G. MIEUX RECONNAÎTRE L'ENGAGEMENT DU PERSONNEL DANS LES PROJETS DE COOPÉRATIONS TRANSNATIONALES ET NOTAMMENT LES PROGRAMMES CONJOINTS

1. Appuyer la proposition de recommandation du Conseil relative à des carrières attrayantes et durables dans l'enseignement supérieur80(*)

La proposition de recommandation du Conseil relative à des carrières attrayantes et durables dans l'enseignement supérieur vise à créer un cadre commun au niveau de l'Union pour des carrières attrayantes, inclusives et durables dans l'enseignement supérieur, en encourageant notamment une meilleure reconnaissance de l'engagement du personnel académique et des autres personnels dans des activités de coopération transnationale.

Ce texte présente plusieurs liens avec la recommandation du Conseil de décembre 2023 sur un cadre européen pour attirer et retenir les chercheurs, l'innovation et les entrepreneurs talentueux en Europe (cf. encadré infra).

Recommandation du Conseil du 18 décembre 2023 relative à un cadre européen pour attirer et retenir les talents dans les domaines de la recherche, de l'innovation et de l'entrepreneuriat en Europe

La recommandation reconnaît la nécessité d'avoir une compréhension commune du terme "chercheur" au niveau de l'Union et des activités qu'ils exercent dans différents secteurs ; de sauvegarder la liberté académique et la liberté de recherche ; de s'attaquer aux inégalités persistantes entre les sexes ; de soutenir les chercheurs en début de carrière, des conditions de travail attrayantes et des contrats stables ; d'avoir des systèmes de recrutement et de promotion transparents et fondés sur le mérite ; d'assurer une protection sociale adéquate aux chercheurs ; d'encourager la mobilité et la formation des chercheurs afin qu'ils puissent avoir de meilleures opportunités de carrière ; et d'établir des évaluations de performance qui reconnaissent les divers résultats, activités et pratiques de la recherche avec une estime et une récompense égales pour les différents parcours de carrière.

La recommandation introduit notamment une nouvelle Charte européenne du chercheur. Cette charte consiste en un ensemble de principes qui sous-tendent le développement de carrières de recherche attrayantes dans toute l'Europe. Elle détaille les droits et les responsabilités des chercheurs, des employeurs, des bailleurs de fonds et des décideurs politiques à travers quatre piliers : "Éthique, intégrité, genre et science ouverte" ; "Évaluation, recrutement et progression des chercheurs" ; "Conditions et pratiques de travail" ; et "Carrières de recherche et développement des talents".

Dans cette proposition de recommandation du Conseil, la Commission recommande ainsi aux États membres, dans un dialogue avec les établissements d'enseignement supérieur :

· d'encourager et soutenir l'engagement du personnel dans des activités de coopération transnationale plus approfondies, telles que des programmes de diplômes conjoints ou des offres conjointes d'éducation et de formation débouchant sur des micro-crédits, à tous les niveaux et dans toutes les disciplines, en valorisant ces activités et en les intégrant dans les parcours de carrière et les heures de travail. Par exemple :

- en envisageant d'intégrer les objectifs liés à la coopération transnationale en matière d'éducation dans les parcours professionnels et dans la politique de dotation en personnel aux niveaux national et institutionnel ;

- en prenant en compte le développement d'activités éducatives transnationales communes dans l'évaluation de la carrière universitaire du personnel universitaire ;

- en tenant compte des activités dans le domaine de la coopération transnationale dans la comptabilisation du nombre total d'heures de travail du personnel universitaire ;

· d'élaborer des perspectives de carrière à long terme et des mesures de gestion des talents à l'intention du personnel participant à la coordination et la gestion d'alliances d'établissements d'enseignement supérieur, telles que les alliances d'universités européennes ;

· d'encourager le développement et la promotion de nouvelles possibilités de mobilité européenne et internationale, en proposant aussi des formes alternatives pour ceux qui ne peuvent pas voyager et en tirant parti des instruments existants pour la gestion des carrières et la mobilité de la main-d'oeuvre, tels que la plateforme Europass et les conseillers en mobilité du réseau européen de coopération des services de l'emploi (EURES) ;

· d'encourager la possibilité pour le personnel académique et professionnel de pratiquer l'apprentissage tout au long de la vie, y compris en prenant un congé sabbatique dans le but d'améliorer les compétences nécessaires aux activités éducatives transnationales ;

· de promouvoir, reconnaître et valoriser la diversité des rôles académiques (enseignement, recherche, esprit d'entreprise et innovation, valorisation des connaissances, coopération transnationale, engagement des entreprises et des communautés, développement régional et local, tutorat, administration et gestion, participation à la gouvernance institutionnelle...) ;

· de soutenir l'amélioration de l'enseignement, en soutenant la recherche sur l'enseignement et l'expérimentation de nouvelles méthodes pédagogiques, et en créant des centres d'enseignement et d'apprentissage innovants dans les établissements ;

· d'envisager l'intégration d'indicateurs évaluant le degré d'innovation et la qualité de l'enseignement et de l'apprentissage dans les processus existants d'assurance de la qualité. 

2. Soutenir cet engagement via des dotations spécifiques, ou des politiques de primes

L'implication des enseignants-chercheurs dans les alliances est une clé de leur pérennité, selon les rapporteurs. Elle doit être encouragée par une meilleure prise en compte dans leurs progressions de carrière de cet investissement dans la vie et dans les activités des alliances européennes. Cette meilleure reconnaissance doit concerner tous les personnels, universitaires comme administratifs, comme demandé par les établissements interrogés.

Paroles des établissements français...

« Il faut être conscient que tout développement de l'offre de formation « internationale » demande un fort engagement des équipes pédagogiques (enseignement en anglais la plupart du temps), des responsables pédagogiques, de la scolarité, etc. Sans reconnaissance (décharge, prime, etc.), cela restera très fragile ».

« Il est essentiel d'entretenir une forte motivation et implication des membres de l'alliance en mettant en valeur l'importance et les avantages du projet pour chacun »

Source : Réponses au questionnaire adressé par les rapporteurs aux établissements français, membres des alliances.

Des dispositifs existent actuellement (cf. encadré infra), mais il faut aller plus loin. Comme indiqué par un établissement, « les outils de reconnaissance doivent aller au-delà des décharges horaires pour les uns, et d'éventuelles primes ponctuelles pour les autres, pour soutenir un engagement dans la durée. Sans cela, la transformation profonde et durable de nos établissements grâce aux alliances fera long feu ».

Dispositifs prévus en matière de reconnaissance de l'engagement du personnel

Conformément à la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités qui renforcent leur autonomie, « le conseil d'administration [d'un établissement ayant accédé aux responsabilités et compétences élargies] peut créer des dispositifs d'intéressement permettant d'améliorer la rémunération des personnels. Un dispositif d'intéressement ne peut se substituer aux régimes indemnitaires institués en application d'un texte législatif ou réglementaire. » (art. L954-2 du code de la recherche).

La création d'un régime d'intéressement est facultative. Elle procède de la volonté d'associer les personnels à l'atteinte des objectifs de la politique de l'établissement. Ces objectifs doivent être déclinés de manière concrète et précise. Il peut s'agir d'intéressement individuel ou collectif.

Les systèmes indemnitaires ainsi créés peuvent avoir pour but de reconnaître l'investissement des personnels notamment dans les domaines suivants :

-implication dans une évolution institutionnelle de l'établissement ou dans des projets de service ;

-implication particulière en faveur de la formation et de l'insertion professionnelle des étudiants ;

-gestion d'évènements d'une ampleur particulière (élections, déménagement de service...) ou développement de partenariats extérieurs.

Ils ne peuvent toutefois pas donner lieu à un versement résultant uniquement du simple exercice des missions statutaires de l'agent.

Les régimes d'intéressement peuvent être cumulés avec tout autre régime réglementaire existant et ne doivent en aucun cas se substituer aux régimes indemnitaires prévus. Les régimes d'intéressement n'ont pas non plus pour objet de contourner le plafonnement des régimes indemnitaires existants. Il s'agit de compléter ces régimes indemnitaires en fonction des objectifs de la politique de l'établissement.

Par ailleurs, l'arrêté du 31 juillet 2009 prévoit des décharges horaires pour les enseignants-chercheurs. Ces décharges visent à libérer des enseignants-chercheurs de tout ou partie de leur service d'enseignement, pour leur permettre de se consacrer à une liste d'activités déterminées par le conseil d'administration de chaque établissement. Ces activités sont réparties en trois grandes catégories81(*) : les activités pédagogiques ; l'animation, l'encadrement ou la valorisation de la recherche ; et les autres activités ou activités mixtes.

Source : réponse au questionnaire du ministère

Il pourrait être proposé des mesures d'incitation fortes avec des compensations visibles dans le court terme. Cela pourrait passer par des dotations annuelles aux universités, dédiées au montage et à la gestion des programmes conjoints, ou par une politique de primes aux enseignants ou de bonification des heures d'enseignements dédiées aux programmes conjoints.

Devrait également être mieux reconnue la charge de travail des enseignants pour les formes non traditionnelles de scénarios d'enseignement, comme l'apprentissage en ligne.


* 80 Proposition de recommandation du Conseil relative à des carrières attrayantes et durables dans l'enseignement supérieur (COM (2024) 145 final).

* 81 Cf. https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000020974583/.

Les thèmes associés à ce dossier

Partager cette page