3. Régionalisation et décentralisation
Il faut
partir d'une constatation : en Europe, il existe presque toujours un
niveau différent de celui de la collectivité territoriale de
base, mais il est rarement appelé région. La
régionalisation présentée comme une
nécessité de la construction européenne implique-t-elle
nécessairement la création d'un niveau supplémentaire qui
serait le troisième ? Ou la transformation du deuxième
niveau existant en une entité encore plus autonome ?
Ces questions couvrent un débat sur la taille idéale du niveau
intermédiaire, sur l'identité culturelle de l'entité ainsi
créée, sur le degré d'autonomie à accorder à
ces entités et donc sur l'unité de l'Etat pour les pays de
tradition unitaire, (et surtout les nouvelles démocraties soucieuses
d'éviter un éclatement centrifuge et tous les pays comptant de
fortes minorités).
D'autre part, le débat sur la régionalisation en Europe semble ne
pas prendre en compte certaines réalités de la
décentralisation comme la coopération existant entre les
collectivités locales de base : l'intercommunalité en France
et aux Pays-Bas ou les " fédérations " en Finlande.
La régionalisation, qui aujourd'hui semble être
considérée comme un moyen de mise en oeuvre d'un certain
degré d'autonomie territoriale par rapport à l'Etat, avait au
départ une connotation économique et relevait plus
précisément de la mission d'aménagement du territoire. Il
s'agissait de trouver un échelon de décision suffisamment vaste,
sans être celui de l'Etat central, pour répondre aux
nécessités de l'aménagement de l'espace.
Ce n'est qu'ensuite qu'apparaissent la culture et l'identité (en effet,
le découpage régional souvent artificiel quand il existait ne
s'appuyait que rarement sur un territoire historique). La région en
Europe est présentée maintenant comme un moyen d'affirmer la
diversité des cultures négligées jusque là par les
Etats centralisateurs.
L'idée a pris corps en Europe qu'il est nécessaire de disposer de
véritables collectivités régionales et locales autonomes
et administrées par des élus, expression de la
décentralisation. La région est donc devenue un niveau de
décentralisation au même titre que la commune, mais elle doit
être suffisamment vaste pour exercer des tâches
d'aménagement de développement économique, social et
culturel et de coordination et suffisamment proche pour demeurer sous le
contrôle des citoyens.
Une telle approche paraît suffisamment souple pour permettre à
chaque Etat de déterminer la structure de collectivités
territoriales qui lui semble répondre le mieux à son histoire et
à sa dimension
.
Mais aujourd'hui nous ne pouvons pas mettre sur le même plan les
régions à forte autonomie politique des Etats
fédérés et régionalisés et les niveaux
intermédiaires qui en tiennent lieu dans les Etats unitaires. Il faut
donc distinguer entre les collectivités de troisième niveau
appartenant à un Etat fédéral ou régional et les
régions telles qu'elles viennent d'être définies,
c'est-à-dire le meilleur niveau intermédiaire possible entre les
communes et l'Etat.
On voit donc qu'
il
n'y a pas de modèle unique en Europe
.
Toutefois, on présentera ici l'évolution récente de quatre
pays voisins (le Royaume-Uni, l'Italie, l'Espagne et l'Allemagne).