Séance du 27 janvier 1999
M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 252 est présenté par MM. Vissac, Althapé, Bernard, Besse, Bizet, Braun, Cazalet, César, Cornu, Courtois, Debavelaere, Doublet, Dufaut, Esneu, Flandre, Fournier, François, Gaillard, Gérard, Gerbaud, Goulet, Gouteyron, Gruillot, Hamel, Hugot, Jourdain, Larcher, Lassourd, Lauret, Le Grand, Martin, Murat, Ostermann, de Richemont, Rispat, de Rohan, Taugourdeau, Vasselle, Vinçon et les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
L'amendement n° 391 rectifié est déposé par M. Pastor, Mme Boyer, MM. Bony, Courteau, Lejeune, Piras, Plancade, Raoult, Tremel, Bellanger, Besson, Demerliat, Désiré, Dussaut, Fatous, Godard, Journet, Percheron, Rinchet, Signé, Teston, Vidal, Weber et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous deux tendent, après l'article 23, à insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le troisième alinéa de l'article 1106-3-1 du code rural est ainsi rédigé :
« L'avantage ci-dessus prévu est ouvert pour une période de remplacement équivalente dans sa durée à celle qui permet à une salariée de suspendre son contrat de travail telle que visée à l'article L. 122-26 du code du travail. »
Par amendement n° 470, M. Le Cam, Mme Borvo, M. Fischer, Mmes Luc, Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 23, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le troisième alinéa de l'article 1106-3-1 du code rural est ainsi rédigé :
« L'allocation de remplacement est accordée pour une période équivalente à celle qui permet à une salariée de suspendre son contrat de travail telle que visée à l'article L. 122-26 du code du travail. »
« II. - Les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts sont relevés à due concurrence.
La parole est à M. Cornu, pour présenter l'amendement n° 252.
M. Gérard Cornu. Cet amendement vise à faire disparaître une injustice sociale concernant les agricultrices.
Le projet de loi prévoit une simple amélioration du congé de maternité des agricultrices, en permettant une prise en charge totale, et non plus partielle, des frais de remplacement.
Or il convient d'octroyer aux agricultrices, dont le congé maternité est à l'heure actuelle de huit à dix semaines, les mêmes droits à congés que ceux dont bénéficient les salariés, c'est-à-dire au moins seize semaines.
M. le président. La parole est à Mme Boyer, pour présenter l'amendement n° 391 rectifié.
Mme Yolande Boyer. J'ai eu l'occasion, au cours de la discussion générale, de m'exprimer sur ce sujet et de souligner les avancées du projet de loi en faveur des agricultrices, notamment par la création du statut de conjoint-collaborateur d'exploitation. Il s'agit là d'une avancée tant en matière de couverture sociale que de droit à la retraite. C'est aussi une reconnaissance du travail effectif de la femme dans l'exploitation.
Le projet de loi comporte une autre avancée, qui concerne la prise en charge totale et non plus partielle des frais de remplacement à l'occasion d'un congé de maternité.
Nous pouvons cependant aller encore plus loin compte tenu d'une inégalité, d'une part, entre les agricultrices et les autres femmes et, d'autre part, entre les agricultrices salariées et celles qui ne le sont pas, puisque les congés de maternité sont, pour les unes, de huit semaines et, pour toutes les autres, de seize semaines.
Le groupe socialiste considère qu'il convient de remédier à cette injustice sociale.
M. le président. La parole est à M. Le Cam, pour défendre l'amendement n° 470.
M. Gérard Le Cam. L'article 23 que nous venons de voter permet une indemnisation totale et non plus seulement partielle des frais de remplacement en cas de maternité.
Cette mesure constitue un progrès non négligeable lorsque l'on sait qu'un tiers seulement des agricultrices demandent à bénéficier de l'allocation de remplacement lorsqu'elles sont dans cette situation.
Hélas ! cette avancée sociale n'efface pas l'inégalité entre les femmes quant à la durée du congé maternité.
Alors que ce congé est de seize semaines pour les femmes salariées d'autres catégories socioprofessionnelles, les agricultrices n'ont droit qu'à un maximum de dix semaines de congé.
Cette question illustre une fois de plus la fragilité sociale des femmes dans le secteur agricole. Certes, cette loi d'orientation apportera des améliorations sensibles, notamment avec la création d'un statut de conjoint-collaborateur qui confère à la femme une reconnaissance juridique et une autonomie financière.
Il est curieux d'observer que ce que les autres secteurs d'activités ont acquis dans les années soixante-dix, les femmes de l'agriculture n'aient pu l'obtenir jusqu'à présent.
L'égalité d'accès aux droits sociaux, en l'occurrence au droit à un congé maternité de seize semaines pour toutes les femmes, quelles que soient les professions, doit être respectée dans une République, et ce quel qu'en soit le coût.
En conséquence, nous vous demandons, monsieur le ministre, de prendre à votre compte cet amendement afin d'éviter, une fois de plus, l'écueil de l'article 40. (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques n°s 252 et 391 rectifié, ainsi que sur l'amendement n° 470 ?
M. Michel Souplet, rapporteur. La commission aurait souhaité, avant de se prononcer, connaître l'avis, d'une part, de la commission des affaires sociales, qui a étudié ces trois amendements et, d'autre part, du Gouvernement.
M. Louis Le Pensec avait évoqué, lors du vote de la loi, au mois d'octobre, un décret. Nous aimerions également savoir ce qu'il en est de ce décret, monsieur le ministre.
M. le président. Quel est donc l'avis de la commission des affaires sociales ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis. La commission des affaires sociales souhaiterait, elle aussi, connaître l'avis du Gouvernement. (Sourires.)
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Richert. Article 40 !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Mais non ! Je vais vous donner satisfaction sans que vous ayez besoin de voter un article additionnel et sans que j'aie besoin de reprendre un amendement. D'ailleurs, M. le rapporteur a déjà suggéré la bonne réponse.
Ces amendements, qui visent à aligner la durée de prise en charge par l'assurance maladie des frais de remplacement occasionnés aux agricultrices par une maternité sur la durée du congé de maternité des salariées recueillent, sur le fond, un avis favorable du Gouvernement.
Le Gouvernement est favorable à cet allongement de la durée de prise en charge. Il s'est d'ailleurs engagé, lors de la première lecture du projet de loi à l'Assemblée nationale, à prendre une disposition en ce sens.
Je souhaite toutefois ajouter deux ou trois précisions sur les modalités pratiques.
Un alignement complet, pur et simple, sur le régime des salariées n'est pas souhaitable et il n'est d'ailleurs pas souhaité par les agricultrices elles-mêmes, compte tenu des spécificités qui s'attachent au statut de non-salariée. A titre d'exemple, les salariées ne peuvent prétendre au versement d'indemnités journalières pendant un congé de maternité qu'à la condition expresse d'interrompre toute activité professionnelle pendant au moins huit semaines. Cette obligation n'est pas adaptée à la situation de certaines agricultrices qui souhaitent continuer leur activité et obtenir une juste prise en charge de leurs frais de remplacement.
L'article 23 du présent projet de loi d'orientation répond à cette préoccupation et poursuit en cela un objectif de santé publique.
Par ailleurs, cette disposition est d'ordre réglementaire. L'avant-dernier alinéa de l'article 1106-3-1 du code rural renvoie en effet à un décret en Conseil d'Etat pour la fixation de la ou des périodes de remplacement ouvrant droit au bénéfice de la prise en charge ainsi que pour la durée maximale d'attribution.
Comme cette mesure n'est pas financée dans le BAPSA et que je ne veux pas que vous m'accusiez d'invoquer encore l'article 40 de la Constitution, je précise, confirmant en cela les propos de mon prédécesseur, M. Louis Le Pensec, devant l'Assemblée nationale, qu'un décret fait actuellement l'objet d'une concertation avec les représentants des professions agricoles afin d'envisager le financement de l'allongement de la durée de remplacement dans la loi de finances pour l'an 2000.
Cette disposition aura donc une traduction concrète au plus tard à la fin de l'année.
Compte tenu de cet engagement solennel du Gouvernement, je demande le retrait de ces trois amendements.
M. le président. Monsieur César, l'amendement n° 252 est-il maintenu ?
M. Gérard César. Oui, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Pastor, l'amendement n° 391 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Marc Pastor. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 391 rectifié est retiré.
Monsieur Le Cam, l'amendement n° 470 est-il maintenu ?
M. Gérard Le Cam. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 470 est retiré.
Reste l'amendement n° 252, sur lequel je demande à nouveau l'avis du Gouvernement.
M. Jean Glavany ministre de l'agriculture et de la pêche. Il me semble qu'en exprimant le souhait de voir cet amendement retiré, j'ai émis un avis défavorable à son encontre, mais j'espère que M. César fera preuve de sagesse.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Michel Souplet, rapporteur. Je pense en effet qu'il serait sage que M. César retire l'amendement n° 252.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 252.
M. Gérard César. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. César.
M. Gérard César. J'ai bien entendu ce qu'a dit M. le ministre quant à son engagement de faire financer ce droit naturel des femmes à bénéficier des congés de maternité dans les mêmes conditions que les salariées agricoles ou autres.
Toutefois, j'aurais voulu savoir si M. le ministre prend l'engagement d'inscrire, dans la loi de finances pour 2000, l'incidence de ces congés de maternité pour les exploitantes agricoles.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Oui, monsieur César, je prends cet engagement.
M. Gérard César. Dans ce cas, je retire l'amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 252 est retiré.
Article 24