II. PRESENTATION D'UNE ETUDE SUR " LES RELATIONS EURO-MEDITERRANEENNES DANS LA PERSPECTIVE DU LIBRE ECHANGE REGIONAL "
M. Jean Pisani-Ferry, Directeur du Centre
d'études prospectives et d'informations internationales (CEPII), et
Mme Agnès Chevallier, économiste senior au CEPII, ont
présenté une étude sur les relations
euro-méditerranéennes dans la perspective du libre-échange
régional.
Mme Agnès Chevallier
a tout d'abord rappelé que, avant la
démarche de partenariat euro-méditerranéen
élaboré lors de la Conférence de Barcelone de novembre
1995, les pays du sud bénéficiaient d'accords de
coopération reposant sur une aide financière et sur l'application
d'un système de préférence commerciale. Ces instruments
n'avaient toutefois pas été suffisants pour susciter de
réelles performances économiques puisque l'on constatait, d'une
part, que le revenu moyen par habitant était resté stable depuis
les années 1970 -de l'ordre de 30 % de celui enregistré dans
l'Union européenne- et que, d'autre part, aucune percée des
produits méditerranéens n'avait été
réalisée sur le marché européen. En outre, les
avantages tirés de la préférence commerciale dont
bénéficiaient les pays méditerranéens
s'étaient trouvé peu à peu érodés avec
l'ouverture du marché européen à d'autres pays.
Au début des années quatre-vingt dix, certains
éléments extérieurs ont conduit l'Europe à repenser
ses relations de voisinage avec la zone méditerranéennne,
notamment l'avancée du processus de paix au Proche-Orient et la
réintégration dans l'Europe des pays de l'Europe centrale et
orientale. Lors de la Conférence de Barcelone, l'Union européenne
a donc proposé un nouveau schéma de développement
régional ayant pour objectif la création d'une zone de libre
échange qui se traduira, dans la pratique, par l'ouverture des
marchés du sud aux produits européens, la réciproque
étant déjà acquise par les accords de coopération
précédemment conclus. Avec cette réciprocité de
l'ouverture, qui change la nature des relations
euro-méditerranéennes, le partenariat prend une certaine
réalité.
Mme Agnès Chevallier a souligné que si cette démarche,
proposée par l'Union européenne, avait été
accueillie favorablement, elle avait également suscité des
réactions plus hostiles devant le risque de déséquilibre
des économies locales qu'elle comporte.
En réalité, la réussite de ce projet repose sur la
capacité d'adaptation économique et sociale des pays
méditerranéens, sachant que le processus d'ouverture des
marchés sera lent, très progressif, et précisément
défini dans le cadre des accords d'association conclus ou à
conclure avec chacun des pays méditerranéens.
Le partenariat euro-méditerranéen a donc pour objectif de
susciter des réformes, notamment fiscales, compte tenu de la place
importante qu'occupent jusqu'à présent les droits de douane
à l'importation dans l'ensemble des ressources fiscales des pays
concernés. Il se propose également, en accompagnement de l'aide
financière massive envisagée dans le cadre du programme MEDA
(mesures financières et techniques en faveur des territoires et des pays
tiers méditerranéens), de stimuler les investissements, publics
et privés, et de favoriser les échanges entre pays
méditerranéens eux-mêmes. La démarche du partenariat
est exigeante pour chacune des parties ; elle l'est pour les pays
méditerranéens qui devront ouvrir leurs marchés ;
elle l'est aussi pour l'Europe qui, en engageant ses voisins à aller
plus loin dans l'ouverture et la libéralisation, prend à cet
égard de nouvelles responsabilités.
Enfin, Mme Agnès Chevallier a souligné que si l'ouverture
d'une zone de libre échange n'était pas envisagée par
l'Union européenne comme devant inclure les produits agricoles, cette
exclusion sera difficile à maintenir, sachant que, pour l'heure, seul le
secteur agro-alimentaire pourrait être positif dans les échanges
euro-méditerranéens.
A l'issue de cette présentation,
M. Christian de
La Malène
s'est interrrogé sur le bien-fondé de
la démarche libre échangiste et sur l'avantage que les
économies méditerranéennnes pourraient en attendre en plus
de ceux produits par les précédents accords de
coopération.
M. Jean Pisani-Ferry
a alors fait observer que le partenariat
euro-méditerranéen répondait également à des
préoccupations de sécurité et de contrôle de
l'immigration vers l'Union européenne qui ne pouvaient être
satisfaites que par la réussite du processus de développement des
pays méditerranéens ; il a ajouté qu'il n'existait
pas, à son sens, d'alternative à l'insertion dans
l'économie internationale pour permettre le développement de la
zone méditerranéenne.