SEANCE DU 8 JANVIER 2002
M. le président.
La parole est à M. Demilly, auteur de la question n° 1219, adressée à Mme le
secrétaire d'Etat au logement.
M. Fernand Demilly.
Madame la secrétaire d'Etat, je souhaite appeler votre attention sur l'utilité
et la légitimité des comités interprofessionnels du logement, les CIL,
gestionnaires du 1 % logement au regard des négociations qui se sont tenues
entre les partenaires sociaux et l'Etat dans le cadre des « conventions »
d'octobre 2001.
A la lecture de ces conventions, c'est plus de 12 milliards de francs, sur les
17 milliards de francs collectés, qui seront utilisés par l'Etat.
Le CIL, organisme paritaire collecteur des cotisations d'entreprises, voit
ainsi son rôle de décideur local nié par les décisions prises à l'échelon
national, lesquelles le détournent de sa vocation première, à savoir être au
service des entreprises assujetties et de leurs salariés par des aides à
l'accession à la propriété, à la rénovation et à la location.
Ces aides contingentées et restreintes excluent parfois les salariés eux-mêmes
au profit de nouveaux ayants droit sans lien avec le monde du travail.
Dans ces conditions, quelle est la légitimité même du 1 % logement ? Le rôle
de l'entreprise ne va-t-il pas se limiter à être le payeur, sans retour au
profit de ses salariés ?
La nouvelle destination des fonds collectés - démolition - reconstruction de «
quartiers », financement de HLM, etc. - est-elle légitime pour l'entreprise,
qui devient une nouvelle manne financière de la politique sociale du
Gouvernement ?
Madame la secrétaire d'Etat, comptez-vous redonner aux entreprises et aux CIL
les moyens et les pouvoirs qui leur sont dévolus ?
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Noëlle Lienemann,
secrétaire d'Etat au logement.
Monsieur le sénateur, quel plaidoyer pour
la disparition du rôle du 1 %, qui lèserait les entreprises !
Or l'accord que nous venons de signer au mois de décembre - puisque nous ne
sommes plus dans la convention - a été obtenu avec l'unanimité des syndicats et
du MEDEF, et approuvé pour le Gouvernement. Je n'imagine pas que l'ensemble de
ces forces sociales cessent soudain de prendre en compte l'intérêt des salariés
et des entreprises !
L'accord trouvé, fondateur pour l'avenir, me paraît consolider le pacte
républicain et répondre parfaitement aux besoins des salariés des
entreprises.
Premièrement, il est clair qu'un certain nombre de logements réservés par les
entreprises ne trouvaient pas preneur chez les salariés, ce qui concourait à
aggraver la ségrégation sociale dans certains secteurs où les poches de
pauvreté s'accroissaient.
C'est pourquoi les gestionnaires du 1 % et l'ensemble des forces sociales se
sont associés à l'idée que le Gouvernement défend, avec, me semble-t-il, un
large accord de tous, à savoir l'accélération des démolitions dans certains
quartiers pour y réinstaurer de la mixité sociale et pour y offrir à nos
concitoyens une qualité de vie grâce à des appartements mieux adaptés à
l'attente d'aujourd'hui.
Le 1 % reste, pour une large part, dans ses fonctions originelles. Il y a
d'abord le soutien à l'accession à la propriété. Je vous rappelle que 4,3
milliards de francs - pardonnez-moi, je n'ai pas fait la conversion en euros -
étaient historiquement consacrés au soutien aux HLM, qui accueillent
massivement des salariés, et heureusement, car ceux-ci ont aussi droit au
logement !
Deuxièmement, les aides qui sont destinées aux travaux d'amélioration sont
maintenues à la même hauteur. Ce qui est fondamentalement nouveau, c'est
d'abord l'accompagnement des démolitions par des reconstructions et la
constitution d'un outil foncier pour accroître l'offre locative de logements
intermédiaires pour les classes moyennes dans les quartiers qui sont
aujourd'hui trop monolithiques et trop touchés par le risque de ghettoïsation ;
c'est ensuite la création de logements sociaux, voire très sociaux, pour des
salariés. En effet, vous le savez, monsieur le sénateur, il y a des salariés
qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, ce qui est un autre problème. Nous
créons donc des logements sociaux pour les salariés dans les secteurs où il y
en a peu, dans les centres villes ou dans les villes qui n'atteignent pas le
seuil de 20 % de logements conventionnés fixé par la loi.
Nous sommes donc devant le partage d'une responsabilité : faire vivre la
mixité sociale, que je crois être la déclinaison urbaine du pacte
républicain.
Les organismes collecteurs du 1 % logement ont émis la crainte d'être
dessaisis des politiques locales. Bien évidemment, le Gouvernement a également
été très attentif à ce que l'action de l'association foncière et le 1 %
logement soient liés aux plans locaux de l'habitat et aux programmes locaux
définis par les élus locaux et par les partenaires sociaux, les collecteurs du
1 % logement sur le terrain.
C'est pourquoi l'association Foncière comportera obligatoirement une structure
régionale qui permettra aux différents organismes collecteurs de veiller à ce
qu'il n'y ait pas une « captation » du 1 % logement en direction de certaines
régions au détriment d'autres. En tout cas, sur ce point, la convention est
claire : la répartition du 1 % logement doit correspondre à la réalité du
territoire et répondre à l'attente des entreprises.
M. Fernand Demilly,
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Demilly.
M. Fernand Demilly.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'Etat, de votre réponse. Mes
informations différent des vôtres ; elles émanent des comités
interprofessionnels du logement et de leurs conseils d'administration.
Ma question concernait effectivement la légitimité et l'utilité de ces comités
interprofessionnels du logement, organismes paritaires et gestionnaires, en
principe, de ce que l'on appelle toujours le « 1 % logement » et qui est
devenu, après un certain nombre de baisses successives, le « 0,45 % ». Il
permettait néanmoins aux entreprises d'aider leurs salariés - j'en fus le
gestionnaire dans une grande entreprise - par des prêts pour l'accession à la
propriété et les travaux d'entretien ou d'amélioration, notamment pour les
salariés victimes des inondations, et par des aides au locatif et à la mobilité
professionnelle.
Sans aucunement contester les objectifs du Gouvernement en matière de
politique sociale du logement, il est évident que, de plus en plus, le rôle de
ces comités interprofessionnels du logement devient celui de tiroir-caisse pour
des actions de l'Etat. Le rôle de l'entreprise se limite donc à celui de
payeur, sans toujours en avoir un retour au profit de ses propres salariés.
De ce point de vue, la réponse ne peut être satisfaisante puisque, au fil des
années, le 1 % logement continue d'être détourné de sa vocation première - être
au service des entreprises et de leurs salariés - pour devenir une manne
financière au service de la politique sociale de l'Etat.
J'aurais souhaité, madame la secrétaire d'Etat, que vous nous fassiez part
d'intentions positives pour redonner à ces comités interprofessionnels du
logement leur utilité et leur pouvoir local et faire en sorte que le 1 %
logement retrouve sa légitimité.
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