2. La nécessaire réforme des administrations de l'Etat
La clarification des relations avec l'Etat passe aussi par la
nécessaire réforme des administrations de l'Etat.
En effet, la mise en oeuvre d'une déconcentration effective constitue un
préalable indispensable à l'approfondissement de la
décentralisation.
a) La redéfinition des missions
Tout d'abord, la prise en charge de certaines
compétences à un niveau décentralisé doit conduire
l'Etat à réorienter ses missions autour d'une fonction
d'impulsion, de coordination et de péréquation.
Une clarification des missions respectives de l'Etat et des
collectivités locales s'impose en effet ; elle devrait en particulier
chercher à mettre fin aux doubles emplois existant actuellement entre
les services extérieurs de l'Etat et les services des
collectivités, qui peuvent générer une confusion
regrettable.
M. Jean-Ludovic Silicani, commissaire à la réforme de l'Etat, a
ainsi indiqué, au cours de son audition, que dans le cadre des
réflexions préparatoires à la réforme de l'Etat,
avaient été identifiés certains secteurs dans lesquels une
clarification des compétences
pourrait être
envisagée, à savoir les transports, le secteur sanitaire et
social, la formation et les interventions économiques.
En particulier, les auditions du groupe de travail ont fait apparaître la
nécessité d'une clarification du partage des compétences
entre l'Etat et les départements en matière d'action sanitaire et
sociale ; la politique sanitaire ne devrait-elle pas relever exclusivement du
niveau national, ainsi que l'a suggéré M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation ?
Peut-être faudrait-il également poursuivre la clarification de la
situation des DDE, ainsi que le souhaite l'APCG ?
Dans le cadre de missions clarifiées, une meilleure coordination de
l'action des services déconcentrés de l'Etat et de ceux des
collectivités locales devrait enfin être recherchée.
b) Pour une déconcentration effective
Qualifiée par M. Jacques Gérault, chef de
mission au commissariat à la réforme de l'Etat, de
"
corollaire naturel de la décentralisation
", la
déconcentration apparaît également comme une condition
indispensable à un dialogue efficace entre l'Etat et les
collectivités locales.
Une déconcentration effective de l'action de l'Etat, accompagnée
d'une simplification des procédures, doit donc être
réalisée, à travers la mise en oeuvre des objectifs
affichés par le Gouvernement dans le cadre de son projet de
réforme de l'Etat.
M. Jean-Ludovic Silicani, commissaire
à la réforme de
l'Etat, a en effet rappelé devant le groupe de travail que la
" lutte contre la centralisation au sein de l'Etat
"
constituait l'un des cinq "
chantiers
" de la réforme
de l'Etat.
Cette démarche est en cours de concrétisation, à travers
un certain nombre de mesures qui ont été annoncées au
groupe de travail par M. Dominique Perben, ministre de la fonction
publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, au
cours de son audition du 18 décembre 1996.
- Tout d'abord, le décret n° 97-34 du 15 janvier 1997
relatif à la
déconcentration des décisions
administratives individuelles
confère aux services
déconcentrés une exclusivité de la compétence pour
prendre des décisions individuelles à partir du 1er janvier 1998,
sous réserve de certaines exceptions fixées par décret en
Conseil d'Etat.
La compétence du préfet du département sera
désormais la règle de droit commun pour ces décisions
à l'exception de celles qui concernent les agents publics.
Toutefois, certaines décisions resteront prises au niveau national,
notamment celles qui excèdent le champ des compétences des
autorités territoriales, nécessitant, du fait de leur enjeu, une
appréciation nationale ou requérant une compétence
technique particulière.
D'autre part, de nombreuses décisions continueront de relever d'autres
autorités de l'Etat : le préfet de zone, le préfet de
région, les chefs des services déconcentrés de l'Etat, les
magistrats de l'ordre administratif ou judiciaire et les maires.
- Une
déconcentration de la gestion des crédits de l'Etat
est également en cours de mise en place, à partir d'une
expérimentation portant sur certains crédits en matière
d'emploi. Une enveloppe globale d'un milliard de francs de crédits
déconcentrés a d'ores et déjà été
mise à la disposition des préfets. En outre, six régions
test ( Lorraine, Nord-Pas-de-Calais, Auvergne, Limousin, Bretagne,
Poitou-Charentes ) devraient bénéficier d'une
déconcentration totale des crédits d'aide à l'emploi.
Cette expérimentation pourrait donner lieu à l'identification de
chapitres de crédits déconcentrés dans le cadre de la
préparation de la loi de finances pour 1998.
- Enfin, en ce qui concerne les personnels, une
déconcentration de la
gestion des corps
est envisagée et plusieurs projets de
décrets tendent à la création de commissions
administratives paritaires et de comités techniques partiaires locaux.
Cette approche doit s'accompagner d'une
adaptation de l'organisation des
administrations centrales comme des services déconcentrés
à leurs nouvelles missions.
Les effectifs des administrations centrales devront ainsi être
réduits au profit des services extérieurs, un objectif de
réduction de 10 % en trois ans des effectifs des administrations
centrales proprement dites ayant été fixé.
Les services déconcentrés seront pour leur part
réorganisés à partir d'une expérimentation mise en
place en 1997 dans quelques départements ; en vue d'une simplification
souhaitable, elle pourrait se traduire par leur regroupement autour de quelques
pôles : un pôle " santé, population et
solidarité ", un pôle " équipement ", un
pôle " agriculture et forêt " et un pôle
" police économique ".
La déconcentration suppose en outre un
renforcement des pouvoirs de
décision et de coordination du préfet
qui doit être
l'interlocuteur naturel des élus locaux et disposer d'une
autorité accrue sur les services déconcentrés.
En effet, -comme l'ont notamment mis en évidence les réflexions
du groupe de travail de la commission des Lois sur la responsabilité
pénale des élus locaux- ceux-ci souhaitent, dans la mesure du
possible, avoir un interlocuteur unique et ce rôle est tout naturellement
celui du préfet. Or, "
l'unité de commandement au sein
des services de l'Etat
" qu'appelle de ses voeux le rapport
établi par M. Pierre-Rémy Houssin sur la simplification de l'Etat
dans ses relations avec les collectivités locales, implique un
renforcement de l'autorité du préfet sur l'ensemble des services
extérieurs de l'administration de l'Etat.
Selon M. Joël Thoraval, président de l'Association du corps
préfectoral et des hauts fonctionnaires du ministère de
l'Intérieur, l'objectif de déconcentration devrait finalement
conduire à déconnecter les départements
ministériels de leurs représentations territoriales en supprimant
les filiations verticales.
M. Jacques Gérault, chef de mission au commissariat à la
réforme de l'Etat, a pour sa part suggéré que les
administrations centrales se limitent à des directives d'objectifs en
laissant une certaine marge de manoeuvre aux préfets.