SEANCE DU 28 NOVEMBRE 2000


M. le président. « Art. 12 bis . - Dans le a du 2° de l'article 39 AA du code général des impôts, après les mots : "économiser l'énergie", sont insérés les mots : "et les équipements de production d'énergies renouvelables". »
Par amendement n° I-43, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
A. - De compléter in fine cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
« II. - Le dernier alinéa de l'article 39 AA du code général des impôts est supprimé.
« III. - Les pertes éventuelles de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du II sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés au articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
B. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention : « I. - ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est une situation assez drôle, voire cocasse, madame le secrétaire d'Etat, que je vais tâcher d'exposer en cette fin de matinée.
M. Paul Loridant. Rions, rions !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je vous y incite, mon cher collègue !
L'un de vos partenaires un peu turbulent de la majorité plurielle à l'Assemblée nationale...
M. Henri de Raincourt. Qui ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... en l'occurrence, M. Yves Cochet, député des Verts ...
M. Josselin de Rohan. De quelle tendance ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... et vice-président de l'Assemblée nationale, a obtenu du Gouvernement, ...
M. Paul Loridant. Par un vote !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... une concession qu'il estimait sans doute substantielle, puisqu'elle a vraisemblablement constitué l'un des éléments qui a permis au Gouvernement de gérer le vote de la loi de finances en première lecture à l'Assemblée nationale.
En modifiant l'article 39 AA du code général des impôts, l'article 12 bis permet, semble-t-il, aux matériels de production d'énergie renouvelable de bénéficier de l'amortissement dégressif. Telle est manifestement l'intention de l'auteur de l'amendement. Mais, en réalité, le dernier alinéa de cet article prévoit que ces dispositions ne s'appliquent pas aux matériels acquis ou fabriqués après 1991. S'agit-il d'une erreur d'inattention de la part du Gouvernement ou d'un moyen de faire des concessions sans frais à une fraction de sa majorité plurielle ? On peut s'interroger.
Face à ce dispositif, partageant naturellement l'objectif recherché mais ayant le souci de voter des lois qui soient applicables et utiles, le Sénat doit, nous semble-t-il, ouvrir le dispositif de l'article 39 AA du code général des impôts à tous les matériels, quelle que soit leur date d'acquisition ou de fabrication. L'amendement n° I-43 va au-delà des matériels de production d'énergie renouvelable, puisqu'il concerne également ceux qui permettent d'économiser de l'énergie ou des matières premières.
Madame le secrétaire d'Etat, ne nous en veuillez pas si nous essayons de donner un caractère opérationnel à la démarche sympathique de M. Cochet, démarche à laquelle le Gouvernement a pu donner un avis d'autant plus favorable qu'elle ne lui coûtait rien ! Ayez un bon geste, si ce n'est pas à l'égard du Sénat et de la commission des finances, du moins à l'égard de l'un de vos partenaires, remuant certes, mais imaginatif, il faut le reconnaître, au sein de la majorité qui vous soutient plus ou moins selon les moments !
Murmures sur les travées socialistes.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je comprends que l'article 12 bis, tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale sur l'initiative de M. Cochet, suscite de la part de votre rapporteur général une interrogation d'ordre rédactionnel.
En effet, l'article 12 bis étend le champ d'application de l'article 39 AA du code général des impôts afin d'accorder aux équipements de production d'énergie renouvelable le bénéfice de l'amortissement accéléré prévu par le texte. Or l'article 39 AA du code général des impôts a cessé de s'appliquer depuis le 1er janvier 1991, comme l'indique le dernier alinéa. Il en résulte donc une contradiction, mais elle est de pure forme. En effet, sur le strict plan juridique et malgré ce dernier alinéa, le Gouvernement considère que l'article 39 AA du code général des impôts doit bien s'appliquer de nouveau pour les équipements de production d'énergie renouvelable du fait de la modification opérée par l'article 12 bis de ce projet de loi de finances.
Pour faciliter la lecture de l'article, je veux bien admettre qu'il serait préférable de modifier la rédaction du dernier alinéa, bien qu'il n'existe aucune ambiguïté ni dans l'intention du Gouvernement ni, je crois, dans celle de M. Cochet.
Toutefois, la proposition qui nous est faite va bien au-delà de cette correction technique, puisqu'elle aboutit à faire renaître ce régime non seulement pour les équipements de production d'énergie renouvelable - ce qui était bien l'intention initiale -, mais également pour l'ensemble des biens visés par son champ d'application, et cela ne me paraît pas opportun.
Quels équipements seraient concernés par l'extension ainsi opérée ?
Ce sont d'abord les matériels destinés à économiser l'énergie qui, en réalité, peuvent bénéficier d'un régime plus favorable, celui de l'amortissement exceptionnel sur douze mois prévu à l'article 39 AB du code général des impôts.
Ensuite, ce sont les matériels utilisés dans certaines opérations d'économie d'énergie qui ont reçu une aide de l'Etat et qui ont été soumises à un agrément discrétionnaire de l'administration fiscale.
La proposition faite ne me paraît pas en phase avec la modernisation de la fiscalité que nous souhaitons tous. C'est pourquoi, si je puis vous donner mon plein accord sur un amendement de précision juridique dont les effets ont été exactement appréciés, je souhaite, en revanche, le retrait de la partie de l'amendement visant à étendre le dispositif, extension dont les conséquences seraient disproportionnées.
Je suis tout à fait prête à étudier avec vous, peut-être lors de la suspension de séance, une nouvelle rédaction de cet amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Afin de répondre à l'invitation de Mme le secrétaire d'Etat, il convient, monsieur le président, de suspendre la séance.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, la conférence des présidents devant se réunir à douze heures quinze, nous allons interrompre maintenant nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Jean Faure.)