2. Le statut privilégié des dépenses structurelles doit être purement et simplement supprimé
La
proposition de la Commission tendant à revenir partiellement sur le
statut privilégié des dépenses structurelles va dans le
bon sens. Le budget de la Communauté, pour 1999 met en avant, s'il en
était besoin, les inconvénients les plus manifestes d'un
système consistant à considérer comme un objectif de
dépenses des dotations programmées sept années
auparavant : la nécessité juridique de " solder "
la programmation décidée à Edimbourg conduit, compte tenu
des retards accumulés dans l'exécution des crédits,
à une augmentation des dépenses structurelles de 17 % au
moment même où l'entrée dans la troisième phase de
l'Union économique et monétaire impose à la plupart des
Etats membres un effort d'assainissement de leurs finances publiques.
Il convient donc de soutenir fermement la proposition de la Commission,
formalisée à l'article 30 de la proposition de
règlement général sur les fonds structurels, d'un
dégagement automatique des crédits pour lesquels aucune demande
de paiement n'aurait été présentée à la fin
de la deuxième année suivant leur engagement.
Il serait même souhaitable d'aller au-delà en supprimant purement
et simplement l'obligation pour le Parlement européen et le Conseil
d'inscrire dans chaque budget des crédits d'engagement pour les actions
structurelles à hauteur du plafond prévu par les perspectives
financières. Il convient en effet de laisser un certain pouvoir
d'appréciation à l'autorité budgétaire en
évitant tout systématisme qui conduirait à inscrire des
crédits (et à accroître la participation des Etats au
financement de l'Union européenne) quand bien même il serait
évident que ceux-ci ne pourraient être exécutés dans
leur intégralité.
3. Conserver l'équilibre actuel des responsabilités en matière budgétaire
La
procédure budgétaire repose actuellement sur un équilibre
globalement satisfaisant entre les différentes institutions
européennes :
- la Commission propose un avant-projet de budget sur la base duquel sera
établi un projet puis le budget lui-même, le Conseil disposant du
dernier mot en matière de dépenses obligatoires (DO) alors que le
Parlement européen le détient en matière de
dépenses non obligatoires (DNO) ;
- l'engagement d'une dépense pour
" une action communautaire
significative "
suppose non seulement son inscription dans le budget
communautaire, mais aussi une décision normative, dite aussi base
légale, définissant et autorisation l'action communautaire ainsi
financée
(6(
*
))
.
Cet équilibre pourrait se trouver modifié par deux séries
de propositions formulées par la Commission.
Tout d'abord l'intégration dans la rubrique 1 (dont les
dépenses sont classées en DO) de certaines actions relevant
actuellement de la rubrique 2 (dont les dépenses sont
classées en DNO) conduirait à accroître le champ des DO par
rapport aux DNO. Pour y obvier, la Commission propose de préciser, dans
une annexe au futur accord interinstitutionnel, que les dépenses
fiancées par le FEOGA-Garantie autres que celles liées aux
organisations commune de marché entrent dans la catégorie des
DNO. Un tel dispositif présenterait peut être l'avantage d'assurer
le statu quo à court terme, mais constituerait un regrettable
précédent.
Dans la mesure où toutes les dépenses
de la rubrique 1 ne seraient plus considérées comme des DO,
une brèche serait
ouverte qui pourrait venir
ultérieurement à l'appui de
revendications tendant
à supprimer le caractère obligatoire des dépenses
agricoles.
La prudence semble donc commander de s'opposer au transfert vers la
rubrique 1 de dépenses relevant aujourd'hui de la rubrique 2.
Le maintien de la situation actuelle assurerait en outre une meilleure
lisibilité de l'évolution des dépenses de la
rubrique 1 en facilitant les comparaisons avec la programmation
décidée à Edimbourg. Elle permettrait de mieux prendre
conscience de la stabilisation, et même de la diminution des dotations
consacrées à l'agriculture.
Ce même souci de prudence et de lisibilité plaide pour la
création d'une rubrique spécifique à la
préadhésion dès lors que les dépenses de celle-ci
devraient, comme le propose la Commission, être classées en DNO.
En second lieu, la proposition de nouvel accord interinstitutionnel
prévoyait, dans une première version, plusieurs exceptions
à l'exigence d'une base légale préalablement à
l'exécution de crédits inscrits au budget. Ainsi, auraient pu
être exécutés sans base légale, entre autres, les
crédits inscrits sur les lignes dotées de moins de
5 millions d'euros. La Commission considérait donc implicitement
comme non significatives des actions dont le coût n'excédait pas
un certain montant, en l'occurrence 5 millions d'euros. Mais, peu
après le dépôt de cette proposition, la Cour de justice des
Communautés européennes devait, dans un arrêt en date du
22 mai 1998, prendre le contre-pied de cette interprétation :
"
rien ne permet d'exclure qu'une action significative engendre des
dépenses limitées
".
A la suite de cet arrêt, la délégation du Sénat pour
l'Union européenne avait annoncé son souci d'éviter, lors
de l'adoption du nouvel accord interinstitutionnel, "
le maintien d'une
pratique explicitement condamnée par la Cour de justice
".
Tirant les conséquences de cet arrêt, la Commission a
présenté une nouvelle proposition de définition des
crédits susceptibles d'être exécutés sans acte de
base. Il s'agirait :
- des crédits relatifs à des projets pilotes de nature
expérimentale visant à tester la faisabilité d'une action
et son utilité. Les crédits d'engagement y afférents ne
pourraient être inscrits au budget que pour deux exercices
budgétaires et leur montant total ne pourrait excéder
32 millions d'euros ;
- des crédits relatifs à des actions destinées à
préparer des propositions en vue de l'adoption de futures actions
communautaires. Les crédits d'engagement y afférents ne
pourraient être inscrits au budget que pour trois exercices
budgétaires au maximum. Le montant total des lignes nouvelles
concernées ne pourrait dépasser 30 millions d'euros par
exercice et le montant total des crédits effectivement engagés au
titre des actions préparatoires ne pourrait excéder
75 millions d'euros.
Cette nouvelle définition a fait l'objet d'un accord de principe de la
part du Conseil et du Parlement européen au cours du trilogue du
17 juillet 1998. Au plafonnement des crédits, au demeurant assez
élevés, elle ajoute un second critère tenant à
l'objet même de l'action concernée. Elle prend ainsi en
considération l'arrêt de la Cour de justice des Communautés
européennes qui excluait une définition des actions non
significatives par référence au seul niveau des crédits
engagés pour son exécution. Aussi cette nouvelle
définition doit-elle être préférée à
celle initialement proposée par la Commission.