M. le président. La parole est à Mme Borvo, auteur de la question n° 247, adressée à M. le secrétaire d'Etat à la santé.
Mme Nicole Borvo. Madame le secrétaire d'Etat, depuis trois mois maintenant, les personnels de nuit de différents hôpitaux dépendant de l'Assistance publique sont en grève. Ils demandent des moyens afin de pouvoir remplir correctement leurs missions.
En effet, chacun le sait, la surcharge des tâches, une flexibilité qui désorganise de plus en plus leur travail, ainsi que la volte-face de la direction de l'Assistance publique qui détourne le « protocole Durieux » s'agissant de la mise en oeuvre des 35 heures de nuit sont au coeur du conflit qui a commencé à l'hôpital Saint-Louis, connu pour l'excellence de ses prestations, et qui s'est étendu ensuite à d'autres établissements.
D'ailleurs, les personnels des hôpitaux Broca et Emile-Roux ont déjà obtenu des engagements à propos des effectifs, et j'espère que vous pourrez nous indiquer quand et comment cette avancée positive pourra se concrétiser.
En outre, le personnel de nuit de l'hôpital Saint-Louis, qui est en grève depuis le 26 janvier 1998, souhaiterait que l'engagement de sa direction sur la création de dix emplois de nuit supplémentaires soit respecté. Dans l'intérêt de l'amélioration du dialogue social et en vue de la satisfaction de besoins essentiels, il serait utile de créer les conditions pour que cette promesse soit tenue.
Etendre les créations de postes pour toutes les équipes de nuit, c'est à la fois répondre aux besoins des services et réussir l'application des 35 heures de nuit, qui ne seraient plus alors une simple et néfaste annualisation du temps de travail.
Actuellement, le personnel travaille en cycles de dix heures : sept heures de travail et trois heures de récupération. Les agents peuvent bénéficier de ces heures de récupération seulement si elles sont prises. Sinon, ils sont redevables de trois heures en cas de prise de repos supplémentaire, de congé maladie, d'accident du travail ou de journée d'enfant malade.
Pourquoi ne pas reconnaître la pénibilité du travail de nuit en considérant les repos récupérateurs comme repos hebdomadaires ? Sinon, l'état de fait actuel continuera d'engendrer une fatigue supplémentaire qui diminue les capacités des professionnels. De ce fait, face à des situations critiques et des urgences vitales, pourront-ils agir efficacement à tout instant ?
Ces interrogations des personnels avaient trouvé un écho favorable le 13 mars 1997 dans une note rédigée par la direction de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, mais, deux mois plus tard, cette note était remise en cause.
Pour l'instant, les conflits dans les hôpitaux sont dans l'impasse. Il serait urgent de débloquer la situation et d'établir ou de rétablir un véritable dialogue entre les personnels, leurs organisations syndicales et la direction de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.
Ce dialogue, qui aurait pour objet d'appliquer enfin les 35 heures pour ce personnel en contact permanent avec la population et de mettre en oeuvre les moyens nécessaires, l'un n'allant pas sans l'autre, loin de se satisfaire d'un immobilisme dommageable, pourrait contribuer à transformer ce que Mme Aubry nommait le 30 mars « le vaste chantier des 35 heures dans le secteur hospitalier » en un véritable progrès de civilisation.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat à la formation professionnelle. Madame le sénateur, j'ai écouté avec une attention toute particulière votre question et, avant d'y répondre sur le fond, je tiens à vous dire que l'Assistance publique - hopitaux de Paris n'a pas remis en cause les accords Durieux de 1991. La note du 5 mai 1997 à laquelle vous faites référence n'a fait que préciser les procédures spécifiques existantes afin de permettre, pour chacun, une meilleure compréhension de la réglementation.
Dans la pratique, au sein de l'Assistance publique - hopitaux de Paris, la durée du travail de nuit, qui devrait, si l'on se réfère aux termes mêmes du protocole Durieux et à la présentation actuelle, être de sept heures par vacation, est de dix heures. Cette pratique est conforme à l'ordonnance du 26 mars 1982 relative à l'organisation du travail dans la fonction publique hospitalière.
Par conséquent, chaque fois qu'un agent travaille de nuit, son établissement lui attribue un repos supplémentaire au titre des trois heures qu'il a effectuées en plus de l'horaire théorique. Cette compensation quotidienne, conduisant sur un planning à offrir aux agents concernés un repos récupérateur de trois heures, est conditionnée par l'exercice effectif des fonctions, cette notion étant synonyme de travail effectué.
Si la négociation relative à la mise en oeuvre du protocole Durieux à l'Assistance publique - hopitaux de Paris fut longue et difficile, son aboutissement a entraîné la création de plusieurs milliers d'emplois, et l'Assistance publique - hopitaux de Paris s'est engagée à pourvoir les postes vacants.
Ces dispositions complexes demeurent cependant difficiles à appliquer au quotidien. Il convient donc de rester vigilant pour assurer tout à la fois une pleine transparence de celles-ci et une égalité de traitement entre les personnels. C'est la raison pour laquelle de nombreuses réunions de concertation ont été tenues sur le sujet tant avec les responsables hospitaliers qu'avec les organisations syndicales, afin de maintenir un dialogue social au sein de cette institution.
Par ailleurs, Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité vous rappelle, madame le sénateur, que le Gouvernement a chargé M. Jacques Roché d'une mission en vue d'établir un état des lieux exhaustif de la réglementation et des pratiques effectives concernant le temps de travail et les heures supplémentaires dans les trois fonctions publiques, mission qui s'inscrit dans la perspective de la mise en oeuvre des 35 heures dans la fonction publique. Cette étude devra nécessairement intégrer certaines pratiques et spécificités propres aux différentes structures hospitalières. Mme Nicole Borvo. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Vous avez constaté, comme moi, madame la secrétaire d'Etat, que le problème est très complexe. En effet, si les accords Durieux n'ont pas été remis en question, ils sont sans cesse détournés et le problème concerne tant la durée du travail que le nombre d'emplois, les deux thèmes étant étroitement liés.
De ce point de vue, les problèmes d'effectifs perdurent et je vais vous en donner un exemple.
A l'hôpital Broca, comme d'ailleurs dans tous les hôpitaux de gériatrie, le nombre de personnel qualifié au chevet des malades est très faible - 265 postes d'aide-soignant pour 400 malades - et la charge de travail due au taux de dépendance, qui a connu ces cinq dernières années une augmentation de 30 %, a annulé la création de la vingtaine de postes d'aide-soignant intervenue en 1996 et 1997.
Par conséquent, l'augmentation des moyens est une condition nécessaire pour réussir les 35 heures dans ce secteur si particulier.
J'ai bien entendu ce que vous m'avez répondu sur la concertation. Il serait nécessaire que les personnels de nuit et leurs représentants à l'Assistance publique comme ailleurs soient conviés au groupe de recherche sur les modes organisationnels adaptés. Ce serait un acte de concertation important et il serait salué par les personnels.
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