SEANCE DU 22 NOVEMBRE 2000
M. le président.
« Art. 13. - I. - Le dernier alinéa de l'article 3 de la loi du 26 janvier
1984 susmentionnée est supprimé.
« Les agents contractuels qui ont été recrutés en application des dispositions
du dernier alinéa de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 susmentionnée
dans sa rédaction antérieure à la présente loi, en fonctions à la date de
publication de la présente loi ou bénéficiaires, à la même date, de l'un des
congés prévus par le décret pris en application du dernier alinéa de l'article
36 de la loi du 26 janvier 1984 susmentionnée, continuent à être employés dans
les conditions prévues par la législation antérieure, lorsqu'ils ne sont pas
recrutés au titre des dispositions des articles 36 ou 38 de la loi du 26
janvier 1984 ou au titre des dispositions des articles 3 à 5 de la présente
loi.
« II. - L'article 14 de la loi du 26 janvier 1984 susmentionnée est complété
par les dispositions suivantes :
« Les centres de gestion réalisent une synthèse des informations mentionnées à
l'alinéa précédent ainsi que de toutes autres données relatives à l'évolution
des emplois dans les collectivités et établissements relevant de leur ressort
et aux besoins prévisionnels recensés en application de l'article 43 de la
présente loi, dans le but d'organiser une concertation annuelle auprès de ces
collectivités et établissements et de contribuer à l'évaluation des besoins
prévisionnels de recrutement ainsi que des moyens nécessaires à leur mise en
oeuvre.
« A ce titre, ils examinent plus particulièrement les demandes et propositions
de recrutement et d'affectation susceptibles d'être effectuées sur la base du
deuxième alinéa de l'article 25.
« Les informations et propositions issues de cette concertation sont portées à
la connaissance des comités techniques paritaires.
« III. - Dans la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 34 de la loi
du 26 janvier 1984 susmentionnée, le terme : "trois" est remplacé par le terme
: "deux".
« IV. - L'article 36 de la loi du 26 janvier 1984 susmentionnée est complété
ainsi qu'il suit :
« En outre, l'accès à certains cadres d'emplois peut être, dans les conditions
fixées par leur statut particulier, ouvert par la voie d'un troisième concours
aux candidats justifiant de l'exercice, pendant une durée déterminée, d'une ou
de plusieurs activités professionnelles ou d'un ou de plusieurs mandats de
membre élu d'une collectivité territoriale. Ce troisième concours peut aussi
être ouvert à des candidats justifiant d'une ou de plusieurs activités en
qualité de responsable d'une association.
« La durée de ces activités ou mandats ne peut être prise en compte que si les
intéressés n'avaient pas, lorsqu'ils les exerçaient, la qualité de
fonctionnaire, de magistrat, de militaire ou d'agent public. Les statuts
particuliers fixent la nature et la durée des activités requises, et la
proportion des places offertes pour l'accès par ces concours aux cadres
d'emplois.
« V. - Pour la durée d'application du dispositif de la présente loi, le
rapport établi sur la base de l'article 33 de la loi du 26 janvier 1984
susmentionnée comporte un bilan de la mise en oeuvre des dispositions prévues
aux articles 3 à 5 ci-dessus.
« Le centre de gestion est rendu destinataire du bilan susmentionné et en
assure la transmission aux organisations syndicales représentées au Conseil
supérieur de la fonction publique territoriale. »
Je suis d'abord saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 13 est présenté par M. Hoeffel, au nom de la commission.
L'amendement n° 25 rectifié est déposé par MM. Eckenspieller et Vasselle.
Tous deux tendent à supprimer le I de l'article 13.
Par amendement n° 37 rectifié, MM. Eckenspieller et Vasselle proposent de
rédiger comme suit le I de cet article :
« I. - Le dernier alinéa de l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984
précitée est complété par les mots suivants : "et relevant de la catégorie A ou
B. Les agents ainsi recrutés, lorsqu'ils occupent un ou plusieurs emplois pour
une durée inférieure à la moitié de la durée légale du travail, ne sont pas
soumis aux dispositions du 1er alinéa de l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13
juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires". »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 13.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Il s'agit d'une question de principe que la plupart d'entre
vous ont soulevée au cours de leurs interventions.
Le projet de loi tend à supprimer la possibilité pour les communes de moins de
2 000 habitants et pour leurs groupements de recruter des contractuels sur des
emplois permanents à temps non complet.
Or, nous estimons que ce mode de recrutement est un élément de souplesse pour
ces communes. C'est donc pour garantir cette souplesse de gestion que la
commission vous propose, mes chers collègues, de supprimer le paragraphe I de
l'article 13.
M. le président.
La parole est à M. Eckenspieller, pour présenter les amendements n°s 25
rectifié et 37 rectifié.
M. Daniel Eckenspieller.
L'amendement n° 25 rectifié étant identique à celui de la commission, je
n'ajouterai rien aux propos de M. le rapporteur.
Quant à l'amendement n° 37 rectifié, il n'aura plus de raison d'être si
l'amendement n° 13 est adopté. Si tel ne devait pas être le cas, cet amendement
n° 37 rectifié constituerait une solution de repli qui réglerait au moins
partiellement le problème que nous cherchons à résoudre.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 37 rectifié ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je me place dans une situation optimiste en espérant que
l'amendement n° 13 sera adopté.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 13, 25 rectifié, et 37
rectifié ?
M. Michel Sapin,
ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Nous
abordons là l'un des sujets importants qui ont été soulevés au Sénat, en
particulier sur l'initiative de la commission.
L'analyse statistique des effets de l'accord Perben montre que la proportion
des personnels concernés qui ont pu être titularisés dans la fonction publique
d'Etat est importante. En revanche, cette proportion est faible dans les
collectivités locales. Il y a donc, je crois, un problème spécifique aux
collectivités territoriales en termes de précarité.
J'ai bien compris votre souci de garantir de la souplesse. Mais, si ce souci
aboutit à ce que, dans les collectivités territoriales, il reste un nombre très
important de personnels en situation précaire, alors que, par ailleurs, l'Etat
se verra imposer une plus grande rigueur pour diminuer ce nombre, la situation
paraîtra des plus choquantes, notamment aux personnels qui, par les hasards de
leur carrière, se trouveront employés par une collectivité territoriale, alors
qu'ils auraient pu entrer aussi bien dans une administration de l'Etat.
Le Gouvernement a donc essayé, à la fois, de respecter la liberté des
collectivités territoriales tout en parvenant par diverses modifications, y
compris par des modifications législatives comme celle dont nous parlons, de
réduire le champ du recrutement contractuel et donc du recrutement précaire
dans les collectivités territoriales.
Monsieur le rapporteur, vous le savez mieux que quiconque, vous aviez souhaité
apporter un certain nombre d'assouplissements dans votre loi du 27 décembre
1994 par l'élargissement des possibilités de recours au temps non complet et
par la généralisation - ce qui est très important - du recrutement direct, sans
concours, pour les emplois de catégorie C. Ainsi, une plus grande souplesse
dans le choix de ceux qui peuvent servir ces collectivités territoriales a été
instituée grâce à votre initiative.
Je crois pouvoir dire qu'un amendement qui a été déposé sur cet article vise à
apporter plus de souplesse en permettant à un agent employé à temps non complet
de cumuler cet emploi à temps partiel avec un autre emploi. Cet assouplissement
permettrait de résoudre bien des difficultés.
Je crois donc que le dispositif qui a la faveur du Gouvernement, c'est-à-dire
la suppression de la possibilité pour les communes de moins de deux mille
habitants, conjugué avec les dispositions que vous avez introduites, en
particulier le recrutement direct sans concours de titulaires pour les
catégories C, conjugué également avec le dispositif de cumul que vous allez
proposer maintenant, permettra de résoudre l'ensemble des problèmes.
Etre rigoureux pour faire en sorte que le champ de la précarité diminue, y
compris dans les collectivités territoriales, respecter la liberté de chacune
des collectivités territoriales dans le choix des agents embauchés, mais aussi
respecter chacun des agents en lui permettant d'avoir, par un cumul
d'activités, un salaire complet, tels sont les principes qui recueillent
l'assentiment du Gouvernement.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Monsieur le ministre, j'ai écouté votre argumentation avec
attention et je me dois d'intervenir à nouveau car nous nous trouvons là au
coeur d'un des problèmes fondamentaux.
Trois raisons me paraissent justifier notre amendement.
Première raison : si les assouplissements introduits par la loi de décembre
1994 faisaient réellement double emploi avec le recrutement contractuel à temps
non complet dans les petites communes, on aurait déjà procédé, en 1994, à la
suppression de cette mesure dérogatoire introduite sept ans auparavant.
Deuxième raison : le recrutement sans concours dans la catégorie C ne répondra
pas à l'ensemble des besoins des petites communes et de leurs groupements, sauf
à considérer qu'elles n'auraient pas besoin d'agents de catégories A et B.
Troisième raison : la mise à disposition de personnels par les centres de
gestion est une mesure utile - nous ne le contestons pas - mais actuellement
encore peu utilisée et très inégalement développée selon les centres de
gestion. Il faut espérer que l'on y recourra de plus en plus.
En attendant, notre amendement nous paraît correspondre à la réalité vécue
dans les communes et leurs groupements. C'est donc faire preuve de sagesse que
de vous demander, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 13 et 25 rectifié.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
M. Hoeffel a, d'une manière tout à fait pertinente, énoncé les raisons pour
lesquelles cet amendement doit être adopté.
J'ajouterai deux remarques supplémentaires.
Je me souviens parfaitement de l'assouplissement apporté dans le cadre de la
loi de 1994, puisque j'avais déposé, au nom de l'Association des maires de
France, l'amendement qui a permis le recrutement direct des agents de catégorie
C.
Je rappelle également que le texte qui nous est soumis ce soir est le résultat
d'un protocole d'accord engagé entre le Gouvernement et les organisations
syndicales. Les associations représentatives d'élus, qui n'étaient pas invitées
à la table des négociations, n'étaient pas présentes. Et l'Association des
maires de France, au sein de laquelle je préside le groupe de la fonction
publique territoriale, a été conduite à donner un avis sur les dispositions de
ce texte : c'est à l'unanimité que tous les membres du groupe de la fonction
publique territoriale, dans lequel se trouvent les communes affiliées et non
affiliées, ont demandé la suppression de ces dispositions.
Monsieur le ministre, si nous avions été à la table des négociations, vous
auriez su dès le départ, devant les organisations syndicales, que nous n'étions
pas favorables à ces mesures.
Il me paraît important que la représentation nationale tienne compte de l'avis
exprimé par l'Association des maires de France, toutes sensibilités et toutes
strates démographiques confondues, en ce qui concerne le territoire
national.
M. Claude Domeizel.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel.
Il s'agit, en effet, d'un article important.
La possibilité de recruter des agents dans les communes de moins de 2 000
habitants dès lors que la durée du travail hebdomadaire était de moins de
trente et une heures trente date de 1987. Depuis, les choses ont beaucoup
changé, cela a été dit. Depuis 1991 et 1994, tout emploi de catégorie C à
l'échelle 2 peut être pourvu sans concours.
Les centres de gestion, on l'a rappelé, ont un rôle à jouer, même si certains
ne le jouent pas encore pleinement, et on doit les encourager à le faire.
L'intercommunalité a également modifié les possibilités offertes aux
communes.
Pour sa part, le groupe socialiste votera contre cet amendement. Il suffit de
lire l'intitulé du texte : « projet de loi relatif à la résorption de l'emploi
précaire » ! On ne peut prétendre vouloir résorber l'emploi précaire et, dans
le même temps, laisser la porte ouverte au recrutement d'un grand nombre de
personnes et d'agents en emploi précaire ! On ne peut pas tenir deux langages
!
J'ai une fort longue expérience de président de centre de gestion dans mon
département et je peux affirmer qu'aujourd'hui la demande des petites communes
peut être satisfaite, même si l'on supprime cette mesure concernant les
communes de moins de 2 000 habitants.
Le problème pour les communes de moins de 2 000 habitants - et c'est la raison
pour laquelle j'ai déposé, au nom du groupe socialiste, un amendement que nous
examinerons ultérieurement - c'est le cumul d'un emploi public et d'un emploi
privé. Il est vrai que lorsqu'on a recruté un agent dans une petite commune et
qu'il exerce en même temps une activité privée on se heurte à des
difficultés.
Il faut donner la possibilité à des personnes qui sont titulaires dans la
fonction publique de pouvoir travailler dans le secteur privé, et répondre
ainsi aux attentes des maires des communes rurales. Telle est la raison pour
laquelle, je le répète, nous voterons contre cet amendement.
M. Jean-Jacques Hyest.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest.
Tout d'abord, je me permets de rappeler que les recrutements directs d'agents
de catégorie C n'étaient effectués que pour des raisons de simplification. Il
est à peu près impossible, en effet, d'organiser des concours, par exemple,
pour recruter des agents d'entretien : on risquerait de voir se présenter huit
cents candidats pour un poste. Tel était donc bien - M. le rapporteur s'en
souvient fort bien - le principal motif de la simplification.
Ensuite, je suis quelque peu surpris par les propos tenus par M. Domeizel :
des agents publics qui ne pourraient plus être recrutés à temps non complet
pourraient, en revanche, cumuler un emploi dans le privé. Or, en vertu d'une
disposition concernant le statut des fonctionnaires, toute personne exerçant
une activité à temps complet ne peut pas cumuler un emploi public et un emploi
privé. C'est d'ailleurs, je le rappelle, ce qui fait parfois toute la
difficulté.
Par ailleurs, ne travailler que quelques heures ne signifie pas nécessairement
précarité. Dans nos petites communes, nous avons parfois recours, pour quelques
heures, à une femme de ménage. Mais, en même temps, elle est employée comme
aide ménagère. En fin de compte, elle travaille à temps complet, mais ce n'est
pas un emploi public, parce qu'elle est également employée par une association.
C'est interdit aujourd'hui, mais ce serait rendu possible demain.
Je vous citerai un autre exemple, celui des personnels qui conduisent les
autobus scolaires.
(M. Claude Domeizel s'exclame.)
Vous voulez interdire
qu'on les recrute à temps non complet et de manière contractuelle !
M. Claude Domeizel.
Pas du tout !
M. Jean-Jacques Hyest.
Si, en fait, c'est ce que vous voulez ! Je ne comprends pas ! C'est très utile
dans les petites communes, et, pour ces personnels, ce n'est pas de la
précarité. Simplement, ils ne sont employés que quelques heures. Il faut donc
maintenir ce dispositif.
M. René Garrec.
Tout à fait !
M. Jacques Mahéas.
Il n'y a pas d'opposition de notre part !
M. Claude Domeizel.
Pas du tout !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 13 et 25 rectifié, repoussés
par le Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 37 rectifié n'a plus d'objet.
La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.
13