SEANCE DU 8 JANVIER 2002


M. le président. La parole est à M. Haenel, auteur de la question n° 1107, adressée à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Hubert Haenel. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ma question vise à demander à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement quelles mesures il compte prendre pour mettre fin au ballet des camions qui circulent sur l'axe nord-sud alsacien autoroutier ou l'axe à deux fois deux voies entre Mulhouse et Strasbourg, qui se dépassent et bloquent la circulation parfois pendant dix minutes ou un quart d'heure, comme j'ai pu le constater maintes fois.
Soulignant les risques d'accidents consécutifs à ces dépassements anarchiques et dangereux pour les usagers de la route, je demande la mise en place d'une expérimentation visant à réglementer, voire à interdire, sur certaines portions le dépassement des poids lourds sur la RN 83 et, plus particulièrement, entre Mulhouse et Colmar et entre Colmar et Sélestat, notamment au niveau de Guémar, section de quinze kilomètres sinueuse et très chargée.
Après de nombreuses interventions écrites et orales, et plusieurs coups de colère face à l'inertie des services, j'ai obtenu en partie satisfaction puisqu'une expérimentation a été mise en place. Toutefois, madame la secrétaire d'Etat, pourquoi ne pas étudier ce problème du dépassement des poids lourds sur un plan plus général et procéder à des expérimentations dans d'autres régions de France, afin d'évaluer les avantages d'une telle réglementation ?
A l'occasion de mes nombreux déplacements à l'étranger, j'ai constaté que le sujet avait été traité ailleurs, tout particulièrement chez nos voisins allemands. La France semble être en retard sur ce type de réglementation. Faudra-t-il, pour réagir, que survienne un grave accident consécutif à un dépassement anarchique ou au non-respect de l'intervalle réglementaire entre deux poids lourds ? Quelles explications seraient alors données aux victimes et à leur famille ?
Madame la secrétaire d'Etat, quelles mesures compte prendre le Gouvernement pour remédier à cette situation ?
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le sénateur, la question que vous posez est extrêmement importante, puisqu'elle concerne la sécurité routière. Même si la situation tend à s'améliorer en la matière, vous connaissez en effet le nombre des victimes, tués ou blessés, des accidents de la route.
Il ne faut pas croire que les pouvoirs publics n'ont pas réfléchi à cette question. Au-delà de l'expérimentation dont vous avez parlé et qui est engagée, sans doute est-il nécessaire de mieux faire connaître les possibilités de réglementer localement en fonction de la situation.
Votre question est pour moi l'occasion de rappeler les moyens qui peuvent être mobilisés pour la sécurité de nos concitoyens.
Tout d'abord, dans le cadre de leurs pouvoirs de police, les préfets sont chargés d'adapter les conditions de la circulation sur les routes et autoroutes de leur département en fonction de leurs caractéristiques et des dangers particuliers découlant du trafic. L'article R. 411-8 du code de la route leur permet de prendre des mesures plus rigoureuses que les dispositions réglementaires générales, si la sécurité de la circulation routière ou de l'ordre public l'exige. C'est au regard de ces dispositions qu'une interdiction de dépassements là où ils sont dangereux peut être mise en oeuvre.
En règle générale, les dépassements entre poids lourds sont autorisés s'ils respectent notamment l'article R. 414-4 du code de la route. Celui-ci spécifie qu'avant de dépasser le conducteur doit s'assurer qu'il peut le faire sans danger, c'est-à-dire qu'il a la possibilité de reprendre sa place dans le courant normal de la circulation sans la gêner, et que la vitesse relative des deux véhicules permet d'effectuer le dépassement dans un temps suffisamment bref.
Sur la proposition de cantonner à une seule voie de circulation les poids lourds, il faut considérer l'extrême variabilité de leur vitesse maximale autorisée, qui est, par exemple, sur autoroute, de 80 kilomètres à l'heure pour les transports de matières dangereuses, de 110 kilomètres à l'heure pour les véhicules de transport de marchandises d'un poids total autorisé en charge de moins de 12 tonnes, en passant par 100 kilomètres à l'heure pour certains véhicules de transport de voyageurs. De plus, le code de la route autorise la circulation sur autoroute sur la voie de droite pour des vitesses encore plus lentes.
Interdire le dépassement reviendrait à limiter la vitesse de certains de ces véhicules à celle du véhicule le plus lent et aurait pour conséquence prévisible de les inciter à transgresser la règle, ce qui irait à l'encontre de l'objectif d'amélioration de la sécurité routière.
Les véhicules de plus de 3,5 tonnes et de plus de sept mètres sont astreints à des règles plus strictes que les autres en ce qui concerne la distance à maintenir par rapport aux véhicules qui les précèdent.
En effet, à l'obligation nouvelle du décret du 23 novembre 2001, qui fixe la distance minimale à celle qui est parcourue en deux secondes en fonction de la vitesse, s'ajoute cumulativement l'obligation antérieure d'une distance minimale de cinquante mètres quelle que soit la vitesse pour les véhicules dont j'ai parlé. De plus, le non-respect de cette obligation est désormais sanctionné plus lourdement, puisque à une amende de deuxième classe de 35 euros a été substituée une amende de quatrième classe de 135 euros à laquelle s'ajoute un retrait de trois points du permis de conduire.
Enfin, il convient de rappeler que, lorsqu'une autoroute comporte plus de deux voies, l'article R. 412-25 du code de la route interdit l'accès de la voie la plus à gauche à la totalité des poids lourds.
Monsieur le sénateur, vous voyez que les réglementations existent.
L'idée de responsabiliser d'abord et avant tout le conducteur est au coeur de nos préoccupations. Le ministère des transports est très soucieux de porter à la connaissance des préfets les marges de manoeuvre qu'ils ont, localement, en partenariat avec les élus, pour trouver les bonnes adaptations des réglementations, et à la connaissance des transporteurs les contraintes qui pèsent sur chacun d'eux et qui méritent d'être rappelées.
M. Hubert Haenel. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Haenel.
M. Hubert Haenel. Madame la secrétaire d'Etat, j'apprécie votre réponse et le fait que vous ayez rappelé avec précision tant les grands principes que le cadre législatif et réglementaire.
Il serait toutefois souhaitable qu'une note ou une circulaire soit adressée à tous les préfets pour leur rappeler les différentes possibilités qui s'offrent à eux.
Par ailleurs, on pourrait aussi envisager que, de temps en temps, les forces de police et de gendarmerie concentrent leurs contrôles sur ces points particuliers.

POLITIQUE DU 1 % LOGEMENT