II. UNE ORGANISATION CENTRALISÉE DU TERRITOIRE CONTRASTANT AVEC L'ISOLEMENT DES ARCHIPELS ET LA PARALYSIE DES COMMUNES
Le développement du territoire s'est jusqu'à présent effectué sur un mode centralisateur, privilégiant les îles de la Société et laissant à l'écart les autres archipels. A défaut d'une politique d'aménagement du territoire, un mouvement à deux vitesses s'est instauré. L'évolution institutionnelle et statutaire n'a fait que conforter cette organisation fortement centralisée : la quasi-absence de dispositions relatives aux communes dans le projet de réforme statutaire en cours d'examen devant le Parlement est une nouvelle illustration de ce constat.
A. UNE ORGANISATION FORTEMENT CENTRALISÉE
La marche vers une plus grande autonomie du territoire s'est effectuée sur un mode centralisateur.
1. Une évolution institutionnelle centrée sur l'organisation territoriale
Les lois statutaires successives applicables à la Polynésie française traitent essentiellement de la délimitation des compétences entre l'Etat et le territoire et de la répartition des pouvoirs entre le gouvernement et l'assemblée, ainsi que de leurs règles de fonctionnement. La diversité géographique et culturelle est largement passée sous silence, de même que l'organisation des communes et les compétences qui leur sont dévolues.
Les archipels peuvent actuellement faire valoir leurs préoccupations Par l'intermédiaire des conseillers territoriaux siégeant à l'assemblée territoriale, composée de quarante et un membres. La loi du 21 octobre 1952 relative à la composition et à la formation de cette assemblée, modifiée par la loi du 18 décembre 1985 a réparti les sièges entre cinq circonscriptions de la façon suivante : 22 pour les Iles du Vent, 8 pour les Iles Sous-le-Vent, 3 pour les Iles Australes, 5 pour les Iles Tuamotu et Gambier et 3 pour les Iles Marquises.
Pour une meilleure représentation des archipels, la loi du 12 juillet 1990, modifiant la loi statutaire du 6 septembre 1984, avait en outre institué, dans chacune des cinq circonscriptions administratives précitées, un conseil d'archipel composé des membres de l'assemblée territoriale et des maires élus de la circonscription. Ces conseils devaient être obligatoirement consultés par le président du Gouvernement du territoire sur les plans de développement et sur les contrats de plan ainsi que sur les dessertes maritimes et aériennes les concernant. Ils pouvaient en outre émettre des avis dans les matières économiques, sociales ou culturelles intéressant l'archipel, en particulier sur la carte scolaire, l'emploi et la formation professionnelle, le développement des langues et des cultures locales.
Leur organisation et leur fonctionnement relevant d'une délibération de l'assemblée territoriale, celle-ci n'a jamais été prise et les conseils d'archipel n'ont donc jamais vu le jour, ce qui a donné l'occasion au tribunal de Papeete, au mois de mai 1994, d'annuler une délibération de l'assemblée territoriale relative aux dessertes maritimes, pour défaut de consultation des conseils d'archipel.
Le projet de réforme statutaire en cours de discussion, qui porte abrogation de la loi du 6 septembre 1984, renonce à la création de ces conseils d'archipel et prévoit en revanche la création, au sein du Conseil économique, social et culturel, d'un cinquième collège constitué de sept membres désignés par les maires, maires-délégués et maires-adjoints.
La plupart des interlocuteurs rencontrés au cours de la mission se sont cependant élevés contre une telle initiative au motif que cette réforme dénaturerait l'institution du Conseil économique, social et culturel en y introduisant une représentation politique. Certains ont en outre observé que la répartition des sièges au sein de l'assemblée territoriale assurait d'ores et déjà une sur-représentation des archipels en considération de leur importance démographique.