Article 2
Le chapitre V du titre VIII du livre VII du code du travail est complété par un article L. 785-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 785-2. - Les dispositions de l'article L. 125-3 ne sont pas applicables à l'opération mentionnée à cet article, lorsqu'elle concerne le salarié d'une association ou société sportive mentionnée à l'article 11 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, lorsqu'il est mis à disposition de la fédération sportive délégataire concernée en qualité de membre d'une équipe de France dans des conditions définies par la convention conclue entre ladite fédération et la ligue professionnelle qu'elle a constituée, et alors qu'il conserve, pendant la période de mise à disposition, sa qualité de salarié de l'association ou de la société sportive ainsi que les droits attachés à cette qualité. »
Mme la présidente. L'amendement n° 6, présenté par M. Collin, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article.
Le second alinéa de l'article L. 1253 du code du travail est complété par les mots :
« en particulier aux opérations qui concernent le salarié d'une association ou société sportive mentionnée à l'article 11 de la loi n° 84610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, lorsqu'il est mis à la disposition de la fédération sportive délégataire concernée en qualité de membre d'une équipe de France dans des conditions définies par la convention conclue entre ladite fédération et la ligue professionnelle qu'elle a constituée, et alors qu'il conserve, pendant la période de mise à disposition, sa qualité de salarié de l'association ou de la société sportive ainsi que les droits attachés à cette qualité. »
La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Si les mises à disposition de joueurs auprès des fédérations appellent une sécurisation juridique, il n'y a aucune raison pour les qualifier d'emblée de prêt de main-d'oeuvre à but lucratif. Il appartient, le cas échéant, aux conventions conclues entre les fédérations et les représentants professionnels des clubs de régler les aspects financiers de ces opérations, ne serait-ce que pour prévenir l'éventualité de négociations au cas par cas, dont l'issue est nécessairement plus incertaine qu'un accord conclu à froid.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Humbert, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Les débats à l'Assemblée nationale ont permis d'améliorer la cohérence du dispositif, en rassemblant, dans le nouveau chapitre relatif au sport professionnel créé par l'article 1er, l'ensemble des dispositions relatives au sport professionnel qui modifient le code du travail.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Lamour, ministre. L'objet de l'article 2 de la proposition de loi, qui a été rédigé avec le concours de la direction des relations du travail, est justement d'exclure la possibilité de recourir à un prêt de main-d'oeuvre illicite à but lucratif pour ce qui concerne la mise à disposition, par la fédération, d'un joueur professionnel évoluant en équipe de France.
Cette disposition répond donc aux risques juridiques auxquels étaient confrontées les fédérations et les clubs. Il va de soi que, dans le cadre des conventions qui lient les fédérations et les ligues professionnelles, celles-ci sont libres de régler l'ensemble des aspects financiers de ces opérations.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'article 2.
Mme Annie David. L'article 2 est bien le seul de cette proposition de loi que nous voterons. En effet, il apporte une réponse à tous les sportifs du monde professionnel lorsque ceux-ci sont sélectionnés dans les équipes de France, quelles qu'elles soient. Cet article répond donc aux attentes de l'ensemble des sportifs professionnels.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Todeschini. Comme je l'ai indiqué lors de la discussion générale, le groupe socialiste votera l'article 2. Nous voterons au moins un article de la proposition de loi.
M. Charles Revet. Vous pouvez continuer, monsieur Todeschini ! (Sourires.)
M. Jean-Marc Todeschini. Nous verrons ! (Nouveaux sourires.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté à l'unanimité.)
Article 3
Le chapitre V du titre VIII du livre VII du code du travail est complété par un article L. 785-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 785-3. - Le versement prévu par l'article L. 931-20 n'est pas dû en cas de contrat à durée déterminée conclu, en application du 3° de l'article L. 122-1-1, dans le secteur d'activité du sport professionnel. »
Mme la présidente. L'amendement n° 11, présenté par MM. Todeschini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. L'article 3 constitue, à nos yeux, une rupture d'égalité entre les citoyens face aux charges publiques. Une telle disposition a déjà fait l'objet de nombreuses censures du Conseil constitutionnel.
Sur le fond, il est politiquement et socialement scandaleux d'envisager d'exonérer, dans le sport, les contrats à durée déterminée du versement de la taxe de 1 %, dont le produit permet de financer le congé de formation et le congé de bilan de compétences.
Nous ne pouvons accepter que le secteur du sport professionnel, qui véhicule, dans certains cas, beaucoup d'argent, soit exonéré du paiement de cette taxe et ne participe pas à un effort national de solidarité.
Les arguments fallacieux employés par le Gouvernement et sa majorité pour justifier cette exonération ne tiennent pas. En effet, pourquoi avancer sans cesse l'argument selon lequel les sportifs professionnels ne bénéficient pas du congé de formation ? En la matière, ils sont toujours, autant que je sache, soumis aux dispositions de droit commun.
Compte tenu de la durée extrêmement courte de leur carrière et de leur reconversion obligatoire, les bilans de compétences qui sont financés par cette même taxe constituent, pour ces professionnels, un outil particulièrement précieux.
Comment justifier le fait que les CDD de droit commun, dont les bénéficiaires sont souvent rémunérés au SMIC, continuent à acquitter cette taxe alors que les salaires mirobolants des footballeurs professionnels en seront exonérés ?
Le seul argument qui ait réellement pu faire pencher la balance en faveur de cette disposition est celui de la hauteur des salaires versés aux sportifs professionnels et de la taxe acquittée en conséquence, qui coûte très cher aux clubs de football.
Le contribuable de base, surtout s'il est employé en CDD, appréciera que le secteur du sport professionnel, qui véhicule souvent des capitaux considérables, soit ainsi exonéré de participer à la politique sociale nationale !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Humbert, rapporteur. Dans le sport professionnel, le CDD est la norme. Il est donc anormal que les clubs aient à acquitter la taxe de 1 % sur les salaires des CDD. Nous proposons, pour notre part, de les exonérer de ce versement.
A l'heure actuelle, je le rappelle, moins du quart des clubs s'acquittent de cette taxe. Le produit ne bénéficie donc que marginalement au dispositif de reconversion professionnelle des sportifs.
M. Serge Lagauche. Ce n'est pas une raison !
M. Jean-François Humbert, rapporteur. Dans mon intervention liminaire, j'ai annoncé que le moment était venu de remettre à plat les structures de formation et, peut-être, de s'inspirer de ce qui se fait en matière de football avec Eurosport Reconversion ou avec l'Agence XV pour le rugby.
Dans ces conditions, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Lamour, ministre. A l'origine, il s'agissait d'une taxe visant à dissuader les clubs de recourir aux CDD. Or, comme vient de le souligner M. le rapporteur, dans le sport, le CDD est la norme.
Par ailleurs, ce dispositif ne fonctionnait pas dans le sport professionnel. Qu'il s'agisse du rugby ou du football, les deux sports les plus concernés par les problèmes de reconversion ont mis en place une convention de reconversion et un fonds de reconversion, lequel fonctionne bien et est remarquablement alimenté.
Il faut laisser aux partenaires sociaux - et nous les suivons avec beaucoup d'attention - le soin de mettre en place ces dispositifs de reconversion, qui sont particulièrement performants.
En conséquence, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3.
(L'article 3 est adopté.)
Article additionnel après l'article 3
Mme la présidente. L'amendement n° 3 rectifié bis, présenté par MM. Mercier et J. Boyer, Mmes Dini et G. Gautier et M. Nogrix, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 11 de la loi du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives est ainsi modifié :
I - Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« - soit d'une société anonyme. »
II - Dans la première phrase du dernier alinéa, après les mots : « la société anonyme sportive professionnelle » sont insérés les mots : « ou la société anonyme »
La parole est à M. Philippe Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Cet amendement, qui a fait l'objet d'une proposition de loi déposée par Michel Mercier au mois de juin dernier, vise à modifier l'article 11 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives.
Il s'agit, en fait, de permettre aux clubs sportifs de se constituer en société anonyme de droit commun et ainsi de les autoriser à accéder au marché financier, en leur donnant la possibilité de recourir à l'appel public à l'épargne.
Cette question, je le sais, ne fait pas l'unanimité. Vous m'avez devancé, monsieur le ministre, en indiquant tout à l'heure que vous étiez contre cet amendement. Toutefois, je souhaite expliquer les raisons pour lesquelles je soutiens une telle position, car je veux, avec mon groupe, permettre aux sportifs d'avoir les moyens financiers de créer un patrimoine particulier, une mesure dont vous êtes partisan. Vous avez d'ailleurs répondu tout à l'heure à M. Mélenchon sur ce sujet.
Compte tenu des nombreux commentaires polémiques qui stigmatisent et diabolisent le recours à l'appel public à l'épargne, il n'est pas toujours évident de défendre cette position. En réalité, nous voulons adapter notre législation aux réalités, et non promouvoir une nouvelle idéologie du sport en France.
Il s'agit concrètement de donner aux clubs français la possibilité de faire face à leurs besoins de financement, d'assurer une parfaite transparence de leur fonctionnement et d'harmoniser leur statut juridique avec celui de l'ensemble de leurs concurrents européens.
En effet, les différences entre les législations nationales sont telles que cela crée un décalage avéré entre les clubs français et les autres grands clubs européens.
Par exemple, la direction nationale du contrôle de gestion, chargée d'assurer en France le contrôle juridique et financier des clubs sportifs affiliés, peut décider de rétrograder un club de football en division inférieure dès lors qu'il se trouve dans une situation financière difficile.
A l'inverse, les clubs italiens ou espagnols bénéficient de la plus grande mansuétude de la part de leurs fédérations respectives quand le gouvernement n'intervient pas directement pour couvrir une partie des dettes des clubs, comme ce fut le cas en Italie.
Par ailleurs, la pression fiscale sur les clubs français est une des plus lourdes d'Europe. Ainsi, selon une étude publiée en décembre 2001, pour un salaire net équivalent, un joueur français coûte à un club 243 786 euros en charges sociales, un joueur anglais 45 547 euros, un joueur italien 24 168 euros, un joueur allemand 13 666 euros et un joueur espagnol 12 337 euros.
La France cultive ce paradoxe de former les meilleurs joueurs du monde et d'être la plus grande exportatrice de ces mêmes joueurs. Nous sommes dans l'incapacité de garder l'élite de nos footballeurs au sein de l'Hexagone.
Les clubs professionnels ont aujourd'hui atteint un niveau qui permet de les considérer non plus uniquement comme des créateurs de divertissement, mais comme de véritables entreprises qui doivent vivre dans un contexte de concurrence vive et dure. Nous devons donc leur permettre de faire jeu égal avec les autres clubs européens dans ce contexte de compétition commerciale.
Mme Annie David. Compétition sportive ou commerciale ?
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
M. Jean-François Humbert, rapporteur. Nous proposons de donner aux clubs professionnels la possibilité de se transformer en société anonyme et d'être ainsi soumis au régime de droit commun.
Le présent amendement a pour objet de leur permettre notamment de faire appel public à l'épargne et, le cas échéant, d'être cotés en bourse. Il s'agit d'une demande récurrente émanant de quelques grands clubs de football, dont l'Olympique lyonnais.
Cette question ne fait pas l'unanimité, loin de là, au sein du football professionnel.
M. Philippe Nogrix. Et alors ?
M. Jean-François Humbert, rapporteur. Il s'agit d'une question qui exige une étude de fond. Le Parlement doit donc se donner le temps de la réflexion sur ce sujet complexe et controversé, qui pourrait avoir des conséquences graves aussi bien pour les épargnants que pour ce sport
En conséquence, comme cela avait été fait au mois d'août 2003, je demande le retrait de l'amendement. A défaut, la commission émettrait un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Lamour, ministre. C'est une constance lyonnaise qui anime ces dépôts successifs de propositions pour permettre l'entrée en bourse des clubs. Vous connaissez ma position ; elle n'a pas évolué depuis quelques mois. Je pense que ce problème est secondaire. Vous avez cité l'Italie. Les clubs italiens cotés en bourse, c'est une catastrophe ! Il a fallu un décret et une loi du gouvernement italien pour essayer de sortir le championnat d'un marasme terrible alors que les clubs avaient fait appel à l'épargne publique.
Ce que nous faisons aujourd'hui permet de combler le déficit que vous rappeliez, en particulier concernant les charges sociales et l'imposition « lourde », c'est-à-dire l'imposition des activités économiques. Je pense que l'entrée en bourse n'est pas en adéquation avec l'idée que je me fais de l'activité sportive, malgré un environnement économique qui est de plus en plus présent et dont il faut tenir compte. La proposition de loi le fait avec beaucoup d'équilibre.
J'étais il y a quelques jours au Canada pour une réunion du conseil exécutif de l'Agence mondiale antidopage et j'ai appris que le club de baseball de Montréal avait été vendu à Washington. Cela est inacceptable ! Le jour où des actionnaires pourront vendre un club d'une ville à une autre, c'est que quelque chose n'ira pas dans le sport européen. Je crains que l'entrée en bourse des clubs ne permette un jour ce type de déplacement d'un club d'une ville à une autre. Vous en conviendrez, ce n'est pas dans notre culture.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Yvon Collin, pour explication de vote.
M. Yvon Collin. L'amendement a un but : permettre aux clubs sportifs d'accéder à l'épargne publique. Je vous indique que le rapport de la délégation du Sénat pour la planification ne formule pas de réserves de principe face à cette éventualité. Cependant, des précautions doivent être prises et il serait très utile de mettre en place un groupe de réflexion sur ce sujet. Je ne voterai pas l'amendement, mais il pose un vrai problème, qu'il faut, comme toujours, aborder sans parti pris idéologique.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour explication de vote.
M. Philippe Nogrix. Je ne retirerai pas l'amendement pour trois raisons.
Premier paradoxe : tout à l'heure, un intervenant a dit qu'il était honteux de parler d'une proposition de loi déposée par un sénateur et de la nommer du nom d'une personne extérieure ; en l'occurrence, je défends un amendement au nom du groupe centriste et on me dit que c'est un amendement de l'Olympique lyonnais. Aussi, je ne comprends pas très bien !
Second paradoxe : nous sommes dans un pays où l'on incite et où l'on invite tous les Français à faire des investissements en bourse ; on dit que l'économie française a besoin de l'épargne ; et parce qu'il s'agit de sport, on ne pourrait pas faire appel à l'épargne ? C'est un peu gênant !
Enfin, monsieur le rapporteur, vous nous dites qu'il faut créer un groupe de travail. Je vous ai rappelé que M. Mercier avait déposé sa proposition au mois de juin dernier. Depuis le mois de juin, il y avait de quoi faire un groupe de travail. Pourquoi ne s'est-il pas réuni ? Nous allons de groupe de travail éventuel en groupe de travail éventuel. Je finis par croire que c'est un groupe de travail virtuel que vous voulez créer.
Je maintiens donc mon amendement.
M. Charles Revet. Je constate que seul M. Nogrix a voté en faveur de cet amendement.
M. Philippe Nogrix. « Et s'il n'en reste qu'un, je serai celui-là ! » (Sourires.)
Article 4
Le premier alinéa de l'article 15-1 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives est ainsi rédigé :
« Il est interdit à une même personne privée de détenir le contrôle, au sens de l'article L. 233-16 du code de commerce, de plus d'une société constituée conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 11 et dont l'objet social porte sur une même discipline sportive. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 7 est présenté par M. Collin.
L'amendement n° 12 est présenté par MM. Todeschini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Yvon Collin, pour présenter l'amendement n° 7.
M. Yvon Collin. Des motifs liés à l'équité sportive s'opposent à l'adoption d'un article qui témoigne d'une grande négligence à l'égard de l'exception sportive.
La Commission européenne, en réclamant que la France s'ouvre la faculté de multipropriété, illustre particulièrement sa méconnaissance de l'exception sportive. Elle a l'habitude de rendre des arbitrages où celle-ci est sacrifiée. Elle s'inspire sans doute de la Cour de justice des communautés européennes dont le funeste arrêt Bosman ne cesse de faire sentir ses piteux effets. Alors que le projet de constitution européenne ouvre à l'Union européenne une compétence dans le domaine du sport, on doit s'inquiéter de l'absence de culture sportive dont témoigne la Commission.
On en vient à se féliciter que le projet de constitution prive l'Union européenne de toute capacité en lui interdisant les pouvoirs supranationaux dont elle dispose dans d'autres domaines.
Il faudra pourtant bien créer une institution européenne capable d'assurer une régulation efficace du football. Nous avons proposé l'instauration d'une organisation interétatique, Eurofoot, capable d'assurer cette mission au service d'un football plus équilibré économiquement et mieux protégé contre la banalisation. Nous attendons toujours le début d'une réaction du Gouvernement. En attendant, il faut supprimer cet article pour préserver l'équité sportive.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour présenter l'amendement n° 12.
M. Jean-Marc Todeschini. Cet article remet en cause notre conception même du sport.
Il assouplit un article fondamental de la loi de 1984, l'article 15-1, qui est interdit à toute personne privée, directement ou indirectement, d'être porteur de titres donnant accès au capital ou conférant un droit de vote dans plus d'une société sportive d'une même discipline.
Désormais seul « le contrôle de plus d'une société » reste interdit ; en revanche, une même personne pourra détenir des droits de vote ou des parts de capital dans autant de sociétés sportives qu'elle le souhaitera, à condition de ne pas être actionnaire majoritaire dans plus de l'une d'entre elles.
La détention de tant d'intérêts croisés dans les mains d'une seule personne ne contribuera pas à assainir le secteur du sport de haut niveau. On imagine d'ores et déjà les pressions -voire les versements - qui seront réalisées auprès d'une équipe ou d'un joueur, lors des compétitions mettant en présence deux équipes au capital desquelles sera partie une même personne.
Il est tout de même incroyable que la ligue de football ait obtenu gain de cause sur ce point à Bruxelles et que la France doive, à ce titre, adapter sa législation. Mais était-ce vraiment à une proposition de loi, donc à un texte d'origine parlementaire, de traduire en droit interne les invectives de la Commission européenne ?
Je suis très inquiet que l'idée selon laquelle le sport constitue une activité purement économique se répande dans tous les esprits, et notamment au niveau européen. Les conséquences juridiques et économiques qui en découlent ne sont pas anodines et éloignent toujours davantage le sport professionnel du sport de masse, pourtant pilier fondateur de ce secteur.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Humbert, rapporteur. Avis défavorable sur les deux amendements car nous considérons que le texte proposé assouplit cette interdiction. Le point important et essentiel est qu'un même actionnaire ne puisse pas détenir le contrôle économique. Il s'agit d'un garde-fou contre d'éventuelles manoeuvres pouvant influencer le comportement d'une équipe lors d'une compétition.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Lamour, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les deux amendements.
J'ai demandé le renforcement des moyens de contrôle au travers de l'article L. 233-16 du code de commerce pour éviter tout problème d'ingérence dans l'activité du club de la part de ses actionnaires minoritaires.
Nous avons un contentieux très lourd à Bruxelles, qui a aussi nécessité cette évolution.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Je ne reviendrai pas sur la loi de 1984, ni sur le passage de Marie-George Buffet au ministère de la jeunesse et des sports, que M. Jean-François Lamour n'apprécie pas puisqu'il ne cesse de dire qu'elle n'a fait que des mauvaises choses lorsqu'elle était ministre. Il n'en demeure pas moins que Marie-George Buffet a toute mon amitié et toute mon estime.
Nous voterons la suppression de l'article 4, car il s'agit d'éthique sportive. Il nous semble inconcevable que l'on puisse être multipropriétaire dans des sociétés sportives concernant la même discipline.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 7 et 12.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
Après le cinquième alinéa (3°) du I de l'article 16 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4° Les sociétés sportives mentionnées à l'article 11. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 8 est présenté par M. Collin.
L'amendement n° 13 est présenté par MM. Todeschini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Yvon Collin, pour défendre l'amendement n° 8.
M. Yvon Collin. Il me semble anormal de permettre l'adhésion, comme membres de plein droit, de sociétés à objet purement commercial à des personnes morales sans but lucratif en charge de la mission de service public administratif de développement du sport.
Par ailleurs, je m'interroge sur les motivations de cet article, qui me semble apporter une réelle confusion. Je demande donc sa suppression.
Mme la présidente. La parole est à M. Serge Lagauche, pour présenter l'amendement n° 13.
M. Serge Lagauche. Cette disposition est très révélatrice de l'esprit qui a guidé les rédacteurs de la proposition de loi : la logique commerciale, au lieu de la logique associative qui doit prévaloir dans la réglementation des activités physiques et sportives.
La loi du 1er août 2003 a déjà remis en cause la place centrale préalablement octroyée aux licenciés dans la vie des fédérations.
La modification proposée par cet article - que nous souhaitons supprimer - va permettre aux sociétés, en qualité d'adhérent, de participer au fonctionnement des fédérations conformément aux usages commerciaux alors que la loi leur ouvre déjà cette possibilité de façon contractuelle.
Elle porte un coup supplémentaire à la gestion associative des fédérations voulue par la loi du 6 juillet 2000, qui seront de plus en plus régies par des intérêts commerciaux.
Je crains que d'ici peu, de fait, ce ne soit la ligue de football professionnel qui régisse la fédération française de football, au détriment des licenciés pratiquants des petits clubs.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Humbert, rapporteur. Avis défavorable, car la réintégration des sociétés sportives au sein des fédérations ne fait que consacrer la reconnaissance d'une situation de fait. En dépit de leur éviction par la loi de juillet 2000, les sociétés sportives ont, en réalité, toujours participé aux instances représentatives des fédérations dont elles dépendent. Ces amendements n'ont donc pas lieu d'être.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Lamour, ministre. Ces dispositions, qui figuraient dans la loi de 1984, ont été supprimées, pour des raisons idéologiques, dans la loi de 2000.
Il me paraît logique et normal que des sociétés sportives puissent participer à la gestion des fédérations. Le sport moderne le veut ainsi ! Il s'agit, non pas d'une « prise de pouvoir », comme certains l'ont prétendu, mais d'une vraie participation, d'une véritable capacité de développement, à l'exemple du ski, du golf et, bientôt je l'espère, de l'équitation.
L'environnement économique est tel que, logiquement, les sociétés sportives participent à la vie fédérale.
Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 et 13.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 5.
(L'article 5 est adopté.)
Article additionnel après l'article 5
Mme la présidente. L'amendement n° 14, présenté par MM. Todeschini, Lagauche, Charasse, Guérini, Mélenchon, Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est institué une commission comprenant des représentants du gouvernement, du parlement et du mouvement sportif.
Cette commission est chargée d'étudier la question des salaires élevés octroyés aux personnes qui effectuent une carrière professionnelle courte.
Avant fin juin 2005, un rapport rendu public par cette commission, émet des propositions en matière de traitement fiscal et social de ces personnes, ne portant pas atteinte au principe d'égalité.
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Le texte de cet amendement est explicite : nous souhaitons qu'une commission étudie, une fois pour toutes, la question des sportifs ayant une carrière professionnelle courte, qui bénéficient néanmoins souvent, en guise de compensation de cette durée limitée, de salaires importants. Ce type de carrière est, d'ailleurs, vécu non seulement par les sportifs, mais aussi par certains artistes.
Il est toujours très délicat de procéder à des mesures d'allégement fiscal, qui sont sources d'injustice et de disparité de traitement, et, à ce titre, - nous l'avons répété au cours du débat - susceptibles d'être entachées d'inconstitutionnalité.
Au lieu de légiférer au coup par coup, dans la précipitation, mieux vaudrait qu'un groupe d'experts réfléchisse tranquillement à la question et propose les solutions les meilleures au regard du droit et de la justice sociale et fiscale.
Par cet amendement, nous proposons donc d'instaurer, pour un délai finalement très court, six mois, une commission associant représentants du Gouvernement, du Parlement et, bien sûr, du milieu sportif, afin qu'ils travaillent sur ce sujet et proposent, dans un rapport public, des solutions approuvées par tous, et donc équitables.
En réponse aux propos de M. le ministre relatifs à Mme Marie-George Buffet et aux remises en cause que ne manque pas de faire chaque nouveau ministre des sports, je souhaite préciser que le budget de la jeunesse et des sports a augmenté de 3,4 % en 1999, de 3,5 % en 2000, de 3,8 % en 2001 et de 3,1 % en 2002. Ces taux d'augmentation intéressants sont à mettre en regard des augmentations de 1,3 % en 2003 et 1,9 % en 2004, et de la diminution de 3 % hors inflation en 2005.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Humbert, rapporteur. Ainsi que j'ai eu l'occasion de le préciser lorsque la commission a examiné les amendements, pendant la suspension de séance, un tel groupe de travail a déjà été constitué dans le cadre des états généraux du sport. Il a réuni des élus, des représentants des services déconcentrés de l'Etat et du monde sportif, sous la présidence du sportif Richard Dacoury - quel sportif ! -, et a beaucoup réfléchi à la place du sport professionnel en France. Les conclusions qu'il a remises ont largement inspiré les rédacteurs de la présente proposition de loi.
Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Lamour, ministre. Il n'est nul besoin d'une proposition de loi pour instituer une commission qui existe déjà.
Les groupes de travail ont étudié les domaines évoqués dans cette proposition de loi. Nous allons poursuivre la réflexion engagée, en particulier sur l'épargne salariale. Les parlementaires continueront, bien sûr, d'être associés à ces travaux. Vous faisiez sans doute allusion, monsieur le sénateur, à cette possibilité qu'ont les joueurs professionnels d'épargner pendant leur temps d'activité.
Quant aux augmentations du budget de la jeunesse et des sports, vérifiez vos sources, vous constaterez que ce sont les crédits consacrés à la jeunesse qui ont augmenté, et non ceux qui concernent le sport !
Mme la présidente. La parole est à M. Yvon Collin, pour explication de vote.
M. Yvon Collin. Je suis favorable à cet amendement.
Les sportifs professionnels ont une carrière courte. Des dispositifs susceptibles de leur permettre d'étaler leurs impositions existent déjà, mais ils pourraient sans doute être améliorés. Je pressens que le Sénat y serait favorable, dès lors que les principes essentiels seraient sauvegardés.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Todeschini. Selon M. le rapporteur, une commission a déjà travaillé sur l'amendement concernant l'Olympique lyonnais.
La création de la commission que nous, nous proposions remet tout simplement en cause cette proposition de loi, qui s'adresse directement aux footballeurs professionnels.
Nous comprenons et ne nions pas les problèmes de compétitivité, de concurrence que rencontrent les clubs professionnels de football français, mais ce que nous souhaitions, c'est que cette commission, composée de parlementaires, de représentants de l'Etat et de représentants des clubs, travaille sérieusement et soumette au Gouvernement une proposition respectant le principe d'égalité et qui puisse être acceptée par tous les acteurs concernés et par tous les groupes politiques.
Nous voulions rester dans la règle et dans la normalité, et ne pas nous attacher à des cas particuliers, sinon les chercheurs, tous ceux qui, mécontents de leur sort, sont obligés de s'expatrier pour travailler ou pour être payés d'une façon à peu près décente, demanderont à bénéficier, eux aussi, de niches fiscales. Si nous ne parvenons pas à un consensus au sujet du sport professionnel, vous aurez ouvert aujourd'hui la boîte de Pandore.