et 200 000 en 1999. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Dominique Braye. Effectivement !
Mme Hélène Luc. Mais le projet a été retiré !
M. François Fillon, ministre. Je le dis simplement parce que vous avez fait une nouvelle fois la démonstration, par la manière dont vous avez posé votre question, que vous ne proposez rien d'autre que des moyens supplémentaires, alors même que notre système fait aujourd'hui la preuve de son incapacité à résoudre les problèmes de l'échec scolaire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. Jean-Marc Todeschini. Répondez à la question !
M. François Fillon, ministre. Je ne me satisferai jamais que 150 000 jeunes soient sacrifiés par notre système parce que nous refusons de le faire évoluer.
Je n'accepte pas que plus de 80 000 jeunes, et ce chiffre est en augmentation, entrent en sixième sans savoir lire, écrire et compter, et soient donc condamnés à l'échec ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Que proposez-vous pour faire face à cela ? Rien, sinon continuer à mettre en place des moyens sans aucune innovation pédagogique, sans aucun effort pour les jeunes qui sont en difficulté. (Mme Nicole Bricq s'exclame.)
Le projet de loi que vous allez examiner dans quelques jours, c'est 2 milliards d'euros, c'est 150 000 recrutements,...
M. Jean-Marc Todeschini. Vraiment, 150 000 recrutements ? Et les retraités ?
M. François Fillon, ministre. ...c'est trois heures de soutien par semaine - ce que jamais vous n'aviez proposé -, c'est le dédoublement des cours de langue pour que la France cesse d'être le dernier pays européen en matière d'apprentissage des langues (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP) ...
M. Jean-Marc Todeschini. On rêve ! Vous y croyez vraiment ?
M. François Fillon, ministre. ...c'est la multiplication par cinq des classes relais pour accueillir les élèves qui sont en difficulté, c'est la multiplication par trois des bourses au mérite, c'est l'introduction dans l'université des instituts universitaires de formation des maîtres, pour élever leur niveau.
On va pouvoir discuter de toutes ces questions et vous aurez du mal à démontrer que, face à cet effort, vous proposez vraiment une politique alternative. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
politique économique de la france
Mme la présidente. La parole est à M. Yann Gaillard.
M. Yann Gaillard. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Lors de votre conférence de presse mardi dernier, vous avez ouvert un éventail de mesures extrêmement large et touchant à des domaines très différents de la politique économique et budgétaire.
Certes, vous avez vous-même inscrit l'ensemble de ces mesures sous un triple chapeau : « emploi, confiance, croissance », mais ces mots, si sympathiques soient-ils, ne suffisent pas à caractériser l'orientation qui est la vôtre.
Vous avez voulu ne négliger aucun domaine et j'ai compté au moins une trentaine de mesures.
La première mesure que vous avez proposée est la baisse de l'impôt sur le revenu pour les classes moyennes.
Je considère, pour ma part, que les classes moyennes seront très intéressées, outre cette disposition, par l'accentuation des mesures favorables aux donations, par la rémunération des comptes courants, par les assurances contre les loyers impayés, pour les propriétaires, et par la révision des modalités d'indexation des loyers, pour les locataires, et, enfin, par les mesures favorisant l'épargne investie dans les titres d'entreprise.
Certes, toutes ces mesures ne seront pas réservées aux classes moyennes, mais celles-ci sont les premières à pouvoir en bénéficier.
Les classes moyennes ont été quelque peu négligées par le passé.
Elles constituent pourtant une catégorie importante de la population susceptible de travailler, de consommer et d'investir, à condition bien sûr que l'on ne pénalise pas son pouvoir d'achat et que l'on soutienne sa capacité d'initiative.
Comme je sais que vous ne vous contentez pas d'analyse technique, pouvez-vous m'indiquer sur quoi repose cette confiance que vous faites aux classes moyennes et quel rôle elles devraient jouer au service de l'emploi et de la croissance. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Ivan Renar. Sont les deux mamelles de la France !
M. Jean-Pierre Sueur. L'emploi baisse, la confiance chute, la croissance trébuche.
M. Hervé Gaymard, ministre. Depuis deux ans et demi, nous avons veillé à ce que cette politique économique profite à tous les Français. C'est ainsi que le SMIC a augmenté de près de 15 % entre 2002 et 2005, soit en moyenne 5 % par an, alors que sous la précédente législature l'augmentation n'avait été que de 3 %.
Plusieurs sénateurs de l'UMP. Eh oui !
M. René-Pierre Signé. Créée par les socialistes !
M. Hervé Gaymard, ministre. C'est ainsi que nous avons mis en place une politique pour que le travail paie davantage que l'assistance.
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Hervé Gaymard, ministre. Mais il faut aller plus loin.
Tout d'abord, il faut poursuivre le soutien au pouvoir d'achat.
M. René-Pierre Signé. C'est pour cela qu'il baisse !
M. Hervé Gaymard, ministre. S'agissant de la poursuite de la baisse de l'impôt sur le revenu, je l'ai indiqué avant-hier, Jean-François Copé et moi-même proposerons au Premier ministre de cibler la baisse de l'impôt sur le revenu sur les tranches inférieures du barème, puisqu'un grand nombre de nos compatriotes ont en effet le sentiment de toujours payer sans avoir jamais droit à rien. Or ce sont des Français qui jouent un rôle important dans la consommation, dans l'économie et dans l'entreprise.
C'est pourquoi également, comme vous l'avez souligné, monsieur Gaillard, il faut, sur des sujets aussi importants que le logement, qui représente 27 % des dépenses des foyers français, prévoir un certain nombre de mesures.
Avec Jean-Louis Borloo...
M. Jean-Marc Todeschini. Il est parti !
M. Hervé Gaymard, ministre. ... et Marc-Philippe Daubresse, nous y travaillons, afin que les logements soient davantage mis sur le marché malgré le risque de loyer impayé. Nous travaillons aussi à la révision de l'indexation, puisque, aujourd'hui, le fait de retenir l'indice du coût de la construction pénalise beaucoup les locataires.
Tel est l'esprit de ces mesures, qui seront mises en oeuvre très rapidement ou dans les mois à venir.
Nous n'avons pas oublié les entreprises, notamment les PME. L'Etat accélérera le remboursement de la TVA. Cela porte sur 33 milliards d'euros, montant très important pour dynamiser notre économie. En outre, les entreprises pourront compenser les dettes et les créances fiscales.
Il faut également travailler sur d'autres sujets plus structurels : l'emploi - avec Jean-Louis Borloo, nous allons mettre en place un comité d'orientation pour l'emploi - et l'épargne, qui, comme chacun le sait et en particulier le président Arthuis, est insuffisamment dirigée vers l'innovation et l'entreprise. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
journée de solidarité du lundi de pentecôte
Mme la présidente. La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. Ma question s'adresse à M. Douste-Blazy, ministre des solidarités, de la santé et de la famille.
Plusieurs sénateurs socialistes. Il n'est pas là !
M. Jean-Marc Todeschini. Les membres du Gouvernement présents ne sont d'ailleurs pas très nombreux !
M. Charles Gautier. Travailler plus pour gagner plus ! Tel est le nouveau slogan du Gouvernement, à un moment où la plupart des salariés souffrent de la régression de leur pouvoir d'achat.
Mais les Français ne sont pas dupes : ils n'y voient qu'une supercherie, qui aboutira à l'effet inverse. J'en veux pour preuve l'initiative prise dans la précipitation et l'émotion qui a suivi la canicule de 2003. N'osant alors forcer sur l'impôt solidarité en raison des promesses de baisses d'impôt que vous aviez faites, vous avez réinventé la corvée pour tous les salariés : un jour supplémentaire de travail sans contrepartie salariale.
M. Josselin de Rohan. Ce n'est pas vrai !
M. Charles Gautier. Travailler plus pour gagner moins !
M. Guy Fischer. Eh oui !
M. Dominique Braye. Merci pour la solidarité !
M. Charles Gautier. La cible était le lundi de Pentecôte ou, accessoirement, le lundi de Pâques, au mépris de l'organisation de la vie locale et associative, puisque cela entraînera la déstabilisation de nombreuses journées sportives, festives ou touristiques, comme la féria de Nîmes.
Mme Gisèle Printz et M. Simon Sutour. Effectivement !
M. Charles Gautier. Sont en jeu 2 milliards d'euros, soit 13 milliards de francs. En principe, cette somme devrait être répartie entre les personnes handicapées, l'allocation personnalisée d'autonomie et les maisons de retraite. Or les Français ont appris cette semaine par la presse que la totalité des sommes obtenues n'ira pas à destination. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Dominique Braye. C'est de l'invention !
M. Guy Fischer. Elles seront détournées !
M. Charles Gautier. Nous avons tous présent à l'esprit le précédent de la vignette automobile, dont le produit devait déjà aider les personnes âgées.
M. André Lardeux. Qui l'a supprimée ?
M. Charles Gautier. Mme la secrétaire d'Etat aux personnes âgées...
M. Jean-Marc Todeschini. Elle n'est pas là non plus !
M. Charles Gautier. ...a reconnu que, sur les 800 millions d'euros qui devaient être affectés aux maisons de retraite, seuls 365 millions d'euros seront utilisés cette année. Même en débloquant 50 millions d'euros supplémentaires pour la rénovation des établissements, il restera 385 millions d'euros non utilisés. Cette situation est aberrante, alors que les directeurs de maison de retraite ne cessent de réclamer des aménagements et des embauches pour mieux s'occuper de nos anciens.
M. Jean Arthuis. Les 35 heures !
M. Charles Gautier. Où ira donc cet argent ? On nous dit que ces 385 millions d'euros viendront diminuer le déficit global des comptes sociaux en 2005. Ce serait inacceptable, et même malhonnête ! (Protestations sur les travées de l'UMP.) Le groupe socialiste du Sénat ne peut imaginer que le Gouvernement se livre à une pareille manipulation.
Mme la présidente. Posez votre question, mon cher collègue.
M. Charles Gautier. Nous avions déjà interrogé le Gouvernement sur la destination de ces sommes lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Aujourd'hui, nous vous demandons solennellement d'indiquer à la représentation nationale la répartition exacte des sommes recueillies, et notamment le nombre de créations de postes dans les maisons de retraite. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jean-Pierre Sueur. C'est une vraie question !
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de M. Philippe Douste-Blazy, qui est retenu.
M. Simon Sutour. Il ne vient jamais !
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat. La question que vous posez mérite une réponse claire. Celle-ci est en effet attendue par nos compatriotes, qui, à la suite de la loi du 30 juin 2004, consentiront en effet une journée de congé à ce geste de fraternité et de solidarité à destination des personnes âgées et des personnes handicapées.
Les Français doivent être parfaitement assurés que le produit du jour férié, 2 milliards d'euros, sera exclusivement consacré à la politique de la dépendance dans notre pays.
M. Guy Fischer. On verra !
M. René-Pierre Signé. C'est faux !
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat. C'est pourquoi a été créée la caisse nationale de solidarité, qui assurera la transparence et le fléchage de ces fonds. Vous demandez des précisions au sujet de ce fléchage, je vais vous les donner.
En vitesse de croisière, c'est-à-dire à partir de 2005 pour les personnes âgées et de 2006 pour les personnes handicapées, les fonds seront répartis en deux enveloppes : 40 % pour les personnes handicapées et 60 % pour les personnes âgées.
Les 800 millions d'euros destinés aux personnes handicapées serviront à financer, d'une part, ce qu'on appelle la compensation collective, c'est-à-dire la création de places en établissement - car, vous le savez, notre pays est en retard dans ce domaine - et, d'autre part, la prestation de compensation destinée au financement des aides humaines et techniques dont elles ont besoin.
En ce qui concerne les personnes âgées et le fléchage de 1,2 milliard d'euros, 410 millions d'euros seront consacrés au recrutement de personnels, afin de renforcer les équipes soignantes dans les établissements,...
M. Charles Revet. Très bien !
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat. ... et 400 millions d'euros compléteront le financement de l'APA, dont vous n'ignorez pas le coût et les efforts collectifs qu'il nécessite.
Plusieurs sénateurs UMP. Oh si, ils l'ignorent !
M. Henri de Raincourt. Et depuis le début !
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat. Je dissipe ainsi les doutes et les interrogations qui ont pu naître chez nos concitoyens à la suite de l'article qui est paru dimanche dernier dans un quotidien.
J'ajoute que, pour 2004, les fonds qui ont été prélevés à partir du jour férié à destination des personnes âgées ont été intégralement utilisés. En effet, contrairement à ce qui est écrit dans cet article, ce prélèvement s'est effectué à partir du 1er juillet 2004, et non du 1er juillet 2003.
Pour ce qui concerne le budget de la caisse nationale de solidarité pour 2005, j'ai déjà eu l'occasion de le présenter au Sénat.
Nous pouvons donc rassurer nos concitoyens et leur dire que, selon les souhaits du Président de la République et du Premier ministre, ces fonds sont intégralement fléchés à destination de cette politique pour laquelle nous manquons de financement et nous devons rattraper un retard qui fait cruellement défaut à nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Mortemousque.
M. Dominique Mortemousque. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité.
En tant qu'agriculteur, mais aussi en tant que maire d'une commune rurale, je tiens à vous faire part du découragement des agriculteurs face à la réforme de la politique agricole commune.
M. Roland Muzeau. Il faut voter non !
M. Dominique Mortemousque. Tout d'abord, cette réforme s'inscrit dans un contexte difficile, celui d'une baisse du revenu agricole en 2004.
La nouvelle PAC est perçue comme une réglementation complexe, rigide et tatillonne.
Complexe, parce qu'il existe une multitude de règlements et de directives pour obtenir les aides, et les agriculteurs ont des difficultés pour se repérer dans ces nouveaux dispositifs.
M. Jean-Pierre Sueur. C'est vrai !
M. Dominique Mortemousque. Rigide, parce que le manquement à ces règles par erreur entraîne des pénalités financières, par exemple pour la perte des boucles des animaux.
Tatillonne, parce qu'elle est très administrative et s'accompagne de contrôles draconiens des exploitations, qui déstabilisent les agriculteurs.
M. René-Pierre Signé. Il n'est plus à l'UMP, il est dans l'opposition !
M. Dominique Mortemousque. En bref, la PAC est perçue comme un moyen supplémentaire de réduire le nombre d'agriculteurs.
Mme Hélène Luc. Eh oui !
M. Dominique Mortemousque. C'est dommage, car la France a obtenu, grâce aux négociations à Bruxelles, près de 8 milliards d'euros par an jusqu'en 2013, soit 20 % de l'ensemble de l'enveloppe agricole communautaire. Il est donc temps de rétablir les choses.
Mme Hélène Luc. Vous avez raison !
M. René-Pierre Signé. Il faut l'appeler au PS !
M. Dominique Mortemousque. Les agriculteurs sont attachés à fournir des produits de qualité dans un souci de respect de l'environnement, et ils aiment leur travail.
Les services de l'Etat, en l'occurrence les directions départementales de l'agriculture, ne pourraient-elles pas redevenir des partenaires, comme par le passé, afin de vulgariser des procédures de gestion adaptées ?
M. Simon Sutour. Eh oui !
M. René-Pierre Signé. Il a raison !
M. Roland Courteau. On va l'applaudir !
M. Dominique Mortemousque. Ne serait-il pas utile d'établir une charte de bonnes pratiques du contrôle, opposable à toutes les parties, avec une commission de recours ?
Le projet de loi d'orientation agricole, que le Gouvernement présentera au Parlement dans les prochains mois, a de grandes ambitions. Pour atteindre de tels objectifs - auxquels nous adhérons totalement -, il faudrait d'abord lever les inquiétudes liées à la réforme de la politique agricole commune et regagner la confiance des agriculteurs.
M. René-Pierre Signé. Eh oui, car vous l'avez perdue !
M. Dominique Mortemousque. J'espère que votre réponse nous permettra de prendre ce chemin. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et à la ruralité. Monsieur le sénateur, vous avez eu raison de rappeler l'accord exceptionnel que, malgré l'opposition de certains de nos partenaires, la France a obtenu en juin 2003, grâce à l'action menée par le Président de la République...
M. René-Pierre Signé. Ah, si on ne l'avait pas !
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. ...et le Gouvernement auprès des instances européennes : ce sont 10 milliards d'euros, dont 8 milliards d'euros d'aides directes, qui nous sont garantis jusqu'en 2013 !
M. Simon Sutour. Au détriment des fonds structurels !
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. Il y a très longtemps que nous n'avions pas connu une telle lisibilité pour moderniser notre agriculture et construire l'avenir du monde rural.
La contrepartie, qui était souhaitée par l'opinion, c'était la mise en oeuvre de bonnes conditions agro-environnementales, ce qu'on appelle la conditionnalité des aides. Je précise au passage que ces bonnes conditions, qui sont décrites dans dix-neuf directives et règlements, sont, pour la plupart, déjà en vigueur Les agriculteurs les connaissent et ils ont commencé à les mettre en pratique. Nous devrons les mettre en oeuvre progressivement d'ici à 2007.
Cette situation, même si elle suscite bien sûr des inquiétudes car il y a un risque de complexité administrative, est positive.
M. René-Pierre Signé. En quoi est-elle positive ?
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. M. Dominique Bussereau et moi-même avons souhaité, en fonction des informations qui remontaient du terrain, procéder immédiatement à un certain nombre d'assouplissements sur la mise en oeuvre de la conditionnalité des aides. Ainsi, les anomalies mineures ne seront pas financièrement sanctionnées en 2005. Nous avons également souhaité que l'absence de boucle sur un animal, ou si la boucle est illisible, ne soit pas relevée comme une anomalie. Il existe donc, d'ores et déjà, beaucoup d'assouplissements. Nous poursuivrons en fonction du dialogue sur le terrain, non seulement avec les DDAF, mais aussi avec les organisations professionnelles et les parlementaires.
Concernant les contrôles, nous devons, là aussi, nous montrer très pragmatiques. M. Dominique Bussereau et moi-même avons demandé aux DDAF et aux préfets de veiller à ce que les règlements soient appliqués avec discernement, pragmatisme, progressivement, dans une vraie démarche de dialogue.
M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas le cas !
Mme Hélène Luc. Vous ne répondez pas aux inquiétudes des agriculteurs !
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. Nous avons aussi souhaité, c'est la mission des préfets, que les contacts soient multipliés avec les organisations professionnelles agricoles afin de pouvoir découvrir les améliorations possibles.
Conformément aux négociations que nous avons menées avec Bruxelles, tout cela est fait dans l'optique d'aménagements nouveaux, en fonction de cette année test pour les agriculteurs qu'est 2005, qui seront mis en oeuvre en 2006, de façon pragmatique et avec confiance en l'avenir. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. René-Pierre Signé. M. Mortemousque ne semble pas convaincu par votre réponse !
péage pour les poids lourds sur les sections gratuites d'autoroute
M. Jean Louis Masson. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.
Monsieur le ministre, vous le savez, j'ai de la suite dans les idées. Il y a deux ans, le 13 mars 2003, je vous ai interrogé par la voie d'une question écrite sur la possibilité de mettre en oeuvre un péage pour les poids lourds sur la section gratuite de l'autoroute A31 en Lorraine. Or aujourd'hui, cette question est plus que jamais d'actualité, car l'instauration d'un péage pour les poids lourds en Allemagne amène ceux-ci à se reporter massivement sur les autoroutes gratuites de la zone frontalière.
A l'ouest de l'A31, l'autoroute Lille-Reims est à péage, et à l'est de l'autoroute A31, les autoroutes allemandes ont maintenant elles aussi instauré un péage pour les poids lourds. Dans ces conditions, l'ensemble du trafic se reporte sur l'A31, qui est gratuite dans le sillon lorrain. Or la vallée de la Moselle n'a pas vocation à concentrer tout le trafic de camions entre le nord et le sud de l'Europe. Il faut donc, monsieur le ministre, que des mesures vigoureuses soient prises à l'encontre d'un trafic de transit qui n'apporte que des nuisances.
L'instauration d'un péage pour les poids lourds serait, à mon sens, une action emblématique et dissuasive. Le président du conseil régional d'Alsace vient d'ailleurs de se rallier à cette idée. L'instauration de ce péage serait d'autant plus judicieuse que le produit du péage pourrait financer en Lorraine et en Alsace des voies rapides de délestage ou, par exemple, la mise à deux fois trois voies de l'A31, dont on a tant besoin, entre Metz et Nancy.
Ma question est donc simple, monsieur le ministre. Ce qui est possible en Allemagne peut l'être en France, et dépend seulement de la bonne volonté des pouvoirs publics. Oui ou non, êtes-vous d'accord pour l'instauration, à titre expérimental, d'un péage sur le transit des poids lourds dans les régions frontalières en Lorraine et en Alsace ?
M. Dominique Braye. Non !
M. Jean Louis Masson. Le problème de la saturation de l'autoroute A31 préoccupe tout le monde - y compris, vous-même, monsieur le ministre -, notamment en Lorraine.
Mme la présidente. Veuillez conclure, monsieur le sénateur.
M. Jean Louis Masson. Je conclus, madame la présidente.
Lors des dernières élections régionales, les Lorrains ont massivement rejeté le tracé d'autoroute que vous proposiez. Si vous persistez, monsieur le ministre, ils continueront.
Nous vous proposons une solution constructive, qui ne coûte rien à l'Etat et qui permet de résoudre le problème d'une saturation qui devient insupportable pour tous les Lorrains. (M. Christian Cointat applaudit.)
M. René-Pierre Signé. C'est une question locale, pour le mardi matin !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, le nouveau système à l'allemande permet de taxer tous les camions dans le secteur allemand, mais a entraîné un report en France de nombre de camions. Le président Zeller m'a d'ailleurs adressé une lettre à ce sujet.
Face à cette situation, il existe trois réponses.
La première consisterait à taxer les camions étrangers en France. Le droit européen ne le permet pas. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
La deuxième réponse serait d'instaurer le système à l'allemande en France. Cela présenterait trois inconvénients. D'abord, cette solution entraînerait une perte de compétitivité pour les entreprises françaises. Ensuite, ce serait plus coûteux qu'en Allemagne, car y a déjà un grand circuit à péage sur les autoroutes françaises. Enfin, la circulation de poids lourds se reporterait sur des circuits routiers qui ne sont pas faits pour cela.
La troisième solution est le péage sur l'A31, voire l'A35, mais cela suppose une forte différenciation entre véhicules légers et poids lourds, beaucoup plus importante que sur les autoroutes actuelles. Je suis très ouvert à cette solution, à condition qu'elle soit consensuelle. Si vous êtes prêt à y travailler, nous aussi ! (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze.)
Mme la présidente. La séance est reprise.