Article 20
I. - Non modifié.......................................................
II. - Le premier alinéa de l'article L. 321-1 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« A l'intérieur des périmètres délimités en application de l'article L. 143-1, ils peuvent procéder, après information des communes et des établissements publics de coopération intercommunale concernés, aux acquisitions foncières nécessaires à la protection d'espaces agricoles et naturels périurbains, le cas échéant en exerçant, à la demande et au nom du département, le droit de préemption prévu par l'article L. 142-3 ou, en dehors des zones de préemption des espaces naturels sensibles, le droit de préemption prévu par le 9° de l'article L. 143-2 du code rural. »
III. - Le premier alinéa de l'article L. 324-1 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« A l'intérieur des périmètres délimités en application de l'article L. 143-1, ils peuvent procéder, après information des communes et des établissements publics de coopération intercommunale concernés, aux acquisitions foncières nécessaires à la protection d'espaces agricoles et naturels périurbains, le cas échéant en exerçant, à la demande et au nom du département, le droit de préemption prévu par l'article L. 142-3 ou, en dehors des zones de préemption des espaces naturels sensibles, le droit de préemption prévu par le 9° de l'article L. 143-2 du code rural. »
III bis et IV. - Non modifiés........................................
V. - Après l'article L. 143-7 du même code, il est inséré un article L. 143-7-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 143-7-1. - A l'intérieur des périmètres délimités en application de l'article L. 143-1 du code de l'urbanisme, la société d'aménagement foncier et d'établissement rural informe le président du conseil général de toutes les déclarations d'intention d'aliéner.
« Lorsque le département décide d'utiliser le droit de préemption prévu au 2° de l'article L. 143-3 du code de l'urbanisme à l'intérieur des périmètres mentionnés au premier alinéa, ce droit est applicable à tout terrain, bâti ou non bâti, ou ensemble de droits sociaux donnant vocation à l'attribution en propriété ou en jouissance de terrains qui font l'objet d'une aliénation à titre onéreux, sous quelque forme que ce soit et qui ne sont pas soumis au droit de préemption prévu par l'article L. 142-3 du code de l'urbanisme. Les 2° et 5° de l'article L. 143-4 et l'article L. 143-7 du présent code ne sont alors pas applicables.
« Le droit de préemption prévu par le 9° de l'article L. 143-2 peut être exercé pour l'acquisition d'une fraction d'une unité foncière comprise dans les périmètres mentionnés au premier alinéa. Dans ce cas, le propriétaire peut exiger que le titulaire du droit de préemption se porte acquéreur de l'ensemble de l'unité foncière. Le prix d'acquisition fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation tient compte de l'éventuelle dépréciation subie, du fait de la préemption partielle, par la fraction restante de l'unité foncière.
« Les modalités de financement des opérations conduites par la société d'aménagement foncier et d'établissement rural pour le compte du conseil général en application du 9° de l'article L. 143-2 sont fixées par une convention passée entre le conseil général et ladite société. »
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 12, présenté par M. Emorine, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le II de cet article :
II - L'article L. 321-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« A l'intérieur des périmètres délimités en application de l'article L. 143-1, les établissements publics mentionnés aux troisième et quatrième alinéas peuvent procéder, après information des communes et des établissements publics de coopération intercommunale concernés, aux acquisitions foncières nécessaires à la protection d'espaces agricoles et naturels périurbains, le cas échéant en exerçant, à la demande et au nom du département, le droit de préemption prévu par l'article L. 142-3 ou, en dehors des zones de préemption des espaces naturels sensibles, le droit de préemption prévu par le 9° de l'article L. 143-2 du code rural. »
La parole est à M. Jean-Paul Emorine, rapporteur.
M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec la loi de programmation pour la cohésion sociale.
M. le président. Le sous-amendement n° 187 rectifié, présenté par MM. Vasselle et Ginoux, est ainsi libellé :
A la fin du texte proposé par l'amendement n° 12, supprimer les mots :
ou, en dehors des zones de préemption des espaces naturels sensibles, le droit de préemption prévu par le 9° de l'article L 143-2 du code rural
La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Il apparaît peu utile de multiplier les interlocuteurs dans la gestion et la préservation des espaces agricoles périurbains qui auront été définis. Le département doit rester le seul compétent pour cette politique et lui seul devrait détenir un droit de préemption pour remplir cette mission.
C'est la raison pour laquelle ce sous- amendement a été déposé, monsieur le président.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 144 rectifié bis est présenté par MM. Sido, de Broissia, Bailly, Le Grand, Leroy, du Luart, Dériot, Vial, Doligé et Fouché.
L'amendement n° 243 est présenté par MM. Le Cam, Billout et Coquelle, Mmes Demessine, Didier et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 298 rectifié est présenté par MM. Fortassin et A. Boyer.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Dans le texte proposé par les II et III de cet article pour compléter respectivement les premiers alinéas de l'article L. 321-1 et L. 324-1 du code de l'urbanisme, supprimer (deux fois) les mots :
le droit de préemption prévu par l'article L. 142-3 ou, en dehors des zones de préemption des espaces naturels sensibles
La parole est à M. Eric Doligé, pour présenter l'amendement n° 144 rectifié bis.
M. Eric Doligé. Cet amendement vise à simplifier les procédures. Nous souhaitons en effet, avec plusieurs collègues, clarifier l'utilisation du droit de préemption des départements dans le cas où celui-ci est confié aux SAFER.
M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l'amendement n° 243.
M. Gérard Le Cam. Il est défendu.
M. le président. L'amendement n° 298 rectifié n'est pas soutenu.
L'amendement n° 188 rectifié, présenté par MM. Vasselle et Ginoux, est ainsi libellé :
A la fin du texte proposé par le III de cet article pour compléter le premier alinéa de l'article L. 324-1 du code de l'urbanisme, supprimer les mots :
ou, en dehors des zones de préemption des espaces naturels sensibles, le droit de préemption prévu par le 9° de l'article L. 143-2 du code rural.
La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Cet amendement a le même objet que le sous-amendement n° 187 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Le sous-amendement n° 187 rectifié, qui avait déjà été déposé en première lecture, limite la possibilité d'intervention des établissements publics fonciers. Or, ces derniers ont fait preuve de leur efficacité comme outil au service des collectivités territoriales. En outre, le fait pour les départements d'avoir le choix de recourir, soit aux SAFER, soit aux établissements publics fonciers constitue un facteur de souplesse indispensable.
Je propose donc à notre collègue de retirer ce sous-amendement ; à défaut, comme en première lecture, la commission émettrait un avis défavorable.
Pour ce qui est des amendements identiques nos 144 rectifié bis et 243, la suppression de la possibilité pour les établissements publics fonciers d'exercer, à la demande du département, le droit de préemption relatif aux espaces naturels sensibles n'apparaît pas souhaitable dans la mesure où l'article vise à mettre à la disposition du département des outils lui permettant de mener une politique de protection des espaces naturels et agricoles. Le droit de préemption relatif aux espaces naturels sensibles apparaît comme un instrument adapté à cet objectif ; c'est pourquoi la commission, défavorable à ces amendements, en propose le retrait.
Sur l'amendement n° 188 rectifié, pour les raisons que j'ai exposées au sujet du sous-amendement n° 187 rectifié, la commission a émis un avis défavorable et en demande le retrait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. L'amendement n° 12, présenté par M. Emorine, est un amendement de coordination avec l'article 45 de la loi de programmation pour la cohésion sociale. Naturellement, le Gouvernement y est favorable.
Le Gouvernement est, en revanche, défavorable au sous-amendement n° 187 rectifié, présenté par M. Vasselle, visant à supprimer la possibilité, pour les établissements publics fonciers nationaux qui interviennent au nom des départements, de mobiliser le droit de préemption des SAFER dans les espaces périurbains.
En effet, en disposant, aux termes de l'article 20, de la possibilité de mettre en oeuvre le droit de préemption des SAFER sur les terrains à caractère agricole où ne peut s'appliquer le droit de préemption prévu à l'article L. 142-3 du code de l'urbanisme au titre des espaces naturels sensibles, les établissements publics fonciers nationaux se voient reconnaître une capacité globale d'intervention pour la protection des espaces périurbains, à la demande du département. Si nous limitons la possibilité d'intervention des établissements publics fonciers nationaux aux seuls instruments du code de l'urbanisme, c'est-à-dire aux zones de préemption des espaces naturels sensibles, nous réduisons l'efficacité du dispositif.
Par conséquent, monsieur Vasselle, il me paraît nettement préférable d'en rester à ce dispositif ; je vous propose à mon tour, après M. le rapporteur, de retirer votre sous-amendement. J'ai compris ce que vous souhaitiez exprimer mais, dans le même temps, la possibilité d'intervention globale de ces établissements à la demande du département s'en trouverait vraiment limitée.
S'agissant de l'amendement n° 144 rectifié bis, amendement de coordination avec l'amendement n° 142 rectifié ter, la tentative de clarification est louable, comme j'ai pu le dire précédemment, mais elle n'atteint pas son objectif.
En effet, le Gouvernement s'est efforcé de ne pas ajouter de nouveaux droits de préemption et d'utiliser de façon cohérente les droits de préemption existants, celui des départements dans les espaces naturels sensibles et celui de la SAFER et des établissements publics fonciers.
Par cet amendement, comme je le faisais remarquer précédemment à M. Doligé, on supprime la possibilité d'utiliser le droit de préemption pour les espaces naturels sensibles dans les périmètres périurbains et on crée un droit de préemption supplémentaire pour le département, ce qui est source de complexité.
En réalité, le département peut déjà mobiliser les droits de préemption existants, qui couvrent la totalité des périmètres périurbains. Par conséquent, là encore, même si l'intention est louable, il me semble préférable d'en rester à l'équilibre du texte qui permet au département d'utiliser au mieux les outils existants en matière de préemption.
Le Gouvernement propose donc le retrait de l'amendement n° 144 rectifié bis ; sinon, il émettra un avis défavorable. Il en va de même, évidemment, pour l'amendement n° 243.
L'amendement n° 188 rectifié vise la suppression de l'utilisation du droit de préemption de la SAFER par un établissement public foncier local. Pour les raisons que j'ai évoquées précédemment en ce qui concerne les établissements publics fonciers locaux, le Gouvernement est défavorable à cet amendement et en demande le retrait.
M. le président. Monsieur Vasselle, le sous-amendement n° 187 rectifié est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle. J'ai bien entendu l'argumentation développée par M. Emorine. Il faut savoir que, en Picardie, les chambres d'agriculture de l'Oise et de la Somme avaient demandé, par délibération, la suppression du droit de préemption conféré à la SAFER, compte tenu de son comportement dans le cadre de l'exercice de ce droit. Les élus en viennent naturellement à se poser des questions si la profession agricole doute de la pertinence du maintien de ce droit à la SAFER !
Vous comprendrez que l'on s'interroge a fortiori sur la pertinence de l'exercice de ce droit, à la demande des départements, pour l'acquisition de terrains en zone périurbaine ou dans des espaces sensibles ! Le dépôt de ce sous-amendement avait notamment pour objet de vous interpeller sur ce qui s'est produit dans ma région, mais d'autres régions de France peuvent se trouver dans des situations analogues.
Ainsi, j'ai eu quelques échos - c'est la raison pour laquelle mon collègue Georges Ginoux est cosignataire du sous-amendement - au sujet de comportements surprenants de la part de la SAFER dans la région Centre. En effet, certaines SAFER se comportent comme des marchands de biens ou des agents immobiliers, ne cherchant en définitive qu'à réaliser du chiffre d'affaires et à récolter quelques subsides au passage, plaçant parfois l'intérêt général au second plan.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il ne m'appartient pas de persister dans cette voie. Votre projet de loi est construit, il est cohérent. La possibilité pour les départements de faire appel aux SAFER en tant que de besoin procède d'une certaine logique, mais à la condition, bien entendu, que ce droit soit exercé conformément à l'esprit de la loi et à l'intérêt général. Si tel n'est pas le cas, il faut prendre des mesures en conséquence.
Que vais-je faire à présent ? (Sourires.) Si je retire le sous-amendement, mes collègues n'auront pas le plaisir de s'exprimer sur le sujet... Toutefois, comme personne ne semble se manifester pour approuver ou désapprouver, mon rôle est plutôt d'aider le Gouvernement et non de lui créer des difficultés. L'avenir nous éclairera.
Par conséquent, dans l'immédiat, j'accède bien volontiers à votre demande de retrait, monsieur le secrétaire d'Etat, mais je souhaite que vous réfléchissiez à mes propos parce que tout n'est pas limpide et étale, à cet égard, sur l'ensemble du territoire.
M. le président. Le sous-amendement n° 187 rectifié est retiré.
La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote sur l'amendement n° 12.
M. Michel Mercier. L'intervention de M. Vasselle est fort intéressante, je me dois de le souligner, même si j'approuve le retrait du sous-amendement.
Je souhaiterais obtenir des précisions de la part du Gouvernement sur le mécanisme que nous sommes en train d'instituer. Les départements sont chargés d'établir le périmètre de protection de l'agriculture périurbaine ; ils disposeront pour ce faire de deux moyens d'action pour acheter les terrains : le droit de préemption lié à la protection des zones naturelles sensibles et le droit de préemption de la SAFER.
Monsieur le secrétaire d'Etat, dans l'esprit du texte que vous nous présentez, la SAFER doit-elle déférer à la demande du département ou lui reconnaît-on le droit d'opposer un refus ? Par ailleurs, qui paie ? Je réitérerai cette demande ultérieurement.
M. le président. La parole est à M. Gérard César, pour explication de vote.
M. Gérard César. Le problème posé par notre collègue Alain Vasselle est important, mais - et nous en avons débattu hier en commission - il me paraît cohérent d'attendre, pour remettre à plat le rôle des SAFER, le projet de loi d'orientation agricole.
Les SAFER se comportent différemment selon les départements. Je dois dire que, dans le mien, en partenariat étroit avec l'association des maires, la SAFER signe des conventions afin d'intervenir sur certaines préemptions qui favorisent un urbanisme efficace au niveau des communes.
Je souhaite donc que la proposition que M. Vasselle a faite, même s'il a retiré son sous-amendement, soit abordée plus globalement dans la future loi d'orientation agricole.
M. Philippe Darniche. Très bien !
M. le président. En conséquence, les amendements identiques nos 144 rectifié bis et 243, ainsi que l'amendement n° 188 rectifié n'ont plus d 'objet.
L'amendement n° 174, présenté par MM. Revet et Détraigne, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le IV de cet article pour compléter l'article L. 143-2 du code rural par les dispositions suivantes :
, ainsi que dans l'ensemble des zones rurales, la réalisation de projets de développement rural au sens de l'article L. 111-2 du présent code. Dans ce cas, le droit de préemption sera exercé sur tout immeuble bâti ou non à la demande expresse de la collectivité concernée
La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. J'avais déposé un amendement similaire en première lecture et le Gouvernement m'avait alors indiqué que la situation des SAFER serait examinée dans la future loi d'orientation agricole. J'y avais totalement souscrit, car la vocation première de la SAFER étant l'aménagement foncier agricole, c'est bien dans le cadre d'une loi d'orientation agricole qu'il y a lieu de l'examiner. Nous aurons donc, à cette occasion, un large débat qui me paraît tout à fait légitime.
L'objet du présent amendement, monsieur le secrétaire d'Etat, est différent. Il se fonde non pas sur l'aménagement agricole mais, bien au contraire, sur l'aménagement du territoire.
Pourquoi ? Tout simplement parce qu'il existe des situations où la collectivité pourrait être amenée à intervenir, à condition qu'elle soit informée des cessions de terrain qui sont envisagées.
Nous sommes confrontés de plus en plus souvent, sur l'ensemble du territoire national - c'est le cas tous les ans, en Seine-Maritime, depuis une dizaine d'années -, à des problèmes d'inondations et d'érosion des sols dus à la pluviométrie, aux évolutions culturales, etc. On enregistre quelquefois des décès et les conséquences économiques sont extrêmement graves.
Actuellement, lorsqu'un terrain est à vendre sur un territoire communal, la collectivité concernée n'en est pas informée. Elle ne peut donc pas se manifester si ce terrain l'intéresse. Qu'est-ce qui interdirait que les communes soient informées ?
Je suggère que, chaque fois qu'intervient une cession, la SAFER en informe la collectivité afin que celle-ci puisse préempter, si elle estime que le terrain est situé à un endroit permettant une opération d'aménagement et d'intérêt général.
Certes, cette disposition pourrait être prise dans le cadre d'une prochaine loi d'orientation ; mais nous savons tous comment les choses se font : il faut du temps. Or, tous les ans maintenant, nous sommes confrontés partout en France à de telles situations.
De plus, dans la mesure où cet amendement traite d'aménagement du territoire, il est davantage lié au projet de loi que nous examinons aujourd'hui qu'à un texte sur l'aménagement foncier agricole.
En conséquence, monsieur le secrétaire d'Etat, je suggère que nous adoptions tout de suite cette disposition, sans attendre demain.
La SAFER, dans le contexte actuel et dans le cadre des prérogatives qui sont les siennes, doit informer les collectivités - départements, communautés de communes, communes, peu importe - en fonction des projets, et la collectivité concernée doit être prioritaire.
C'est un point également important puisque, à l'heure actuelle, c'est l'agriculture qui est prioritaire, ce qui est bien légitime dans la mesure où il s'agit d'un outil foncier agricole. Mais en l'espèce, il faudrait que ce soit la collectivité qui ait priorité. Je pense aux inondations ; je pense à la protection des captages, secteur de plus en plus vulnérable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Le projet de loi étend déjà les pouvoirs reconnus aux SAFER de manière très significative puisque, dans les périmètres de protection périurbains, celles-ci pourront, à la demande du département, exercer un droit de préemption sur tout terrain, bâti ou non.
Cet amendement va beaucoup plus loin, car il aurait pour conséquence - son auteur l'a bien dit - d'étendre ce droit déjà large à l'ensemble du milieu rural, pour tout projet de développement local.
Cette question mérite, effectivement, d'être examinée dans la mesure où les besoins sont certains dans les petites communes rurales. Toutefois, elle n'a pas sa place à l'article 20 de ce projet de loi, qui ne traite que du périurbain. Elle s'insérera parfaitement, en revanche, dans le projet de loi d'orientation agricole.
M. Charles Revet. Mais non !
M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. La commission s'en remet donc à la sagesse du Sénat, en attendant de prendre connaissance de l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. Avant de me prononcer sur cet amendement, monsieur le président, je souhaite répondre à la question que m'a posée M. Mercier sur les SAFER.
Monsieur le sénateur, vous me demandez si la SAFER doit absolument déférer à la demande du département : la SAFER est un établissement public et doit donc répondre à la demande du département.
Si le département peut adresser sa demande à la SAFER, il dispose également de l'outil que constituent les établissements publics fonciers, les EPF, même s'ils ne sont pas présents partout.
En tout état de cause, vous n'avez pas d'inquiétude à avoir, monsieur Mercier : répondre à la demande du département est bien une mission de la SAFER
M. Michel Mercier. Parfait, monsieur le secrétaire d'Etat : c'est très clair.
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. L'amendement n° 174 tend à étendre le champ du droit de préemption des SAFER à tout immeuble, bâti ou non, pour la réalisation de projets de développement rural qui intéressent les collectivités.
Les projets de développement des collectivités, via des cessions de terrain, pour la réalisation d'équipements collectifs, ou de bâtiments ayant perdu leur usage agricole, pour l'implantation, notamment, d'activités créatrices d'emplois, peuvent déjà être accompagnés par les SAFER. Il s'agit de biens acquis à l'amiable, ce qui représente a priori, en moyenne, 85 % de leur activité foncière.
Ouvrir le droit de préemption des SAFER aux projets de développement rural les feraient sortir, par définition, du domaine proprement agricole, puisque cela leur ouvrirait notamment la possibilité, vous l'avez vous-même souligné, monsieur Revet, de s'occuper d'immeubles bâtis, au sens large.
Il faut, M. César l'a dit tout à l'heure, prendre le temps de mesurer cette évolution. Ce projet de loi renforce déjà grandement les moyens des SAFER. Dans quelques mois, nous aurons un débat plus global sur le projet de loi d'orientation agricole. En l'occurrence, si nous adoptions aujourd'hui votre amendement, monsieur Revet, nous irions peut-être un peu vite, sans avoir conduit cette réflexion jusqu'à son terme.
Nous pouvons, en particulier, nous interroger sur le fait de savoir en quoi une prérogative très encadrée, très motivée, comme l'exercice du droit de préemption, pourrait s'inscrire dans le cadre d'une fonction d'intermédiaire foncier, beaucoup plus généraliste. Une telle disposition mérite tout de même que l'on y travaille et qu'il y ait un débat.
J'ai bien retenu, monsieur le sénateur, votre proposition d'information par les SAFER et votre suggestion que les collectivités concernées puissent être prioritaires ; cela mérite que l'on s'y prépare dans la perspective de la loi d'orientation agricole. Telle est ma proposition.
Je suis tout à fait prêt à vous associer à cette démarche, comme nous l'avons fait sur d'autres dispositions de ce texte entre les deux lectures - vous pouvez en témoigner, monsieur Revet. Faisons-le maintenant entre la deuxième lecture de ce projet de loi et la loi d'orientation agricole.
Je vous demande donc, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Revet, l'amendement n° 174 est-il maintenu ?
M. Charles Revet. Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaiterais vous suivre. Mais lorsque l'on est sur le terrain, que l'on visite pour la énième fois une famille qui a les pieds dans l'eau et dont les biens ont subi des dégâts majeurs, comment leur expliquer que nous avons reporté aux calendes grecques, uniquement pour des raisons réglementaires, une telle disposition ?
M. Charles Revet. Comment pouvez-vous refuser un tel ajustement ? Je suis navré, monsieur le secrétaire d'Etat, mais je ne peux pas vous comprendre.
Il m'a semblé, hier, qu'une majorité des membres de la commission était plutôt favorable à ma proposition. Il s'agit, en effet, d'un petit ajout qui ne préjuge en rien la discussion générale que nous aurons sur les SAFER. Peut-être même que des modifications seront apportées à cette occasion, je n'en sais rien. Mais puisque l'ensemble de nos collectivités, sur pratiquement la quasi-totalité du territoire, sont confrontées au même problème, puisqu'il y a des inondations, puisqu'à chaque pluviométrie importante des forages sont pollués et qu'il convient de protéger les captages, pourquoi ne pas agir ?
Je ne demande pas grand-chose : je souhaite simplement que la SAFER informe la collectivité lorsqu'il y a des terrains à vendre, dans le cas où cette dernière serait intéressée pour des motifs d'intérêt général.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je suis navré, mais je ne peux pas retirer mon amendement. Il s'agit là, me semble-t-il, d'un point extrêmement important. Il est nécessaire, à tout le moins, que le Parlement, dans son ensemble, fasse preuve de bon sens lorsqu'il en va de l'intérêt général !
M. Jean Desessard. Venez vous asseoir parmi nous, monsieur Revet ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Paul Raoult, pour explication de vote.
M. Paul Raoult. A ce moment du débat, nous pouvons tous nous rendre compte que ce texte sur les territoires ruraux recoupe la question du droit du sol.
Par couches successives, un peu à la sauvette, ce droit du sol est modifié ; c'est du moins ce que m'apprend mon expérience de sénateur - je le suis depuis treize ans ! Petit à petit, en rajoutant des strates, nous aboutissons à un résultat confus, sur un sujet extrêmement difficile.
Le vrai problème de fond, aujourd'hui, mes chers collègues, est la rareté du sol : le coût du foncier pour bâtir a explosé, et plus la rareté est organisée plus, évidemment, les coûts augmentent.
Je lis dans vos journaux de droite, messieurs, que l'administration pèse de plus en plus et organise la rareté. Mais que faisons-nous, nous, parlementaires ? Nous rajoutons des strates administratives, des strates de règlements, de lois, et nous organisons, nous aussi, la rareté !
N'oublions pas, mes chers collègues, que nous devons faire face, aujourd'hui, à une forte demande en sol à bâtir. Si nous ne sommes pas capables d'y répondre favorablement, les prix des logements et des terrains flamberont de plus belle. C'est également une question à laquelle il nous faut songer.
Par ailleurs, les agriculteurs nous demandent de protéger leurs sols pour qu'ils puissent continuer à vivre. Mais une fois arrivés à l'âge de la retraite, ils sont demandeurs de modifications du PLU : ils vendent ainsi plus cher leurs terrains et ils arrondissent leur pécule ! J'ai pu constater combien leur discours changeait diamétralement à vingt ans de distance !
Cette variation de point de vue est humaine, mais il nous faut aussi organiser les choses.
Si le sol a une fonction de production, il a également une fonction résidentielle et une fonction de nature. Cette dernière fonction, à l'heure actuelle, devient fondamentale, et M. Revet l'a également mise en avant en évoquant la protection des champs captants.
Pour répondre à cette volonté de préserver notre planète, il nous faut une législation qui permette à une collectivité d'être propriétaire ; il nous faut un règlement qui permette de protéger le sol des agressions diverses et multiples qu'il subit.
En conséquence, est-ce une bonne chose que de proposer que le département soit l'unique détenteur du droit de préemption ? Je n'en suis pas sûr.
Depuis l'extraordinaire mouvement de l'intercommunalité et des communautés d'agglomération, éléments fondamentaux dans le schéma d'organisation, une réflexion est menée dans ces bassins de vie. Le mouvement des SCOT est devenu, lui aussi, un élément important. Même si nous les avons mis en place un peu à reculons, surtout en raison de la difficulté d'organiser la relation urbain-rural, ces SCOT commencent à exister. Proposer brutalement que seul le département légifère et décide pour nous, avouez tout de même, mes chers collègues, que cela pose problème !
Il faudrait donc donner un peu plus de liberté aux élus afin qu'ils gèrent correctement ce droit du sol en tenant compte de la fonction de production, de la fonction résidentielle et la fonction de nature. Nous sommes en effet empêtrés dans des contradictions.
Je puis témoigner, comme d'autre dans cet hémicycle, en tant que responsable d'un gros syndicat de distribution d'eau, que la protection des champs captants, à l'heure actuelle, est devenue un élément déterminant dans la préservation de la richesse en eau. Si nous ne nous en donnons pas les moyens, soit au niveau des agences de l'eau, soit au niveau des distributeurs d'eau, nous en arriverons à des situations dramatiques. Nous devons nous donner les moyens de préserver, de sanctuariser ces champs captants.
Nous avons aujourd'hui besoin d'une réflexion globale. Je sais bien, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous aurons l'occasion d'en discuter de nouveau dans le cadre de la loi d'orientation agricole. Pour autant, je souhaite que, d'ici-là, nous conduisions, tous ensemble et de manière consensuelle, une réflexion de fond sur ces fonctions diverses du sol, parfois contradictoires et difficiles à maîtriser. C'est le rôle des élus, quels qu'il soient, d'y parvenir, pour que notre sol soit collectivement mieux géré en tenant compte des ruraux, des urbains, des agriculteurs, des non-agriculteurs. Il s'agit, à l'heure actuelle, d'un dilemme de fond.
Toutefois, je rappelle que la fonction résidentielle est l'élément de base. Sur l'ensemble du territoire national, le coût du terrain est devenu exorbitant. Aussi, cette fonction résidentielle commence à être difficile à assumer.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Emorine, rapporteur.
M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. Je veux dire en toute amitié à notre collègue Charles Revet que j'ai émis un avis de sagesse conformément à la position adoptée en commission. Il est compréhensible que l'auteur de l'amendement ait plutôt la faiblesse de penser qu'il s'agit d'une sagesse favorable !
M. Revet a évoqué le rôle des SAFER ainsi que les problèmes auxquels on peut être confronté lors de la mise en place des périmètres de protection. A ce jour, les collectivités locales ont la possibilité de passer par la SAFER pour préserver les sols puisque, dans le périmètre immédiat, il doit y avoir une acquisition définitive, dans le périmètre rapproché, cette possibilité existe, et dans le périmètre éloigné, il n'y a aucune obligation.
Il faut bien prendre conscience qu'un vrai débat a lieu sur le rôle des SAFER. Aussi, je crois que le moment n'est pas opportun pour prendre une décision. On peut porter un jugement global sur l'intervention des SAFER, mais, d'un département à l'autre, en fonction des directeurs, des administrateurs, les influences ne sont pas les mêmes.
Il arrive que les SAFER aillent peut-être au-delà de leurs prérogatives. La loi d'orientation agricole donnera vraiment l'occasion de recadrer leur rôle ; une réflexion a été engagée à ce sujet. Tout à l'heure, certains collègues ont dit que, à la limite, les départements n'avaient pas besoin des SAFER et pouvaient assumer seuls les attributions qu'elles exercent
Un problème lié aux SAFER se pose donc. Interrogé par leur journal, j'ai déclaré qu'il faudrait, à un moment donné, que leur rôle soit bien encadré, voire quelquefois limité. C'est un outil qui est mis à la disposition des collectivités locales.
Me rangeant à l'argumentation du Gouvernement, je demande à M. Revet de retirer son amendement, auquel je suis plutôt défavorable.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, je n'ajouterai rien à ce que vient de dire avec raison M. le rapporteur.
J'apporterai néanmoins une précision supplémentaire. L'extension des possibilités d'exercice du droit de préemption a pour conséquence d'empiéter sur le droit de propriété et donc de modifier des éléments fondamentaux constitutifs de ce dernier. Ce point mérite d'être étudié.
Telle est la position technique du Gouvernement : une réflexion globale doit être menée tant sur l'évolution de la relation entre le droit de préemption et le droit de propriété que, plus globalement, comme l'a dit M. Raoult, sur la définition de ces zones périurbaines. On ne peut pas, à l'occasion d'un amendement, revoir les choses si rapidement.
Néanmoins, monsieur Revet je comprends très bien votre souci. Vous l'avez, d'ailleurs, exprimé hier et vous avez obtenu partiellement satisfaction puisque, dorénavant, il sera possible de mettre en valeur des patrimoines qui sont aujourd'hui délabrés, inutilisés ou non valorisés, de prévenir des phénomènes tels que les inondations, ou encore d'améliorer la protection des captages.
Je vous propose que nous travaillions sur ce sujet. Vous ne pouvez pas parler d'un report aux calendes grecques ; un tel report ne serait pas honnête de ma part. Le projet de loi d'orientation agricole, que le Gouvernement est en train de préparer, sera examiné dans trois mois. Le Président de la République a chargé le Premier ministre, ainsi que Dominique Bussereau et moi-même, de présenter ce texte au printemps. Dominique Bussereau a eu l'occasion, hier encore, lors de la cérémonie des voeux aux corps constitués travaillant avec le ministère de l'agriculture, d'annoncer que le texte de loi sera présenté au mois de mai.
On peut réfléchir, comme le proposait M. Raoult, tant sur les aspects juridiques que sur le fond. C'est dans cet esprit que je vous propose de retirer votre amendement. Je me tiens à votre disposition, comme cela a été le cas entre les deux lectures, et je veillerai personnellement à ce que nous puissions travailler ensemble sur ces questions.
M. le président. Monsieur Revet, l'amendement n° 174 est-il toujours maintenu ?
M. Charles Revet. Je le retire, monsieur le président. Cependant, je prends date et je ferai une réflexion plus large.
Je comprends mieux pourquoi nos concitoyens ont le sentiment d'être complètement déconnectés de certaines décisions qui sont prises soit au niveau de l'Etat, soit au niveau local. Que demandais-je dans mon amendement ? Je demandais simplement deux choses : d'une part, que la SAFER informe la collectivité, d'autre part, que cette dernière puisse se porter acquéreur d'un terrain si celui-ci - on ne le sait pas par avance - l'intéresse en vue d'y réaliser un aménagement d'intérêt général.
Certes, il est toujours possible d'utiliser toutes les procédures qui existent. Néanmoins, celles-ci étant lourdes, ce sont non pas trois mois, mais deux ou trois ans qui seront nécessaires. Or, il se passe beaucoup de choses pendant ce temps-là. Il conviendrait de faire preuve d'un peu plus de simplicité et de sagesse pour que les choses avancent et de faire en sorte que nos concitoyens comprennent un peu mieux le travail que nous faisons. Vous pouvez dire tout ce que vous voulez à celui qui a les pieds dans l'eau, vous pouvez lui dire qu'il faut respecter la réglementation : quand il subit à trois ou quatre reprises des inondations, entendant cela, il est probable qu'il éclatera de rire ! Faisons preuve d'un peu de bon sens !
M. Jean Desessard. A celui qui a les pieds dans l'eau, on ne va pas dire qu'on reporte !
M. le président. L'amendement n° 174 est retiré.
M. Thierry Foucaud. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 174 rectifié.
Vous avez la parole, mon cher collègue, pour le défendre.
M. Thierry Foucaud. Chez nous, en Normandie, particulièrement en Seine-Maritime, et notamment dans le Pays de Caux, on dit qu'il y a les « faiseux » et les « diseux ».
Les élus sont véritablement les « faiseux ». Notre collègue Charles Revet a bien rappelé la situation. Parmi d'autres problèmes, nous sommes confrontés à celui, urgent, des inondations.
L'amendement présenté par notre collègue était de bon sens.
M. Jean Desessard. Un excellent amendement !
M. Thierry Foucaud. Il serait utile que tous nos collègues le votent. Il n'engage en rien l'avenir, monsieur le secrétaire d'Etat. En revanche, il donnera la possibilité de régler certains problèmes, liés notamment à l'aménagement du territoire. Il permettra singulièrement à un département tel que celui de la Seine-Maritime, qui est malheureusement souvent « sous l'eau », de résoudre un certain nombre de difficultés.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 189 rectifié, présenté par MM. Vasselle et Ginoux, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 143-7-1 du code rural :
« Art. L. 143-7-1 - A l'intérieur des périmètres délimités en application de l'article L. 143-1 du code de l'urbanisme, toute aliénation est subordonnée, à peine de nullité, à une déclaration préalable adressée par le propriétaire au président du conseil général.
« Lorsque le département décide d'utiliser le droit de préemption prévu au 2° de l'article L. 143-3 du code de l'urbanisme à l'intérieur des périmètres mentionnés à l'article L. 143-1, ce droit est applicable à tout terrain, bâti ou non bâti, ou ensemble de droits sociaux donnant vocation à l'attribution en propriété ou en jouissance de terrains qui fait l'objet d'une aliénation à titre onéreux, sous quelque forme que ce soit et qui n'est pas soumis au droit de préemption prévu par l'article L. 142-3 du code de l'urbanisme. »
La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Cet amendement s'inscrit dans le même esprit que les précédents. Aussi ne m'attarderai-je pas davantage. Il s'inspire également des remarques pertinentes formulées par notre collègue Charles Revet.
Cependant, je n'attends pas d'autres réponses que celles qui m'ont été données précédemment, à moins d'un miracle. (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 347 rectifié, présenté par MM. Collombat, Repentin et les membres du groupe Socialiste, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 143-7-1 du code rural, après les mots :
d'établissement rural informe
insérer les mots :
les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale compétents,
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. C'est un amendement de coordination, qui est retiré.
M. le président. L'amendement n° 347 rectifié est retiré.
L'amendement n° 99 rectifié, présenté par MM. Barraux, Murat et de Richemont, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 143-7-1 du code rural, après les mots :
, bâti ou non bâti,
insérer les mots :
à l'exclusion des surfaces boisées, sauf celles visées au 6° de l'article L. 143-4,
La parole est à M. Bernard Barraux.
M. Bernard Barraux. Les forêts bénéficient déjà d'un statut juridique spécifique de nature à leur garantir une protection au regard de l'urbanisation - droit sur le défrichement, classement en espace boisé classé, etc. Dans un tel contexte, la création d'un nouveau dispositif visant à permettre une préemption de ces forêts ne paraît pas être de nature à apporter des nouvelles garanties.
Je demandais tout à l'heure que tous les organismes parapublics s'investissent. A l'inverse, dans le cas présent, je demande qu'on laisse la forêt de côté afin de ne pas compliquer la gestion de ces terrains.
Les SAFER exerceront seules un droit de préemption dans des cas particuliers. Ne nous engageons pas dans une mécanique qui devient un peu difficile à suivre.
M. le président. L'amendement n° 149, présenté par MM. Béteille, Karoutchi et Houel, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le V de cet article pour l'article L. 143-7-1 du code de l'urbanisme par un alinéa ainsi rédigé :
« En Ile-de-France, la région est compétente pour élaborer et mettre en oeuvre une politique de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains dans les conditions prévues à l'article L. 4413-2 du code général des collectivités territoriales. »
La parole est à M. Laurent Béteille.
M. Laurent Béteille. Cet amendement concerne la région d'Ile-de-France. Depuis vingt-cinq ans existe une Agence régionale des espaces verts, qu'avait mise en place notre ancien collègue Michel Giraud. Elle fonctionne, me semble-t-il, à la satisfaction de l'ensemble des acteurs, qu'il s'agisse de la région, des départements et des communes. Elle nous a permis de mettre en place une politique tout à fait utile de création et de protection des espaces verts.
C'est pourquoi, bien entendu en accord avec les départements, Roger Karoutchi et moi-même avons souhaité déposer cet amendement pour rétablir la compétence de la région d'Ile-de-France dans ce domaine.
M. le président. L'amendement n° 316 rectifié, présenté par Mmes Campion et Bricq, MM. Pastor, Piras, Raoult, Courteau, Dussaut et Lejeune, Mmes Herviaux et Y. Boyer, MM. Besson et Caffet, Mmes Hurel et Khiari, MM. Krattinger, Raoul, Reiner, Repentin, Saunier, Teston, Trémel et Lise, Mme M. André, MM. Bel, Dauge, Domeizel, Marc, Picheral, Signé, Vidal et les membres du groupe Socialiste , apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le IV de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - En Ile-de-France, la région est compétente pour élaborer et mettre en oeuvre une politique de protection et mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains dans les conditions prévues à l'article L. 4413-2 du code général des collectivités territoriales ».
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Nous poursuivons le débat qui a été amorcé tout à l'heure sans grand succès par moi-même et mes amis du groupe socialiste.
Notre amendement a pour objet de compléter l'article 20 afin que soit reconnue cette spécificité en vertu de laquelle, depuis la loi du 6 mai 1976 portant création et organisation de la région d'Ile-de-France, la région dispose d'un établissement public, l'Agence des espaces verts, capable, notamment, de procéder à des acquisitions amiables ou d'utiliser le droit de préemption des départements en zone « espace naturel sensible » - le Sénat a voté contre cette disposition tout à l'heure - et le droit de préemption de la SAFER dans les autres secteurs.
Par ailleurs, la SAFER bénéficie de l'aide du fonds national d'aménagement et de développement du territoire, le FNADT, pour lui donner les moyens de développer sa collaboration avec les collectivités territoriales.
Les nouvelles dispositions prévues par le présent texte vont remettre en cause l'efficacité du dispositif et créer un chevauchement des compétences régionales et départementales. Les nouvelles mesures inscrites au code de l'urbanisme, issues de cette loi, s'opposeront à celles qui figurent à l'article L. 4413-2 du code général des collectivités territoriales, article qui reconnaît le rôle de la région d'Ile-de-France dans ce domaine et qui est à l'origine de la création de l'Agence des espaces verts.
J'ai défendu tout à l'heure cette spécificité. Animés de la même motivation, Mme Campion, moi-même et le groupe socialiste nous présentons cet amendement, qui vise à reconnaître l'efficacité d'un système qui fonctionne très bien.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Emorine, rapporteur. L'amendement n° 189 rectifié, présenté par notre collègue Vasselle, vise à limiter les possibilités d'intervention des SAFER. et s'inscrit dans le même esprit que les autres amendements présentés par notre collègue.
Cette modification n'est pas souhaitable dans la mesure où cette intervention ne peut se faire qu'à la demande et avec l'accord du département. Aussi la commission demande-t-elle à son auteur de retirer cet amendement. A défaut, elle émettra un avis défavorable.
La commission avait émis, en première lecture, un avis défavorable sur un amendement similaire à l'amendement n° 99 rectifié. Elle avait en effet considéré que les espaces boisés étant tout autant menacés par les phénomènes spéculatifs que les terres agricoles, il serait préjudiciable de limiter l'exercice du droit de préemption aux espaces autres que boisés. Aussi la commission demande-t-elle le retrait de cet amendement. A défaut, elle émettra un avis défavorable.
Le débat sur les amendements n°s 149 et 316 rectifié est identique à celui que nous avons eu tout à l'heure. La région d'Ile-de-France, qui possède son Agence des espaces verts, pense que cette agence a pleine compétence. C'est le cas aujourd'hui.
Encore une fois, pour ne pas établir une différenciation entre cette région et les autres, on reconnaît cette agence, elle existe. On me dit que tout fonctionne bien. Il est simplement demandé à cette agence de recueillir l'avis du département avant d'agir. (M. Laurent Béteille s'exclame.)
Ce n'est qu'un avis, mon cher collègue, et, si tout se passe bien, je ne vois pas pourquoi l'avis serait négatif. En revanche, on ne peut quand même pas imposer à un président de conseil général une préemption qu'il ne souhaiterait pas !
Puisque vous me dites que tout se passe bien, je ne vois pas en quoi la loi pourrait modifier fondamentalement le rôle de l'Agence des espaces verts de la région d'Ile-de-France.
La commission demande donc le retrait de ces deux amendements. Sinon, par souci de cohérence, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. Sur l'amendement n° 189 rectifié, le Gouvernement émet, comme la commission, un avis défavorable. Il n'y aura pas de miracle, monsieur Vasselle, j'en suis désolé !
Je ne reprendrai pas les arguments développés par M. le rapporteur. Je précise simplement que cet amendement s'inscrit dans la perspective où le département ne peut pas recourir au droit de préemption prévu par le code rural. Dans ces conditions, il est proposé à tout vendeur d'un terrain situé dans le périmètre de faire une déclaration préalable d'intention auprès du président du conseil général.
Or le dispositif qui est proposé par le Gouvernement prévoit, par souci de simplification - je l'ai déjà dit tout à l'heure à propos d'autres amendements - non pas de créer de nouveaux droits de préemption, mais simplement d'utiliser ce qui existe en l'organisant bien.
Le département décide donc de l'acquisition éventuelle des terrains et de la mise en oeuvre du droit de préemption. Cet amendement affaiblirait, de ce fait, la portée du dispositif de protection qui est proposé.
L'amendement n° 99 rectifié vise à exclure la forêt du droit de préemption mis en oeuvre par le département. Monsieur Barraux, on ne peut pas traiter différemment ni, surtout, séparément les terres agricoles et les espaces forestiers.
Le terme de « terrains » qui est utilisé dans la rédaction de l'article 143-3 du code de l'urbanisme englobe à la fois les terres agricoles, boisées ou non, et les espaces naturels.
Dans les faits, vous le savez comme moi, les activités agricoles et sylvicoles présentent une complémentarité dont le code rural souligne le principe et la pertinence. Par conséquent, afin de pouvoir intervenir efficacement sur un territoire rural, il est nécessaire de maintenir un droit de préemption sur tout type de terrains et de ne pas faire de différence.
Même si j'ai bien entendu la préoccupation que vous avez exprimée sur la forêt, je vous suggère néanmoins de retirer cet amendement, sinon le Gouvernement sera, pour toutes ces raisons, obligé d'émettre un avis défavorable.
L'amendement n° 149, présenté par M. Béteille, et l'amendement n° 316 rectifié, présenté par Mme Bricq, s'inscrivent dans la même logique.
La région d'Ile-de-France bénéficie d'une particularité, celle de disposer de l'Agence des espaces verts.
Lors de la deuxième lecture, l'Assemblée nationale, sur proposition du Gouvernement, a accru la spécificité de l'Agence des espaces verts de la région d'Ile-de-France en lui permettant d'intervenir pour acquérir des terrains situés dans le périmètre de protection.
Cependant, comme je l'ai dit tout à l'heure, dans la mesure où l'Assemblée nationale puis le Sénat se sont accordés sur une position de principe reconnaissant au département la compétence pour mettre en oeuvre le dispositif de protection des espaces naturels et sensibles périurbains, introduire une exception pour la région d'Ile-de-France causerait de nombreuses difficultés d'adaptation et ne serait pas cohérent avec le dispositif retenu.
Madame Bricq, M. le rapporteur a clairement rappelé - je l'avais dit moi-même tout à l'heure - que les relations entre l'Agence des espaces verts et les départements sont codifiées, dans la préparation du périmètre comme dans la gestion du programme d'action. Vous avez dit vous-même tout à l'heure que cela se passait bien. Je crois que, là aussi, nous nous situons dans la logique du bon sens et de l'intérêt général à laquelle s'attachent les élus locaux. Je ne vois donc pas de difficulté.
Je demande, par conséquent, à M. Béteille et à Mme Bricq de bien vouloir retirer leurs amendements. Sinon, le Gouvernement en sollicitera le rejet.
M. le président. Monsieur Vasselle, l'amendement n° 189 rectifié est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 189 rectifié est retiré.
Monsieur Barraux, l'amendement n° 99 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Barraux. Non, monsieur le président, faisant contre mauvaise fortune bon coeur, je le retire !
M. le président. L'amendement n° 99 rectifié est retiré.
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'amendement n° 149.
Mme Nicole Bricq. Je ne vais pas reprendre le débat que nous avons eu à l'article 19. Toutefois, je m'étonne de l'obstination du Gouvernement.
M. le secrétaire d'Etat vient de nous dire que la position retenue était une position de principe et que les amendements présentés introduiraient une distorsion en Ile-de-France ; c'est exactement le contraire.
Je vous propose, en effet, de laisser la loi en l'état, c'est-à-dire celle de 1976 qui a créé l'Agence des espaces verts, et celle de 1985 pour ce qui est du droit de préemption dont nous avons discuté tout à l'heure. Je note que c'est le texte du Gouvernement qui va rompre de jure et de facto avec une pratique qui, tout en conférant une sécurité juridique au système, n'empêche pas la négociation.
Ayant été pendant six ans membre du conseil d'administration de l'Agence des espaces verts, je peux vous assurer que l'on ne faisait rien sans avoir négocié avec les départements.
J'ajoute que l'Ile-de-France est très contrastée : elle comporte des départements très urbains, Paris et sa petite couronne, et, en grande couronne, des départements largement pourvus de terrains boisés et d'espace naturels. C'est notamment le cas de mon département, la Seine-et-Marne, qui abrite la grande forêt nationale de Fontainebleau et comprend des espaces agricoles très étendus.
La région d'Ile-de-France participe à un programme européen intitulé « PURPLE », ce qui montre qu'elle a été capable depuis plus de trente ans de préserver à la fois des espaces naturels et l'agriculture périurbaine ; cela prouve également l'efficacité du système.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, il n'est absolument pas question pour nous d'opposer les départements aux régions. Je ne comprends pas que l'on veuille opposer les uns aux autres, pas plus que je ne comprends cette obstination à revenir sur un système juridique qui permet pourtant d'aboutir au résultat visé au travers de ce projet de loi, c'est-à-dire la préservation de territoires ruraux dynamiques, qui fournissent un vrai service, tant par l'agriculture que par la qualité environnementale qu'ils peuvent offrir.
Actuellement, il existe une mutualisation de l'effort de protection des terres agricoles au niveau de la région. Les départements urbains - Paris et sa petite couronne, notamment - ne voudront pas participer à cet effort.
A partir du moment où l'on « démutualise » le système, on l'appauvrit. Quand, ensuite, on regardera ce qui se passe sur le terrain, on constatera effectivement qu'on a fait le contraire de ce qu'on prétendait vouloir faire par la loi.
M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille, pour explication de vote.
M. Laurent Béteille. Nous avons eu de longs débats sur le principe de la décentralisation et sur les objectifs que nous visions en ce domaine. Parmi ces objectifs figuraient la nécessité de nous adapter aux particularités du terrain et la possibilité de mener des expérimentations afin de déterminer les meilleurs outils pouvant être utilisés dans telle ou telle région.
J'avoue ma perplexité dans ce débat.
L'Ile-de-France est effectivement une région un peu à part - il ne s'agit pas de s'en glorifier, c'est un constat - où le problème des espaces verts se pose à l'évidence d'une manière différente compte tenu de l'extrême importance de la pression foncière. Or nous disposons d'un outil - mis en place, je le rappelle, par Michel Giraud -, qui fonctionne à la satisfaction de tous. Nous ne demandons rien d'extraordinaire, sinon le maintien d'un système qui fonctionne.
Par ailleurs, s'agissant de l'argument du président-rapporteur de la commission selon lequel il ne faut pas aller contre les départements, je précise que ce n'est nullement notre intention. A cet égard, je n'ai pas du tout souscrit à l'amendement n° 315 rectifié, présenté tout à l'heure à l'article 19, qui visait à exclure les départements de la consultation ; celle-ci me paraît pleinement justifiée.
Cet amendement n'a pas été adopté. Par conséquent, même si mon amendement n° 149 avait été voté, la région aurait nécessairement consulté les départements ; tout se serait passé en accord avec eux, comme cela s'est toujours fait, à la satisfaction de tout le monde.
Ayant été invité à retirer cet amendement, j'y consens, mais à regret.
M. le président. L'amendement n° 149 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 316 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)