SEANCE DU 17 OCTOBRE 2001
M. le président.
L'amendement n° 85, présenté par M. Karoutchi, est ainsi libellé :
« Avant l'article 14
bis
A, insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« Le premier alinéa de l'article 23 de la loi du 15 juillet 1845 sur la police
des chemins de fer est complété par une phrase ainsi rédigée : "La déclaration
intentionnelle d'une fausse adresse ou d'une fausse identité sera punie de 3
750 euros d'amende." »
La parole est à M. Karoutchi.
M. Roger Karoutchi.
Il s'agit de créer un délit de déclaration intentionnelle d'une fausse adresse
ou d'une fausse identité aux agents de contrôle des chemins de fer. Cette
déclaration de fausse adresse ou de fausse identité serait punie d'une amende
de 3 750 euros.
Aujourd'hui, 880 000 à 900 000 contraventions sont dressées à des personnes
n'ayant pas de billet ou ne l'ayant pas composté ; mais l'adresse et l'identité
sont souvent fausses.
Aujourd'hui, grâce à la création d'un PC de surveillance générale et aux
recoupements informatiques, il est plus facile pour la SNCF de retrouver les
contrevenants, ce qui n'était pas le cas il y a encore quelques années, d'où la
nécessité d'un délit de déclaration intentionnelle d'une fausse adresse ou
d'une fausse identité. Les agents seraient plus motivés et la SNCF serait en
mesure de faire réellement son travail de recouvrement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
La commission est favorable à cet amendement, qui permettrait
en effet aux agents de la SNCF ou de la RATP d'appréhender les contrevenants
repérés et de mettre un terme à cet abus que les agents ont constaté eux-mêmes
et dont ils se plaignent, à savoir les contrevenants récidivistes patentés.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
D'un point de vue pratique, les agents de la
SNCF ou de la RATP ont le pouvoir d'exiger du contrevenant la production d'un
document officiel d'identité. Le code de procédure pénale a été modifié en ce
sens par la loi du 15 avril 1999 relative aux polices municipales. L'objectif
est de diminuer le nombre de procès-verbaux établis à partir d'une identité
erronée.
D'un point de vue juridique, la simple déclaration, même intentionnelle, d'une
fausse identité n'a pas été portée ; elle n'est qu'un mensonge. Il paraît
difficile d'en faire une incrimination nouvelle spécifique, d'autant qu'il
existe dans le code pénal une infraction générale de faux. La Cour de cassation
a d'ailleurs jugé à plusieurs reprises que les déclarations unilatérales d'un
prévenu en sa propre faveur ne représentaient que des affirmations sujettes à
vérification. En quelque sorte, la Cour de cassation a reconnu le droit de
mentir pour éviter une sanction.
Du point de vue de l'efficacité, quelle serait la portée d'une telle
infraction ? En effet, pour sanctionner le contrevenant menteur, il faudra
avoir démontré que sa déclaration était fausse, trouvé la bonne adresse et
enclenché une procédure judiciaire pour délit. Contrairement à ce que soutient
l'auteur de l'amendement, la procédure de flagrance ne serait pas applicable,
car aucune peine d'emprisonnement n'est encourue.
En fin de compte, il existe d'autres méthodes de lutte contre la fraude que
cette fuite en avant vers des procédures lourdes et difficilement
applicables.
C'est pourquoi j'émets un avis défavorable.
M. Paul Blanc.
Alors, il ne faut rien faire !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Non, mais il ne faut rien faire qui ne serve à
rien !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 85, accepté par la commission et repoussé par
le Gouvernement.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par
assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, avant l'article 14
bis
A.
Article 14 bis A