2. La diversité des archipels
Chaque archipel de la Polynésie française se caractérise par certaines spécificités : au-delà des différences de nature géographique et climatique, il convient de souligner leur diversité économique et culturelle.
Si la Polynésie française, dans son ensemble, connaît un climat de type tropical océanique, chaud et humide, avec deux saisons principales, une saison sèche et une saison des pluies, ces deux périodes sont inversées entre les Marquises, plus proches de L'Equateur, et les autres archipels, situés dans la zone du Tropique du Capricorne. Les îles Australes, qui bénéficient d'un climat tempéré, sont ainsi productives de légumes, tels que la pomme de terre, insusceptibles d'être cultivés dans les autres archipels.
En dépit de la faible superficie des terres cultivées du fait des reliefs volcaniques (environ 7 % des terres émergées), l'agriculture est une réalité sociale importante : elle occupe moins de 10 % de la population active mais fait vivre quelque 50 000 personnes et représente environ 4,5 % du PIB. Les exploitations, souvent familiales, sont essentiellement des unités de cultures vivrières ou fruitières ou des cocoteraies.
Les exportations de certaines denrées se sont considérablement accrues depuis quelques années, pourvoyeuses de ressources extérieures.
Il s'agit de la vanille, dont la variété « Vanilla tahitensis », très prisée sur le marché mondial, est essentiellement produite aux îles Sous-le - Vent (Raiatea, Tahaa...). Comme le montre l'envolée des prix en 1995, cette production reste insuffisante pour les besoins du marché et cela ouvre des perspectives à l'économie polynésienne. Notons cependant que cette production progresse lentement car la culture de la vanille nécessite un travail manuel important et de longs mois de séchage des gousses impliquant un revenu différé peu compatible avec les habitudes polynésiennes.
L'huile de coprah et le monoï constituent également une production en pleine expansion de l'agriculture polynésienne, dans l'ensemble de la Polynésie française mais plus particulièrement dans l'archipel des Tuamotu où le sol corallien des atolls n'autorise guère d'autres types de culture que le cocotier.
La mise en place d'une appellation d'origine et la création du groupement interprofessionnel du Monoï de Tahiti ont permis une augmentation sensible des exportations. Après avoir bien progressé sur le marché européen, les producteurs de monoï se tournent désormais vers le marché des Etats-Unis.
L'économie des atolls constituant les archipels Tuamotu et Gambier connaît une autre activité en plein essor : la perliculture. Ce secteur a représenté en 1994 un chiffre d'affaires à l'exportation de 11 967 millions de francs CFP (658 millions FF), soit 90 % des exportations du territoire, dont les quatre cinquièmes à destination du Japon. La production de la nacre, la « Pinctada Margaritifera », est également en progression.
La commercialisation des perles noires est assurée par des coopératives et des GIE et la création d'un label est à l'étude. Ce produit phare, exclusivité mondiale puisque seules les eaux polynésiennes semblent adaptées à l'élevage de cette variété d'huître nacrière, constitue une ressource essentielle du territoire.
Autre ressource économique issue de la mer, la pêche, qui ne représente actuellement que 5 % du PIB, est une activité prometteuse dans la perspective du développement de la Polynésie française. Elle tient une place importante dans la culture du polynésien et, si elle a longtemps procédé d'une démarche de type artisanal et familial, on assiste depuis quelques années à une profonde mutation. En effet, à côté de la pêche lagonaire ou proche du récif corallien, se développe une pêche hauturière industrielle qui structure en amont et en aval des activités porteuses, telles que la construction navale ou le conditionnement du poisson pour l'exportation.
Il convient de souligner que le projet de réforme statutaire prévoit de transférer au territoire l'exploration et l'exploitation de la zone économique exclusive (ZEE) qui couvre un espace de 4 800 000 km 2 . Cette zone, dont les potentialités apparaissent importantes, fait l'objet d'études conduites par l'ORSTOM, l'IFREMER et la Commission du Pacifique Sud, afin de mieux connaître les zones de pêche, et, en particulier, d'identifier les ressources en thonidés.
Le développement de la pêche se heurte cependant actuellement à des insuffisances en matière de formation des pêcheurs, d'investissements portuaires (l'accès aux côtes est particulièrement difficile aux îles Marquises non protégées par un lagon) et d'aménagement des circuits de commercialisation.
Le secteur de la pêche constitue un potentiel de développement primordial pour la Polynésie française. Les exigences de qualité et de fraîcheur des produits pour leur exportation vers le Japon et les Etats-Unis impliquent l'aménagement d'infrastructures de communication adaptées : ainsi est-il envisagé depuis plusieurs années de créer un aéroport international aux Marquises, situées actuellement à plus de trois heures et demi de vol de Tahiti.
La spécificité des archipels se manifeste également par les différences culturelles.
Les tahitiens ont conservé leur langue vernaculaire, bien qu'elle ait eu tendance à s'appauvrir, sa pratique ayant été interdite à l'école pendant de nombreuses années.
Mais les langues pratiquées dans les archipels éloignés diffèrent sensiblement du Tahitien.
C'est le cas en particulier aux Marquises, aux Tuamotu et dans l'archipel des Gambier (mangarévien). Ainsi, un habitant des îles Marquises comprend le tahitien tandis qu'un Tahitien ne comprend pas le marquisien. Le séjour aux Marquises et aux Tuamotu a en outre permis de constater que certains élus locaux n'étaient pas capables de s'exprimer en Français : ainsi, dans deux îles (Nuku Hiva et Manihi), la tenue des réunions de travail a nécessité la présence d'un interprète. Les élus des Marquises ont affirmé leur hostilité à une officialisation statutaire de la langue tahitienne et ont souligné avec vigueur leur attachement profond à la France.
Du point de vue religieux, les Eglises exercent une emprise très importante en Polynésie. Depuis 1836, date d'implantation de la mission catholique française, une lutte d'influence s'est engagée avec la mission protestante. Aujourd'hui, 99 % des Polynésiens pratiquent une religion. Le protestantisme reste majoritaire, l'Eglise évangélique réunissant 53 % des Polynésiens, tandis que l'Eglise catholique romaine arrive en seconde position avec 32 %. C'est aux Marquises que la religion catholique est la plus pratiquée, alors que les autres archipels sont essentiellement protestants.