SEANCE DU 21 NOVEMBRE 2001
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la
parole à M. Badinter pour explication de vote.
M. Robert Badinter.
Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, voici
venue l'heure des félicitations : félicitations, d'abord, aux auteurs de la
proposition de loi ; félicitations, ensuite, à ceux qui l'ont rapportée, et
plus particulièrement à notre excellent rapporteur Jean-Jacques Hyest.
Félicitations aussi, madame la garde des sceaux, pour l'ouverture d'esprit, la
compréhension et l'imagination juridique dont vous avez fait preuve tout au
long de ces débats.
Félicitations encore à tous les membres de la commission des lois comme à ceux
de la commission mixte paritaire.
Félicitations à ceux, enfin, à tous ceux qui s'apprêtent à voter le texte.
Une sorte de
post-scriptum
s'impose cependant : ce n'est pas fini.
(Mme le garde des sceaux sourit.)
Que nous nous apprêtions à voter la
présente proposition de loi à l'unanimité ne doit pas nous faire oublier que le
premier texte concernant la réforme non pas seulement des droits du conjoint
survivant mais du droit des successions en général a été déposé il y a vingt
ans déjà.
Puisque le travail est partiellement accompli, saluons le succès remporté,
mais, puisque l'oeuvre est loin d'être achevée, prenons l'engagement de
l'achever le plus vite possible !
La rénovation de notre droit civil est en effet une absolue nécessité. Elle
est attendue depuis longtemps. Ce sont non pas les sujets qui font défaut - le
droit des successions, bien sûr, mais aussi celui des libéralités doivent être
revus - mais le temps, la disponibilité du Parlement et du Gouvernement. Je
crois pourtant que nos concitoyens sont fondés à escompter de leurs élus et de
ceux qui les gouvernent qu'ils accordent enfin à des sujets d'une telle
importance un traitement prioritaire à la mesure de leur attente. Mais,
aujourd'hui, votons !
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi
que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, même si c'est
avec d'autres mots, je reprendrai sur le fond les propos de M. Badinter.
En effet, il convient de féliciter M. le rapporteur, qui s'est approprié avec
talent un rapport déjà élaboré au moment de la commission mixte paritaire. Je
tiens à lui rendre hommage pour la façon dont il a oeuvré à la rédaction d'un
texte qui puisse être accepté par tous, députés et sénateurs, au sein de la
commission mixte paritaire.
Je crois que, grâce aux concessions des uns et des autres, nous sommes
parvenus à un texte équilibré, qui respecte à la fois l'affection du conjoint
prédécédé pour le conjoint survivant et les liens de la famille initiale.
C'était le langage qu'il convenait de tenir.
Je regrette que l'on n'ait pas pu aller jusqu'au bout et mener la réforme
d'ensemble des successions et des libéralités. Les dispositions qui s'y
appliquent datent, il faut le dire, madame la ministre, et elles appellent une
sérieuse modernisation !
A ce propos, je ferai une remarque. De loi en loi, nous modifions
d'importantes dispositions du code civil relatives au statut personnel de nos
concitoyens : aujourd'hui, ce sont les droits du conjoint survivant et
l'autorité parentale, demain ce sera le divorce... Or je me demande dans quelle
mesure la multiplication de ces textes et leur juxtaposition permettent de
garder à notre droit de la famille et au statut personnel des Français la
logique d'ensemble qui était celle des rédacteurs du code civil. Peut-être
faudra-t-il revoir notre copie de façon à harmoniser les réformes successives
et à retrouver une cohérence, madame la ministre !
Quoi qu'il en soit, je me félicite de ce que la présente proposition de loi
ait fait l'objet d'un tel consensus en commission mixte paritaire. Bien
entendu, nous la voterons.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
J'estime, moi aussi, que le travail parlementaire a été très fructueux.
Mon groupe tenait particulièrement à ce que la présente proposition de loi
permette deux avancées, d'une part, en assurant l'égalité de tous les enfants -
l'horrible expression d'« enfant adultérin » est enfin supprimée - d'autre
part, en garantissant une réelle protection du conjoint survivant dans les «
petites successions », c'est-à-dire dans les successions n'ayant pas fait
l'objet de dispositions de la part du défunt, qui sont principalement visées
ici.
Nous étions particulièrement attachés au maintien dans le logement du conjoint
survivant, car on sait que le logement constitue un problème préoccupant pour
bon nombre de veufs et, plus encore, de veuves, puisque les femmes sont plus
souvent concernées.
Je crois que nous sommes parvenus à une solution acceptable et nous voterons,
bien sûr, cette proposition de loi, à mon avis satisfaisante du point de vue du
travail parlementaire.
(Applaudissements sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées
socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix
l'ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte
proposé par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements
précédemment adoptés par le Sénat.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président.
Je constate que la proposition de loi a été adoptée à l'unanimité, et je me
réjouis que ce soit la seconde fois, cet après-midi, que le Sénat adopte à
l'unanimité un texte issu des travaux d'une commission mixte paritaire.
(Applaudissements.)
Mme Marylise Lebranchu,
garde des sceaux.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Marylise Lebranchu,
garde des sceaux.
Il est dommage que des travaux aussi importants, longs
et difficiles que ceux qui ont permis d'aboutir au texte qui vient d'être voté
ne retiennent pas davantage l'attention des médias, qui verraient ainsi que,
lorsqu'il s'agit de régler les problèmes de nos concitoyens, nous parvenons à
nous entendre.
Ce n'est pas la coutume, mais, dans un texte aussi difficile et d'une
application aussi lourde, chaque mot compte, et je voudrais associer à nos
remerciements l'ensemble des collaborateurs de l'une et de l'autre assemblée,
ainsi que mes propres collaborateurs.
(Applaudissements.)
M. le président.
Le Sénat s'associe, bien sûr, à vos remerciements, madame le garde des
sceaux.
Mes chers collègues, avant d'aborder le point suivant de l'ordre du jour, nous
allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heure vingt, est reprise à seize heures
trente.)