Il est inséré, avant le chapitre Ier du titre III du livre IX du code du travail, un article L. 930-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 930-1. - L'accès des salariés à des actions de formation professionnelle continue est assuré :
« 1° A l'initiative de l'employeur dans le cadre du plan de formation mentionné à l'article L. 951-1 ;
« 2° A l'initiative du salarié dans le cadre du congé de formation défini à l'article L. 931-1 ;
« 3° A l'initiative du salarié avec l'accord de son employeur dans le cadre du droit individuel à la formation prévu à l'article L. 933-1. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 4, présenté par Mme Bocandé, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Au début du texte proposé par cet article pour l'article L. 930-1 du code du travail, ajouter un alinéa ainsi rédigé :
« L'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences. »
Le sous-amendement n° 193, présenté par M. Souvet, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par l'amendement n° 4 par une phrase ainsi rédigée :
« En ce qui concerne les salariés temporaires des entreprises de travail temporaire, l'adaptation au poste de travail s'entend de l'adaptation à un emploi. »
L'amendement n° 83, présenté par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Au début du texte proposé par cet article pour l'article L. 930-1 du code du travail, ajouter un alinéa ainsi rédigé :
« L'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail. Il doit veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences. »
L'amendement n° 225, présenté par Mme David, M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Au début du texte proposé par cet article pour l'article L. 930-1 du code du travail, ajouter un alinéa ainsi rédigé :
« L'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation des salariés à l'évolution de leur poste de travail. Il doit veiller au maintien de la capacité des salariés à occuper un emploi au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences des salariés. »
La parole est à Mme Annick Bocandé, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 4.
Mme Annick Bocandé, rapporteur. L'Assemblée nationale a décidé de supprimer l'obligation de formation des salariés par l'employeur au motif que, certaines actions de formation pouvant se dérouler en dehors du temps de travail, la formation relèverait désormais de la responsabilité exclusive du salarié.
Or les partenaires sociaux n'ont jamais souhaité la suppression de ce principe, comme en témoigne la lettre paritaire qu'ils ont adressée à M. le ministre le 13 janvier dernier. L'envoi d'une lettre commune par les cinq organisations syndicales est extrêmement rare. Cela prouve que cette question revêt pour eux une importance capitale. D'ailleurs, les organisations patronales entendues par notre commission lors de la table ronde qu'elle a organisée le 22 janvier dernier n'ont pas contesté le bien-fondé de la revendication syndicale.
En effet, les partenaires sociaux ont souhaité redéfinir les actions de formation qui composent le plan de formation autour d'une typologie ternaire : les actions d'adaptation au poste de travail, les actions de formation liées à l'évolution des emplois et participant au maintien dans l'emploi, et les actions de formation ayant pour objet le développement des compétences des salariés.
Cette nouvelle typologie remet-elle en cause l'obligation de formation de l'employeur à l'égard de ses salariés ? Avec l'extension du plan de formation à des actions se déroulant hors du temps de travail, l'Assemblée nationale, répondant positivement à cette question, a supprimé ce principe au motif que l'obligation ne peut s'appliquer à des formations se déroulant en dehors du temps de travail.
Monsieur le ministre, lors de l'adoption de cet amendement de suppression à l'Assemblée nationale, vous aviez tenu à préciser qu'il ne remettait nullement en cause les obligations de l'employeur en matière de formation, celui-ci ayant l'obligation d'assurer l'adaptation de ses salariés à l'évolution de leurs emplois.
Notre commission ne peut pas défendre la suppression de l'obligation de formation, et ce pour deux raisons : d'une part, cette suppression n'est pas conforme à l'esprit de l'ANI et en déséquilibre gravement l'économie ; d'autre part, elle est lourde de conséquences en ce qui concerne la responsabilité de l'employeur dans la formation de ses salariés.
Issue de la jurisprudence « Expovit », en date de 1992, l'obligation de formation est un principe fondamental de notre droit du travail selon lequel, en contrepartie de l'engagement du salarié à travailler pour l'employeur, celui-ci doit, à son tour, proposer régulièrement au salarié une adaptation de ses qualifications au poste de travail occupé par des formations réalisées dans le temps de travail effectif.
Or, à aucun moment, ni les organisations de salariés ni les organisations patronales n'ont souhaité remettre en question une telle obligation. C'est la raison pour laquelle nous proposons le rétablissement de l'obligation de formation des salariés par l'entreprise tout en adaptant cette obligation à la nouvelle typologie des actions qui forment le plan de formation.
Je précise bien, pour lever toute ambiguïté sur cette question, que l'obligation de formation ne porte que sur l'adaptation au poste de travail, étant entendu que cette obligation n'est pas requise pour les autres types de formation, à savoir les actions liées à l'évolution des emplois, celles qui participent au maintien dans l'emploi et celles qui ont pour objet le développement des compétences. C'est une solution intermédiaire qui satisfera, me semble-t-il, les partenaires sociaux.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. Le sous-amendement n° 193 n'est pas défendu.
La parole est à M. Gilbert Chabroux, pour défendre l'amendement n° 83.
M. Gilbert Chabroux. Nous rejoignons la position de la commission, en présentant un amendement pratiquement identique au sien. Nous demandons le rétablissement d'une formule qui figurait à peu de choses près dans le code du travail et qui avait été reprise dans le texte initial du projet de loi.
Malheureusement, à la suite de l'adoption d'un amendement tout à fait regrettable, cette disposition a disparu du texte qui nous a été transmis, à la suite d'un malentendu, avez-vous dit, monsieur le ministre. Notre rapporteur nous en propose maintenant le rétablissement, même si nous aurions préféré que ce soit à l'article 10, ce qui prouve que ce n'est pas un débat entre la droite et la gauche. Nous sommes en fait au coeur des enjeux de la formation professionnelle pour le salarié.
Il n'est en effet pas possible que le chef d'entreprise s'exonère de sa responsabilité d'assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail, ni de son obligation de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi au regard des diverses évolutions, notamment en matière de technologies et d'organisation du travail.
Nous avons été particulièrement alertés par certains arguments qui ont été développés à l'Assemblée nationale sur ces thèmes. La formation - il est important d'être clair sur ce point - devrait être reconnue comme étant un droit pour le salarié. Il est ainsi écrit à plusieurs reprises dans le code du travail que « le refus du salarié de participer à des actions de formation ne constitue ni une faute ni un motif de licenciement. »
Tout semblerait donc clair. Néanmoins, la suppression de la mention de l'obligation de l'employeur décidée à l'Assemblée nationale conduit tout naturellement à se demander qui sera désormais obligé de faire quelque chose.
Sans citer le nom de notre collègue député UMP qui s'est exprimé ainsi, et sans vouloir insister plus qu'il ne faut, je veux reprendre certains de ses propos que j'ai pu lire à la page 12320 du Journal officiel : « Si, aujourd'hui, le devoir de formation est impérieux, il s'impose à la fois à l'entreprise et au salarié. L'entreprise a le devoir de former, le salarié le devoir de se former de façon à toujours trouver sa place sur le marché du travail. » Ce même collègue a également prononcé cette phrase que ne renieraient ni Alfred Jarry ni M. de Virville : « Aujourd'hui, le meilleur moyen pour un salarié de conserver un emploi, c'est de pouvoir en changer. »
Au total, si le salarié n'a pas trouvé sa place sur le marché du travail, c'est qu'il ne s'en est pas donné tous les moyens. Nous savions déjà que les chômeurs étaient responsables de leur sort, qu'ils ne cherchaient pas vraiment un travail, et qu'ils profitaient honteusement du système. Sans doute pour les encourager à retrouver du travail, le Gouvernement a pris les mesures qui s'imposaient pour priver plusieurs centaines de milliers d'entre eux de leurs allocations.
Désormais, nous savons que, s'ils sont chômeurs, c'est aussi parce qu'ils n'ont pas accompli en temps et en heure tous les efforts pour se former. S'ils sont chômeurs, ce serait donc doublement de leur faute, à cause d'une incurie de longue date, et cela, bien sûr, alors que le marché des offres d'emploi est pléthorique, comme chacun d'entre nous peut le constater avec les plans sociaux qui se succèdent dans nos régions.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. N'en faites pas trop, monsieur Chabroux !
M. Gilbert Chabroux. Ecoutez, il faut bien que je donne quelques arguments !
Après tout, nous n'avons eu en 2003 que 137 900 chômeurs de plus, et 431 500 jeunes âgés de moins de 25 ans sont recensés au chômage. M. le ministre a parlé des deux bouts de la chaîne, les jeunes et les chômeurs de longue durée. Or je rappelle que les chômeurs de catégories 1 et 6 sont maintenant au nombre de 2 870 000.
Il est temps d'arrêter cette folle dérive, non seulement celle du chômage, bien sûr, mais aussi et surtout celle qui traduit la volonté de faire peser sur les salariés et sur les chômeurs la responsabilité de la situation, comme si c'étaient eux qui prenaient l'initiative de fermer les entreprises. Les salariés ne sont pas responsables des délocalisations. Ils sont plutôt les victimes collatérales de la misère qui règne sur les autres continents et qui est honteusement exploitée.
Si la formation est une obligation, c'est d'abord une obligation pour l'Etat et la région qui aura désormais une compétence pleine, et c'est une obligation de moyens. Je ne reviens pas sur les questions de désengagement budgétaire de l'Etat et d'inégalités entre régions. C'est aussi, comme la loi doit le préciser, une obligation pour l'employeur dans son entreprise.
M. François Fillon, ministre. Cela n'a rien à voir avec l'article !
M. Gilbert Chabroux. Pour le salarié, c'est un droit reconnu par la loi depuis 1971, renforcé par ce projet de loi, et il ne doit y avoir aucune ambiguïté sur ce point.
Nous soutiendrons donc l'amendement de Mme Bocandé, mais nous avons souhaité présenter également le nôtre.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 225.
Mme Annie David. Cet amendement est quasiment identique à ceux qui ont été présentés par Mme le rapporteur et par M. Chabroux. Je ne puis donc que reprendre à mon compte les différentes argumentations que je viens d'entendre, notamment celle de M. Chabroux, que je partage complètement.
L'amendement n° 225 vise à rendre conforme le projet de loi à l'ANI qui a été signé le 20 septembre dernier, et donc à définir le périmètre des obligations pesant sur l'employeur en matière de formation.
En soumettant cet amendement à votre vote, je veux attirer votre attention, mes chers collègues, sur le rôle et la responsabilité de l'employeur, lequel a le pouvoir de freiner l'accès au droit affirmé du salarié à la formation professionnelle tout au long de la vie. L'initiative de l'employeur, dans la constitution d'un environnement formateur, est fondamentale. En effet, 58 % des salariés ayant reçu une ou plusieurs formations entre janvier 1999 et mars 2000 indiquent que leur initiative n'a pas été impulsée ou encouragée par leur employeur.
Or le contexte professionnel devrait avoir une influence pertinente sur l'initiative individuelle. Un plan de formation dans l'entreprise est une expérience cruciale pour ceux qui n'ont jamais eu de formation continue. Pouvoir consulter sur ce sujet au sein de l'entreprise est important pour entamer les démarches d'un vrai projet de carrière.
Toutefois, l'employeur doit intégrer cette simple logique économique selon laquelle une vraie modernisation de l'organisation du travail et une véritable gestion du personnel par rapport au poste occupé et à la productivité tiennent non pas aux seuls investissements matériels, mais bien dans la capacité de mutualiser des connaissances, des savoir-faire et des intelligences humaines de façon stable, mais exponentielle, dans son entreprise.
Comme vous l'avez souligné tout à l'heure, monsieur le ministre, il faut que les entreprises puissent compter sur les femmes et sur les hommes qui y travaillent pour pouvoir obtenir la plus grande rentabilité possible.
Aussi préférons-nous inscrire dans le texte l'obligation de l'employeur d'assurer au salarié le droit d'accéder aux différents types de formations.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Annick Bocandé, rapporteur. La commission demande aux auteurs des amendements n°s 83 et 225 de bien vouloir les retirer, puisque ces derniers sont satisfaits par l'amendement n° 4 de la commission.
S'agissant de l'amendement n° 226, je rappellerai à Mme David que celui-ci n'est absolument pas conforme à l'ANI ni au projet de loi, puisque son article 8 dispose très clairement que l'accord de l'employeur est nécessaire pour le choix de l'action de formation dont le salarié a l'initiative.
Ce dispositif correspond à la procédure de codécision sur laquelle les partenaires sociaux se sont entendus, alors qu'il s'agissait sans doute là de l'un des points les plus discutés de la négociation. Le remettre en cause reviendrait à perturber toute l'architecture de l'ANI.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Je veux tout de suite dire, avant de développer mes arguments, que le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 4 présenté par Mme Bocandé.
Cela étant dit, monsieur Chabroux, autour de cet amendement, vous vous êtes livré à une sorte de procès d'intention qui n'a rien à voir avec la réalité des faits. (M. Gilbert Chabroux s'exclame.) Lors du débat à l'Assemblée nationale, nous avons rencontré un problème de rédaction juridique. Il était impossible de maintenir la rédaction initiale du code du travail, compte tenu de l'accord signé par les partenaires sociaux. La rédaction proposée par l'Assemblée nationale ne remettait pas en cause - comme Mme le rapporteur a bien voulu le rappeler, je l'avais indiqué expressément à l'Assemblée nationale - cette obligation d'adaptation des salariés.
L'arrêt « Expovit », rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation le 25 février 1992, prévoit que l'employeur, tenu d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, a le devoir d'assurer l'adaptation des salariés. L'obligation pour l'employeur d'assurer l'adaptation de ses salariés à l'évolution de leurs emplois, qui figurait à l'article L. 932-2 du code du travail, ne correspondait plus à la nouvelle typologie d'actions de formation définie par l'accord et reprise dans le projet de loi.
Par l'amendement n° 4, Mme le rapporteur nous propose une rédaction satisfaisante, qui explicite utilement la responsabilité de l'employeur au regard des nouvelles catégories d'actions de formation et permet de lever ce que j'ai appelé un malentendu, car il s'agit bien d'un problème de rédaction juridique et en aucun cas d'une volonté de l'Assemblée nationale de mettre un terme à cette obligation.
Je rappelle d'ailleurs, pour la petite histoire, que plusieurs députés du groupe communiste ont voté cet amendement en toute bonne foi lorsqu'il a été présenté à l'Assemblée nationale.
En outre, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 226. En effet, le droit individuel à la formation est un dispositif de formation concerté entre l'employeur et le salarié. Or ce qui est proposé dans cet amendement n'est absolument pas conforme à l'accord des partenaires sociaux, et il existe d'ailleurs d'autres dispositifs.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 83 et 225 n'ont plus d'objet.
L'amendement n° 226, présenté par Mme David, M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le dernier alinéa (3°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 930-1 du code du travail, supprimer les mots : "avec l'accord de son employeur". »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Bien que M. le ministre ait indiqué à l'instant que l'objet de cet amendement n'était pas conforme à l'ANI, je vais malgré tout le défendre !
En effet, préciser dans le dernier alinéa (3°) de l'article 7 que le droit individuel à la formation est soumis à l'accord de l'employeur me paraît redondant avec les dispositions de l'article L. 933-3 du code du travail. Ajouter cette précision dans le corps de l'article me semble également réducteur. Il s'agit, sinon d'une entrave, du moins d'une pression supplémentaire sur le salarié pour qu'il renonce à faire valoir son DIF.
Je ne souhaite pas remettre en cause le fait que le DIF soit soumis à l'accord de l'employeur. Mais le texte proposé à l'article 8 pour l'article L. 933-3 du code du travail est très clair : « La mise en oeuvre du droit individuel à la formation relève de l'initiative du salarié, en accord avec son employeur. » Il est donc inutile d'en faire mention à l'article 7 du projet de loi.
M. le président. La commission s'est déja exprimée sur cet amendement.
La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre. Je reprends mon argumentation malgré les explications de Mme David, car la rédaction de l'article 7 est due à une raison essentielle. Cet article décrit la typologie des actions de formation : celles qui sont à l'initiative de l'employeur, celles qui sont à l'initiative du salarié et celles qui sont à l'initiative du salarié et de l'employeur. Supprimer simplement la mention « avec l'accord de l'employeur » au 3° viderait l'article 7 de tout son sens. L'une des innovations de ce projet de loi consiste précisément à proposer trois sortes de formations différentes, avec les conséquences que cela peut avoir sur le temps pendant lequel ces formations peuvent avoir lieu.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Monsieur le ministre, j'ai bien entendu votre réponse. Effectivement, l'article 7 prévoit différentes initiatives permettant l'accès à des actions de formation professionnelle. Mais si vous prévoyez l'accord de l'employeur dans le 3° de l'article 7, il faudrait également le mentionner dans le 2° du même article, qui concerne le CIF. En effet, pour pouvoir partir en formation dans le cadre d'un CIF, le salarié doit obtenir l'accord de son employeur. S'il quitte l'entreprise sans l'accord de son employeur, c'est une faute grave et une cause de licenciement très fréquente. Du reste, cela fait très souvent l'objet de recours devant le conseil des prudhommes.
Il n'y a pas de raison que l'accord de l'employeur soit nécessaire pour le DIF et pas pour le CIF.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre. Madame David, votre explication sur le CIF n'est pas exacte. Le CIF est une formation à l'initiative du salarié. L'employeur a la possibilité de différer le CIF, mais en aucun cas la décision de suivre une formation dans le cadre du CIF ne nécessite une autorisation de l'employeur. Il s'agit de l'article L. 931-6 du code du travail, dont je vous donne lecture : « Le bénéfice du congé demandé est de droit, sauf dans le cas où l'employeur estime, après avis du comité d'entreprise ou, s'il n'en existe pas, des délégués du personnel, que cette absence pourrait avoir des conséquences préjudiciables à la production et à la marche de l'entreprise. En cas de différend, l'inspecteur du travail contrôlant l'entreprise peut être saisi par l'une des parties et peut être pris pour arbitre. »
Ce n'est pas du tout le cas du DIF, qui, lui, est bien lié à un accord préalable du chef d'entreprise.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 226.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Chapitre II
Le droit individuel à la formation
I. - L'article L. 932-3 du code du travail est abrogé.
II. - Les chapitres III et IV du titre III du livre IX du même code deviennent respectivement les chapitres IV et V et les articles L. 933-1, L. 933-2, L. 933-2-1, L. 933-3, L. 933-4, L. 933-6 et L. 934-1 deviennent respectivement les articles L. 934-1, L. 934-2, L. 934-3, L. 934-4, L. 934-5, L. 934-6 et L. 935-1.
III. - Le chapitre III du titre III du livre IX du même code est ainsi rétabli.
« Chapitre III
« Du droit individuel à la formation
« Art. L. 933-1. - Tout salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, à l'exclusion des contrats prévus au chapitre Ier du titre VIII du présent livre, disposant d'une ancienneté d'au moins un an dans l'entreprise qui l'emploie, bénéficie chaque année d'un droit individuel à la formation d'une durée de vingt heures, sauf dispositions d'une convention ou d'un accord collectif interprofessionnel, de branche ou d'entreprise prévoyant une durée supérieure. Pour les salariés à temps partiel, cette durée est calculée pro rata temporis.
« Art. L. 933-2. - Une convention ou un accord collectif de branche ou d'entreprise peut prévoir des modalités particulières de mise en oeuvre du droit individuel à la formation, sous réserve que le cumul des droits ouverts soit au moins égal à une durée de cent vingt heures sur six ans ou, pour les salariés à temps partiel, au montant cumulé des heures calculées chaque année conformément aux dispositions de l'article L. 933-1, dans la limite de cent vingt heures. Les droits acquis annuellement peuvent être cumulés sur une durée de six ans. Au terme de cette durée et à défaut de son utilisation en tout ou partie, le droit individuel à la formation reste plafonné à cent vingt heures. Ce plafond s'applique également aux salariés à temps partiel, quel que soit le nombre d'années cumulées, sur la base des droits annuels acquis pro rata temporis. Chaque salarié est informé par écrit annuellement du total des droits acquis au titre du dispositif du droit individuel à la formation.
« Une convention ou un accord collectif de branche ou d'entreprise peut définir des priorités pour les actions de formation mises en oeuvre dans le cadre du droit individuel à la formation. A défaut d'un tel accord, les actions de formation permettant l'exercice du droit individuel à la formation sont les actions de promotion ou d'acquisition, d'entretien ou de perfectionnement des connaissances mentionnées à l'article L. 900-2 ou les actions de qualification prévues à l'article L. 900-3.
« Art. L. 933-3. - La mise en oeuvre du droit individuel à la formation relève de l'initiative du salarié, en accord avec son employeur. Le choix de l'action de formation envisagée est arrêté par accord écrit du salarié et de l'employeur.
« Une convention ou un accord collectif de branche ou d'entreprise peut prévoir que le droit individuel à la formation s'exerce en partie pendant le temps de travail. A défaut d'un tel accord, les actions de formation se déroulent en dehors du temps de travail.
« Art. L. 933-4. - Les heures consacrées à la formation pendant le temps de travail ouvrent droit au maintien de la rémunération du salarié dans les conditions définies au I de l'article L. 932-1. Lorsque les heures de formation sont effectuées hors du temps de travail, le salarié bénéficie du versement par l'employeur de l'allocation de formation définie au III de l'article L. 932-1. Le montant de l'allocation de formation ainsi que les frais de formation correspondant aux droits ouverts sont à la charge de l'employeur et sont imputables sur sa participation au développement de la formation professionnelle continue. Pendant la durée de cette formation, le salarié bénéficie de la législation de la sécurité sociale relative à la protection en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles.
« Art. L. 933-5. - Lorsque durant deux exercices civils consécutifs, le salarié et l'entreprise sont en désaccord sur le choix de l'action de formation au titre du droit individuel à la formation, l'organisme paritaire agréé au titre du congé individuel de formation dont relève son entreprise assure par priorité la prise en charge financière de l'action dans le cadre d'un congé individuel de formation sous réserve que cette action corresponde aux priorités et aux critères définis par ledit organisme. Dans ce cas, l'employeur est tenu de verser à cet organisme le montant de l'allocation de formation correspondant aux droits acquis par l'intéressé au titre du droit individuel à la formation et les frais de formation calculés conformément aux dispositions de l'article L. 933-4 et sur la base forfaitaire applicable aux contrats de professionnalisation mentionnés à l'article L. 983-1.
« Art. L. 933-6. - Le droit individuel à la formation est transférable en cas de licenciement du salarié, sauf pour faute grave ou faute lourde. Dans ce cas, le montant de l'allocation de formation correspondant aux heures acquises au titre du droit individuel à la formation et n'ayant pas été utilisées est calculé sur la base du salaire net perçu par le salarié avant son départ de l'entreprise. Les sommes correspondant à ce montant doivent permettre de financer tout ou partie d'une action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience ou de formation, lorsqu'elle a été demandée par le salarié avant la fin du délai-congé. A défaut d'une telle demande, le montant correspondant au droit individuel à la formation n'est pas dû par l'employeur. Dans le document mentionné à l'article L. 122-14-1, l'employeur est tenu, le cas échéant, d'informer le salarié qu'il licencie de ses droits en matière de droit individuel à la formation, notamment de la possibilité de demander pendant le délai-congé à bénéficier d'une action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience ou de formation. En cas de démission, le salarié peut demander à bénéficier de son droit individuel à la formation sous réserve que l'action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience ou de formation soit engagée avant la fin du délai-congé. »
M. le président. La parole est à M. le président de la commission, sur l'article.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je saisis l'occasion de l'examen de l'article 8 pour rappeler notre réticence de principe aux opérations de dénumérotation et de renumérotation auxquelles il est de plus en plus souvent procédé, au fil des textes. Nous avions d'ailleurs formulé la même observation lors de l'examen du projet de loi relatif à la politique de santé publique.
Or le paragraphe II de l'article 8 procède à une renumérotation de deux chapitres et de sept articles du code du travail. Il faut bien se rendre compte que cette pratique rend la loi complètement impraticable et qu'elle crée une insécurité juridique pour ceux qui tentent de s'y référer.
M. Roland Muzeau. Eh oui !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Elle conduit à laisser au futur lecteur de l'article L. 933-1 du code du travail, par exemple, le soin de s'apercevoir qu'il a changé d'objet et qu'il faut désormais rechercher son contenu précédent au nouvel article L. 934-1.
M. Roland Muzeau. C'est un jeu de piste !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est le citoyen, lecteur amateur ou professionnel du code du travail, qui fera les frais de telles renumérotations. Sans se décourager, croyez-le, la commission des affaires sociales persiste à souhaiter qu'à l'avenir soit trouvée une solution alternative à la pratique de renumérotation des articles du code.
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par Mme Bocandé, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-1 du code du travail, remplacer les mots : "à l'exclusion des contrats prévus au chapitre Ier du titre VIII du présent livre" par les mots : "à l'exclusion des contrats mentionnés au titre Ier du livre Ier et au chapitre Ier du titre VIII du présent livre". »
La parole est à Mme Annick Bocandé, rapporteur.
Mme Annick Bocandé, rapporteur. C'est un amendement de précision qui vise à réparer un oubli. En effet, le présent aticle précise que le DIF n'est pas ouvert aux titulaires de contrats d'insertion en alternance, en vertu du principe selon lequel les salariés ne peuvent parallèlement suivre deux formations aux finalités différentes. Si les contrats en alternance ne sont pas concernés, je ne vois pas la raison pour laquelle les contrats en apprentissage le seraient davantage.
Le présent amendement prévoit donc que les titulaires de contrats en apprentissage n'ont pas accès aux DIF.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
Je profite de l'occasion qui m'est offerte pour indiquer à M. le président de la commission des affaires sociales que c'est bien dans cet esprit que le rapport Virville propose la recodification du code du travail.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Voilà un bon rapport, que l'on attend avec impatience !
M. François Fillon, ministre. Il s'agit donc, non pas d'une réforme du code du travail qui est proposée au travers de la codification, mais d'une réécriture...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
M. François Fillon, ministre. ... permettant une meilleure lisibilité.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 84, présenté par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-1 du code du travail, remplacer les mots : "dans l'entreprise qui l'emploie, bénéficie" par les mots : "au 1er janvier 2004 dans l'entreprise qui l'emploie, bénéficie à compter de cette date et". »
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement a pour objet d'instituer une date de mise en oeuvre du droit individuel à la formation. Sans originalité, nous proposons le 1er janvier 2004, comme le font les partenaires sociaux dans l'accord interprofessionnel du 20 septembre 2003.
Pour éviter un risque de contentieux sur la rétroactivité des dispositions de cet article, il convient de définir un point de départ aussi précoce que possible du dispositif.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Annick Bocandé, rapporteur. Je me demande si Mme Gisèle Printz a bien mesuré la portée de son amendement. Je n'ai vu nulle part dans l'ANI que le DIF devait être mis en place à partir du 1er janvier 2004. Par ailleurs, je vous rappelle que l'entrée en vigueur du DIF nécessite l'intervention d'accords collectifs préalables.
Un seul exemple suffira peut-être à vous convaincre, ma chère collègue. Il est prévu qu'une convention ou un accord collectif puisse préciser que le DIF se déroule pendant le temps de travail et que, à défaut d'un tel accord, le DIF s'exercera hors du temps de travail. Si vous fixez l'application du DIF au 1er janvier 2004, vous risquez d'empêcher la conclusion de ces accords, donc de faire en sorte que les actions de formation se déroulent de facto en dehors du temps de travail.
Vous connaissant, ma chère collègue, je suis sûre que ce n'est pas ce que vous souhaitez. Je vous demande donc de retirer votre amendement et de laisser aux partenaires sociaux le temps de conclure ces accords.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement suit l'excellente argumentation de Mme le rapporteur.
M. le président. Madame Printz, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Gisèle Printz. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 84.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 85 est présenté par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté.
L'amendement n° 227 est présenté par Mme David, M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer la dernière phrase du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-1 du code du travail. »
La parole est à Mme Gisèle Printz, pour présenter l'amendement n° 85.
Mme Gisèle Printz. L'acquisition d'une compétence ou d'une qualification pour un salarié requiert la même durée de formation, qu'il soit employé à temps plein ou à temps partiel. Les formations sont calculées en fonction de nécessités pédagogiques, et non du temps de travail des salariés qui les suivent. Certains salariés à temps partiel ne pourront donc pas suivre une formation complète. Cela peut avoir des conséquences très négatives dans certains secteurs économiques qui connaissent des évolutions technologiques rapides, comme l'informatique ou les biotechnologies. Le salarié risque de devoir attendre plus longtemps pour bénéficier d'une formation, donc de ne pas pouvoir suivre l'évolution des techniques, ce qui menacera son « employabilité ».
Par conséquent, il n'est pas logique d'appliquer cette disposition de pro rata temporis aux salariés à temps partiel. Au demeurant, un employeur, que ce soit pour un emploi à temps plein ou un emploi à temps partiel, sur un même poste, va requérir la même qualification.
Outre cette incohérence, nous ne devons pas oublier que les salariés à temps partiel sont le plus souvent des femmes, qui subissent le temps partiel plus qu'elles ne le souhaitent. Or elles sont peu formées et ont donc davantage besoin d'une formation. Cela est particulièrement important si elles veulent avoir une chance d'occuper un emploi plus intéressant, mieux rémunéré et surtout à temps plein. Leur appliquer cette disposition, c'est un peu, toutes proportions gardées, comme les condamner à une double peine, et qui serait définitive.
Nous savons que Mme le rapporteur est très attachée, et à juste titre, à l'équilibre de l'accord. Mais cet équilibre ne doit pas seulement être financier. Qu'elle nous permette de lui faire observer qu'il y a là, à l'encontre des femmes en particulier, un déséquilibre sérieux.
Nous demandons que cette disposition qui nous semble dépourvue de bon sens soit retirée du projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 227.
Mme Annie David. Cet amendement vise à supprimer la notion de pro rata temporis qui est attachée au droit à la formation.
Je voudrais, comme ma collègue Gisèle Printz, vous faire remarquer que, très souvent, les salariés qui travaillent à temps partiel dans les entreprises sont des femmes ou, tout au moins, des personnels fragilisés : des titulaires du RMA ou d'autres catégories de personnels, tels les travailleurs handicapés ou ceux qui bénéficient d'un mi-temps thérapeutique. En général, ce temps partiel leur est imposé et ne correspond pas à un libre choix de leur part.
En revanche, la durée de formation est la même pour tous, que l'on soit un travailleur à temps partiel ou un travailleur à temps complet. Cela signifie que le travailleur à temps partiel devra acquérir plus d'années d'ancienneté dans l'entreprise pour avoir droit au même temps de formation et à la même possibilité d'évoluer, soit en fonction de son poste, soit même en fonction de sa volonté personnelle, vers un poste plus intéressant, comme vient de le dire Gisèle Printz.
Ce serait une grave erreur que d'introduire cette notion de temps partiel attachée à la formation. Une telle disposition serait en outre discriminatoire, car elle viserait des populations déjà fragiles et en difficulté.
Pour avoir travaillé bon nombre d'années en entreprise dans la métallurgie à temps partiel, je sais ce que cela veut dire, surtout lorsque l'on a besoin d'une formation et que l'on travaille dans de telles conditions.
Eu égard à notre volonté d'assurer l'égalité des droits pour tous les salariés, cette notion de temps partiel attachée au temps de formation est vraiment inacceptable. L'article 8, qui crée le DIF, lequel représente une avancée incontestable pour les salariés, ne doit pas être entaché par cette notion de temps partiel, qui priverait de leurs droits beaucoup de nos compatriotes. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Annick Bocandé, rapporteur. Mme Printz et son groupe nous ont présenté une série d'amendements motivés par le souci d'appliquer l'ANI. Or l'amendement n° 85 prend à contre-pied tout l'esprit de cet accord.
Si les partenaires sociaux ont choisi un système de proratisation, il nous faut respecter leur choix. Sinon, nous risquons de bouleverser toute l'architecture qu'ils ont mise en place.
Sur le fond, je ne sais pas si un employeur accepterait de financer, comme pour les salariés à temps complet, la formation d'un salarié à temps partiel dans son entreprise. En outre, si ce salarié à temps partiel occupe plusieurs emplois de même nature, il pourra cumuler des droits à formation qui lui permettront de bénéficier d'un DIF comparable à celui dont disposent les salariés à temps complet.
Vous ne serez donc pas étonnée, madame Printz, que la commission émette un avis défavorable sur votre amendement.
Cette réponse vaut également pour l'amendement n° 227 de Mme David.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
Ces sujets sont au coeur des équilibres qui ont été trouvés entre les partenaires sociaux. Certes, rien n'empêche les branches de négocier pour mettre en place des dispositions plus favorables si elles le souhaitent. Mais le législateur doit avoir à coeur de respecter l'équilibre de cet accord. On ne peut en effet se féliciter d'obtenir un accord unanime et ensuite en rompre les équilibres essentiels.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 85 et 227.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 228 rectifié, présenté par Mme David, M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du Groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
« I. - Après les mots : "six ans", supprimer la fin de la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-2 du code du travail.
« II. - Supprimer l'avant-dernière phrase du premier alinéa du même texte. »
L'amendement n° 86, présenté par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Après les mots : "six ans", supprimer la fin de la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-2 du code du travail. »
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 87 est présenté par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté.
L'amendement n° 253 est présenté par Mme David, M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer l'avant-dernière phrase du premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-2 du code du travail. »
La parole est à Mme Annie David, pour défendre l'amendement n° 228 rectifié.
Mme Annie David. Le présent amendement tend à corriger le texte de loi présenté conformément à l'Accord national interprofessionnel. Le DIF, comme je ne cesserai de m'en faire l'écho, est un acquis pour l'ensemble des salariés, sans distinction, ce quel que soit le type de contrat passé avec leur employeur.
La responsabilité de la précarité de l'emploi n'incombe pas aux salariés et la formation doit bénéficier à tous les travailleurs, qu'ils soient en emploi précaire, à temps partiel contraint ou privés d'emploi.
Le monde du travail a besoin de résister et d'imposer une nouvelle logique de développement économique et social à l'heure de l'économie de la connaissance.
Le changement passe par l'individu qui, au retour de formation, exprime le besoin de la matérialiser dans un emploi et l'entreprise performante est celle qui conçoit la formation comme un investissement pleinement consenti. Pourtant, dans ce domaine, rien ne va de soi. Car si valoriser l'humain, le capital humain, l'intelligence humaine, n'est pas un acte naturel de notre société actuelle, pourquoi nos entreprises favoriseraient-elles la promotion de ceux qui les font exister ?
Pour en revenir à l'ANI, le présent texte de loi se doit d'effacer toute discrimination à l'encontre d'une quelconque catégorie de salariés et de créer une véritable dynamique de dialogue social.
Pour en revenir aux arguments qui ont été avancés par Mme le rapporteur quant aux personnels à temps partiel, on sait très bien que, lorsqu'il s'agit d'un temps partiel contraint, il est très difficile pour les salariés de compléter ce temps partiel par un autre emploi, surtout pour les emplois postés ou les emplois à trois quarts de temps. En effet, un employeur accepte difficilement de prendre un salarié pour un quart de temps ; de ce fait, le droit individuel à la formation se verrait amputé d'autant.
J'insiste donc vraiment sur ce point : associer le DIF au temps de présence, donc le calculer au pro rata temporis du temps travaillé pour les salariés à temps partiel est vraiment inacceptable et discriminatoire pour les travailleurs qui se trouvent dans cette situation.
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz, pour présenter les amendements n°s 86 et 87.
Mme Gisèle Printz. L'amendement n° 86 est un amendement de cohérence avec l'amendement que nous avons déjà défendu au sujet des salariés à temps partiel.
Nous rappelons que l'obtention de droits suffisants pour réaliser une formation diplômante, par exemple, risque d'être trop longue pour le salarié, ce qui peut mettre en péril son employabilité.
L'amendement n° 87 est également un amendement de cohérence.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour défendre l'amendement n° 253.
Mme Annie David. Nous insistons sur le fait que l'acquisition au pro rata temporis du droit individuel à la formation pour les salariés à temps partiel est inacceptable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Annick Bocandé, rapporteur. Ces amendements procèdent de la même philosophie que l'amendement n° 85, sur lequel je me suis longuement expliquée tout à l'heure. Pour les mêmes raisons, la commission émet sur ces quatre amendements un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 228 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 86.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 87 et 253.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 6 est présenté par Mme Bocandé, au nom de la commission.
L'amendement n° 189 est présenté par M. Etienne.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Rédiger ainsi la première phrase du second alinéa du texte proposé pour le III de cet article pour l'article L. 933-2 du code du travail :
« Par convention ou accord collectif de branche ou d'entreprise ou, à défaut, par accord collectif conclu entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés signataires d'un accord constitutif d'un organisme collecteur paritaire des fonds de la formation professionnelle continue à compétence interprofessionnelle, des priorités peuvent être définies pour les actions de formation mises en oeuvre dans le cadre du droit individuel à la formation. »
La parole est à Mme Annick Bocandé, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 6.
Mme Annick Bocandé, rapporteur. Cet amendement est important, puisqu'on le retrouvera dans plusieurs autres articles du texte. Son objectif est d'encourager la négociation interprofessionnelle uniquement lorsque l'accord d'entreprise ou de branche prévu n'est pas intervenu.
Lors de mon introduction, je vous ai rappelé que certains avaient dénoncé ce qu'ils appellaient la « consécration des branches » dans ce projet de loi, non pas parce que la légitimité ou l'action des branches est contestable, au contraire, mais parce qu'elle laisse peu de place à la négociation interprofessionnelle. J'ai été sensible à cet argument.
Aujourd'hui, la collecte des fonds de la formation professionnelle est surtout effectuée par les organismes collecteurs créés par les syndicats représentatifs des branches ; ce sont les principaux financeurs de la formation. Les organismes de branche sont 72 à collecter les fonds, pour l'essentiel ceux du plan de formation, de l'alternance et du congé de formation. Leurs ressources sont donc très importantes. C'est la raison pour laquelle une règle datant de 1985 les oblige à reverser une partie de leurs ressources aux organismes interprofessionnels.
Les organismes collecteurs interprofessionnels sont constitués par les représentants des syndicats sans considération liée à la branche, soit parce que les entreprises qu'ils regroupent ne sont pas représentées dans une branche - c'est le cas de 5 % des entreprises françaises -, soit parce que les branches auxquelles elles appartiennent à l'origine sont trop déficitaires pour survivre. Face aux 72 OPCA de branches, il existe 26 OPCA interprofessionels, dont 2 nationaux et 24 régionaux. C'est ce qui conduit à dire que les organismes collecteurs interprofessionnels sont plus adaptés à la problématique du territoire que ne le sont les branches. Or, le projet de loi supprime cette solidarité financière, ce qui a de nombreux avantages par ailleurs mais présente l'inconvénient d'affaiblir financièrement ces organismes.
C'est la raison pour laquelle il m'a semblé important de rééquilibrer l'architecture du système de collecte en associant les organismes collecteurs interprofessionnels aux nouvelles actions de formation. Actuellement, les priorités de formation sont définies par la branche ou l'entreprise. Pourquoi ne pas également prévoir qu'à défaut d'un accord de branche ou d'entreprise un accord constitutif d'un OPCA interprofessionnel pourra définir ces priorités ?
M. le président. L'amendement n° 189 n'est pas défendu.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 6 ?
M. François Fillon, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 88, présenté par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Compléter la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-3 du code du travail par les mots : "en tenant compte éventuellement des priorités définies par la convention ou l'accord collectif de branche ou d'entreprise prévu au deuxième alinéa de l'article L. 933-2". »
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement de précision vise à reprendre une disposition de l'accord du 20 septembre 2003.
La mise en oeuvre du droit individuel à la formation doit tenir compte, le cas échéant, des priorités définies par la convention collective ou l'accord de branche ; clairement, il faut donc pouvoir aller au-delà des limites horaires proposées dans le projet de loi. Nous sommes ici en accord avec Mme le rapporteur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Annick Bocandé, rapporteur. L'amendement n° 88 ayant un objet identique à celui de l'amendement n° 7, la commission vous demande, madame Printz, de bien vouloir le retirer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, rapporteur. Le Gouvernement étant favorable à l'amendement de la commission, il est favorable à l'amendement n° 88.
M. le président. Madame Printz, maintenez-vous votre amendement ?
Mme Gisèle Printz. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 88 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 7, présenté par Mme Bocandé, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-3 du code du travail, après les mots : "formation envisagée", insérer les mots : ", qui peut prendre en compte les priorités définies au deuxième alinéa de l'article L. 933-2,". »
L'amendement n° 229 rectifié, présenté par Mme David, M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-3 du code du travail, après les mots : "formation envisagée", insérer les mots : ", qui peut prendre en compte des priorités définies conformément au deuxième alinéa de l'article L. 933-2,". »
La parole est à Mme Annick Bocandé, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 7.
Mme Annick Bocandé, rapporteur. Cet amendement porte sur une disposition du projet de loi qui a été très discutée par les partenaires sociaux. Outre l'obligation de formation dont on a parlé plus haut, il s'agit du second point abordé par les organisations syndicales dans leur lettre du 13 janvier.
Les syndicats craignent que la liberté de choix de la formation par le salarié et l'employeur ne soit affaiblie si ce choix doit prendre en compte les priorités définies par la branche. Ce n'est certainement pas ce que les négociateurs ont souhaité. Il me semble que la mise en oeuvre du DIF doit relever de la procédure de codécision entre le salarié et son employeur. Après tout, dès lors que les deux parties se sont entendues sur le choix de la formation, je ne vois pas ce que la branche pourrait y trouver à redire. La codécision, que les organisations patronales n'ont eu cesse de mettre en avant lors des négociations, doit absolument être préservée, si on veut que le DIF soit un vrai droit individuel et soit appliqué.
L'amendement que je vous propose vise à atténuer cette querelle en rapprochant la rédaction de l'article 8 de celle de l'accord national.
Je souhaite qu'il soit précisé que le choix de l'action de formation décidée par l'employeur et le salarié peut prendre en compte les priorités de la branche, lorsqu'elles existent : il n'y aura donc de ce point de vue aucune obligation.
M. le président. La parole est à Annie David, pour défendre l'amendement n° 229 rectifié.
Mme Annie David. Cet amendement est presque identique à l'amendement n° 7.
Chaque salarié en CDI pourra exiger de son employeur que, sur une période de six ans au moins, cent vingt heures lui soient attribuées pour pouvoir se former sans que soient remis en cause ses autres droits existants comme le CIF, le congé individuel de formation, le bilan de compétences et la validation des acquis de l'expérience.
Le DIF, ce nouveau droit créé dans l'article 8, suppose une démarche personnalisée du salarié, mais pas forcément une démarche étroitement individuelle, puisque cette liberté peut s'enrichir d'une concertation franche avec l'employeur.
Les salariés n'ont rien à craindre d'une responsabilisation individuelle, dans la mesure où elle s'accompagne des garanties collectives correspondantes que sont le maintien de la hiérarchie des normes et la garantie face aux aléas économiques.
Notre amendement va dans le sens d'une protection du droit individuel du salarié à la formation et d'une clarification, entre le salarié et son employeur, des priorités auxquelles est soumis ce droit.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Annick Bocandé, rapporteur. Cet amendement étant satisfait par celui de la commission, j'en demande le retrait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Il s'agit du deuxième sujet évoqué dans la lettre, souvent citée, notamment sur les travées de l'opposition, des partenaires sociaux, et la très grande distance entre l'interprétation qu'a voulu en donner l'opposition et la réalité apparaît bien.
Le premier sujet, on l'a vu, a donné lieu à un problème de rédaction juridique ; sur le deuxième sujet, le texte du projet de loi est parfaitement conforme à l'accord interprofessionnel.
De notre point de vue, il n'y avait pas d'ambiguïté quant à la possibilité pour le salarié, en accord avec son employeur, d'utiliser son DIF pour suivre une action de formation s'inscrivant éventuellement dans les priorités définies par une convention ou par un accord collectif de branches ou d'entreprises.
L'amendement proposé par la commission permet toutefois de satisfaire tout le monde et lève toute interprétation erronée de la loi. Le Gouvernement y est donc favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 229 rectifié n'a plus d'objet.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 8, présenté par Mme Bocandé, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Compléter le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-3 du code du travail par deux phrases ainsi rédigées :
« Ce dernier dispose d'un délai de quinze jours pour notifier sa réponse lorsque le salarié prend l'initiative de faire valoir ses droits à la formation. L'absence de réponse de l'employeur vaut acceptation du choix de l'action de formation. »
Le sous-amendement n° 265, présenté par M. Gérard, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 8 pour compléter l'article L. 933-3 du code du travail, remplacer les mots : "de quinze jours" par les mots : "d'un mois". »
L'amendement n° 89, présenté par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Compléter le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-3 du code du travail par deux phrases ainsi rédigées :
« Ce dernier a quinze jours pour notifier sa réponse, à compter de la réception de la demande écrite du salarié de faire valoir ses droits à la formation. Une non-réponse de l'employeur a valeur d'acceptation de sa part du choix de l'action de formation. »
La parole est à Mme Annick Bocandé, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 8.
Mme Annick Bocandé, rapporteur. L'article 8 prévoit la possibilité d'un désaccord entre l'employeur et le salarié sur le choix de l'action de formation. Lorsque ce désaccord se prolonge deux années de suite, le salarié est autorisé à se former dans le cadre non plus du DIF, puisque l'employeur le refuse, mais d'un autre dispositif, le congé individuel de formation.
Toutefois cet article 8 n'indique pas dans quel délai l'employeur doit faire connaître son accord sur la formation envisagée par le salarié. L'amendement n° 8 tend donc à lui accorder un délai de quinze jours pour y répondre, son silence valant acceptation.
L'objectif est d'éviter que l'employeur ne donne pas suite à la demande du salarié et que celui-ci ne puisse effectuer les démarches nécessaires auprès de l'organisme de formation concerné pour obtenir le congé de formation.
M. le président. La parole est à M. Alain Gérard, pour présenter le sous-amendement n° 265.
M. Alain Gérard. Ce sous-amendement a pour objet d'harmoniser le délai de réponse de l'employeur avec celui qui lui est applicable pour les demandes de départ en formation dans le cadre du congé individuel de formation.
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz, pour présenter l'amendement n° 89.
Mme Gisèle Printz. Nous voici à nouveau en accord avec Mme le rapporteur : nous voulons revenir au texte des partenaires sociaux, dans un souci d'équilibre, et afin de ne pas laisser perdurer une ambiguïté qui pourrait être défavorable au droit du salarié et donc limiter la portée pratique de l'accord du 20 septembre dernier.
L'amendement n° 89 est peut-être un peu plus précis que celui de la commission, mais nos intentions sont les mêmes, et je ne doute pas que nous allons parvenir à un accord.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Annick Bocandé, rapporteur. A mon grand regret, je ne peux émettre un avis favorable sur le sous-amendement n° 265, car il est incompatible avec l'amendement de la commission, laquelle a considéré que le délai de quinze jours était suffisant.
Je demande donc à M. Gérard de bien vouloir retirer son sous-amendement.
Quant à l'amendement n° 89, dont Mme Printz a elle-même reconnu qu'il était très proche de celui de la commission, il est en effet satisfait et j'en demande également le retrait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 8 de la commission, sous réserve toutefois que le Sénat adopte le sous-amendement n° 265. En effet, comme l'a indiqué M. Gérard, il est cohérent que le délai applicable aux employeurs soit le même pour l'ensemble des dispositifs.
Le sous-amendement de M. Gérard et l'amendement de la commission ne sont pas incompatibles. Ils ont le même objectif, la seule différence étant que l'un prévoit un délai de quinze jours alors que l'autre retient un délai d'un mois, délai qui me paraît raisonnable, qui correspond à l'usage et qui est cohérent avec celui qui est prévu pour le CIF.
Le Gouvernement est donc favorable au sous-amendement n° 265.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. La commission se rallie à la position du Gouvernement !
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 265.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8, modifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 89 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 90, présenté par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-3 du code du travail, après les mots : "s'exerce" insérer les mots : "en totalité ou". »
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement apporte une précision et tend à rapprocher le projet de loi du texte de l'accord du 20 septembre.
Ce dernier indique en effet que l'objet du DIF est de permettre aux salariés de bénéficier d'actions de formation réalisées en dehors du temps de travail, conformément aux dispositions de l'accord de branche ou d'entreprise dont ils relèvent.
Il semble donc préférable de laisser cette option ouverte et de ne pas faire injonction aux partenaires sociaux de suivre, dans la pratique quotidienne, une loi qui serait plus restrictive que l'accord auquel ils sont librement parvenus.
Nous ne sommes d'ailleurs pas en mesure de savoir à l'avance si des entreprises ne souhaiteront pas, pour des raisons liées à leur métier, que la formation soit réalisée en totalité pendant le temps de travail. Au demeurant, on nous demande trop souvent de laisser les partenaires sociaux négocier pour que nous ne respections pas, dans ce cas précis, leur liberté (M. le président de la commission des affaires sociales sourit), qui ne porte en rien atteinte aux prérogatives du Parlement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Annick Bocandé, rapporteur. L'amendement de Mme Printz ne peut être présenté comme un simple amendement de précision : il est contraire à l'esprit et, surtout, à la lettre de l'ANI. Nulle part je n'y ai lu que les formations peuvent se réaliser en totalité pendant le temps de travail.
J'émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Il est totalement défavorable : il s'agit là d'une innovation acceptée par l'ensemble des partenaires sociaux et qui, d'ailleurs, aurait déjà dû faire l'objet d'une intervention du législateur sous la législature précédente. Nous voyons en effet qu'avoir ignoré complètement les possibilités de formation lors du débat sur le projet de loi relatif à la réduction du temps de travail a été une grave erreur.
Le groupe socialiste est prêt à refaire cette même erreur en ignorant sciemment un accord dans lequel les partenaires sociaux ont fait preuve d'innovation.
Le Gouvernement souhaite donc que le Sénat repousse cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 90.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 230 rectifié, présenté par Mme David, M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Remplacer la seconde phrase du second alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-3 du code du travail par deux phrases ainsi rédigées :
« Une convention ou un accord collectif de branche ou d'entreprise peut prévoir que le droit individuel à la formation s'exerce en partie hors du temps de travail. A défaut d'un tel accord, les actions de formation se déroulent pendant le temps de travail. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. L'amendement n° 230 rectifié vise à éviter les inégalités liées à l'impossibilité pour certaines personnes, en particulier pour les femmes, de suivre une formation hors des horaires de travail. Il respecte ainsi le principe de la réduction du temps de travail.
Cet amendement vise également à encourager le dialogue dans les entreprises.
Monsieur le ministre, vous venez d'indiquer que les accords de branche pourraient donner satisfaction aux salariés à temps partiel. Je vous propose de faire de ces accords des accords généraux. Les partenaires sociaux dans les entreprises pourraient ainsi décider si le temps de formation est ou non pris sur le temps de travail.
En l'absence de partenaires sociaux au sein de l'entreprise, et faute d'accord, les actions de formation doivent se dérouler pendant le temps de travail.
L'employeur doit être conscient de ce que la formation tout au long de la vie relève pour la plus grande part d'investissements qu'il se doit de faire s'il veut que son entreprise reste compétitive et qu'elle acquière de la valeur ajoutée. C'est pourquoi je défends l'idée que les salariés se forment en priorité pendant leur temps de travail.
Ce seront très souvent les salariés les plus fragiles qui auront des difficultés pour se former. Je prends une nouvelle fois l'exemple des femmes qui, on le sait, malgré l'évolution de notre société, se consacrent très souvent de manière traditionnelle à leur famille, parfois à leurs ascendants défaillants ou encore aux tout petits enfants privés d'une place en crèche. Elles peuvent ainsi passer deux années ou plus sans bénéficier d'aucune formation.
Parmi les personnes qui rencontreront des difficultés pour se former en dehors de leur temps de travail figurent également tous les salariés postés, c'est-à-dire travaillant en faction de nuit, de jour, de matin. Et il faudrait que, dans le cadre de leur CDI, ces salariés, qui travaillent sept heures trente ou huit heures, parfois la nuit, parfois la journée, parfois le soir, trouvent le temps en plus de suivre une formation ? De nombreuses conditions sont réunies pour qu'ils ne puissent pas bénéficier d'une formation.
On sait par ailleurs que les femmes sont plus concernées que les hommes par les contrats à durée déterminée ou par le travail à temps partiel. Leur accès au droit à la formation est plus limité. C'est donc un problème récurrent depuis la loi de 1971, portant organisation de la formation professionnelle continue dans le cadre de l'éducation permanente. De ce point de vue, ce projet de loi n'améliore pas leur situation et creusera les inégalités socioprofessionnelles entre les hommes et les femmes.
Après votre réforme sur les retraites, monsieur le ministre, dont les femmes sont parmi les premières victimes, vous nous présentez à nouveau un texte qui porte atteinte au droit des salariées dans l'entreprise.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Annick Bocandé, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, car il n'est pas conforme à l'ANI.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 230 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 231, présenté par Mme David, M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Remplacer les deuxième et troisième phrase du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-4 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :
« Les frais de formation correspondant aux droits ouverts sont à la charge de l'employeur et sont imputables sur sa participation au développement de la formation professionnelle tout au long de la vie. »
La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 231.
Mme Annie David. Il s'agit d'un amendement de cohérence avec notre opposition à la formation en dehors du temps de travail.
Selon le MEDEF, le salarié devrait participer financièrement à sa formation professionnelle, en l'effectuant en dehors de son temps de travail.
Au-delà de l'aspect juridique et financier de la prise en charge de la formation, votre notion de « co-investissement » vise à nous convaincre du bien-fondé de votre idéologie « paternalisante », selon laquelle le salarié doit mériter son emploi.
D'après une enquête récente, un tiers des personnes qui n'ont pas pu bénéficier d'une formation évoquent celle-ci comme un rêve impossible, soit parce qu'ils n'ont reçu aucune proposition, soit parce que leur début de démarche auprès de l'employeur, de l'ANPE ou d'un organisme public ou privé s'est soldé par une fin de non-recevoir, soit parce qu'ils connaissent des problèmes financiers ou d'emploi du temps, soit parce que leur contrat d'intérim, leur CES ou leur emploi à temps partiel ne leur ouvre pas de droits. Nombreuses sont les raisons.
L'accord national interprofessionnel devrait tenir compte de tous les freins subjectifs ou environnementaux susceptibles d'entraver l'accès à la formation.
Tel est le sens de cet amendement, que je vous demande, bien évidemment, de voter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Annick Bocandé, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, contraire à la philosophie et à la lettre de l'ANI.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 231.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 9, présenté par Mme Bocandé, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Après la troisième phrase du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-4 du code du travail, insérer deux phrases ainsi rédigées :
« L'employeur peut s'acquitter de ses obligations relatives aux frais de formation par l'utilisation d'un titre spécial de paiement émis par des entreprises spécialisées. Sa mise en oeuvre par accord de branche s'effectue dans des conditions fixées par décret. »
La parole est à Mme Annick Bocandé, rapporteur.
Mme Annick Bocandé, rapporteur. Pour simplifier les formalités administratives liées au DIF, notamment pour les PME, je vous propose de créer un « titre-formation » sur le modèle du ticket-restaurant : ce titre-formation devrait permettre à l'employeur de s'aquitter de ses obligations relatives aux frais de formation. Il lui suffira d'acheter ces titres auprès d'entreprises spécialisées, qui fourniront une liste d'organismes de formation fiables, et de les remettre aux salariés qui souhaitent se former. Ceux-ci transmettront ce titre pour paiement à l'organisme de formation. L'entreprise est ainsi libérée de toute formalité administrative.
Le dispositif du titre-formation permettra ainsi aux entreprises de simplifier les formalités administratives qui pèseront sur elles, d'être certaines que les sommes versées sont bien affectées à des coûts pédagogiques et de mieux gérer leur budget de formation.
Il permettra aussi aux salariés d'accéder à une offre plus ciblée de formation parmi les quelque 67 000 organismes de formation affiliés.
Il permettra également aux organismes de formation de bénéficier d'un accès facilité à la clientèle individuelle, de limiter les difficultés liées à la solvabilité et aux délais de paiement.
Il permettra enfin aux partenaires sociaux d'utiliser cet outil au service d'une politique de formation au niveau de chaque branche professionnelle, en promouvant des titres-formation dédiés à l'activité concernée.
Ce dispositif sera évidemment neutre pour le budget de l'Etat puisqu'il ne crée aucune exonération.
Afin d'associer les partenaires sociaux à la mise en place de ce titre, je vous propose de confier sa mise en oeuvre aux accords collectifs dans des conditions fixées par décret.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 232, présenté par Mme David, M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi la première phrase du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-5 du code du travail :
« Lorsque durant deux exercices civils consécutifs, l'entreprise n'a pas donné son autorisation d'absence pour que le salarié puisse bénéficier du droit individuel à la formation, l'organisme paritaire agréé au titre du congé individuel de formation dont relève son entreprise assure par priorité la prise en charge financière de l'action dans le cadre d'un congé individuel de formation. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement vise à rétablir, pour le salarié, la liberté de choisir sa formation. Le droit individuel à la formation implique en effet pour le salarié une liberté de choix. Si le DIF est soumis à l'accord de l'employeur, le désaccord de celui-ci sur la formation choisie ne peut justifier qu'il empêche un salarié de se former.
Notre amendement vise à établir que, si un salarié est dans l'impossibilité de bénéficier du droit individuel à la formation parce que son employeur ne le lui accorde pas, la responsabilité en incombe à ce dernier, et non au salarié, qui ne refuse pas de suivre une formation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Annick Bocandé, rapporteur. La question des formations prioritaires a été précisée par l'Assemblée nationale par voie d'amendements, rendant ainsi le présent article plus conforme à l'ANI. L'amendement proposé par Mme Annie David est en retrait par rapport au souhait exprimé par les partenaires sociaux.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 232.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 91, présenté par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Compléter la dernière phrase du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-5 du code du travail par les mots : "et au salarié, dans la limite de l'intégralité des frais liés à la mise en oeuvre de son congé individuel formation, le montant de formation correspondant à ses droits acquis au titre du droit individuel". »
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Le texte de l'accord national interprofessionnel du 20 septembre 2003 prévoit que l'employeur doit verser à l'organisme de formation des frais afférents à cette dernière et au salarié le montant de l'allocation.
Or, dans sa rédaction actuelle, l'article L. 933-5 prévoit le versement de ces deux montants à l'organisme de formation.
On discerne mal la logique qui préside à cette modification du texte de l'accord. De plus, il n'est pas précisé si, après le versement des deux sommes à l'organisme de formation, celui-ci devra verser le montant de l'allocation au salarié. Si tel était le cas, cela alourdirait considérablement sa gestion ; dans le cas contraire, cela signifierait que le salarié en formation est considéré comme une sorte de mineur sous tutelle. Il ne semble pas que cette conception soit celle qui a permis d'aboutir à la signature de l'accord par les partenaires sociaux.
Ainsi, nous souhaitons que l'esprit de l'accord soit strictement respecté. L'employeur doit adresser, d'une part, à l'organisme de formation le montant des frais calculés conformément aux dispositions de l'article L. 933-4 du code du travail et sur la base forfaitaire applicable aux contrats de professionnalisation mentionnés à l'article L. 983-1 du même code, d'autre part, au salarié l'allocation correspondant à ses droits acquis au titre du DIF.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Annick Bocandé, rapporteur. L'article 8 du projet de loi prévoit qu'en cas de désaccord entre le salarié et son employeur sur le choix de l'action de formation, l'employeur est tenu de verser à l'organisme collecteur des fonds du CIF le montant de l'allocation de formation, ainsi que les frais de formation correspondant aux droits acquis au titre du DIF.
Cette disposition ne diffère en rien de l'ANI, si ce n'est que les sommes versées le sont directement à l'organisme, sans passer par l'intermédiaire du salarié. Que l'entreprise verse le montant dû au salarié ou à l'organisme, je ne vois pas ce que cela changerait : en tout état de cause, la formation du salarié sera rémunérée. Je pense que c'est bien ce qui importe aux auteurs de l'amendement.
D'ailleurs, lors de notre table ronde, aucun des partenaires sociaux, y compris les syndicats, n'ont fait de propositions particulières sur ce point. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement, car, s'il était retenu en l'état, il aurait pour effet de conduire l'employeur à verser deux fois les mêmes sommes : une première fois à l'organisme paritaire, une seconde fois au salarié.
M. Roland Muzeau. Ce n'est pas mal ! (Sourires.)
M. François Fillon, ministre. Dans la mesure où, en cas de refus de prise en charge d'une formation dans le cadre du droit individuel à la formation, c'est à l'organisme paritaire, agréé au titre du congé de formation, de prendre en charge les frais qui y sont liés, il est apparu plus logique et plus opérationnel que cet organisme soit destinataire des sommes dues au titre du droit individuel à la formation. C'est de cette manière que le texte a été présenté aux partenaires sociaux lors de la commission permanente de la formation professionnelle. Ces derniers n'ont alors émis aucune réserve à cet égard.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 91.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 233, présenté par Mme David, M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-6 du code du travail :
« Art. L. 933-6. - Le droit individuel à la formation est transférable. En cas de licenciement du salarié, le montant de l'allocation de formation correspondant aux heures acquises au titre du droit individuel à la formation et n'ayant pas été utilisées est calculé sur la base du salaire net perçu par le salarié avant son départ de l'entreprise. Les sommes correspondant à ce montant doivent permettre de financer tout ou partie d'une action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience ou de formation. A défaut de leur utilisation, le montant correspondant au droit individuel à la formation doit être versé automatiquement au salarié par l'employeur. Dans le document mentionné à l'article L. 122-14-1, l'employeur est tenu, le cas échéant, d'informer le salarié qu'il licencie de ses droits en matière de droit individuel à la formation, notamment de la possibilité de demander pendant le délai-congé à bénéficier d'une action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience ou de formation. En cas de démission, le salarié peut demander à bénéficier de son droit individuel à la formation sous réserve que ses démarches visant à l'action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience ou de formation soit engagées avant la fin du délai-congé. »
L'amendement n° 92, présenté par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-6 du code du travail, supprimer les mots : "sauf pour faute grave ou faute lourde". »
L'amendement n° 10, présenté par Mme Bocandé, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 933-6 du code du travail par une phrase ainsi rédigée :
« En cas de départ à la retraite, le droit individuel à la formation n'est pas transférable. »
La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 233.
Mme Annie David. Je vous ferai grâce de la lecture de la nouvelle rédaction, qui est un peu longue, proposée pour l'article L. 933-6 du code du travail, à travers cet amendement.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Contentons-nous de l'objet de l'amendement !
Mme Annie David. A cette heure, il n'y a plus beaucoup de personnes attentives !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr que l'on écoute !
Mme Annie David. En effet, M. le ministre écoute !
Le droit individuel à la formation est transférable. Cette caractéristique du DIF se justifie pleinement à une époque où la mobilité du salarié, d'une entreprise à l'autre et d'un métier à un autre, est devenue une pratique courante.
Dans le contexte d'une économie nationale et mondiale mouvante, la formation demandée ne peut exclusivement viser l'adaptation à un seul poste de travail ; le salarié devra à un moment de sa vie utiliser son droit à la formation pour se reconvertir.
Cette transférabilité du DIF pourrait se concevoir comme une épargne-temps s'il était calculé dans le respect des textes légaux concernant la durée du travail, mais nous savons que, pour des raisons dites comptables, les employeurs préfèrent le monnayer. Une sécurité sociale de l'emploi et de la formation, telle que je l'envisageais tout à l'heure, n'est malheureusement pas à l'ordre du jour.
Il faut absolument insister également sur le devoir qu'a l'employeur de tenir le salarié informé de ses droits à différentes formations et sur le fait que les sources d'information doivent être facilement accessibles afin de susciter et de faciliter les démarches des salariés.
Le droit à la formation compense la peur de l'avenir professionnel.
Les délocalisations sur le sol national et à l'étranger, les concentrations du capital international et des entreprises laissent sur le bord d'anciens sites industriels des salariés dont les savoirs sont localement inutilisables.
Puis il y a des métiers, des secteurs, des branches entières qui disparaissent. Il y a également les accidents du travail et de la vie...
Enfin, pour des raisons personnelles, à un moment donné de sa vie, on peut ressentir le besoin de réaliser un rêve et de changer d'orientation professionnelle.
Les raisons pour lesquelles, au cours d'une vie, une personne évolue sont multiples. C'est cette liberté d'évoluer qu'a pour objet de traduire le présent amendement.
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz, pour défendre l'amendement n° 92.
Mme Gisèle Printz. La transférabilité du droit individuel à la formation est une question primordiale pour l'ensemble des salariés, qui n'a pu être résolue lors de la négociation. La transférabilité n'est apparue au cours de la discussion du projet de loi qu'en première lecture à l'Assemblée nationale, grâce à un amendement du rapporteur.
On nous permettra de faire observer que, pour cette première partie du texte au moins, la discussion au Parlement et les interventions tant des rapporteurs que des orateurs des divers groupes auront indéniablement permis de progresser vers l'équilibre. Cela en est un nouvel exemple.
En l'occurrence, j'ai envie de dire que nous avons fait une bonne partie du chemin, mais qu'il reste encore quelques pas à accomplir.
La transférabilité du DIF est donc acquise, ce qui était indispensable compte tenu de l'instabilité du marché du travail. Sans qu'il soit même besoin d'évoquer le développement de la précarité, on comprend bien qu'un salarié sous contrat à durée indéterminée, licencié après avoir occupé son emploi pendant trois ou quatre années, ne saurait perdre les droits qu'il a acquis. Le droit individuel à la formation est attaché au salarié et non pas à l'employeur. Ce point est tout à fait fondamental. Encore une fois, le salarié n'est pas un mineur sous tutelle, comme une frange du patronat aurait manifestement tendance à le penser.
Sur le plan pratique, il est bien évident que la non-transférabilité signifierait, dans le contexte d'instabilité que j'évoquais, la fin du DIF avant même qu'il ait été mis en place. Ce serait transformer un espoir pour les salariés et une chance pour notre économie en un simple effet d'annonce. Cela susciterait une immense déception et serait certainement perçu comme une véritable « arnaque » par l'opinion. Je ne crois pas que les circonstances se prêtent à une telle manoeuvre.
Notre amendement vise à supprimer la mention : « sauf pour faute grave ou lourde ».
Sur le plan du principe d'abord, comme je viens de le dire, le salarié n'est pas un mineur sous tutelle. Il n'y a donc pas lieu de le punir en le privant de formation parce que l'employeur estimera qu'il a commis une faute grave ou lourde. La formation n'est pas une « friandise », c'est une nécessité économique. Elle ne doit pas être associée à l'appréciation que l'employeur porte sur le salarié ; elle est un droit inhérent à la qualité juridique de salarié.
Sur le plan pratique ensuite, nombre de licenciements pour faute grave ou lourde donnent lieu à un contentieux. Ils sont assez souvent requalifiés à l'issue de la procédure. Dans quelles conditions le salarié retrouvera-t-il alors son droit à la formation ?
La formulation actuelle du texte ne tient pas compte de ces deux éléments, même si elle constitue un progrès par rapport à la rédaction initiale. Nous demandons qu'elle soit modifiée pour mieux tenir compte du statut juridique et de la situation réelle du salarié.
M. le président. La parole est à Mme Annick Bocandé, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 10 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 233 et 92.
Mme Annick Bocandé, rapporteur. L'amendement n° 10 vise à reprendre une disposition qui figurait dans l'ANI et qui semble si évidente que le Gouvernement ne l'a pas insérée à l'article 8. Toutefois, il n'est pas rare de voir des salariés partis à la retraite reprendre une activité, notamment à temps partiel. Il importe donc de préciser que, dès lors qu'ils auront quitté l'entreprise pour partir à la retraite, les droits acquis au titre du DIF par les salariés ne pourront pas faire l'objet d'un transfert.
En ce qui concerne l'amendement n° 233, madame David, même si la commission partage votre souci de prévoir une transférabilité plus complète du DIF, elle a émis un avis défavorable sur votre proposition. Celle-ci est contraire à l'esprit de l'ANI qui, je le rappelle, est un compromis et constitue la première étape d'une réforme qui se poursuivra dans les mois à venir.
Il convient, par conséquent, de laisser aux partenaires sociaux le temps de mener à bien les négociations complémentaires avant d'instituer une transférabilité totale du DIF.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 92.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements n°s 233 et 92. En revanche, il est favorable à l'amendement n° 10.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 233.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 92.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.