N° 764

SÉNAT

2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 septembre 2024

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le Haut-commissariat au Plan,

Par M. Christopher SZCZUREK,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

L'ESSENTIEL

I. ALORS QUE LES CRISES RÉCENTES ONT MIS EN AVANT LA NÉCESSITÉ DE RENFORCER LA RÉFLEXION PROSPECTIVE ET LA PLANIFICATION, L'ACTION DU HCP EST LIMITÉE PAR L'ÉCLATEMENT DES COMPÉTENCES ET LA DÉCONNEXION AVEC LE LEVIER FINANCIER

A. LA CRÉATION DU HCP EN SEPTEMBRE 2020, APRÈS LE PREMIER PIC DE LA CRISE SANITAIRE, VISAIT À DOTER LES POUVOIRS PUBLICS D'UNE CAPACITÉ DE RÉFLEXION DE LONG TERME AFIN D'ÉCLAIRER LEURS DÉCISIONS LES PLUS STRUCTURANTES

Après le choc de la première vague de l'épidémie de Covid-19 et l'activation de l'état d'urgence sanitaire en mars 2020, l'idée de renouer avec une démarche de réflexion et de planification sur le long terme est apparue nécessaire au sommet de l'État.

En effet, la crise sanitaire a mis en évidence des vulnérabilités majeures : difficultés structurelles dans l'offre de soins ainsi que dans le secteur médico-social ; forte dépendance aux importations en matière de médicaments et produits de santé critiques ; absence de constitution de stocks suffisants pour certains produits essentiels ; perte de compétitivité en termes de recherche et d'innovation dans le domaine de la santé.

Dans ce contexte, la nécessité d'une vision à long terme de la gestion des risques a rapidement été affirmée par l'exécutif, le terme de « planification » étant employé par le Président de la République dans son allocution du 13 avril 2020.

Cette volonté présidentielle donne lieu, quelques mois plus tard, à l'institution d'un Haut-commissaire au Plan (HCP), par le décret du 1er septembre 2020, et à la nomination de François Bayrou, par le décret du 3 septembre 2020. La dénomination de cette nouvelle instance et les termes mêmes de sa mission font expressément référence à la démarche du Commissariat général au Plan (CGP), créé en 1946 par le Général de Gaulle avec à sa tête Jean Monnet, remplacé en 2006 par le Conseil d'analyse stratégique (devenu depuis France Stratégie).

B. EN DÉPIT D'UNE MISSION TRÈS ÉTENDUE EN THÉORIE, L'ACTION DU HCP EST SIGNIFICATIVEMENT LIMITÉE PAR LA MULTIPLICITÉ DES ORGANES ADMINISTRATIFS EXISTANTS AINSI QUE PAR LA DÉCONNEXION ENTRE LA RÉFLEXION STRATÉGIQUE ET LE LEVIER FINANCIER

En vertu de son décret institutif, le HCP est chargé d'une mission très étendue, consistant à « animer et coordonner les travaux de planification et de réflexion prospective conduits pour le compte de l'État » et à « éclairer les choix des pouvoirs publics au regard des enjeux démographiques, économiques, sociaux, environnementaux, sanitaires, technologiques et culturels ».

Pourtant, en dépit de cette formulation qui confère au HCP un rôle central dans le domaine de la planification et de la réflexion prospective publique, cette mission est largement partagée avec d'autres organes administratifs, au risque d'un éclatement des compétences et des moyens.

Ainsi, le HCP se voit concurrencé par d'autres institutions, dont plusieurs préexistaient largement à la création de celui-ci, aux statuts très divers, notamment :

le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, ou « France Stratégie », mis en place sous sa forme actuelle en 2013 et lointain successeur historique du Commissariat général au Plan ;

le Conseil d'analyse économique (CAE), institué en 1997 ;

le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), créé en 2022 ;

le Secrétariat général pour l'investissement (SGPI), introduit en 2010 pour assumer la responsabilité des programmes d'investissements d'avenir (PIA) et, depuis 2021, celle du plan France 2030.

En outre, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) et, pour le Parlement, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) et la Délégation sénatoriale à la prospective produisent également des analyses dans des champs de compétences proches.

Dans certains cas, la concurrence peut même se muer en contournement pur et simple : ainsi, le choix d'avoir confié, postérieurement à la création du HCP, une compétence en matière de planification énergétique et environnementale au SGPE, interroge sur une forme de dépossession du HCP d'une partie de ses missions.

Plus fondamentalement, le Haut-commissariat n'exerce pas en réalité de fonction de planification et de pilotage opérationnel. Ainsi, à la différence du Commissariat général au Plan, le HCP ne dispose d'aucun levier financier. Le HCP n'a été associé ni à l'élaboration, ni à l'évaluation du plan France 2030 de 54 milliards d'euros, dont la mise en oeuvre et le suivi ont été confiés au SGPI.

II. SI LA GESTION ADMINISTRATIVE ET FINANCIÈRE DU HCP NE PRÉSENTE PAS DE DIFFICULTÉ PARTICULIÈRE, SON ORGANISATION ET SON STATUT ATYPIQUES N'OFFRENT PAS LES MEILLEURES GARANTIES POUR L'ACCOMPLISSEMENT DE SES MISSIONS

A. LES MOYENS BUDGÉTAIRES ET HUMAINS DU HCP, TRÈS RÉDUITS, ONT CONNU UNE AUGMENTATION NOTABLE LIÉE AU SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DU CONSEIL NATIONAL DE LA REFONDATION (CNR)

La gestion de la dotation budgétaire et des ressources humaines du HCP est assurée par la direction des services administratifs et financiers du Premier ministre (DSAF) et s'inscrit dans un cadre commun aux autres organes interministériels, au sein du programme budgétaire « Coordination du travail gouvernemental » (programme 129 de la mission « Direction de l'action du Gouvernement).

Avec un budget de 1,9 million d'euros en 2023 et en 2024, pour 14 équivalents temps plein travaillés (ETPT) en 2023, le HCP dispose de ressources modestes par rapport aux autres organismes intervenant dans le domaine de la prospective et de la planification au sens large, qui s'expliquent par son rôle d'animation et de coordination. À titre de comparaison, France Stratégie comptait 135 ETP à fin 2023 et bénéficiait d'une dotation budgétaire de 23,1 millions d'euros pour 2024.

Il convient de noter que le Haut-Commissaire au Plan a choisi d'exercer ses fonctions à titre bénévole et a souhaité que cela soit mentionné dans son décret de nomination. Il ne perçoit aucune rémunération ou indemnité es qualité.

Dotation budgétaire du HCP depuis sa création

(en euros)

 

2020

2021

2022

2023

2024

 

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

Prévision

Dépenses de fonctionnement

82 350

77 208

226 000

99 359

226 000

164 152

500 000

220 296

511 500

Dépenses de personnel

 

171 051

 

1 191 054

 

1 247 549

 

1 708 521

1 363 094

HCP

 

160 271

 

926 988

 

855 246

 

937 286

1 027 625

HCP soutien

 

10 780

 

264 066

 

290 941

 

369 700

335 468

Secrétariat général du CNR

         

101 363

 

401 536

 

TOTAL

 

248 259

226 000

1 290 413

226 000

1 411 701

500 000

1 928 817

1 874 594

Note : les personnels de soutien sont partagés avec l'autre service occupant le siège du HCP à Paris, soit le Secrétariat général de la présidence française de l'Union européenne (SGPFUE) jusqu'en 2022, puis le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE).

Source : réponses de la DSAF au questionnaire du rapporteur spécial

Alors que l'augmentation des moyens du HCP entre 2022 et 2023 répondait à sa nouvelle responsabilité de secrétariat général du Conseil national de la refondation (CNR) depuis septembre 2022, les emplois du CNR ne relèvent plus aujourd'hui du HCP mais de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP). Ce changement de rattachement s'est traduit par le transfert de 3 ETPT, effectif depuis le 1er février 2024.

B. L'ORGANISATION ET LE STATUT SPÉCIFIQUES DU HCP, MARQUÉS PAR UNE FORTE PERSONNALISATION DE LA FONCTION, APPARAISSENT PEU COMPATIBLES AVEC SES MISSIONS DE PROSPECTIVE ET DE PLANIFICATION

Justifiant la spécificité de son statut, le HCP revendique un portage plus puissant que celui que pourrait assurer des profils administratifs classiques, tels que le Commissaire général de France Stratégie ou le Secrétaire général à la planification écologique.

Cependant, les responsabilités politiques importantes que le Haut-commissaire continue d'assumer, en parallèle de son mandat, interrogent fortement.

Au-delà de la question des responsabilités politiques, cette dimension personnelle se retrouve dans l'organisation et le fonctionnement du HCP, à plusieurs titres.

Concernant plus particulièrement l'existence d'une antenne locale, celle-ci ne présente pas de difficulté de principe ou d'enjeu budgétaire particulier. D'ailleurs, la réflexion prospective et la planification publiques ne sauraient être cantonnées à la capitale. Pour autant, le choix précis de cette implantation, située à Pau, s'explique par un motif de convenance personnelle pour le Haut-commissaire, qui ne manque pas d'interroger.

III. UNE CONTRIBUTION DU HCP AUX POLITIQUES PUBLIQUES TRÈS MITIGÉE QUI APPELLE À UNE RATIONALISATION ET À UNE ORGANISATION CLARIFIÉE DES ORGANES DE PROSPECTIVE ET DE PLANIFICATION

A. DES CHOIX DE SUJETS QUI PEUVENT ÉTONNER, UNE RÉFLEXION PROSPECTIVE DONT L'HORIZON TEMPOREL DEMEURE CENTRÉ SUR LE MOYEN TERME, UNE PLANIFICATION QUI RESTE GÉNÉRALEMENT EMBRYONNAIRE

Depuis sa création en septembre 2020, le HCP a publié 18 études en propre, appelées « notes stratégiques ». À ces travaux s'ajoutent un rapport corédigé avec un think tank et deux rapports rédigés par des tiers sur commande, l'un par une mission d'appui conjointe de l'Inspection générale des affaires sociales et du Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies, l'autre par le Conservatoire national des arts et métiers.

1,9 M€

13,71 ETPT

18

 

Budget du HCP en 2023 (montant exécuté) et en 2024 (montant prévu).

Effectif du HCP en 2023.

Nombre de notes stratégiques publiées en propre par le HCP depuis sa création en 2020.

Dans leur immense majorité, les notes stratégiques produites par le HCP ne se distinguent pas des travaux d'autres organes administratifs chargés de missions d'expertise et de conseil auprès des décideurs publics, tels que les inspections, les administrations parlementaires ou encore France Stratégie. Pour une partie, ces notes peuvent même apparaître beaucoup moins précises et approfondies.

À ce jour, la contribution du HCP à la définition des politiques publiques n'a pas pleinement répondu aux attentes importantes qui avaient été placées dans cet organe à sa création.

Un tel travail ne saurait à l'évidence correspondre à une mission ambitieuse de prospective et de planification visant à influer sur les choix de politiques publiques, confiée à un service constitué de plus d'une dizaine d'agents de haut niveau.

Par ailleurs, il convient de relever plusieurs lacunes importantes :

l'absence de publication sur les enjeux du numérique, alors même que la lettre de mission adressée par le Président de la République mentionnait expressément cette thématique ;

un intérêt limité pour les problématiques spécifiques à la jeunesse (notamment en matière d'éducation et de précarité), par contraste avec le traitement réservé aux enjeux du vieillissement ;

- pour certaines notes (correspondant plutôt aux premières publications du HCP), un défaut dans la démarche de planification se traduisant par des recommandations peu opérationnelles, ne présentant pas de valeur ajoutée pour la prise de décision publique.

B. UNE RATIONALISATION NÉCESSAIRE DES ADMINISTRATIONS CHARGÉES DE PROSPECTIVE ET DE PLANIFICATION, QUI DOIT S'ACCOMPAGNER DE GARANTIES RENFORCÉES EN MATIÈRE D'INDÉPENDANCE ET D'EXPERTISE

Face aux risques de redondance et d'éclatement des moyens et des compétences, une rationalisation résolue des missions confiées au HCP, à France Stratégie et au Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) apparaît nécessaire.

Constatant qu'en pratique la mission assumée par le HCP relève davantage de la prospective que de la planification, même indicative, le rapporteur spécial préconise ainsi de distinguer :

- d'une part, la responsabilité de la réflexion prospective, qui serait réservée au HCP ;

- d'autre part, celle de la planification des ressources physiques et financières, qui serait assumée par le SGPE (celui-ci ayant déjà réalisé un travail très conséquent concernant les ressources physiques) ;

- enfin, celle de l'évaluation des politiques publiques, dévolue à France Stratégie.

Dans ce cadre, et afin de traduire cette répartition des compétences clarifiée, le HCP serait renommé en « Haut-commissariat à la Prospective ».

Aussi, et afin de donner une plus-value accrue aux travaux du Haut-commissariat par rapport à ceux plus classiques conduits par les autres administrations, la démarche prospective du HCP pourrait se déployer sur un horizon de plus long terme et explorer des scénarios radicaux, suivant le modèle de l'initiative « Red Team » développée par l'Agence de l'Innovation de Défense (AID), associant auteurs de science-fiction, universitaires et professionnels (militaires pour l'AID).

Par ailleurs, un renforcement des garanties en matière d'indépendance, d'expertise et de redevabilité pourrait passer par des mesures telles que :

- la mise en place d'une procédure d'avis consultatif préalable pour les décisions relatives à la programmation des travaux du HCP, sous la forme de la réunion annuelle d'un collège restreint de personnalités qualifiées dans les domaines scientifique, technologique, économique, sociologique et géopolitique ;

- la fixation d'un terme de six ans, renouvelables, pour la durée du mandat de Haut-commissaire et son inamovibilité ;

- la remise d'un rapport annuel d'activité.

LISTE DES RECOMMANDATIONS

Recommandation n° 1 : Rapprocher la réflexion prospective et le pilotage des investissements publics stratégiques (HCP, France Stratégie, SGPE, SGPI).

Recommandation n° 2 : Concevoir un outil de cartographie dynamique des tendances technologiques mondiales et du positionnement de la recherche française par rapport à la frontière technologique (HCP, France Stratégie, SGPI).

Recommandation n° 3 : Pour tirer les conséquences du transfert des emplois du CNR à la direction interministérielle de la transformation publique, ajuster à la baisse le plafond d'emplois et la dotation budgétaire relative aux dépenses de fonctionnement du HCP (direction du budget, DSAF).

Recommandation n° 4 : Rationaliser et clarifier la répartition des compétences entre les instances rattachées au Premier ministre dans les domaines de la prospective et de la planification, en confiant expressément la responsabilité de la réflexion prospective au HCP, celle de la planification des ressources physiques et financières au SGPE et celle de l'évaluation à France Stratégie. Renommer le HCP en Haut-commissariat à la Prospective (HCP, SGPE, France Stratégie, Gouvernement).

Recommandation n° 5 : Inscrire systématiquement les travaux du HCP dans un horizon de réflexion minimal de 30 ans et s'inspirer, pour l'élaboration des scénarios prospectifs, du modèle de l'initiative « Red Team » conçue par l'Agence de l'Innovation de Défense (HCP).

Recommandation n° 6 : Structurer davantage la programmation des travaux du HCP en soumettant les décisions du Haut-commissaire à l'avis consultatif préalable d'un collège restreint, réuni annuellement, composé de personnalités qualifiées dans les domaines scientifique, technologique, économique, sociologique et géopolitique (HCP, Gouvernement).

Recommandation n° 7 : Fixer à six ans, renouvelables, la durée du mandat de Haut-commissaire et prévoir son inamovibilité (Gouvernement).

Recommandation n° 8 : Prévoir la remise au Parlement d'un rapport annuel d'activité du HCP (Gouvernement).

Recommandation n° 9 : Rationaliser les implantations immobilières du HCP, du SGPE et de France Stratégie (DSAF).

I. ALORS QUE LES CRISES RÉCENTES ONT MIS EN AVANT LA NÉCESSITÉ DE RENFORCER LA RÉFLEXION PROSPECTIVE ET LA PLANIFICATION, L'ACTION DU HCP EST LIMITÉE PAR L'ÉCLATEMENT DES COMPÉTENCES ET LA DÉCONNEXION AVEC LE LEVIER FINANCIER

A. LA CRÉATION DU HCP EN SEPTEMBRE 2020, APRÈS LE PREMIER PIC DE LA CRISE SANITAIRE, VISAIT À DOTER LES POUVOIRS PUBLICS D'UNE CAPACITÉ DE RÉFLEXION DE LONG TERME AFIN D'ÉCLAIRER LEURS DÉCISIONS LES PLUS STRUCTURANTES

1. La crise liée à l'épidémie de Covid-19 a révélé l'ampleur des risques et des défis actuels pour le modèle économique et social français

Après le choc de la première vague de l'épidémie de Covid-19 et l'activation de l'état d'urgence sanitaire en mars 20201(*), à travers un confinement imposé sur l'ensemble du territoire national2(*), l'idée de renouer avec une démarche de réflexion et de planification sur le long terme est apparue nécessaire au sommet de l'État.

En effet, la crise sanitaire a mis en évidence des vulnérabilités majeures pour l'économie et plus généralement pour la société française3(*), notamment :

- des difficultés structurelles dans l'offre de soins, qui a manqué d'être submergée par la vague pandémique, ainsi que dans le secteur médico-social ;

- une forte dépendance aux importations en matière de médicaments et produits de santé critiques, résultant du mouvement de désindustrialisation et de délocalisation des décennies précédentes ;

l'absence de constitution de stocks suffisants pour certains produits essentiels4(*), à l'image des masques de protection5(*) ;

- une perte de compétitivité en termes de recherche et d'innovation, dans le domaine de la santé, ce qui s'est en particulier traduit par l'incapacité des acteurs pharmaceutiques français à développer un vaccin à ARN messager contre le Covid-19 dans des délais suffisamment rapides6(*).

Cet ensemble de vulnérabilités a ainsi contraint le gouvernement à adopter, dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, des mesures de restriction sanitaires particulièrement drastiques et dérogatoires au regard des droits et libertés publiques : liberté d'aller et venir, liberté de réunion, liberté de culte ou encore liberté d'entreprendre, nombreuses ont été les libertés qui ont été affectées par les restrictions de police sanitaire.

De fait, la période récente a été marquée par deux périodes d'état d'urgence : l'état d'urgence sanitaire a en effet fait suite à un premier état d'urgence sécuritaire, activé entre novembre 2015 et novembre 2017, en réaction à la menace terroriste.

Cette succession d'états d'exception, face à des menaces présentant un caractère structurel et non simplement conjoncturel (le risque pandémique d'une part, le risque terroriste d'autre part), a ainsi posé avec acuité la question des capacités d'anticipation des pouvoirs publics.

Comme le notait le vice-président du Conseil d'État, Bruno Lasserre, « un État qui protège est un État qui doit se donner les moyens d'anticiper et d'agir de manière conséquente même lorsque les menaces ne sont pas immédiates »7(*).

C'est ainsi que la nécessité d'une vision à long terme de la gestion des risques a rapidement été affirmée au sommet de l'État. Le terme de « planification » est ainsi employé par le Président de la République, Emmanuel Macron, dans son allocution du 13 avril 2020, appelant à l'élaboration d'une « stratégie où nous retrouverons le temps long, la possibilité de planifier, la sobriété carbone, la prévention, la résilience qui seules peuvent permettre de faire face aux crises à venir »8(*).

Cette volonté présidentielle donne lieu, quelques mois plus tard, à l'institution d'un Haut-commissaire au Plan (HCP), par le décret du 1er septembre 20209(*), et à la nomination de François Bayrou, par le décret du 3 septembre 202010(*).

2. La création du HCP s'inscrit dans l'optique de renouer avec la démarche du Commissariat général au Plan institué au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dans un contexte politique et économique cependant très différent

Dans la lettre de mission qu'il adresse à François Bayrou, le 21 septembre 2020, le Président de la République, Emmanuel Macron, affirme que « la prise en compte du long terme est pour notre temps une impérieuse obligation »11(*), allusion à la fameuse formule du Général de Gaulle qui avait qualifié la planification d'« ardente obligation » en 1961.

De fait, la référence à la démarche du Commissariat général au Plan, créé en 1946 par le Général de Gaulle avec à sa tête Jean Monnet, remplacé en 2006 par le Conseil d'analyse stratégique (devenu depuis France Stratégie)12(*), est clairement assumée.

Caractéristiques de la démarche du Commissariat général au Plan (CGP)

La démarche planificatrice, telle que mise en oeuvre par les premiers plans du CGP, se distinguait par la conjonction dans un seul et même exercice des dimensions suivantes :

- la projection dans un horizon temporel d'une demi-douzaine d'années ;

- l'adoption d'une vision globale touchant à la totalité de l'action publique et à l'ensemble des enjeux sociaux, visant à la prise en compte de diverses externalités ;

- l'organisation d'une large concertation d'experts et de parties prenantes dans une perspective d'intérêt général ;

le déploiement de ressources publiques importantes et coordonnées, autour de priorités définies ;

- la coordination étroite, dans sa mise en oeuvre, de nombreux acteurs publics et privés.

Source : commission des finances du Sénat, d'après France Stratégie, « La planification : idée d'hier ou piste pour demain ? », point de vue, juin 2020

Certes, la lettre de mission relève que « la planification au sens chiffré, impératif, fixant des objectifs domaine par domaine de la production nationale, qui était la règle lorsque le Commissariat général au Plan a été créé après la Libération de notre pays, n'est plus adaptée à notre temps ».

En effet, si les objectifs en matière d'équipement et de modernisation de la production nationale fixés par les trois premiers plans (1947-1953, 1954-1957, 1957-1961) ont, dans l'ensemble, été atteints voire dépassés, la portée des plans suivants, couvrant un domaine plus large et intervenant dans une période où leur exécution dépend davantage de la situation internationale, est progressivement devenue plus « indicative »13(*).

Comme le relèvent les économistes Sandra Moatti et Xavier Timbeau, « le plan quinquennal, comme vision globale du développement économique et social, a disparu dans les années 1990, rendu inopérant par la libéralisation et l'ouverture économique, la construction européenne, la décentralisation (...) L'État n'a pas perdu pour autant toute ambition de se projeter à moyen terme, mais celle-ci s'est diffractée en une multitude de démarches sectorielles, comme les lois de programmation ou quelques grands programmes ».14(*)

Cependant, les termes mêmes de la mission confiée au Haut-commissaire au Plan, s'inscrivent bien dans un objectif d'orientation prospective des politiques publiques, analogue à celui poursuivi par le Commissariat général au Plan.

Selon la lettre de mission, le Haut-commissaire est ainsi chargé d'« éclairer les choix collectifs que la Nation aura à prendre pour maintenir ou reconstruire sa souveraineté et une autonomie européenne face à l'impact des évolutions démographiques, à la grande transition écologique et aux bouleversements du numérique et de la recomposition des chaînes de valeur mondiales ».

B. EN DÉPIT D'UNE MISSION TRÈS ÉTENDUE EN THÉORIE, L'ACTION DU HCP EST SIGNIFICATIVEMENT LIMITÉE PAR LA MULTIPLICITÉ DES ORGANES ADMINISTRATIFS EXISTANTS AINSI QUE PAR LA DÉCONNEXION ENTRE LA RÉFLEXION STRATÉGIQUE ET LE LEVIER FINANCIER

1. Une mission très large, mais concurrencée voire contournée par une multiplicité d'organes de planification et de réflexion prospective

Aux termes du décret du 1er septembre 2020, le HCP est chargé d'une mission très étendue, consistant à « animer et coordonner les travaux de planification et de réflexion prospective conduits pour le compte de l'État ».

Compétence du HCP aux termes de l'article 1er du décret du 1er septembre 2020

« Il est institué un haut-commissaire au plan, chargé d'animer et de coordonner les travaux de planification et de réflexion prospective conduits pour le compte de l'État et d'éclairer les choix des pouvoirs publics au regard des enjeux démographiques, économiques, sociaux, environnementaux, sanitaires, technologiques et culturels. »

Source : Décret n° 2020-1101 du 1er septembre 2020 instituant un Haut-commissaire au Plan

Fort de cette compétence en théorie très vaste, le Haut-commissaire a évoqué pour son programme d'action, présenté dans son discours au Conseil économique, social et environnemental (CESE) le 22 septembre 202015(*), trois grandes thématiques ou « horizons » stratégiques, qui recouvrent de fait l'ensemble des politiques publiques :

le premier horizon réunit les questions touchant à « la vitalité » de la France au sens large : le rapport avec le vivant, l'environnement, la préservation ou le rétablissement de l'équilibre climatique, la planète ; la dynamique propre de la population française ; l'économie, la recherche, l'innovation, la « place des créateurs d'entreprise et des développeurs d'entreprise » ; les questions d'identité ; la vitalité de la démocratie et de l'action publique ; les outre-mer ;

le deuxième horizon est celui de « l'indépendance » : les productions vitales ; la question agricole ; la dette publique ; l'alerte face aux grands risques ;

le troisième horizon correspond au « projet de société fondé sur la justice », avec la question des inégalités : l'éducation ; la santé ; les questions de la dépendance et de l'accompagnement des personnes âgées ; l'aménagement du territoire ; la politique d'aide au développement ; la justice.

Pourtant, en dépit de la formulation du décret qui confère au HCP un rôle central dans le domaine de la planification et de la réflexion prospective publique, cette mission est largement partagée avec d'autres organes administratifs, au risque d'un éclatement des compétences et des moyens.

Ainsi, le HCP se voit concurrencé par d'autres institutions, dont plusieurs préexistaient largement à la création de celui-ci, aux statuts très divers, notamment :

le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, ou « France Stratégie », mis en place sous sa forme actuelle en avril 201316(*) et lointain successeur historique du Commissariat général au Plan ;

le Conseil d'analyse économique (CAE), institué en juillet 199717(*) et placé auprès du Premier ministre ;

le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), créé en juillet 202218(*) ;

le Secrétariat général pour l'investissement (SGPI), introduit en janvier 201019(*) pour assumer la responsabilité des programmes d'investissements d'avenir (PIA) et, depuis 2021, celle du plan France 2030.

En outre, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) et, pour le Parlement, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) et la Délégation sénatoriale à la prospective produisent également des analyses dans des champs de compétences proches.

Dans certains cas, la concurrence peut même se muer en contournement pur et simple : ainsi, le choix d'avoir confié, postérieurement à la création du HCP, une compétence en matière de planification énergétique et environnementale au SGPE, interroge sur une forme de dépossession du HCP d'une partie de ses missions.

2. Une action restreinte par l'absence de pouvoirs propres et de levier financier : le rendez-vous manqué avec le plan France 2030

Plus fondamentalement, et comme le relève le Conseil d'État dans son étude annuelle consacrée à la souveraineté, le Haut-commissariat au Plan n'exerce pas en réalité de fonction de planification et de pilotage opérationnel20(*).

Ainsi, à la différence du Commissariat général au Plan institué en 1946 par le Gouvernement du Général de Gaulle et qui se veut le modèle historique du HCP, celui-ci ne dispose d'aucun levier financier.

Or, comme le notait en 2020 l'économiste Jean Pisani-Ferry, ancien commissaire général de France Stratégie, « si c'est pour faire de la prospective, il n'est pas nécessaire de créer une nouvelle institution. En revanche, ce qui n'existe plus, c'est un organisme qui combine prospective et concertation avec un outil de programmation publique et un outil financier, comme le faisait le Plan » avec les fonds du plan Marshall21(*).

Ainsi, le HCP n'a pas été associé de manière étroite à l'élaboration du plan France 2030, annoncé en octobre 2021 par le Président de la République et doté de 54 milliards d'euros (30 milliards d'euros initialement), dont la mise en oeuvre et le suivi ont été confiés au SGPI.

Alors que le HCP avait défendu en février 2021 un « plan Marshall » de l'ordre de 200 milliards d'euros (4 % du PIB) pour prendre la suite du plan de relance post-crise sanitaire22(*), cette proposition n'a pas été transcrite dans le montant finalement retenu par l'Élysée, en raison selon la presse de l'opposition des services du ministère de l'économie et des finances23(*).

Or, comme France Stratégie le relevait en 2020 à propos du programme des investissements d'avenir (PIA), précurseur du plan France 2030, « par sa dimension transversale, ses priorités stratégiques et son pilotage par un commissaire placé auprès du Premier ministre, ce « grand plan d'investissement » est sans doute ce qui de nos jours se rapproche le plus de la logique de l'ancien « Plan » »24(*).

Objectifs et leviers du plan France 2030, groupés par thèmes

(en milliards d'euros)

Note 1 : les périmètres bleus et rouges correspondent respectivement aux objectifs et leviers.

Note 2 : les montants étant des fléchages indicatifs de crédits, la somme des montants excède 54 milliards d'euros.

Source : Comité de surveillance des investissements d'avenir, à partir de données du SGPI

De même, le HCP n'est pas représenté au comité de surveillance des investissements d'avenir, en charge de l'évaluation du plan France 2030, dont le premier rapport a été publié en juin 202325(*). Plus étonnant encore, le HCP n'a pas été auditionné par ce comité, en dépit du grand nombre d'auditions conduites par celui-ci (lequel a, à l'inverse, rencontré France Stratégie et le SGPE).

Sur une évaluation de plus de 260 pages, les travaux du HCP sont cités à seulement deux reprises, à propos de la note sur le commerce extérieur26(*).

De surcroît, le rapport du comité de surveillance souligne un « flou sur les caps stratégiques dans plusieurs champs d'action publique, rendant difficile d'identifier précisément la contribution et la place des investissements portés par France 2030 », notamment en matière numérique, industrielle, d'innovation en santé ou encore agricole, alors même que le HCP a publié plusieurs notes sur ces sujets (qui ne sont tout simplement pas mentionnées).

Pour la suite du déploiement du plan France 2030, le comité de surveillance recommande de confier au SGPI (et non au HCP, dont la mission initiale devait pourtant consister, aux termes du décret du 1er septembre 2020, à « animer et coordonner les travaux de planification ») une mission de connaissance et d'anticipation au service des investissements stratégiques, en lien avec les ministères, afin de redéfinir les objectifs visés par le plan et les moyens alloués. Dans le cadre de cette recommandation, le HCP aurait uniquement vocation à intervenir en soutien du SGPI, aux côtés du SGPE et de France Stratégie27(*).

Interrogé par le rapporteur spécial, le SGPI a confirmé qu'aucun échange n'avait eu lieu entre ses services et le HCP, aussi bien pour l'élaboration du plan France 2030 que pour son suivi et son évaluation28(*). Seule une rencontre est intervenue en 2023 pour identifier d'éventuelles convergences dans les feuilles de route respectives des deux structures, sans aboutir à date à un travail commun.

Comme Jean Pisani-Ferry le relevait dès 202129(*), le Haut-commissaire « ne cherche pas à faire du Plan le chef d'orchestre ou l'architecte des politiques publiques [par la mobilisation d'instruments financiers, réglementaires, budgétaires ou fiscaux] mais (...) il se voit davantage dans une fonction de vigie, d'alerte, de mise en débat », reposant sur une forme de « soft power », à travers sa capacité de conviction politique.

Afin de remédier à ce que l'on peut qualifier de « rendez-vous manqué » entre le Haut-commissariat et le plan France 2030, le rapporteur spécial recommande de développer activement une coopération étroite entre, d'une part, les instances chargées de réflexion prospective et de planification au sens large, en premier lieu le HCP, et, d'autre part, le Secrétariat général pour l'investissement, responsable du pilotage des investissements publics stratégiques.

Recommandation n° 1 : Rapprocher la réflexion prospective et le pilotage des investissements publics stratégiques (HCP, France Stratégie, SGPE, SGPI).

Dans ce cadre, et pour reprendre une proposition formulée par le SGPI dans sa contribution écrite en réponse aux questions du rapporteur, il pourrait être opportun de confier au HCP, en lien avec France Stratégie, la mission de concevoir un outil de cartographie des tendances technologiques mondiales permettant d'identifier le positionnement de la recherche française par rapport à la frontière technologique. En effet, un tel outil serait particulièrement pertinent pour orienter les choix d'investissements du plan France 2030.

Recommandation n° 2 : Concevoir un outil de cartographie dynamique des tendances technologiques mondiales et du positionnement de la recherche française par rapport à la frontière technologique (HCP, France Stratégie, SGPI).

II. SI LA GESTION ADMINISTRATIVE ET FINANCIÈRE DU HCP NE PRÉSENTE PAS DE DIFFICULTÉ PARTICULIÈRE, SON ORGANISATION ET SON STATUT ATYPIQUES N'OFFRENT PAS LES MEILLEURES GARANTIES POUR L'ACCOMPLISSEMENT DE SES MISSIONS

A. LES MOYENS BUDGÉTAIRES ET HUMAINS DU HCP, TRÈS RÉDUITS, ONT CONNU UNE AUGMENTATION NOTABLE LIÉE AU SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DU CONSEIL NATIONAL DE LA REFONDATION (CNR)

1. La gestion de la dotation budgétaire et des ressources humaines du HCP, assurée par la direction des services administratifs et financiers du Premier ministre (DSAF), s'inscrit dans un cadre commun aux autres organes interministériels

La dotation de fonctionnement du HCP est intégrée, comme celles de l'ensemble des services soutenus par le Premier ministre, aux crédits de l'action 10 « Soutien » du programme 129 « Coordination du travail gouvernemental » de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».

Quant aux dépenses de personnel du HCP, celles-ci sont intégrées à la sous-action 1 « Cabinet du Premier ministre et ministres rattachés » de l'action 1 « Coordination du travail gouvernemental » du programme 129. À l'instar des dépenses de fonctionnement, elles font l'objet d'un suivi régulier30(*).

2. Avec un budget de 1,9 million d'euros en 2023 et en 2024, le HCP dispose de ressources modestes en comparaison des autres services de prospective et de planification, qui s'expliquent par son rôle d'animation et de coordination

Dotation budgétaire du HCP depuis sa création

(en euros)

 

2020

2021

2022

2023

2024

 

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

Prévision

Dépenses de fonctionnement

82 350

77 208

226 000

99 359

226 000

164 152

500 000

220 296

511 500

Dépenses de personnel

 

171 051

 

1 191 054

 

1 247 549

 

1 708 521

1 363 094

HCP

 

160 271

 

926 988

 

855 246

 

937 286

1 027 625

HCP soutien

 

10 780

 

264 066

 

290 941

 

369 700

335 468

Secrétariat général du CNR

         

101 363

 

401 536

 

TOTAL

 

248 259

226 000

1 290 413

226 000

1 411 701

500 000

1 928 817

1 874 594

Note : les personnels de soutien sont partagés avec l'autre service occupant le siège du HCP à Paris, soit le Secrétariat général de la présidence française de l'Union européenne (SGPFUE) jusqu'en 2022, puis le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE).

Source : réponses de la DSAF au questionnaire du rapporteur spécial

Lors de la création du HCP en 2020, les services du Premier ministre ont décidé de lui octroyer une dotation annuelle de 226 000 euros pour ses dépenses de fonctionnement (crédits hors dépenses de personnel). Cette enveloppe avait été proratisée en 2020 en lien avec la date de nomination du HCP intervenue début septembre. Cette dotation a été doublée en loi de finances initiale pour 2023, pour être portée à 500 000 euros afin de tenir compte de l'évolution des effectifs du HCP et de la prise en charge du secrétariat du Conseil national de la refondation (CNR) et de ses déclinaisons en format plénier.

Il est à noter que les frais de déplacements entre Paris et Pau de François Bayrou ne sont pas pris en charge par le budget du Haut-commissariat. En outre, ni son véhicule, ni son conducteur ne sont pris en charge par l'administration.

S'agissant de la masse salariale, l'évolution des dépenses de personnel depuis 2020, qui représente l'essentiel des dépenses du HCP, est liée à la montée en puissance progressive du Haut-commissariat et à la prise en charge, à compter de 2022, du CNR. Les dépenses relevées en 2024 au titre de l'activité du CNR correspondent à la rémunération du mois de janvier, antérieure à la prise en charge des agents du CNR par la DITP (effective depuis le mois de février 2024).

De fait, avec un budget de 1,9 million d'euros en 2023 et en 2024, pour 14 équivalents temps plein travaillés (ETPT) en 2023, le HCP dispose de ressources modestes par rapport aux autres organismes intervenant dans le domaine de la prospective et de la planification au sens large, qui s'expliquent par son rôle d'animation et de coordination. À titre de comparaison, France Stratégie comptait 135 ETP à fin 2023 et bénéficiait d'une dotation budgétaire de 23,1 millions d'euros pour 202431(*).

Il convient de relever que le Haut-Commissaire au Plan a choisi d'exercer ses fonctions à titre bénévole et a souhaité que cela soit mentionné dans son décret de nomination. Il ne perçoit aucune rémunération ou indemnité es qualité.

Par ailleurs, les personnels de soutien sont partagés avec l'autre service occupant l'Hôtel de Beistegui, soit le Secrétariat général de la présidence française de l'Union européenne (SGPFUE) jusqu'en 2022, puis le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE).

Plafonds d'emplois du HCP depuis sa création

(en équivalents temps plein travaillés, ETPT)

Typologie des emplois

2021

2022

2023

2024

ETPT

 %

ETPT

 %

ETPT

 %

ETPT

 %

Emplois sous plafond

14,0

87,5

14,0

87,5

24,0

88,9

21,0

91,3

dont HCP

8,0

8,0

13,0

15,0

dont HCP soutien

6,0

6,0

6,0

6,0

dont CNR

   

-

5,0

   

Collaborateurs extérieurs

2,0

12,5

2,0

12,5

3,0

11,1

2,0

8,7

dont HCP

2,0

2,0

2,0

2,0

dont HCP soutien

-

-

-

-

dont CNR

   

-

1,0

   

TOTAL

16,0

 

16,0

 

27,0

 

23,0

 

Note : les personnels de soutien sont partagés avec l'autre service occupant le siège du HCP à Paris, soit le Secrétariat général de la présidence française de l'Union européenne (SGPFUE) jusqu'en 2022, puis le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE).

Source : réponses de la DSAF au questionnaire du rapporteur spécial

Effectifs du HCP depuis sa création, par catégorie et par statut

(en équivalents temps plein travaillés, ETPT)

Typologie des emplois

2021

2022

2023

ETPT

 %

ETPT

 %

ETPT

 %

Effectif total

7,83

 

8,72

 

13,71

 

Catégorie A+

5,69

73 %

5,31

61 %

5,70

42 %

Catégorie A

1,60

20 %

1,99

23 %

5,01

37 %

Catégorie B

0,54

7 %

1,42

16 %

3,00

22 %

Catégorie C

-

0 %

-

0 %

-

0 %

Fonctionnaires

0,60

8 %

0,65

7 %

0,65

5 %

CDI

-

0 %

-

0 %

-

0 %

CDD

7,23

92 %

8,07

93 %

13,06

95 %

TOTAL

7,83

100 %

8,72

100 %

13,71

100 %

Note : les emplois en CDD comprennent des fonctionnaires détachés par d'autres administrations auprès du HCP.

Source : réponses de la DSAF au questionnaire du rapporteur spécial

En 2023, avec près de 14 équivalents temps pleins travaillés, le HCP comptait notamment :

- une secrétaire générale ;

- une cheffe de cabinet (à temps partiel - 70 %) ;

- un rapporteur général ;

- une équipe de sept rapporteurs, composée de deux conseillers (dont une mise à disposition à 65 %) et de cinq chargés de mission ;

- un chargé de communication.

Il convient de noter qu'au début de l'année 2024, la secrétaire générale a quitté le Haut-commissariat, conduisant à son remplacement par le rapporteur général lui-même, en cumulant actuellement les deux fonctions.

Le HCP bénéficie également de l'appui de trois conseillers-experts :

- un ingénieur retraité, spécialisé dans les questions énergétiques ;

- un professeur des universités en géographie, spécialisé dans les questions d'aménagement du territoire ;

- un enseignant-chercheur, spécialisé dans les questions sociales et politiques.

Ces trois conseillers-experts bénéficient du statut des collaborateurs extérieurs prévu par l'article 8 du décret du 22 avril 2013 portant création du commissariat général à la stratégie et à la prospective. Ils perçoivent une indemnité au titre de cette activité. Les deux premiers bénéficient d'un bureau à l'antenne de Pau, le troisième est rattaché à l'équipe parisienne.

Par ailleurs, le HCP recourt aux services de l'intendance partagée avec le SGPE, installé dans les mêmes locaux (Hôtel de Beistegui, Paris 7ème). Cette intendance est dotée de cinq équivalents temps plein travaillés (ETPT).

Enfin, les emplois du CNR ne relèvent plus en 2024 du HCP mais de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP). Ce changement de rattachement s'est traduit par le transfert en gestion de 3 ETPT présents au 1er janvier 2024. Par ailleurs, le CNR a bénéficié de l'appui d'un collaborateur extérieur.

3. Les moyens du Haut-commissariat ont bénéficié d'un quasi-doublement dans le cadre du secrétariat général du CNR, dont le coût pour le HCP devrait cependant diminuer à partir de 2024 avec le transfert des dépenses de personnel correspondantes à la DITP

À compter de septembre 2022, le HCP s'est vu confier la responsabilité du secrétariat général du Conseil national de la refondation (CNR). Cette nouvelle mission s'est traduite par une augmentation significative des moyens humains et budgétaires du Haut-commissariat.

Comme le note la DSAF, la prise en charge des dépenses de personnel du CNR par la DITP est effective depuis le 1er février 2024. Ainsi, celles-ci ne relèvent plus depuis cette date du HCP.

À la suite de ce transfert, le rapporteur spécial recommande, dans une logique de rigueur budgétaire, de geler les créations nettes d'emplois au sein du HCP. Dans le même esprit de rigueur budgétaire, le rapporteur préconise une rationalisation des dépenses de fonctionnement du HCP.

Recommandation n° 3 : Pour tirer les conséquences du transfert des emplois du CNR à la direction interministérielle de la transformation publique, ajuster à la baisse le plafond d'emplois et la dotation budgétaire relative aux dépenses de fonctionnement du HCP (direction du budget, DSAF).

B. L'ORGANISATION ET LE STATUT SPÉCIFIQUES DU HCP, MARQUÉS PAR UNE FORTE PERSONNALISATION DE LA FONCTION, APPARAISSENT PEU COMPATIBLES AVEC SES MISSIONS DE PROSPECTIVE ET DE PLANIFICATION

1. Si la nomination à sa tête d'un responsable politique de premier plan a pu accroître la visibilité du Haut-commissariat, cette équation personnelle pèse dans l'organisation et la programmation des travaux du HCP

Justifiant sa spécificité dans le paysage institutionnel français, le Haut-commissaire revendique, pour sa mission de prospective et de planification, un portage politique plus puissant que celui que pourrait assurer des profils administratifs classiques, tels que le Commissaire général de France Stratégie ou le Secrétaire général à la planification écologique.

Cette spécificité lui est ainsi reconnue par France Stratégie, qui considère que les approches des deux structures sont « différentes et complémentaires », soulignant que « le HCP est dirigé par un homme politique de premier plan, ce qui lui donne un impact médiatique propre »32(*).

Cependant, les responsabilités politiques importantes que le Haut-commissaire continue d'assumer, en parallèle de son mandat, interrogent fortement :

- celui-ci exerce la présidence du parti du Mouvement Démocrate (MoDem) ;

- il continue également d'exercer le mandat de maire de la ville de Pau ;

- enfin, il était présent (certes à titre symbolique) sur la liste Renaissance aux élections européennes de juin 2024.

Au-delà de la question des responsabilités politiques, cette dimension personnelle se retrouve dans l'organisation et le fonctionnement du HCP, à plusieurs titres :

la cheffe de cabinet du Haut-commissaire exerce un emploi à temps partiel, partagé avec le MoDem (par lequel elle est donc également rémunérée) ;

- une conseillère est aussi adjointe au maire de la ville de Pau ;

- le Haut-commissariat compte, en plus de son siège à Paris, une antenne située à Pau, dans un local mis à disposition par la Préfecture des Pyrénées-Atlantiques (voir infra) ;

la programmation des travaux du HCP, soit le choix des sujets traités et des angles d'étude pour les notes stratégiques, est à l'entière discrétion du Haut-commissaire.

2. Un cumul de fonctions très atypique qui brouille la réception des travaux du HCP

De fait, la confusion des rôles entretenue par le Haut-commissaire apparaît problématique pour une instance visant une certaine distance vis-à-vis des considérations de court terme.

Ainsi, le positionnement et le statut particuliers du HCP suscitent des critiques récurrentes, à l'image de celles exprimées lors du débat organisé au Sénat le 10 avril 2024 sur le thème « Haut-commissariat au Plan : quel bilan et quelle influence sur les politiques publiques depuis 2020 ? »33(*).

À cet égard, le rapporteur spécial partage partiellement l'analyse soutenue par le Haut-commissaire : en effet, la réflexion prospective et la planification publiques ne doivent pas être réservées à des experts de l'administration et revêtent une forte dimension politique, s'agissant de choix engageant le devenir de la société.

Pour autant, le rapporteur considère que, si un responsable de premier plan doit être chargé d'une telle mission, seule une garantie forte d'indépendance et de disponibilité de la part de la personne exerçant le mandat de Haut-commissaire peut assurer la crédibilité des travaux du HCP. À ce titre, le cumul du mandat de Haut-commissaire avec d'autres fonctions, notamment politiques, interroge fortement.

3. Une implantation locale intéressante dans son principe et au coût très faible, mais dont le choix précis relève essentiellement d'un motif de convenance personnelle

En plus de son siège parisien (Hôtel de Beistegui, Paris 7ème), le HCP dispose également d'une antenne au sein de la Préfecture de Pau où il occupe une surface de bureau de 40 mètres carrés.

L'existence d'une antenne locale, loin de soulever une difficulté de principe, présente un intérêt certain en matière de planification, en permettant la confrontation des analyses menées par l'administration à la réalité du terrain. En ce sens, le choix d'une ville de taille moyenne pour une telle implantation, ici la ville de Pau, apparaît plutôt représentatif.

En effet, le rapporteur spécial partage la conviction selon laquelle la réflexion prospective et la planification publiques ne sauraient être cantonnées à la capitale.

De même, l'antenne de Pau ne soulève pas d'enjeu budgétaire particulier. En effet, le Haut-commissaire et la direction des services administratifs et financiers du Premier ministre (DSAF) ont veillé à limiter au maximum les coûts associés à cette implantation, qu'il s'agisse de l'occupation des locaux (remboursement forfaitaire des charges mensuelles à la Préfecture des Pyrénées-Atlantiques, pour 280 euros par mois) ou d'éventuels trajets des agents du HCP en provenance ou à destination du siège de Paris.

Dépenses de fonctionnement du HCP au titre de l'antenne de Pau

(en euros)

 

2021

2022

2023

Occupation des locaux
(forfait de 280 euros/mois)

3 080

3 360

3 360

Frais de déplacements

3 020

519

1 141

Total

6 100

3 879

4 501

Source : réponses de la DSAF au questionnaire du rapporteur spécial

Néanmoins, le choix précis de cette implantation locale s'explique par un motif de convenance personnelle pour le Haut-commissaire, celui-ci ayant continué d'exercer le mandat de maire de la ville de Pau. Aussi, ce choix pour convenance personnelle ne manque pas d'interroger.

Le rapporteur spécial constate que le budget et les effectifs réduits du HCP représentent des enjeux limités au regard de l'ensemble des moyens alloués aux services rattachés au Premier ministre. Pour autant, la forte personnalisation du mandat de Haut-commissaire se traduit par une organisation et un fonctionnement très atypiques qui brouillent à l'évidence la réception de ses travaux.

III. UNE CONTRIBUTION DU HCP AUX POLITIQUES PUBLIQUES TRÈS MITIGÉE QUI APPELLE À UNE RATIONALISATION ET À UNE ORGANISATION CLARIFIÉE DES ORGANES DE PROSPECTIVE ET DE PLANIFICATION

A. DES CHOIX DE SUJETS QUI PEUVENT ÉTONNER, UNE RÉFLEXION PROSPECTIVE DONT L'HORIZON TEMPOREL DEMEURE CENTRÉ SUR LE MOYEN TERME, UNE PLANIFICATION QUI RESTE GÉNÉRALEMENT EMBRYONNAIRE

1. Une vingtaine d'études réalisées en quatre ans de fonctionnement

Depuis sa création en septembre 2020, le HCP a publié 18 études en propre, appelées « notes stratégiques ».

À ces travaux s'ajoutent un rapport corédigé par le HCP et le think tank Matières Grises, « Quand les babyboomers auront 85 ans » (janvier 2023), et deux rapports rédigés sur sa commande, l'un par la mission d'appui IGAS/CGEIET, « Les vulnérabilités d'approvisionnement en produits de santé » (décembre 2021), l'autre par le Conservatoire national des arts et métiers, « Dynamique économique et réindustrialisation durables des territoires » (janvier 2022).

Liste des travaux publiés en propre par le HCP depuis sa création

Et si la Covid durait ? (octobre 2020)

Produits vitaux et secteurs stratégiques : comment garantir notre indépendance ? (décembre 2020)

Face à la dette Covid, une stratégie de reconquête (février 2021)

Électricité : le devoir de lucidité (mars 2021)

Démographie : la clé pour préserver notre modèle social (mai 2021)

L'agriculture : enjeu de reconquête (juillet 2021)

La France est-elle une grande puissance agricole et alimentaire ? (juillet 2021)

Les agriculteurs (juillet 2021)

Consommation et pratiques alimentaires de demain : quelle incidence sur notre agriculture ? (octobre 2021)

Reconquête de l'appareil productif : la bataille du commerce extérieur (décembre 2021)

Médicaments : identifier nos vulnérabilités pour garantir notre indépendance (février 2022)

Responsabilité climatique - La géothermie de surface : une arme puissante (octobre 2022)

Retraites : une base objective pour le débat civique (décembre 2022)

Vieillissement de la société française : réalité et conséquences (février 2023)

La bataille du commerce extérieur - Données 2022 (mai 2023)

La grande transformation du travail : crise de la reconnaissance et du sens du travail (octobre 2023)

Le développement de l'aquaculture : un enjeu de souveraineté alimentaire (novembre 2023)

La prise en charge des troubles psychiques et psychologiques (juin 2024)

Source : site internet du HCP

Dans leur immense majorité, les notes stratégiques produites par le HCP ne se distinguent pas des travaux d'autres organes administratifs chargés de missions d'expertise et de conseil auprès des décideurs publics, tels que les inspections, les administrations parlementaires ou encore France Stratégie. Pour une partie (et en exceptant les toutes premières publications, pour lesquelles le format n'était pas encore abouti), ces notes peuvent même apparaître beaucoup moins précises et approfondies34(*).

Or, si le rapporteur spécial admet que des synthèses rédigées de manière accessible à un large public puissent certainement être utiles à la diffusion des études du HCP, un tel travail ne saurait à l'évidence correspondre à une mission ambitieuse de prospective et de planification visant à influer sur les choix de politiques publiques, confiée à un service constitué de plus d'une dizaine d'agents de haut niveau.

À cet égard, une inflexion, qui demande à être poursuivie, peut être relevée : en effet, les publications récentes (depuis la fin de l'année 2023) révèlent des analyses et recommandations plus développées et plus précises, sur des sujets moins traités par ailleurs, présentant ainsi une plus grande valeur ajoutée par rapport aux travaux des autres administrations, qu'il s'agisse de la note sur l'aquaculture35(*) ou de celle sur la santé mentale36(*).

Pour autant, il convient de relever plusieurs lacunes importantes dans les travaux du HCP (voir 2., 3. et 4. infra).

2. Une impasse : l'absence de publications sur les enjeux du numérique en quatre ans de travaux

Alors que la lettre de mission adressée par le Président de la République mentionne expressément les « bouleversements du numérique » parmi les grands défis à traiter par le Haut-commissaire37(*), cette thématique n'a fait l'objet d'aucune étude spécifique depuis la création du HCP.

Même si certains aspects tels que l'économie des plateformes ont pu être abordés dans le cadre de la note stratégique sur le travail38(*), l'absence de publications couvrant les différentes dimensions des enjeux soulevés par l'évolution des technologies du numérique apparaît peu compréhensible.

Interrogés sur ce point par le rapporteur spécial, les services du HCP ont indiqué dans leurs réponses écrites qu'une étude portant sur la souveraineté numérique était en cours. Cette étude viserait à « proposer une stratégie qui intègre (...), en les inscrivant dans une cohérence d'ensemble, les différents programmes actuellement conduits relatifs notamment au stockage des données, à l'intelligence artificielle, au développement des technologies quantiques »39(*).

3. Un impensé majeur : une jeunesse laissée en plan ?

De la même manière que pour le numérique, les publications du HCP ont, jusqu'à présent, fait peu de cas des problématiques spécifiques à la jeunesse, notamment en matière d'éducation et de précarité.

Ainsi, aucune note stratégique ne porte réellement sur ces questions. Concernant la note sur la démographie40(*), celle-ci aborde certes le sujet du renouvellement des générations, mais à travers le prisme quantitatif de la natalité. De même, dans la note sur les retraites41(*), la jeunesse est envisagée sous le seul angle de l'équité financière entre les générations. Enfin, la note récente sur la santé mentale porte incidemment sur les troubles psychiques et psychologiques affectant les jeunes42(*).

Cette situation contraste avec le traitement réservé par le HCP aux enjeux du vieillissement, lesquels ont donné lieu à une note en propre et à une note corédigée avec le think tank Matières Grises.

4. Un Plan sans planification véritable : le risque de la « think-tankisation »

En l'absence de démarche de planification conséquente, plusieurs travaux du Haut-commissariat tombent dans l'écueil des recommandations ou des voeux peu opérationnels, ne présentant pas de valeur ajoutée pour la prise de décision publique.

Ainsi, la note sur les produits vitaux43(*) comporte comme recommandation « le retour à l'esprit d'industrie dans le monde économique », formule particulièrement vague, et renvoie à des travaux futurs sur différents secteurs.

De même, la note sur l'agriculture44(*) présente à titre de recommandation : « c'est désormais à la société de se tenir aux côtés des agriculteurs dans les mutations profondes et les défis qui sont devant eux ».

Heureusement, de tels cas demeurent limités et correspondent plutôt aux premières notes publiées par le HCP.

B. UNE RATIONALISATION NÉCESSAIRE DES ADMINISTRATIONS CHARGÉES DE PROSPECTIVE ET DE PLANIFICATION, QUI DOIT S'ACCOMPAGNER DE GARANTIES RENFORCÉES EN MATIÈRE D'INDÉPENDANCE ET D'EXPERTISE

1. Une meilleure articulation des missions dévolues aux différents organes rattachés au Premier ministre

Face aux risques de redondance et d'éclatement des moyens et des compétences (voir supra), une rationalisation résolue des missions confiées au HCP, à France Stratégie et au Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) apparaît nécessaire.

Constatant qu'en pratique la mission assumée par le HCP relève davantage de la prospective que de la planification, même indicative, le rapporteur spécial préconise ainsi de distinguer :

- d'une part, la responsabilité de la réflexion prospective, qui serait réservée au HCP ;

- d'autre part, celle de la planification des ressources physiques et financières, qui serait assumée par le SGPE (celui-ci ayant déjà réalisé un travail très conséquent concernant les ressources physiques) ;

- enfin, celle de l'évaluation des politiques publiques, dévolue à France Stratégie.

Dans ce cadre, et afin de traduire cette répartition des compétences clarifiée, le HCP serait renommé en « Haut-commissariat à la Prospective »45(*).

Cette mesure vise ainsi à mieux responsabiliser chaque service en le recentrant sur son coeur de mission et à éviter tout doublon.

Recommandation n° 4 : Rationaliser et clarifier la répartition des compétences entre les instances rattachées au Premier ministre dans les domaines de la prospective et de la planification, en confiant expressément la responsabilité de la réflexion prospective au HCP, celle de la planification des ressources physiques et financières au SGPE et celle de l'évaluation à France Stratégie. Renommer le HCP en Haut-commissariat à la Prospective (HCP, SGPE, France Stratégie, Gouvernement).

Par ailleurs, afin de donner une plus-value accrue aux travaux du Haut-commissariat par rapport à ceux plus classiques conduits par les autres administrations, la démarche prospective du HCP pourrait se déployer sur un horizon de plus long terme et explorer des scénarios radicaux46(*), suivant le modèle de l'initiative « Red Team » développée par l'Agence de l'Innovation de Défense (AID)47(*).

Cette initiative récente48(*), mise en oeuvre depuis 2020, se distingue d'approches prospectives plus classiques en ce qu'elle fait appel à un groupe d'auteurs de science-fiction afin d'imaginer des scénarios particulièrement audacieux (mais plausibles).

Réunis dans une « Red Team » (« équipe rouge »), ces auteurs peuvent s'appuyer sur les connaissances scientifiques d'une « Purple Team » (« équipe violette ») constituée d'universitaires travaillant dans des domaines variés, de l'intelligence artificielle à la philosophie en passant par la biologie. Une troisième équipe, la « Blue Team » (« équipe bleue »), composée d'une trentaine de militaires, dialogue avec les auteurs, en fournissant des informations, voire en les emmenant sur des lieux secrets, des sites de test de matériel ou d'entraînement. Celle-ci choisit également la thématique générale des travaux, après discussion avec la « Red Team ».

Recommandation n° 5 : Inscrire systématiquement les travaux du HCP dans un horizon de réflexion minimal de 30 ans et s'inspirer, pour l'élaboration des scénarios prospectifs, du modèle de l'initiative « Red Team » conçue par l'Agence de l'Innovation de Défense (HCP).

2. Un renforcement des garanties en matière d'indépendance, d'expertise et de redevabilité

Comme l'indique le rapport d'activité du HCP49(*), le Haut-commissaire est, en l'état actuel de son statut, « libre du choix de ses sujets ». À ce titre, il « fixe la feuille de route et l'angle d'attaque choisi chaque semestre ».

Afin d'assurer une rigueur et une cohérence accrues dans la programmation des travaux du HCP, le rapporteur spécial recommande de prévoir une procédure qui, tout en restant très souple, permette de recueillir l'avis préalable d'un collège restreint de personnalités qualifiées, réuni sur une base annuelle.

Recommandation n° 6 : Structurer davantage la programmation des travaux du HCP en soumettant les décisions du Haut-commissaire à l'avis consultatif préalable d'un collège restreint, réuni annuellement, composé de personnalités qualifiées dans les domaines scientifique, technologique, économique, sociologique et géopolitique (HCP, Gouvernement).

De même, le renforcement des garanties relatives à la durée du mandat de Haut-commissaire apparaît opportun.

Le rapporteur spécial préconise ainsi, d'une part, d'instituer un terme au mandat de Haut-commissaire, aujourd'hui théoriquement illimité (aucune durée n'ayant été précisée dans le décret de création du HCP ou dans le décret de nomination de M. François Bayrou), et, d'autre part, de prévoir l'inamovibilité du Haut-commissaire, afin de garantir son indépendance dans l'exercice de ses fonctions.

Recommandation n° 7 : Fixer à six ans, renouvelables, la durée du mandat de Haut-commissaire et prévoir son inamovibilité (Gouvernement).

Enfin, afin d'assurer une meilleure prise en compte des travaux du HCP par les pouvoirs publics et plus particulièrement par le Parlement, le rapporteur spécial préconise la remise à celui-ci d'un rapport annuel d'activité.

Cette mesure, classique pour ce type d'instance, viserait ainsi à consolider la pratique initiée par le Haut-commissariat par la publication en février 2024 d'un premier rapport d'activité couvrant la période d'octobre 2022 à décembre 2023.

Recommandation n° 8 : Prévoir la remise au Parlement d'un rapport annuel d'activité du HCP (Gouvernement).

3. Une rationalisation à inscrire dans le cadre de l'optimisation de la gestion du patrimoine immobilier des services du Premier ministre

Conformément à la recommandation émise par le rapport pour avis de la commission des lois du Sénat sur la mission « Direction de l'action du Gouvernement » dans le cadre du projet de loi de finances pour 202450(*), il convient de soutenir la poursuite des efforts de mutualisation immobilière des services et autorités rattachés au Premier ministre.

Or, dans le cadre de sa mission de contrôle, le rapporteur spécial a pu relever qu'un projet de cession avait été envisagé pour l'Hôtel de Beistegui, avant d'être abandonné en 2020 au profit de sa mise à disposition pour accueillir le HCP, conjointement avec le Secrétariat général de la présidence française de l'Union européenne (SGPFUE), auquel a succédé le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) depuis 2022.

Aussi, le rapporteur note que des marges pourraient exister en matière d'occupation de surface immobilière par agent et qu'une rationalisation à cet égard devrait être recherchée.

Recommandation n° 9 : Rationaliser les implantations immobilières du HCP, du SGPE et de France Stratégie (DSAF).

En conclusion, le rapporteur spécial estime qu'à ce jour, la contribution du HCP à la définition des politiques publiques n'a pas pleinement répondu aux attentes importantes qui avaient été placées dans cet organe à sa création. Qu'il s'agisse du choix des sujets traités, de l'horizon temporel visé ou de la méthode d'analyse mobilisée, les travaux du HCP ne se distinguent pas significativement de ceux conduits par d'autres services et institutions. Aussi la référence au Plan apparaît-elle trompeuse : les publications du Haut-commissariat s'inscrivent pour l'essentiel dans une démarche de réflexion prospective d'ambition modérée, sans planification véritable. De fait, les ressources restreintes du HCP ne sont pas calibrées pour une mission de planification.

De surcroît, le rapporteur spécial voit un risque de dépossession du pouvoir politique par la multiplication des travaux d'instances telles que le HCP ou encore le SGPE. Le Haut-commissaire actuel peut également être conduit à assumer un rôle de prescription, et non de simple proposition, compte tenu des responsabilités politiques qu'il exerce par ailleurs. Cette situation brouille le rôle du HCP et nuit à sa reconnaissance au sein des instances de prospective et de stratégie publiques.

Dans ces conditions, il convient d'engager une rationalisation des actions conduites par les services rattachés au Premier ministre dans les domaines de la prospective et de la planification. Si un tel effort requiert d'abord une répartition des compétences clarifiée entre le HCP, le SGPE et France Stratégie, il importe plus fondamentalement de structurer davantage le fonctionnement du Haut-commissariat, afin de garantir le plus haut niveau d'indépendance et d'expertise et renforcer ainsi la prise en compte de ses travaux par les pouvoirs publics.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 18 septembre 2024 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a entendu une communication de M. Christopher Szczurek, rapporteur spécial, sur le Haut-commissariat au Plan.

M. Claude Raynal, président. - Nous allons entendre une communication de M. Christopher Szczurek, rapporteur spécial de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », sur le Haut-commissariat au Plan.

M. Christopher Szczurek, rapporteur spécial. - En tant que rapporteur spécial de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », j'ai choisi, pour ma première année au sein de la commission des finances du Sénat, de mener un contrôle budgétaire sur une institution relativement récente, le Haut-commissariat au Plan (HCP).

Créée en septembre 2020 et confiée depuis cette date à M. François Bayrou, cette instance a été chargée d'une mission très étendue en matière de prospective et de planification. Cependant, son action suscite des critiques récurrentes ; en témoigne le débat organisé au Sénat le 10 avril dernier, sur le thème : « Haut-commissariat au Plan : quel bilan et quelle influence sur les politiques publiques depuis 2020 ? ». Par ailleurs, des questions sont régulièrement posées à ce sujet lors de l'examen du projet de loi de finances.

Aussi, le rapport que je vous présente aujourd'hui vise à faire le point sur les questions soulevées par l'organisation, le fonctionnement et les travaux de cette institution spécifique.

Je commencerai par un rappel du contexte de création et du champ de la mission confiée au HCP en septembre 2020. La mise en place de cette nouvelle instance résulte de la volonté affichée de l'exécutif de renouer avec une démarche de réflexion et de planification sur le long terme, après le choc de la première vague de l'épidémie de covid-19 au printemps 2020.

En effet, la crise sanitaire a mis en évidence des vulnérabilités majeures pour notre pays, en particulier une forte dépendance aux importations et l'absence de stocks suffisants pour certains produits de santé essentiels, à l'image des masques de protection.

Dans ce contexte, la nécessité d'une vision à long terme de la gestion des risques a rapidement été affirmée par l'exécutif. C'est ainsi que, dans son allocution du 13 avril 2020, le Président de la République appelait à l'élaboration d'une « stratégie où nous retrouverons le temps long, la possibilité de planifier » afin de pouvoir « faire face aux crises à venir ».

Instituée par un décret du 1er septembre 2020, la fonction de Haut-commissaire au Plan est confiée, par décret du 3 septembre 2020, à M. François Bayrou. Le HCP est chargé d'une mission très étendue en théorie, consistant à « animer et coordonner les travaux de planification et de réflexion prospective conduits pour le compte de l'État ».

De fait, la dénomination de cette nouvelle instance et les termes mêmes de sa mission font expressément référence à la démarche du Commissariat général au Plan (CGP), créé en 1946 par le Général de Gaulle, tombé en désuétude et privé de son importance au fur et à mesure, avant d'être remplacé en 2006 par le Conseil d'analyse stratégique, devenu depuis France Stratégie.

Cependant, l'action du HCP est dès l'origine significativement limitée par la multiplicité des organes administratifs intervenant dans le domaine de la prospective et de la planification, dont plusieurs préexistaient largement à la création de celui-ci : France Stratégie, le Conseil d'analyse économique (CAE), le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), le Secrétariat général pour l'investissement (SGPI)...

Plus fondamentalement, et contrairement à sa dénomination, le Haut-commissariat n'exerce pas de fonction réelle de planification et de pilotage opérationnel. Ainsi, à la différence de l'ancien Commissariat général au Plan, le HCP ne dispose d'aucun levier financier et son action ne peut donc pas se traduire en la définition, par exemple, de grands plans quinquennaux, comme le plan Monnet, plan d'investissement qui trouva une partie de ses fonds dans le plan Marshall.

C'est ainsi que le Haut-commissariat n'a contribué ni à l'élaboration ni à l'évaluation du plan France 2030, doté de 54 milliards d'euros, dont la mise en oeuvre et le suivi ont été confiés au SGPI. Or, comme France Stratégie le relevait à propos du programme des investissements d'avenir (PIA), précurseur du plan France 2030, ce grand plan d'investissement est sans doute ce qui, de nos jours, se rapproche le plus de la logique de l'ancien Plan. On peut donc évoquer à ce propos une forme de « rendez-vous manqué » entre le HCP et le plan France 2030.

Je voudrais à présent aborder plus précisément les modalités d'organisation et de fonctionnement du Haut-commissariat.

Avec un budget de 1,9 million d'euros en 2023 et en 2024, pour 14 équivalents temps plein travaillés (ETPT) en 2023, le HCP dispose de ressources modestes par rapport aux autres organismes intervenant dans le domaine de la prospective et de la planification au sens large, ce qui s'explique par son rôle d'animation et de coordination.

Les moyens du HCP sont ainsi dix fois inférieurs à ceux de France Stratégie, qui comptait 135 ETP fin 2023 et bénéficiait d'une dotation budgétaire de 23,1 millions d'euros pour 2024.

Il convient également de noter que le Haut-commissaire a choisi d'exercer ses fonctions à titre bénévole, souhaitant que cela soit mentionné dans son décret de nomination. Il ne perçoit donc à ce titre aucune rémunération ou indemnité.

Les moyens du HCP ont connu une augmentation notable entre 2022 et 2023, passant de 1,4 million à 1,9 million d'euros en crédits exécutés. Cette évolution s'explique par la nouvelle responsabilité de secrétariat général du Conseil national de la refondation (CNR) qui a été confiée au HCP en septembre 2022. Cependant, depuis le mois de février dernier, les emplois du secrétariat général du CNR relèvent non plus du HCP, mais de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP), avec le transfert de 3 ETPT.

Si la gestion de la dotation budgétaire et des ressources humaines du HCP, assurée par la direction des services administratifs et financiers du Premier ministre (DSAF), ne présente pas de difficulté particulière, l'organisation et le statut du HCP sont marqués par une forte personnalisation de la fonction du Haut-commissaire, qui cristallise fatalement les critiques et peut détourner d'une évaluation objective, en plus de la soumettre potentiellement aux contingences politiques et médiatiques.

Ainsi, le HCP revendique un portage plus puissant que des profils administratifs classiques, tels que le Commissaire général de France Stratégie ou le Secrétaire général à la planification écologique. Cependant, les responsabilités politiques importantes que le Haut-commissaire continue d'assumer, en parallèle de son mandat, interrogent fortement : celui-ci exerce toujours la présidence du parti du Mouvement Démocrate (MoDem) ; il continue également d'exercer le mandat de maire de la ville de Pau ; enfin, il était présent - certes à titre symbolique - sur la liste Renaissance aux élections européennes de juin 2024.

Au-delà de la question des responsabilités politiques, cette dimension personnelle se retrouve dans l'organisation et le fonctionnement du HCP, à plusieurs titres : certains agents du HCP exercent des emplois ou fonctions au sein du MoDem ou de la ville de Pau ; le Haut-commissariat compte, en plus de son siège à Paris, une antenne située à Pau, dans un local mis à disposition, contre loyer, par la préfecture des Pyrénées-Atlantiques ; la programmation des travaux du HCP, soit le choix des sujets traités et des angles d'étude pour les notes stratégiques, est à l'entière discrétion du Haut-commissaire. En soi, évidemment rien d'illégal, mais cela peut poser question s'agissant d'une fonction qui nécessite certes une vision politique, mais aussi un détachement face à l'instantanéité d'une activité politique en cours.

À titre personnel, et si je n'en fais pas forcément une recommandation dans ce rapport, je considère que, si une personnalité politique d'expérience peut être chargée d'une telle mission de prospective, qui ne saurait être réservée à des techniciens - si brillants soient-ils - et qui revêt forcément une forte dimension politique, le HCP ne présente pas à ce jour de garantie suffisante d'indépendance et de disponibilité.

De même, concernant l'existence d'une antenne locale, si celle-ci ne présente pas de difficulté de principe ou de légalité, ni d'enjeu budgétaire particulier, le choix précis de cette implantation, située à Pau, s'explique par un motif de convenance personnelle pour le Haut-commissaire, qui renforce encore un peu plus l'incarnation très forte de la fonction.

Pour autant, l'écueil dans lequel je ne souhaite pas tomber à titre personnel serait justement de condamner le Haut-commissaire uniquement parce qu'il est François Bayrou et proche d'un Président de la République dont je combats la politique et le bilan. Aussi, les critiques que j'adresserai ne seront pas ad hominem...

J'en viens à la contribution du HCP aux politiques publiques. À l'évidence et d'un constat largement partagé, cette contribution, très mitigée, n'a pas pleinement répondu aux attentes importantes qui avaient été placées dans le Haut-commissariat à sa création en 2020.

En quatre ans d'activité, le HCP a publié 18 études en propre, appelées « notes stratégiques ». À ces travaux s'ajoutent un rapport corédigé avec un think tank et deux rapports rédigés par des tiers sur commande, l'un par une mission d'appui conjointe de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et du Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGEIET), l'autre par le Conservatoire national des arts et métiers (Cnam).

Pour l'essentiel, les notes stratégiques du HCP ne se distinguent pas des travaux d'autres services administratifs chargés de missions d'expertise et de conseil, tels que les inspections, les administrations parlementaires ou France Stratégie. Pour une partie, ces notes peuvent même apparaître beaucoup moins approfondies.

Or, si des synthèses rédigées de manière accessible pour un large public peuvent certainement être utiles à la diffusion des études du HCP, un tel travail ne saurait correspondre à une mission ambitieuse de prospective et de planification visant à influer sur les choix de politiques publiques.

Au-delà du caractère peu détaillé de certaines publications, les travaux du HCP présentent plusieurs lacunes importantes : l'absence de publication sur les enjeux du numérique, un intérêt limité pour les problématiques spécifiques à la jeunesse et, pour certaines notes, un défaut dans la démarche de planification se traduisant par des recommandations peu opérationnelles.

Face aux risques de redondance et d'éclatement des moyens et des compétences, une rationalisation de l'organisation des services chargés de prospective et de planification apparaît donc nécessaire. Ainsi, il importe de clarifier la répartition des compétences entre les instances rattachées au Premier ministre, en confiant expressément la responsabilité de la réflexion prospective au Haut-commissariat, celle de la planification des ressources physiques et financières au Secrétariat général à la planification écologique et celle de l'évaluation à France Stratégie. Dans ce cadre, le HCP serait renommé en Haut-commissariat à la prospective.

De même, afin de donner une plus-value accrue à ses travaux, la démarche prospective du HCP pourrait se déployer sur un horizon de plus long terme et explorer des scénarios radicaux, suivant le modèle de l'initiative Red Team développée par l'Agence de l'innovation de défense (AID) qui associe auteurs d'oeuvres littéraires d'anticipation - de science-fiction -, universitaires et professionnels.

Par ailleurs, cette rationalisation des missions du HCP doit s'accompagner de garanties renforcées en matière d'indépendance, d'expertise et de « redevabilité ». Ainsi, la programmation des travaux du HCP pourrait être consolidée à travers le recours à l'avis consultatif d'un collège restreint composé de personnalités qualifiées. De même, il est proposé de fixer à six ans, renouvelables, la durée du mandat de Haut-commissaire et de prévoir son inamovibilité.

Mes chers collègues, face aux risques et aux défis majeurs de notre époque, la réflexion prospective dans le domaine de la décision publique est particulièrement essentielle et paraît justement insuffisante. À ce titre, le HCP pourrait apporter une contribution utile, à condition de veiller à une plus grande rigueur dans son action et son organisation. C'est la raison pour laquelle je ne propose pas sa suppression comme certains ont été tentés de le faire. Aucun outil n'est fondamentalement mauvais, pourvu qu'il ne se saborde pas lui-même, et il faut clairement entendre des critiques adressées de longue date. Il faut aussi que l'exécutif permette au HCP de vivre et ne lui crée pas lui-même une concurrence.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. -Ce travail était attendu et s'inscrit dans le prolongement d'amendements qui avaient été déposés par le rapporteur spécial peu après son entrée au Sénat. À cet égard, j'avais souhaité qu'un travail plus en profondeur soit mené pour trier le bon grain de l'ivraie. De manière générale, le Sénat déplore la multiplication des organismes, opérateurs de l'État.

S'agissant du Haut-commissariat au Plan, plusieurs compétences sont mal définies ou croisées avec d'autres autorités. En ces temps d'impasse budgétaire où les comptes publics sont profondément dégradés, un diagnostic est utile. Il nous appartiendra ensuite d'examiner la nécessaire rationalisation des dispositifs mis en place pour la prévision et la planification. À mon sens, des ajustements seront requis. Et il est bien légitime que le Sénat continue de se pencher sur ces questions et qu'il formule des propositions.

Mme Vanina Paoli-Gagin. - Monsieur le rapporteur spécial, à l'heure où l'on assiste au retour des empires pour lesquels la planification est de longue date un outil de conquête des marchés et des esprits, ne pensez-vous pas qu'une refonte intégrale de la fonction et des missions du HCP devrait être opérée ? C'est un organe qui devrait être en surplomb et qui devrait maîtriser l'amont et l'aval, pour être un outil au service d'une stratégie nationale. Comment peut-on piloter des politiques publiques sans avoir un continuum de la vision prospective et des moyens opérationnels ?

M. Grégory Blanc. - Merci, monsieur le rapporteur spécial. J'ai lu avec attention la note de synthèse du rapport et écouté la présentation qui vient d'en être faite. Si l'on envisage le Haut-commissariat au Plan comme un outil supplémentaire de prospective, on peut alors débattre de la nécessaire rationalisation des structures existantes. Mais il me semble que, depuis quelque temps, le HCP a aussi pour objectif de faire vivre le Conseil national de la refondation, outil favorisant le dialogue entre les différentes composantes de notre société afin de faire émerger des compromis. Tel est d'ailleurs le sens historique du Plan dans notre pays : engager un débat démocratique sur la trajectoire d'industrialisation et de développement. La prospective ne suffit pas ; encore faut-il une clarification et une volonté politique en plus haut lieu. Si le CNR n'a pas obtenu les résultats escomptés, c'est aussi parce que des freins ont entravé le dialogue. Il ne faudrait pas jeter le bébé avec l'eau du bain...

Mme Christine Lavarde. - Merci beaucoup pour ce contrôle qui intervient à la suite des questions que nous avions posées au moment de la discussion budgétaire, notamment en ce qui concernait l'organisation des moyens immobiliers des trois instances - le Haut-commissariat au Plan, le Secrétariat général à la planification écologique et France Stratégie - évoquées dans son rapport par le rapporteur spécial.

S'agissant de la recommandation de s'inspirer du modèle de l'initiative Red Team de l'Agence de l'Innovation de Défense, la délégation sénatoriale à la prospective a eu la chance d'engager des échanges avec les divers intervenants de cette initiative. Il faut savoir que, dans leur structure, les équipes projet sont constituées en fonction d'une action précise et préalablement définie. Or, si l'on suit cet exemple, ne faudrait-il pas revoir la politique de ressources humaines des trois instances précitées - le Haut-commissariat au Plan, le Secrétariat général à la planification écologique et France Stratégie ?

M. Claude Raynal, président. - À titre personnel, les questions d'incarnation ne m'intéressent pas, mais je dois dire que je n'ai jamais trouvé particulièrement passionnante - pour le dire ainsi... - la lecture des documents publiés par le HCP. Aussi, même si elle est justifiée, je trouve la recommandation n° 1 « Rapprocher la réflexion prospective et le pilotage des investissements publics stratégiques » modérée dans son expression. Nous avons un organisme qui fonctionne, qui a des moyens, c'est France Stratégie. Alors, concentrons nos forces ! S'il s'agit uniquement de maintenir une structure sans objectif réel derrière, nous ne serons jamais capables de rien faire !

Par conséquent, je suis un peu en désaccord avec la recommandation n° 7, « Fixer à six ans, renouvelables, la durée du mandat de Haut-commissaire et prévoir son inamovibilité », car j'estime qu'il ne faut pas conserver cette structure en l'état. Si on veut vraiment garder le nom de « Plan », on peut rebaptiser France Stratégie, mais on ne doit pas maintenir deux structures de ce type. Ce n'est d'ailleurs pas vraiment une question budgétaire, puisque le budget du HCP reste modéré, mais une question d'organisation globale de la réflexion stratégique en France.

En tout cas, pendant que nous tergiversons, notamment sur la politique industrielle, d'autres pays, à toute vitesse, en sont déjà revenus au Plan du Général de Gaulle, comme nous l'avons vu lors d'un déplacement récent dont nous vous rendrons bientôt compte. Nous n'allons pas au bon rythme et nous avons trop d'organismes qui produisent peu !

Mme Nathalie Goulet. - Je tiens à faire un parallèle avec un sujet qui fâche : l'utilisation incontrôlée des cabinets de conseil. Là aussi, il n'existe aucune coordination, comme l'a montré la commission d'enquête sur l'influence croissante des cabinets de conseil privés sur les politiques publiques, dont la rapporteure était Éliane Assassi, et comme le montrait hier encore une émission télévisée. Il faut choisir : nous ne pouvons pas dépenser des millions dans des cabinets privés et en même temps disposer d'organismes comme ceux dont nous parlons aujourd'hui.

Le Sénat cherche des économies et, manifestement, il y en a en la matière. Je relève d'ailleurs que la proposition de loi encadrant l'intervention des cabinets de conseil privés dans les politiques publiques a été quelque peu vidée de sa substance par l'Assemblée nationale en première lecture et qu'elle y est toujours en instance.

M. Christopher Szczurek, rapporteur spécial. - Je n'ai pas voulu proposer une suppression pure et simple du Haut-commissariat au Plan, car, pour des raisons stratégiques, nous avons réellement besoin de planification en France. Puisque cette structure n'est pas en mesure d'assumer pour l'instant cet objectif, les recommandations visent à renforcer et à rationaliser son action en la recentrant sur la prospective, plutôt qu'à l'affaiblir.

Je ne suis pas convaincu que la rationalisation s'oppose à la clarification. Par « rationalisation », je parlais non pas de baisse des moyens, mais de définir qui fait quoi. À ce titre, le Secrétariat général à la planification écologique a toute sa place. Je ne propose ni sa mise sous tutelle par le HCP ni sa suppression.

Le HCP n'est plus en charge en pratique du Conseil national de la refondation, celui-ci relevant désormais de la direction interministérielle de la transformation publique. Il est apparu pendant les auditions, de l'aveu même des services du Haut-commissaire au Plan, que le CNR joue un rôle positif quand il fonctionne de manière ascendante, c'est-à-dire quand les acteurs peuvent s'exprimer. Quand il fonctionne de manière descendante, c'est-à-dire quand quelqu'un arrive avec une série de recommandations qu'il espère voir validées, le Conseil n'échappe pas à la critique politique, car tout paraît dirigé d'en haut, écueil qu'il faut éviter en matière de démocratie participative.

Au sein du Haut-commissariat au Plan, la part de contractuels est forte, comme dans beaucoup de services similaires, car il existe généralement des difficultés de recrutement sur les postes de fonctionnaire. En matière de performance, je n'ai pas de religion concernant le choix entre des agents aux missions limitées dans le temps et des agents présents sur le long terme, disposant de hauteur de vue. Cela explique l'absence de recommandations à ce sujet, à l'exception de la recommandation n° 7, limitée au Haut-commissaire, afin de détacher ce dernier rôle du calendrier électoral.

Par définition, la planification est relativement étatiste et directive. Ne nous mentons pas : l'inspiration est soviétique ! Tandis que certains pays élaborent des scénarios et les mettent en oeuvre, d'autres subissent. Je crains que cette dernière situation soit la nôtre actuellement. L'incertitude budgétaire à court et à moyen terme nous rend incapables de développer des plans sur des décennies.

La commission a adopté les recommandations du rapporteur spécial et autorisé la publication de sa communication sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Haut-commissariat au Plan

- M. François BAYROU, Haut-commissaire au Plan ;

- M. Philippe LOGAK, secrétaire général et rapporteur général ;

-  M. Baptiste PETITJEAN, conseiller ;

-  M. Mehdi KELLAL, chef de cabinet, Secrétariat général du Conseil national de la refondation.

France Stratégie

- M. Cédric AUDENIS, commissaire général.

Secrétariat général à la planification écologique

- M. Antoine PELLION, secrétaire général ;

- Mme Louise CONTAT, cheffe de cabinet du secrétaire général.

Direction des services administratifs et financiers du Premier ministre

- M. Serge DUVAL, directeur.

M. Jérôme CLECH, ingénieur de recherche au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) et enseignant à Sciences Po, ancien conseiller ministériel au ministère des Armées

Contribution écrite

Secrétariat général pour l'investissement (SGPI)

TABLEAU DE MISE EN OEUVRE ET DE SUIVI

N° de la proposition

Proposition

Acteurs concernés

Calendrier prévisionnel

Support

1

Rapprocher la réflexion prospective et le pilotage des investissements publics stratégiques

HCP, France Stratégie, SGPE, SGPI

Premier semestre 2025

Tous moyens

2

Concevoir un outil de cartographie dynamique des tendances technologiques mondiales et du positionnement de la recherche française par rapport à la frontière technologique

HCP, France Stratégie, SGPI

Second semestre 2025

Tous moyens

3

Pour tirer les conséquences du transfert des emplois du CNR à la direction interministérielle de la transformation publique, ajuster à la baisse le plafond d'emplois et la dotation budgétaire relative aux dépenses de fonctionnement du HCP

Direction du budget, DSAF

Second semestre 2024

Tous moyens

4

Rationaliser et clarifier la répartition des compétences entre les instances rattachées au Premier ministre dans les domaines de la prospective et de la planification, en confiant expressément la responsabilité de la réflexion prospective au HCP, celle de la planification des ressources physiques et financières au SGPE et celle de l'évaluation à France Stratégie. Renommer le HCP en Haut-commissariat à la Prospective

HCP, SGPE, France Stratégie, Gouvernement

Premier semestre 2025

Décret

5

Inscrire systématiquement les travaux du HCP dans un horizon de réflexion minimal de 30 ans et s'inspirer, pour l'élaboration des scénarios prospectifs, du modèle de l'initiative « Red Team » conçue par l'Agence de l'Innovation de Défense

HCP

Premier semestre 2025

Tous moyens

6

Structurer davantage la programmation des travaux du HCP en soumettant les décisions du Haut-commissaire à l'avis consultatif préalable d'un collège restreint, réuni annuellement, composé de personnalités qualifiées dans les domaines scientifique, technologique, économique, sociologique et géopolitique

HCP, Gouvernement

Premier semestre 2025

Décret

7

Fixer à six ans, renouvelables, la durée du mandat de Haut-commissaire et prévoir son inamovibilité

Gouvernement

Premier semestre 2025

Loi ordinaire

8

Prévoir la remise au Parlement d'un rapport annuel d'activité du HCP

Gouvernement

Premier semestre 2025

Loi ordinaire

9

Rationaliser les implantations immobilières du HCP, du SGPE et de France Stratégie

DSAF

Premier semestre 2025

Tous moyens


* 1 LOI n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19.

* 2 Confinement mis en oeuvre dans un premier temps, par décret, au regard des circonstances exceptionnelles et de l'urgence : décret n° 2020-260 du 16 mars 2020 portant réglementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus covid-19.

* 3 Voir, pour une analyse détaillée, le rapport d'information n° 199 (2020-2021) de Mme Catherine DEROCHE, M. Bernard JOMIER et Mme Sylvie VERMEILLET, au nom de la commission d'enquête du Sénat pour l'évaluation des politiques publiques face aux grandes pandémies à la lumière de la crise sanitaire de la covid-19 et de sa gestion, décembre 2020.

* 4 Voir pour une première alerte, antérieure à la crise sanitaire, le rapport d'information n° 737 (2017 2018) de M. Jean-Pierre DECOOL au nom de la mission d'information sur la pénurie de médicaments et de vaccins, septembre 2018 ; voir également le rapport d'information n° 625 (2014-2015) de M. Francis DELATTRE, au nom de la commission des finances du Sénat sur l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS), juillet 2015, qui notait déjà une forte diminution depuis 2010 des stocks nationaux de produits de santé nécessaires pour répondre aux situations sanitaires exceptionnelles (dits « stocks stratégiques ») et qui recommandait, tout en poursuivant le développement de la réservation de capacités de production et d'acquisition de produits de santé auprès de laboratoires, de maintenir des stocks physiques pour les produits stables.

* 5 Pour reprendre les termes du rapport de la commission d'enquête du Sénat précitée, « la pénurie de masques restera le triste symbole de l'état d'impréparation du pays et du manque d'anticipation des autorités sanitaires face à la crise ».

* 6 Le Monde, 28 septembre 2021.

* 7 Bruno Lasserre, « Les états d'urgence : pour quoi faire ? », conférence inaugurale du cycle de conférences de l'étude annuelle pour 2021 du Conseil d'État sur les états d'urgence, octobre 2020.

* 8 Emmanuel Macron, Adresse aux Français, 13 avril 2020.

* 9 Décret n° 2020-1101 du 1er septembre 2020 instituant un haut-commissaire au plan.

* 10 Décret du 3 septembre 2020 portant nomination du Haut-commissaire au Plan.

* 11 Lettre de mission du haut-commissaire au plan, 21 septembre 2020.

* 12 Voir, pour une synthèse historique sur le Commissariat général au Plan, la note de France Stratégie, « La planification : idée d'hier ou piste pour demain ? », point de vue, juin 2020.

* 13 Rapport au Premier ministre du député Jean de Gaulle, « L'avenir du Plan et la place de la planification dans la société française » (1994), qui observe qu'à partir des années 1960, la planification « fixe des objectifs dont la satisfaction ne dépend plus uniquement de l'État » et que « d'un plan à l'autre, la fiabilité des prévisions est inégale et va se dégradant ».

* 14 Sandra MOATTI, Xavier TIMBEAU, « Réinventer le plan », L'Économie politique 2021/1 (N° 89), janvier 2021 ; voir également, dans la même revue, pour une étude historique, Michel MARGAIRAZ, « Le Commissariat général du Plan : une méthode en contexte ».

* 15 Présentation par M. François Bayrou de la méthode et de l'agenda de travail du Haut-Commissariat au Plan, Conseil économique, social et environnemental, 22 septembre 2020.

* 16 Décret n° 2013-333 du 22 avril 2013 portant création du Commissariat général à la stratégie et à la prospective.

* 17 Décret n° 97-766 du 22 juillet 1997 portant création du Conseil d'analyse économique.

* 18 Décret n° 2022-990 du 7 juillet 2022 relatif au secrétariat général à la planification écologique.

* 19 Décret n° 2010-80 du 22 janvier 2010 relatif au secrétariat général pour l'investissement.

* 20 Conseil d'État, Étude annuelle 2024, « La souveraineté », septembre 2024. Le Conseil d'État recommande ainsi de mettre en place un « Commissariat général du plan », qui serait placé auprès du Premier ministre et réunirait l'ensemble des compétences de prospective de l'État et associer les parties prenantes (syndicats, élus, universités, etc.), « afin de garantir la diffusion, la continuité et le suivi des orientations stratégiques retenues pour conforter les conditions d'exercice de la souveraineté » [nous soulignons].

* 21 Les Échos, 9 juillet 2020.

* 22 Haut-commissariat au plan, note stratégique n° 3, « Face à la dette Covid, une stratégie de reconquête », 24 février 2021.

* 23 Le Monde, 27 janvier 2022.

* 24 France Stratégie, « La planification : idée d'hier ou piste pour demain ? », point de vue, juin 2020 : la note relève cependant, concernant le PIA, que « du fait même qu'il est inscrit à la marge du reste de l'action publique, dans un lien souvent distendu avec les ministères, on ne peut lui reconnaître le rôle systémique, porteur d'un projet de société, que revêtaient les lois de plan. De plus, les modalités de pilotage de ses appels à projets ne ressemblent pas à l'approche concertée qui était celle du plan ». La remarque vaut également pour France 2030.

* 25 Comité de surveillance des investissements d'avenir, Première évaluation in itinere, France 2030. Lancement maîtrisé d'un plan d'investissements à impacts majeurs.

* 26 Haut-commissariat au Plan, note stratégique n° 14, « La bataille du commerce extérieur : données 2022 », mai 2023.

* 27 À noter qu'en 2019, soit avant la création du HCP, le comité de surveillance des investissements d'avenir (alors en charge du suivi des programmes d'investissements d'avenir, dont le plan France 2030 a pris la suite) avait suggéré que le SGPI puisse à la fois conduire l'animation et la coordination de la veille stratégique et de la prospective de l'État et être chargé de l'élaboration de stratégies nationales d'innovation et de compétitivité en étroite collaboration avec les administrations, les opérateurs et les acteurs privés ou publics (Comités stratégiques de filière, organisations syndicales, monde académique, think-tanks).

* 28 Contribution écrite du Secrétariat général pour l'investissement.

* 29 Jean PISANI-FERRY, « L'État a perdu la capacité à prendre des risques », L'Économie politique 2021/1 (N° 89), janvier 2021.

* 30 Réponses de la DSAF au questionnaire du rapporteur spécial.

* 31 Réponses de France Stratégie au questionnaire du rapporteur spécial.

* 32 Réponses de France Stratégie au questionnaire du rapporteur spécial.

* 33 Voir le compte rendu intégral de la séance du mercredi 10 avril 2024.

* 34 À l'image de la note sur les médicaments critiques, publiée par le HCP, qui synthétise les travaux conduits par la mission d'appui confiée conjointement au Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGEIET) et à l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur le même sujet : Haut-commissariat au Plan, note stratégique n° 11, « Médicaments : identifier nos vulnérabilités pour garantir notre indépendance », février 2022 ; CGEIET, IGAS, « Les vulnérabilités d'approvisionnement en produits de santé », décembre 2021.

* 35 Haut-commissariat au Plan, note stratégique n° 16, « Le développement de l'aquaculture : un enjeu de souveraineté alimentaire », novembre 2023.

* 36 Haut-commissariat au Plan, note stratégique n° 17, « La prise en charge des troubles psychiques et psychologiques : un enjeu majeur pour notre société », juin 2024.

* 37 Lettre de mission du haut-commissaire au plan, 21 septembre 2020.

* 38 Haut-commissariat au Plan, note stratégique n° 15, « La grande transformation du travail : crise de la reconnaissance et du sens du travail », octobre 2023.

* 39 Réponses écrites des services du HCP au questionnaire du rapporteur spécial.

* 40 Haut-commissariat au Plan, « Démographie : la clé pour préserver notre modèle social », mai 2021.

* 41 Haut-commissariat au Plan, « Retraites : une base objective pour le débat civique », décembre 2022.

* 42 Haut-commissariat au Plan, note stratégique n° 17, « La prise en charge des troubles psychiques et psychologiques : un enjeu majeur pour notre société », juin 2024.

* 43 Haut-commissariat au Plan, « Produits vitaux et secteurs stratégiques : comment garantir notre indépendance ? », décembre 2020.

* 44 Haut-commissariat au Plan, « L'agriculture : enjeu de reconquête », juillet 2021.

* 45 La lettre de mission adressée par le Président de la République mentionnait déjà (certes à tort) le titre de « Haut-commissaire au Plan et à la Prospective ».

* 46 Cette recommandation s'inspire notamment des échanges en audition avec M. Jérôme CLECH et de la contribution écrite de celui-ci.

* 47 L'AID est une agence placée sous la responsabilité du délégué général pour l'armement et chargée de coordonner les initiatives d'innovation du ministère des Armées.

* 48 Site de l'Agence de l'Innovation de Défense ; voir également Le Monde, 7 juillet 2021.

* 49 Haut-commissariat au Plan, rapport d'activité du Plan allant d'octobre 2022 à décembre 2023, février 2024.

* 50 Avis n° 134 (2023-2024), tome IX, « Direction de l'action du Gouvernement - Publications officielles et information administrative » de Mme Nathalie DELATTRE, au nom de la commission des lois du Sénat, novembre 2023.

Partager cette page