B. LA QUÊTE DE NOUVEAUX MARCHÉS
Une autre série de raisons qui conduit cadres et entrepreneurs à s'expatrier tient à leur recherche de marchés dynamiques, présentant plus de débouchés et d'opportunités que la France n'en offre. Cette réaction est particulièrement marquée dans le secteur des nouvelles technologies, où le décalage entre les Etats-Unis et la France est manifeste.
1. Le développement des nouvelles technologies de l'information aux Etats-Unis
De par
sa taille et sa fulgurante croissance, le marché des nouvelles
technologies aux Etats-Unis attire les ingénieurs et les informaticiens
du monde entier.
En avance de plusieurs années sur les autres pays, le marché
américain des nouvelles technologies représente selon les
produits de 50 à 75 % du marché mondial. Il constitue
aujourd'hui un passage obligé pour toute entreprise du secteur qui
souhaite conquérir une envergure internationale.
La taille de ce marché s'accompagne d'un très fort dynamisme qui
entraîne l'économie américaine tout entière. Le
secteur des technologies de l'information a contribué à hauteur
de 35% à la croissance de l'économie américaine de 1995
à 1998, créant plus de 5 millions d'emplois. Un
développement tel que le Département du Commerce estime qu'en
2006, près de la moitié des emplois salariés seront le
fait des industries productrices ou fortement utilisatrices de matériels
et de services liés aux technologies de l'information.
42(
*
)
La croissance de la nouvelle économie aux Etats-Unis s'appuie sur une
dynamique exceptionnelle de l'innovation et de la création
d'entreprises, fortement soutenue par la diffusion rapide d'Internet et du
commerce électronique tant dans le monde de l'entreprise que dans le
grand public.
36 millions d'ordinateurs ont été vendus aux Etats-Unis en 1998,
portant le nombre des ordinateurs utilisés, fin 1998, à 129
millions
43(
*
)
. Plus de 80
millions d'Américains utilisent l'Internet, soit près du tiers de
la population américaine. Par comparaison, dans l'Union
Européenne, qui compte 376 millions d'habitants contre 270 aux
Etas-Unis, le nombre de personnes connectées ne dépasse pas 50
millions. Ce développement d'Internet explique la croissance rapide du
commerce électronique.
En 1998, le volume du commerce électronique de détail aux
Etats-Unis a dépassé les 60 milliards de dollars, les
prévisions sont de 80 milliards de dollars en 2002 et 180 milliards
dès 2004. Le commerce électronique inter-entreprises était
estimé quant à lui à 180 milliards de dollars en 1998
et devrait dépasser les 1.000 milliards de dollars dès 2002.
Un développement aussi spectaculaire explique qu'il ait attiré
des capitaux en quantité sans cesse croissante. 12,5 milliards de
dollars ont été levés en 1998 sous forme de
capital-risque, soit 24 % de plus qu'en 1997. Pour le seul premier
semestre 1999, les fonds investis en capital-risque ont déjà
atteint 11,2 milliards de dollars, dont 80 % dans le secteur des
technologies de l'information contre 60 % en 1998, essentiellement dans
des technologies liées à Internet.
A ces financements il faut, en outre, ajouter ceux, difficiles à
évaluer, provenant des investisseurs privés, les " business
angels ", anciens entrepreneurs qui jouent un rôle essentiel dans le
suivi et l'accompagnement des entreprises naissantes, du démarrage
à l'introduction sur le NASDAQ.
Les " bussiness angels " américains, seraient, d'après
les estimations de la réserve fédérale de Dallas, au
nombre de 250.000, représentant 70 milliards de dollars
d'investissements dans quelques 110.000 entreprises. Leur rapport annuel
de fonds atteint 20 milliards de dollars et concerne
30.000 entreprises nouvelles. L'apport moyen serait de 80.000 dollars
par investisseur et de 660.000 dollars par entreprise
44(
*
)
.
Enfin, le développement du NASDAQ offre une " sortie " sans
équivalent dans le monde aux opérateurs qui financent les
entreprises innovantes. Le volume d'actions émises en 1998 sur le NASDAQ
a atteint 202 milliards de dollars, soit une augmentation de 23 % par
rapport à 1997. La capitalisation boursière totale du NASDAQ
s'est élevée à 2.600 milliards de dollars en 1998,
représentant une augmentation de 44 % par rapport à 1997
soit 400 fois plus que le nouveau marché français dont la
capitalisation n'excède pas 5,5 milliards d'euros.
Cette réussite s'explique par la conjonction de plusieurs facteurs :
- une large diffusion des nouvelles technologies, favorisée par un
système de tarification forfaitaire des télécommunications
locales ;
- la multiplication de pôles technologiques favorisant l'osmose
entre chercheurs et entrepreneurs ;
- un système de financement facile d'accès et complet
couvrant l'ensemble des besoins des entreprises naissantes et comprenant : des
investisseurs privés, les " businness angels ", qui jouent un
rôle essentiel au niveau de la création d'entreprise, plus de 700
sociétés de capital risques assurant le financement de leur
développement et un marché boursier dynamique, valorisant les
entreprises utilisatrices des nouvelles technologies ;
- un environnement fiscal, social et culturel favorable à la prise
de risque.
L'ensemble de ces facteurs a contribué depuis cinq ans à un
extraordinaire développement des nouvelles technologies aux Etats-Unis,
développement qui contraste avec le relatif retard de la France dans ce
domaine.