2. Un fort sentiment d'insécurité
Ces incertitudes affectant la politique de proximité en matière de sécurité s'inscrivent dans un contexte marqué par la détérioration des statistiques de la délinquance et de la criminalité et par une aggravation de la délinquance de proximité.
a) Une croissance globale des infractions
Inversant la tendance qui avait été
enregistrée
les trois années précédentes, l'année 1998 a
été marquée par une détérioration de ces
statistiques.
3 565 525 crimes et délits
ont été recensés,
soit environ 72 000 de plus que l'année précédente. Les
vols représentent plus de 64% de la criminalité. La
délinquance dite de voie publique représente plus de la
moitié (54,9%) de la délinquance enregistrée.
Quatre régions (Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte d'Azur,
Rhône-Alpes et Nord-Pas-de-Calais) concentrent plus de la moitié
(55,11%) des crimes et délits constatés en France
métropolitaine.
Les statistiques restaient orientées à la hausse au premier
semestre de 1999 (+ 2% au niveau national, +3,9% à Paris).
M. Patrice Bergougnoux, directeur général de la police nationale,
a observé, lors de son audition par votre mission d'information, une
stabilisation de l'évolution de la délinquance à partir du
deuxième semestre de 1999. Il a relevé que cette stabilisation
correspondait à la phase de mise en oeuvre de la police de
proximité et y a vu un signe encourageant pour poursuivre et
généraliser la réforme.
b) Une aggravation de l'insécurité quotidienne
En tout
état de cause, les statistiques officielles ne permettent pas de
retracer véritablement l'insécurité réellement
subie ou perçue par les citoyens dans leur vie quotidienne. Elles ne
recensent, en effet, que les faits signalés par leurs victimes. Or trop
souvent, les victimes d'infractions sont dissuadées de porter plainte.
Les taux d'élucidation des
infractions de proximité
restent particulièrement faibles : 13% pour les vols, moins de 10%
pour l'ensemble de la délinquance de voie publique (contre 85% pour les
homicides et en moyenne 28,66% pour l'ensemble des infractions).
En outre, 80% des affaires élucidées dans ces matières
sont
classées sans suite
par les parquets, faute de moyens
adéquats pour les traiter. Il y a donc là une rupture de la
chaîne répressive que ne peut suffire à justifier
l'encombrement des tribunaux.
Depuis plusieurs années, l'apparition de comportements provocants, dits
" incivilités
", susceptibles d'être
réprimés par une contravention, sont difficilement ressentis par
la population.
Au total, l'enquête de
" victimisation "
menée
par l'Institut des hautes études de sécurité
intérieure en association avec l'INSEE, a mis en évidence, en
octobre dernier, que les faits de délinquance commis en 1998 seraient
cinq fois supérieurs
à ceux des statistiques officielles.
Ce constat inquiétant doit être complété par
l'aggravation de la violence de proximité. Depuis 1988, les
dégradations et les coups et blessures volontaires ont plus que
doublé. Les vols avec violence ont pour leur part progressé de
75%.
En 1998, le service des renseignements généraux a recensé
26 000 faits de violence urbaine
, soit 10 000 de plus qu'en
1997. La moitié de ces faits ont porté sur des incendies de biens
(8 000 voitures en ont été victimes).
La croissance de la
violence dans les transports en commun
constitue un
phénomène particulièrement préoccupant. Elle
affecte la vie quotidienne des agents et des usagers.
Enfin, la
délinquance des mineurs
continue de progresser de
manière préoccupante. En 1998, le nombre de mineurs
impliqués dans des crimes ou des délits a atteint 171 787, soit
une hausse de 11,23%. Ils représentent 60% des personnes mises en cause
pour des vols de deux roues à moteur et 34,11% sur l'ensemble des vols.
Ils sont également plus fréquemment responsables de la
délinquance de voie publique (36% de l'ensemble des faits
recensés).