SEANCE DU 16 NOVEMBRE 2000
M. le président.
La parole est à M. Debarge.
M. Marcel Debarge.
Je vais essayer à mon tour de poser une question de bon sens, puisque le bon
sens semble être au rendez-vous !
La question que je pose s'adresse à M. le ministre délégué à la ville. Elle
concerne les jeunes, la place des jeunes dans notre société, des jeunes des
villes mais également des jeunes des campagnes.
Pour notre pays, pour l'avenir de notre société, cette place revêt de plus en
plus d'importance.
Bon nombre de ces jeunes, contrairement aux images qui paraissent, savent
mener des actions de solidarité pour peu qu'ils en aient la possibilité et
qu'ils trouvent les moyens nécessaires. J'ai pu le constater dans mon
département, mais cela se vérifie ailleurs. Dans les départements difficiles,
on trouve des jeunes qui agissent dans le domaine associatif, culturel ou
sportif.
Monsieur le ministre, un récent rapport de l'Institut national de la santé et
de la recherche traite de la question des souffrances et des violences à
l'adolescence. Il est nécessaire que les souffrances diverses concernant
l'adolescence soient abordées au même titre que les violences, dont on ne peut
nier la gravité.
Certains veulent croire - je ne dis pas qu'il n'y ait quelques raisons à cela
- que les adolescents sont porteurs de violence. Mais ils sont également les
victimes d'un certain nombre de violences, et nous devons en tenir compte.
Il ne s'agit pas d'établir un équilibre entre ces deux conceptions. Il s'agit
de s'approcher au plus près de la réalité de la vie quotidienne et
collective.
Monsieur le ministre, dans le droit-fil de l'action gouvernementale, compte
tenu du rapport que je viens d'évoquer, je voudrais savoir quels ajustements -
c'est vous qui, je crois, avez employé le terme - doivent être apportés à
l'action que conduit le Gouvernement pour mieux appréhender la place des
adolescents dans notre société et quelle coordination supplémentaire peut être
envisagée avec les autres ministères concernés, mais également avec les
associations et les collectivités locales.
C'est grâce à un vaste effort collectif que nous parviendrons, non pas à
régler ce problème, mais tout au moins à tracer des perspectives qui permettent
à notre société de progresser dans un sens positif.
(Applaudissements sur
les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué à la ville.
J'ai, en effet, commandé aux chercheurs de
l'INSERM le rapport dont vous avez parlé, monsieur le sénateur, au lendemain de
l'apparition du vocable « sauvageon », qui avait, à l'époque, fait couler
beaucoup d'encre.
J'ai voulu savoir s'il n'y avait que les jeunes des banlieues qui posaient des
problèmes, qui en arrivaient au degré de violence retracé dans les pages des
faits divers et, si tel était le cas, pourquoi l'on arrivait à ce résultat.
Le rapport des chercheurs est clair. Nous sommes tous touchés, ruraux,
urbains, dans tous les milieux sociaux, par ces manifestations de violence.
Car, derrière la violence qui fait la une des journaux, il y a aussi une
violence dont on parle moins souvent, la violence des jeunes vis-à-vis
d'eux-mêmes, qui se traduit par des accidents de la circulation, de l'anorexie,
et surtout, hélas ! par un nombre incroyable de suicides.
J'ai donc souhaité que l'on puisse réfléchir à un certain nombre de pistes,
différentes des réponses qui peuvent être apportées par la police ou par la
justice. Il m'a paru important que la représentation nationale se saisisse de
la question de savoir comment éviter à notre jeunesse ce tryptique infernal :
avoir mal, faire mal, mettre à mal.
Les chercheurs ont pris le risque de nous présenter cent propositions pour
nous démontrer qu'ils n'entendaient pas simplement s'en tenir à la réflexion
mais qu'ils voulaient aider les élus et la représentation nationale à explorer
de nouvelles pistes, à envisager des solutions.
Les uns et les autres, dans nos collectivités locales, nous en mettons déjà
certaines en pratique. Le Gouvernement s'efforce, de son côté, d'apporter sa
pierre : mesures innovantes pour lutter contre l'échec scolaire ; institution
des parcours TRACE - trajet d'accès à l'emploi - pour permettre à celles et
ceux qui ont connu l'échec scolaire de pouvoir prétendre à nouveau à l'emploi ;
différentes mesures prises par le ministère de l'emploi et de la solidarité ou
celui de la jeunesse et des sports.
Les chercheurs nous conseillent, pour les années qui viennent, de renforcer
nos actions dans deux directions : en matière de veille éducative et en matière
de suite éducative.
Il apparaît que bon nombre de ces jeunes qui provoquent de la violence sur
eux-mêmes ou sur la société, à un moment donné, sont en échec scolaire ou,
parfois, « décrochent » du système scolaire, même s'ils sont encore soumis à
l'obligation scolaire. Les chercheurs nous conseillent donc de mettre en place
une veille éducative de manière que ces jeunes n'aient pas l'impression que
l'on se désintéresse de leur sort.
Par ailleurs, ces mêmes chercheurs insistent pour que, au-delà de la période
d'obligation scolaire, pour les jeunes qui ont subi l'échec, soit assurée une
suite éducative, leur permettant de revenir vers des voies normales de
socialisation.
Sans doute faudrait-il aussi aider les élus à réinventer les maisons des
jeunes qui existaient voilà quelques années. En effet, on le voit bien, dans
nos collectivités, il manque des lieux où les jeunes puissent eux aussi
s'exprimer.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir évoqué ainsi l'oeuvre d'André
Malraux au ministère de la culture.
Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions d'actualité au
Gouvernement.
Nous allons maintenant interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous
la présidence de M. Guy Allouche.)