SEANCE DU 7 JUIN 2001


M. le président. « Art. 4. - Les charges budgétaires de l'Etat comprennent :
« l° Les dotations des pouvoirs publics ;
« 2° Les dépenses de personnel ;
« 3° Les dépenses de fonctionnement, autres que celles de personnel ;
« 4° Les dépenses d'intervention ;
« 5° Les dépenses d'investissement de l'Etat pour son propre compte ;
« 6° Les prêts et avances. »
Par amendement n° 11, M. Lambert, au nom de la commission propose de rédiger comme suit cet article :
« Les dépenses budgétaires de l'Etat comprennent les catégories suivantes :
« - les dépenses ordinaires ;
« - les dépenses d'intervention ;
« - les dépenses d'investissement.
« Les dépenses ordinaires sont groupées sous quatre titres :
« - dépenses de rémunération de la dette de l'Etat et dépenses en atténuation de recettes ;
« - dotations des pouvoirs publics ;
« - dépenses de personnel ;
« - autres dépenses de fonctionnement courant.
« Les dépenses d'intervention sont groupées sous quatre titres :
« - dépenses de transfert ;
« - dépenses de prêts et d'avances ;
« - dépenses de subventions de fonctionnement ;
« - dépenses résultant des garanties supportées par l'Etat.
« Les dépenses d'investissement sont groupées sous trois titres :
« - dépenses d'investissement de l'Etat pour son propre compte ;
« - dépenses d'aide à l'investissement ;
« - dotations en fonds propres et acquisitions d'actifs. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 174, présenté par M. Charasse, et tendant :
I. - Après le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 11, à insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - les dotations des pouvoirs publics, qui comportent des dépenses ordinaires et des dépenses d'investissement ; ».
II. - Dans le cinquième alinéa de ce texte, à remplacer les mots : « quatre titres » par les mots : « trois titres ».
III. - A supprimer le septième alinéa de ce texte.
IV. - A compléter ce texte, in fine, par un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Outre la Présidence de la République, le Parlement, le Conseil constitutionnel, le Conseil économique et social, la Haute Cour de Justice et la Cour de Justice de la République, les dotations des pouvoirs publics peuvent comporter les crédits relatifs aux organismes publics qui, en raison de leur indépendance, sont soumis à des règles particulières dérogatoires en matière d'ordonnancement ou de paiement de leurs dépenses. »
Par amendement n° 251 rectifié, MM. Fréville, Arthuis et Badré proposent de rédiger comme suit l'article 4 :
« Les dépenses budgétaires de l'Etat comprennent les catégories suivantes :
« - les dépenses définitives de fonctionnement ;
« - les dépenses définitives en capital ;
« - les dépenses financières non visées à l'article 25.
« Les dépenses définitives de fonctionnement regroupent sous cinq titres :
« 1° les charges de la dette de l'Etat et les dépenses en atténuation de recettes ;
« 2° les dotations des pouvoirs publics ;
« 3° les dépenses de personnel ;
« 4° les dépenses de fonctionnement courant des services ;
« 5° les dépenses d'intervention et les dépenses résultant des garanties supportées par l'Etat.
« Les dépenses définitives en capital regroupent sous deux titres :
« 5° les dépenses d'investissement de l'Etat pour son propre compte ;
« 6° les aides à l'investissement et les autres transferts en capital versés par l'Etat.
« Les dépenses financières regroupent sous deux titres :
« 7° les prêts et avances ;
« 8° les dotations en fonds propres et acquisitions d'actifs financiers. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 11.
M. Alain Lambert, rapporteur. Il s'agit de prévoir une présentation des dépenses budgétaires de l'Etat plus développée que celle de l'Assemblée nationale, limitée à six titres.
La nomenclature de l'Assemblée nationale comporte, à nos yeux, trois inconvénients.
Tout d'abord, certaines charges budgétaires comme les charges d'intérêts y sont difficilement rattachables. En outre, certains titres de dépenses sont susceptibles de recouvrir des charges de nature économique dissemblable. Il en va ainsi de la catégorie des dépenses d'intervention susceptibles de mêler des dépenses de fonctionnement et d'investissement et dans lesquelles il n'y a guère de raison de ne pas inclure les prêts et avances.
Enfin, cette nomenclature n'assure pas de traçabilité suffisante des opérations, ce qui est un grave handicap dans un système où la fongibilité quasi complète des crédits a été instituée.
M. le président. La parole est à M. Charasse, pour présenter le sous-amendement n° 174.
M. Michel Charasse. Ce sous-amendement présente deux aspects.
La présentation qui est proposée par M. Lambert et la commission des finances à l'article 4 pose un problème de logique.
On nous dit, en effet, que les dépenses budgétaires de l'Etat comprendront les dépenses ordinaires, d'intervention et d'investissement. Puis, plus loin, on nous dit que les dépenses ordinaires comportent notamment les dotations des pouvoirs publics. Mais, dans la dotation des pouvoirs publics, mes chers collègues, il y a le Parlement. Et le Parlement gère, pour le compte de l'Etat, les bâtiments qui lui sont affectés et il y fait des investissements : le palais du Luxembourg, le Palais-Bourbon, les annexes du Palais-Bourbon, ainsi que Versailles pour les locaux du Congrès.
C'est pour cette raison que je préférais sortir les dotations des pouvoirs publics des distinctions « dépenses ordinaires, dépenses en capital », d'autant plus que les dépenses d'investissement sont regroupées sous trois titres dont l'un se lit ainsi : « Dépenses d'investissement de l'Etat pour son propre compte. » Or les dépenses du Parlement, en matière d'investissement, sont des dépenses de l'Etat que les assemblées font pour le compte de l'Etat, mais au bénéfice de bâtiments concédés au Parlement par l'ordonnance du 17 novembre 1958. Mais il n'empêche que ce sont des dépenses d'investissement. Donc, tout cela me paraissait plus clair.
Par ailleurs, j'avais suggéré que, peut-être, on rattache aux « pouvoirs publics » tout ce qui correspond, dans notre pays, à des règles particulières de gestion, de contrôle budgétaire, d'ordonnancement ou autre ; je pense au médiateur, au CSA, bref, à tous les organismes dits « indépendants » et dont j'ai horreur pour ce motif, en dehors de ceux, naturellement, qui sont prévus par la Constitution.
C'est une précision rédactionnelle qui me paraît plus logique. Mais, si elle n'est pas retenue, je n'en ferai pas une maladie !
M. le président. La parole est à M. Fréville, pour présenter l'amendement n° 251 rectifié.
M. Yves Fréville. Entre les deux adages : non bis in idem et bis repetita placent, je serai tenté de choisir le second.
Je propose une classification des dépenses qui est la réplique de la classification que j'avais proposée pour les recettes. Je ne redirai pas l'intérêt que présente cette classification qui figure dans l'ordonnance organique actuelle.
Je remarque par ailleurs que, dans l'ensemble, la classification de la commission des finances n'est pas très éloignée de celle que nous proposons, et ce à deux exceptions près.
Tout d'abord, les dépenses d'intervention comprennent, très curieusement, les dépenses de prêts et d'avances. Là encore, j'estime qu'il s'agit de dépenses financières qui n'ont rien à voir avec, par exemple, des subventions d'investissement. Comment pouvez-vous faire figurer dans la même rubrique des crédits d'intervention les subventions de fonctionnement qui sont faits à fonds perdus et les prêts et avances qui permettront d'obtenir un remboursement à l'avenir ?
Je me pose, d'ailleurs, la question de savoir où seront les prêts et avances sur impositions locales dans cette loi organique.
De la même façon, en ce qui concerne les dépenses d'investissements, il est assez délicat de mettre dans la même rubrique les dépenses d'investissement et les dépenses d'aide à l'investissement. C'est un très grand progrès par rapport à la version de l'Assemblée nationale puisque, dans cette dernière, les dépenses de subventions d'investissement sont classées en dépenses d'intervention avec les autres dépenses ordinaires.
Par ailleurs, je constate que, dans l'amendement n° 11, les dotations en fonds propres et acquisitions d'actifs qui sont des opérations sur titres, et qui, a mon sens, relèvent des opérations financières, deviennent des opérations d'investissement !
Voilà pour quelles raisons, monsieur le président, je maintiens la classification entre opérations définitives et opérations financières.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 174 et l'amendement n° 251 rectifié ?
M. Alain Lambert, rapporteur. S'agissant du sous-amendement n° 174, je comprends l'intention de M. Charasse, mais je lui recommanderais de le retirer car sa rédaction n'est pas satisfaisante. D'abord, elle conduit à une présentation par titre des crédits des pouvoirs publics qui constituent en eux-mêmes un titre à eux seuls, ce qui n'est pas très rigoureux. Par ailleurs, elle aboutit à définir assez largement, mais, à mon avis, de manière assez imprécise, les pouvoirs publics alors qu'il me paraît préférable de préserver leur définition coutumière.
Je demande donc à M. Charasse de retirer son sous-amendement ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.
S'agissant de l'amendement n° 251 rectifié, je ne suis pas expert en la matière mais il existe, me semble-t-il, plusieurs langues des comptes et, pour notre part, nous nous efforçons d'utiliser celle qui est actuellement en vigueur. Je reste logique avec les précédentes dispositions qui ont été adoptées comme vous restez logique avec vos propositions antérieures.
Cela dit, il n'y a pas d'opposition de fond entre nos deux conceptions. Il s'agit simplement de deux langues différentes.
La commission est cependant défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 11, le sous-amendement n° 174 et l'amendement n° 251 rectifié ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. L'amendement n° 11 modifie la présentation, en termes de nomenclature, des titres par rapport à ce qui a été proposé à l'Assemblée nationale. J'espère que M. le président Lambert ne m'en voudra pas, mais j'ai une certaine préférence pour la nomenclature par titre qui a été adoptée par l'Assemblée nationale.
Elle me paraît plus simple, plus ramassée et, par conséquent, plus claire. Il me semble également qu'elle exprime mieux l'esprit de la réforme de modernisation de l'Etat qui voudrait que l'attention se porte plus désormais sur les résultats fixés que sur la nature de la dépense effectuée.
Par ailleurs, je partage l'avis du président de la commission des finances sur le sous-amendement n° 174 et sur l'amendement n° 251 rectifié.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 174.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Au fond, la nouvelle loi organique est faite pour clarifier. Or on commence à clarifier en admettant qu'il y ait des dépenses d'investissement dans les dépenses ordinaires. Tout cela me paraît très logique !
Cela dit, je retire mon sous-amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 174 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 11.
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Je vais voter l'amendement de la commission des finances et retirer le mien.
Après avoir entendu Mme la secrétaire d'Etat, je relève qu'entre le texte de l'Assemblée nationale et le texte de la commission il y a un énorme progrès. Il porte sur le classement des subventions d'investissement, qui représentent l'essentiel des dépenses civiles en capital aujourd'hui ; je ne parle pas des dépenses militiares. Sur 80 milliards de francs environ, il y a 20 milliards de francs d'investissements directs et 60 milliards de francs de subventions d'investissement.
Le mérite de la proposition de la commission est de faire entrer les dépenses d'investissement, ces 60 milliards de francs, dans la classification des dépenses budgétaires de l'Etat, c'est pourquoi je voterai cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 251 rectifié est retiré.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 4 est ainsi rédigé.

Article 5