II. UNE RÉFORME IMPROVISÉE DONT LES CONDITIONS D'ACCEPTABILITÉ ET DE MISE EN oeUVRE OPÉRATIONNELLE NE SONT PAS RÉUNIES

A. UNE MESURE SUSCITANT DES POSITIONS TRÈS CONTRASTÉES, CONTESTÉE PAR LES AUTOENTREPRENEURS ET PAR PLUSIEURS SECTEURS D'ACTIVITÉ

1. Une réforme critiquée par les représentants des autoentrepreneurs et de plusieurs secteurs et professions

Le cycle d'auditions organisé en quelques jours a permis de mesurer l'étendue de l'opposition à la réforme de la franchise en base de TVA, telle que résultant de la loi de finances pour 2025.

Si les représentants des autoentrepreneurs ont été les plus mobilisés et se sont fait beaucoup entendre, les critiques exprimées par les autres professions et secteurs concernés ont mis en évidence l'impact significatif et le manque de concertation autour de cette réforme.

2. Une application suspendue par le Gouvernement le jour même de l'adoption au Parlement du projet de loi de finances pour 2025, désormais reportée au 1er juin 2025

Cette vive opposition a été prise en compte par le Gouvernement dès l'adoption de la loi de finances par le Parlement : le 6 février 2025, la suspension de la réforme jusqu'au 1er mars est annoncée, le temps d'organiser une concertation avec les parties prenantes.

Le 28 février, le Gouvernement a acté la fin de la concertation et prorogé la suspension de la mesure jusqu'au 1er juin.

3. Alors que les initiatives parlementaires se sont accélérées, la saisine du Sénat par voie de pétition a permis de faire la lumière sur les enjeux et les lacunes de la réforme

En parallèle de la suspension de la réforme par le Gouvernement, plusieurs initiatives ont été portées par des parlementaires de groupes politiques variés, afin de défendre son abrogation.

Ainsi, quatre propositions de loi ont été déposées en ce sens, par des députés du Parti socialiste, La France insoumise, Droite Républicaine et Horizons & Indépendants.

B. UNE RÉFORME AUJOURD'HUI INAPPLICABLE, TANT PAR LES CONTRIBUABLES QUE PAR L'ADMINISTRATION FISCALE, POUR UN RENDEMENT BUDGÉTAIRE DÉSORMAIS RÉDUIT POUR 2025

1. Des conditions d'application par les contribuables qui demeurent encore entourées de nombreuses incertitudes

La révision des seuils de la franchise en base en cours d'année civile présenterait plusieurs difficultés d'application. Ainsi, l'application du double seuil de franchise (avec la tolérance de 10 %) revêtirait un caractère rétroactif. De même, la prise en compte des opérations facturées avant la date d'entrée en vigueur de la réforme poserait question.

2. Des modalités de mise en oeuvre opérationnelle inabouties

Alors que la solution désormais soutenue par le Gouvernement consisterait à maintenir une distinction des seuils par types d'activités, avec un seuil de droit commun de 37 500 euros et un seuil spécifique de 25 000 euros pour les seuls travaux immobiliers, un tel dispositif nécessiterait encore que l'administration fiscale lève certaines difficultés de mise en oeuvre, notamment en termes de coordination au niveau européen.

3. Un rendement budgétaire pour 2025 réduit par les reports successifs déjà actés par le Gouvernement

À la suite de la suspension de la réforme jusqu'au 1er juin 2025, le rendement total théorique du dispositif est aujourd'hui estimé à environ 400 millions d'euros pour 2025, dont 200 millions d'euros pour le budget de l'État. À supposer que la solution soutenue par le Gouvernement soit adoptée, avec une entrée en vigueur à compter du 1er juillet, le rendement total attendu s'élèverait à environ 150 millions d'euros, dont 75 millions d'euros pour l'État.

Les conditions d'improvisation de cette réforme ne permettent pas sa mise en oeuvre.

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