SEANCE DU 7 JUIN 2001
M. le président.
Par amendement n° 102 rectifié, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après
le premier alinéa du I du texte présenté par le 2 du I de l'article 6 pour
l'article L. 312-1-3 du code monétaire et financier, un alinéa ainsi rédigé
:
« Le ou les médiateurs désignés par les établissements de crédit remplissent
leur mission sans percevoir ni rémunération ni indemnité ou remboursement de
frais de toute nature de la part de l'établissement de crédit auquel ils sont
rattachés. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Il s'agit ici d'une question essentielle, celle du statut des médiateurs
attachés à la relation entre les établissements de crédit et la clientèle.
Nous ne mettons évidemment pas en question la nécessité, surtout dans un
contexte de concurrence et de diversification de l'offre bancaire, voire de
sophistication des services rendus, de proposer aux usagers des établissements
de crédit un outil de prévention des éventuels conflits pouvant naître de la
relation commerciale. Cependant, nous souhaitons, par cet amendement, donner un
contenu particulier au statut des médiateurs.
On comprendra en effet aisément que cette fonction ne puisse être directement
liée à un établissement de crédit quel qu'il soit. Cela poserait en effet des
problèmes de subordination de l'activité de ces médiateurs à l'activité des
établissements, et mettrait donc en cause l'impartialité même des
médiateurs.
Aussi, nous souhaitons qu'aucun lien pécuniaire ne soit établi entre les
médiateurs et les établissements de crédit auxquels ils seraient attachés.
C'est pourquoi cet amendement tend à définir les conditions de l'indépendance
d'intervention des médiateurs bancaires.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Le rapporteur est très perplexe. Si le médiateur
n'est pas rémunéré par la banque, par qui est-il rémunéré ? Toute peine mérite
salaire, cher collègue ! Il s'agit d'un travail sérieux et complexe. Il faudra
écouter les uns et les autres, rapprocher les points de vue, trouver des
solutions.
Je ne vois que deux possibilités. La première : les médiateurs sont des
fonctionnaires de l'Etat. Peut-être y a-t-il trop de fonctionnaires, et
peut-être certains peuvent-ils s'acquitter de ces missions ? Seconde
possibilité : il s'agit de personnalités richissimes qui consacreraient leur
temps libre à l'intérêt général, ce qui, après tout, est une bonne chose, et je
serais heureux que M. Foucaud défende ce type d'action, tourné bénévolement
vers l'intérêt général, le service de nos concitoyens. Toutefois, je ne suis
pas persuadé que ce soit très réaliste.
Pour ces raisons la commission des finances, surprise par le dépôt d'un tel
amendement, émet un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je comprends parfaitement l'objectif visé par cet
amendement. En effet, il me paraît légitime d'assurer l'indépendance des
médiateurs. Je crains néanmoins que la méthode et le remède utilisés ne soient
excessivement sévères en excluant toute possibilité de défraiement. En effet,
on risque ainsi de se priver des compétences de personnes susceptibles
d'assumer ces fonctions dans les meilleures conditions.
Si l'action d'un médiateur n'était pas assortie de toute l'indépendance
requise, le comité de la médiation bancaire peut intervenir. Dans ces
conditions, cet amendement ne me semble pas absolument nécessaire au bon
fonctionnement du système de la médiation. Aussi, je m'en remets à la sagesse
du Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 102 rectifié.
M. Thierry Foucaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Nous n'avons pas à recevoir de leçons de bénévolat de la part de M. le
rapporteur général, et notre action le prouve chaque jour.
Cela étant dit, j'ai bien compris les propos de Mme la secrétaire d'Etat, mais
cette question reste en débat, et la réflexion doit se poursuivre. Aussi, je
demanderai à ses services d'approfondir cette question, car l'indépendance des
médiateurs est un point fondamental.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 102 rectifié, repoussé par la commission et
pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 139, M. Angels et les membres du groupe socialiste et
apparentés proposent de compléter le deuxième alinéa du I du texte présenté par
le 2 du I de l'article 6 pour l'article L. 312-1-3 du code monétaire et
financier par une phrase ainsi rédigée : « L'existence de la médiation et ses
modalités d'accès doivent faire l'objet d'une mention portée sur le relevé de
compte ou sur la convention visée à l'article L. 312-1-1. »
La parole est à M. Moreigne.
M. Michel Moreigne.
S'il convient effectivement de donner la possibilité de recourir à la
médiation, encore faut-il que les consommateurs soient informés de l'existence
d'une telle procédure.
L'expérience de La Poste, de la Société générale et du Crédit lyonnais montre
que seuls quelques centaines d'usagers peuvent s'adresser aux structures de
médiation mises en place par ces établissements. Cette faculté est donc très
peu connue. C'est pourquoi nous demandons que l'existence de la médiation et
ses modalités d'accès fassent l'objet d'une mention portée sur le relevé de
compte ou sur la convention visée à l'article L. 312-1-1 du code monétaire et
financier.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
En commission, nous avons demandé aux auteurs de cet
amendement de bien vouloir le rectifier en supprimant un groupe de mots pour
que la phrase qu'ils proposent d'insérer dans le texte présenté pour l'article
L. 312-1-3 du code monétaire et financier se lise ainsi : « L'existence de la
médiation et ses modalités d'accès doivent faire l'objet d'une mention portée
sur la convention visée à l'article L. 312-1-1. » Sous réserve de cette
modification, la commission émet un avis favorable.
M. le président.
Monsieur Moreigne, acceptez-vous de rectifier ainsi votre amendement ?
M. Michel Moreigne.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 139 rectifié, présenté par M. Angels et
les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant à compléter le
deuxième alinéa du I du texte proposé par le 2 du I de l'article 6 pour
l'article L. 312-1-3 du code monétaire et financier par une phrase ainsi
rédigée : « L'existence de la médiation et ses modalités d'accès doivent faire
l'objet d'une mention portée sur la convention visée à l'article L. 312-1-1.
»
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement émet un avis favorable car cet
amendement va dans le bon sens, puisqu'il permettra de développer l'information
dont dispose le consommateur.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 139 rectifié, accepté par la commission et
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 103 rectifié, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après les mots :
« des entreprises d'investissement », de rédiger comme suit la fin du second
alinéa du II du texte présenté par le 2 du I de l'article 6 pour l'article L.
312-1-3 du code monétaire et financier : « et trois personnalités qualifiées,
l'une sur proposition du ministère de l'économie et des finances, la seconde
sur proposition du ministre de l'emploi et de la solidarité, la troisième sur
proposition du garde des sceaux, ministre de la justice. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Il s'agit, par cet amendement, d'apporter une précision, qui nous paraît
indispensable, à la composition du comité de la médiation bancaire, s'agissant
de la personnalité des membres qualifiés choisis en sus des représentants
respectifs des associations de consommateurs et, bien sûr, des établissements
de crédit.
La médiation bancaire doit permettre, selon nous, de mettre en évidence les
difficultés que rencontrent les usagers lors de leurs relations avec
l'établissement de crédit.
Ces difficultés trouvent aujourd'hui deux illustrations essentielles. Il
s'agit, d'une part, des diverses formes de l'exclusion bancaire, qui touche
bien sûr les populations les plus précarisées, mais également les personnes
plus vulnérables parmi celles qui conservent un droit d'accès aux services
bancaires : salariés modestes ou moyens, petits commerçants et artisans. Il
s'agit, d'autre part, des difficultés de nature juridique alimentant un
contentieux dont la complexité s'accroît et qui peut justifier que nous
débattions aujourd'hui de la normalisation des relations commerciales
bancaires.
Aussi, il nous semble judicieux de prévoir que les personnalités qualifiées
pour siéger au comité de la médiation bancaire soient également désignées, en
sus des prérogatives naturellement dévolues au ministère de l'économie et des
finances, par le ministère des affaires sociales et par le ministère de la
justice.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement est légèrement différent de celui que
la commission avait examiné. La version soumise à la commission exprimait un
ostracisme complet vis-à-vis de Bercy. Là, on laisse subsister un représentant
de Bercy sur trois personnalités qualifiées, ce qui - madame le secrétaire
d'Etat, vous le voyez ! - est un progrès.
Cela étant dit, s'agissant de cette éventuelle discussion interministérielle,
la commission ne saurait prendre parti avant de vous avoir entendue.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je comprends bien le souci exprimé par les auteurs de
l'amendement. Cependant, il peut être satisfait sans nécessairement recourir à
une disposition législative.
En effet, il s'agit de solliciter les personnalités les plus qualifiées par
une procédure interministérielle tout à fait classique, qui passe, bien
évidemment, par la consultation de chacun des ministres intéressés. Le fait que
cette nomination relève du ministre chargé de l'économie ne signifie évidemment
pas que ce dernier ne consulte pas ses collègues pour bénéficier des
compétences des personnalités les plus qualifiées. Le Gouvernement a bien
entendu le souci exprimé. Il en sera tenu compte dans les procédures de
désignation. Mais, je le répète, il n'est pas absolument nécessaire de recourir
à une disposition législative.
M. le président.
Quel est donc l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur.
La commission suit Mme le secrétaire d'Etat : avis
défavorable.
M. le président.
Monsieur Foucaud, l'amendement n° 103 rectifié est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud.
Non, je le retire, monsieur le président. En effet, Mme la secrétaire d'Etat
vient de préciser que des dispositions seront prises pour tenir compte de la
philosophie qui le sous-tend.
M. le président.
L'amendement n° 103 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 312-1-3 du code monétaire
et financier.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE L. 312-1-4 DU CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER