4. L'évolution du financement du secteur public
On ne
citera que pour mémoire cette question abondamment étudiée
chaque année dans les rapports pour avis des commissions
compétentes du Sénat et l'Assemblée nationale sur les
projets de budgets de la communication.
C'est en effet dans le cadre des projets de loi de finances et non dans celui
de la loi du 30 septembre 1986 qui constitue l'horizon de ce rapport, que
peuvent être résolus de façon pertinente les principaux
problèmes financiers actuels du secteur public, à commencer par
l'apparent paradoxe du financement publicitaire d'organismes voués
à une forme de communication non commerciale.
Deux remarques à cet égard.
D'une part, en ce qui concerne " l'apparent paradoxe ", il convient
de prévenir toute analyse trop sommaire du rôle de la
publicité dans la programmation des chaînes publiques. Un
financement publicitaire excessif tire sans doute la programmation vers le bas.
Mais nous venons de voir que cela n'implique pas l'alignement de celle-ci sur
celle des chaînes privées. La ménagère de moins de
50 ans n'est pas la cible-mère du secteur public, qui paraît
répondre dans une assez large mesure à sa vocation de
" fédérer " un public beaucoup plus vaste. Et il a
besoin pour cela de ressources importantes, que la publicité lui
garantit mieux sans doute que les crédits budgétaires ou la
redevance. Comment attirer en effet un vaste public sans coûteuses
" paillettes " ? Comment poursuivre l'ambition de susciter la
production d'oeuvres de qualité, pourvues d'une valeur patrimoniale, si
la ressource publicitaire diminue au profit d'un financement public dont on
sait d'expérience immémoriale le caractère
fondamentalement aléatoire ? On voit que le débat du
financement est une équation à beaucoup d'inconnues. Seule
l'idée d'écarter le financement publicitaire excessif, (mais
à quel niveau se situe l'excès ?) apparaît
incontestable.
D'autre part, il faut noter les effets de chaîne de toute modification
substantielle des modalités de financement du secteur public :
comment le partage s'effectuera-t-il, de la manne qu'un repli sensible du
financement publicitaire du secteur public déversera sur la
communication audiovisuelle privée ? Sera-ce un ballon
d'oxygène pour la presse écrite, pour la communication locale, ou
un facteur de renforcement des tendances oligopolistiques du
marché ? La législateur ne pourra se
désintéresser de la réponse.
En ce qui concerne les problèmes de l'avenir, on notera simplement les
doutes que l'on peut avoir sur la pérennité d'un
prélèvement qui finance une part de plus en plus étroite
de l'offre audiovisuelle, une part plus étroite encore de l'offre
effectivement consommée, et qui s'analysera de plus en plus comme la
rémunération arbitraire d'une consommation virtuelle
forcée. A plus long terme, la possibilité de recevoir des
émissions de télévision sur les écrans
d'ordinateur, non taxés, aura les mêmes conséquences
déstabilisatrices sur cette ressource. Si un jour le financement du
secteur public devenait entièrement budgétaire, et l'on ne peut
manifestement pas négliger cette hypothèse, il est probable que
l'époque des objectifs publicitaires excessivement hardis que nous avons
l'habitude de dénoncer aujourd'hui apparaîtrait comme un temps
béni de vaches grasses et de créativité.