SEANCE DU 26 NOVEMBRE 2002
M. le président.
« Art. 23
bis.
- I. - Dans le deuxième alinéa de l'article 51 de la loi
n° 47-520 du 21 mars 1947 relative à diverses dispositions d'ordre financier,
après les mots : "Fonds national pour le développement des adductions d'eau",
sont insérés les mots : "sauf en 2003".
« II. - Pour 2003, la part du prélèvement prévu par l'article 51 de la loi n°
47-520 du 21 mars 1947 précitée, affectée au budget général, est relevée à due
concurrence. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-55, est présenté par MM. Oudin, Bourdin, Détraigne, Doublet,
Frécon, Hérisson et Vasselle.
L'amendement n° I-90 est présenté par MM. Miquel, Massion, Moreigne, Sergent,
Demerliat, Charasse, Lise, Haut, Marc, Angels, Auban et les membres du groupe
socialiste et rattachée.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
La parole est à M. Michel Doublet, pour présenter l'amendement n° I-55.
M. Michel Doublet.
L'article 23
bis
supprime l'affectation d'une partie des recettes du
Pari mutuel urbain au Fonds national de développement des adductions d'eau,
FNDAE. Ce fonds constitue la deuxième section du Fonds national de l'eau,
compte spécial du Trésor, institué par l'article 58 de la loi n° 99-1172 du 30
décembre 1999.
Certes, en vertu de l'article 21 de la loi organique du 1er août 2001, les
recettes du Pari mutuel urbain ne pourront plus abonder les crédits du FNDAE à
compter de 2006. En effet, les comptes d'affectation spéciale devront être
alimentés au moyen de recettes particulières, par nature en relation directe
avec les dépenses concernées.
Toutefois, d'ici à 2006, le FNDAE aura permis de soutenir les efforts
entrepris par les petites communes dans le domaine de l'eau et de
l'assainissement, pour autant que ses recettes ne se trouvent pas réduites de
moitié.
Outil de solidarité unique, le FNDAE, créé en 1954, a pour objet d'aider les
communes rurales à se doter d'une alimentation en eau de qualité, à un prix
comparable à celui qui est pratiqué dans les grandes villes. Son domaine
d'intervention a été élargi à l'assainissement en 1979.
Il est alimenté, d'une part, à concurrence de 53 % par une redevance sur les
consommations d'eau distribuée dans toutes les communes bénéficiant d'une
distribution publique d'eau potable et, d'autre part, à 47 % par un prélèvement
sur les sommes engagées au Pari mutuel urbain.
De plus, il a un rôle de péréquation entre le monde rural et le milieu urbain,
rôle plus que jamais nécessaire.
Si l'écart observé entre le milieu rural et les zones urbaines est aujourd'hui
plus faible que par le passé, le retard des communes rurales risque néanmoins
de s'accroître du fait des nouvelles exigences imposées par les directives
européennes dans le domaine de l'eau.
Il faut noter par ailleurs un détournement de la mission première du fonds
sans augmentation correspondante des crédits.
Depuis la loi de finances de 1997, le FNDAE contribuée annuellement, à
concurrence de 150 millions de francs, au financement du programme de maîtrise
des pollutions d'origine agricole, le PMPOA. La réalisation de ce programme
doit se prolonger jusqu'en 2006. En outre, dès 2003, cette contribution sera
revue à la hausse, voire doublée.
Cette intervention s'opère malheureusement au détriment de l'aide aux communes
dans le domaine de l'eau potable et de l'assainissement.
Or l'efficacité de ce fonds va considérablement s'améliorer.
Conscients de la nécessité d'en parfaire l'efficacité et d'optimiser
l'utilisation des crédits, les pouvoirs publics ont en effet engagé une
réorientation du FNDAE dans trois directions : en généralisant les conventions
entre l'Etat et les départements, en subordonnant le montant des dotations à la
mise en place de schémas directeurs et en privilégiant l'amélioration de la
qualité de l'eau distribuée.
L'objet du présent amendement est de soutenir l'action du FNDAE en maintenant
les recettes dont il doit disposer pour aider efficacement les communes rurales
dans le domaine de l'eau et de l'assainissement.
M. Alain Vasselle.
Très bon amendement !
M. le président.
La parole est à M. Gérard Miquel, pour présenter l'amendement n° I-90.
M. Gérard Miquel.
Cet amendement vise à maintenir en faveur du fonds national pour le
développement des adductions d'eau le prélèvement sur les recettes du Pari
mutuel urbain de 65 millions d'euros. Je rappelle que l'article 23
bis
prévoit d'affecter ce prélèvement au budget de l'Etat.
Cette suppression de ressources est injustifiée compte tenu des charges qui
pèsent sur les collectivités locales en matière d'adduction d'eau, en
augmentation constante sous la pression d'une réglementation de plus en plus
contraignante.
Le rapport général de la commission des finances indique que le fonds dispose
de reports importants, évalués à 212 millions d'euros en 2002. Toutefois, il
précise que cette sous-consommation des crédits provient d'un dysfonctionnement
dans les délégations de crédits aux collectivités locales. Aussi, le fait
d'amoindrir les ressources du fonds national pour le développement des
adductions d'eau en 2003 nous apparaît comme une solution de facilité
défavorable aux collectivités locales, qui ont besoin d'être aidées en matière
d'adduction d'eau.
Nous proposons donc, par l'amendement n° I-90, de maintenir les affectations
de recettes au Fonds en 2003 tout en invitant parallèlement le Gouvernement à
améliorer les procédures de délégation de crédits.
Cela nous semble une bonne méthode, car elle est respectueuse de l'intérêt des
collectivités locales. Or, je sais, monsieur le ministre, que vous êtes, tout
comme nous, soucieux de l'intérêt des collectivités locales.
Sur ces deux amendements qui poursuivront le même objectif et qui proviennent
l'un de l'opposition, l'autre de la majorité, je ne comprendrais pas que vous
n'émettiez pas un avis favorable.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Nous sommes donc saisis de deux
amendements identiques visant à la suppression de l'article 23
bis
.
Cet article 23
bis
prévoit que, pour l'exercice 2003, le prélèvement
non fiscal opéré sur les sommes engagées au titre du PMU ne sera pas attribué
au FNDAE.
Pourquoi l'Assemblée nationale a-t-elle adopté cet article additionnel ?
C'est sur l'initiative de M. Gilles Carrez, rapporteur général du budget à
l'Assemblée nationale, que cette mesure a été prise. M. Carrez a relevé, et on
ne peut franchement pas lui donner tort, la croissance régulière depuis 1999
des reports de crédit sur le FNDAE. Ces reports de crédit sont passés de 148
millions d'euros en 1999 à 214,41 millions d'euros en 2002. Ils progressent de
20 millions à 30 millions d'euros chaque année. Ils résultent en effet, avant
tout, d'une délégation tardive, chaque année, par le FNDAE, des crédits aux
collectivités locales.
J'ai un peu de peine à comprendre la mécanique du système. Qui est responsable
de cette délégation tardive ? Les services de l'Etat ? Si oui, quels services
de l'Etat ? Est-ce un problème comptable, est-ce un problème de maîtrise
d'ouvrage, un problème technique ? Il faudrait pouvoir décortiquer les
procédures pour mieux comprendre ce qui se passe.
Est-ce faute de projet de la part des collectivités territoriales ?
M. Paul Loridant.
Cela, certainement pas !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je pose toutes ces questions, car l'expérience prouve
que la réalité des choses ne correspond pas toujours à l'idée que l'on s'en
fait.
Est-ce faute de projets susceptibles d'être financés, c'est-à-dire
suffisamment étudiés techniquement, évalués financièrement, afin d'être menés à
bien ? Est-ce un problème de maîtrise d'ouvrage ? Est-ce un problème de
concours des services de l'Etat ? En d'autres termes, les directions
départementales de l'agriculture font-elles correctement leur travail, elles
qui sont chargées d'encadrer ces travaux, de conseiller les collectivités et
d'assister les maîtres d'ouvrage ?
Finalement, l'accumulation des reports peut-elle s'expliquer par des
difficultés de cette nature ? Je ne le sais pas, car je ne dispose pas des
éléments d'information qui me permettraient de porter une appréciation vraiment
fondée sur ce sujet.
En revanche, la croissance régulière des reports est incontestable. Aussi,
lorsque je vois le ministre du budget faire la chasse à l'argent non consommé
et aux reports de toute nature, je ne peux pas m'inscrire en faux contre les
affirmations de l'Assemblée nationale et contester l'initiative prise par
Gilles Carrez.
Je rappellerai en outre que le prélèvement sur le produit du PMU, qui
représente 65 millions d'euros, ne constitue pas la seule ressource du FNDAE.
En effet, pour 2003 comme pour 2002, deux lignes d'alimentation sont prévues,
dont l'une comprend le produit de la redevance sur les consommations d'eau,
soit le produit de ce qui figure sur toutes les factures d'eau reçues par les
consommateurs, qui représente un montant de 77 millions d'euros.
En 2002, à cette somme de 77 millions d'euros s'ajoutait le prélèvement sur le
produit du PMU pour 65 millions d'euros.
Tout cela a abouti, semble-t-il, à un montant de crédits non consommés, dont
le report sur 2003 de ses atteindra 214,41 millions d'euros. Aussi, mes chers
collègues, si je calcule bien - je parle sous le contrôle du ministre et de ces
services - en 2003, le FNDAE disposera de 77 millions d'euros, auxquels
s'ajouteront 214 millions d'euros, soit un total de l'ordre de 290 millions
d'euros, alors que ce fonds consomme chaque année beaucoup moins que ce qui lui
est alloué.
Ce montant de 290 millions d'euros est, me semble-t-il, largement suffisant
pour financer les projets susceptibles d'être présentés dans chacun de nos
départements. Je pense, en particulier, à l'un des plus dynamiques d'entre eux,
le beau département de la Charente-Maritime, qui est représenté par Michel
Doublet et qui a, je le sais, des projets importants à financer sur son
territoire.
Je voudrais donc que M. le ministre nous donne son avis et nous rassure, car
le Sénat est traditionnellement très attentif au FNDAE. Il est clair que
l'adduction d'eau en milieu rural représente un enjeu important, et nous y
sommes naturellement très sensibles.
Telles sont, mes chers collègues, les quelques considérations préalables que
je voulais formuler. Après avoir entendu l'avis de M. le ministre, je vous
donnerai celui de la commission.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
Mesdames,
messieurs les sénateurs, c'est l'Assemblée nationale qui a décidé d'introduire
cette suppression de l'affectation du prélèvement du PMU au FNDAE pour 2003.
Comme M. le rapporteur général l'a dit à l'instant, cette décision est liée au
fait que les montants de reports de crédits résultant de non-consommations tout
à fait récurrentes sont très importants.
La disposition votée par l'Assemblée nationale ne remet absolument pas en
cause les missions qui sont dévolues au FNDAE, compte tenu des reports de
crédits disponibles et du produit de la redevance sur la consommation d'eau
pour 2003, comme en témoignent les chiffres cités à l'instant par M. le
rapporteur général.
Même si cette disposition a été introduite par l'Assemblée nationale, je
voudrais, mesdames, messieurs les sénateurs, vous faire part de mes convictions
profondes sur ce sujet. Il nous faut enfin sortir des budgets en affichage pour
en arriver aux budgets en résultats. Permettez-moi de vous démontrer par deux
chiffres que les pouvoirs de la représentation du peuple français sont
extraordinairement inférieurs à ceux des administrations publiques.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Absolument !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
La marge de manoeuvre dont dispose le nouveau
gouvernement qui a pris ses fonctions voilà six mois est, pour 2003, d'environ
2 milliards d'euros alors que le montant des reports de l'ensemble des
administrations relevant du budget de l'Etat atteint 14 milliards d'euros !
Dès lors, si vous voulez que la discussion budgétaire se limite au vote de
l'impôt, à l'attribution ou à la reconduction de tel ou tel crédit, c'est la
fin de la démocratie parlementaire.
Interrogez-vous plutôt sur les reports qui s'accumulent d'année en année, sans
aucune relation avec l'exécution.
C'est la raison pour laquelle je ne me suis pas opposé à cet amendement,
déposé à l'Assemblée nationale, qui s'inscrit dans cette démarche de vérité
budgétaire que nous avons tant souhaitée dans la Haute Assemblée et qui
consiste à faire en sorte que l'autorisation parlementaire donne lieu à une
véritable exécution mesurable par les parlementaires. En tout cas, je peux
prendre devant vous l'engagement qu'il ne manquera pas un euro pour la
réalisation des travaux que vous souhaitez conduire dans vos départements ; et
le mien n'est pas moins rural que les vôtres. Il faut simplement que tous les
gestionnaires de fonds de notre pays sachent que le Parlement ne vote pas les
yeux fermés des moyens dont l'utilisation n'est jamais vérifiée. Il n'y a donc
pas lieu de s'inquiéter de la situation.
La Cour des comptes elle-même s'était inquiétée du phénomène. Pour mar part,
je n'aurais pas évoqué le cas du FNDAE, si les dotations de ce fonds n'avaient
pas fait l'objet d'un amendement. Mais je suis prêt à reformuler la même
argumentation à propos de n'importe quel autre fonds qui poserait le même
problème.
Lors de l'examen de la seconde partie du présent projet de loi de finances,
certains de mes collègues ministres regretteront peut-être de ne pas se voir
attribuer des crédits plus importants, alors qu'ils disposent de reports non
négligeables, tout simplement parce que leurs services leur auront dit que les
crédits de leur ministère n'ont pas, cette année, été abondés de 1,7 % ou de 2
%. A ce moment-là, je pense qu'il sera de l'honneur du Sénat, assemblée qui
veille sur les prérogatives de la représentation du peuple français, de faire
en sorte que les administrations sachent qu'un euro est un euro et qu'il doit
être employé dans les meilleures conditions.
S'agissant du FNDAE, la Cour des comptes indique qu'il se caractérise par une
situation financière structurellement excédentaire. Depuis le milieu des années
quatre-vingt-dix - et la Cour précise qu'elle le signale en permanence -, le
taux de consommation effective des crédits est faible : 70 % en 1995, 50 % en
2000. Elle ajoute que les crédits qui sont délégués au niveau départemental ne
sont toujours engagés que très tardivement.
Par ailleurs, la répartition à l'échelon central des enveloppes
départementales ne repose pas sur des besoins réels et immédiats au niveau
local. La tâche consiste donc, mesdames, messieurs les sénateurs, à effectuer
un contrôle sur le fonctionnement de la chaîne de décision entre l'échelon
central et l'échelon local, afin de déterminer les causes des problèmes
constatés.
En tout état de cause, je vous le dis avec passion parce que j'ai eu
l'honneur, grâce à votre confiance, de défendre les prérogatives du Parlement
en matière budgétaire, je voudrais que nous cessions d'être, en quelque sorte,
les greffiers purs et simples de nos administrations. Nos administrations, que
je respecte hautement, doivent tout de même savoir qu'il y a des femmes et des
hommes qui se sont soumis au vote de leurs compatriotes pour les représenter et
qui sont l'expression du peuple souverain : nous n'avons pas à être
exclusivement les porte-parole de nos administrations.
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
C'est ce qui me conduit à demander avec force et conviction le retrait de ces
amendements et, à défaut, leur rejet.
M. le président.
Monsieur Doublet, l'amendement n° I-55 est-il maintenu ?
M. Michel Doublet.
Je comprends parfaitement la position de M. le ministre et de M. le rapporteur
général, mais je suis un peu surpris de ces reliquats importants.
En effet, en Charente-Maritime, nous demandons depuis un certain nombre
d'années des crédits relativement importants, mais ce qui nous est accordé est
limité à 20 millions de francs. Encore obtenons-nous une rallonge de 20 % parce
que nous sommes « bons élèves » et que nous consommons l'intégralité de ce qui
nous est alloué.
Je précise que, en Charente-Maritime, nous n'avons aucun retard : j'ai mis au
point hier la programmation pour 2003. La participation du département est
importante mais, en ce qui concerne le FNDAE, nous ne savons pas encore si
l'enveloppe sera du même ordre que l'année dernière, d'autant qu'un certain
nombre de communes rurales qui étaient éligibles ne figurent plus dans la
programmation : l'enveloppe risque donc d'être réduite de 50 %. J'en ai
évidemment tenu compte dans mes calculs.
Monsieur le ministre, vous venez de dire que tous les projets importants
seraient menés à bien. Dieu sait si, en Charente-Maritime, nous avons des
projets très importants ! Ce sont même des projets vitaux puisqu'il s'agit de
la distribution d'eau potable et que la construction d'une usine est prévue.
Aujourd'hui, avec une aide de l'agence de bassin à hauteur de 10 % et la
contribution du département, le syndicat que je préside n'a pas les moyens de
financer cette usine, dans la mesure où, d'après ce qu'on m'avait dit, le FNDAE
ne participerait pas au financement.
Si vous m'assurez aujourd'hui, monsieur le ministre, que le FNDAE apportera
son concours aux grands projets à un niveau convenable, je reverrai ma
position. Mais je voudrais que vous me confirmiez que nous pourrons recevoir
ces crédits pour des ouvrages structurants qui sont indispensables.
M. le président.
La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle.
J'ai écouté avec beaucoup d'attention ce qui a été dit par M. le rapporteur
général et par M. le ministre. Du point de vue de la bonne gestion, ils ont
indiscutablement raison.
Nous sommes ici un certain nombre à nous trouver à la tête de collectivités
territoriales et nous veillons à ce que les crédits votés soient consommés à 90
ou 95 %, afin d'éviter les reports d'année en année, car les crédits non
consommés représentent autant d'argent qui n'est pas réinjecté dans l'économie
et des besoins qui ne sont pas satisfaits.
M. le rapporteur général a posé les bonnes questions, et j'ai cru comprendre
qu'elles étaient relayées par M. le ministre. Il s'agit effectivement
d'analyser l'ensemble de la chaîne entre les crédits votés et le niveau de
consommation de ces crédits, afin d'essayer de déterminer l'origine des retards
qui sont constatés.
Monsieur le ministre, vous avez été rapporteur général, puis président de la
commission des finances : vous êtes donc bien placé pour savoir que les
remarques qui sont formulées aujourd'hui le sont en fait depuis longtemps.
Certes, nous n'avions pas la responsabilité du pouvoir entre 1997 et 2002,
mais ces reports ne datent pas d'aujourd'hui.
Monsieur le ministre, vous avez sans aucun doute la volonté de sortir de cette
situation. La question reste de savoir si vous en avez les moyens. Pouvez-vous
nous assurer que, lorsque nous examinerons le projet de loi de finances pour
2004, nous ne nous retrouverons pas dans la situation actuelle ? Aurez-vous le
temps et les moyens suffisants pour « détricoter » les difficultés qui sont à
l'origine de cette non-consommation des crédits ?
Pourquoi, en effet, voter des crédits supplémentaires si l'on sait par avance
qu'ils ne seront pas consommés au cours de l'exercice considéré ?
Cela étant, je crois utile d'appeler votre attention sur les difficultés que
nous rencontrons souvent en matière de délégation de crédits. Il n'y a pas que
ceux du FNDAE : je pense aussi, par exemple, à la DGE. Les crédits alloués au
titre de la DGE ne sont parfois notifiés en préfecture qu'au début de l'été et
les subventions ne sont effectivement versées aux communes qu'en septembre ou
octobre. Comment s'étonner, dès lors, que les crédits en question ne soient pas
consommés et reportés sur l'exercice suivant ? Et c'est en vertu de cette
non-consommation des crédits qu'on réduit l'enveloppe de DGE !
Hélas ! cela est vrai pour de nombreux crédits : ils sont inscrits en loi de
finances, mais ils ne peuvent être consommés à la hauteur qui serait
souhaitable.
Je reviens au FNDAE, monsieur le ministre, pour évoquer une particularité que
je vous invite à étudier. Vous qui avez été sénateur d'un département rural et
agricole, vous comprendrez certainement le problème que nous rencontrons, nous
qui sommes maires d'une commune rurale.
Aujourd'hui, même si nous cumulons les concours financiers de nos partenaires
- l'agence de bassin, le département, parfois la région, mais ce n'est pas le
cas de la Picardie -, il ne nous est pas toujours possible de mettre en oeuvre
un projet d'assainissement, par exemple, tout simplement parce que la somme des
diverses contributions n'est pas suffisante.
Ainsi, dans ma propre commune, qui ne compte que 183 habitants, étant donné la
somme des concours financiers que je peux attendre de l'agence de bassin,
éventuellement du conseil général ou du FNDAE, si je veux mettre en oeuvre
l'assainissement collectif - je n'ai pas d'autre choix parce que mon village se
situe sur une terre argileuse -, le prix de l'eau devra être compris entre 90
et 120 francs le mètre cube !
Quel est le maire qui, aujourd'hui, prendra la responsabilité d'engager des
travaux de cette nature pour demander ensuite aux consommateurs d'eau de payer
90 francs le mètre cube ? Sachant que la consommation moyenne est de 120 mètres
cubes par foyer, cela représente une facture annuelle de plus de 10 000 francs,
c'est-à-dire deux à trois fois le montant de la taxe d'habitation : cela
devient insupportable ! On s'achemine vers des impayés considérables ! Et
s'ajoutent à cela le problème des ordures ménagères et bien d'autres encore
!
Certains maires se trouvent ajourd'hui dans une situation impossible, car ils
n'arrivent tout simplement plus à boucler leur budget.
Je dirai pour conclure que, si nous avons au moins l'assurance que les crédits
que nous allons voter seront effectivement consommés à concurrence de 90 % ou
95 %, nous pourrons, l'année prochaine, abonder le FNDAE à nouveau avec les
ressources du PMU, de manière à obtenir un niveau de crédits au moins égal à ce
qu'il aurait été avec la taxe sur l'eau et le prélèvement sur le PMU. Dès lors,
je n'aurai aucune raison de mettre le Gouvernement en difficulté et de
maintenir mon amendement. Je demande seulement pour cela, vous le comprendrez,
monsieur le ministre, que nous recevions un minimum d'assurances.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je voudrais tout d'abord me réjouir que ce débat ait
lieu et remercier à nouveau MM. Michel Doublet et Gérard Miquel d'avoir bien
posé ce problème.
En réalité, ce qui est ici en question, avec cette sorte d'incompréhension
entre le niveau central et le niveau local, c'est une affaire de
décentralisation. Au niveau central, le Parlement vote des crédits, mais on
observe
ex post
que ces crédits ne sont pas dépensés au rythme
souhaité.
Il semble bien qu'il y ait, si j'ose dire, de la « friture sur la ligne » ou
des aspérités qui viennent entraver le flux. Mais je veux être plus précis.
Les services de l'Etat ont, dans chaque département, pour mission d'assister
les maîtres d'ouvrage et, à ce titre, ils jouent à la fois un rôle de
prescripteur et un rôle d'accompagnant.
En tant que prescripteur, ils définissent le type de solution technique à
mettre en oeuvre, le type de matériel à utiliser. Ainsi, dans le département
qui nous est commun, à M. Alain Vasselle et à moi-même, ce sont les services de
l'Etat qui insistent toujours pour que, en matière d'assainissement, des
solutions collectives techniquement lourdes, et particulièrement onéreuses,
soient retenues, alors que, dans certaines petites communes rurales, des
solutions plus souples et moins coûteuses pourraient être mises en oeuvre.
Lorsqu'on suit le cheminement des dossiers, on se rend compte que, en règle
générale, les services techniques de l'Etat ont tendance à privilégier les
solutions les plus lourdes et les plus chères, tout en expliquant sans cesse
aux élus que c'est leur responsabilité qui est en jeu, que, s'ils ne prennent
pas la décision qu'on leur recommande, ils ne se mettront pas en conformité
avec les normes, prenant des risques susceptibles de les conduire on ne sait où
!
Monsieur le ministre, il s'agit bien là d'une question de décentralisation. Le
Parlement, notamment par la voix du Sénat, veut que l'assainissement et
l'adduction d'eau dans les communes rurales soient une vraie priorité. Nous
sommes face à un réel problème de solvabilité des communes rurales, mais,
techniquement, nous ne sommes pas sûrs que l'intendance suive.
Peut-être faudrait-il en tirer les conséquences dans le cadre de l'exercice de
décentralisation auquel nous convie actuellement le Premier ministre. Peut-être
faudrait-il - c'est une suggestion que je formule, une piste que j'essaie
d'ouvrir - que, dans ce domaine, on s'interroge sur une possibilité
d'expérimentation. Ne conviendrait-il pas, en la matière, de regrouper les
compétences et d'appliquer le principe de subsidiarité ?
En vérité, se trouve ici soulevé le problème de la pertinence de la tutelle
technique et financière des services de l'Etat vis-à-vis de certaines
catégories de collectivités territoriales, en l'occurrence les plus faibles
d'entre elles.
Au demeurant, pour qu'on y voie plus clair, la commission des finances, si son
président en est d'accord, pourrait apporter sa contribution. Pourquoi ne
demanderions-nous pas à notre rapporteur spécial du budget de l'agriculture,
Joël Bourdin, d'étudier la dévolution de ces crédits, de chercher, comme l'a
suggéré Alain Vasselle, ce qui fait obstacle à une délégation des crédits à un
rythme et dans des délais acceptables ?
Dans le programme de contrôle de la commission des finances que les
rapporteurs spéciaux sont en mesure de mener, si M. le président Arthuis le
veut bien, nous pourrions recommander que soit effectué un examen de cette
procédure de délégation de crédits, de façon que l'on sache où se situent, en
la matière, les responsabilités.
Mes chers collègues, sous le bénéfice de ces observations, nous devons, me
semble-t-il, nous en tenir à ce qui a été préconisé par le ministre, à savoir
ne pas voter des budgets d'affichage, ne pas voter des crédits qui n'ont pas de
réalité et ne pas être dupes d'un système dans lequel on voudrait nous
enfermer.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Pierre Hérisson, pour explication de vote.
M. Pierre Hérisson.
Notre collègue Alain Vasselle a bien montré ce qui se passe dans le milieu
rural en matière d'adduction d'eau et d'assainissement.
Cela étant, monsieur le ministre, je suivrai votre proposition, car il est
démontré que les crédits non consommés sont supérieurs aux crédits annuels à
utiliser dans le cadre du FNDAE. Mais cela ne vaut que pour cette année.
Il s'agit, en effet, d'une mesure d'ordre général consistant, en quelque
sorte, à infliger une sanction dès lors qu'il y a sous-consommation des
crédits.
Nous connaissons déjà l'exemple des crédits européens, dont la
sous-utilisation entraîne une sanction. Nous connaissons aussi ce type de
dysfonctionnement et de sous-utilisation des crédits avec l'ADEME, l'Agence de
l'environnement et de la maîtrise de l'énergie : depuis un certain nombre
d'années, on passe d'un fort excédent à l'impossibilité de financer les projets
qui sont proposés.
Je suis élu dans un département qui, depuis plus de dix ans, souffre d'un
ralentissement, voire de restrictions dans la mise en oeuvre de ses projets au
motif que les collectivités souhaitent conserver la totalité du financement
provenant du FNDAE et que, malheureusement, l'enveloppe annuelle proposée pour
le département est insuffisante par rapport à l'ensemble des programmes qui
sont recensés.
Ne serait-il pas possible, en fonction de la dynamique des besoins, variable
selon les départements, ou du retard à rattraper en matière d'assainissement
sur tel ou tel point du territoire, d'introduire de la souplesse dans
l'utilisation des crédits en cours d'exercice, de manière que les crédits non
utilisés dans un département ou dans une région puissent être utilisés dans un
autre département ou dans une autre région ? Ainsi y aurait-il, en quelque
sorte, une prime à ceux qui sont plus efficaces en termes d'aménagement du
territoire.
En effet, aujourd'hui, dans la mesure où les services déconcentrés ne prennent
pas en compte une sorte de
surbooking,
nous n'aboutissons qu'à des taux
compris entre 60 % et 80 % en matière de consommation des crédits, d'autant que
les projets d'utilité publique sont parfois retardés par des recours devant la
juridiction administrative.
Il y a donc une logique à ce que les services de l'Etat dans les départements
acceptent d'inscrire sur un exercice un montant supérieur à ce qui sera
effectivement réalisé en cours d'année.
Par conséquent, il est nécessaire d'assouplir le système ou de donner en début
d'année une délégation pour l'utilisation d'une ligne de crédits. Ce serait une
solution pour sortir du véritable casse-tête auquel nous sommes confrontés
lorsqu'il s'agit, au cours d'un même exercice, d'obtenir l'accord et de
réaliser les travaux de manière à consommer les crédits.
M. le président.
La parole est à M. Paul Loridant, pour explication de vote.
M. Paul Loridant.
Je voudrais m'exprimer ici à titre personnel et rappeler notamment à M. le
rapporteur général que le rapporteur des comptes spéciaux du Trésor que je suis
a déjà pointé ce problème depuis deux ou trois ans. Par conséquent, mes chers
collègues, je crains que vous ne découvriez aujourd'hui, à l'occasion de cet
amendement, l'eau chaude !
Les observations qu'ont faites M. Vasselle et M. le rapporteur général
figuraient dans le rapport des comptes spéciaux du Trésor l'an passé, il y a
deux ans et peut-être même - il faut que je vérifie - voilà trois ans.
Je souscris à vos remarques, monsieur le rapporteur général, monsieur le
ministre et je trouve effectivement anormal que des crédits attribués à des
administrations, qu'il s'agisse des administrations déconcentrées ou des
administrations territoriales, ne soient pas consommés. Au demeurant, comme l'a
dit l'un d'entre nous, en tant que maire ou président d'un conseil général,
nous veillons à ne pas reconduire les crédits lorsqu'ils sont systématiquement
reportés.
Le rapporteur des comptes spéciaux du Trésor est donc tout à fait en capacité
- cela fait partie de ses attributions - de voir comment fonctionne le
FNDAE.
M. Jean-Pierre Masseret.
Tout à fait !
M. Paul Loridant.
M'adressant maintenant à la majorité sénatoriale, je voudrais bien qu'elle
fasse preuve de cohérence.
(Exclamations sur les travées du RPR.)
En
effet, vous ne pouvez pas dénoncer cette pratique à l'occasion du FNDAE et ne
rien dire sur le budget de la recherche ou sur d'autres budgets.
M. Alain Vasselle.
A chaque jour suffit sa peine !
M. Paul Loridant.
Je peux certes partager avec vous le souci d'une meilleure gestion des crédits
de l'Etat et veiller à limiter les reports de crédit systématiques ; encore
faut-il, lorsque l'on fait des remarques, qu'elles s'appliquent dans tous les
domaines et qu'elles ne soient pas à géométrie variable, selon les budgets et
selon ce qui vous arrange.
M. Alain Vasselle.
C'est un procès d'intention !
M. Jean-Pierre Masseret.
Tout à fait !
M. Paul Loridant.
Etant moi-même vice-président du syndicat intercommunal pour l'aménagement
hydraulique de la vallée de l'Yvette - cela vaut bien les eaux de l'Oise,
monsieur Vasselle, monsieur le rapporteur général ! -, je connais le problème,
à savoir que les collectivités locales membres des syndicats demandent une
multitude de crédits pour exécuter des travaux qu'il faut étaler faute de
recevoir à temps les crédits demandés du FNDEA.
Face à ce léger dysfonctionnement des services de l'Etat ou d'autres services,
peut-être le Parlement pourrait-il exercer ses fonctions de contrôle.
Je souscris à la suggestion de M. le rapporteur général qu'un certain nombre
d'entre nous se rendent dans l'Oise - et je veux bien y accompagner M. le
rapporteur spécial du budget de l'agriculture - pour y effectuer, dans le cadre
d'une mission commune, un contrôle sur pièces et sur place. Je ne doute pas que
les sénateurs de l'Oise accueilleront avec bonheur leurs collègues rapporteurs
spéciaux !
M. Alain Vasselle.
Avec plaisir !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je suis prêt à vous accueillir dans l'Oise ! Ce sera
très convivial !
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
La priorité pour 2003, que nous sommes invités
par M. le ministre délégué au budget à soutenir, sera le contrôle de
l'exécution budgétaire.
Je veillerai à ce que les moyens soient donnés aux rapporteurs spéciaux des
crédits de l'agriculture et des comptes spéciaux du Trésor pour « traquer » les
crédits et observer ce qui s'accomplit entre leur inscription au budget, leur
vote par le Parlement et leur mise en oeuvre sur le terrain.
Nous verrons alors s'il y a de la « viscosité dans les canalisations »
(Sourires)
et nous tâcherons de comprendre les raisons de ce décalage
entre l'inscription des crédits, leur vote et leur consommation.
Nous devrons également chercher à savoir si, dans toutes les communes de
France, y compris celles qui ne comptent que quelques dizaines d'habitants, il
est opportun d'installer des assainissements collectifs dont le coût est
absolument exorbitant.
M. Bruno Sido.
Absolument !
M. Jean Arthuis,
président de la commission.
Peut-être pourrait-on, dans ces cas-là,
expérimenter des solutions appropriées infiniment moins coûteuses sans pour
autant écarter les subventions publiques au motif qu'il ne s'agirait pas
d'assainissement collectif.
C'est sur ce point, sans doute, que le politique doit s'impliquer et assumer
pleinement sa responsabilité. J'ai la conviction que d'importantes économies
seront réalisées si nous admettons le principe du subventionnement des
assainissements individuels en remplacement du subventionnement de
l'assainissement collectif.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il s'agit là
d'un débat de fond très important.
L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques
m'a chargé d'effectuer un travail sur la qualité de l'eau et de
l'assainissement en France dont je présenterai les conclusions à la fin du mois
de janvier.
Depuis un an, j'ai parcouru notre pays et j'ai auditionné un grand nombre
d'experts ainsi que d'élus. J'en suis parvenu à la conclusion que la situation,
dans notre pays, était critique. Nous allons devoir mettre aux normes nos
installations, notamment dans le domaine de l'assainissement, mais sans aller
jusqu'aux petites communes. Ainsi, les 340 communes que compte mon département
ne relèvent pas toutes, bien entendu, d'un assainissement collectif et je
partage, à cet égard, l'analyse de M. Arthuis.
Mais nous devons aujourd'hui nous mettre aux normes en matière d'eau potable.
Les problèmes de nitrates, de pesticides nécessitent des installations très
coûteuses.
Les collectivités doivent réaliser des investissements très lourds qui vont
provoquer une augmentation du prix de l'eau. Dans chacun de nos départements,
nous sommes obligés d'étaler sur plusieurs années nos programmes de
financement, car les crédits dont nous disposons sont insuffisants pour nous
permettre de faire face à de tels investissements. Où est le blocage ?
Quand j'interroge la direction départementale de l'agriculture, elle reconnaît
disposer d'une enveloppe qui lui permet de ne financer qu'une petite partie des
projets que j'envisage d'effectuer...
Monsieur le ministre, je suis tenté de vous faire une suggestion. Il est
proposé de ponctionner 65 millions d'euros, mais on connaît les habitudes :
cette ponction opérée cette année peut facilement devenir définitive. Je
préférerais donc que nous gardions ces 65 millions d'euros, que nous les
affections au FNDAE et que vous vous inspiriez un peu de la méthode Sarkozy.
(Approbations sur les travées du RPR.)
M. Alain Vasselle.
Quelle référence !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Ce n'est pas insultant !
M. Gérard Miquel.
Laissez-moi aller jusqu'au bout de mon explication.
Au sein de l'administration centrale, un haut responsable gère ce dossier.
Donnez-lui une promotion. Affectez-le ailleurs et nommez quelqu'un qui aura
une obligation de résultat.
Si l'on double l'enveloppe de mon département, je vous assure, monsieur le
ministre, que je la consommerai dans l'année, sans aucune difficulté.
M. Alain Vasselle.
C'est partout pareil !
M. Gérard Miquel.
Laissons ces 65 millions d'euros au FNDAE et soumettons-nous à une obligation
de résultat quant à la distribution qui sera faite de ces crédits dans les
différents départements français. Les projets ne manquent pas, ils sont à
l'étude. Ne manquent que les financements.
Un grand chantier nous attend.
Nous devons régler les problèmes d'environnement relatifs à l'eau, à
l'assainissement, aux déchets.
Je suis très inquiet quant aux financements que nous pouvons mettre en place.
Si nous voulons mener à bien ces actions, nous serons obligés d'imposer
davantage nos concitoyens en augmentant le prix de l'eau, de l'assainissement,
en majorant la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ou la redevance sur les
consommations d'eau. Cette ponction n'est pas bienvenue. Si nous avons des
crédits importants en réserve, distribuons-les dans les divers départements.
Nous sommes prêts à les utiliser.
(Applaudissements sur les travées du
groupe socialiste.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je souhaite répondre à deux questions qui ont été
posées et donner une explication.
La question posée par M. Vasselle est claire : la mesure proposée
concerne-t-elle seulement l'exercice 2003 ?
Oui, il s'agit exclusivement d'une mesure pour 2003 non reconductible, j'en
prends l'engagement devant vous.
La seconde question, qui faisait d'ailleurs l'objet d'un dialogue entre deux
éminents sénateurs de l'Oise, était : faut-il aller vers plus de
décentralisation ? Bien sûr.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous savez l'affection que je vous porte.
(Sourires.)
M. Gérard Miquel.
Nous aussi !
M. Gérard César.
Aïe, Aïe, Aïe !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Permettez-moi d'utiliser une métaphore liée à l'art de
la plomberie.
Vous avez reçu des Français, comme vos collègues de l'Assemblée nationale, la
belle, noble, unique et souveraine mission d'autoriser les crédits nécessaires
au fonctionnement de notre pays. Vous pouvez - je file toujours la métaphore de
la plomberie -, dans la canalisation qui part de l'échelon central, engager
tous les crédits que vous voudrez, mais si vous gardez cette cohorte de
plombiers tout au long des canalisations, et ce jusqu'au hameau le plus
retranché de vos villages, il ne restera à la fin qu'un mince filet d'eau.
Donc, je vous en supplie, repartez du filet d'eau, remontez les canalisations
et enlevez les bouchons là où ils se trouvent : alors, vous aurez fait
progresser le pays. Telle est ma conviction profonde. En tout cas, le
Gouvernement et l'inspection générale des finances sont à votre disposition.
Paul Loridant et le président de la commission des finances, Jean Arthuis, ont
raison : c'est aussi le rôle du Parlement, c'est pour cela qu'il a été
institué, c'est en cela qu'il est irremplaçable. Contrairement à un ministre,
de surcroît un simple ministre délégué au budget, vous détenez le pouvoir
souverain. Alors, mesdames, messieurs les sénateurs, faites un petit travail de
plomberie : vous ferez progresser le pays.
En tout cas, cela me conduit à ne pas accueillir de manière favorable la
proposition de Gérard Miquel, car elle vise à maintenir un flux qui part de
l'échelon central, sans que cela ne change rien au niveau local. Je vous invite
donc, mesdames, messieurs les sénateurs, à rejeter, sans aucun complexe, cet
amendement.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union
centriste.)
M. le président.
Monsieur Doublet, après les explications de M. le ministre, maintenez-vous
votre l'amendement n° I-55 ?
M. Michel Doublet.
Après avoir écouté le « plombier en chef », j'espère qu'il y aura les crédits
pour faire la soudure !
(Sourires.)
J'ai bien entendu, monsieur le ministre, l'engagement que vous avez pris de
mettre de l'ordre dans la maison et votre incitation à faire remonter et à
faire financer les projets. Monsieur le ministre, vous vous êtes engagé dans ce
domaine, je retire donc mon amendement.
(Très bien ! sur les travées du RPR,
des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
L'amendement n° I-55 est retiré.
Monsieur Miquel, l'amendement n° I-90 est-il maintenu ?
M. Gérard Miquel.
Compte tenu des explications que j'ai données, vous comprendrez, monsieur le
ministre, que je ne retire pas cet amendement.
(M. le rapporteur général
s'exclame.)
Par rapport à l'Assemblée nationale, le Sénat a un rôle particulier à jouer,
en direction des collectivités locales.
(M. Bruno Sido opine.)
Or, avec
de telles méthodes, je crains que notre décision ne soit mal comprise par les
élus, notamment les maires, qui comptent sur nous pour régler ce problème
particulièrement important. C'est la raison pour laquelle je souhaite maintenir
cet amendement.
Il est prévu cette année de prélever - indûment - 65 millions d'euros sur le
FNDAE pour les affecter au budget général. Or, dans les années à venir, nous
aurons à faire face à des investissements très importants, et nous disposerons
d'une enveloppe diminuée. En outre, même si nous nous efforçons de distribuer
cette enveloppe dans les meilleures conditions, je ne suis pas persuadé qu'une
décentralisation accrue aboutisse à de meilleurs résultats.
Je crois, au contraire, qu'il nous faut utiliser la totalité de ces crédits.
Encore une fois, aucun problème technique ne se pose. Les dossiers sont dans
les tiroirs et nous différons les investissements par manque de crédits.
Sur cet amendement, monsieur le président, je demande un scrutin public.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
Monsieur Vasselle, je regrette, mais vous avez déjà eu la parole pour
expliquer votre vote.
M. Alain Vasselle.
Monsieur le président, j'ai expliqué mon vote sur l'amendement n° I-55, mais
non sur l'amendement n° I-90.
M. le président.
Ces amendements étant identiques, votre explication de vote vaut pour les deux
amendements.
M. Alain Vasselle.
Dans ces conditions, je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président.
La parole est à M. Alain Vasselle, pour un rappel au règlement.
M. Alain Vasselle.
Monsieur le président, vous connaissez certainement mieux le règlement que
moi, je n'insisterai donc pas sur le fait que, ayant expliqué mon vote sur
l'amendement de M. Doublet, qu'il a ensuite retiré, je pensais pouvoir
également m'exprimer sur l'amendement de M. Miquel.
M. Miquel a avancé comme argument essentiel pour justifier le maintien de son
amendement sa crainte, si les 65 millions d'euros devaient disparaître au titre
de l'exercice 2003, de ne pas les retrouver en 2004 et dans les années
futures.
Si mes amis politiques et moi-même ne votons pas l'amendement de M. Miquel,
c'est parce que M. Lambert, en sa qualité de ministre délégué du budget, a
répondu positivement à la question que j'avais posée moi-même en ces termes : «
Monsieur le ministre, pouvez-vous prendre l'engagement devant la représentation
nationale que cette mesure ne vaudra que pour l'exercice 2003 et ne
s'appliquera pas pour l'exercice 2004 et les exercices futurs ? » Dès lors que
M. Lambert nous a donné cette assurance au nom du Gouvernement, nous n'avons
aucune raison de mettre en doute sa parole.
C'est la raison pour laquelle, m'appuyant sur l'engagement solennel du
Gouvernement, selon lequel les crédits seront rétablis l'année prochaine, nous
ne voterons pas l'amendement de M. Miquel.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Christian Bergelin.
Je demande la parole, pour un rappel au règlement.
M. le président.
La parole est à M. Christian Bergelin.
M. Christian Bergelin.
Ce débat est très important tant les besoins sont incommensurables en milieu
rural. Chacun des décideurs ici présents le sait.
Monsieur le ministre, je n'aurai pas l'outrecuidance de vous donner un
conseil, mais je voudrais apporter un témoignage.
Lorsque j'étais en charge du ministère de la jeunesse et des sports, en 1986,
les crédits alloués au FNDS, le Fonds national pour le développement du sport,
n'étaient pas entièrement consommés à la fin de chaque année. Les importants
reports de crédits suscitaient la colère de tous ceux qui attendaient, dans
chacune de nos régions, de pouvoir mettre en place les équipements nécessaires
à la jeunesse de ce pays. J'avais alors indiqué aux préfets de chaque région,
dès le début du mois de janvier de chaque année, le montant approximatif de
l'enveloppe destinée à financer les projets. Constatant ensuite que les choses
ne progressaient pas assez vite, j'ai demandé que tous les projets soient
prêts, notamment en termes de maîtrise d'ouvrage, de descriptifs techniques et
de financement, avant le 30 juin de chaque année. A partir de là, à la fin de
chaque année, tous les crédits étaient consommés jusqu'au dernier centime.
C'est pourquoi il faut modifier les procédures.
Nous avons pris acte de vos engagements, monsieur le ministre, et nous
comprenons votre démarche. Nous souhaitons que 2003 voie l'émergence de
pratiques nouvelles.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Avant la tenue du scrutin public demandé par M. Gérard
Miquel, je souhaite apporter quelques précisions pour éclairer le Sénat.
Permettez-moi d'abord de vous rappeler que celui qui vous parle est le
président de l'Association des maires des cinq cent cinq communes d'un
département qui compte moins de 300 000 habitants. Si vous connaissez un
département plus rural, dites-le moi !
S'il demeure des difficultés sur le plan local, attaquons-nous aux vrais
problèmes !
M. Alain Vasselle.
Voilà !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Attaquons-nous aux procédures qui régissent
l'utilisation des crédits !
M. Jean-Pierre Schosteck.
Absolument !
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Ce qui est en cause, à ce jour, c'est non pas une
l'insuffisance du volume des moyens qui vous sont alloués et dont vous avez
besoin pour réaliser les missions qui vous ont été confiées, mais tout
simplement le fait que les modalités d'utilisation des crédits ne sont pas au
point.
En rejetant l'amendement n° I-90, vous contribuerez à faire évoluer la
situation puisque vous vous attaquerez à l'essentiel, c'est-à-dire à la
révision des mécanismes d'utilisation des crédits. Je vous invite donc sans
aucun complexe à rejeter cet amendement inopportun.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° I-90.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du
règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 319 |
Nombre de suffrages exprimés | 315 |
Majorité absolue des suffrages | 158 |
Pour l'adoption | 108 |
Contre | 207 |
Je mets aux voix l'article 23 bis.
(L'article 23 bis est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre le cours normal de l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2003 pour aborder, comme il en a été décidé en conférence des présidents, le débat sur les recettes des collectivités locales.
C'est M. le président du Sénat qui va mener ce débat.
(M. Christian Poncelet remplace M. Bernard Angels au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET
Débat sur les recettes des collectivités locales