ARTICLE 7 DE LA LOI N° 78-17 DU 6 JANVIER 1978

M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Türk, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« I. - Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 7 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :

« Un traitement de données à caractère personnel doit avoir reçu le consentement de la personne concernée ou satisfaire à l'une des conditions suivantes : ».

« II. - Rédiger comme suit le début du deuxième alinéa (1°) du texte proposé par cet article pour l'article 7 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :

« 1° Le respect... »

« III. - Rédiger comme suit le début du troisième alinéa (2°) du texte proposé par cet article pour l'article 7 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :

« 2° La sauvegarde... »

« IV. - Rédiger comme suit le début du quatrième alinéa (3°) du texte proposé par cet article pour l'article 7 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :

« 3° L'exécution... »

« V. - Rédiger comme suit le début de l'avant-dernier alinéa (4°) du texte proposé par cet article pour l'article 7 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :

« 4° L'exécution... »

« VI. - Rédiger comme suit le début du dernier alinéa (5°) du texte proposé par cet article pour l'article 7 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :

« 5° La réalisation... »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alex Turk, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 109, présenté par M. C. Gautier et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Dans le dernier alinéa (5°) du texte proposé par cet article pour l'article 7 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, après les mots : "la réalisation de l'intérêt légitime poursuivi", insérer les mots : "de manière explicite et adéquate". »

La parole est à M. Charles Gautier.

M. Charles Gautier. Le texte proposé pour l'article 7 de la loi de 1978 énumère différentes hypothèses dans lesquelles, nonobstant le consentement de la personne, le traitement est licite.

Il en est notamment ainsi lorsque ce consentement est nécessaire à la réalisation de l'intérêt légitime poursuivi par le responsable du traitement ou par le destinataire, à condition de ne pas méconnaître l'intérêt ou les droits et libertés fondamentaux de la personne concernée.

Cette disposition, qui ressort directement du paragraphe f de l'article 7 de la directive, laisse une grande marge de manoeuvre au responsable du traitement de données automatisées appartenant au secteur privé, ce dernier n'étant tenu qu'au respect de l'équilibre entre ses intérêts légitimes et les libertés fondamentales des personnes concernées. Surtout, elle fragilise substantiellement la portée du principe du consentement de la personne.

Je ne fais là que prendre acte des observations formulées par M. le rapporteur dans son rapport. Au demeurant, le rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Gouze, avait émis la même critique. Je tire les conséquences de cette unanimité.

A mon sens, ces précisions sont utiles et elles sont inspirées par un souci de cohérence. C'est la raison pour laquelle il est proposé que cette dérogation soit mieux encadrée en insistant sur le caractère explicite et adéquat de l'intérêt légitime poursuivi par le responsable du traitement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Alex Turk, rapporteur. J'ai le sentiment que le terme « explicite » n'apporte pas grand-chose.

Quant au mot « adéquate », il soulève certaines difficultés, comme nous avons déjà eu l'occasion de le signaler à propos du niveau de protection. En effet, cet adjectif n'a pas exactement la même signification en droit français et en droit anglo-saxon.

J'ajoute que la notion d'intérêt légitime est très ancienne et qu'elle est très fréquemment utilisée au sein de la CNIL. Pourquoi, alors, vouloir préciser une notion qui est parfaitement claire dans l'esprit des commissaires de la CNIL ?

Craignant donc que cet amendement « de précision » n'apporte plutôt du flou, j'émets un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 109.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 7 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978.

(Ce texte est adopté.)

 
 
 

ARTICLE 8 DE LA LOI N° 78-17 DU 6 JANVIER 1978

M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Türk, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« I. - Dans le premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, supprimer les mots : ", sauf consentement exprès de la personne concernée".

« II. - Après le premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, insérer un alinéa rédigé comme suit :

« 1° A Les traitements pour lesquels la personne concernée a donné son consentement exprès, sauf dans le cas où la loi prévoit que l'interdiction visée au I ne peut être levée par le consentement de la personne concernée. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alex Turk, rapporteur. Le projet de loi prévoit en quelque sorte une dérogation de portée générale au principe de l'interdiction de collecter ou de traiter des données sensibles : cette interdiction est levée dès lors que la personne concernée a donné son consentement exprès.

L'amendement n° 6 vise à supprimer cette dérogation à cet endroit du texte et à l'intégrer dans la liste de celles qui figurent au II de l'article 8 tout en précisant qu'une loi peut prévoir l'impossibilité de lever l'interdiction par le consentement exprès. Ce mécanisme est prévu expressément par la directive.

Il s'agit en fait d'assurer aux employés une protection à l'égard de leurs employeurs. Dans une première approche, on pourrait considérer que le consentement exprès devrait suffire, mais il faut imaginer le cas où un employé se sent obligé de donner son consentement exprès à son employeur qui le lui demande : ce sera le résultat d'une certaine forme de pression.

C'est pourquoi nous proposons ce système à double détente en indiquant qu'une loi pourra ultérieurement prévoir les cas où le consentement exprès de la personne concernée ne permettra pas de lever l'interdiction.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Hyest. Je comprends tout à fait l'argumentation de M. le rapporteur. Mais, dans le projet de loi est tout de même posée une sorte d'exception de principe : « sauf consentement exprès de la personne concernée ». Or l'amendement la ravale au rang de simple exception, tout en évoquant d'éventuelles lois ultérieures.

Monsieur le rapporteur, je me permets de vous rendre attentif au fait que, en matière d'assurance vie, d'assurance santé, de prévoyance, la collecte de données personnelles est tout de même très importante. Si le consentement exprès ne figure plus comme exception de principe, cela pourrait donner lieu à des distorsions de concurrence.

Si vous me garantissez que cela n'empêchera pas de continuer à recueillir des données pour établir différents contrats d'assurance, je n'ai pas d'objection à formuler. Mais vous écrivez tout de même un certain nombre de choses susceptibles de nous donner à penser que la loi pourrait interdire totalement le recueil de données de santé, ce qui mettrait en cause tout un secteur économique. Je ne pense pas que ce soit ce que vous souhaitez.

Faute de ces garanties, je ne pourrai pas voter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Alex Turk, rapporteur. Je ferai observer à M. Hyest que, en l'état actuel des choses, une loi postérieure serait nécessaire. Il appartient donc au législateur d'adopter, s'il le souhaite, une disposition de cette nature. Pour l'heure, le régime juridique n'est pas modifié.

M. Jean-Jacques Hyest. Il faut le dire !

M. Alex Turk, rapporteur. Eh bien, je le dis !

M. Jean-Jacques Hyest. C'est important !

M. Alex Turk, rapporteur. Le consentement exprès est aujourd'hui exigé, et il suffit en tant que tel. Si l'on souhaite modifier les choses - notre amendement ne dit pas autre chose -, il faut que le législateur intervienne. A ce moment-là, il vous appartiendra de donner votre opinion, monsieur Hyest, et à moi de donner la mienne.

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je ne peux que confirmer ce qui vient d'être dit par M. le rapporteur : cet amendement n'a pas d'incidence sur le cadre juridique actuel ; il n'a ni pour objet ni pour effet de restreindre les possibilités de traitement actuellement ouvertes ; il tend simplement à rappeler, dans un souci de précision juridique, qu'il existe des hypothèses où la loi pose elle-même des limites aux effets du consentement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 94, présenté par M. Bret et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Après les mots : "Appartenance syndicale", rédiger comme suit la fin du I du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés : "les caractéristiques génétiques des personnes, ou celles qui sont relatives à la santé, à l'orientation sexuelle ou à l'intimité de leur vie privée". »

L'amendement n° 110, présenté par M. C. Gautier et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :

« Dans le I du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, après les mots : "ou qui sont relatives", insérer les mots : "aux caractéristiques génétiques,". »

L'amendement n° 7, présenté par M. Türk, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Dans le premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, remplacer les mots : "l'orientation sexuelle" par les mots : "la vie sexuelle". »

La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 94.

M. Robert Bret. Cet amendement vise à élargir la liste des données sensibles, qui doivent faire l'objet d'une protection particulière, c'est-à-dire celles dont la collecte est en principe interdite sauf consentement exprès de la personne et autorisation de la CNIL.

Les données génétiques font partie du patrimoine inviolable de la personne. Or on constate que ces informations sont souvent collectées dès le plus jeune âge, voire in utero, dans le cadre de diagnostics prédictifs, sans que ces éléments puissent être réellement considérés comme des diagnostics médicaux au sens strict dans la mesure où ils ne visent qu'à définir des probabilités de survenue de telle ou telle maladie.

Par ailleurs, tout en maintenant la notion d'orientation sexuelle, qui revêt une signification bien précise dans le contexte actuel et permet de mettre l'accent sur la nécessité de lutter contre l'homophobie, nous avons considéré, comme la commission, que cette notion était trop restrictive. Nous avons ainsi souhaité inclure parmi les données sensibles les informations qui mettent en cause l'intimité de la vie privée dans la mesure où elles font de plus en plus souvent l'objet d'un traitement lié à l'informatisation de l'action sociale. Ainsi, il est fréquent que les travailleurs sociaux soient amenés à faire mention d'appréciations largement subjectives sur l'intimité des personnes.

Si la collecte de ces informations peut être nécessaire au travail social lui-même, dans un contexte de maillage, il convient d'être particulièrement vigilant quant à leur utilisation ultérieure.

L'inclusion de ces données dans le champ des données sensibles serait d'ailleurs conforme à la délibération de la CNIL du 13 octobre 1998, laquelle affirmait le caractère extrêmement sensible de ces informations qui touchent à l'intimité de la vie privée des personnes.

M. le président. La parole est à M. Charles Gautier, pour présenter l'amendement n° 110.

M. Charles Gautier. Le traitement de données biologiques doit à l'évidence être entouré de garantie.

L'article 1er de la déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l'homme, adoptée par la conférence générale de l'UNESCO en 1997, établit la nature particulière du génome humain en indiquant que celui-ci « sous-tend l'unité fondamentale de tous les membres de la famille humaine, ainsi que la reconnaissance de leur dignité intrinsèque et de leur diversité » et précise que, « dans un sens symbolique, il est le patrimoine de l'humanité ».

Le génome humain est source d'informations dont l'exploitation incontrôlée peut conduire à des dérives extrêmement dangereuses.

Les échantillons génétiques contiennent un nombre considérable de données extrêmement sensibles puisqu'ils touchent à l'identité la plus intime de la personne, son lignage, son histoire passée et à venir.

Les ouvrages d'Axel Kahn nous ont appris que l'utilisation de ces échantillons génétiques pouvait donner lieu à bien d'autre recherches que celles qu'avaient initialement imaginées leurs auteurs ; elles peuvent aller dans un sens opposé aux convictions intimes du donneur de l'échantillon.

Cet amendement a donc pour objet d'inclure les données génétiques dans l'énumération des données dites sensibles.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 7 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 94 et 110.

M. Alex Turk. rapporteur. Le I de l'article 8 porte sur des données sensibles.

Dans le texte transmis par l'Assemblée nationale, l'expression retenue est celle d'« orientation sexuelle », alors qu'il nous paraît plus logique de parler de « vie sexuelle », parler d'« orientation sexuelle » mettant l'accent sur la distinction entre hétérosexualité et homosexualité. Or, dans ce projet de loi, il nous semble préférable de parler de la vie sexuelle au sens de vie privée de chacun sous l'angle sexuel. Selon nous, l'expression « vie sexuelle » est plus large et moins invasive que celle d'« orientation sexuelle ».

Pour ce qui concerne l'amendement n° 94, on peut, je crois, rejeter sans difficulté, sans crainte, la notion d'intimité de la vie privée puisqu'elle est prise en compte par l'amendement de la commission. J'y suis donc défavorable.

En revanche, la notion de données génétiques, qui figure également dans l'amendement n° 111, ne pose aucune difficulté et je m'en remettrai à la sagesse de notre assemblée.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Pour ce qui est des données génétiques, le projet de loi en fait un critère de contrôle prélable.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur les amendements n°s 94 et 110, et favorable sur l'amendement n° 7.

M. le président. La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. Puisque M. le rapporteur s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur l'amendement n° 110 et que l'amendement n° 7 va dans le sens que nous préconisons, je retire l'amendement n° 94.

M. le président. L'amendement n° 94 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 110.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 8, présenté par M. Türk, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« I. - Rédiger comme suit le début du deuxième alinéa (1°) du II du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :

« 1° Les traitements nécessaires à la sauvegarde de la vie humaine, mais auxquels la personne... »

« II. - Remplacer le troisième alinéa (2°) du II du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés par quatre alinéas ainsi rédigés :

« 2° Les traitements mis en oeuvre par une association ou tout autre organisme à but non lucratif et à caractère religieux, philosophique, politique ou syndical :

« - pour les seules données mentionnées au I correspondant à l'objet dudit organisme ;

« - sous réserve qu'ils ne concernent que les membres de cet organisme et, le cas échéant, les personnes qui entretiennent avec celui-ci des contacts réguliers dans le cadre de son activité ;

« - et qu'ils ne portent que sur des données non communiquées à des tiers, à moins que les personnes concernées n'y consentent expressément ; »

« III. - Rédiger comme suit le début du quatrième alinéa (3°) du II du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :

« 3° Les traitements portant sur des données à caractère personnel rendues publiques... »

« IV. - Rédiger comme suit le début du cinquième alinéa (4°) du II du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :

« 4° Les traitements nécessaires à la constatation... »

« V. - Rédiger comme suit le début de l'avant-dernier alinéa (5°) du II du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :

« 5° Les traitements nécessaires aux fins de la médecine préventive, des diagnostics médicaux, de l'administration de soins ou de traitements, ou de la gestion de services de santé et mis en oeuvre... »

« VI. - Rédiger comme suit le début du dernier alinéa (6°) du II du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :

« 6° Les traitements nécessaires à la recherche... »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alex Turk, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de nature rédactionnelle.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 9, présenté par M. Türk, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après le sixième alinéa (5°) du II du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, insérer un alinéa rédigé comme suit :

« 5° bis Les traitements statistiques réalisés par l'Institut national de la statistique et des études économiques ou l'un des services statistiques ministériels dans le respect de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 modifiée sur l'obligation, la coordination et le secret en matière statistique, après avis du Conseil national de l'information statistique et dans les conditions prévues à l'article 25. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alex Turk, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir une exception supplémentaire à l'interdiction de procéder à des traitements statistiques de données.

Une autorisation de la CNIL sera nécessaire de toute manière, le contrôle sera assuré et cet assouplissement est nécessaire.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Cet amendement est très important pour l'INSEE et pour ses possibilités d'études statistiques et de recherches. On ne peut qu'y être très favorable.

M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote.

M. Robert Bret. Je suis favorable à cet amendement de la commission. Il serait selon moi utile de le compléter en indiquant que « les données recueillies ne peuvent être exploitées que dans le cadre de la mission de cet institut. »

Cette précision viendrait, me semble-t-il, clarifier et mieux encadrer le dispositif prévu par l'amendement de la commission. C'est pourquoi je dépose un sous-amendement en ce sens.

M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 128 à l'amendement n° 9 de la commission, présenté par M. Bret, et qui est aussi libellé :

« Compléter les texte de cet amendement par un membre de phrase ainsi rédigé : "cependant, les données recueillies ne peuvent être exploitées que dans le cadre de la mission de cet institut". »

Quel est l'avis de la commission ?

M. Alex Turk, rapporteur. Il me semble que nous devrions éviter de trop modifier le texte en séance, car cela rend le débat extrêmement complexe.

Cela dit, très sincèrement, j'ai le sentiment que cette précision ne soulève pas de difficulté puisque les données sont forcément recueillies à des fins exclusivement statistiques.

Je ne suis pas hostile à cette « ultraprécision » et je m'en remets à la sagesse du Sénat.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. C'est une tautologie juridique, mais je m'en remets à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 128.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote sur l'amendement n° 9.

M. Yves Fréville. Je me pose une question, mais, ne connaissant pas suffisamment le texte de loi, je ne sais si celle-ci est pertinente.

Je suis tout à fait d'accord avec le principe de cet amendement n° 9 qui permet des traitements statistiques par l'INSEE après avis du Centre national de l'information statistique, où je siège, mais je voudrais savoir si cette exception vaut également pour les organismes publics de recherche, en particulier pour l'INSERM, l'Institut national de la santé et de la recherche médical, qui a besoin de croiser des données.

Si cela est prévu dans un autre article, naturellement, mon observation est sans objet. Mais si l'INSERM ou le CNRS ne sont pas concernés par d'autres articles, je souhaiterais que, par un sous-amendement, soient ajoutés dans l'amendement n° 9, après les mots : « l'INSEE », les mots : « les organismes publics de recherche, ».

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Alex Turk, rapporteur. Je comprends bien la préoccupation de notre collègue M. Fréville. Je lui ferai remarquer simplement que, dans le texte tel qu'il est rédigé aujourd'hui, il s'agit de statistiques, ce qui ne concerne pas directement l'INSERM.

J'ajoute, monsieur Fréville, que les responsables de l'INSERM, notamment, ne nous ont jamais fait part de cette préoccupation et que la navette permettra de résoudre les problèmes qui apparaîtraient.

Cela dit, il s'agit là d'un problème que nous pourrons résoudre ultérieurement, puisque, je le répète, nous nous limitons ici à l'INSEE et aux services statistiques ministériels en tant que tels.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 10, présenté par M. Türk, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Après le dernier alinéa (6°) du II du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, insérer un paragraphe rédigé comme suit :

« II bis. - Si les données à caractère personnel visées au I de l'article 8 sont appelées à faire l'objet à bref délai d'un procédé d'anonymisation préalablement reconnu conforme aux dispositions de la présente loi par la Commission nationale de l'informatique et des libertés, celle-ci peut autoriser, compte tenu de leur finalité, certaines catégories de traitements. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Alex Turk, rapporteur. Nous en arrivons à la question de l'anonymisation dont nous avons déjà parlé à différentes reprises.

L'amendement prévoit une dérogation supplémentaire à l'interdiction de traitement des données sensibles.

Je précise que le procédé d'anonymisation doit avoir été validé par la CNIL - premier filtre - et que la CNIL doit donner une autorisation - second filtre. Nous sommes donc dans un système parfaitement encadré, mais qui permet, en même temps, et c'est l'un des points essentiels de ce texte, d'apporter des garanties supplémentaires sans freiner pour autant le développement du dispositif.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

M. Robert Bret. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 11, présenté par M. Türk, au nom de la commission, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le III du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés :

« III. - De même, ne sont pas soumis à l'interdiction prévue au I les traitements, automatisés ou non, justifiés par l'intérêt public et autorisés dans les conditions prévues au I de l'article 25 ou au II de l'article 26. »

L'amendement n° 89 rectifié, présenté par M. Seillier, est ainsi libellé :

« Compléter le III du texte proposé par cet article pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés par deux alinéas ainsi rédigés :

« En particulier, à l'exception des dispositions expressément prévues par la loi, l'anonymisation des décisions de justice est soumise, en vue notamment de leur diffusion gratuite par voie électronique, à l'appréciation de chaque juridiction compétente.

« Pour les décisions antérieures à la promulgation de la loi n° du relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel, il appartient à la Cour de cassation et au Conseil d'Etat de définir de façon limitative les décisions devant faire l'objet d'une anonymisation. »

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 11.

M. Alex Turk, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

M. le président. La parole est à M. Bernard Seillier, pour défendre l'amendement n° 89 rectifié.

M. Bernard Seillier. Dans le cadre du service public de la diffusion du droit par l'internet, notamment de la base Légifrance, que nous sommes certainement nombreux à utiliser dans cette assemblée, il a été décidé de diffuser gratuitement, parmi d'autres données juridiques, les décision des principales juridictions. Or la CNIL a recommandé que l'ensemble de cette jurisprudence soit anonymisé, tant pour le flux depuis le 15 septembre 2002 que pour le stock utilisable aujourd'hui : environ 450 000 décisions.

Cette disposition, outre qu'elle ne permet nullement de garantir aux citoyens susceptibles d'être concernés par une décision de justice, une véritable protection juridique - certaines sociétés privées ou étrangères ont, effet, la possibilité de présenter sur l'internet les mêmes décisions en contrepartie d'un paiement - entraînerait pour l'administration une charge financière considérable, évaluée à environ 1 million d'euros, au moment où celle-ci cherche, au contraire, à réaliser des économies budgétaires.

L'adoption de cet amendement permettrait de répondre aux recommandations de la CNIL dans de bonnes conditions. L'anonymisation serait donc désormais spécifiée au cas par cas par chaque instance de jugement et, pour le passé, réglée selon les décisions de la Cour de cassation et du Conseil d'Etat.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 89 rectifié ?

M. Alex Turk, rapporteur. Cet amendement soulève une véritable difficulté.

La commission comprend bien l'intérêt de la recommandation de la CNIL : au fond, elle tend à éviter que ne s'organise une sorte de casier judiciaire « parallèle ». Car, en utilisant des moteurs de recherche, il est possible de repérer un patronyme et d'aller rechercher la totalité du parcours de la personne intéressée dans l'ensemble des informations qui sont mises à disposition.

Néanmoins, cette recommandation de la CNIL emporte des conséquences lourdes et complexes, que l'amendement de notre collègue M. Seillier vise à prendre en compte.

La difficulté est la suivante : le secrétariat général du Gouvernement a fait connaître expressément à la Commission nationale de l'informatique et des libertés, au mois d'août dernier, sa décision de résoudre le problème dans le sens de la recommandation formulée par cette dernière. A partir du moment où le Gouvernement a autorisé la mise en place des moyens nécessaires à l'application de la recommandation de la CNIL, et puisque les deux parties semblent s'être mises d'accord, il est assez malvenu au rapporteur que je suis de suggérer une autre solution.

En outre, la formule proposée présenterait une certaine lourdeur.

Enfin, dans ce système, il appartiendrait à chacune des juridictions de décider si nous sommes ou non dans le cas de l'anonymisation. Dès lors, un problème se pose : dans un cas, une certaine protection serait assurée à l'égard de la vie privée et, dans l'autre, il n'y aurait aucune protection. Et, au hasard des décisions des juges, une personne pourrait être réintégrée et retrouvée par un moteur de recherche, une autre ne le serait pas.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je souhaiterais que M. Seillier retire l'amendement n° 89 rectifié plutôt que d'émettre un avis défavorable dans la mesure où j'ai bien conscience qu'il pose une vraie question. Toutefois, la réponse suggérée ne me semble pas la bonne.

En vérité, il nous faut réfléchir de nouveau à l'obligation de diffusion de la décision, puis à l'anonymisation de cette décision.

A partir du moment où cette anonymisation systématique centralisée est impossible à mettre en place et que le fait de laisser à chaque juridiction le soin d'en décider soulèvera des difficultés, comme le soulignait M. le rapporteur, nous devons poser le problème dans son ensemble.

Je vous invite donc à engager cette réflexion. De mon côté, je suis prêt à examiner cette question, qui est très complexe, avec mes autres collègues.

La réponse qu'apporte cet amendement n'est pas satisfaisante et il faut réfléchir en amont s'agissant à la fois de la diffusion de ce type d'information et de son éventuelle anonymisation.

M. le président. L'amendement n° 89 rectifié est-il maintenu, monsieur Seillier ?

M. Bernard Seillier. Je le retire, monsieur le président.

Toutefois, après les explications fournies tant par M. le rapporteur que par M. le ministre sur la prise en compte de cette réalité, je voudrais faire observer que certaines juridictions prévoient la publication du jugement dans certains organes de presse. Dès lors, nous nous trouverions dans une situation paradoxale, puisque l'anonymisation serait finalement contraire au contenu de la décision de justice. La question est donc plus complexe encore que ne l'a appréciée M. le ministre à l'instant.

Par ailleurs, tout le monde le sait, le mieux est l'ennemi du bien. Il serait donc regrettable qu'en raison du coût de cette opération pour le service de Légifrance, que j'apprécie beaucoup et que j'utilise quasi quotidiennement, on observe une réaction de retrait de la jurisprudence en ligne pour éviter ce coût.

Si, au contraire, ce service est mis en oeuvre pour satisfaire les conditions posées par la CNIL - et chacun sait ici le souci que je porte aux personnes qui se trouvent dans une situation précaire au sein du Conseil national de lutte contre l'exclusion - s'agissant des arbitrages budgétaires, un million d'euros serait mieux placé dans des mesures protectrices des personnes que dans un dispositif relatif à l'anonymisation des jugements.

M. le président. L'amendement n° 89 rectifié est retiré.

La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote sur l'amendement n° 11.

M. Robert Bret. La rédaction retenue par l'Assemblée nationale, à savoir « Lorsque l'intérêt public l'impose », était beaucoup plus contraignante. J'ai une nette préférence pour cette rédaction. C'est la raison pour laquelle je ne voterai pas cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978.

(Ce texte est adopté.)