Séance du 23 mars 2000







M. le président. La parole est à M. Raffarin. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Jean-Pierre Raffarin. Ma question aurait pu s'adresser à M. le Premier ministre, à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, à M. le ministre de l'intérieur, finalement à tout le Gouvernement !
Auparavant, je voudrais dire que j'ai trouvé dans les propos tenus par M. Allègre tout à l'heure un message de courage. Je ne sais pas si ce sont les dernières consignes, mais je tenais à souligner la hauteur de sa réponse.
Voilà quelques mois, M. Jospin a reçu dans son bureau le président de l'Association des maires de France, le président de l'Assemblée des départements de France et le président des régions de France. Il leur a dit que ce n'était pas parce que les socialistes avaient fait voter les lois Defferre qu'ils étaient exonérés de toute avancée en matière de décentralisation (Approbation sur les travées du RPR), et il leur a proposé de créer une commission.
Nous y avons participé de bon coeur.
Elle était présidée par un sénateur, M. Mauroy, et nous y étions représentés. Nous avons donc travaillé. Mais, depuis que cette commission existe, nombreux sont les mauvais coups qui ont été portés à la décentralisation. Je pense au projet sur les aides économiques, qui va favoriser la confusion des compétences, plutôt que de les clarifier, et renforcer la bureaucratie ! Je pense aussi au projet de régionalisation ferroviaire, mal financé, pour lequel l'urgence a été déclarée, alors que la question est fort complexe et qu'on a pas eu le temps de l'examiner à fond. Je pense encore à un texte beaucoup plus vaste sur l'urbanisme.
M. Alain Gournac. Un texte brouillon !
M. Jean-Pierre Raffarin. Et maintenant, sans aucune concertation, on apprend la révision de la taxe d'habitation. La politique de la France ne se fait plus à la corbeille, mais sur TF1, au journal de 20 h. On nous prive de ressources fiscales et on nous annonce que, désormais, on recentralise la fiscalité et que les finances locales sont placées sous tutelle budgétaire.
Les finances d'une région moyenne et sympathique comme Poitou-Charentes dépendront maintenant, pour plus de 50 %, de dotations de l'Etat. On va faire des régions des pôles d'émergence de nouveaux préfets. Ce n'est pas l'ambition de la décentralisation !
M. Claude Estier. Vous étiez contre, à l'époque !
M. Jean-Pierre Raffarin. Ma question est toute simple : quelles sont les prochaines avancées que le Gouvernement veut soutenir pour développer la décentralisation ? A quoi sert la commission Mauroy ? (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de l'Union centriste et du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le sénateur, en effet, M. le Premier ministre a annoncé jeudi dernier une diminution de grande ampleur de la taxe d'habitation, puisqu'elle atteindra, dès 2000, 11 milliards de francs.
Cette décision répondait à un engagement, qui avait été pris dès 1995 par le candidat Lionel Jospin et réitéré en 1997, de rendre les impôts locaux plus justes - et je crois qu'ici chacun souscrit à cet objectif.
Cette décision répondait aussi à une attente des familles, car comment expliquer qu'aujourd'hui un RMIste soit totalement exonéré de taxe d'habitation tandis qu'un titulaire de l'allocation de solidarité spécifique, qui perçoit à peu près la même somme chaque mois, doit, lui, payer parfois jusqu'à 1 500 francs par an de taxe d'habitation ?
M. Alain Gournac. Ce n'est pas une réponse !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Elle répondait aussi à une demande des parlementaires de toute opinion, puisque, dans l'article 28 de la loi de finances pour 2000, qui a été voté dans les mêmes termes par l'Assemblée nationale et par le Sénat, il était demandé au Gouvernement de soumettre au Parlement des propositions présentant diverses modalités de réforme de la taxe d'habitation...
M. Alain Gournac. On ne les a pas vus !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. ... en vue d'alléger significativement la charge supportée par les contribuables dès 2000.
Le Gouvernement a donc tenu ses engagements (Non ! sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Bien sûr, la taxe d'habitation est une ressource importante des collectivités locales - cela n'avait point échappé au Gouvernement - et il est difficile de la diminuer de façon significative sans diminuer, d'une façon ou d'une autre, les ressources des collectivités locales, ce dont les sénateurs, qui ont adopté l'article 28 de la loi de finances pour l'année 2000, avaient évidemment conscience.
Pour autant, peut-on soutenir, comme vous le faites, que l'on porte atteinte à la décentralisation (Oh oui ! sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste) en se bornant à supprimer la part régionale de la taxe d'habitation ?
M. Alain Gournac. C'est évident !
M. Patrick Lassourd. Bien sûr !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Honnêtement, je ne le crois pas. La part régionale de la taxe d'habitation représente 5,8 milliards de francs, c'est-à-dire moins de 10 % du produit de cette taxe et moins de 2 % de l'ensemble des recettes fiscales des collectivités locales.
Par conséquent, nous sommes loin de remettre en cause, me semble-t-il, les principes auxquels vous êtes légitimement attachés, mesdames, messieurs les sénateurs. D'ailleurs, nous avons eu l'occasion de nous en expliquer hier, Jean-Pierre Chevènement et moi, devant la commission présidée par Pierre Mauroy, et je crois que les raisons pour lesquelles M. le Premier ministre a annoncé cette décision dès jeudi ont été fort bien comprises par les membres de cette commission. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)

TRAÇABILITÉ DES VIANDES BOVINES