SEANCE DU 8 JANVIER 2002
M. le président.
La parole est à Mme Printz, auteur de la question n° 1199, adressée à Mme le
ministre de la culture et de la communication.
Mme Gisèle Printz.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous connaissons toutes et tous la règle : tout projet de construction ou de
travaux situé dans un périmètre de 500 mètres autour d'un édifice protégé au
titre des différentes lois sur les monuments historiques, les secteurs
sauvegardés ou les zones de protection du patrimoine architectural et urbain,
est soumis à l'avis des architectes des Bâtiments de France, les ABF.
Depuis les années soixante, les ABF veillent à la sauvegarde de notre
patrimoine, mais, aujourd'hui, leur rôle est régulièrement contesté. En effet,
qui d'entre nous n'a pas été confronté aux sollicitations d'élus, de
responsables d'association ou de particuliers désireux d'entreprendre une
démolition, une restauration ou une construction et se heurtant aux services
des architectes des Bâtiments de France ?
Les contestations sont nombreuses, et parmi celles-ci figurent notamment la
fluctuation des règles et l'obligation de faire appel à des entreprises
agréées.
En effet, il n'est pas rare, dans les périmètres protégés, que les règles
varient en fonction des personnes et des circonstances.
Ces changements conduisent aujourd'hui de nombreuses personnes à s'interroger
sur la pertinence des remarques des architectes des Bâtiments de France, à
qualifier d'abus de pouvoir les décisions de cette autorité administrative et,
surtout, à demander qu'un règlement connu, transparent et qui ne change pas au
gré des personnes soit appliqué.
En outre, les voies de recours sont rares, ce qui n'atténue que très peu les
pouvoirs de cette autorité, même si des avancées ont été obtenues par le
passé.
Ce fut le cas en 1983, dans le cadre des lois de décentralisation, mais
uniquement pour les zones de protection du patrimoine architectural et urbain
créées par les communes.
Plus près de nous, la loi du 28 février 1997 relative à l'instruction des
autorisations de travaux dans le champ de visibilité des édifices classés ou
inscrits et dans les secteurs sauvegardés a institué une commission du
patrimoine et des sites.
Malheureusement, celle-ci a montré ses limites puisque, en quatre ans, les
recours dont a été saisie cette commission restent d'ordre anecdotique, et ses
infirmations des décisions de l'architecte des Bâtiments de France représentent
moins d'un quart des contentieux qui lui ont été soumis.
Il n'est pas question aujourd'hui de jeter la pierre aux architectes des
Bâtiments de France, car nul ne contestera le rôle inestimable qu'ils ont joué,
qu'ils jouent toujours et qu'ils doivent continuer à jouer dans la préservation
de notre patrimoine. Toutefois, leurs décisions doivent pouvoir faire l'objet
d'un recours, au même titre que toute autre décision administrative, et les
règles qu'ils appliquent doivent être transparentes.
A défaut d'un accord sur le texte que nous avons examiné en juin dernier, le
débat que nous avons eu à ce sujet n'a pas manqué d'intérêt. Il a révélé
plusieurs préoccupations communes à nos différents groupes.
Mais, comme vous l'aviez fort justement souligné à ce moment, monsieur le
secrétaire d'Etat, il ne faut pas légiférer à la hâte. La qualité
architecturale en espaces protégés ne doit pas passer après le souci de
surmonter un avis négatif de l'architecte des Bâtiments de France.
Je souhaite donc connaître les pistes que le Gouvernement privilégie en vue
d'améliorer et d'étendre les possibilités de recours contre les décisions des
ABF, et, plus particulièrement, s'il est envisagé de moderniser les commissions
pour que les élus, qui sont les principaux intéressés, y trouvent une juste
place. Par ailleurs, est-il question d'instaurer, une bonne fois pour toutes,
des règles publiques et durables au sein des périmètres protégés ?
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Michel Duffour,
secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle.
Vous
vous interrogez, madame la sénatrice, sur les décisions des architectes des
Bâtiments de France dans les périmètres protégés et sur les possibilités de
recours contre ces décisions, en souhaitant mieux y associer les élus.
Le Gouvernement partage votre souci. Depuis l'adoption par votre Haute
Assemblée, le 14 juin 2001, de la proposition de loi de M. Fauchon rapportée
par M. Richert, nous avons poursuivi notre réflexion.
En effet, si les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et
paysager et les secteurs sauvegardés font l'objet de règles connues et donc
prévisibles pour les élus et les pétitionnaires, il n'en est pas de même pour
les abords des monuments historiques. Nous souhaitons donc, dans l'intérêt de
tous, améliorer l'information du public sur ces règles de protection.
En ce qui concerne les recours, outre le droit commun qui permet à une
personne s'étant vu refuser un permis de construire de saisir la juridiction
administrative, il existe, en vertu de la loi du 28 février 1997, pour tous les
espaces protégés, une procédure de recours contre l'avis de l'ABF ouverte aux
maires. Mais celle-ci n'ayant pas donné de résultats suffisamment probants, le
Gouvernement a décidé de la faire évoluer en l'ouvrant aux pétitionnaires,
comme l'avait souhaité le Sénat.
S'agissant de la commission statuant sur les recours, tout en gardant le
niveau régional, qui permet de prendre le recul nécessaire vis-à-vis des
intérêts locaux et qui présente une plus grande pertinence sur le plan
scientifique, nous proposerons d'en revoir la composition et le fonctionnement
en y associant mieux les élus locaux.
Le Gouvernement est donc prêt à avancer dans le sens de la modernisation du
dispositif entourant les décisions des ABF. Il déposera des amendements au
projet de loi relatif à la démocratie de proximité, lors de son examen par
votre Haute Assemblée, examen qui doit débuter aujourd'hui même.
Mme Gisèle Printz.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Printz.
Mme Gisèle Printz.
J'apprécie les réponses que M. le secrétaire d'Etat vient de me donner, et
surtout le fait que les élus locaux seront impliqués dans ces commissions de
recours. J'espère que ces nouvelles dispositions seront favorablement
accueillies par les ABF ?
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