CONCLUSION GÉNÉRALE
C'est dans un climat de grande tension entre les pouvoirs publics et les chercheurs de la communauté des synchrotrons que vos Rapporteurs ont conduit leur analyse.
Même si le délai de trois mois dans lequel s'est déroulé ce travail est de fait très réduit, il semble que les lignes d'une opposition frontale, qui motivait la demande du groupe communiste de voir le Bureau de l'Assemblée nationale saisir l'Office d'une étude, ont bougé depuis lors.
Par une écoute attentive de toutes les parties et une objectivité aussi poussée que possible, vos Rapporteurs espèrent avoir contribué à rétablir, au moins en partie et cette fois sur des bases rationnelles, un dialogue interrompu.
Toutefois, même si le rayonnement synchrotron est un outil d'analyse de la matière qui, après des progrès exceptionnellement rapides, apporte une contribution technique essentielle au progrès des connaissances, les synchrotrons ne sont que des machines performantes et l'on peut se surprendre à penser que la question du renouvellement des installations vieillissantes du LURE ne méritait somme toute ni cet excès d'honneur ni cette indignité.
A vrai dire, le souci d'une bonne utilisation des deniers publics dans le domaine de la recherche ne saurait qu'être partagé. Les phases d'interrogation sur ces sujets sont profitables mais à condition qu'elles ne s'éternisent pas et surtout que l'on ne se trompe pas d'adversaire.
L'adversaire à combattre pour le bien de la recherche française est certes l'insuffisance du recrutement de jeunes chercheurs et le déficit de moyens de fonctionnement des laboratoires.
L'adversaire n'est certainement pas un grand instrument dont la vocation est de fournir des moyens d'étude de haut niveau à un ensemble considérable de chercheurs appartenant à plus de 700 laboratoires répartis sur tout le territoire.
Au vrai, avec la construction indispensable et urgente d'un nouveau synchrotron dans notre pays, il s'agit bien de doter les laboratoires français de moyens supplémentaires.
Bien sûr, s'il était possible de doter chacun des laboratoires français de micro synchrotrons performants, la centralisation de facto d'un grand instrument ne serait pas nécessaire et la question de SOLEIL ne se serait pas posée. Mais les techniques actuelles de production de rayonnements électromagnétiques de haute performance n'autorisent que la construction d'un grand instrument vers lequel les chercheurs se déplacent.
Ce grand instrument partagé et donc d'un type particulier présente, en contrepartie de ses grandes dimensions, l'avantage de produire naturellement le processus si important de l'interdisciplinarité, grâce aux contacts entre spécialistes de la machine et les utilisateurs de toutes disciplines, et de permettre l'effet de communauté si important pour la créativité des scientifiques et l'épanouissement de leurs recherches.
D'ailleurs, cette centralisation positive semble bien constituer un élément de la stratégie scientifique de différents pays, puisque, aussi bien, la tendance observée dans plusieurs pays est de rassembler une masse critique d'instruments et de compétences sur un même site pour créer des synergies bénéfiques pour la recherche.
Au reste, une stratégie scientifique ne semble pas pouvoir se résumer de nos jours à des choix dichotomiques. Au contraire, c'est de l'ensemble de la panoplie des moyens techniques et des types d'organisation dont il faut disposer.
A cet égard, la coopération franco-britannique constitue sans nul doute une voie qu'il convient d'explorer et de finaliser. La présence de chercheurs français sur d'autres synchrotrons européens est également une voie intéressante.
Mais tout indique que ces solutions délocalisées, si elles étaient les seules à être mises en application, ne suffiraient pas à satisfaire la totalité des besoins français, tout en générant des coûts par utilisateur supérieurs à ceux d'une solution autonome.
Il est donc indispensable de décider clairement et sans délai la construction d'un synchrotron national et pour cela de modifier le calendrier des différentes tranches prévues dans le plan des pouvoirs publics pour le rayonnement synchrotron.
Au-delà des positions de combat prises par les uns et les autres, il est temps que soit reconnu le bien fondé des positions exprimées par chacune des parties, tant il est vrai que les réformes de modes d'organisation et de fonctionnement, si elles peuvent être proposées par le sommet, doivent être acceptées par les acteurs pour s'inscrire dans les faits.
En tout état de cause, il est temps que s'arrête une de ces guerres d'opinion franco-françaises que les vrais partenaires de la France contemplent toujours avec douleur et que soient détaillées et mises en pratique les orientations que vous proposent vos Rapporteurs et qui n'ont d'autre finalité que de vouloir combiner les atouts de la recherche française et européenne, sur des bases nationales fortes, pour le plus grand succès de nos chercheurs.