Séance du 7 juin 2000
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune
Par amendement n° 25, MM. Hérisson, Amoudry, Arnaud, Huchon, Louis Mercier et Fréville proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le a quater de l'article 279 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« « a quater) La fourniture de repas à consommer sur place. »
« « II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 73 rectifié, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Dubrulé, Fournier, Joyandet, Murat, Neuwirth, Ostermann, de Richemont, Trégouët, Valade et Cornu proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le a quater de l'article 279 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« a quater) La fourniture de repas à consommer sur place. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 92, MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le a quater de l'article 279 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« a quater) La fourniture de repas à consommer sur place. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I ci-desus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 26, M. Hérisson, Mme Bocandé, MM. Baudot, Huriet, Amoudry, Arnaud, Huchon, Louis Mercier, Moinard, Marquès, Nogrix, Lorrain, Richert, Souplet et Fréville proposent d'insérer, après l'article 3 un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 281 quinquies du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 281 quinquies. - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 14 % pour la fourniture de repas à consommer sur place. »
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 91, MM. du Luart, Bourdin, Clouet, Lachenaud, de Rocca Serra, Torre, Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 281 nonies, il est inséré, dans le code général des impôts, un article ainsi rédigé :
« Art. ... - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 14 % en ce qui concerne la vente à consommer sur place dans le secteur de la restauration. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Fréville, pour défendre l'amendement n° 25.
M. Yves Fréville. Cet amendement traite d'un problème que nous connaissons bien, celui de l'alignement du taux de TVA appliqué aux restaurants traditionnels, soit 19,6 %, sur celui qui prévaut pour la fourniture de repas à emporter, soit 5,5 %.
Plusieurs de nos collègues ont fait remarquer hier, lors du débat d'orientation budgétaire, que nous avions à ce sujet un véritable contentieux avec le Gouvernement, quel qu'il soit, d'ailleurs, puisque c'est un problème récurrent depuis quelques années.
Il est tout à fait regrettable que, au moment où des marges de manoeuvre assez importantes se dégagent, l'on ne puisse pas supprimer cette cause d'injustice et faire en sorte que les restaurants traditionnels puissent bénéficier d'un taux de TVA identique à celui qui est appliqué à la fourniture de repas à emporter.
D'où cette proposition, qui est tout à fait dans la ligne du rapport Salustro, déposé voilà déjà quelques années.
M. le président. La parole est à M. Oudin, pour présenter l'amendement n° 73 rectifié.
M. Jacques Oudin. Avant le dîner, nous avons parlé du chocolat ; maintenant, nous reparlons de la restauration. C'est un vieux contentieux - M. Fréville l'a dit - qui nous oppose au Gouvernement depuis longtemps.
Est-il vraiment raisonnable, à un moment où l'évolution de notre société pousse de plus en plus de nos concitoyons, hommes et femmes, à travailler, et donc à se nourrir à l'extérieur de leur foyer, à un moment où, partant, toute l'évolution de notre société tend vers le développement de la restauration, qu'elle soit traditionnelle ou collective, d'établir une distinction aussi absurde entre la vente de repas à emporter et la vente de repas à consommer sur place ?
Cela crée des inégalités ou des iniquités que nous dénonçons dans cette assemblée depuis longtemps, mais semble-t-il, de façon vaine.
Il est vrai que le Gouvernement a opté pour une réduction généralisée de la TVA, alors que, dans la dernière loi de finances il avait décidé, ce qui était plus sage, une réduction ciblée dans certains domaines, en l'occurrence ceux des travaux immobiliers et de la restauration immobilière.
Nous pensons qu'il aurait été plus judicieux, aujourd'hui, de traiter ce dossier, car ce secteur d'activité de la restauration est pour nous d'une importance considérable. La France est en effet l'une des premières nations en Europe, voire dans le monde, sur le plan de la gastronomie. Et c'est cette gastronomie-là que vous taxez à 20 %, madame le secrétaire d'Etat !
La France est l'une des premières destinations touristiques au monde. Quand on vient faire du tourisme dans un pays - c'est comme ça ! - on consomme, on se nourrit, on va notamment au restaurant. Vous avez beau faire de la publicité, la meilleure contre-publicité, c'est la taxation de nos restaurants à 19,6 %, alors que, chez tous nos voisins, le taux maximal est de 14 %.
Enfin, au moment où vous développez une politique élargie de simplification administrative, avez-vous imaginé ce qu'est la gestion ou la comptabilité d'une entreprise de restauration dont une partie des repas est à emporter et dont l'autre est livrée quasiment à la même clientèle qui s'assoit à une table pour déjeuner ou pour dîner ? C'est d'une absurdité confondante. Et pourtant, nous n'arrivons pas à faire passer le message !
Je m'associe donc à mon collègue Yves Fréville et à tous ceux qui ont cosigné ces amendements pour demander au Gouvernement de revenir à un peu plus de raison.
Peut-être me direz-vous que cela coûterait trop cher. Mais à voir les autres dépenses qui ont défilé dans le budget, les diverses taxes qui ont frappé la nation, à commencer par la TGAP pour financer les 35 heures - 60 milliards de francs, excusez du peu ! - j'estime que traiter plus équitablement notre restauration traditionnelle eût été une bonne mesure.
M. le président. La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 92.
M. Jean-Claude Carle. Cet amendement a le même objet que ceux qui viennent d'être exposés.
Il vise à réduire le taux de TVA à 5,5 % dans un secteur important de notre économie dont le développement conditionne l'emploi durable. D'autre part, la mesure permettrait de limiter les distorsions entre les différentes formes de restauration.
M. le président. La parole est à M. Hérisson, pour présenter l'amendement n° 26.
M. Pierre Hérisson. Il est proposé la création d'un second taux réduit de TVA fixé à 14 %, applicable à la restauration traditionnelle. Le taux réduit continuerait de s'appliquer à la restauration collective et à la restauration rapide.
Cette solution permettrait, d'une part, d'atténuer les distorsions fiscales existantes, d'autre part, de relancer l'emploi dans un secteur porteur du point de vue économique.
M. le président. La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 91.
M. Jean-Claude Carle. Cet amendement de repli a le même objet que celui que vient d'évoquer M. Hérisson, c'est-à-dire créer une étape intermédiaire pour cette année.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 25, 73 rectifié, 92, 26 et 91 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2000, nous avons déjà fait part de la volonté du Sénat de voir cette question évoluer. Il semble à la commission particulièrement important et opportun de réitérer ce débat car le secteur de la restauration, en plus de toutes les caractéristiques qui ont été exposées par les différents orateurs, a l'aspect particulier de créer des emplois, souvent peu qualifiés, de manière substantielle. Il est donc clair que, s'agissant de services à forte densité de main-d'oeuvre, toute mesure fiscale améliorant les conditions d'exploitation créerait beaucoup d'emplois. Toutes les études le montrent.
Or nous savons bien que le Gouvernement, lorsqu'il a élaboré les mesures fiscales figurant dans le projet de loi de finances pour 2000, a sans doute beaucoup hésité entre deux secteurs, celui du bâtiment et celui de la restauration. Pour des raisons budgétaires, il ne pouvait sans doute opter pour les deux en même temps. Lors de négociations européennes, il a donc obtenu la modification de la fameuse liste de manière à y incorporer les professions du bâtiment ; de ce fait, il a renoncé à défendre l'adjonction à la liste du secteur de la restauration.
Cette question doit être à nouveau posée. Il est important qu'elle le soit. La commission des finances est favorable à une avancée en faveur du secteur de la restauration. Elle souhaite d'abord entendre le Gouvernement de sorte que Mme Parly puisse nous dire si les choses sont susceptibles d'évoluer sur le plan franco-français mais, surtout, sur le plan franco-européen. Dans le cadre des possibilités qui seront peut-être ouvertes par la présidence française, est-il concevable que cette question évolue ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 25, 73 rectifié, 92, 26 et 91 ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Comme M. le rapporteur général vient de l'indiquer, nous avons fait, à l'échelon européen, un choix qui, comme la suite l'a démontré, était judicieux. S'agissant du secteur de la restauration collective, nous ne sommes pas dans une situation dérogatoire par rapport à la plupart des Etats membres, puisqu'une dizaine d'entre eux appliquent le même taux que nous en matière de restauration.
Par ailleurs, il me semble que, désormais, nos partenaires européens, notamment l'Allemagne, sont vent debout contre une mesure de ce type. Je crois qu'il faut en tenir compte et cesser de dire que nous sommes les seuls à ne pas vouloir défendre une mesure de baisse de la TVA dans le domaine de la restauration.
Enfin, il est des arguments de fond que vous connaissez bien et qui sont les suivants : il n'y a pas de distorsion de concurrence au sein du secteur de la restauration. Selon qu'il s'agit de vente à emporter ou de produits à consommer sur place, c'est une méthode de taxation différente qui est appliquée pour une raison très simple : lorsqu'il s'agit de vente à emporter, on considère qu'une prestation de base est seule en cause, alors que lorsque le client consomme sur place, on considère qu'il y a une pluralité de services, ce qui justifie l'application du taux normal de TVA.
Sur le plan du droit, le fait que la sixième directive n'ait pas été modifiée par la nouvelle directive relative aux services à forte intensité de main-d'oeuvre fait que, juridiquement, nous sommes dans l'impossibilité d'abaisser au taux réduit la TVA sur les prestations de restauration. Si l'on se replace un seul instant sur le terrain de la distorsion de concurrence, on constate que la restauration rapide est elle-même soumise au double taux.
Lorsque vous allez dans un établissement dont je ne citerai pas le nom et qui ne propose pas des produits typiques de la restauration française, vous pouvez consommer sur place, auquel cas on vous applique le taux normal, ou bien vous pouvez emporter, auquel cas on vous applique le taux réduit.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est simple !
M. Jacques Oudin. C'est absurde !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Ce n'est pas très simple, mais ce n'est pas la seule profession qui connaisse cette méthode de double comptabilisation en fonction des prestations ! Je ne citerai pas toutes les professions qui sont dans le même cas.
J'observe par ailleurs que, malgré l'application du taux normal de TVA, la restauration est un secteur en forte progression, puisque le chiffre d'affaires de la restauration commerciale a progressé de 7 % en 1999.
J'ajoute que la restauration bénéficie, comme tous les autres secteurs, de la baisse de un point du taux normal de TVA dont nous discutons ce soir.
Enfin, je ne suis pas certaine que, parmi les différents secteurs d'activités, la restauration soit le secteur qui répercute le mieux cette réduction du taux de la TVA. Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons qu'être défavorables à des amendements de ce type.
M. le président. Quel est désormais l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je suis extrêmment déçu par la réponse que nous venons d'entendre.
M. Charles Revet. Vous n'êtes pas le seul !
M. Jean-Claude Carle. Tout le monde est déçu !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je suis extrêmement déçu, parce que j'espérais, de la part du Gouvernement au moins le témoignage d'une volonté de faire évoluer les choses. Or nous voyons bien que la position du Gouvernement consiste à ne pas évoluer du tout sur ce sujet, malgré tous les arguments qui ont été exprimés.
Madame le secrétaire d'Etat, il s'agit non pas de restauration collective ni de restauration rapide, mais de la restauration traditionnelle.
M. Charles Revet. Bien sûr !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit d'un élément important pour l'attractivité de notre pays, pour notre mode de vie, pour le maintien et le développement d'un élément de notre identité à laquelle nous sommes tous attachés à l'époque de mondialisation, et je ne ferai allusion à aucun mouvement d'opinion.
Il serait donc important d'adresser un signal fort en faveur de la restauration traditionnelle dans notre pays.
Quoi qu'il en soit, mes chers collègues, la commission des finances propose aux auteurs des amendements de bien vouloir accepter de se rallier au premier de la liste. Mais, afin d'adresser aux professionnels de ce secteur un signal fort, il conviendrait de le modifier pour qu'il soit mis aux voix après l'article d'équilibre. Il s'agirait donc de l'amendement n° 25 rectifié tendant à insérer un article additionnel après l'article 15.
Je demande par ailleurs aux auteurs des amendements n°s 26 et 91 de bien vouloir les retirer. Ainsi, nous montrerions bien aux professionnels de la restauration que les sénateurs veulent faire bouger les choses.
Nous ne savons pas dans quel délai un résultat pourra être acquis, mais nous ne perdons pas de vue ce problème, nous le considérons comme très important, tant pour notre mode de vie que pour l'emploi dans notre pays.
M. le président. Monsieur Fréville, acceptez-vous la suggestion de M. le rapporteur général ?
M. Yves Fréville. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 25 rectifié sera donc appelé après l'article 15.
Monsieur Oudin, l'amendement n° 73 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Oudin. Madame la secrétaire d'Etat, j'admire le talent dont vous avez fait preuve pour défendre une position aussi intenable que celle que vous avez défendue. Aucun de vos arguments ne pouvait sérieusement être accepté : quinze points de différence, même après la baisse d'un point, cela n'a aucune raison d'être.
Cela dit, je me rallie à la proposition de M. le rapporteur général.
J'irai même plus loin : au nom de mes collègues cosignataires, je retire l'amendement n° 73 rectifié au profit de l'amendement n° 25 rectifié de M. Hérisson, qui prévoit un taux ce 14 %. En effet, je crois qu'il sera plus facile de réaliser cette évolution en deux étapes plutôt qu'en une.
Si le Gouvernement persiste à refuser d'abaisser à 14 % le taux de la TVA pour cette activité, c'est vraiment qu'il n'a pas le souci de développer un secteur qui est pourtant essentiel pour notre économie nationale.
M. le président. L'amendement n° 73 rectifié est retiré.
Monsieur Carle, les amendements n° 92 et 91 sont-ils maintenus ?
M. Jean-Claude Carle. Je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements n°s 92 et 91 sont donc retirés.
Monsieur Hérisson, l'amendement n° 26 est-il maintenu ?
M. Pierre Hérisson. Non, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 26 est retiré.
Par amendement n° 56, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« ...) Les abonnements relatifs aux livraisons d'énergie calorifique distribuée par réseaux publics, alimentés par la géothermie et la cogénération. »
« II. - Le taux de prélèvement libératoire prévu à l'article 200 a du code général des impôts est relevé à due concurrence des pertes de recettes dues aux dispositions du I. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Nous avions déjà déposé cet amendement lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2000.
A cette occasion, on sait que deux arguments essentiels avaient été opposés à notre proposition.
Le premier argument tenait à son coût budgétaire, qui se situerait aux alentours de 100 millions de francs.
Cela semble bien modique quand on examine les conditions générales de l'équilibre des comptes budgétaires et, en regard, l'importance des plus-values de recettes engendrées par la croissance.
Le second argument que l'on nous opposera peut-être encore, à défaut de désaccord sur le fond, est celui, bien connu désormais, de l'euro-compatibilité de la mesure.
On me permettra donc de souligner encore une fois le bien-fondé de la disposition que nous préconisons.
La réduction du taux de la taxe sur la valeur ajoutée sur les abonnements aux réseaux de chaleur a pour objet essentiel de favoriser la réduction concomitante du niveau des charges de chauffage acquittées par les particuliers raccordés à ces réseaux. En effet, l'abonnement au réseau continue de représenter une part importante et parfois majoritaire du coût du chauffage dans les ensembles raccordés aux réseaux de chaleur. Une réduction du taux de TVA peut donc engendrer une réduction d'environ 7 % à 10 % de la facture acquittée.
C'est sous le bénéfice de ces observations essentielles que nous vous invitons de nouveau, mes chers collègues, à adopter cet amendement de simple bon sens qui présente de surcroît l'avantage d'encourager une utilisation rationnelle de l'énergie.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini rapporteur général. Une instruction fiscale du 31 mars 1998 a confirmé que les réseaux de chaleur ne pouvaient pas, en l'état actuel des choses, bénéficier du taux réduit, et ce, en application du droit communautaire.
Sur le fond, la commission des finances partage le souci de développer les réseaux de chaleur, bien entendu, pour des raisons tant d'ordre social que d'ordre environnemental.
Nous avons déjà soutenu cette demande, et nous encourageons le Gouvernement à faire évoluer la législation communautaire sur ce point. Cela étant, nous souhaiterions entendre le Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je ne suis pas en désaccord avec les auteurs de l'amendement qui vient d'être défendu.
Mais, contrairement aux founitures de gaz et d'électricité, la distribution d'énergie calorifique sur les réseaux de chaleur ne figure pas sur la liste autorisée par la Commission européenne.
Le Gouvernement a demandé à la Commission, par lettre, de bien vouloir l'intégrer, mais la Commission lui a répondu que cela n'était pas possible actuellement. Dans la situation où nous sommes, sauf à enfreindre le droit communautaire, nous ne pouvons donc pas envisager d'appliquer le taux réduit à ce type de livraison d'énergie.
Je vous confirme cependant que nous ferons nos meilleurs efforts pour obtenir de la Commission, notamment lors de la présidence française, l'extension du taux réduit de TVA à ce type de prestations.
M. Michel Moreigne. Très bien !
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini rapporteur général. Compte tenu de l'engagement du Gouvernement de faire ses « meilleurs efforts », peut-être nos collègues vont-ils faire confiance au Gouvernement et retirer leur amendement.
M. le président. L'amendement n° 56 est-il maintenu, monsieur Foucaud ?
M. Thierry Foucaud. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 56 est retiré.
Par amendement n° 74 rectifié, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Fournier, Joyandet, Murat, Neuwirth, Ostermann, de Richemont, Trégouët, Valade et Cornu proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété, in fine, par un alinéa ainsi rédigé :
« i) Le droit d'utilisation d'installations sportives ».
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Cet amendement vise à favoriser l'accès des jeunes aux installations sportives et à la pratique du sport, qui est un puissant facteur d'intégration, en appliquant le taux réduit de TVA aux droits d'utilisation d'équipements sportifs, et cela quel que soit leur système de gestion.
Cette proposition ne posant par ailleurs aucun problème d'incompatibilité avec nos engagements européens, je souhaite donc qu'elle recueille l'avis favorable de la commission et du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est favorable à cet amendement, d'autant qu'il est compatible avec la législation communautaire.
En outre, sauf erreur de ma part, à l'occasion de la préparation du projet de loi de finances pour 2000, Mme Marie-George Buffet nous avait indiqué qu'elle y était favorable.
Il faut donc voter cette mesure, dont le coût, s'il est certes difficile à chiffrer, est sans doute inférieur à 500 millions de francs et se situe probablement autour de 300 millions de francs.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, dans la mesure où la plupart des activités sportives sont exercées dans un cadre associatif et donc exonérées de TVA.
En outre, appliquer un tel dispositif favoriserait les organismes à but lucratif, ce qui n'est pas notre intention.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les professionnels apprécieront !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 74 rectifié.
M. Jacques Oudin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Madame le secrétaire d'Etat, j'ai bien noté, malheureusement, que vous faisiez une distinction entre les systèmes de gestion, bien que j'aie pris la précaution, en présentant l'amendement, de bien préciser « quel que soit leur système de gestion ».
Il est vrai que les installations sportives gérées par des associations ou des communes ne sont pas assujetties à la TVA ; mais il suffit qu'elles soient concédées ou que leur mode de gestion change pour qu'elles le deviennent !
La pratique sportive - on en revient au débat que nous avons eu à propos de la restauration - va donc être l'objet d'une discrimination uniquement en fonction du mode de gestion, et non dans la volonté affichée du développement de la pratique sportive elle-même.
Nous retrouvons ce genre de discrimination pour des piscines, pour des tennis et - pourquoi pas ? - pour des clubs hippiques, etc. Pardonnez-moi, madame le secrétaire d'Etat, mais je trouve que vous prenez une position qui n'est en faveur ni de la jeunesse, ni des sportifs, ni de l'équité de nos concitoyens face au développement de la pratique sportive !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 74 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 3.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 81 rectifié est présenté par MM. Girod et Bimbenet.
L'amendement n° 97 rectifié est déposé par M. du Luart et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... - Les remboursements et les rémunérations versés par les communes ou leurs groupements aux prestataires au titre des dépenses occasionnées par la prise en charge, en lieu et place des propriétaires riverains, du balayage des voies livrées à la circulation publique visées à l'article L. 2331-3 a 3° du code général des collectivités territoriales, à l'article 1528 du présent code et 317 de l'annexe II du présent code. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée par le relèvement à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Bimbenet, pour défendre l'amendement n° 81 rectifé.
M. Jacques Bimbenet. Le taux de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à la distribution de l'eau, à l'assainissement, aux transports urbains, à la collecte, au tri et au traitement des déchets est en France de 5,5 %.
Le taux applicable aux opérations de nettoiement des voies publiques reste fixé à 19,6 %.
Pourtant, une directive européenne n° 92-77 du 19 octobre 1992 avait inscrit, dans la liste des services pouvant bénéficier du taux réduit de TVA, les services fournis dans le cadre du nettoyage des voies publiques.
Cette mesure permettrait de réduire de 15 % la facture des collectivités locales sur ces opérations, diminuerait de 15 % le coût réel des emplois concernés dans les entreprises de nettoiement, encouragerait le développement de ces emplois faiblement qualifiés et permettrait d'offrir des débouchés aux chômeurs les plus difficiles à insérer sur le marché de l'emploi.
M. le président. La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 97 rectifié.
M. Jean-Claude Carle. Je n'ai rien à ajouter à ce qui vient d'être excellemment développé par notre collègue M. Bimbenet.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission, convaincue par les arguments qui ont été développés, est favorable à cette mesure qui, se répercutant sur les budgets des collectivités territoriales, permettra à ces dernières de mieux assumer leurs missions et participera de leurs efforts de gestion.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
D'abord, il s'agit d'une possibilité et non d'une obligation qui est proposée dans la directive.
De plus, cette disposition ne bénéficierait qu'aux collectivités qui ont recours à la sous-traitance et qui donc passent par l'intermédiaire d'une entreprise privée. A l'inverse, elles défavoriserait celles qui assurent elles-mêmes le service.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 81 rectifié et 97 rectifié, acceptés par la commission et repoussés par le Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 3.
Par amendement n° 84, M. Nogrix propose d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 2° du 2 de l'article 298 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cependant, par exception aux dispositions prévues par ces articles, n'est pas comprise dans la valeur imposable au titre de la taxe sur la valeur ajoutée le montant de la taxe intérieure sur les produits pétroliers. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Avec l'envolée du prix du pétrole et une fiscalité particulièrement lourde, la facture de carburant de chaque français s'est alourdie, en un an, de 1 000 francs en moyenne. Depuis le mois de janvier 1999, le prix de l'essence a augmenté de plus de 25 %.
La hausse du prix du pétrole n'explique pas tout, en effet, puisque, comme chacun le sait, pour chaque litre de carburant vendu, près de 80 % du prix va directement dans les caisses de l'Etat.
La voiture est ainsi taxée comme si elle constituait encore de nos jours un bien de luxe. Madame le secrétaire d'Etat, ce n'est pourtant plus le cas. La voiture représente un bien de consommation indispensable à tous les travailleurs français, quel que soit leur niveau de revenu.
Eminemment antisociale, la taxation de l'essence doit absolument être revue à la baisse : c'est en tout cas - vous le savez - le souhait exprimé par les Français dans un récent sondage.
Parmi les réformes envisageables figure la suppression de la TVA perçue sur la taxe intérieure sur les produits pétroliers, qui constitue une taxe sur une taxe. Cette suppression réduirait le prix des carburants, selon les produits, de 50 à 80 centimes par litre - c'est ce que réclament, je le répète, tous les Français - alors qu'avec la baisse de la TVA de 1 %, gadget fiscal que vous nous proposez, le sans plomb coûte 6 centimes de moins seulement.
Par le présent amendement, nous voulons permettre aux Français de se rendre sur leur lieu de travail en payant un peu moins de taxes.
M. Charles Revet. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Notre collègue M. Nogrix a mis l'accent sur un réel problème. Il est vrai que payer l'impôt sur l'impôt, la TVA sur une autre taxe, - en l'occurrence la TIPP - peu apparaître paradoxal.
En fait, si la France n'est pas la seule à connaître une telle situation, cela ne rend pas les choses plus faciles à expliquer à l'opinion publique ! C'est bien l'article 11 A de la sixième directive TVA de 1977 qui prévoit que les impôts payés, à l'exception de la TVA elle-même, sont compris dans la base d'imposition à la TVA.
La question posée par M. Nogrix s'explique si l'on tient compte de l'effet d'amplification joué par la TVA, notamment en 1999, puisque la croissance s'est répercutée sur la TIPP, mais aussi sur la TVA, et qu'au bout du compte ce sont les usagers, donc les consommateurs de produits pétroliers, qui ont payé davantage.
Lorsque j'affirmais, dans la discussion générale, que plus de 70 % de l'augmentation de la richesse nationale avait été consacrée, en 1999, au paiement des prélèvements obligatoires, cet élément précis que nous évoquons a joué un rôle non négligeable d'amplification fiscale des résultats de la croissance.
Dans l'état actuel du droit européen, nous ne pouvons pas, sur le strict plan juridique du respect de nos engagements internationaux, suivre M. Nogrix, mais le problème qu'il pose devrait, me semble-t-il, se traduire par une véritable réflexion sur le niveau de la fiscalité pétrolière, et sans doute faudrait-il que - par le biais d'une remise à plat des divers éléments de la politique fiscale que nous pourrions appeler de nos voeux - cette question soit traitée en toute clarté.
La commission des finances avait souhaité, lors de la discussion du budget 2000, mettre l'accent sur ce que nous avions appelé la « fiscalité implicite », c'est-à-dire les augmentations automatiques de fiscalité résultant du jeu des règles existantes telles que les seuils qu'on ne relève pas, et, comme ici, le rendement de l'impôt qui s'accroît, qui fait en quelque sorte « boule de neige », en fonction des données de la conjoncture.
Mon cher collègue, je crois que vous avez raison de poser cette question qui, pour l'opinion publique, est une question particulièrement sensible. La commission est par avance intéressée par les éléments de réponse que le Gouvernement pourra nous livrer, mais, dans l'état actuel des choses, nous serons tenus, par le droit, de vous demander tout à l'heure de retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Nous comprenons fort bien l'objectif fixé. Nous pensons toutefois que le moyen est inopérant. C'est la raison pour laquelle Laurent Fabius vous a indiqué qu'il souhaitait rencontrer l'ensemble des pétroliers, et il le fera dès vendredi, parce que le problème se situe bien là.
Le rapporteur général a fort bien rappelé les raisons pour lesquelles le moyen était inopérant. Nous sommes obligés, surtout à la veille de prendre la présidence du Conseil de l'Union européenne, de respecter la législation communautaire en la matière, selon laquelle tous les impôts, y compris la TIPP, doivent entrer dans l'assiette de taxation à la TVA. C'est une obligation qui s'impose à nous.
Selon vous, la mesure de baisse d'un point de TVA dont nous discutons ce soir est un gadget fiscal. Je suis un peu surprise par cette terminologie. C'est un gadget de 30 milliards de francs en année pleine alors que la mesure que vous nous proposez vaut 33 milliards de francs. Gadget pour gadget, je ne sais pas, en l'occurrence, lequel est le plus efficace.
Enfin, je rappelle que la baisse d'un point de la TVA a eu un effet de baisse sur les prix à la pompe, comme cela s'est constaté en avril, même si d'autres effets que nous connaissons bien peuvent malheureusement jouer dans l'autre sens.
M. le président. Monsieur Nogrix, cédez-vous à l'invitation de M. le rapporteur général ?
M. Philippe Nogrix. Comment pourrais-je faire autrement devant tant de bons raisonnements ? Ce qui m'ennuie, c'est que le Français qui travaille, lui, les comprendra d'autant moins qu'il doit, pour faire le plein, payer de 400 francs à 500 francs ! Et que dire des transporteurs routiers qui subissent la concurrence des transporteurs étrangers, pourtant européens ? Ces derniers payent le gasoil 3 francs ou 3,10 francs et passent la frontière avec des réservoirs qui, de 200 litres au départ, sont maintenant de 800 litres ! De plus, ils traversent l'Europe avec du pétrole portugais, qui est beaucoup moins cher.
Il est dommage que, pour des raisons de droit que personne ne comprendra, en dehors des spécialistes qui sont réunis ici ce soir, le Français soit obligé de continuer à payer l'essence au prix auquel il la paye !
Je retire néanmoins l'amendement n° 84.
M. le président. L'amendement n° 84 est retiré.
Article 3 bis