C. TROIS PRÉALABLES POUR PERMETTRE AUX LOIS DE FINANCEMENT DE JOUER PLEINEMENT LEUR RÔLE
1. Disposer des comptes à temps
Les
dates d'arrêté des comptes n'ont jamais eu, dans l'histoire de la
sécurité sociale, autant d'importance.
Si les comptes
étaient arrêtés beaucoup plus tôt qu'à l'heure
actuelle, le Parlement, les partenaires sociaux, la Cour des comptes,
l'administration elle-même, disposeraient de davantage de temps pour
procéder à une analyse approfondie de l'existant et pour
élaborer, sur des bases solides, des prévisions et des
propositions.
Le calendrier que subissent actuellement les partenaires sociaux, qui doivent
se prononcer en moins d'une semaine sur des dispositions complexes, ne doit pas
être considéré comme une fatalité.
De même, il semble légitime que le Parlement puisse disposer de
davantage de temps pour à la fois :
- apprécier l'application de la loi de financement n-1 à
travers les rapports de la commission des comptes et de la Cour des
comptes ;
- étudier les prévisions révisées de
l'année n et celles élaborées pour l'année
n+1 ;
- évaluer enfin les propositions du Gouvernement concernant
l'année n+1.
L'unique solution est d'accélérer de manière
significative la sortie des comptes des organismes de sécurité
sociale.
Le groupe de travail s'accorde pour reconnaître qu'il faut fixer
clairement un objectif : les comptes des organismes de
sécurité sociale de l'année n doivent être
arrêtés définitivement avant le 31 mars de l'année
n+1.
La commission des comptes de la sécurité sociale de printemps
deviendrait une commission " tous régimes ", et non plus
seulement consacrée au régime général. Cette
commission effectuerait ainsi le bilan de l'exercice n-1, avec quatre mois
d'avance par rapport à la situation actuelle.
La deuxième réunion annuelle de la commission des comptes de la
sécurité sociale aurait lieu au tout début du mois de
septembre, et non à la fin du mois de septembre, à partir du
moment où les prévisions macro-économiques auront
été retenues -dans le cadre de la préparation du projet de
loi de finances- dès la fin du mois de juillet.
Cette réunion devrait s'en tenir aux prévisions
révisées de l'exercice n et aux prévisions tendancielles
de l'exercice n+1. Le Gouvernement pourrait, s'il souhaite annoncer le
même jour les principales mesures de l'avant-projet de loi -les
délais étant de toute façon très restreints-
organiser une réunion spécifique, afin de ne pas confondre
l'analyse des soldes tendanciels ou spontanés et la présentation
des mesures de redressement et leur impact sur les comptes.
L'avant-projet de loi pourrait être ainsi transmis aux différents
régimes dès cette date. Adopté en conseil des ministres
vers le 15 septembre, le texte serait immédiatement déposé
à l'Assemblée nationale.
Le calendrier idéal des lois de financement
janvier - février
: travaux du Haut
comité
de la santé publique ;
mi-mars
: réunion de la conférence nationale de
santé ;
31 mars
: date d'arrêté des comptes pour tous les
organismes de sécurité sociale ;
fin mai
: réunion de la commission des comptes de la
sécurité sociale tous régimes - publication des
résultats de l'année n-1 - révision de la prévision
de l'année n ;
fin juillet
: remise du rapport de la Cour des comptes sur
l'application de la loi de financement n-1 ;
début septembre
: réunion de la commission des
comptes de la sécurité sociale - révision des
prévisions de l'année n - prévisions des comptes
tendanciels de l'année n+1 ;
début septembre :
présentation des principales
mesures du projet de loi ;
première quinzaine de septembre
: consultation des
partenaires sociaux ;
vers le 15 septembre
: adoption par le Conseil des ministres ;
15-20 septembre
: début des travaux en commission à
l'Assemblée nationale ;
15 octobre
: date officielle du dépôt de la
dernière annexe au projet de loi, afin de faire courir les délais
prévus par la Constitution et la loi organique.
Non seulement l'Assemblée nationale et le Sénat disposeraient de
trois semaines supplémentaires par rapport au calendrier actuel, mais
les deux assemblées verraient leurs tâches allégées,
puisqu'elles prendraient connaissance des comptes de l'année n-1
dès le mois de mai.
La Cour des comptes aurait également le loisir, à partir du
moment où la commission des comptes de printemps porterait sur des
résultats définitifs de tous les régimes, de
procéder à sa mission constitutionnelle de contrôle de
l'application de la loi de financement de l'année n-1, et pourrait
remettre son rapport dans le courant de l'été.
Votre rapporteur considère que le Parlement se doit d'exiger des
" comptes à temps "
et de ne pas
" relâcher cette pression ".
Il a été
encouragé dans cette voie par les différentes
personnalités entendues par le groupe de travail.
Les travaux de la mission Déniel, qui s'attaque à ce difficile
problème, en analysant toutes les raisons de retard et en
édictant des normes comptables qui s'appliqueront de manière
unique pour tous les organismes de sécurité sociale,
méritent non seulement d'être encouragés mais
également soutenus.
L'objectif d'une remise des comptes avant le 31 mars doit être ainsi
clairement affiché et un " plan de marche " établi,
prenant en compte la nécessaire formation des personnels et l'adaptation
des systèmes d'information pour que cet objectif puisse être
atteint dans un délai de trois ans.
Votre rapporteur estime que cette échéance doit d'ores et
déjà être inscrite dans la loi.
2. Redéployer les moyens administratifs
La direction de la sécurité sociale s'est vu confier de nouvelles missions, sans bénéficier de véritables moyens supplémentaires.
Evolution des effectifs réels de la direction de la
sécurité sociale
du 1
er
janvier 1990 au
1
er
janvier 1999
Date |
Catégorie A |
Catégorie B |
Catégorie C |
Total |
1 er janvier 1990 |
120 |
42 |
90 |
252 |
1 er janvier 1991 |
110 |
41 |
88 |
239 |
1 er janvier 1992 |
109 |
35 |
86 |
230 |
1 er janvier 1993 |
114 |
35 |
86 |
226 |
1 er janvier 1994 |
125 |
33 |
77 |
234 |
1 er janvier 1995 |
127 |
38 |
82 |
247 |
1 er janvier 1996 |
131 |
37 |
76 |
244 |
1 er janvier 1997 |
132 |
38 |
77 |
247 |
1 er janvier 1998 |
133 |
37 |
74 |
244 |
1 er janvier 1999 |
134 |
37 |
67 |
238 |
Source : Direction de la sécurité
sociale
Force est de constater que l'effort de recrutement de personnels de
catégorie A a débuté en 1992, pour
s'accélérer entre 1993 et 1996, puis stagner depuis. Par
ailleurs, la création des lois de financement n'a pas
entraîné les mêmes conséquences pour les
sous-directions de la sécurité sociale.
Seule la cinquième sous-direction (financement et gestion de la
sécurité sociale) était à l'origine directement
concernée ; une sixième sous-direction de la
prévision et des études financières a heureusement
été créée, mais le bureau chargé des comptes
de la sécurité sociale, devenu bureau 6A, n'a pas vu ses
effectifs augmenter pour autant. Deux contrats de catégorie A seraient
toutefois en cours de recrutement.
Les six sous-directions de la direction de la sécurité sociale
-
1
ère
sous-direction : financement de l'offre de soins
- 2
ème
sous-direction : accès aux soins
- 3
ème
sous-direction : retraites
- 4
ème
sous-direction : famille, accidents du travail et
handicaps
- 5
ème
sous-direction : financement et gestion de la
sécurité sociale
- 6
ème
sous-direction : prévision et
études financières
Un renforcement des moyens est nécessaire d'un point de vue quantitatif.
Un redéploiement au sein du ministère de l'emploi et de la
solidarité, dont les effectifs budgétaires
s'élèvent à 24.300 personnes en 1999, le permettrait au
demeurant.
Mais il doit être également qualitatif. M. Raoul Briet, directeur
de la sécurité sociale, a insisté lors de son audition par
le groupe de travail sur la nécessité de recruter des profils
nouveaux pour le bon accomplissement des nouvelles missions de la
Direction : fiscalistes, statisticiens, informaticiens.
Une solution simple consisterait à réaffecter du personnel entre
ministères. Or, cette solution s'avère quasiment impossible. Il
est très étonnant de constater, une fois encore, l'extrême
difficulté de l'Etat à redéployer ses effectifs en raison
notamment de l'opacité et de
l'hétérogénéité des régimes de
rémunération.
La direction de la sécurité sociale cumule un certain nombre de
fonctions. Comme l'a noté M. Alain Déniel, elle est à la
fois "
la direction du budget, la direction de la prévision et
la direction de la comptabilité publique
" des finances
sociales.
Les mêmes fonctionnaires sont investis de trois missions :
- tutelle des régimes ;
- comptes de la commission des comptes ;
- préparation du projet de loi de financement, et notamment des
annexes.
La création d'une nouvelle direction, chargée du financement de
la sécurité sociale, pourrait être un objectif de moyen
terme, à condition de ne pas reproduire le cloisonnement que
connaît le ministère des Finances.
La modernisation de l'administration de tutelle n'est pour autant pas
suffisante. Il apparaît essentiel de responsabiliser les organismes de
sécurité sociale. De ce point de vue, les conventions d'objectifs
et de gestion prévoient la conclusion de contrats d'objectifs et de
gestion entre l'organisme national et les organismes locaux : la CNAMTS et
les CRAM, l'ACOSS et les URSSAF, la CNAF et les CAF, etc. Les contrats
d'objectifs et de gestion devraient comporter des engagements des caisses
locales pour accélérer la sortie de leurs comptes.
Une question demeure néanmoins posée, relative à la
politique comptable des organismes de sécurité sociale. A l'heure
actuelle, cette politique (provisions, charges à payer) n'est
déterminée ni par le directeur de l'organisme, ni par le conseil
d'administration, mais par le comptable. Il serait souhaitable que la
responsabilité en incombe au directeur de l'organisme.
L'accélération de la sortie des comptes reste également
suspendue à la redéfinition des processus d'affectation des
recettes. Le projet RACINE devrait permettre une nette amélioration de
la répartition des encaissements. Il importe que ce projet soit soutenu
et que différents moyens soient mis en oeuvre pour mieux évaluer
ses effets.
Mais certaines des recettes des organismes de sécurité sociale
sont précisément liées à l'évaluation des
déficits comptables : CSG et C3S, dont la répartition
dépend elle-même de la répartition de la CSG.
Un système de répartition forfaitaire de la CSG entre les
différents régimes d'assurance maladie, fixée de
manière législative, serait préférable au
mécanisme complexe mis en oeuvre.
Il importe également de faire évoluer la culture comptable des
organismes de sécurité sociale -marqués par le souci du
" chiffre vrai "
, selon l'expression de M. Alain
Déniel- pour concilier la double exigence d'efficacité et
d'exactitude s'attachant aux comptes sociaux.
Au-delà d'une réorganisation administrative et de simplifications
législatives, il serait judicieux qu'une responsabilité politique
soit plus clairement engagée, à travers la nomination d'un
secrétaire d'Etat qui, au sein du Gouvernement, serait
spécifiquement chargé de la sécurité sociale, des
différentes réformes engagées et du suivi de ses comptes.
Ce secrétaire d'Etat pourrait utiliser sa légitimité
politique pour précipiter les évolutions. M. Alain Déniel
a rappelé le rôle joué, dans ce domaine, par M. Jean
Farge à la fin des années soixante-dix.
3. Clarifier le contexte institutionnel
Le
schéma vertueux que proposait Alain Juppé dans la
déclaration du Gouvernement du 15 novembre 1995 visait à
établir une chaîne des responsabilités : le Parlement,
"
la clef de voûte d'une nouvelle architecture de
responsabilité
"
57(
*
)
, fixe les prévisions de
recettes et les objectifs de dépenses de la sécurité
sociale tandis que les caisses adoptent des "
relations
conventionnelles avec l'Etat pour clarifier les responsabilités et
définir les objectifs et les moyens
". Il revient au
Gouvernement de déterminer les orientations générales de
la politique de santé et d'assurance maladie, tandis que les
régimes d'assurance maladie -et principalement la CNAMTS- assurent la
gestion quotidienne du système, dans le respect des objectifs
fixés par le Parlement.
Cette " révolution culturelle de la sécurité
sociale " n'a pas eu lieu, l'Etat restant dans une logique
centralisée.
a) L'Etat reste dans une logique centralisée de la gestion de l'assurance maladie
Le
Gouvernement est retombé dans les travers d'une tutelle pesante et
vétilleuse. La cohérence de la politique d'assurance maladie
apparaît ainsi difficile à entrevoir.
Mme Martine Aubry a ainsi cru bon de présenter, le 6 juillet 1998, un
plan d'économies d'environ 3 milliards de francs, l'essentiel
(1,8 milliard de francs) étant à la charge des laboratoires
pharmaceutiques.
Dès le 26 juin 1998, le Gouvernement avait reporté, par
arrêté, une mesure de revalorisation de la nomenclature de
chirurgie dentaire, au mépris des engagements conventionnels, puisque
cette revalorisation était prévue par l'arrêté
interministériel du 30 mai 1997.
Le 11 août 1998, un arrêté a baissé de 13,5 % la
valeur de la lette-clé Z1 (électroradio, gastro-entéro,
onco-radio). Le Gouvernement a annoncé qu'il entendait
" récupérer " 450 millions de francs et a donc
consenti à caractériser cette baisse de " temporaire ".
Après le déremboursement du médicament MAXEPA
(Laboratoires Pierre Fabre), le Gouvernement a pris un arrêté du 3
août 1998 diminuant de 65 % à 35 % le taux de
remboursement de 28 présentations de médicaments
vasodilatateurs.
Devant les réactions des professionnels s'indignant que de telles
mesures soient prises sans qu'ils aient été entendus par la
commission administrative compétente, un arrêté du
21 août 1998 a retiré l'arrêté
précédent.
Le Gouvernement est intervenu, avec le plan d'économies du mois de
juillet 1998, dans la gestion courante de l'assurance maladie, la
plaçant ainsi dans une situation délicate vis-à-vis des
professionnels avec lesquels elle est appelée à négocier
des engagements conventionnels de maîtrise des dépenses. A la
même date, Mme Martine Aubry avait ainsi ces mots quelque peu malheureux
pour définir les missions de la Caisse nationale d'assurance
maladie :
" La Caisse doit mieux fonctionner pour sortir des
statistiques fiables, pour contrôler les médecins et les
dépenses qui dérivent ".
Confiner la CNAMTS à la fonction d'effectuer des contrôles et de
" sortir des statistiques " apparaît particulièrement
réducteur.
La mission confiée à l'IGAS le 15 juin 1998 pour contrôler
ces statistiques n'a produit aucun résultat, en dehors d'une
déstabilisation de la CNAMTS elle-même. Un Conseil de transparence
de l'information médicale, organisme à l'utilité douteuse,
a été créé par la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999.
Les décisions gouvernementales concernant les chirurgiens-dentistes ont
ainsi donné lieu à une vive réaction des caisses
d'assurance maladie, exprimée par une lettre des trois présidents
(CNAMTS, MSA, CANAM) à Madame la ministre de l'emploi et de la
solidarité (8 octobre 1998).
Lettre envoyée par les présidents des
caisses
d'assurance maladie
à Mme Martine Aubry le 8 octobre 1998
Madame la Ministre,
Par un arrêté du 26 juin 1998, le Gouvernement a reporté la
mesure de revalorisation de la Nomenclature de chirurgie dentaire qui devait
entrer en vigueur le 1
er
juillet. Cette revalorisation,
prévue par l'arrêté interministériel du 30 mai 1997,
figurait pourtant au nombre des engagements de la Convention Nationale qui lie
la profession à l'assurance maladie, convention approuvée elle
aussi par arrêté interministériel du même jour.
Les caisses nationales avaient, à l'époque, regretté cette
décision, qui aboutissait à rompre unilatéralement un
accord conventionnel important, et surtout fragilisait ce très important
changement d'attitude de la profession, laquelle s'engageait enfin dans la voie
-vertueuse- d'une revalorisation des soins dentaires conservateurs, et d'une
maîtrise concomitante des dépassements tarifaires sur les actes
prothétiques.
Au mois de juin dernier, vous avez présenté cette mesure comme
conservatoire, et résultant de l'évolution de 5,5 % des
dépenses de chirurgie dentaire sur les cinq premiers mois de 1998, que
vous jugiez préoccupante.
A la vérité, cette tendance du début 1998 ne
dépassait que d'assez peu le taux de croissance de 4,2 % qui avait
été anticipé et souhaité par les caisses, au cours
des négociations conventionnelles de l'annexe tarifaire pour 1998
(délibération du Conseil d'Administration de la CNAMTS du 28
avril 1998 implicitement approuvée par les autorités de tutelle).
Le taux d'évolution global des dépenses ambulatoires (2,1 %)
ne saurait en effet servir de référence pour des secteurs dans
lesquels l'assurance maladie doit massivement se réinvestir pour combler
un retard préjudiciable aux assurés.
Au surplus, cette première tendance ne paraît pas se confirmer au
vu des chiffres disponibles à la fin du mois de juillet. La hausse des
dépenses remboursables de chirurgie dentaire se situe en effet à
un niveau de 4,1 %, c'est-à-dire non seulement en net retrait par
rapport aux premiers chiffres de 1998, mais surtout dans la cible que visait le
projet d'annexe conventionnelle. (...)
Cette situation préoccupante nous conduit, Madame la Ministre, à
souhaiter que le Gouvernement réexamine la position provisoire qui fut
la sienne au mois de juin dernier, et donne un signal très clair aux
chirurgiens-dentistes en confirmant que la mesure de suspension de la nouvelle
nomenclature sera rapportée avant la fin de l'année. (...)
Nous vous prions d'agréer, Madame la Ministre, l'expression de notre
respectueuse considération.
Jean-Marie SPAETH, Jeannette GROS, Marcel RAVOUX
Cet épisode montre une confusion fâcheuse. Les professionnels de
santé -estimant que le pouvoir de décision se situe au sein
même du ministère- ne sont pas encouragés à signer
des accords conventionnels avec les caisses d'assurance maladie.
Le Gouvernement appuie sa politique de maîtrise des dépenses de
santé sur trois accords partiels avec les professions de
santé : les radiologues, les chirurgiens-dentistes et les
cardiologues
58(
*
)
. Il fixe des
orientations sans même en informer les caisses d'assurance maladie. Il se
réserve le droit de recourir éventuellement à la baisse
des lettres-clefs.
Le discours de Mme Martine Aubry, prononcé à la commission des
comptes du 31 mai 1999, était tout à fait
révélateur ; il n'abordait la CNAMTS qu'en fin de parcours.
Consciente des réactions provoquées -dont celle de votre
rapporteur- au sein de la commission des comptes de la sécurité
sociale, Mme Martine Aubry a modifié son propos devant les journalistes
présents à la conférence de presse qui a suivi la
réunion de la commission. Il ressortait, en effet, des comptes rendus de
cette conférence de presse que la CNAMTS devait rapidement proposer des
mesures au Gouvernement pour qu'elle puissent être
intégrées dans le projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 2000.
Or, lorsque la CNAMTS avait adopté un plan stratégique le 31 mars
1999, la seule réaction de Mme Martine Aubry avait été de
constater que la CNAMTS n'était responsable ni de la politique
hospitalière, ni de celle du médicament.
L'effort de responsabilisation des caisses ne saurait être ainsi remis
en cause. Aussi votre rapporteur estime-t-il qu'il est impératif de
revenir à l'esprit des ordonnances de 1996.
b) L'Etat conserve le pouvoir de nomination des directeurs des caisses du régime général
A
l'occasion de la démission de M. Bertrand Fragonard, directeur de la
CNAMTS, le 2 juin 1998, et de son remplacement par M. Gilles Johanet, la
question de la nomination des directeurs des caisses a été
évoquée. Le directeur d'une caisse nationale est nommé en
Conseil des ministres, est révocable par le ministre, mais est
censé mener la politique définie par le conseil d'administration
de sa caisse.
Cette situation apparaît pour le moins paradoxale. Sans aller
jusqu'à une nomination du directeur par le conseil d'administration de
la caisse, il serait envisageable de prévoir que cette nomination soit
prise sur proposition du conseil d'administration.
Au-delà, l'institution par les ordonnances Juppé de conseils de
surveillance présidés par les parlementaires est un moyen pour le
Parlement, par le contrôle de la mise en oeuvre des conventions
d'objectifs et de gestion, de vérifier que le Gouvernement et les
conseils d'administration des caisses restent dans leur rôle.
Ces conseils de surveillance, mis en place à l'automne 1997, n'ont
certainement pas pris encore toute leur ampleur.
*
* *
Des
comptes à temps et un contexte institutionnel clarifié devraient
permettre au Parlement de se prononcer sur les lois de financement en
connaissance de cause, c'est-à-dire de voter clairement ce qui
relève de sa compétence.
Or, il semble à votre rapporteur que le Parlement se trouve aujourd'hui
dans une situation paradoxale : il ne parvient pas à exercer sa
compétence dans des conditions satisfaisantes ; mais
parallèlement, le Gouvernement lui prête volontiers des
responsabilités qui ne sont pas les siennes, d'où un risque
" d'instrumentalisation ".
Ainsi, un commentateur même averti reste persuadé que le Parlement
se prononce sur l'équilibre du régime général ou
sur les différentes enveloppes de l'ONDAM. Il n'en est rien.
Les orientations proposées par votre rapporteur tendent
précisément à ce que le Parlement exerce pleinement -et de
façon suffisamment claire- ses prérogatives pour ne pas
empiéter sur les responsabilités propres à chacun des
acteurs de notre protection sociale.