SEANCE DU 23 OCTOBRE 2001
M. le président.
« Art. 1er. - Est ratifiée, telle qu'elle est modifiée par la présente loi,
l'ordonnance n° 2001-273 du 28 mars 2001 transposant certaines dispositions de
la directive 1999/62/CE du Parlement et du Conseil du 17 juin 1999 relative à
la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures et
réformant le régime d'exploitation de certaines sociétés concessionnaires
d'autoroutes. »
Sur l'article, la parole est à M. Doligé.
M. Eric Doligé.
Monsieur le ministre, je me permets d'abord de me réjouir de votre
présence.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
J'arrive de
Moscou !
M. Eric Doligé.
Tout à l'heure vous avez évoqué les voies maritimes. Il y a une fenêtre de tir
pour réfléchir éventuellement à des voies d'eaux. Le moment serait propice pour
envisager de nouveau la réalisation du canal Rhin-Rhône. Cela pourrait être une
bonne piste de réflexion dans les mois à venir.
Revenons-en aux autoroutes. Je voudrais profiter de l'occasion pour vous
parler de l'A 19, puisque vous l'avez évoquée et, incidemment, vous avez parlé
de la RN 60.
S'agissant de l'A 19, cela fait quatre ans au moins que M. Masson et moi-même
vous interrogeons pour tenter d'obtenir des informations. Nous sommes quelque
peu inquiets de voir les années passer et de constater que le dossier, au fil
de réglementations nouvelles - maintenant on en est à l'adossement - recule
année après année, alors que le dossier était déjà prêt à l'époque et qu'il
aurait pu aboutir si la volonté avait existé.
Aujourd'hui, soit quatre ou cinq ans plus tard, on nous annonce un certain
nombre de critères nouveaux pour le financement d'une autoroute, qu'il s'agisse
de l'A19 ou d'une autre liaison. Parmi ces critères figure la durée de
concession. Celle-ci est-elle inscrite dans les appels d'offres ? Fait-elle
partie des clauses précises ou la laisse-t-on ouverte ? Je pose la même
question s'agissant des trafics et d'une règle nouvelle qui serait le
financement par les pouvoirs publics.
Je m'interroge à propos de ce dernier point, car j'ai appris que le préfet
devait me rencontrer pour me demander si le département est prêt à contribuer
au financement de l'autoroute. J'avoue être surpris que, dans le cadre d'un
appel d'offres, on annonce que l'on demandera une participation à des
collectivités pour compléter éventuellement un financement, sachant que cette
participation serait assurée, semble-t-il, à 50 % par l'Etat et 50 % par les
collectivités. Des chiffres sont même annoncés, ce qui signifie que, bien
entendu, les soumissionnaires sont informés de l'importance des sommes que nous
serions en mesure d'apporter. Je ne vois donc pas pourquoi ils amèneraient ces
sommes-là s'ils ont la capacité de faire dans une concurrence tout à fait
normale, surtout pour une autoroute qui,
a priori,
est l'une des moins
chères à réaliser compte tenu de sa localisation en plaine.
Le fait d'annoncer que l'on va demander aux collectivités d'apporter une
certaine somme, dont on annonce également le montant éventuel, me semble poser
question dans le cadre de la concurrence saine et loyale qui doit prévaloir en
matière d'appels d'offres.
J'ai appris ensuite, et vous l'avez confirmé, monsieur le ministre, que des
dividendes seraient éventuellement distribués aux actionnaires des voies
autoroutières. Cela sous-entend que les subventions que le département pourrait
accorder seraient susceptibles de déboucher sur le versement de dividendes.
Cela m'inquiète aussi quelque peu, parce que, à la limite, on pourrait me dire
que la réalisation de l'autoroute coûte 4 milliards de francs et me demander si
le département est prêt à verser un, deux, trois ou quatre milliards de francs.
Il faut annoncer la couleur, mais cela paraît quand même quelque peu gênant
dans le cadre de la concurrence nationale, voire internationale.
Serait-il possible, si les collectivités sont obligées d'apporter des
financements - sous réserve encore que vous en inscriviez au budget de l'Etat,
monsieur le ministre, car, d'après ce que j'ai compris des propos de notre
collègue M. Alain Lambert, ce n'est pas le cas, ce qui m'inquiète quelque peu
dans l'optique de la réalisation de l'autoroute - que celles-ci deviennent
actionnaires ? Il n'y a pas de raison qu'elles contribuent à fonds perdus et
que d'autres touchent les dividendes.
Serait-il éventuellement possible d'apporter une garantie, plutôt qu'un
financement, puisqu'il ne peut plus y avoir de garantie de l'Etat ? Les
collectivités pourraient-elles se substituer à celui-ci en cette matière ?
Enfin, ne pourrions-nous pas éventuellement faire des avances remboursables,
de manière que, si l'autoroute est bénéficiaire, comme cela est souhaitable,
nous puissions les récupérer selon des clauses particulières ?
Voilà un certain nombre de questions que je souhaitais vous poser, monsieur le
ministre, alors que l'on est susceptible de demander à des collectivités de
financer à hauteur de 1 milliard de francs - excusez du peu par rapport à nos
budgets ! Ce n'est pas tous les jours que l'on peut trouver facilement 1
milliard de francs dans une collectivité !
J'en viens à ma dernière question. Selon vous, quand l'appel d'offres
pourra-t-il enfin être lancé ? En effet, tous les concessionnaires potentiels
sont, semble-t-il, dans les starting-blocks et prêts à partir ; ils attendent
simplement que l'on m'ait demandé combien je suis prêt à mettre pour la
réalisation de cette opération. Mais la question qui m'est annoncée sous huit
jours depuis quatre mois, je l'attends toujours. Voilà la problématique dans
laquelle nous sommes.
En matière routière, on a tout de même quelques difficultés à y voir clair,
monsieur le ministre. En effet, le partenaire que nous avons en face de nous ne
nous donne pas la règle du jeu. Lorsque nous souhaitons réaliser localement une
route, une voie communale, une voie départementale, tout le monde peut
consulter les dossiers et connaître les modalités du financement, l'impôt qui
est concerné et le coût réel de l'opération. En revanche, chaque fois qu'on
demande à vous-même ou à vos services où en est un dossier, on n'arrive jamais
à obtenir la réponse. Je souhaiterais non seulement de la clarté mais également
des informations afin que nous puissions, si possible, établir nos budgets pour
les vingt ans à venir, puisque les chiffres que vous nous avez annoncés
concernent des périodes assez longues.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Doligé a posé
plusieurs questions.
L'A 19 Artenay-Courtenay est un élément important de la politique de
l'aménagement du Bassin parisien. Cela permettra à une partie du trafic
est-ouest d'éviter la traversée de l'Ile-de-France. Cette autoroute permettra
également d'améliorer la sécurité routière dans la région Centre en déchargeant
la RN 60 qui relie Orléans à Courtenay d'une partie de son trafic. Cet objectif
a été réaffirmé dans le cadre des schémas de services collectifs de transport
qui ont été adoptés par le Gouvernement lors du comité interministériel de
juillet 2001, voilà trois mois. La réalisation de l'A 19 dans le cadre des
règles de financement désormais applicables implique de procéder à une
concession nouvelle dans le cadre d'un contrat séparé. C'est clair et désormais
chacun sait que c'est ainsi qu'il faut procéder.
Les nouvelles sections doivent trouver leur équilibre financier, par une
subvention publique lorsque cette dernière s'avère indispensable. Cela se fera
désormais partout, monsieur Doligé, et la subvention publique devra
effectivement être cofinancée par l'Etat et les collectivités locales
concernées.
Ce dispositif a été mis en oeuvre sur l'A 75 à Millau, mais il n'a pas été
nécessaire de recourir à une subvention publique. En effet, le coût des
travaux, d'une part, et la récupération à partir des péages des sommes
investies pour la construction et l'entretien de l'ouvrage, d'autre part, ont
permis un financement sans recourir à une subvention publique. En revanche,
s'agissant de l'A 28, entre Rouen et Alençon, comme je l'ai dit voilà quelques
instants, 1 milliard de francs a été nécessaire.
La prochaine attribution concernera l'A 19 entreArtenay et Courtenay,
conformément aux engagements que j'ai pris en 1999.
L'appel à la concurrence pour la concession sera possible dès 2002, dès qu'un
accord sur le financement aura été trouvé.
En tout cas, permettez-moi de vous dire, monsieur le sénateur, qu'il ne faut
pas tourner en rond sur cette affaire. Vous voulez que les choses aillent vite,
mais attention de ne pas risquer justement de les retarder en hésitant à
participer.
M. Eric Doligé.
IL va nous dire que c'est notre faute !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Je sais bien
qu'il est difficile de participer, mais c'est ainsi que tout cela se passe
maintenant, vous le savez.
Vous m'avez posé d'autres questions, qui sont d'ailleurs intéressantes. Ainsi,
vous m'avez demandé si les collectivités pouvaient être actionnaires.
Théoriquement, oui. Mais elles devront apporter des montants importants si
elles veulent avoir des participations qui soient susceptibles de les amener à
jouer un rôle actif dans les sociétés publiques concessionnaires. Avec 1 % du
capital, leur influence dans ces sociétés serait bien moins importante qu'avec
20 % ou 30 %.
Vous m'avez interrogé sur les avances remboursables. En fait, elles sont
contraires au droit communautaire. Certes, on peut faire changer les choses.
Mais alors là, il faudra se battre, il faudra que nous nous y mettions tous.
Pour l'instant, c'est interdit.
Quant aux garanties d'emprunt, c'est autre chose : on peut y penser. En tout
cas, je ne puis vous répondre ainsi sur le champ à cette question.
J'en viens aux concessionnaires.
Ce n'est pas l'appel d'offres qui fixe la durée de la concession, c'est la
réponse à l'appel d'offres, si je puis dire.
Comment cela se passe-t-il ? Deux, trois, quatre ou cinq sociétés répondent à
l'appel d'offres en proposant une durée de concession, en précisant le montant
de la subvention publique qui leur paraît nécessaire, le montant des péages qui
doit permettre d'atteindre l'équilibre, en décrivant bien sûr les travaux et
leur déroulement. Le tout s'inscrit dans le cadre de la concurence et ce n'est
qu'ensuite que le choix est fait.
Pour m'aider à effectuer ce choix, j'ai mis en place une commission chargée
d'examiner tous les appels d'offres, de dresser un bilan faisant ressortir les
aspects positifs et les aspects négatifs des différentes propositions. Jusqu'à
présent, je me suis toujours rallié à son opinion.
Comprenez bien, monsieur le sénateur : une subvention publique n'est pas
toujours nécessaire.
M. Eric Doligé.
Mais comment le sait-on ?
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Lorsque vous
voulez réaliser une section d'autoroute, vous avez
a priori
un ordre
d'idées - même s'il est vague - sur son niveau de rentabilité, mais vous n'en
avez pas sur la subvention d'équilibre. En effet, ceux qui répondent aux appels
d'offres n'annoncent jamais exactement les mêmes montants : certains vous
diront qu'ils réaliseront l'opération avec 20 milliards de francs de subvention
d'équilibre et d'autres avec beaucoup moins.
En tout état de cause, pour lancer les projets, il est important que les
collectivités territoriales concernées s'engagent à prendre leur part dans la
mesure où une subvention d'équilibre sera nécessaire. Aussi, je vous dis :
n'hésitez pas ! Vous verrez que cela accélérera le processus.
M. le président.
Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2