2. L'AEC à la croisée des chemins
L' Atomic Energy Corporation pouvait véritablement être qualifiée il y a quelques années de « bras armé » de la puissance sud-africaine en matière nucléaire. Une part très importante de ses activités était en effet à caractère militaire ; une autre part importante consistait à fournir un soutien scientifique et technique à ESKOM, électricien national exploitant la centrale nucléaire de Koeberg (voir ci-dessous). Moins de 10 % des dépenses étaient affectées il y a 10 ans à des activités commerciales autres.
Au tout début des années 90, l'évolution du contexte politique en Afrique du Sud et la décision du Gouvernement d'arrêter toute activité nucléaire militaire ont amené l'AEC à redéfinir profondément ses orientations stratégiques (mise en place du plan AEC 2000).
De 8500 à 2500 personnes, les effectifs ont été divisés par plus de 3 depuis 1990 et les activités ont été réorganisées en trois pôles :
- les activités de recherche « pure » ou de soutien à la recherche : gestion et exploitation de quelques petits réacteurs de recherche, monopole de la production de radio-isotopes ;
- la production de combustible et la R&D correspondante : l'AEC exploite une usine de conversion de 1200 tonnes/an ; elle exploitait jusqu'en avril 1995 une usine d'enrichissement (Z-Plant : 300 000 UTS/an) mettant en oeuvre un procédé de conception locale mais absolument pas compétitif au plan international ; elle exploite toujours une usine de fabrication de combustible de 100 tonnes/an destinée à satisfaire les besoins de Koeberg ; cette usine fait l'objet d'un accord de coopération avec FRAMATOME ; en matière de R&D, l'AEC a abandonné un projet (bien avancé) d'ultra-centrifugation mais continue à travailler sur un procédé d'enrichissement par laser ;
- les activités non nucléaires : regroupées au sein de deux départements spécialisés (développement et production industrielle), elles doivent valoriser les compétences acquises par l'AEC en chimie (composés du fluor), optique (lasers), technologies des membranes (procédés de séparation), métallurgie (traitements de surface, alliages spéciaux...), filtration d'air, systèmes d'acquisition et de mesures, etc. ; depuis 1991 les ventes de ces deux départements ont augmenté de 35 à 45 % l'an, en réponse à la diminution régulière des subventions publiques à l'AEC ; 40 % du budget de l'AEC est aujourd'hui assuré par ces activités commerciales et un objectif de 80 % a été fixé pour l'horizon 1997-98.
Par ailleurs l'AEC a conservé le statut d'autorité réglementaire pour tout ce qui concerne les « sauvegardes » (prévention de la prolifération nucléaire), pour l'ensemble des organismes soumis à une réglementation nucléaire (industriels, mines, recherche, production d'électricité...).
Pour la protection radiologique des travailleurs dans ses activités nucléaires M. KRUGER, directeur de la Sécurité du travail, m'a indiqué que l'AEC applique par anticipation les recommandations de la CIPR 60. Les services en radioprotection sont essentiellement destinés au personnel de l'AEC mais peuvent également être fournis à des clients extérieurs, l'AEC a aussi pour rôle de fournir une assistance en situation d'urgence, en liaison avec les autorités réglementaires (Conseil de Sûreté nucléaire. Ministère de la Santé publique).
Pour la protection de l'environnement, M. SNYDERS, directeur général exécutif des Services techniques, m'a indiqué que l'AEC dispose de très bonnes banques de données sur les bruits de fond radiologiques initiaux (« points zéro »). Les rapports avec les autorités réglementaires sont classiques ; l'AEC doit établir un rapport trimestriel, et des rapports immédiats au cas où les limites seraient dépassées. Des compétences internes significatives ont été développées en matière d'identification des voies d'exposition et de modélisation des transferts de radionucléides. Ces compétences sont mises à la disposition, dans un cadre commercial, des exploitants de mines qui doivent désormais déposer des demandes d'autorisation au titre de la législation sur les installations nucléaires. De façon générale, l'AEC apporte un soutien aux exploitants miniers tout au long de la procédure d'autorisation.
L'AEC fait également profiter ESKOM de ses compétences, pour l'exploitation et la sûreté de la centrale nucléaire de Koeberg.