Séance du 5 octobre 1999
M. le président. « Art. 1er. - L'article L. 1er bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre est ainsi rédigé :
« Art. L. 1er bis . - La République française reconnaît, dans des conditions de stricte égalité avec les combattants des conflits antérieurs, les services rendus par les personnes qui ont participé sous son autorité à la guerre d'Algérie ou aux combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962.
« Elle leur accorde vocation à la qualité de combattant et au bénéfice des dispositions du présent code. »
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. « Le courage, disait Jaurès, c'est de chercher la vérité et de la dire. »
Le moins qu'on puisse dire, c'est que le courage a manqué pendant quarante-quatre ans puisqu'il aura fallu quarante-quatre ans pour appeler un chat un chat et pour reconnaître que ce qu'il était convenu d'appeler pudiquement « maintien de l'ordre », « pacification », « événements », entre 1954 et 1962, s'agissant de l'Algérie, n'était rien d'autre qu'une guerre.
Vous avez été l'un des premiers - vous et le Gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le secrétaire d'Etat - à avoir eu le courage, à un poste de responsabilité, de le dire.
Aujourd'hui, c'est la loi qui va le dire, et c'est là un acte de justice à l'égard de deux catégories de citoyennes et de citoyens.
C'est un acte de justice, d'abord, à l'égard des centaines de milliers de ceux, tous ceux qui, dans cette guerre, ont donné leur temps, toujours, et, trop souvent, leur sang ou leur vie même.
Ils seront désormais considérés officiellement comme des combattants à part entière et, puisqu'il n'est jamais trop tard pour bien faire, nous nous en réjouissons.
Reconnaître officiellement qu'il y eut une guerre d'Algérie, c'est aussi un acte de justice à l'égard de ceux qui, en luttant politiquement pour « la paix en Algérie », n'ont cessé de le dire.
Je me permettrai de faire deux citations.
Voici la première : « Une fois de plus, des hommes qui avaient sincèrement voulu la pacification entraînent le pays dans ce qu'il faut bien appeler la guerre ». Ainsi s'exprimait, le 28 mai 1956, un député « progressiste » dont j'ai la fierté de dire que je porte le nom puisqu'il s'agit de mon père.
La seconde citation est extraite d'un article paru le 10 août 1956 dans un bi-hebdomadaire qui s'appelait Quand Même ! : « Aujourd'hui, en Algérie, les armes répondent aux armes, les exécutions capitales aux attentats, les ratissages aux embuscades. Sans doute M. Bourgès-Maunoury - j'aurais pu en citer d'autres - affirme-t-il toujours que "la pacification n'est pas la guerre." C'est déjà ce que l'on disait en 1830 ! C'est baptiser carpe le lapin. "Pacification" ou "guerre", des hommes tombent chaque jour en Algérie... »
Vous comprendrez ma satisfaction devant la rédaction de l'article 1er de la proposition de loi que nous allons voter : j'étais le signataire de ces lignes.
Un mot encore : j'espère qu'il ne faudra pas attendre quarante-quatre ans pour qu'il soit admis officiellement et une fois pour toutes que la guerre d'Algérie a pris fin en tant que telle non le 16 octobre 1977, mais le 19 mars 1962. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Articles 2 à 4