Chapitre II
Dispositions étendant certaines dispositions
législatives à la Nouvelle-Calédonie,
à la Polynésie française, aux îles Wallis et Futuna,
aux Terres australes et antarctiques françaises
et à Mayotte
Article additionnel après l'article 82
M. le président. L'amendement n° 134, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Après l'article 82, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les articles 81 bis à 81 sexies sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit de prévoir l'application outre-mer des dispositions transitoires du projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 134.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 82.
I et II. - Non modifiés.
III. - Supprimé.
IV. - Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° A l'article 804, les mots : « de la Nouvelle-Calédonie, » sont supprimés ;
2° L'article 804 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« A l'exception des articles 529-6 à 529-9 et 717 à 719, le présent code (Dispositions Législatives) est applicable en Nouvelle-Calédonie, sous réserve des adaptations prévues au présent titre. » ;
3° L'article 850 est complété par un phrase ainsi rédigée :
« En Nouvelle-Calédonie, pour les contraventions des quatre premières classes à la réglementation applicable localement en matière de transport terrestre, qui sont seulement punies d'une peine d'amende, l'action publique est éteinte par le paiement d'une amende forfaitaire qui est exclusive de l'application des règles de la récidive. »
M. le président. L'amendement n° 273 rectifié, présenté par M. Loueckhote et les membres du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le IV de cet article :
« IV. _ Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
« 1° L'article 850 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En Nouvelle-Calédonie, pour les contraventions des quatre premières classes à la réglementation applicable localement en matière de transport terrestre, qui sont seulement punies d'une peine d'amende, l'action publique est éteinte par le paiement d'une amende forfaitaire qui est exclusive de l'application des règles de la récidive. » ;
« 2° Après l'article 850, il est inséré un article 850-1 ainsi rédigé :
« Art. 850-1. - En Nouvelle-Calédonie, les contraventions des quatre premières classes à la police des services de transports publics routiers de personnes, fixés par la réglementation locale, sont constatés par des procès-verbaux dressés concurremment par les agents assermentés de la Nouvelle-Calédonie, des provinces et des communes et des délégataires du service public.
« Ces agents sont commissionnés par l'autorité administrative compétente ou par le délégataire de service public. Après avoir été agréés par le procureur de la République, ils prêtent serment devant le tribunal de première instance.
« Ces agents sont habilités à relever l'identité et l'adresse du contrevenant uniquement lorsqu'ils procèdent au contrôle de l'existence et de la validité des titres de transport des voyageurs. Si le contrevenant refuse ou se trouve dans l'impossibilité de justifier de son identité, l'agent du délégataire du service public en rend compte immédiatement à tout officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétent, qui peut alors lui ordonner sans délai de lui présenter sur-le-champ le contrevenant. A défaut de cet ordre, l'agent du délégataire du service public ne peut retenir le contrevenant. »
La parole est à M. Laurent Béteille.
M. Laurent Béteille. Deux réseaux de transport en commun fonctionnent actuellement en Nouvelle-Calédonie, l'un à Nouméa, exploité par un groupement d'intérêt économique, un GIE, et l'autre en province Sud.
Confrontés, comme en métropole, à une recrudescence de la fraude des utilisateurs, notamment au défaut de titre de transport, les exploitants des réseaux ont mis en place des agents chargés de contrôler les titres de transport des voyageurs, mais cette pratique n'est étayée par aucune disposition. En effet, les articles 529-3 à 529-5 du code de procédure pénale ne sont pas applicables en Nouvelle-Calédonie. Par conséquent, il est nécessaire de régulariser cette situation.
L'Assemblée nationale a donc étendu, en deuxième lecture, à la Nouvelle-Calédonie l'application des articles 529-3 à 529-5 du code de procédure pénale. Cette extension a cependant été proposée en bloc, sans tenir compte de la situation spécifique de la Nouvelle-Calédonie. En effet, l'article 88 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie dispose que « le Congrès peut réglementer le droit de transaction dans les matières de sa compétence », parmi lesquelles se trouvent les transports routiers. La ministre de l'outre-mer, consultée par la mairie de Nouméa, a partagé l'analyse selon laquelle le Congrès est compétent pour réglementer ces transactions entre l'exploitant et le contrevenant en matière de transport terrestre public.
Cet amendement a pour objet de concilier ces deux exigences d'extension et d'adaptation en proposant une nouvelle rédaction. Selon ses termes, les articles 529-3 à 529-5 ne seraient pas applicables en l'état en Nouvelle-Calédonie. Toutefois, l'introduction d'un article 850-1 permettrait de transposer l'essentiel de ces dispositions en prévoyant l'habilitation d'agents des collectivités territoriales de la Nouvelle-Calédonie ou des délégataires du service public à constater, par procès-verbal, les contraventions des quatre premières classes à la police des services de transports publics routiers de personnes.
En sus de l'adoption de cette disposition - si le Sénat le décide -, il restera à étendre les conditions d'agrément, par le procureur de la République, de ces agents. En effet, aux termes de l'article 529-4, un décret fixe ces conditions d'agrément. Les articles R. 49-8-1 à R. 49-8-4 du code de procédure pénale ne sont cependant pas applicables à la Nouvelle-Calédonie. Il conviendra donc de prévoir les conditions de cet agrément pour les agents commissionnés en Nouvelle-Calédonie.
Enfin, monsieur le garde des sceaux, M. Simon Loueckhote souhaite connaître la date de parution du décret permettant d'étendre les dispositions d'agrément aux agents de contrôle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Cet amendement vise à permettre aux exploitants de réseaux de transport de verbaliser les contrevenants en Nouvelle-Calédonie, comme c'est déjà le cas en métropole. Il est inspiré par M. Loueckhote, qui connaît certainement mieux la Nouvelle-Calédonie que les membres de la commission des lois.
La commission est tout à fait favorable à l'extension à la Nouvelle-Calédonie des règles qui sont applicables en métropole, au moins sur ces points-là. Elle souhaite toutefois connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement. Mme la ministre de l'outre-mer ne m'a pas signalé de difficulté particulière.
S'agissant de la date de publication du décret, je ne peux apporter une réponse en l'instant à M. Loueckhote. Je la lui ferai parvenir le plus tôt possible, après avoir consulté mes services.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 273 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 83, modifié.
(L'article 83 est adopté.)
I et II. - Non modifiés.
III. - Les trois derniers alinéas de l'article 695-14-1 du même code, en ce qu'ils font référence au Système d'information Schengen, ne sont applicables qu'au territoire européen de la République française. - (Adopté.)
Chapitre III
Dispositions modifiant les codes des communes
applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon,
à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie
Article 85 (pour coordination)
Après l'article L. 122-27 du code des communes applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, il est inséré un article L. 122-27-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 122-27-1. - Conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale, le maire est tenu de signaler sans délai au procureur de la République les crimes ou les délits dont il acquiert la connaissance dans l'exercice de ses fonctions.
« Le maire est avisé des suites données à son signalement conformément aux dispositions de l'article 40-2 du même code.
« Le procureur de la République peut également communiquer au maire des éléments d'information sur les procédures relatives à des infractions commises sur le territoire de la commune ».
M. le président. L'amendement n° 135, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Remplacer le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 122-27-1 du code des communes applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le procureur de la République peut porter à la connaissance du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale toutes les mesures ou décisions de justice, civiles ou pénales, dont la communication paraît nécessaire à la mise en oeuvre d'actions de prévention, de suivi et de soutien, engagées ou coordonnées par l'autorité municipale ou intercommunale.
« Les dispositions des articles 226-13 et 226-14 du code pénal s'appliquent aux destinataires de cette information, sous réserve de l'exercice de la mission mentionnée à l'alinéa précédent. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 135.
(L'amendement n° 135 est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 85, modifié.
(L'article 85 est adopté.)
Article 86 (pour coordination)
Après l'article L. 122-27 du code des communes applicable en Nouvelle-Calédonie, il est inséré un article L. 122-27-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 122-27-1. - Conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale, le maire est tenu de signaler sans délai au procureur de la République les crimes ou les délits dont il acquiert la connaissance dans l'exercice de ses fonctions.
« Le maire est avisé des suites données à son signalement conformément aux dispositions de l'article 40-2 du même code.
« Le procureur de la République peut également communiquer au maire des éléments d'information sur les procédures relatives à des infractions commises sur le territoire de la commune. »
M. le président. L'amendement n° 136, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Remplacer le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 122-27-1 du code des communes applicable en Nouvelle-Calédonie par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le procureur de la République peut porter à la connaissance du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale toutes les mesures ou décisions de justice, civiles ou pénales, dont la communication paraît nécessaire à la mise en oeuvre d'actions de prévention, de suivi et de soutien, engagées ou coordonnées par l'autorité municipale ou intercommunale.
« Les dispositions des articles 226-13 et 226-14 du code pénal s'appliquent aux destinataires de cette information, sous réserve de l'exercice de la mission mentionnée à l'alinéa précédent. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. C'est un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 136.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 86, modifié.
(L'article 86 est adopté.)
Article 87 (pour coordination)
Au II de l'article 3 de la loi n° 77-1460 du 29 décembre 1977 modifiant le régime communal dans le territoire de la Polynésie française, le dernier alinéa est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :
« - les articles L. 122-25 à L. 122-27 ;
« - l'article L. 122-27-1 dans la rédaction suivante :
« Art. L. 122-27-1. - Conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale, le maire est tenu de signaler sans délai au procureur de la République les crimes ou les délits dont il acquiert la connaissance dans l'exercice de ses fonctions.
« Le maire est avisé des suites données à son signalement conformément aux dispositions de l'article 40-2 du même code.
« Le procureur de la République peut également communiquer au maire des éléments d'information sur les procédures relatives à des infractions commises sur le territoire de la commune. » ;
« - les articles L. 122-28 et L. 122-29. »
M. le président. L'amendement n° 137, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Remplacer l'avant-dernier alinéa de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le procureur de la République peut porter à la connaissance du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale toutes les mesures ou décisions de justice, civiles ou pénales, dont la communication paraît nécessaire à la mise en oeuvre d'actions de prévention, de suivi et de soutien, engagées ou coordonnées par l'autorité municipale ou intercommunale.
« Les dispositions des articles 226-13 et 226-14 du code pénal s'appliquent aux destinataires de cette information, sous réserve de l'exercice de la mission mentionnée à l'alinéa précédent. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. C'est un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 137.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 87, modifié.
(L'article 87 est adopté.)
M. le président. Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l'objet de la deuxième lecture.
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Robert Bret, pour explication de vote.
M. Robert Bret. Au terme de cette deuxième lecture, je formulerai simplement trois brèves remarques.
Premièrement, cette loi focalise sur elle le mécontentement de l'ensemble du monde judiciaire : magistrats, avocats, personnel pénitentiaire et chercheurs. Mardi dernier, dans votre intervention liminaire, monsieur le garde des sceaux, vous avez insisté sur le dialogue et la concertation qui auraient présidé à la rédaction de ce texte. Il me semble que vous confondez information et dialogue, lequel suppose d'écouter son interlocuteur.
L'ensemble des acteurs de la justice, que nous avons reçus, ont, pour leur part, déploré le manque d'écoute de la chancellerie.
Deuxièmement, ce texte ne répond pas aux objectifs fixés initialement, à savoir la lutte contre les nouvelles formes de criminalité, et singulièrement la criminalité organisée ; il laisse de côté une large partie de la délinquance « en col blanc ».
En revanche, il bouleverse de façon irréfléchie et très préjudiciable aux libertés individuelles la procédure pénale, en instituant un déséquilibre profond et un déplacement des pouvoirs du juge vers le parquet et du parquet vers la police. Ce glissement est d'autant plus grave que ses effets n'ont pas pu être évalués : comme l'ont relevé nos collègues socialistes et comme l'avait parfaitement expliqué la commission consultative des droits de l'homme, ils sont sans nul doute de nature à remettre en cause la Convention européenne des droits de l'homme.
Troisièmement, enfin, nous déplorons que la majorité parlementaire se soit autant crispée sur nos propositions relatives à la prison, dont l'urgence n'échappe à personne.
J'espère que l'avenir me démentira, mais je crains, mes chers collègues, que vous ne mettiez en place une véritable poudrière.
Pour l'ensemble de ces raisons, les sénateurs du groupe CRC voteront contre le projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Claude Estier.
M. Claude Estier. Tout comme en première lecture, après plusieurs jours et nuits de travaux, nous ne pouvons que déplorer les conditions dans lesquelles ce projet de loi a été élaboré et surchargé au gré des initiatives des parlementaires de la majorité, singulièrement à l'Assemblée nationale : il ne ressemble aujourd'hui qu'à un « fourre-tout » sans véritable cohérence, bouleversant gravement la procédure pénale.
Le texte final reflète ce que nous dénoncions dès la première lecture et qui a été fortement relayé par toutes les professions judiciaires et par la société civile, alarmées : une volonté déterminée de mettre à bas la grande loi du 15 juin 2000, votée pourtant à l'unanimité, et, à travers cette remise en cause, de bouleverser à nouveau la procédure pénale. Pour la première fois depuis vingt ans, il s'agit de tourner le dos au procès équitable, clé de voûte des exigences de la Convention européenne des droits de l'homme en matière pénale.
En effet, malgré les efforts de notre commission des lois, le texte introduira un déséquilibre structurel entre les parties au procès pénal, qu'il s'agisse de la procédure dérogatoire applicable à la criminalité et à la délinquance organisées ou de la procédure de droit commun.
Ainsi, on assiste à un accroissement considérable des pouvoirs des parquets et de la police judiciaire : surveillance et infiltration policières, conditions des perquisitions, extension de la garde à vue et prolongation de l'enquête de flagrance.
En revanche, les juges du siège, qu'il s'agisse du juge des libertés et de la détention ou des autres magistrats du siège, font l'objet de bien peu de considération : ils apparaîtront désormais comme de simples contrôleurs, homologateurs d'accords passés entre le procureur de la République et le délinquant.
Quant à la défense, elle sera silencieuse ou, en tout cas, sans moyens.
Et que dire de la création du fichier des délinquants sexuels - vos arguments à cet égard, monsieur le ministre, ne m'ont pas convaincu -, sinon qu'il reflète parfaitement l'esprit de ce texte d'inspiration policière et sécuritaire, qui constitue une régression sans précédent depuis plus de vingt ans ?
Vous comprendrez, monsieur le ministre, mes chers collègues, que le groupe socialiste, malgré les améliorations apportées sur l'initiative de la commission des lois, ne puisse s'associer à cette dérive de l'institution judiciaire. Nous voterons donc contre l'ensemble du projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille.
M. Laurent Béteille. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous parvenons aujourd'hui, avec la quatrième lecture d'un projet de loi déposé en avril dernier, au terme d'un long travail législatif.
Ce texte avait pour objectif de répondre aux comportements délictueux, qui n'attendent pas, pour évoluer, pour s'adapter et pour mettre en échec les dispositions visant à les supprimer, que le Parlement procède à la modification de la procédure pénale !
Il visait à répondre à l'attente de nos concitoyens, notamment les plus faibles d'entre eux, qui aspirent à une protection de la part de l'Etat.
Il tendait aussi - c'était même le fondement de ce texte - à protéger les victimes. J'entendais avant-hier M. Dreyfus-Schmidt nous dire : mais nous avons déjà pensé aux victimes ; nous avons prévu de les indemniser !
C'est bien, sans doute ; mais qu'est-ce qu'une indemnisation financière face à certains comportements, comme un viol ? Ne faut-il pas préférer les mesures de nature à éviter la multiplication de tels actes à l'indemnisation des victimes ?
Le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles vise précisément à réduire le nombre des victimes, et donc des infractions. Voilà qui relève du rôle et de la responsabilité du Parlement !
Depuis le mois d'avril dernier, nous avons eu le temps d'examiner en profondeur, grâce aux nombreuses auditions auxquelles a procédé la commission des lois, les différentes dispositions de ce texte. La navette a permis de préciser ces dernières et d'enrichir le texte. A cet égard, je pense en particulier au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou au mandat européen, qui constituent des avancées très importantes.
Certains ont stigmatisé le caractère prétendument fourre-tout de ce texte. Je pense au contraire que l'Assemblée nationale et le Sénat, durant les longs mois qu'ils ont consacré à l'examen de ce projet de loi, se sont attachés, lorsque c'était possible, à apporter des solutions législatives aux différents problèmes qui se posent en matière de justice, palliant ainsi un manque et une absence de réponse constatés depuis un certain nombre d'années.
Je tiens à vous remercier, monsieur le garde des sceaux, pour votre constante ambition de travailler avec le Parlement de manière constructive et mesurée.
Sans esprit partisan, vous avez su défendre votre texte et reconnaître les propositions de notre assemblée, de la majorité comme de l'opposition, lorsqu'elles vous semblaient fondées. Je pense notamment à l'abrogation de l'infraction d'offense à un chef d'Etat étranger, devenue obsolète dans notre droit.
Je tiens également à remercier M. le rapporteur, qui a fait preuve des mêmes qualités et a su proposer un certain nombre de dispositions tout à fait essentielles qui ont enrichi ce texte.
Le Sénat a encore su démontrer, au cours de ses deux lectures, son enthousiasme particulier et sa volonté de débattre sans polémiques inutiles lorsqu'il s'agit d'étudier des textes relatifs à notre procédure pénale.
Nous sommes satisfaits de l'équilibre du projet de loi que nous allons adopter dans un instant. En premier lieu - et c'était son objectif initial -, ce projet de loi dote pour la première fois notre appareil judiciaire d'un dispositif d'ensemble destiné à lutter contre la criminalité organisée, une criminalité qui est appréhendée dans sa globalité.
Le fichier des délinquants sexuels, dont nous avons su préciser les termes, sera de nature à prévenir le renouvellement des infractions sexuelles et à faciliter l'identification de leurs auteurs, tout en garantissant les droits essentiels des personnes.
Il en est également ainsi de la procédure du plaider-coupable. A ce titre, je me félicite que, sur l'initiative de M. le rapporteur, la commission des lois ait proposé que la personne poursuivie ne puisse renoncer à son droit d'être assistée par un avocat.
Il reste encore, naturellement, un certain nombre de points en discussion avec l'Assemblée nationale, et je ne doute pas que nous arrivions à un consensus sur les derniers sujets en débat.
Je conclurai en insistant sur ce qui me semble le plus important, et ce d'autant plus que, ces derniers jours, la presse a souvent rendu un écho totalement déformé des réalités.
Nous avons travaillé dans un climat assez étrange dans la mesure où un certain nombre d'affirmations totalement inexactes ont été propagées. S'agissant en particulier de l'amendement Garraud, nous avons entendu des propos totalement aberrants et tout à fait contraires au texte.
Si je pense, comme d'autres, que ce problème ne pouvait pas être réglé dans le cadre de la discussion de ce projet de loi, je reconnais néanmoins qu'il existe un vide juridique à cet égard. En effet, certaines infractions parmi les plus graves ne sont pas poursuivies, contrairement à d'autres, moins graves : ainsi, on n'est pas poursuivi si on cause par imprudence la mort d'un foetus, mais on l'est si l'on le blesse ! Tout le monde reconnaîtra que c'est totalement invraisemblable !
Il faudra donc régler ce problème, et je rejoins tout à fait la position de Pierre Fauchon sur ce point.
Toutefois, ce projet de loi traite d'ores et déjà de nombreux sujets. En outre, cette question nécessite un certain nombre de consultations. Nous ne pouvions donc pas maintenir cet amendement. Mais il n'empêche - et c'est pour cette raison que j'ai tenu à en parler - qu'il est exemplaire du climat dans lequel nous avons travaillé.
En conclusion, ce projet de loi réforme en profondeur notre procédure pénale avec un double impératif : garantir les droits de la défense, fondement de notre système judiciaire, mais également doter la justice des moyens de faire face à toutes les évolutions et les mutations de la grande délinquance, ainsi que protéger les victimes.
C'est donc avec enthousiasme et détermination que le groupe de l'UMP votera ce projet de loi tel qu'il a été enrichi par les travaux des deux assemblées. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Avant que n'intervienne le vote sur ce texte très important, je tiens à remercier le Sénat, en particulier la commission des lois et son rapporteur, du travail effectué.
Le cheminement de ce texte a duré un an, mais l'importance des questions traitées méritait qu'il y ait deux lectures dans chaque assemblée.
Certes, ce cheminement parlementaire a entraîné l'alourdissement du texte. Mais pour autant, je ne crois pas que l'on puisse parler d'un texte « fourre-tout » : je ne pense pas, en effet, que le mandat d'arrêt européen ou les mesures d'adaptation des fins de peine soient des dispositions négligeables !
Grâce à ce texte, nous allons être dotés, comme l'a dit M. Béteille, d'un ensemble législatif permettant à la justice française de disposer de moyens adaptés pour lutter contre la délinquance criminelle internationale.
Par ailleurs, nous allons pouvoir - c'était le second grand objectif de ce texte - apporter une réponse pénale diversifiée en fonction de la nature des dossiers que doit traiter l'institution judiciaire. La grande question qui se pose à nous est en effet de savoir comment l'institution judiciaire peut traiter les dossiers qui lui sont soumis par les citoyens ou par les services d'enquête : il faut lui permettre de le faire avec efficacité et humanité, dans le respect des principes de liberté qui sont les nôtres.
Je vous remercie donc, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, du travail qui a été accompli par la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons d'adopter.
Il va être procédé immédiatement à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de cette commission mixte paritaire.
La liste des candidats établie par la commission des lois a été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. René Garrec, François Zocchetto, Patrice Gélard, Jean-Jacques Hyest, Jean-René Lecerf, Michel Dreyfus-Schmidt et Mme Nicole Borvo.
Suppléants : MM. Robert Badinter, Christian Cointat, Jean-Patrick Courtois, Pierre Fauchon, Hubert Haenel, Georges Othily et Jean-Pierre Sueur.
ORDRE DU JOUR
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 27 janvier 2004 :
A dix heures :
1. Quatorze questions orales.
(Le texte des questions figure en annexe.)
A seize heures et le soir :
2. Discussion du projet de loi (n° 410, 2002-2003), relatif à la régulation des activités postales.
Rapport (n° 162, 2003-2004) fait par M. Pierre Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques et du Plan.
Le délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale est fixé au lundi 26 janvier 2004, à dix-sept heures.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est fixé au lundi 26 janvier 2004, à dix-sept heures.
Délai limite pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques, des experts judiciaires, des conseils en propriété industrielle et des experts en ventes aux enchères publiques (n° 141, 2003-2004) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 27 janvier 2004, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 27 janvier 2004, à dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social (n° 133, 2003-2004) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 2 février 2004, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 2 février 2004, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à onze heures trente.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD
NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES ET DU PLAN
M. Yannick Texier a été nommé rapporteur sur le projet de loi n° 164 (2003-2004) portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire, dont la commission est saisie au fond.
COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES,
DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL,
DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Patrice Gélard a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 156 (2003-2004), présentée par MM. Christian Poncelet, Josselin de Rohan, Michel Mercier, Jacques Pelletier, Henri de Raincourt et Xavier de Villepin, actualisant le tableau de répartition des sièges de sénateurs et certaines modalités de l'organisation de l'élection des sénateurs, dont la commission des lois est saisie au fond.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON
QUESTIONS ORALES
REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT
(Application des articles 76 à 78 du réglement)
Accidents maritimes et insuffisance
des moyens de repérage des navires
411. - 23 janvier 2004. - M. François Marc attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer sur le manque de moyens de repérage des navires. Le récent naufrage du Bugaled-Breizh, chalutier immatriculé au Guivinec (Finistère), qui a coulé le 15 jnvier dernier, au sud du cap Lizard (Grande-Bretagne) entraînant la mort de cinq membres de l'équipage, démontre précisément les conséquences dramatiques de l'insuffisant équipement des navires en outils d'identification. Intensification du trafic maritime, vétusté des bateaux, tempêtes, indifférence aux réglementations, voire comportement de « voyous des mers », comme cela a été le cas dernièrement au cours de cette catastrophe : tous ces facteurs contribuent à un double problème d'insécurité maritime et de dangerosité du métier de marin-pêcheur. Selon l'institut maritime de prévention à Lorient, un pêcheur sur huit est victime chaque année d'au moins un grave accident de travail. Pour rappel, le naufrage du Bugaled-Breizh résulterait de l'abordage d'un grand navire de type cargo ou porte-conteneurs dont l'identification se heurte à de grosses difficultés pratiques. Le naufrage s'est en outre produit dans les eaux internationales, dans une zone dépourvue de couverture radar permanente. Depuis le 1er janvier 2004, tous les bateaux de pêche doivent être équipés d'un système de surveillance par satellite pour contrôler les zones de pêche. Or, les bateaux de commerce ne sont pas soumis à cette obligation. Une directive européenne 2002/59/CE du 22 juin 2002 prévoit d'installer le SIA (système d'identification automatique) sur chaque navire afin de permettre la transmission automatique et quasi continue aux stations côtières des informations relatives à l'identité, à la position et au parcours de bateaux ainsi équipés. Non opérationnelle pour le moment, cette législation européenne n'a à ce jour aucune force contraignante sur le territoire français. Il lui demande de ce fait ce que le Gouvernement entend mettre en oeuvre pour traduire en droit national, et donc appliquer la directive européenne relative à la sécurité maritime. A cette occasion, il souhaiterait également connaître les mesures qui vont être prises pour doter les CROSS (centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage en mer) d'outils suffisamment puissants de suivi du trafic.