c) Le département face au poids des dépenses de gestion
Le département est pour sa part confrontée au
poids croissant des dépenses de gestion.
L'évolution rapide des dépenses d'aide sociale, qui
représentent désormais 60 % du budget de fonctionnement des
départements, peut nuire à leur capacité d'investissement
et à la mise en oeuvre de leurs autres compétences pour organiser
et valoriser leur territoire.
Répondant à une interrogation de votre rapporteur, M. Jean Puech,
président de l'Assemblée des présidents de conseils
généraux (APCG) a partagé la préoccupation selon
laquelle le poids croissant de l'aide sociale frappait davantage les
départements que les autres collectivités, au détriment
des dépenses d'investissement et au risque de modifier le centre de
gravité de leurs compétences. Il a constaté qu'il
existait, en effet, un risque de déséquilibre accentué par
une situation économique difficile.
M. Jean-Louis Sanchez, délégué général de
l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée, a
confirmé le constat d'un contexte financier dégradé de
l'action sociale, pour laquelle les départements ont affecté
73 milliards de francs en 1995.
Tout en estimant que le poids de l'action sociale restait limité dans
l'ensemble des dépenses de protection sociale (223 milliards de
francs sur un total de 2 200,2 milliards de francs), il a relevé
que chaque année, l'action sociale exigeait des financements
supplémentaires importants qu'il a évalués à
hauteur de 3 % au-dessus du coût de la vie.
M. Jean-Louis Sanchez a en outre souligné le poids croissant des
dépenses liées à l'insertion et l'augmentation du
coût du service.
En raison de ce constat inquiétant, le groupe de travail juge
nécessaire une meilleure définition des réponses sociales
qui a, comme l'a suggéré M. Jean-Louis Sanchez
,
pourrait
reposer sur trois principes.
En premier lieu, la prévention devrait devenir une priorité
concrète en mobilisant toutes les politiques publiques au service de la
cohésion sociale. Cette priorité répondrait à une
demande de plus en plus forte pour une évolution d'une action sociale
très spécialisée vers une action sociale plus
" sociétale ".
En deuxième lieu, la restructuration de l'offre de services -que
concrétise déjà la prise en oeuvre des auxiliaires de vie
pour ce qui concerne la prise en charge de la dépendance- ne pourrait
avoir pour objet de mieux répondre aux attentes des
bénéficiaires de l'action sociale dont les demandes se sont
beaucoup diversifiées.
Enfin, la prise en compte de l'environnement des personnes en difficulté
et sa mobilisation au profit de ces dernières devraient être
encouragées.
Le législateur s'est d'ores et déjà engagé dans
cette voie en adoptant la proposition de loi d'origine sénatoriale (loi
n° 97-60 du 24 janvier 1997) instituant une prestation spécifique
dépendance qui prévoit un suivi de la personne dépendante
et tient compte de son environnement.
Les départements ont, pour leur part, également commencé
à engager une nouvelle approche de l'action sociale. La majorité
d'entre eux essaient ainsi d'organiser leurs services sociaux dans une
dynamique de mission à partir de trois grands pôles
consacrés, d'une part, à l'enfance, d'autre part, au handicap et
aux personnes âgées et, enfin, à l'insertion.
Les départements recherchent une globalisation de l'action sociale, par
la mise en place d'équipes pluri-disciplinaires, par une approche plus
socio-économique et par un affranchissement de l'action sociale des
missions de gestion.
Le groupe de travail souhaite que cette évolution soit approfondie
afin de réinsérer l'action sociale dans une dynamique des
politiques publiques et ainsi d'éviter les pièges d'une logique
purement gestionnaire.
Encore faudra-t-il que les efforts des élus départementaux ne
soient pas découragés par un contexte budgétaire par trop
dégradé et par des sanctions juridictionnelles fondées
plus sur des préoccupations immédiatement gestionnaires que de
résultats.
Les départements seront également probablement appelés
à favoriser les complémentarités entre leur propre action
et celle des villes qui assument 15 % des dépenses
départementales.
Une forme d'harmonisation pourrait consister -comme l'a suggéré
M. Jean-Louis Sanchez- dans l'établissement d'un " diagnostic
partagé " qui pourrait constituer un premier pas dans le sens du
développement d'un partenariat.
La loi du 24 janvier 1997 instituant une prestation spécifique
dépendance suit cette orientation.
Il sera enfin de plus en plus difficilement acceptable pour les
départements d'appliquer des décisions qui, pour l'essentiel,
sont étroitement prédéterminées par des
critères fixés par l'Etat.
Si les départements sont prêts à jouer tout leur rôle
dans la prise en compte des défis de notre société, ils
peuvent légitimement demander que leur pleine responsabilité soit
reconnue dans la définition de réponses adaptées pour ce
qui est des compétences qui leur ont été confiées
par le législateur.
L'avenir de l'action sociale départementale passe donc par une plus
grande affirmation du pouvoir de décision des départements. Une
plus grande clarification des rôles de chacun des intervenants serait
probablement au préalable utile.
Devant le groupe de travail, M. Pierre-Rémy Houssin, au nom de
l'Association des présidents de conseils généraux s'est
ainsi déclaré favorable à une clarification des
compétences concernant les personnes âgées, les
handicapés et la protection de l'enfance, à partir de la
définition d'un " chef de file ". Il a également
indiqué qu'une distinction devrait être effectuée entre
l'action sanitaire et la prévention relevant de la compétence de
l'Etat, et que le dispositif du RMI devrait être revu.