M. le président. « Art. 14. _ I. _ A compter du 11 janvier 1997, le tarif de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers prévue au tableau B du 1 de l'article 265 du code des douanes est ainsi modifié :
Désignation des produits |
Indice d'identification |
Unité |
Taux (en francs) |
---|---|---|---|
Goudrons de houille | 1 | 100 kg | 7,82 |
Essences d'aviation | 10 | Hectolitre | 206,62 |
Supercarburant sans plomb | 11 | Hectolitre | 376,23 |
Supercarburant plombé | 11 bis | Hectolitre | 403,51 |
Essence normale | 12 | Hectolitre | 386,92 |
Carburéacteurs sous condition d'emploi | 13,17 | Hectolitre | 14,37 |
Fioul domestique | 20 | Hectolitre | 50,36 |
Gazole | 22 | Hectolitre | 232,79 |
Fioul lourd H.T.S. | 28 | 100 kg | 14,82 |
Fioul lourd B.T.S. | 28 bis | 100 kg | 10,72 |
Mélange spécial de butane et de propane destiné à être utilisé comme carburant, sous condition d'emploi | 33 bis | 100 kg | 25,53 |
Mélange spécial de butane et de propane destiné à être utilisé comme carburant, autre | 34 | 100 kg | 75,90 |
Gaz naturel comprimé destiné à être utilisé comme carburant | 36 | 100 m³ |
65,17 |
« II. _ A compter du 11 janvier 1997, le taux de la taxe
prévue à l'article 266
quinquies
du même code est fixé à 7,21 F par 1
000 kilowattheures. »
Sur l'article, la parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Si je prends la parole sur cet article qui traite de
la TIPP, c'est pour rappeler que le différentiel de taxation entre le
supercarburant plombé et les autres carburants mériterait d'être réduit. Or, le
dispositif actuel maintient cet écart.
Le Gouvernement a donc décidé, monsieur le ministre, de maintenir le
statu
quo
sur cette question alors que le rapport demandé l'année dernière par le
Parlement montre clairement que rien ne justifie l'avantage fiscal actuel en
faveur du gazole.
La France est le seul pays de l'Union européenne à connaître un tel écart. La
situation devra évoluer. La commission considère que l'heure de la
responsabilité politique a sonné.
J'observe d'ailleurs que réduire cet écart n'interdit en aucune façon - c'est
l'une des préoccupations de la commission - de trouver une solution spécifique
pour les usages professionnels, en particulier pour les transporteurs
routiers.
Pour maintenir la pression sur cette question du diesel, tout en l'abordant
sous un angle différent, la commission a adopté, à l'unanimité, un amendement
qu'elle vous présentera en deuxième partie.
La fiscalité des véhicules, et non plus celle des carburants, présente un
autre défaut : la vignette, la taxe sur les cartes grises, la taxe sur les
véhicules de société sont calculées à partir de la puissance fiscale ; or, la
puissance fiscale des moteurs diesel fait l'objet d'un abattement d'environ 30
% par rapport à celle des moteurs à essence. Cela conduit à une véritable
iniquité. J'ajoute que, encore une fois, la France est le seul pays européen
qui soit dans cette situation.
La commission des finances souhaite donc, monsieur le ministre, que le
Gouvernement remette un rapport détaillé sur ce sujet.
Par ailleurs, il ne lui semble pas aberrant qu'une plus grande neutralité soit
recherchée dans le calcul de la puissance fiscale des voitures neuves.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 14
du projet de loi de finances consacre, selon une habitude désormais classique,
la hausse des droits d'accises perçus sur les produits pétroliers.
Une fois de plus, donc, le consommateur va être mis à contribution par la
revalorisation de ces droits, pour permettre à l'Etat de parvenir à atteindre
une part des objectifs fixés par les nécessités de la convergence
européenne.
Il est étonnant que, dans un grand pays développé comme le nôtre, les droits
perçus sur les produits pétroliers constituent une recette fiscale plus
importante que l'impôt sur les sociétés.
Les masses en jeu ne sont pas d'une importance équivalente, pourtant le taux
de la pression fiscale sur les produits pétroliers excède les 80 % dans
certains cas alors qu'il est inférieur à 10 % du résultat brut d'exploitation
quand il s'agit de l'impôt sur les sociétés.
Le consommateur paie des taxes quand il passe à la pompe à essence, le produit
livré ayant en lui-même un prix très faible, puisqu'il est à peine supérieur à
un franc le litre.
Nous estimons d'ailleurs que la lisibilité et la transparence fiscale seraient
sans doute plus grandes si les factures des pleins d'essence comportaient, à
l'attention des clients, des rubriques spécifiant le montant des droits
d'accises. C'est là une idée que nous vous soumettrons éventuellement en
seconde partie du débat budgétaire.
Au-delà, l'augmentation progressive du prix de l'essence a un certain nombre
d'effets pervers, et je souhaite en citer au moins deux.
Le premier est de présenter aujourd'hui un caractère profondément dissuasif,
qui finit d'ailleurs par remettre en cause les prévisions de recettes en
matière de taxe intérieure sur les produits pétroliers.
Le second est de motiver, pour un certain nombre d'usagers professionnels de
l'automobile, un recours croissant au système des frais réels qui fait que la
croissance des droits perçus au titre de la TIPP est absorbée pour partie par
les moins-values au titre de l'impôt sur le revenu.
Voilà au moins deux raisons de s'interroger sur le bien-fondé d'une nouvelle
hausse de la TIPP, qui continuerait d'ailleurs d'être d'autant plus mal
comprise que le Gouvernement annonce qu'il veut réduire les impôts.
Enfin, je ferai une dernière observation sur l'utilisation même des recettes
de la taxe aujourd'hui versée au budget général et que le projet de loi sur la
qualité de l'air vient d'ailleurs de modifier légèrement.
Si l'on admet que la taxe intérieure sur les produits pétroliers pénalise en
quelque sorte une pratique de pollution atmosphérique par rejets de CO2 et de
SO2, il convient de s'interroger sur l'opportunité d'affecter, quelles que
soient par ailleurs les contraintes de l'ordonnance portant loi organique sur
la discussion des lois de finances, une part du produit de la taxe à des
missions d'intérêt général comme, par exemple, le développement des transports
collectifs, des transports combinés ou des alternatives de transport de
marchandises par d'autres moyens que la route.
Sous le bénéfice de ces observations, et à défaut de voir adoptés les
amendements que nous déposons sur cet article, nous ne voterons pas ce
dernier.
M. le président.
Sur l'article 14, je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet
d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° I-62 est présenté par M. Masseret, Mme Bergé-Lavigne, MM.
Charasse, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Régnault, Richard, Sergent et les
membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° I-172 est déposé par Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres
du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent à supprimer l'article 14.
Par amendement n° I-173, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe
communiste, républicain et citoyen proposent :
« A. - De rédiger comme suit le tableau figurant au I de cet article :
Goudrons de houille | 1 | 100 kg | 7,66 |
Essences d'aviation | 10 | Hectolitre | 200,00 |
Supercarburant sans plomb | 11 | Hectolitre | 295,92 |
Supercarburant plombé | 11 bis | Hectolitre | 322,96 |
Essence normale | 12 | Hectolitre | 300,00 |
Carburéacteur sous condition d'emploi | 13,17 | Hectolitre | 14,00 |
Fioul domestique | 20 | Hectolitre | 49,00 |
Gazole | 22 | Hectolitre | 204,26 |
Fioul lourd HTS | 28 | 100 kg | 14,52 |
Fioul lourd BTS | 28 bis | 100 kg | 10,50 |
Mélange spécial de butane et de propane destiné à être utilisé comme carburant sous condition d'emploi | 33 bis | 100 kg | 25,00 |
Mélange spécial de butane et de propane destiné à être utilisé comme carburant, autre | 34 | 100 kg | 63,83 |
Gaz naturel comprimé destiné à être utilisé comme carburant | 36 | 100 m³ | 63,83 |
« B. - Pour compenser la perte de recettes résultant de l'application des dispositions du A ci-dessus, d'insérer après le I de cet article un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant de l'allégement du tarif de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers est compensée par l'abrogation des articles 223 A à U du code général des impôts. »
Par amendement n° I-250, M. Joly propose de rédiger comme suit la huitième ligne du tableau mentionné au I de l'article 14 : « Gazole 22 Hecto-litre 229,5 ».
Par amendement n° I-174, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent de compléter in fine l'article 14 par deux paragraphes ainsi rédigés :
« ... - Une part représentative du produit fiscal découlant de l'application du I ci-dessus est affectée à la recherche en matière de dépollution et de motorisation.
« ... - Au second alinéa de l'article 978 du code général des impôts, les mentions : "3 " et "1,5 " sont remplacés par les mentions : "4 " et "2 ". »
Par amendement n° I-175, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent de compléter in fine l'article 14 par deux paragraphes ainsi rédigés :
« ... - Une part représentative du produit fiscal découlant de l'application du I ci-dessus est consacrée au développement des modes de transport de marchandises alternatifs à la route.
« ... - Dans le premier alinéa de l'article 980 bis du code général des impôts, les mots : "n'est pas" sont remplacés par le mot : "est". »
La parole est à M. Masseret, pour défendre l'amendement n° I-62.
M. Jean-Pierre Masseret. Cet amendement vise à supprimer cet article 14 consacré à la fixation du barème de la taxe intérieure sur les produits pétroliers et le gaz naturel, car nous considérons que la facture finit par être lourde dans ce domaine.
M. René Régnault. Oh oui !
M. Jean-Pierre Masseret. Peut-être parce qu'il s'agit d'une imposition apparemment indolore ou d'une taxation indirecte, depuis trois ans, l'addition s'allonge : 8 milliards de francs de recettes supplémentaires au printemps 1993 ; 2,7 milliards de francs dans la loi de finances de 1994, puis une hausse complémentaire de 7 milliards de francs dans la loi de finances pour 1995 ; 7 milliards de francs en 1996, soit au total 33 % d'augmentation en trois ans, ayant rapporté 28 milliards de francs !
A cela, il faut ajouter les augmentations qu'ont subi les consommateurs du fait de la hausse du marché des produits pétroliers : depuis le début de l'année 1996, c'est une augmentation de plus de 15 % qu'on a pu observer et qui s'ajoute, par conséquent, aux taxes diverses.
Cela pèse sur la consommation, sur le pouvoir d'achat, sur les ménages les plus modestes, puisque ceux-ci ne peuvent pas faire figurer ces dépenses dans un compte d'exploitation en réduction d'un bénéfice professionnel.
Nous considérons donc que l'actualisation des tarifs de la TIPP dans la loi de finances pour 1997 n'est pas justifiée, d'autant qu'elle représente une augmentation supplémentaire de 3,5 milliards de francs.
Autant de raisons qui légitiment cet amendement de suppression. (Très bien ! sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° I-172.
M. Paul Loridant. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec cet amendement, nous refusons une nouvelle majoration des taux de la taxe portant sur les produits pétroliers. L'article 14 propose, en effet, d'augmenter la taxe intérieure sur les produits pétroliers - TIPP - de six centimes par litre pour les carburants routiers, à l'exception du supercarburant plombé qui augmenterait de sept centimes par litre.
Cette revalorisation de la TIPP sur les carburants routiers devrait se traduire par des hausses de prix de vente à la pompe de l'ordre de sept à huit centimes par litre. Ainsi le consommateur devra-t-il payer, en janvier 1997, le litre de supercarburant sans plomb 6,08 francs, celui du supercarburant plombé 6,35 francs et celui de gazole 4,44 francs.
Le relèvement des taxes indirectes sur les carburants revient à faire payer aux automobilistes la réduction envisagée de l'impôt sur le revenu. Le Gouvernement reprend ainsi d'une main ce qu'il donne de l'autre, à une différence près : la moitié des contribuables seulement sera concernée par la réduction d'impôt, surtout les plus privilégiés, alors que l'augmentation de la TIPP touchera tous ceux qui achètent des carburants pour leur véhicule.
Le Gouvernement compte prélever quelque 3,5 milliards de francs supplémentaires sur les automobilistes.
Si l'augmentation de la TIPP est moins élevée que l'an dernier, nous considérons cependant qu'elle est encore trop importante et qu'elle aura des conséquences négatives sur le budget des ménages les plus modestes, ainsi que sur l'activité de l'industrie automobile, et donc sur le chômage.
Aujourd'hui, l'essence est devenue un produit de première nécessité, surtout quand on connaît la faiblesse des transports en commun non seulement dans les grandes agglomérations, mais aussi et surtout dans les zones rurales. Or, c'est en France que le prix des carburants à la pompe intègre le plus de taxes parafiscales.
Ainsi, alors que le prix hors taxes moyen du supercarburant plombé est d'environ un franc, l'automobiliste le paiera près de six francs le litre. Pour le gazole, il paiera quatre francs le litre, alors que ce dernier ne coûte qu'un franc hors taxes.
Il faut arrêter d'« étrangler » les ménages et de pénaliser la consommation populaire en aggravant l'impôt indirect.
Tout au long du débat budgétaire, nous n'aurons de cesse de faire des propositions pour vous montrer que l'on peut trouver d'autres ressources pour le budget de l'Etat. Plutôt que de taxer encore et encore les plus modestes, vous devriez mettre davantage à contribution les revenus financiers.
Pour toutes les raisons que je viens d'évoquer, nous proposons de supprimer purement et simplement l'article 14.
M. le président. La parole est à M. Bécart, pour défendre l'amendement n° I-173.
M. Jean-Luc Bécart. Il s'agit évidemment d'un amendement de repli, au cas où les amendements de suppression, par mésaventure, ne seraient pas adoptés.
Nous proposons de réécrire l'article 14, afin de prévoir une baisse généralisée de la TIPP sur l'ensemble des carburants routiers.
Cette nouvelle rédaction, si elle était retenue, aurait pour résultat, non seulement de placer la France dans la moyenne des taux pratiqués en matière de TIPP en Europe - ce n'est pas un objectif irréaliste en soit, mais également d'enrayer la chute de la consommation populaire et la progression du chômage dans notre pays. Le prix du carburant à la pompe n'a jamais été aussi éloigné qu'aujourd'hui de son prix d'achat hors taxes.
Notre amendement vise à faire baisser le prix du supercarburant plombé d'environ 40 à 50 centimes et celui du supercarburant sans plomb de quelque 80 centimes.
Le supercarburant sans plomb étant destiné à limiter la pollution, il convient de faire un effort particulier afin de le rendre plus attractif.
Pour compenser les pertes de recettes fiscales induites par cette mesure, nous proposons de supprimer le régime fiscal très avantageux dont bénéficient les sociétés mères. Je veux parler, vous l'aurez compris, de ce régime très « spécial » qui permet aux sociétés mères de déduire de leurs propres bénéfices les déficits qu'elles organisent sur les comptes de leurs filiales.
C'est particulièrement inadmissible, d'autant plus que ce procédé entraîne un manque à gagner de plus en plus élevé pour le fisc.
Il lui en coûtait, l'an dernier, environ 19 milliards de francs ; cette année, cette perte peut être évaluée à 30 milliards de francs.
C'est sous le bénéfice de ces observations que nous vous demandons, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Joly, pour présenter l'amendement n° I-250.
M. Bernard Joly. L'amendement concerne le tarif de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers, en particulier le gazole dont nous proposons, à compter du 11 janvier 1997, de limiter la hausse à 229,50 francs l'hectolitre au lieu de 232,79 francs.
Cette limitation concernerait les transporteurs routiers ainsi que d'autres catégories professionnelles. Elle se justifie par l'incidence de celle-ci sur les coûts répercutés qui entravent la marche des entreprises et menacent l'emploi.
Les pertes de recettes résultant d'une telle disparition seraient compensées à due concurrence par une majoration des taux frappant le gazole des véhicules de tourisme.
M. Michel Caldaguès. Eh ben, voilà ! c'est pas plus difficile que ça !
M. Bernard Joly. Je suis conscient, monsieur le ministre, que la période est peut-être malvenue pour présenter cet amendement.
M. Gérard Braun. Eh bien, retirez-le !
M. le président. La parole est à M. Loridant, pour présenter l'amendement n° I-174.
M. Paul Loridant. Cet amendement a pour objet de faciliter le développement de la recherche en vue de diminuer la pollution atmosphérique.
Plus que jamais, une réelle réflexion sur l'utilisation de l'énergie et sur le développement de la recherche relative à la fabrication de véhicules de moins en moins polluants doit être mise à l'ordre du jour.
On le sait, il aujourd'hui possible de réduire la consommation pétrolière, donc la pollution engendrée par les véhicules automobiles.
Il existe des procédés qui permettent une efficacité énergétique meilleure des moteurs.
C'est dans ce secteur que la recherche devrait bénéficier d'une aide substantielle de la part des pouvoirs publics.
Il s'agit, en la matière, de faire des choix, mais, hélas ! trop souvent, ces choix sont contraires aux intérêts des groupes de pression.
Il est nécessaire de trouver, et c'est le rôle de la recherche, de nouvelles sources d'énergies moins polluantes. Nous pensons en particulier à l'agriculture.
Si la mission première de l'agriculture est de nourrir les hommes, elle peut également être une source d'énergies renouvelables. Elle l'a été, par exemple, pour l'alimentation des animaux de traction et le chauffage.
Nous nous prononçons pour l'exploitation des possibilités qu'offre aujourd'hui l'agriculture d'un point de vue énergétique sans, bien évidemment, que cela entraîne de nouvelles nuisances.
Il devient de plus en plus nécessaire de réduire la consommation de pétrole non seulement parce que les ressources de la planète sont limitées, mais également pour améliorer la qualité de l'air.
Or le constat est affligeant et va à l'opposé de ce qui devrait être. En effet, l'insuffisance des transports collectifs, le développement du transport autoroutier de marchandises, l'arrêt de dessertes ferroviaires, l'ouverture de nouvelles autoroutes sont des éléments qui vont à l'encontre d'une réelle prise en charge des problèmes générateurs de pollution atmosphérique.
Certes, la recherche en ce domaine est coûteuse et nécessite, par conséquent, un réel engagement de la part des pouvoirs publics.
C'est tout l'objet de l'amendement que nous vous soumettons puisque nous proposons qu'une part représentative du produit fiscal issu de la taxe intérieur sur les produits pétroliers soit affectée à la recherche en matière de dépollution et de motorisation.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° I-175.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Notre amendement a pour objet de renforcer les moyens d'une véritable politique d'aménagement du territoire en matière d'infrastructures de transport.
Il s'agit en effet de consacrer une part représentative du produit fiscal au développement des modes de transport de marchandises alternatifs à la route.
Aujourd'hui, il est urgent de faire reculer la part de la route dans le transport des marchandises et de développer, a contrario, les transports ferroviaires, fluviaux et maritimes qui permettraient d'éviter non seulement les nuisances sonores, atmosphériques et environnementales, mais également le nombre d'accidents de la route.
Il ne suffit pas de constater que le transport se développe, encore faut-il s'attaquer, d'une part, aux causes de ce développement et, d'autre part, aux moyens propres à endiguer ce phénomène.
C'est d'une façon globale qu'il convient de traiter ce problème, c'est-à-dire en termes d'organisation urbaine et d'aménagement du territoire.
Force est de constater que tel n'est pas le cas, tant s'en faut !
Il ne s'agit pas ici de mettre à l'index telle ou telle catégorie de personnes, il s'agit plutôt de mettre en oeuvre de véritables moyens de substitution au transport routier et autoroutier.
J'évoque ici le transport des marchandises, mais ma réflexion vaut également pour les automobilistes, qui devraient être davantage incités à utiliser les transports en commun.
On voit bien là toute l'importance des taxes sur les produits pétroliers. Aujourd'hui, un conflit grave se développe chez les chauffeurs routiers. Des conditions de travail inhumaines, des salaires insuffisants, des risques aggravés, une vie familiale de plus en plus perturbée constituent les raisons du mouvement avec lequel le groupe communiste républicain et citoyen réaffirme sa solidarité.
Nous comprenons que d'autres corporations déclarent leur soutien à ce mouvement et nous demandons au Gouvernement de prendre ses responsabilités en exigeant du patronat qu'il donne satisfaction aux revendications justifiées des chauffeurs routiers.
Si des problèmes économiques résultent de cette situation, les chauffeurs routiers n'en sont nullement responsables. Les Français le sentent très bien et d'ailleurs, selon un quotidien du soir, deux Français sur trois soutiennent ce mouvement.
M. René Régnault. Absolument !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Si notre économie devait souffrir de cette situation, monsieur le ministre, le Gouvernement, et lui seul, en porterait la responsabilité !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-62, I-172, I-173, I-250, I-174 et I-175 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission est défavorable aux amendements identiques n°s I-62 et I-172, ainsi qu'à l'amendement n° I-173.
Je suggère à M. Joly, s'il le veut bien, de retirer l'amendement n° I-250, compte tenu de ce que j'ai dit tout à l'heure de notre souci de trouver une solution spécifique pour les usages professionnels.
La commission est défavorable à l'amendement n° I-174.
Enfin, l'amendement n° I-175 lui paraît irrecevable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Ces amendements ont des objets qui sont de deux ordres.
Deux d'entre eux, les amendements n°s I-174 et I-175, prévoient une affectation de recettes à certaines dépenses, ce qui n'est pas possible pour un amendement parlementaire. Je considère donc qu'ils ne sont pas recevables.
Les quatre autres amendements ayant pour objet soit de supprimer l'article 14, c'est-à-dire le relèvement des taux de la taxe intérieure sur les produits pétroliers visé par cet article - les amendements n°s I-172 et I-62 - soit d'en réduire la portée à certains carburants - l'amendement I-250 de M. Joly - ou à l'ensemble des carburants - l'amendement I-173 - le Gouvernement n'y est pas favorable.
Je rappelle que la hausse proposée par l'article 14 correspond purement et simplement à l'application de la hausse des prix. Nous sommes d'ailleurs obligés d'évoquer tous les ans ce problème devant le Parlement en raison du mode de calcul de la TIPP, qui est déterminée non pas en proportion du prix de vente du carburant, mais en centimes par litre.
On peut donc considérer que, cette année, il n'y a pas de véritable augmentation de la TIPP, de même qu'il n'y a pas augmentation de la TVA. Simplement, le chiffre d'affaires augmentant, l'assiette va augmenter et, par conséquent, la TVA, cela sans qu'il soit besoin de modifier les taux, qui sont fixés en pourcentages.
M. Jean-Louis Carrère. Quand l'assiette augmente, on peut toujours réduire les taux !
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Il s'agit de taxes qui sont fixées en centimes par litre. Si l'on veut simplement suivre la hausse des prix, on est obligé de les augmenter, ce que nous avons fait, mais très légèrement puisqu'il s'agit de 6 centimes par litre pour le gazole et de 7 centimes par litre pour le supercarburant. Cela représente, pour quelqu'un qui roule 15 000 kilomètres par an avec un véhicule diesel, un supplément compris entre 15 et 20 centimes par jour. Il s'agit donc d'une augmentation qui reste assez modérée.
Il subsiste des problèmes de fond, qui ont été évoqués l'année dernière, lors de la discussion du projet de loi de finances, et qui ont donné lieu à la publication par le Gouvernement d'un rapport qui avait été demandé par le Sénat. Je comprends que M. le rapporteur général souhaite les évoquer en deuxième partie. Effectivement, compte tenu de la crise sociale que nous connaissons actuellement avec les transporteurs routiers, il n'est pas opportun de prendre aujourd'hui des décisions à chaud sur cet aspect important de la question.
La proposition faite par M. le rapporteur général d'en reparler à l'occasion de la discussion des articles de la deuxième partie est donc sage. Dans ces conditions, je suggère à M. Joly, qui comprend les impératifs de la situation actuelle, de retirer son amendement sous le bénéfice de ces observations.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s I-62 et I-172.
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole contre ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Je voterai contre ces deux amendements, conformément aux voeux de la commission des finances et du Gouvernement.
Je voudrais toutefois saisir cette occasion pour évoquer le propos liminaire de M. le rapporteur général, qui est demeuré fidèle - qui s'en étonnerait ? - à la position constante de la commission des finances sur le gazole, position qui a été prise l'année dernière à pareille époque et qui est donc maintenue.
Je me permets, à cet égard, d'émettre le souhait que les positions soient plus nuancées. Je ne suis pas certain en effet que la différence de traitement entre les essences ordinaires, le supercarburant et la gazole constitue pour ce dernier un privilège.
Après la discussion budgétaire de l'année dernière, il se trouve que j'ai eu l'occasion de me rendre en Italie. J'ai observé les pompes : le décalage n'était pas, en tout cas au premier coup d'oeil, extrêmement différent de celui qui existe en France. Par conséquent, monsieur le rapporteur général, votre affirmation selon laquelle un tel privilège mettrait le pays dans une position singulière vis-à-vis des pays environnants mérite, je crois, d'être examinée de plus près.
Quand on ajoute, comme vous l'avez fait, monsieur le rapporteur général, que le privilège existe aussi en matière de puissance fiscale, permettez-moi de dire que, techniquement, il y a bien une différence de puissance ! On ne voit donc pas pourquoi il n'y aurait pas également une différence de puissance fiscale. Je ne sais pas si elle est proportionnelle, mais il est certain que, sans cette différence fiscale, les véhicules fonctionnant au gazole seraient défavorisés.
Il faut faire attention et ne pas s'acharner, ou du moins en donner cette impression, sur une catégorie d'usagers qui n'a cessé d'augmenter proportionnellement depuis quelques années en tirant profit des différences de coût qui s'offraient, pour ce qui concerne aussi bien la taxation de la puissance fiscale que la vente du produit lui-même et, par voie de conséquence, les primes d'assurance.
Cette constatation a donné lieu à une extension importante et continue du marché des véhicules de tourisme à moteur diesel. Il ne faudrait pas que les intéressés aient l'impression d'avoir été piégés parce que ce ne sont pas eux qui ont fait que ce type de moteur bénéficie d'une situation plus économique que les moteurs à essence.
Ce sont les pouvoirs publics qui ont laissé se développer cette situation ; ils l'ont même favorisée. Cela n'a pas été sans conséquence pour notre industrie. Nous ne pouvons tout de même pas, dans une période où la question de l'emploi est aussi cruciale, nous désintéresser de la situation dans laquelle celle-ci se trouve à cause d'un système qui s'est développé grâce aux décisions prises par les pouvoirs publics.
Monsieur le rapporteur général, sans faire de démagogie, il faut bien constater que la proportion de véhicules à moteur diesel est d'autant plus importante que les conducteurs sont plus modestes. Il ne faudrait donc pas donner l'impression, dans une période où la vie est dure, où nombre de nos concitoyens sont privés d'emploi, que l'on a trouvé un nouveau moyen de les matraquer encore.
Depuis l'été dernier, le prix des carburants a augmenté, mais celui du gazole plus que les autres en vertu du système de taxation que vous nous avez exposé tout à l'heure. Si mes calculs sont bons, une augmentation d'au moins 10 %, pour ne pas dire 12 %. A mon avis, il n'est pas normal que les prix augmentent de 10 % ou 12 % en quatre ou cinq mois à l'époque où nous vivons.
Pour toutes ces raisons, je souhaiterais, monsieur le rapporteur général, que les demandes pressantes adressées par la commission des finances au Gouvernement pour que soit réduite la différence de prix entre l'essence et la gazole soit assorties, peut-être, de plus de nuance, et que le Gouvernement lui-même soit prudent dans cette affaire, car on ne peut pas prendre impunément des décisions qui risque de donner naissance à un sentiment d'injustice.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. M. Caldaguès connaît très bien le Sénat ; il sait donc que, quand je m'exprime, je le fais au nom de la commission des finances. Par conséquent, lorsque j'indique que je déposerai, lors de l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances, un amendement qui a été adopté à l'unanimité par la commission des finances - ce qui signifie que je l'ai voté moi-même - j'accomplis un devoir de loyauté envers ma commission, dont je dois rapporter les travaux devant le Sénat.
Cela étant, cette loyauté me conduira aussi à faire connaître à la commission des finances les propos que M. Caldaguès vient de tenir.
M. Michel Caldaguès. Je ne vous demande pas autre chose, monsieur le rapporteur général !
M. Philippe Richert. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert. Je souhaiterais réagir brièvement à la suite de l'intervention de M. Caldaguès, qui portait sur la politique fiscale de la France en matière de gazole.
Mon cher collègue, il me semble que vos propos sont empreints de bons sens. Il ne s'agit pas, en effet, de pénaliser aujourd'hui ceux qui, hier, ont acheté des véhicules qui présentaient alors un certain nombre d'avantages, avantages dont ils avaient le sentiment de pouvoir bénéficier pendant de longues années. Ils pourraient aujourd'hui éprouver l'impression d'avoir été trompés si nous augmentions de façon trop importante la taxation du gazole.
Cela étant, je voudrais vous renvoyer l'argument, monsieur Caldaguès, et souligner que si nous continuons à favoriser de manière très importante le gazole,...
M. Michel Caldaguès. Ce n'est pas le cas !
M. Philippe Richert. ... nous continuerons à accroître la part de ce carburant par rapport aux autres. Or je voudrais rappeler que les moteurs diesels émettent des particules fines qui sont reconnues comme très dangereuses pour la santé, et nous ne pouvons pas, à la fois, voter des lois sur l'amélioration de la qualité de l'air en mettant l'accent sur les incidences de l'émission de particules fines et tenir, deux jours plus tard, des propos contradictoires en affirmant que, finalement, le gazole ou un autre carburant, c'est blanc bonnet et bonnet blanc.
Je crois qu'il faut veiller à favoriser l'utilisation de carburants moins nocifs. Des progrès peuvent certes être réalisés dans la technologie des moteurs diesels, mais je ne pense pas qu'il faille donner au consommateur le sentiment que la part des véhicules diesels dans le parc automobile peut encore augmenter.
Il est grand temps, à mon sens, de freiner cette progression qui devient une particularité de la France au sein de l'Europe.
Ainsi, en Suisse et en Allemagne, où la part du diesel était, jusqu'à présent, plus importante qu'en France, la situation s'est inversée. Il faudra, tôt ou tard, en tenir compte.
Je suivrai donc l'avis de la commission des finances.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s I-62 et I-172, repoussés par la commission et par le Gouvernement.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-173, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-250.
M. Bernard Joly. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. La demande de retrait de cet amendement par M. le ministre ne m'a pas beaucoup surpris puisque j'ai moi-même indiqué en le défendant que le moment n'était peut-être pas bien choisi.
J'ai cru comprendre des propos de M. le ministre que ce débat, dont on ne peut pas faire l'économie, à mon sens - je suis en effet convaincu qu'on ne peut pas consentir des avantages à certaines catégories et pas à d'autres - aurait lieu ultérieurement.
Bref, compte tenu des explications de M. le ministre, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° I-250 est retiré.
Quel est l'avis de la commission des finances sur l'irrecevabilité invoquée par le Gouvernement à l'encontre des amendements n°s I-174 et I-175 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Ils sont effectivement irrecevables, monsieur le président.
M. le président. Les amendements n°s I-174 et I-175 ne sont pas recevables.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14.
(L'article 14 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 14