B. UN PRINCIPE DE SPÉCIALITÉ
Afin d'assurer la pertinence et la crédibilité
de leurs décisions, les institutions chargées de promouvoir la
sécurité sanitaire des biens de santé doivent agir en
fonction de seules préoccupations sanitaires, à l'exclusion
notamment de considérations économiques.
Ainsi, pour le médicament, les procédures d'autorisation de mise
sur le marché, qui doivent obéir à des règles
purement scientifiques, ont été confiées à l'Agence
du médicament tandis que les décisions relatives à
l'admission au remboursement par la sécurité sociale et à
la fixation des prix ont été bien séparées. Elles
sont restées de la compétence de l'administration centrale et
font désormais intervenir le comité économique du
médicament.
Responsable de ses décisions sanitaires, l'Agence du médicament
n'aurait ainsi aucun intérêt à favoriser tel ou tel
médicament en fonction de critères économiques ou
même, plus largement, non sanitaires, même si l'évaluation
d'un médicament doit aussi prendre en considération
l'amélioration du service médical rendu.
Il était d'autant plus important que les critères sanitaires
soient, en quelque sorte, " sanctuarisés " par la
création de l'Agence du médicament que les institutions
chargées, dans les différents pays d'Europe, de l'autorisation de
mise sur le marché des médicaments sont en compétition.
Cette compétition existe non seulement entre les agences ou
autorités de chaque Etat membre, mais aussi entre chacune de ces agences
ou autorités et l'Agence européenne du médicament,
située à Londres. Tant vis-à-vis de ses partenaires
européens que de l'Agence européenne du médicament,
l'Agence française du médicament ne peut donc se permettre que la
crédibilité scientifique de ses décisions soit imparfaite
ou même perçue comme telle.
C. UN PRINCIPE DE SUFFISANCE DES MOYENS FINANCIERS ET HUMAINS
La pauvreté des moyens financiers et humains de
l'administration sanitaire a certainement été à l'origine
de bien des dysfonctionnements que l'on a reprochés au ministère
de la santé alors qu'il n'en était pas vraiment responsable.
Ainsi, les contrôles de produits thérapeutiques ne peuvent
être performants en l'absence de laboratoires modernes, et les
décisions prises ne peuvent être opportunes si les meilleurs
experts ne sont pas appelés à donner leur avis.
Or, avant les réformes entreprises dans les années 1990,
l'administration de la santé ne disposait pas des moyens financiers ou
juridiques pour faire fonctionner des laboratoires suffisamment bien
équipés, ni pour recruter les experts dont les connaissances
auraient été indispensables à la prise de décisions
qui mettent en jeu la sécurité sanitaire.
Le recours au statut d'établissement public a permis aux nouvelles
institutions de disposer de ressources plus importantes, et notamment de
ressources affectées.
Ainsi, l'article L. 567-7 du code de la santé publique dispose que les
ressources de l'Agence du médicament sont constituées, outre des
subventions de l'Etat et de collectivités publiques, des produits de
dons et legs et des emprunts, de diverses redevances et taxes telles que celles
qui sont versées par les industriels qui sollicitent une autorisation de
mise sur le marché ou qui exploitent une spécialité ayant
obtenu cette autorisation.
De même, l'article L. 667-12 dispose que l'Agence française du
sang sera financée, non seulement par une subvention de l'Etat et une
dotation globale de l'assurance maladie, mais aussi par des redevances pour
services rendus.
Enfin, l'article L. 673-8 du code de la santé publique prévoit
qu'outre la subvention de l'Etat et la dotation globale de l'assurance maladie,
des taxes et redevances créées au bénéfice de
l'Etablissement français des greffes viendront alimenter son budget.
Ces affectations de ressources au profit des institutions sanitaires leur
confèrent des moyens qui, s'ils pourraient être encore accrus,
sont tout de même plus importants que ceux dont bénéficiait
l'administration centrale avant les réformes des années 1990.
Les moyens financiers de ces établissements leur permettent, non
seulement de se doter des équipements nécessaires, mais aussi de
s'assurer le concours d'experts, les dispositions des articles L. 567-5, L.
667-8 et L. 673-8 donnant de surcroît aux établissements publics
la base légale nécessaire au recrutement d'agents contractuels.