SEANCE DU 16 NOVEMBRE 2000
M. le président.
La parole est à M. About.
M. Nicolas About.
Ma question s'adresse à Mme le secrétaire d'Etat à la santé et aux
handicapés.
Madame la secrétaire d'Etat, des tissus de boeufs contaminés ont pu être
disséminés depuis plusieurs années dans les circuits de distribution au travers
de certains dérivés du boeuf.
(Marque d'approbation sur les travées des
Républicains et Indépendants).
Que sont devenus ces produits ?
Quelle position a été prise à l'égard des gélatines, des produits cuisinés à
base de boeuf ou des surgelés, mais surtout des conserves qui dorment depuis
des mois, voire des années dans les placards des particuliers tels que les
raviolis, les hachis parmentiers, les
chili con carne
, des sauces rôties
à la viande et autres cubes de bouillons ?
(M. le ministre de l'agriculture
et de la pêche manifeste de l'impatience).
Je sais bien, monsieur le ministre de l'agriculture, que cela ne vous plaît
pas,..
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Propos irresponsables !
M. Nicolas About,
... mais qui peut certifier la non-utilisation de tissus à risque dans la
fabrication de ces produits ?
Nous savons que plusieurs bêtes sont utilisées et, éventuellement, leurs
tissus mélangés pour la composition de certains produits.
Quelle traçabilité est possible lorsque rien n'est indiqué sur les étiquettes
de ces conserves ?
Dans le rapport d'activité de la DGCCRF, la direction générale de la
concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes pour l'année
1998, on peut lire : « Les viandes séparées mécaniquement sont les viandes
récupérées sur les carcasses par des procédés mécaniques de raclage, de broyage
et de pression. Elles sont utilisées en charcuterie pour certaines denrées
telle que les pâtes farcies, des saucisses à pâte fine ou des quenelles ».
Plus inquiétant encore, on peut lire plus loin : « sur quarante et une
entreprises contrôlées, 50 % utilisaient cette technique mais seulement cinq
d'entre elles l'indiquaient sur leurs étiquettes ».
Nous savons aussi que le risque est aggravé par des importations de viandes,
sous toutes les formes que j'ai évoquées, en provenance de pays n'ayant pris
aucune mesure de dépistage ou de protection depuis de nombreuses années.
Madame la secrétaire d'Etat, même si je vous félicite pour vos déclarations
extrêmement mesurées sur les cas à venir de la maladie de Creutzfeldt-Jakob -
en tant que médecin, j'y ai été sensible - je voudrais savoir quelles mesures
vous comptez prendre pour mettre en garde les consommateurs sur certains
produits dérivés. A-t-il été mis fin à la séparation mécanique des viandes ?
Quelles mesures comptez-vous prendre pour obtenir le rappel de certaines
conserves ou de produits de longue conservation présentant un risque ?
Pouvez-vous, enfin, vous opposer à une mise sur le marché de ces dérivés en
provenance des pays n'ayant pas mis en place les mesures prévues en France ?
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR
et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.
Monsieur le sénateur,
vous avez posé une question à laquelle deux secrétaires d'Etat devraient
répondre : d'une part, le secrétaire d'Etat à la santé, qui va s'efforcer de
répondre à votre interrogation et, d'autre part, le secrétaire d'Etat à la
consommation.
Je vais vous répondre très précisément sur le volet directement consacré aux
activités de santé qui fait partie du plan ambitieux que M. le Premier ministre
a annoncé mardi dernier pour rassurer l'opinion publique sur les mesures de
précaution qui sont prises régulièrement dans notre pays et qui sont
régulièrement réajustées et réévaluées en fonction de l'évolution des
connaissances.
Comme vous le savez, puisque vous êtes médecin, le nouveau variant de la
maladie de Creutzfeldt-Jakob est la conséquence pour l'homme du passage chez
lui de l'agent infectieux de l'encéphalopathie spongiforme bovine. Si le nombre
de cas de maladie de Creutzfeldt-Jakob nouveau variant lié à cet agent
infectieux est limité en France,...
M. Nicolas About.
Cela viendra !
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
... il n'en demeure pas moins une des préoccupations
constantes qui fondent les décisions de santé publique que nous prenons
régulièrement.
Les produits de santé, médicaments, vaccins, dispositifs médicaux mis sur le
marché font l'objet d'une analyse du risque permanente conduite par l'agence
française de sécurité sanitaire des produits de santé, l'ancienne agence du
médicament, analyse suivie régulièrement par le groupe de sécurité virale de
l'agence.
Pour ce qui concerne le sang, même si aucune démonstration scientifique n'a à
ce jour établi la transmission de l'agent infectieux par la transfusion
sanguine, la réévaluation des mesures de précaution et de sécurisation, tant de
l'administration que de la fabrication des produits dérivés du sang, est à
l'oeuvre.
Vous savez qu'aujourd'hui se termine un colloque international qui a eu lieu à
Annecy sur le sujet et que, demain, l'Agence française de sécurité sanitaire
des produits de santé va organiser une conférence pluridisciplinaire réunissant
experts et représentants d'associations d'usagers, de malades, de donneurs de
sang et de prescripteurs. Un avis sera rendu public dans les jours qui
viennent.
M. Nicolas About.
Ce n'est pas la question !
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Pour ce qui concerne les activités de soin, les
mesures de sécurité nécessaires ont été prises et sont régulièrement amplifiées
contre le risque éventuel de transmission de la maladie entre les humains, en
fonction, là aussi, de l'évolution de nos connaissances.
Un programme de renforcement de la désinfection et de la stérilisation des
dispositifs médicaux, mais aussi d'encouragement à l'utilisation du matériel à
usage unique dans les établissements de santé sera mis en oeuvre très
rapidement.
Par ailleurs, me préoccupant des malades et de leurs familles, j'ai engagé
l'élaboration d'un guide de bonne pratique pour la prise en charge du malade,
l'accompagnement et le soutien de celui-ci et de sa famille. Toutes ces mesures
vont aboutir très prochainement.
M. Nicolas About.
Ce n'est pas le sujet !
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
J'en arrive au contrôle des produits de consommation
auxquels vous avez élargi votre question.
Vous savez que les contrôles se font d'une manière très régulière et que les
dates limites de consommation contribuent à l'information des consommateurs.
M. Nicolas About.
Cela remonte à quatre ans...
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Par ailleurs, la France s'est engagée à mettre en
place une traçabilité essentielle pour l'ensemble des produits.
M. Nicolas About.
Le rapport a montré qu'elle était nulle.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
En ce qui concerne la séparation mécanique des
viandes, vous savez qu'elle est maintenant très strictement contrôlée et que
des pratiques nouvelles sont recommandées. Elles vont notamment porter, dans
les jours qui viennent, sur l'élimination des colonnes vertébrales et la
découpe des vertèbres.
M. Nicolas About.
Ce n'est pas le raclage !
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Cela dit, nous nous situons dans un ensemble, l'Union
européenne, où les différents pays n'appliquent pas les mêmes mesures de
précaution et de contrôle que nous.
M. Nicolas About.
C'est vrai !
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Il appartient à la Communauté, au Conseil des
ministres, qui va se pencher sur cette question la semaine prochaine, de porter
à l'ordre du jour l'harmonisation des mesures de précaution.
Les dépêches qui relatent les prises de position des responsables de santé
publique des différents pays de la Communauté nous donnent une indication sur
les difficultés que le ministre de l'agriculture aura à surmonter pour parvenir
à une harmonisation européenne qui garantisse une sécurité des aliments de même
niveau que celle que l'on connaît aujourd'hui en France.
(Applaudissements
sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste
républicain et citoyen.)
RAPPORT DE L'INSERM SUR
« SOUFFRANCE ET VIOLENCE À L'ADOLESCENCE »