N° 698

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 juin 2024

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le financement du volet « écoles » du plan Marseille en grand,

Par M. Stéphane SAUTAREL et Mme Isabelle BRIQUET,

Sénateur et Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mmes Marie-Claire Carrère-Gée, Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

L'ESSENTIEL

LA RÉNOVATION DES ÉCOLES MARSEILLAISES :
UNE NÉCESSITÉ QUI VA COÛTER CHER
ET DES EFFORTS À POURSUIVRE

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale, et M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial, des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », ont présenté le 19 juin 2024 les conclusions de leur contrôle budgétaire relatif au financement du volet « écoles » du plan Marseille en grand.

I. LA RÉNOVATION DES ÉCOLES MARSEILLAISES S'INSCRIT DANS L'AMBITIEUX PLAN MARSEILLE EN GRAND

A. LE PLAN MARSEILLE EN GRAND : UNE AMBITION GLOBALE QUI MANQUE DE CADRE STRUCTURANT

Le 2 septembre 2021, le Président de la République a annoncé le lancement du plan Marseille en grand avec pour objectif principal le rattrapage des retards accumulés par la commune dans le développement des services majeurs pour la population.

Le Président de la République a justifié ainsi cette volonté d'intervention de l'État au côté de la collectivité : « le devoir de la Nation est d'être aux côtés des Marseillaises et des Marseillais, parce que décider que ce serait une ville comme les autres, ce serait acter qu'elle va continuer à vivre au milieu de ces difficultés, les subir, et ne pas réussir pour elle-même, pour tout le territoire et pour tout le pays ».

Ce plan inédit d'un montant annoncé de 5 milliards d'euros s'articule autour de 7 axes : les écoles et l'éducation, la sécurité, les mobilités, le logement, l'emploi et l'insertion, la santé et la culture.

Les rapporteurs spéciaux soulignent que ce plan n'a fait l'objet d'aucune contractualisation entre la ville et l'État et n'est matérialisé par aucune feuille de route susceptible de le décliner par domaines, par objectifs et par actions et d'établir un calendrier de réalisation précis pour chacun des volets. Le seul document servant de référence est le discours du Président de la République.

Or, si ce discours contient de nombreux engagements précis dont certains sont chiffrés, il ne permet pas à lui seul de dresser la liste exhaustive des actions envisagées et à déployer. Il existe donc des possibilités d'interprétation divergentes et des transpositions volontairement ou involontairement différentes du prononcé et il est difficile, voire impossible de dresser un état exhaustif des actions à mener et à suivre.

Plus problématique encore, les crédits alloués par l'État au plan Marseille en grand ne sont pas suivis de manière consolidée de sorte que le montant total de l'effort financier de l'État est non seulement très peu fiable mais également évolutif dans le temps.

Ainsi, si le montant fréquemment évoqué est celui de 5 milliards d'euros, l'analyse des réponses permet d'aboutir à des montants compris entre 2,9 et 5,1 milliards d'euros. Le montant total du plan relève donc largement d'effets d'annonce avec une impossibilité de les reconstituer ex-ante.

B. LE VOLET « ÉCOLES / ÉDUCATION » : UNE COMPOSANTE ESSENTIELLE DU PLAN MARSEILLE EN GRAND POUR RÉNOVER ET MODERNISER LES ÉCOLES MARSEILLAISES

1. Une dégradation générale et ancienne des écoles marseillaises à l'origine du volet « écoles » du plan

Le patrimoine municipal scolaire de Marseille compte près de 470 écoles recevant les 76 300 enfants scolarisés sur son territoire.

Ce parc scolaire a accumulé dans le temps une dette d'entretien et de maintenance de plus en plus importante rendant le bâti des écoles vétuste, parfois dangereux pour ses usagers, peu adapté au changement climatique, sensible aux variations de température, ne résistant plus aux intempéries et n'ayant pas été adapté et positionné en fonction de l'évolution urbaine de la Ville.

Consciente de cet état des lieux, la ville de Marseille a donc décidé de mettre en place un important plan de rénovation dès 2017.

La nouvelle majorité municipale, en place à compter de 2020, a souhaité relancer un programme, plus vaste que le premier envisagé, de rénovation et de construction de ses écoles afin de couvrir ses besoins en bâtiments scolaires.

La ville de Marseille s'est donc engagée à rénover, réhabiliter et construire des écoles mieux adaptées au changement climatique, à la configuration de la ville et conformes aux normes de sécurité.

Face à l'importance des besoins, notamment financiers, pour mener à bien ces rénovations sur l'ensemble des écoles marseillaises, le maire de la ville a demandé le soutien de l'État.

Les annonces du Président de la République, le 2 septembre 2021, constituent ainsi l'aboutissement d'un travail mené en amont par la commune et appuyé sur de nombreuses études portant sur l'état des écoles.

2. Les objectifs d'un plan scindé en deux parties

Les objectifs de ce plan initialement communal sont la mise en sécurité et la mise aux normes des établissements, l'amélioration de la performance énergétique et la réduction des inégalités sociales.

Face aux enjeux et à l'ampleur des travaux et des investissements à réaliser le plan « écoles » de la ville de Marseille a été scindé en deux avec les annonces du Président de la République :

- une partie ciblant 188 écoles (réparties sur 109 sites) : les opérations concernant ces écoles sont financées par la Ville et l'État via la société publique des écoles marseillaises (SPEM) qui assure la maîtrise d'ouvrage dans le cadre d'un accord cadre de marché de partenariat passé entre la ville, l'État et la SPEM. Elles portent sur des restructurations lourdes d'écoles déjà bâties mais également sur la création de nouveaux établissements. Cette partie correspond au périmètre du volet « écoles » du plan Marseille en grand ;

- une partie ciblant 304 écoles : ces opérations sont principalement supportées financièrement par la ville et réalisées par ses services. Elles portent sur des restructurations et des rénovations plus légères d'écoles. Ces opérations sont hors champ de l'accord cadre de marché de partenariat.

Répartition générale des sites à enjeux

Source : étude Menighetti sur les sites à enjeux - cahier 1 synthèse de l'analyse

En sus des actions de rénovation, le volet « écoles » du plan Marseille en grand comporte un aspect pédagogique dit « école du futur » visant à donner plus de libertés et d'autonomie aux équipes pédagogiques et à développer des projets d'enseignement innovants.

3. Un montage budgétaire complexe qui s'appuie sur un partenariat public-public innovant et une société créée ad hoc

Afin de rénover et réhabiliter les 188 écoles retenues dans le volet « écoles » du plan Marseille en grand, une enveloppe de 254 millions d'euros en AE a été ouverte sur les crédits de la mission « Relations avec les collectivités » en loi de finances initiale pour 2022. Le 14 décembre 2021, le Premier ministre a validé une augmentation de 150 millions d'euros, aboutissant dès lors à une enveloppe globale réévaluée à 400 millions d'euros.

Ainsi, en complément de la subvention exceptionnelle de 254 millions d'euros, la rénovation des 188 écoles bénéficiera également de 11,7 millions d'euros de dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), de 3,15 millions d'euros de dotation politique de la ville (DPV) ainsi que de 66 millions d'euros de l'agence nationale de rénovation urbaine (ANRU).

Or, à ce stade, le total des subventions de l'État pour la partie rénovation bâtimentaire du volet « écoles » du plan Marseille en grand s'élève à 334,85 millions d'euros soit un delta de plus de 65 millions d'euros par rapport à l'enveloppe majorée sans aucune précision quant à leur provenance.

Par ailleurs, cette enveloppe budgétaire a été complétée par une garantie de 650 millions d'euros d'emprunts.

Au vu de l'ampleur et des caractéristiques du volet « écoles » du plan Marseille en grand, la ville et l'État ont décidé de créer une structure dédiée sous la forme d'une société publique locale d'aménagement d'intérêt national (SPAL-IN), la société publique des écoles marseillaises (SPEM).

Schéma de financement de la partie rénovation du volet « écoles »
du plan Marseille en grand

Source : commission des finances du Sénat

La création de la SPEM a été actée par le décret n° 2022-60 du 25 janvier 2022 et sa durée est fixée, dans les statuts, à 40 ans.

Le système élaboré prend ainsi la forme d'un partenariat public-public dans lequel la ville confie à la SPEM la réalisation des opérations de rénovation et de construction des écoles au moyen de plusieurs contrats conclus entre la ville et la société (marchés subséquents).

L'objectif d'un recours à une SPAL-IN est, en premier lieu, financier puisqu'il permet de faire porter la dette des investissements à une structure autre que la ville de Marseille.

II. QUEL BILAN TROIS ANS APRÈS LE LANCEMENT DU PLAN ?

A. UN BUDGET GLOBAL NETTEMENT SUPÉRIEUR AU MONTANT DES TRAVAUX

Alors que le montant total des travaux est estimé à environ 850 millions d'euros, le coût de l'accord-cadre est fixé à 1,8 milliard d'euros. Ce montant inclus en sus des travaux et études, la rémunération de la SPEM, l'indexation, les frais financiers intercalaires, l'indemnisation des perdants, les taux d'intérêts dus et les dépenses de maintenance et gros entretien.

De surcroit, en dehors de l'accord-cadre, des dépenses de maintenance, de nettoyage et de fluides, supportées directement par la ville, sont à ajouter et porte le montant total des opérations à 2,4 milliards d'euros soit trois fois le montant des travaux.

À compter de la date effective de mise à disposition de chaque école la ville de Marseille devra verser à la SPEM une redevance étalée sur 25 ans. En moyenne, cette dernière serait de 50 millions d'euros par an pendant 25 ans. Cette estimation lissée doit cependant être affinée dans la mesure où le financement total des travaux, déduction faite des subventions de l'État, augmenté des intérêts d'emprunts s'établit à 1,52 milliard d'euros soit l'équivalent, sur 25 ans, d'une redevance annuelle de 60,7 millions d'euros. À ce montant de redevance annuelle, devront être ajoutées les dépenses de maintenance et gros entretien prévues dans l'accord cadre et estimées à 325,5 millions d'euros (soit 13 millions par an pendant 25 ans) et des dépenses de fonctionnement directement à la charge de la ville estimées à 523,3 millions d'euros (soit 21 millions d'euros par an pendant 25 ans).

Enfin, pour la rénovation des 304 écoles pour lesquelles la ville conserve la maitrise d'ouvrage, les investissements prévisionnels s'établissent environ à 40 millions d'euros pendant 10 ans.

Au total, les dépenses d'investissement de la ville de Marseille pour la rénovation des écoles pourraient atteindre 103 à 113 millions d'euros par an soit 30 % de l'investissement annuel moyen de la ville. Dans un contexte où la commune affiche d'importantes ambitions d'investissement dans d'autres domaines comme le verdissement, l'accès au logement, à la santé et à la culture, se pose la question de la soutenabilité à long terme de cet investissement au profit des écoles.

B. UN RÉEL AVANCEMENT DES TRAVAUX MAIS DES INTERROGATIONS POUR L'AVENIR

14 écoles sur 7 sites sont en cours de travaux. 10 d'entre elles (sur 5 sites) devraient être livrées d'ici la fin de l'année 2024 et les 4 autres en 2025. Ce bon avancement résulte en grande partie du fait que les travaux de 7 sites avaient déjà été initiés par la ville de Marseille et ont été transférés à la SPEM dans le cadre du premier marché subséquent.

Dès lors, si la livraison de 10 écoles d'ici la fin de l'année 2024 représente des travaux sans précédent pour la ville de Marseille, elle doit être mise en perspective des enjeux et d'un lancement des marchés et des travaux, finalement, bien antérieur à la création de la SPEM.

Si la première vague se déroule jusqu'à présent selon le calendrier annoncé certains doutes demeurent sur la capacité à tenir les échéances fixées pour les prochaines vagues.

Seule une montée en puissance rapide de la SPEM et l'élaboration de bilans intermédiaires permettant de capitaliser l'expérience acquise lors des deux premiers marchés subséquents seront de nature à favoriser la poursuite du projet dans le calendrier initial.

C. UN SUIVI DE L'AVANCEMENT DU PLAN PERFECTIBLE ET UNE NÉCESSAIRE PRÉPARATION DE LA SUITE

Si le suivi effectué par la ville, la SPEM et la préfecture est très régulier et précis, il mérite cependant d'être formalisé et de faire l'objet d'indicateurs et d'outils de reporting partagé par l'ensemble des acteurs.

En revanche, le suivi réalisé par les cabinets de la secrétaire d'État à la ville et à la citoyenneté, du Premier ministre et du Président de la République parait peu approfondi. Malgré leurs demandes répétées, les rapporteurs spéciaux n'ont d'ailleurs pas pu avoir accès aux documents relatifs à ce suivi.

Le suivi assuré par l'État est d'autant plus nécessaire que, dans le cas présent, par le biais d'une subvention exceptionnelle de 254 millions d'euros, il se substitue en partie à l'exercice d'une compétence communale en engageant des crédits ce qui l'oblige à une certaine rigueur dans le suivi de l'utilisation qui en est faite.

Enfin, l'accord cadre prévoit que la SPEM se voit confier, en sus des opérations de construction, rénovation, des missions liées à la durabilité et à la conservation des écoles et de gros entretien prévues pour une période de 25 ans après chaque livraison. Il en résulte qu'à compter de 2049 pour les premières écoles livrées et de 2056 pour la dernière vague, la ville de Marseille reprendra à sa seule charge la maintenance et le gros entretien et renouvellement pour l'ensemble des 188 écoles rénovées et construites par la SPEM. Il est donc indispensable de prévoir dès à présent les conditions de reprise de la maintenance par les services de la ville de Marseille et de s'assurer que la ville disposera, en amont de cette reprise, de l'ensemble des moyens humains et techniques pour y faire face.

LES RECOMMANDATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Recommandation n° 1 : garantir les 400 millions d'euros annoncés pour le volet « écoles » du plan Marseille en grand, en ouvrant ou fléchant les 65 millions d'euros manquants l'équilibre du projet ayant été construit sur ce montant (Gouvernement).

Recommandation n° 2 : réaliser un bilan des avantages et inconvénients d'un recours à un partenariat public-public afin d'analyser l'efficacité de ce montage et sa transposabilité à d'autres investissements d'ampleur des collectivités (Gouvernement, société publique des écoles marseillaises -SPEM -, ville de Marseille).

Recommandation n° 3 : élaborer un plan de financement stabilisé incluant l'ensemble des dépenses de travaux, de maintenance et les frais annexes ainsi que l'ensemble des ressources en précisant leur origine (SPEM et ville de Marseille).

Recommandation n° 4 : préciser et sécuriser les flux financiers entre la ville et la société publique des écoles marseillaises (SPEM) afférents au paiement de la TVA (SPEM et ville de Marseille).

Recommandation n° 5 : finaliser rapidement les recrutements nécessaires à la pleine activité de la SPEM pour assurer le lancement des travaux de la vague 2 et des suivantes (SPEM).

Recommandation n° 6 : élaborer un document consolidé et partagé entre les acteurs, précisant les sites, les écoles et la nature des travaux envisagés pour chacune des 7 vagues (SPEM et ville de Marseille).

Recommandation n° 7 : mettre à jour régulièrement les documents listant les écoles à rénover par vague pour tenir compte des aléas ou des nouvelles données démographiques (SPEM et ville de Marseille).

Recommandation n° 8 : renforcer le dialogue et la coordination entre la ville et la métropole pour poursuivre le volet « écoles » du plan Marseille en grand de manière coordonnée (ville de Marseille et métropole Aix-Marseille-Provence).

Recommandation n° 9 : formaliser les documents de suivi du volet « écoles » du plan Marseille en grand et élaborer des indicateurs et outils de reporting partagés entre l'ensemble des acteurs (préfecture et cabinet du secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté).

Recommandation n° 10 : élaborer des bilans intermédiaires pour chaque vague de travaux achevée (SPEM et ville de Marseille).

Recommandation n° 11 : élaborer un plan de reprise progressive de la maintenance des 188 écoles rénovées et construites par la SPEM, prévoyant les coûts y afférents et les moyens humains et techniques nécessaires (ville de Marseille).

PREMIÈRE PARTIE :
LA RÉNOVATION DES ÉCOLES MARSEILLAISES S'INSCRIT DANS L'AMBITIEUX PLAN MARSEILLE EN GRAND

I. LE PLAN MARSEILLE EN GRAND : UNE AMBITION GLOBALE QUI MANQUE DE CADRE STRUCTURANT

A. UN PLAN TRANSVERSAL DE RATTRAPAGE QUI ENGLOBE L'ENSEMBLE DES PROBLÉMATIQUES MARSEILLAISES

1. Des annonces présidentielles à l'initiative du plan Marseille en grand
a) Le lancement du plan Marseille en grand en septembre 2021 

Le 2 septembre 2021, le Président de la République a annoncé, lors d'une visite dans la cité phocéenne, le lancement du plan Marseille en grand avec pour objectif principal le rattrapage des retards accumulés par la commune dans le développement des services majeurs pour la population et touchant de nombreux domaines, dans un contexte de situation financière particulièrement tendue.

Le Président de la République a justifié ainsi cette volonté d'intervention de l'État au côté de la collectivité : « le devoir de la Nation est d'être aux côtés des Marseillaises et des Marseillais, parce que décider que ce serait une ville comme les autres, ce serait acter qu'elle va continuer à vivre au milieu de ces difficultés, les subir, et ne pas réussir pour elle-même, pour tout le territoire et pour tout le pays »1(*).

En effet, de toutes les grandes métropoles françaises, Marseille est la dernière ville accueillant autant de classes populaires et de personnes peu diplômées, et intégrant 34 quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et donc paupérisés. Cumulant les difficultés économiques, sociales, scolaires, sécuritaires, financières et un déficit d'infrastructures publiques, la deuxième ville de France est traversée par des inégalités fortes.

Dans ce contexte, au-delà du rattrapage des carences en termes de services publics précité, l'ambition du plan Marseille en grand est une baisse des inégalités incarnée par les mots suivants : « ce que je veux ici aujourd'hui avec vous porter et proposer, c'est une ambition autour de quelques volontés, mais une ambition pour la pleine génération ici, pour qu'elle puisse vivre son destin d'où qu'elle vienne et qu'elle puisse le faire avec les mêmes chances où qu'elle habite, quels que soient le prénom et le nom, quelles que soient les contraintes de l'État »2(*).

b) L'annonce d'un acte 2 du Plan Marseille en Grand

Fin juin 2023, lors d'une nouvelle visite officielle du chef de l'État, l'« acte 2 » du plan a été lancé, avec l'annonce de moyens supplémentaires, notamment en matière de santé et de sécurité et des mesures relevant plus d'ajustements pour les volets éducation, mobilité et logements.

2. Plusieurs volets au service du rattrapage des retards de la ville de Marseille

Le plan Marseille en Grand s'articule autour de sept axes :

- les écoles et l'éducation ;

- la sécurité : police et justice ;

- les mobilités ;

- le logement ;

- l'emploi et l'insertion ;

- la santé ;

- la culture et le rayonnement territorial.

D'après les éléments transmis aux rapporteurs spéciaux par le secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté en charge du suivi du Plan, les principales actions du Plan Marseille en grand sont les suivantes.

a) Le volet « écoles-éducation »

Ce premier volet vise à garantir à tous les élèves les conditions de la réussite scolaire en passant, notamment par la rénovation des écoles très dégradées de la ville (cf. infra).

Ø Acte 1 du Plan

La rénovation des écoles devient, dès lors, une des priorités du plan. Dans ce contexte, 188 écoles ont été identifiées pour être rénovées au cours des dix prochaines années.

Parallèlement, ce programme de rénovation s'accompagne d'une réflexion sur l'articulation entre le bâti scolaire et ses usages pédagogiques :

- créer des écoles innovantes expérimentales et des microstructures (10micro collèges et 10 micro lycées dans les quartiers les plus en difficulté) ;

- lutter contre le décrochage scolaire et combattre les inégalités ;

- préparer des citoyens en devenir.

Ø Acte 2 du Plan

À la suite des annonces de juin 2023, il a également été décidé :

- d'achever le dédoublement des classes de CP et CE1 dans les zones de réseau d'éducation prioritaire (REP et REP +) ;

- de mettre en place la prise en charge de collégiens de 8h à 18h ;

- de systématiser l'accueil des enfants dès 2 ans dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV) ;

- de généraliser les cités éducatives.

b) Le volet « sécurité/justice »

Ø Acte 1 du Plan

Les premières annonces de septembre 2021 ont porté sur le renforcement des effectifs assurant la sécurité et le renforcement des moyens de la police judiciaire et de la justice et la pérennisation de deux compagnies républicaines de sécurité (CRS).

Plus spécifiquement, l'affectation de 300 nouveaux policiers sur deux ans a été actée (dont 200 dès 2022), ainsi que l'arrivée et la pérennisation de deux compagnies de compagnies républicaines de sécurité (CRS).

Par ailleurs, une amélioration des moyens techniques est également prévue par :

- le déploiement de 500 caméras de vidéosurveillance ;

- l'installation d'un nouveau commissariat pour les 13e et 14e arrondissements d'ici fin 2024 ;

- la construction d'un nouvel hôtel de police, prévue pour 2027 ;

- la modernisation de l'équipement des forces de sécurité (moyens numériques d'enquête et 222 nouveaux véhicules).

Ø Acte 2 du Plan

En complément des premières mesures annoncées, l'acte 2 du Plan prévoit également

- la création d'une nouvelle cité judiciaire, prévue pour 2030 ;

- 25 enquêteurs supplémentaires pour renforcer la division criminelle et la répression du banditisme de la police judiciaire ;

- 4 enquêteurs en renfort au groupe cyber de la police judiciaire ;

- 10 techniciens supplémentaires pour le laboratoire de police scientifique ;

- la création d'une compagnie de CRS de type CRS 8 à Marseille.

c) Le volet « mobilité »

L'objectif du volet « mobilité » est de développer l'accessibilité et de financer 15 projets concrets déjà identifiés dans le Plan de Mobilité Métropolitain comme l'automatisation du métro, la création de quatre lignes de tramway et de cinq lignes de bus à haut niveau de service notamment pour réduire la fracture entre les quartiers nord et sud de la ville.

d) Le volet « logement »

Ø Acte 1 du Plan

Ce volet du plan Marseille en grand vise à l'accélération de l'intervention dans le domaine de l'habitat selon trois axes principaux définis lors de l'acte 1 :

- la lutte contre l'habitat indigne avec la mise en place d'un plan d'aménagement particulier pour le centre-ville avec un objectif de traitement de 10 000 logements sur 15 ans. Cette ambition a été confiée à la société Publique Locale d'Aménagement d'Intérêt National Aix Marseille Provence (SPLAIN) créée en juin 2020, par ses trois actionnaires : l'État, la Métropole Aix-Marseille Provence et la Ville de Marseille ;

- le traitement des copropriétés dégradées et la simplification des procédures ;

- la rénovation urbaine avec l'accompagnement de l'ANRU de 9 quartiers prioritaires de la politique de la Ville.

Ces axes devraient se concrétiser par 10 projets de rénovation urbaine globale ainsi que par la création de bataillons de prévention avec 30 médiateurs et 30 éducateurs supplémentaires.

Ø Acte 2 du Plan

Lors de l'acte 2 du Plan, des études de faisabilité ont été lancées pour la création de quatre opérations de requalification des copropriétés dégradées d'intérêt national (ORCOD-IN) pour les copropriétés de la Maurelette, le Grand Mail, les Rosiers, Consolat.

e) Le volet « emploi et insertion »

L'objectif de ce volet est le développement de l'emploi, notamment pour les jeunes et particulièrement les plus éloignés de l'emploi. Pour ce faire, le plan Marseille en grand porte sur la création de 5 carrefours de l'entrepreneuriat et du capital jeunes créateurs qui permet de renforcer les dispositifs de soutien individuel à la création d'entreprises par :

- un accompagnement renforcé des porteurs de projet ;

- une aide financière sous forme d'une prime à la création d'entreprises de 3 000 euros.

Dans ce cadre, un appel à projet a été lancé par BPI France (Accélérateurs Marseille en Grand) pour accompagner 500 jeunes, par des acteurs spécialisés, dans la création d'entreprise.

Enfin, le Président de la République a fait part de sa volonté de mobiliser le dispositif du service militaire volontaire3(*) (SMV), existant déjà mais peu développé, pour accompagner les jeunes les plus défavorisés4(*).

f) Le volet « santé »

Ø Acte 1 du Plan

Le volet santé vise à moderniser l'offre de soins de la deuxième ville de France et réduire les déserts médicaux qui caractérisent certains quartiers de Marseille. Il se compose de trois axes :

- la rénovation de l'assistance publique des hôpitaux de Marseille (AP-HM), avec la modernisation des sites des hôpitaux de la Timone et Nord, la construction d'un pôle parents-enfants sur le site de la Timone et des aménagements sur le site de la conception ;

- la création d'une maison des femmes : lieu d'accueil, d'écoute, d'accompagnement et d'orientation pour les femmes vulnérables et victimes de violences ;

- l'amélioration de l'offre de santé dans les quartiers Nord-Sud notamment par la création de maisons de santé pluridisciplinaires et de centres de santé.

Ø Acte 2 du Plan

En complément de ces premières actions, le Président de la République a annoncé lors de son déplacement de juin 2023 :

- la construction pour 2030 d'un nouvel hôpital d'instruction des armées, qui se situerait dans les quartiers Nord et qui aurait également vocation à être un hôpital de proximité pour les habitants ;

- une aide financière supplémentaire à l'AP-HM pour la rénovation de ses locaux.

g) Le volet « culture et rayonnement territorial »

Le volet « culture et rayonnement territorial » porte essentiellement sur le cinéma et l'audiovisuel et s'articule autour de 4 projets à développer au cours des trois prochaines années :

- la création de l'École Cinéfabrique Marseille ;

- la création d'une base logistique provisoire de tournages ;

- la modernisation du Pôle Média de la Belle de mai ;

- la création d'une antenne de la Cinémathèque française.

Ces actions seront complétées par les lauréats de l'appel à projets national « Grande fabrique de l'image » du plan France 2030 opéré par la Caisse des dépôts et consignations, en lien avec le Centre national du cinéma (CNC) et incluant les projets « Marseille en Grand ».

B. UNE ABSENCE DE CADRE GÉNÉRAL STRUCTURANT

1. Un plan sans véritable plan, en dehors de toute démarche contractuelle ou partenariale qui conduit à des divergences d'interprétation
a) De nombreux outils contractuels existants entre l'État et les collectivités....

Les contrats et partenariats passés entre l'État et les collectivités territoriales sont aujourd'hui de plus en plus nombreux et concernent de nombreux champs thématiques (industrie, revitalisation des centres villes, ruralité, écologie...). Ils constituent aujourd'hui un instrument majeur de l'action publique territoriale, dans lequel la politique d'octroi des dotations d'investissement de l'État s'inscrit désormais pleinement.

Bien qu'existant depuis les années 1970, le recours au procédé contractuel entre l'État et les collectivités territoriales pour la conduite et le financement de projets partagés a connu un fort essor dans les années récentes, dans l'intérêt bien compris de l'État et des collectivités territoriales.

En effet, comme l'expliquent les députées Stella Dupont et Bénédicte Taurine dans leur récente Mission « flash » sur la contractualisation5(*), « la mise en oeuvre de la décentralisation entraîne l'effacement de la décision unilatérale de l'État dans les territoires. Mais la volonté de l'État d'encourager les priorités de son agenda politique demeure. La mise en oeuvre de politiques publiques nationales implique l'établissement d'un partenariat avec les collectivités territoriales. De leur côté, les exécutifs locaux ont besoin des financements de l'État pour monter leurs projets, leurs ressources budgétaires n'étant parfois pas suffisantes pour mener à bien les projets complexes en dépit des possibilités de co-financement ».

Il existe ainsi historiquement trois démarches contractuelles principales dans le cadre desquelles les dotations de l'État sont susceptibles d'être mobilisées : les contrats de plan État-régions, les contrats de ville et les contrats de ruralité.

Ces trois formes de contrats ont par ailleurs été récemment complétées par les contrats de relance et de transition écologique (CRTE). Institués dans le cadre du plan de relance et pour la durée du mandat municipal 2020-2026, ces nouveaux outils contractuels sont en principe signés à l'échelle des intercommunalités et leur mise en oeuvre est confiée à l'ANCT.

Trois objectifs leur étaient assignés par la circulaire du Premier ministre du 20 novembre 2020 relative à l'élaboration des CRTE 6(*) :

- accélérer la relance dans les territoires ;

- accompagner les transitions (écologique, numérique, économique, démographique...) sur la base d'un projet de territoire ;

- simplifier le paysage contractuel, en allant vers un contrat plus intégrateur, expression d'un dialogue renouvelé entre l'État et les collectivités locales.

Adoptant ainsi une approche transversale et interministérielle, et bénéficiant à cette fin d'un portage politique fort au niveau du Premier ministre, les CRTE s'adressent à tous les types de territoires et ont notamment vocation à remplacer les contrats de ruralité pour les intercommunalités qui y sont engagées.

Leur objectif est également de regrouper l'ensemble des initiatives partenariales présentes sur les territoires telles que les programmes « action coeur de ville », « petites villes de demain », « territoires d'industrie » ...

Par ailleurs, les contrats ont été, depuis 2017, complétés par la mise en oeuvre de programmes partenariaux afin d'accompagner les transformations territoriales dans des domaines spécifiques. Ainsi, ces programmes portent sur le soutien au développement des villes moyennes (« action coeur de ville »), aux petites centralités (« petites villes de demain »), au développement industriel (« territoires d'industrie »). Ces principaux programmes sont également complétés par des programmes spécifiques (avenir montagnes, inclusion numérique, cités éducatives, France services...)

Au plan opérationnel, ces programmes sont pilotés par l'agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT). Ils visent avant tout à orienter, ordonner et valoriser des financements préexistants émanant de différents acteurs (ministères, collectivités territoriales, opérateurs...) sur un territoire donné, parmi lesquels les dotations d'investissement de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », en particulier la DSIL et la DETR. Ils n'impliquent donc, pour l'essentiel, pas de crédits nouveaux, même si l'État y apporte un soutien financier à la marge via le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » de la mission « Cohésion des territoires ». Il s'agit donc essentiellement d'une labellisation des financements qui présente toutefois le mérite de créer une dynamique autour de projets partagés et fédérer les acteurs d'un territoire.

b) ...mais non utilisés dans le cadre du plan Marseille en grand, qui se déroule en dehors de tout cadre et document formalisé

Dans le cas du plan Marseille en grand, et contrairement aux démarches contractuelles et partenariales précitées, le lancement du plan n'a fait l'objet d'aucune consultation globale des élus locaux, de la ville ou de la métropole.

Par ailleurs, aucune contractualisation, quelle que soit sa forme, n'a été signée entre la ville et l'État. Il en résulte que la liste des projets et actions et des crédits alloués à leur financement ne sont pas formalisés dans un document unique et partagé par l'ensemble des acteurs concernés par la mise en oeuvre du plan.

Subséquemment, il n'existe pas de feuille de route, qui permettrait de décliner le plan par domaines, par objectifs et par actions et de définir un calendrier de réalisation précis pour chacun des volets.

Le seul document servant de référence, sur la base du prononcé, est le discours du Président de la République du 2 septembre 2021.

Si ce discours contient de nombreux engagements précis dont certains sont chiffrés, il ne permet pas à lui seul de dresser la liste exhaustive des actions envisagées à déployer.

c) Des interprétations divergentes et des différences entre les annonces présidentielles et les documents transmis

Ainsi, il en résulte des possibilités d'interprétation divergentes et des transpositions volontairement ou involontairement différentes du prononcé.

À titre d'exemple, sur le volet « emploi », le Président de la République mentionne trois carrefours de l'entreprenariat alors que les documents transmis aux rapporteurs spéciaux en évoquent cinq.

S'agissant du volet « écoles », le Président de la République évoque 174 établissements dans un état de délabrement tel que l'apprentissage y est devenu impossible et qu'il est donc nécessaire de rénover, tandis que les documents transmis font mention, pour leur part, de 188 écoles qui seront rénovées avec des crédits de l'État.

Il en résulte que les actions à mettre en oeuvre diffèrent entre le discours du Président de la République, les éléments transmis par le secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté et ceux transmis par la préfecture des Bouches-du-Rhône, de sorte qu'il est difficile, voire impossible de dresser un état exhaustif des actions à mener et, subséquemment, à suivre.

La tâche est rendue d'autant plus malaisée que parmi les annonces du Président de la République certaines actions ne relèvent pas spécifiquement du plan Marseille en grand comme, par exemple, achever le dédoublement des classes de CP et CE1 dans les zones REP et REP+ (qui a commencé dès 2017) qui concerne l'ensemble du territoire, ou encore le vote de la loi visant à accélérer et à simplifier la rénovation de l'habitat dégradé adopté le 9 avril 2024.

En l'absence de tels documents de cadrage, il s'avère ainsi quasiment impossible de suivre efficacement les avancées du plan dans son ensemble et d'identifier les éventuels retards.

2. Une articulation avec le contrat métropolitain signé en 2022 entre l'État et la ville de Marseille pas toujours facile à établir

En juin 2022, un contrat métropolitain de relance et de transition écologique (CMRTE) a été signé entre l'État et la métropole Aix-Marseille Provence pour la période 2022-2026.

Ce contrat a pour vocation d'intégrer au sein d'un même contrat les différents dispositifs et politiques partenariales de l'État :

- le protocole entre la présidente de la Métropole et le préfet signé le 14 décembre 2021 concernant le volet « mobilité » du plan Marseille en grand ;

- 18 contrats de ville signés le 7 janvier 2016 ;

- 5 conventions concernant le dispositif Petites villes de demain (Port Saint Louis du Rhône, Berre l'Étang, Trets, Sénas et Lambesc/la Roque-d'Anthéron) ;

- le Pacte de territoire de Gardanne/Meyreuil signé le 22 décembre 2020 qui vise à mettre en oeuvre un projet de territoire qui fera émerger des projets économiques à même de compenser la perte d'activité liée à la fermeture de la centrale à charbon ;

- le Projet partenarial d'aménagement (PPA) pour le centre-ville de Marseille, en faveur de la revitalisation du centre-ville et de la lutte contre l'habitat indigne ;

- l'opération d'intérêt national Euromediterranée, vecteur du développement de l'attractivité et du rayonnement de la métropole et de la ville de Marseille.

Au total, le contrat mentionne 185 projets d'investissement pour la Métropole et les villes qui la composent, dont le coût total est estimé à près de 4 milliards d'euros.

Bien que signé après l'annonce du plan Marseille en grand, l'articulation entre le CMRTE et ce dernier n'est pas pleinement assurée et des divergences sont également identifiées. En effet, du fait de la dénomination différente de certaines actions, d'éléments supplémentaires ou absents dans le CMRTE par rapport aux annonces du plan Marseille en grand, et enfin d'éléments de chiffrages qui varient de l'un à l'autre, il est, une fois encore, difficile de croiser les données afin d'avoir une analyse fiable des actions et de leur financement.

3. Un suivi à dimension gouvernementale mais pour le moins succinct
a) Un suivi assuré par de nombreux acteurs....

Le suivi du plan Marseille en grand est assuré à plusieurs niveaux par des acteurs différents.

Au niveau national, un comité de pilotage général, présidé par la Secrétaire d'État à la ville et à la citoyenneté, en charge du plan Marseille en Grand, s'est tenu le 24 novembre 2023, en présence des parlementaires et des opérateurs (SPEM, établissement public d'aménagement (EPA) Euromediterranée, SPAL-IN7(*) Centre-Ville...) pour un suivi du plan dans sa globalité.

Un prochain comité de pilotage général est prévu à la fin du mois de mai afin de respecter une périodicité biannuelle.

Cependant, force est de constater qu'avant novembre 2023, soit pendant plus de deux ans, aucun comité de pilotage n'a été organisé alors même que certaines actions étaient annoncées avec une réalisation à brève échéance et nécessitaient donc un suivi précoce.

Parallèlement, des réunions interministérielles avec les cabinets du Président de la République et du premier Ministre sont organisées pour assurer un suivi transversal et cadencer le rythme de déploiement du plan Marseille en Grand. Concernant le volet « écoles » ces réunions interministérielles ont en principe lieu une fois par mois sur la base d'un tableau de suivi.

Toutefois, malgré la demande adressée au cabinet du Premier ministre, aucun compte rendu n'a été transmis aux rapporteurs spéciaux, de même que les dates de ces réunions n'ont pas été communiquées. Il a seulement été précisé que la société publique des écoles marseillaises (SPEM) a été constituée en février 2022, que son directeur a été nommé en septembre de la même année et que les premiers mois suivants ont été dédiés à la constitution de l'équipe et à la structuration administrative et financière de la société. Les rapporteurs spéciaux en déduisent donc que les premières réunions mensuelles ont été organisées à partir de début 2023 soit 18 mois après le lancement du plan.

Au niveau local, le suivi du plan Marseille en Grand est assuré par le Préfet de département, appuyé par la sous-préfète en charge spécifiquement du plan, à travers plusieurs instances de suivi :

- comité de suivi interne aux services de l'État, présidé par la sous-préfète, composé des chefs de file désignés sur chacun des volets (DDTM, Préfecture de police, ARS PACA, DASEN, DDETS, CNC, SPEM...) ;

- des réunions de suivi hebdomadaires pour le volet bâtimentaire du plan « écoles » ;

- des relations bilatérales avec les opérateurs et les collectivités territoriales (exemple : avec la métropole pour le GIP mobilité, la Ville pour le plan écoles, le CNC pour le volet Cinéma, etc.)

La sous-préfète participe également aux comités de pilotage organisés par les chefs de file des différents volets (écoles, santé, rénovation urbaine...). Enfin, le préfet et la sous-préfète sont présents au conseil d'administration du GIP mobilité et de la SPEM. 

La secrétaire d'État a également participé :

- au conseil d'administration de la Société des écoles de Marseille (SPEM) le 24 février 2024 ;

- au GIP mobilités le 14 mars 2024 ;

- à la revue de projets ANRU le 22 mars 2024.

Dans ce cadre, les services préfectoraux tiennent à jour un tableau de suivi des mesures du plan Marseille en Grand, ainsi qu'un suivi budgétaire des crédits consommés en AE et CP, régulièrement actualisé par la préfecture et par les services pilotes sur chaque sujet.

Enfin, des réunions bilatérales sont organisées toutes les semaines entre le cabinet de la secrétaire d'État (directeur de cabinet adjoint) et la sous-préfète chargée du suivi du plan Marseille en Grand pour faire le point sur les dossiers et les prochaines grandes échéances à organiser (revue de projets, GIP, CA....). Ces réunions prennent la forme de point d'étape mais demeurent relativement informelles et ne font l'objet d'aucun ordre du jour ou compte rendu.

b) ...mais qui pour autant ne permet pas une vision précise de l'avancement des projets

Au niveau gouvernemental le suivi du plan Marseille en grand prend essentiellement la forme d'un tableau qui récapitule par domaine, les objectifs, les annonces, l'échéance initiale ainsi que l'état d'avancement.

Pour autant, ce tableau est très succinct et se limite à indiquer « réalisé » ou « en cours » sans précision en cas de non réalisation alors que l'échéance est passée. De même, quand l'action est « en cours », aucune mention n'est faite sur le niveau d'avancement ou sur un éventuel décalage du calendrier.

Aucun compte rendu de réunion n'a été transmis à l'exception de celui relatif au comité de pilotage général. Ce dernier est d'ailleurs assez lacunaire. Dans l'hypothèse où des documents plus précis auraient été diffusés lors de ce comité, ils n'ont pas été remis aux rapporteurs spéciaux.

c) La nomination tardive d'une sous-préfète en charge du suivi du plan

Il faut attendre octobre 2022 soit plus d'un an après le lancement du plan Marseille en grand pour qu'une sous-préfète soit nommée en charge spécifiquement du suivi du plan.

En effet, en première intention, le suivi du plan a été confié au préfet à l'égalité des chances. Face à l'ampleur du projet, une sous-préfète a ensuite été dédiée à la politique de la ville dont une des missions était le suivi du plan Marseille en grand. Enfin, une sous-préfète a été nommée spécifiquement pour ce suivi.

Si les rapporteurs spéciaux saluent la désignation d'une personne exclusivement dédiée au plan, ils s'étonnent toutefois du temps écoulé entre le lancement de ce chantier colossal par le Président de la République et la nomination d'une sous-préfète alors même que, dès le commencement, l'ampleur du travail de coordination et de suivi ne faisait pas de doute compte tenu des montants annoncés, d'une réalisation prévue sur plus de 10 ans et du nombre de secteurs et d'acteurs concernés.

C. UN EFFORT BUDGÉTAIRE ANNONCÉ DE PRÈS DE 5 MILLIARDS D'EUROS IMPOSSIBLE À RECONSTITUER

1. Une absence de budget consolidé fiable qui se traduit par d'importantes divergences de chiffrage
a) Les données transmises par l'État : des différences entre le chiffrage par le cabinet du secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté et celui de la préfecture

Les crédits alloués par l'État au plan Marseille en grand ne sont pas suivis de manière consolidée. Il en résulte que le montant total de l'effort financier de l'État est non seulement très peu fiable mais également évolutif dans le temps.

Ainsi, les sites internet de l'Élysée et celui de la préfecture des Bouches-du-Rhône évoquent 5 milliards d'euros sans toutefois faire la distinction entre les crédits nouveaux spécifiquement ouverts à cette fin, les crédits existants déjà au sein des programmes budgétaires et les garanties d'emprunts ou avances remboursables.

D'après un tableau transmis par le secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté, les montants du plan Marseille en grand se décomposent comme suit par axe :

Composition des crédits alloués au plan Marseille en grand

(en euros)

Axes

Annonces

Montants annoncés

Sécurité/police

Installation de 500 caméras de vidéoprotection dans les quartiers Nord et sur les lieux de trafic

Chiffrage en cours

Moderniser l'équipement des forces de l'ordre

8 000 000 €

Nouvel hôtel de police

150 000 000 €

Commissariat commun des 13/14ème arrondissements

8 500 000 €

Logement

Rénovation urbaine ANRU

650 000 000 €

Santé

Réhabilitation et soutien aux hôpitaux

799 000 000 €

Éducation / Jeunesse

Rénovation des écoles

1 050 000 000 €

Écoles innovantes et microstructures

2 500 000 €

Emploi

Carrefours de l'entreprenariat

17 700 000 €

Jeunes créateurs

Cinéma

Plan de modernisation

25 000 000 €

Cinéfabrique

Chiffrage en cours

Cinémathèque

Chiffrage en cours

Base logistique

Chiffrage en cours

Mobilités

Mobilité

1 000 000 000 €

LNPCA

1 400 000 000 €

Extension et desserte aérogare Marignane

Chiffrage en cours

Environnement

Odysséo

Chiffrage en cours

TOTAL

5 110 700 000,00 €

Source : Commission des finances à partir des réponses du secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté

Cependant, l'analyse des réponses du secrétariat d'État permet un chiffrage plus fin qui ne correspond ni aux annonces du Président de la République ni aux éléments chiffrés transmis par la préfecture des Bouches-du-Rhône.

Tableau comparatif des crédits alloués aux différents axes
du plan Marseille en grand

(en euros)

Source : Commission des finances à partir des réponses du secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté, de la préfecture et du discours du Président de la République

Selon les réponses transmises, le total des mesures pour lesquels des montants ont été annoncés est donc compris entre 2,9 et 5,1 milliards d'euros.

b) Des données encore différentes dans le contrat métropolitain de relance et de transition écologique (CMRTE)

La maquette financière du CMRTE, signé entre la métropole et l'État, présente, quant à elle, des chiffres quelques peu différents pour les seuls domaines relevant de la compétence de la métropole.

Ainsi, sont prévus dans le contrat au titre du plan Marseille en grand un total de 2,4 milliards d'euros, en provenance de l'État, composés comme suit :

- 256 millions d'euros de crédits et 744 millions d'avances remboursables pour les mobilités alors que d'après les données transmises par la préfecture des Bouches-du-Rhône, 500 millions seront consacrés aux transports ;

- 600 millions d'euros pour la rénovation urbaine contre 650 millions d'euros évoqués par la préfecture et le secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté ;

- 14,7 millions d'euros pour l'emploi des jeunes ;

- 540 millions d'euros au titre du Ségur de la santé pour moderniser et assainir la situation financière des établissements de santé ;

- 239 millions d'euros spécifiquement pour l'AP-HM ;

- 28 millions d'euros pour les investissements du quotidien des établissements de santé et médico-sociaux soit un total de 807 millions d'euros pour la santé contre 766,9 millions d'euros dans les chiffres de la préfecture et du secrétariat d'État.

En ajoutant le milliard d'euros prévu pour les écoles, le total de 5 milliards d'euros n'est toujours pas atteint non plus dans le CMRTE.

Il en résulte que le montant total du plan, de 5 milliards d'euros, semble relever largement d'effets d'annonce.

2. Une origine des crédits pas toujours aisée à identifier

L'analyse de l'origine des crédits, en s'appuyant sur les réponses transmises, aboutit quant à elle à des montants encore différents de sorte que, là encore, il est impossible, à ce jour, de reconstituer précisément les 5 milliards d'euros annoncés.

En outre, une large partie de l'enveloppe provient de crédits déjà existants qui seront fléchés sur les actions du plan Marseille en grand, de montants correspondant à des garanties d'emprunts (650 millions d'euros pour les écoles) ou encore à des avances remboursables (744 millions d'euros pour les transports).

Ainsi, d'après les éléments transmis par le secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté aux rapporteurs spéciaux, les crédits alloués au plan Marseille en grand proviendraient des programmes suivants :

Origine des crédits affectés au plan Marseille en grand

(en millions d'euros)

Source : Commission des finances à partir des réponses du secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté

AE : autorisations d'engagement / FIPDR : fonds de prévention de la délinquance et de la radicalisation / ONDAM : Objectif national de dépenses d'assurance maladie / MIG : mission d'intérêt général8(*) / FIR : fonds d'intervention régional9(*) / COPERMO : comité interministériel de performance et de l'offre de soins (comité supprimé à l'issu du Ségur de la santé en juillet 2020).

À ces montants, doivent être ajoutés les garanties d'emprunts à hauteur de 650 millions d'euros pour le volet « écoles ». À l'inverse, les crédits dédiés à l'avance remboursable de 744 millions d'euros pour le volet « transport », initialement annoncés, ont été supprimés car transformés, en partie, en subventions.

Concernant le volet « santé », des ressources extra budgétaires seraient encore attendues pour des montants restant en discussion.

De surcroit, dans les faits, les 500 millions d'euros pour les transports semblent portés directement par l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), sur ses ressources fiscales propres, et non résulter de dotations supplémentaires de l'État à l'établissement public.

Concernant les 650 millions d'euros de l'ANRU, 66 millions d'euros seront consacrés à la rénovation des écoles de sorte qu'ils sont comptabilisés deux fois dans le tableau ci-dessus et dans les chiffrages du secrétariat d'État ou de la préfecture.

Enfin, l'affectation de 169 millions d'euros prévus pour la modernisation de l'AP-HM a été décidée lors du comité interministériel de performance et de l'offre de soins en janvier 2020 soit plus d'un an avant le lancement du plan Marseille en grand.

Au total, les chiffres transmis ne permettent pas d'obtenir un total de 5 milliards d'euros. Certaines actions ne sont pas chiffrées. De surcroit, des crédits annoncés comme nouveaux étaient déjà actés antérieurement au lancement du plan ou proviennent de fonds existants, sans pouvoir vérifier si ces derniers ont été abondés spécifiquement pour le plan Marseille en grand.

3. Des crédits évolutifs ventilés, sur 10 programmes budgétaires et trois opérateurs de l'État, et pas toujours traçables

Pour les crédits qui ont pu être identifiés, ils proviennent de 10 programmes budgétaires, de trois opérateurs (AFTIF, ANRU et ARS) ce qui rend leur suivi global particulièrement complexe voire impossible.

Par ailleurs, les montants alloués varient au gré des annonces du Président de la République.

Ainsi, lors de sa deuxième visite à Marseille, le Président de la République a indiqué que la subvention pour les transports attribuée à la Métropole Aix-Marseille-Provence allait être doublée (passant de 256 à 500 millions d'euros). Les avances remboursables de 744 millions d'euros semblent pour leur part, d'après les éléments transmis par la préfecture des Bouches-du-Rhône, avoir été supprimées.

Autre exemple de difficultés à tracer les crédits, la reprise d'une partie de la dette de l'AP-HM, évoquée dans le discours du Président de la République pour un montant de 233 millions d'euros, n'apparait dans aucune des réponses transmises aux rapporteurs spéciaux.

Enfin, le volet « cinéma et audiovisuel » du plan prévoit un investissement total de l'État de 22,5 millions d'euros sur les trois prochaines années sans aucune précision sur la provenance de ces crédits. Cet effort de l'État doit être complété par les lauréats de l'appel à projets national « Grande fabrique de l'image » du plan France 2030 sans indication sur le nombre de projets (et leur montant) qui pourraient être retenus dans le cadre du plan Marseille en grand. Le procédé pourrait d'ailleurs surprendre dans la mesure où il est normalement impossible de connaitre ex-ante les projets qui seront retenus dans le cadre d'un appel à projets. Or, il semblerait que des crédits du plan France 2030 seront donc en partie, de fait, fléchés sur le plan Marseille en grand sans même connaitre la qualité des projets qui seront déposés.

II. LE VOLET « ÉCOLES/ÉDUCATION » : UNE COMPOSANTE ESSENTIELLE DU PLAN MARSEILLE EN GRAND POUR RÉNOVER ET MODERNISER LES ÉCOLES MARSEILLAISES

A. UNE DÉGRADATION GÉNÉRALE ET ANCIENNE DES ÉCOLES MARSEILLAISES À L'ORIGINE DU VOLET « ÉCOLES » DU PLAN MARSEILLE EN GRAND

1. Un état des lieux préoccupant qui touche l'ensemble des communes mais qui est particulièrement marqué à Marseille
a) Un patrimoine ancien et énergivore

De manière générale, le patrimoine immobilier scolaire des communes, majoritairement construit avant 1975, est relativement ancien, mal isolé et, de fait, énergivore.

La mission d'information sénatoriale « Le bâti scolaire à l'épreuve de la transition écologique » précise dans son rapport que les années 1960-1970 ont été marquées par la construction de nombreux bâtiments scolaires rendue nécessaire par l'évolution démographique et l'allongement de 14 à 16 ans de la scolarité. Il en résulte que, selon les chiffres du ministère de l'éducation nationale, les deux tiers de la surface-plancher des cités scolaires sont antérieurs à 1970.

b) Le cas particulier de la ville de Marseille

Le patrimoine municipal scolaire de Marseille compte près de 470 écoles recevant les 76 300 enfants scolarisés sur son territoire.

Ce parc scolaire a accumulé dans le temps une dette d'entretien et de maintenance de plus en plus importante, rendant le bâti des écoles vétuste, parfois dangereux pour ses usagers, peu adapté au changement climatique, sensible aux variations de température, ne résistant plus aux intempéries et n'ayant pas été adapté et positionné en fonction de l'évolution urbaine de la Ville.

L'état de délabrement de certains établissements était tel que le 1er février 2016, le journal Libération titrait « Les écoles à Marseille, la honte de la République : locaux insalubres, papier toilette réclamé aux parents, cantines sous-dimensionnées, chauffage défectueux... Les établissements maternels et primaires de la cité phocéenne atteignent un état de délabrement ahurissant ».

De surcroit, l'aspect architectural a parfois primé sur le confort et les impératifs climatiques. À cet égard, le rapport de la mission d'information sénatoriale « Le bâti scolaire à l'épreuve de la transition écologique » met en exergue, reprenant les mots de Pierre-Marie Ganozzi, adjoint au maire à Marseille, chargé du plan écoles, du bâti, de la construction, de la rénovation et du patrimoine scolaire : « des architectes se font plaisir en dessinant de magnifiques baies vitrées orientées plein sud ! C'est le cas d'une école qui a été construite à Marseille : c'est beau, mais il fait 35 degrés dans les salles de classe dès le mois d'avril ... Il nous faut adapter l'architecture au climat ».

Ainsi, le patrimoine scolaire, peu ou pas entretenu, présente des problèmes structurels conséquents. Véritables passoires thermiques, certaines écoles dépassaient largement les seuils de consommation énergétique moyens avec une surconsommation estimée à 20 000 mégawatts par an (soit la consommation électrique annuelle totale d'une ville de 7 000 habitants).

2. Un plan « écoles » antérieur au plan Marseille en grand

Consciente de cet état des lieux, la ville de Marseille a donc décidé de mettre en place un important plan de rénovation dès 2017. Ainsi, par délibération du 16 octobre 2017, l'ancienne mandature avait approuvé le principe du recours à un accord-cadre de partenariat pour la démolition de 31 établissements dénommés GEEP, du nom de leur concepteur-réalisateur « le Groupement d'études et d'entreprises parisiennes » et la construction, en lieu et place de ces écoles, de 28 nouveaux établissements, ainsi que la construction de six autres nouveaux établissements. Cette délibération a été cependant annulée par le TA de Marseille, décision confirmée ensuite par la CAA de Marseille.

La nouvelle majorité municipale, en place à compter de 2020, a donc souhaité relancer un programme de rénovation et de construction de ses écoles afin de couvrir ses besoins en bâtiments scolaires avec un plan Écoles incluant non seulement les écoles dites GEEP mais également les autres types d'écoles (Egger, Ferry...).

Il en résulte que la ville de Marseille s'est engagée, dès 2020, à rénover, réhabiliter et construire des écoles à la fois mieux adaptées au changement climatique et à la configuration de la ville, et conformes aux normes de sécurité.

Face à l'importance des besoins, notamment financiers, pour mener à bien ces rénovations sur l'ensemble des écoles marseillaises, le maire de la ville a demandé le soutien de l'État.

Les annonces du Président de la République, le 2 septembre 2021, ne sont donc que l'aboutissement d'un travail mené en amont par la commune et appuyé sur des études portant sur l'état des écoles afin de cibler la nature des rénovations à mettre en oeuvre.

3. De nombreuses études menées par la ville de Marseille dès 2019 

Pour la réalisation du plan « écoles », la Ville a ainsi réalisé diverses études et diagnostics :

- une étude sur la projection des besoins scolaires consistant en la réalisation d'une prospective démographique s'appuyant sur des éléments de compréhension des phénomènes passés à court terme (2011 - 2018) et à long terme (1990 -2016). Cette étude a permis d'analyser l'évolution des effectifs scolaires qui peut s'avérer déconnectée de l'évolution de la population. Une mise à jour annuelle de cette prospective est réalisée afin de permettre à la ville d'adapter son parc en fonction de l'évolution des besoins scolaires. Sur ce point relatif au besoin du nombre de classe au regard des perspectives d'évolution de la population scolaire, les secteurs d'intervention prioritaires ressortant de ces différents diagnostics sont les 3e, 13e, 14e et 15e arrondissements ;

- un audit fonctionnel des écoles : il résulte de cet audit une grande disparité des mètres carrés par enfant sur les sites de la Ville avec un nombre important d'écoles où les espaces partagés sont quasiment inexistants ;

- un diagnostic technique du parc scolaire qui souligne l'ancienneté et la vétusté du parc scolaire. Scindé en deux documents (l'un portant sur les écoles des 2e, 3e, 4e, 5e, 13e, 14e, 15e et 16e arrondissements et l'autre portant sur les écoles des 1er, 6e, 7e, 8e, 9e, 10e, 11e et 12e arrondissements), ce diagnostic met en exergue que 341 écoles connaissaient de graves problèmes d'isolation, 188 écoles présentent des problèmes de chauffage chronique, 140 écoles connaissent une surexposition au bruit, et dans 112 écoles les sanitaires étaient dans un état de vétusté avancé.

Les principales conclusions de ces études soulignent une situation préoccupante pour un tiers des écoles publiques de la ville.

B. LES OBJECTIFS MULTIPLES DU VOLET « ECOLES/EDUCATION » DU PLAN MARSEILLE EN GRAND : DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE À LA RÉDUCTION DES INÉGALITÉS SOCIALES

1. Un objectif premier de mise en sécurité et de mise aux normes

Les études réalisées par la ville de Marseille en 2019 ont permis de mettre en exergue un certain nombre de non-conformité des bâtiments générant des risques pour les occupants. Ainsi :

- des problèmes d'infiltrations sont constatés dans 12,7 % des écoles ;

- 17 % des écoles présentent un avis négatif de la commission de sécurité ;

- 23,8 % des écoles présentent des sanitaires défaillants ;

- 30 % des écoles subissent une pollution sonore ;

- 72,5 % des écoles présentent des problèmes de menuiseries ;

- 68,9 % des écoles connaissent des défauts d'étanchéité.

Le principal objectif du volet « écoles » du plan Marseille en grand consiste donc en une mise aux normes sécuritaires et sanitaires.

2. Une logique d'amélioration de la performance énergétique : la nécessaire rénovation du patrimoine immobilier scolaire dans un contexte de réchauffement climatique

L'un des objectifs du volet « écoles » du plan Marseille en grand est la rénovation du bâti scolaire pour améliorer les performances énergétiques. Cette volonté résulte de trois nécessités complémentaires : obligations règlementaires, économies budgétaires et adaptation au changement climatique.

En effet, les collectivités territoriales sont assujetties aux obligations d'actions d'économie d'énergie dans les bâtiments tertiaires (dispositif éco-énergie tertiaire) dans les conditions prévues par les articles L. 174-1 et R. 174-22 à R. 174-32 du code de la construction et de l'habitation (CCH), au même titre que tous les propriétaires et preneurs à bail des bâtiments à usage tertiaire.

Ainsi, l'article L. 174-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit que des actions de réduction de la consommation d'énergie finale doivent être mises en oeuvre dans les bâtiments, parties de bâtiments ou ensembles de bâtiments existants à usage tertiaire, afin de parvenir à une réduction de la consommation d'énergie finale pour l'ensemble des bâtiments soumis à l'obligation d'au moins 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050, par rapport à 2010.

Ces actions s'inscrivent en cohérence avec les objectifs fixés par la stratégie nationale de développement à faible intensité de carbone, mentionnée à l'article L. 222-1 B du code de l'environnement qui précise dans son III que « l'État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics respectifs prennent en compte la stratégie bas-carbone dans leurs documents de planification et de programmation qui ont des incidences significatives sur les émissions de gaz à effet de serre ».

Enfin, la révision de la directive européenne sur l'efficacité énergétique (DEE), actée par le Conseil de l'Europe le 25 juillet 2023, vise à réduire de 11,7 % en 2030 la consommation finale d'énergie au niveau de l'Union européenne. Les nouvelles règles fixent une obligation spécifique pour le secteur public. Les États membres seront, en effet, tenus de rénover chaque année au moins 3 % de la surface totale au sol des bâtiments appartenant à des organismes publics au niveau NZEB (Near Zero Energy Building10(*)).

Par ailleurs, la performance énergétique des bâtiments scolaires est devenue une préoccupation majeure pour les élus locaux en ce qu'elle pèse lourdement sur les budgets des collectivités territoriales.

Ainsi, réduire la consommation énergétique des bâtiments scolaires offre l'opportunité de réduire les coûts énergétiques globaux des collectivités.

La consommation énergétique des bâtiments scolaires peut varier considérablement en fonction de divers facteurs, tels que la date de construction, la taille et la conception des bâtiments, le nombre d'occupants, le climat local, et le niveau d'utilisation des équipements.

D'après l'étude quinquennale réalisée en 2019 par l'ADEME sur les dépenses énergétiques des collectivités territoriales, pour les seules communes, les bâtiments scolaires représentent 30 % de la consommation énergétique des bâtiments communaux.

Part de la consommation énergétique par type de bâtiments
pour les communes

Source : Rapport ADEME, sur les dépenses énergétiques des collectivités locales - 2019 

Les postes de consommation énergétique les plus importants dans les bâtiments scolaires sont généralement le chauffage (jusqu'à 40 %), la climatisation (jusqu'à 15-20 %), l'éclairage (jusqu'à 20 %) et les équipements électroniques.

Enfin, au-delà des arguments et motivations règlementaires et économiques, les collectivités territoriales ont une responsabilité forte concernant la lutte contre le réchauffement climatique au regard du poids de leur patrimoine immobilier dans la consommation énergétique totale au niveau national.

Des actions fortes et rapides de rénovation du patrimoine immobilier scolaire sont donc de nature à avoir un impact significatif sur la consommation totale d'énergie et donc sur les émissions de CO2.

Dès lors, ces rénovations sont une nécessité, non seulement pour réguler les dérèglements climatiques à long terme, mais également pour faire face au réchauffement climatique à court terme et ainsi améliorer le niveau de confort des élèves et enseignants fréquentant les établissements scolaires.

En effet, les récentes canicules qui ont touché la quasi-totalité de la France métropolitaine dès le mois de juin 2023 posent la question de l'adaptation du bâti scolaire aux vagues de chaleur qui devraient se répéter et s'intensifier sur des périodes de plus en plus longues, entre les mois de mai et octobre.

L'objectif affiché par la ville est ainsi de réduire de 40 % la facture énergétique des écoles de la ville afin d'économiser chaque année l'équivalent de la consommation d'une ville de 20 000 habitants.

3. Une volonté de réduire les inégalités sociales

D'après les études menées précitées, les difficultés bâtimentaires sont essentiellement concentrées dans les arrondissements du centre et du nord de la ville.

Plus précisément, la majorité des sites considérés comme prioritaires pour la rénovation sont situés entre le 1er et le 7e arrondissements pour des enjeux à dominante fonctionnelle (notamment en raison d'un manque de place dans les classes ou dans les locaux communs) et dans les arrondissements du nord et du nord est (13e au 16e arrondissements) avec des enjeux à dominantes techniques (notamment de conformité aux normes).

Ainsi, les rénovations pour priorités fonctionnelles et techniques se répartissent comme suit :

Répartition par arrondissement du nombre de sites à enjeux fonctionnels nécessitant des travaux très lourds et lourds

Source : étude Menighetti sur les sites à enjeux - cahier 1 synthèse de l'analyse

Répartition par arrondissement du nombre de sites à enjeux techniques nécessitant des travaux très lourds et lourds

Source : étude Menighetti sur les sites à enjeux - cahier 1 synthèse de l'analyse

Il en résulte qu'une inégalité est bien constatée entre les arrondissements les plus défavorisés situés au nord de la ville et les arrondissements plus favorisés sociologiquement situés au sud.

Répartition générale des sites à enjeux

Source : étude Menighetti sur les sites à enjeux - cahier 1 synthèse de l'analyse

Dans ce contexte, l'objectif affiché du volet « écoles » du plan Marseille en grand est donc également celui d'une diminution des inégalités sociales et d'un égal accès à l'enseignement, dans de bonnes conditions, de toutes les catégories sociales de la ville, indépendamment de leur lieu de résidence.

Parallèlement à ces trois objectifs principaux, la rénovation des écoles marseillaises devra tenir compte de la pédagogie innovante (cf. infra partie sur l'école du futur) c'est-à-dire que les nouveaux locaux devront pouvoir évoluer de manière agile pour s'adapter à de nouvelles méthodes d'enseignement. Par ailleurs, elle devra intégrer des équipements sportifs repensés et adaptés.

4. Un plan « écoles » scindé en deux parties et basé sur une importante consultation des acteurs

Le plan « écoles » de Marseille couvre l'ensemble de la ville. Il s'articule autour de deux types d'opération :

- une partie ciblant 188 écoles (réparties sur 109 sites) : les opérations concernant ces écoles sont financées par la Ville et l'État via la société publique des écoles marseillaises (SPEM) dans le cadre d'un accord cadre de marché de partenariat passé entre la ville, l'État et la SPEM. Elles portent sur des restructurations lourdes d'écoles déjà bâties mais également sur la création de nouvelles écoles. Cette partie correspond au périmètre du volet « écoles » du plan Marseille en grand ;

- une partie ciblant 304 écoles11(*) : ces opérations sont principalement supportées financièrement par la ville et réalisées par ses services. Elles portent également sur des restructurations et des rénovations plus légères d'écoles. Ces opérations sont hors champ de l'accord cadre de marché de partenariat.

Dans ce cadre, les opérations de restructuration correspondent à des opérations de constructions neuves et à des opérations de réhabilitation lourdes impliquant souvent la restructuration complète d'un site alors que les opérations de rénovation correspondent à des travaux de moindre ampleur qui peuvent ne concerner qu'une partie d'un site.

Les opérations dont le niveau d'intervention implique une opération de construction neuve ou une opération de réhabilitation lourde concernant la totalité du site ont été intégrées à la première partie du plan de la ville c'est-à-dire aux 188 écoles ciblées par le plan Marseille en grand.

Le nombres d'écoles de chaque partie du plan (volet « écoles » du plan Marseille en grand et écoles rénovées par la seule ville de Marseille) a été transmis aux rapporteurs spéciaux à titre informatif et pourrait évoluer au cours de la réalisation du plan « écoles » de la ville de Marseille. En effet, les listes ne peuvent être considérées, à ce stade, comme définitives dans la mesure où la prévision d'un plan sur dix ans requiert des ajustements permanents. L'état des bâtis scolaires est réévalué de façon périodique et les prévisions des effectifs scolaires doivent être réinterrogées, notamment en fonction des opérations urbaines.

Ce vaste plan de rénovation est conduit en concertation avec les usagers de l'école : enseignants, personnel municipal, parents d'élèves et enfants. Dans ce cadre, 3 000 heures de concertation ont déjà été conduites afin de faire émerger un nouveau référentiel des écoles marseillaises et recueillir la parole des acteurs de l'école.

5. Un volet pédagogique pour faire « l'école du futur » en complément de la rénovation bâtimentaire

Au-delà de la rénovation des écoles, le Président de la République a annoncé, lors de son discours de septembre 2021 (cf. supra), le lancement de projets pour « l'école du futur » visant à donner plus de libertés et d'autonomie aux équipes pédagogiques et aux directeurs d'établissements.

Le volet éducation du plan Marseille en grand a pour objectif de créer des écoles « laboratoires » qui permettront « d'inventer les écoles du futur en réinventant la façon d'enseigner et les méthodes d'apprentissage »12(*).

« L'école du futur » permet ainsi aux établissements de monter un projet innovant autour de la culture, des langues, de l'environnement ou des sciences en donnant aux directeurs d'école la possibilité de participer au recrutement de leur équipe pédagogique.

Si les possibilités pédagogiques sont nombreuses, les objectifs sont similaires pour tous les projets innovants :

- la prise en compte des besoins scolaires des élèves et de leur bien-être ;

- le lien entre la pratique pédagogique et les locaux ;

- l'articulation et l'organisation des différents temps de l'enfant ;

- l'amélioration des apprentissages.

Les projets s'accompagnent donc d'une réflexion sur l'organisation de l'espace avec des classes flexibles, des classes spécialisées dédiées à certains apprentissages, des cours de récréation conçues comme des espaces pédagogiques.

C. UN MONTAGE BUDGÉTAIRE PARTICULIÈREMENT COMPLEXE

1. Une origine multiple des crédits alloués au volet « écoles » du plan Marseille en grand

Afin de rénover et réhabiliter les 188 écoles retenues dans le volet « écoles » du plan Marseille en grand, une enveloppe de 254 millions d'euros en AE a été ouverte sur les crédits de la mission « Relations avec les collectivités » en loi de finances initiale pour 2022.

Le 14 décembre 2021, le Premier ministre a validé une augmentation de 150 millions d'euros.

Cette enveloppe budgétaire a été complétée par une garantie de 650 millions d'euros d'emprunts.

Par ailleurs, la ville de Marseille contribuera également financièrement aux travaux réalisés dans ces 188 écoles du plan Marseille en grand.

Il en résulte que le montant annoncé pour ce volet s'établit à 1,05 milliard d'euros sans qu'il soit possible, à ce stade, comme pour le financement de l'ensemble du plan Marseille en grand, de reconstituer l'ensemble des crédits.

a) Des crédits « frais » ouverts en loi de finances initiale pour 2022...

Par amendement du Gouvernement adopté lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2022, les crédits du programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ont été abondés de 254 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 6 millions d'euros en crédits de paiement (CP) afin de traduire l'engagement financier de l'État dans le cadre du volet « écoles » du plan Marseille en grand lancé un mois auparavant par le Président de la République.

Ces crédits ont vocation à financer une partie de la rénovation des 188 écoles sélectionnées.

Afin de formaliser les modalités de versement de cette subvention exceptionnelle, une convention a été signée le 9 octobre 2023 entre l'État et la SPEM. 

Par ailleurs, concernant l'aspect pédagogique (« écoles du futur »), les documents transmis aux rapporteurs spéciaux font état de 3,5 millions d'euros attribués au rectorat d'Aix-Marseille, pour 2022, à partir de la mission « Enseignement scolaire » afin de financer :

- les projets pédagogiques innovants à hauteur de 2,5 millions d'euros en provenance du programme 140 « Enseignement scolaire public du premier degré » ;

- les projets pédagogiques pour 20 microstructures à hauteur de 1 million d'euros en provenance du programme 141 « Enseignement scolaire public du second degré ».

Une fois les 2,5 millions d'euros destinés aux projets pédagogiques innovants entièrement engagés, le financement se poursuivra à partir des crédits ouverts sur le fonds d'innovations pédagogiques (FIP du conseil national de la refondation « éducation ») doté de 500 millions d'euros sur 5 ans (entre 2022 et 2027) et porté par la mission « Investir pour la France de 2030 ».

Les crédits alloués à l'aspect pédagogique du volet « écoles » du plan Marseille en grand ont été présentés par le secrétariat d'État et par la préfecture comme des crédits nouveaux. Cependant, l'analyse des projets annuels de performances et des amendements déposés lors de l'examen de la LFI pour 2022 ne permettent pas de confirmer l'ouverture de crédits. Il semble plus probable que les 3,5 millions d'euros susmentionnés préexistaient sur les programmes 140 et 141 et seront fléchés pour les actions innovantes.

Cependant, le coût total du volet pédagogique pourrait, dans les faits être bien plus élevé que les 3,5 millions d'euros affichés en crédit hors titre 2.

En effet, selon les réponses transmises par le ministère de l'éducation nationale lors du projet de loi de finances pour 2024, des moyens importants ont également été mobilisés en dépenses de personnels sans que les montants n'ait été précisés. Ainsi, sur le programme 140 :

- 101 emplois d'enseignants du premier degré public ;

- 9 emplois de psychologues de l'éducation nationale, spécialité « éducation, développement et apprentissage » ;

- 1 emploi d'inspecteur de l'éducation nationale (IEN) pour assurer la coordination du projet appel à manifestation d'intérêt (AMI) du PIA innovation dans la forme scolaire ;

- 60 indemnités pour missions particulières (IMP).

Par ailleurs, pour l'appui aux microstructures créées dans les collèges et les lycées, le programme 141 a mobilisé :

- 21 emplois d'enseignants du second degré public (coordonnateurs microstructures) ;

- 750 heures supplémentaires années (HSA) ;

- 1 emploi d'IEN, spécialité information et orientation (IEN-IO).

Enfin, à partir du programme 230 « Vie de l'élève », 55 emplois d'assistants d'éducation et 4 emplois d'assistants de service social ont été créés au profit des écoles et 1 emploi de conseiller principal d'éducation, 1 emploi de personnel infirmier et 21 emplois d'assistants d'éducation ont été créés pour l'accompagnement de la création de microstructures.

b) ...complétés par des recyclages de crédits existants sans pour autant garantir le respect de l'enveloppe globale sur laquelle le Gouvernement s'était engagé...

En sus des 254 millions d'euros ouverts en LFI 2022 sur le programme 119, la rénovation des 188 écoles ciblées par le plan Marseille en grand bénéficiera de 11,7 millions d'euros de dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) pour 3 écoles, de 3,15 millions d'euros de dotation politique de la ville (DPV) pour 9 établissements ainsi que de 66 millions d'euros de l'agence nationale de rénovation urbaine (ANRU) pour les trois premiers marchés subséquents passés par la SPEM (cf. infra).

Le total des subventions de l'État pour la partie rénovation bâtimentaire du volet « écoles » du plan Marseille en grand s'élève donc à 334,85 millions d'euros alors que les financements mentionnés dans les réponses transmises par le secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté et la ville de Marseille sont de 400 millions d'euros. Il existe donc un delta de plus de 65 millions d'euros sans aucune précision quant à leur provenance dans la mesure où l'origine de ces crédits n'a pas encore été actée.

Dans ce contexte, les rapporteurs spéciaux ne peuvent qu'inciter l'État à tenir ses engagements. Il conviendra donc, à terme, de flécher 65 millions d'euros ou d'ouvrir de nouveaux crédits afin d'atteindre les 400 millions d'euros annoncés.

Recommandation n° 1 : garantir les 400 millions d'euros annoncés pour le volet « écoles » du plan Marseille en grand, en ouvrant ou fléchant les 65 millions d'euros manquants l'équilibre du projet ayant été construit sur ce montant (Gouvernement).

c) ...et des garanties d'emprunts qui n'ont pas encore été utilisées

Enfin, l'État prévoit de garantir les emprunts contractés par la SPEM à hauteur de 650 millions d'euros. À ce jour, cette garantie n'a pas encore été sollicitée dans le cadre du premier marché subséquent passé par la société pour des raisons tenant essentiellement aux délais de contractualisation avec les établissements bancaires.

Cette garantie devrait être mobilisée dans le cadre du deuxième marché subséquent.

d) Des éléments discordants sur le financement ANRU

L'ensemble des réponses écrites transmises aux rapporteurs spéciaux par le secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté, la préfecture ou la ville de Marseille mentionne une contribution de l'ANRU de 66 millions d'euros pour le volet « écoles » du plan Marseille en grand.

Cependant, un tableau de suivi des sites scolaires rénovés par la SPEM, communiqué par la préfecture (cf. annexe 1), liste des financements ANRU pour 31 sites et pour un montant total de 134 millions d'euros. Si ce document précise que certaines subventions ANRU sont conditionnées à une potentielle revoyure en 2024 et ne sont donc pas définitivement actées à ce stade, ces dernières concernent seulement 4 projets pour un montant total de près de 30 millions d'euros.

Il en résulte que, même déduction faite de ces hypothétiques financements ANRU, la contribution de l'agence serait tout de même de 104 millions d'euros, soit près de 40 millions d'euros supérieures à ce qui est annoncé dans le plan.

Par ailleurs, malgré les précisions demandées par les rapporteurs spéciaux, des discordances sont aussi constatées au niveau des projets financés. À titre d'exemple, l'école Malpassé les Oliviers bénéficie dans le tableau en annexe précité d'une subvention ANRU de 8,8 millions d'euros qui n'apparait pas dans un autre tableau transmis. Il en va de même pour les écoles Savine ou Kallisté 2.

Dans ce contexte, il conviendrait de mettre à jour les tableaux de suivi internes à la préfecture avec les montants des conventions ANRU afin de fiabiliser les subventions certaines pour chaque école et les subventions en cours de négociation.

2. Les acteurs de la dépense
a) La direction générale des collectivités locales (DGCL)

La DGCL est responsable du programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements », qui porte les crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2022 au titre du volet « écoles » du plan Marseille en grand soit 254 millions d'euros.

À ce titre, elle procède aux délégations de crédits à la préfecture des Bouches-du-Rhône qui est responsable d'unité opérationnelle de programme (RUO) dans le cadre d'une gestion déconcentrée des crédits.

En tant que responsable de programme, la DGCL a participé à l'élaboration de la convention précitée portant attribution par l'État d'une subvention au bénéfice de la société publique des écoles marseillaises, en charge de la mise en oeuvre du plan écoles relatif à la ville de Marseille. Cette dernière prévoit les modalités de gestion de la subvention et notamment les modalités de versement.

Ainsi, l'article 3 de la convention précise que les versements sont étalés comme suit :

- à la signature de chaque marché subséquent une avance de 30 % ;

- un versement de 20 % du montant de la subvention en n + 1 ;

- un versement de 20 % en N+ 2 ;

- le versement du solde de 30 % du montant de la subvention à l'achèvement des travaux.

Chaque versement est conditionné à la vérification de la réalisation du plan écoles (justificatifs des charges de personnels, études et travaux...) ou du taux de réalisation de chaque marché subséquent validé en conseil d'administration de la SPEM. Ainsi, toute demande de paiement doit comprendre obligatoirement les éléments suivants :

- la délibération du conseil d'administration validant l'avancée des travaux et le dossier de demande de paiement ;

- la lettre sollicitant le versement d'un acompte ou du solde ;

- l'état récapitulatif des paiements daté, validé en conseil d'administration, signé par le demandeur et approuvé par le comptable de la SPEM ;

- un relevé d'identité bancaire ;

- les copies de dérogations ou de prorogations obtenues ;

- des échantillons de factures peuvent également être demandées.

Le versement du solde est effectué par opération et à chaque livraison d'opération. Il est subordonné à la présentation d'un dossier final comprenant les pièces complémentaires suivantes :

- la lettre sollicitant le versement du solde ;

- la copie de l'attestation de versement de l'avance ou de l'acompte ;

- le plan de financement définitif des postes de travaux financés ;

- les copies des aides publiques déjà obtenues ou copie de la lettre d'intention ;

- des échantillons de factures peuvent également être demandés.

b) La préfecture des Bouches-du-Rhône

La préfecture des Bouches-du-Rhône, en tant que responsable d'unité opérationnelle de programme, reçoit les crédits de la DGCL et les subdélègue ensuite à la société publique des écoles marseillaises (cf. infra).

c) La ville de Marseille et la SPEM

En sus des subventions reçues en provenance de crédits budgétaires (254 millions d'euros sur le programme 119) et de la DSIL ou de la dotation ANRU, la SPEM contracte des prêts bancaires nécessaires au bouclage financier des opérations.

Elle passe ensuite l'ensemble des marchés publics nécessaires à la bonne réalisation des opérations et procède directement au paiement des prestataires retenus.

La ville de Marseille rembourse, pour sa part, la SPEM sous la forme d'une redevance étalée sur 25 ans.

Schéma de financement de la partie rénovation du volet « écoles »
du plan Marseille en grand

Source : commission des finances du Sénat

D. LA CRÉATION D'UNE STRUCTURE DÉDIÉE ET LA MISE EN PLACE D'UN PARTENARIAT PUBLIC-PUBLIC

1. La création dès janvier 2022 de la SPEM

Au vu de l'ampleur et des caractéristiques du volet « écoles » du plan Marseille en grand et de sa dimension, la ville et l'État ont décidé de créer une structure dédiée sous la forme d'une société publique locale d'aménagement d'intérêt national (SPAL-IN) conformément aux dispositions des articles L.327-113(*), L.327-314(*) et L.300-1 du code de l'urbanisme.

Cette société, dénommée société publique des écoles marseillaises (SPEM) a vocation à assurer la maitrise d'ouvrage des opérations du plan « écoles » pour construire, réhabiliter et remettre à niveau les écoles et équipements publics fondamentaux et notamment :

- organiser, réaliser ou contrôler toute opération ou action d'aménagement ;

- réaliser les opérations de conception, de construction, de réhabilitation, de rénovation ou tous types d'opérations nécessaires à la durabilité et à la conservation des écoles qui lui seront confiées par la ville ;

- procéder à toute acquisition ou cession d'immeubles, en vue de la réalisation des objectifs énoncés à l'article L.300-1 du code de l'urbanisme ;

- réaliser toutes études préalables en lien avec ses missions ;

- conclure tous emprunts et tous contrats de couverture de taux en vue de la réalisation de son objet social ;

- réaliser toutes opérations immobilières, industrielles, commerciales, financières et civiles se rattachant directement ou indirectement à son objet et contribuant à sa réalisation ;

- conclure tous types de marchés selon les dispositions du code de la commande publique.

Sa création a été actée par le décret n° 2022-60 du 25 janvier 2022 et sa durée est fixée, dans les statuts à 40 ans sauf dissolution anticipée ou prorogation.

Le capital social est fixé à 150 000 euros divisé en 150 actions de 1 000 euros et est détenu à parts égales entre l'État et la ville de Marseille qui en sont les uniques actionnaires.

La société est administrée par un conseil d'administration composé de 12 membres comprenant 6 administrateurs représentant la ville de Marseille, un représentant de l'État et 5 administrateurs nommés sur proposition de l'État.

Le Préfet de région est le représentant de l'État au titre de l'article 4 de l'ordonnance de 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique. Les 5 administrateurs nommés par l'État sont le préfet à l'égalité des chances des Bouches-du- Rhône, un représentant de FININFRA15(*), un représentant de la direction générale des finances publiques (DGFIP), le recteur de l'académie d'Aix-Marseille et le directeur départemental des territoires adjoint (DDTM).

La DGCL n'est pas représentée au sein du conseil d'administration.

2. Un partenariat public-public innovant

Le système élaboré prend ainsi la forme d'un partenariat public-public dans lequel la ville de Marseille confie à la SPEM la réalisation des opérations de rénovation, construction, réhabilitation des écoles au moyen de plusieurs contrats conclus entre la ville et la société (marchés subséquents), sans procédure de publicité et de mise en concurrence dès lors que les conditions nécessaires pour la reconnaissance d'une relation de « quasi-régie » sont réunies, conformément aux dispositions de l'article L.2511-1 du code de la commande publique16(*).

En effet, certains contrats conclus entre entités appartenant au secteur public, constituant des contrats de quasi-régie ou des contrats de coopération public-public, sont exclus du champ d'application du droit de la commande publique.

Par ailleurs, il ne paraît pas utile d'exiger la mise en oeuvre d'obligations de publicité et de mise en concurrence pour la conclusion de contrats entre un pouvoir adjudicateur et une entité qui, bien que dotée de la personnalité morale, constitue le simple prolongement administratif de celui-ci.

La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a ainsi successivement reconnu l'existence des contrats de quasi-régie, qualifiés également de contrats in house, puis des contrats de coopération public-public.

À la suite des directives de 2014, l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession, le code de la commande publique détermine les critères et le régime applicable aux contrats passés entre entités du secteur public.

Dès lors, la ville de Marseille et la SPEM ont signé, le 4 avril 2023, un accord cadre de marché de partenariat pour les 188 écoles du plan Marseille en grand (la ville de Marseille sera maître d'ouvrage pour les 304 autres écoles dont la rénovation ne sera donc pas assurée par la SPEM).

Cet accord a pour objet de définir les termes régissant l'attribution des marchés subséquents portant sur le financement et en tout ou partie, la conception, la démolition, le reconstruction et toute action nécessaire à la durabilité et à la conservation des 188 écoles qui seront confiées à la SPEM par la ville.

La durée de cet accord est fixée à 10 ans. Il en résulte qu'aucune notification de marchés subséquents ne pourra intervenir après l'expiration de l'accord.

L'accord cadre prévoit la passation de 7 marchés subséquents dans lesquels sont définis les écoles à réhabiliter, rénover ou construire. Ces marchés passés en dehors du cadre de la commande publique permettent donc de fixer le périmètre des vagues de travaux et de transférer la maîtrise d'ouvrage à la SPEM. À leur suite, la SPEM passe l'ensemble des marchés publics (études et travaux) nécessaires à la bonne réalisation des opérations.

3. Les avantages d'un partenariat public-public

Afin de choisir le mode de réalisation du plan « écoles », la ville de Marseille a procédé à une étude afin de comparer les avantages et inconvénients des différents modes de contractualisation et notamment entre un marché global de performance, un marché alloti et un partenariat.

Il résulte de cette étude qu'en comparaison avec un marché alloti, le marché de partenariat permet :

- de limiter le risque de dérapage du calendrier en limitant notamment le nombre d'opérateurs interlocuteurs de la ville ;

- de sécuriser les coûts des phases de conception, de construction et de maintenance dès le commencement des vagues alors qu'en marché alloti, seuls les coûts de conception peuvent être fixés au début des vagues ;

- d'assurer la pérennité des écoles par l'intégration des obligations d'opération de durabilité et de conservation des équipements et de gros entretien et renouvellement dès le début de chaque vague.

Parallèlement, l'étude a démontré qu'en comparaison avec un marché global de performance, le marché de partenariat permet :

- d'assurer le transfert de la maîtrise d'ouvrage et, in fine, le transfert des risques en découlant à la SPEM ;

- de confier à la SPEM le financement des opérations ;

- de fixer des ambitions plus importantes en termes d'engagements de performance et de pérennité des bâtiments ;

- une structuration contractuelle plus simple à mettre en oeuvre pour la ville en évitant la conclusion de marchés complémentaires concernant la durabilité ;

- de fixer les coûts liés aux prestations nécessaires à la durabilité et à la conservation des écoles dès le début de la vague pour une durée bien plus importante que dans le cadre d'un MGP.

De manière générale, au vu de l'identification des risques inhérents au projet, la répartition des risques paraissait bien plus opportune pour la ville dans le cadre d'un marché de partenariat. Les risques sont ainsi supportés exclusivement ou majoritairement par la SPEM.

Par ailleurs, l'objectif d'un recours à un marché de partenariat via une SPAL-IN est, en premier lieu, financier puisqu'il permet de faire porter la dette des investissements à une structure autre que la ville de Marseille.

Enfin, l'analyse comparative des coûts effectuée dans l'étude du mode de réalisation révèle que la réalisation du projet par un montage en marché de partenariat serait moins coûteuse qu'un montage en MGP.

Si les rapporteurs spéciaux partagent largement l'analyse concernant le portage des risques et la simplicité du recours au partenariat par rapport au marché alloti et au marché global de performance, ils sont plus réservés sur l'avantage financier au regard des incertitudes qui demeurent sur le plan d'ensemble de financement (cf. infra).

Aussi, un bilan ex-post, à l'issu du marché de partenariat, permettrait de tirer des enseignements sur les avantages et inconvénients du recours à un tel montage juridique et financier. Il permettrait, de surcroit, d'analyser son efficacité et sa transposabilité à d'autres investissements d'ampleur des collectivités.

Recommandation n° 2 : réaliser un bilan des avantages et inconvénients d'un recours à un partenariat public-public afin d'analyser l'efficacité de ce montage et sa transposabilité à d'autres investissements d'ampleur des collectivités (Gouvernement, SPEM, ville de Marseille).

DEUXIÈME PARTIE :
QUEL BILAN TROIS ANS APRÈS LE LANCEMENT
DU PLAN ?

I. UN BUDGET GLOBAL BIEN PLUS ÉLEVÉ POUR LA VILLE DE MARSEILLE QUE LE SEUL COÛT DES TRAVAUX

A. UN COÛT DES TRAVAUX FLUCTUANT ENTRE LA CONVENTION D'ATTRIBUTION DE LA SUBVENTION DE L'ÉTAT ET LES DOCUMENTS TRANSMIS

1. L'estimation du coût des travaux dans la convention d'attribution de la subvention

La convention portant attribution par l'État d'une subvention au bénéfice de la SPEM, signée le 9 octobre 2023, prévoit que 248 millions d'euros seront versés à la SPEM (6 millions d'euros ayant été versé dès en 2022 et 2023 avant la signature afin d'engager les dépenses nécessaires à la mise en place de la société).

Cette subvention doit permettre de financer une partie des dépenses de personnel estimées à 8 % du montant total des travaux hors taxe ainsi que la part des études pré-opérationnelles associées aux travaux de rénovation, estimée à 5 %.

Dans sa plus grande part, la subvention doit surtout financer la partie des travaux du plan « écoles » réalisés par la passation des marchés subséquents.

De manière prévisionnelle, la part d'investissement représente environ 92 % de la subvention (études incluses) et la part de dépenses de fonctionnement représente environ 8 %.

Les dépenses relatives à la maintenance, à l'exploitation des écoles, aux provisions pour risques et charges ainsi que les frais relatifs aux indemnités destinées aux candidats des marchés non retenus sont exclues des dépenses éligibles.

L'annexe de la convention fixe la répartition prévisionnelle des crédits par marché subséquent ainsi que les délais plafonds d'exécution de ces marchés tout en précisant que ces données sont prévisionnelles. Cette répartition a été modifiée à la marge par avenant à la convention daté du 6 décembre 2023, les autres dispositions restant inchangées.

Ainsi, le coût total des travaux est estimé à 870 millions d'euros hors taxes répartis entre une contribution de l'État de 400 millions d'euros et une contribution de la ville de Marseille fixée à 470 millions d'euros

Répartition prévisionnelle des crédits par marché subséquent

(en millions d' euros)

Source : commission des finances à partir de l'avenant à la convention portant attribution d'une subvention à la SPEM

Délais plafonds prévisionnels d'exécution des marchés subséquents

Source : commission des finances à partir de l'avenant à la convention portant attribution d'une subvention à la SPEM et de l'accord cadre

2. Le chiffrage et le calendrier fournis par la ville de Marseille : des écarts parfois notables avec les éléments de la convention

En réponse au questionnaire transmis, la ville de Marseille a détaillé le coût global des travaux et le calendrier des marchés subséquents. Des éléments fournis, il ressort des écarts avec les montants mentionnés dans la convention d'attribution de la subvention.

En effet, dans les documents de la ville, les travaux sont estimés à 844,7 millions d'euros contre 870 millions d'euros dans la convention, soit un écart de 25,3 millions d'euros et le calendrier prévoit des livraisons au plus tard en septembre 2031 contre décembre 2031 dans la convention avec des écarts notables sur certains marchés. Ainsi, la ville indique une date de livraison en septembre 2024 pour le premier marché subséquent quand la convention mentionne avril 2026, soit 18 mois plus tard.

Coût des travaux des marchés subséquents et calendrier de livraison

(en euros)

Source : commission des finances à partir des éléments transmis par la ville de Marseille

B. LE COÛT GLOBAL DE L'ACCORD-CADRE : UNE MULTIPLICATION PAR DEUX PAR RAPPORT AU COÛT DES TRAVAUX

1. Le montant maximal de l'accord-cadre

L'annexe 1 de l'accord-cadre signé le 4 avril 2023 entre la ville et la SPEM précise que «  le montant maximal de l'accord cadre est fixé à 1,813 milliard d'euros hors taxe. Il correspond au montant maximum de l'ensemble des redevances que la personne publique (la ville de Marseille) versera au partenaire (la SPEM). Ce montant est établi en euros courants à partir d'hypothèses posées tant sur l'indexation des coûts (de travaux, d'études, d'entretien-maintenance) que sur les conditions de financement de la dette portée par la SPEM et d'une estimation des coûts des travaux réalisée en valeur janvier 2021 ».

Dès lors, comme le montant maximal de l'accord intègre une part d'indexation, de révision et d'aléas, il est non révisable.

2. Les différentes composantes du montant maximal

Ce montant de 1,813 milliard d'euros hors taxe se compose de plusieurs éléments :

- le coût de l'opération qui s'entend comme le coût des travaux et des études augmenté des honoraires de la SPEM (hors rémunération de la SPEM laquelle fait l'objet d'une catégorie de coût spécifique). Ce coût est fixé à un maximum compris entre 2800 et 3200 euros hors taxe par mètre carré surface de plancher, selon la nature de l'intervention ;

- le coût de l'exploitation maintenance qui correspond à l'ensemble des dépenses permettant de garantir la durabilité et la conservation des écoles (les prestations concernées, limitativement énumérées dans l'annexe 5 de l'accord cadre, sont essentiellement celles liées à l'entretien du gros oeuvre, du chauffage et de la climatisation, de la plomberie et de l'électricité...). Ce coût est fixé à un maximum moyen de 36 euros hors taxe par mètre carré surface de plancher ;

- la rémunération de la SPEM qui couvre l'ensemble des dépenses de personnel, des frais de structure et des charges et honoraires correspondant à l'exécution des missions. Ce montant est plafonné à 8 % du coût des travaux ;

- les frais financiers intercalaires qui correspondent à la somme des coûts de portage des dettes entre la date de notification du marché et la date de mobilisation des dettes de long terme y compris les commissions. Ce montant est plafonné à 3 % du coût des opérations ;

- les frais d'indemnisation des candidats non retenus. Ce montant est plafonné à 1 % du coût des travaux ;

- les frais et études externes qui correspondent aux dépenses engagées par la SPEM pour l'organisation de chaque consultation relative à la passation des marchés subséquents. Ce montant est plafonné à 1 % du coût des opérations.

Il résulte des différentes composantes que le coût total de l'opération devrait être le suivant :

Cout total des travaux et frais annexes pour la SPEM

(en euros, hors taxes)

Source : commission des finances à partir des données transmises par la ville de Marseille

Le financement de ce coût total, soit 1,241 milliard d'euros hors taxes, est réalisé par une part de subvention en provenance de l'État et par le recours à l'emprunt.

Schéma de financement du volet « écoles » du plan Marseille en grand

(en euros)

Source : commission des finances à partir des données transmises par la ville de Marseille

En sus du financement des dépenses d'investissement, l'accord cadre prévoit des dépenses pour la maintenance, le gros entretien et le renouvellement (GER) ainsi que des frais de gestion afférents à cette maintenance.

Des dépenses, hors accord cadre, seront, par ailleurs, supportées par la ville.

Coût global, dans le contrat et hors contrat, du volet « écoles »

(en euros)

Source : commission des finances à partir des données transmises par la ville de Marseille

Il en résulte que le coût total de la rénovation de 188 écoles, maintenance comprise, s'élèvera à 1,8 milliard d'euros dans l'accord cadre augmenté de 523 millions de dépenses hors accord cadre (essentiellement des dépenses de fonctionnement) à la seule charge de la ville qui remboursera à la SPEM, sous forme de redevances trimestrielles, l'ensemble des coûts engagés (travaux, intérêts d'emprunts et maintenance et dépenses de gros entretien et renouvellement).

3. Des interrogations sur le chiffrage de certaines dépenses

Au regard des éléments transmis par la ville de Marseille sur le chiffrage global du volet « écoles », certains montants interrogent les rapporteurs spéciaux.

Premièrement, le montant total (investissement pour travaux et maintenance prévue dans le cadre de l'accord) s'élève à 1,843 milliard d'euros hors taxes alors que l'annexe 1 de l'accord cadre fixe un plafond de 1,813 milliard d'euros hors taxe soit un delta de 30 millions d'euros. Interrogée sur cet écart, la ville a précisé que certaines écoles ont finalement été sorties du projet permettant ainsi de respecter le montant plafond de l'accord cadre (Abeilles, ESPE, Montolieu). Il en résulterait que les écoles à rénover par la SPEM ne seraient plus au nombre de 188 mais de 185.

Par ailleurs, les frais intercalaires, plafonnés dans l'accord cadre, à 3 % du coût des opérations atteignent 3,8 % soit près de 7 millions de plus que le plafond prévu dans l'accord cadre de 3 %. Ce delta résulterait d'un taux Euribor négatif au moment de la rédaction de l'accord cadre et actuellement de 3,8 %.

Enfin, les intérêts d'emprunt, dans le schéma de financement, sont estimés à 601 millions d'euros. Pour évaluer ce montant, l'étude du mode de réalisation du plan écoles, réalisé par la ville de Marseille avant la signature de l'accord cadre, a procédé à des modélisations basées sur un financement à hauteur de 50 % par des prêts auprès de la banque européenne d'investissement (BEI) et à hauteur de 50 % auprès de banques commerciales. Ces prêts se décomposeront de prêts long terme de 25 ans et de prêts court terme de préfinancement d'une durée moyenne estimée à 2,6 années à partir des conditions du marché au 9 janvier 2023.

Sans pouvoir reconstituer l'ensemble des calculs, les rapporteurs spéciaux estiment que ce montant de 601 millions d'euros correspond environ à des prêts de 25 ans à 4,2 %.

D'un côté, les garanties apportées par l'État à hauteur de 650 millions d'euros pourraient générer des taux plus bas, mais d'un autre, le contexte économique plus tendu et la récente détérioration de la note française par l'agence de notation Standard and Poors pourraient avoir une incidence à la hausse sur ces mêmes taux, il est difficile à ce stade de confirmer la fiabilité des hypothèses retenues. Dès lors, les rapporteurs spéciaux se montreront attentifs à l'évolution des conditions de financement de la SPEM et de l'impact de ces conditions sur l'équilibre général du projet.

Par ailleurs, le chiffrage transmis par la ville comporte une actualisation en raison de l'indexation des coûts sur l'évolution réelle des indices (notamment indexe bâtiments travaux publics) estimée à 105,6 millions d'euros (cf. tableau supra). Cependant, l'étude du mode de réalisation mentionne pour sa part une actualisation estimée à 114 millions d'euros à la signature du contrat et à 183 millions d'euros au terme des travaux.

Enfin, dans sa réponse écrite la ville de Marseille a indiqué que la TVA à payer par la SPEM sur l'ensemble des opérations (travaux et maintenance) serait de 750 millions d'euros. Après interrogation des rapporteurs spéciaux, la ville a reconnu une erreur en raison d'un double comptage. La TVA serait donc, au final de 473 millions d'euros. Ce nouveau chiffre interroge encore les rapporteurs spéciaux dans la mesure où il correspond à une TVA de 20 % sur l'ensemble des prestations (et non à un taux de 19,6 %, le taux de droit commun pour les travaux réalisés par les collectivités territoriales).

Par ailleurs, le FCTVA n'est normalement récupérable que sur le loyer financier correspondant à la part « capital », soit sur les 916 millions d'euros de travaux à un taux de 16,4 % ce qui équivaut à un montant total de FCTVA de 150,3 millions d'euros et non 180 millions d'euros comme indiqué dans la réponse de la ville.

Au-delà de ces incohérences de chiffrage concernant la TVA et le FCTVA, actuellement la SPEM paye la TVA et la récupère. En effet, dans le cas où l'entreprise est assujettie à la TVA, elle est amenée à reverser à l'État la TVA collectée suite à l'exercice de son activité. Par ailleurs, l'entreprise possède diverses dépenses, notamment des acquisitions de biens et de services,  le remboursement des frais professionnels à ses employés...Aussi, en contrepartie, l'entreprise est en mesure de récupérer la TVA17(*) payée sur ces dépenses engagées dans le cadre de son activité professionnelle.

Pour autant, elle se fait rembourser la TVA par la ville de Marseille à travers les redevances versées. Les rapporteurs spéciaux n'ont pu avoir de précisions sur les montants de TVA reversés par la ville à la SPEM via la redevance. Les flux financiers afférents à la TVA entre la ville et la SPEM mériteraient d'être précisés. Un rescrit fiscal a été envoyé par la SPEM à la direction générale des finances publiques pour obtenir une réponse sur ce sujet. La réponse est toujours en attente à ce stade.

Dans ce contexte de chiffrages différents concernant les travaux, entre les différents documents transmis aux rapporteurs spéciaux, et d'incohérences entre les termes de l'accord cadre et les éléments recueillis auprès de la ville, il parait essentiel d'aligner les données et d'établir un plan de financement global stabilisé, au besoin en effectuant des mises à jour annuelles ou infra annuelles si nécessaire, afin de tenir compte de l'évolution des données et du périmètre évolutif des 188 écoles retenues ab initio.

Recommandation n° 3 : élaborer un plan de financement stabilisé incluant l'ensemble des dépenses de travaux, de maintenance et les frais annexes ainsi que l'ensemble des ressources en précisant leur origine (SPEM et ville de Marseille).

Recommandation n° 4 : préciser et sécuriser les flux financiers entre la ville et la société publique des écoles marseillaises afférents au paiement de la TVA (SPEM et ville de Marseille).

4. Une redevance soutenable pour la ville de Marseille ?

À compter de la date effective de mise à disposition de chaque école (et/ou tranche de travaux de chacun des marchés subséquents), la ville de Marseille devra verser à la SPEM une redevance qui sera payée par trimestre.

Cette redevance a donc vocation à évoluer au fur et à mesure de l'avancement des travaux et des livraisons des chantiers par la SPEM à la ville.

Concernant le premier marché subséquent, les premiers versements devraient intervenir au troisième trimestre 2024, pour un montant initial de 192 768 euros, et évoluer de manière croissante jusqu'au troisième trimestre 2025 pour atteindre en juin 879 107 euros par trimestre avant de décroitre entre juillet 2049 et juin 2050. Le montant total fixé par le marché est donc de 87 910 730 euros versés sur 26 ans soit 104 trimestres.

Les redevances suivantes seront fixées par chaque marché subséquent.

Toutefois, la ville a indiqué aux rapporteurs spéciaux, qu'en moyenne, cette dernière serait de 50 millions d'euros par an pendant 25 ans soit un total de 1,25 milliard d'euros. Cette estimation lissée devra cependant être affinée et confirmée dans la mesure où le financement total des travaux, déduction faite des subventions de l'État, augmenté des intérêts d'emprunts s'établit à 1,52 milliard d'euros soit l'équivalent, sur 25 ans, d'une redevance annuelle de 60,7 millions d'euros.

À ce montant de redevance annuelle, devront être ajoutées les dépenses de maintenance et gros entretien prévues dans l'accord cadre et estimées à 325,5 millions d'euros (soit 13 millions par an pendant 25 ans).

Par ailleurs, ces dépenses d'investissement seront complétées par des dépenses de fonctionnement directement à la charge de la ville estimées à 523,3 millions d'euros (soit 21 millions d'euros par an pendant 25 ans).

Enfin, pour la rénovation des 304 écoles pour lesquelles la ville conserve la maitrise d'ouvrage, les investissements prévisionnels s'établissent environ à 40 millions d'euros pendant 10 ans soit un total de près de 400 millions d'euros.

Au total, au cours des premières années, les dépenses d'investissement de la ville de Marseille pour la rénovation des écoles pourraient être comprises entre 103 et 113 millions d'euros par an.

Or, dans le programme pluriannuel d'investissement adopté par la ville pour la période 2024-2029, le niveau total d'investissement est fixé à 320 millions d'euros par an en moyenne. Il en résulte que les dépenses dédiées aux écoles représenteraient plus de 30 % de l'investissement total.

Par ailleurs, pour mémoire, les dépenses d'équipement de la ville se sont élevées à 189 millions d'euros en 2021 et 193,6 millions d'euros en 2022.

Dans un contexte où la ville affiche d'importantes ambitions d'investissement dans d'autres domaines, comme le verdissement, l'accès au logement et à la santé, ou encore la culture, la question de la soutenabilité à long terme d'un investissement massif au profit des écoles se pose donc légitimement.

Les rapporteurs spéciaux préconisent à ce titre un suivi fin des investissements et des mises à jour régulières du plan pluriannuel d'investissement (PPI) afin de finaliser la rénovation des écoles sans sacrifier d'autres investissements importants pour le territoire.

II. UN RÉEL AVANCEMENT DES TRAVAUX MAIS QUI DOIT ÊTRE NUANCÉ AU REGARD DES ENJEUX ET QUI SUSCITE DES INTERROGATIONS POUR L'AVENIR

A. UN DÉMARRAGE LABORIEUX

Alors même que le Président de la République annonçait la rénovation des écoles marseillaises dans son discours du 2 septembre 2021 et que des résultats étaient attendues rapidement pour les écoles dont l'état était le plus délabré, quand est-il près de 3 ans après les annonces ?

1. Une SPEM qui a mis près d'un an pour être opérationnelle

Comme évoqué supra, la SPEM a été créée fin janvier 2022 soit 5 mois après le discours du Président de la République. Pour autant, son directeur actuel n'a été nommé qu'en septembre 2022. Dans l'intervalle, la direction a été assurée par trois directeurs qui se sont succédé pour des périodes courtes :

- un premier directeur du 1er février 2022 au 31 mars 2022 ;

- un deuxième du 1er avril 2022 au 17 juin 2022 ;

- un troisième du 18 juin 2022 au 18 septembre 2022.

Au 31 décembre 2022, l'effectif de la société n'était que de deux salariés, en sus du directeur : une assistante de direction et une chargée de communication en CDD.

Parallèlement, le secrétaire général de la société n'a été nommé, quant à lui, qu'en septembre 2023.

La montée en puissance a donc été très progressive et relativement lente. À ce jour, la société est dotée d'une vingtaine de collaborateurs avec un objectif de 35 à termes.

Recommandation n° 5 : finaliser rapidement les recrutements nécessaires à la pleine activité de la SPEM pour assurer le lancement des travaux de la vague 2 et des suivantes (SPEM).

2. Des documents de contractualisation tardifs

La conséquence directe d'une mise en place opérationnelle de la SPEM étalée sur 9 mois a été la signature tardive des documents de contractualisation nécessaires à une partie de son financement et à l'engagement des travaux.

Ainsi, la ville de Marseille et la SPEM ont signé l'accord cadre de marché de partenariat pour les 188 écoles du plan Marseille en grand le 4 avril 2023.

Parallèlement, le premier marché subséquent entre la ville et la SPEM a été signé le 21 août 2023 et a fait l'objet d'un avenant le 21 décembre de la même année.

Enfin, alors qu'une subvention exceptionnelle pour le volet « écoles » du plan Marseille en grand avait été votée en LFI pour 2022, la convention d'attribution de cette subvention n'a été signée que le 9 octobre 2023 entre l'État et la SPEM alors même que dès 2022, 6 millions d'euros de cette subvention était déjà allouée à la SPEM pour ses premiers frais de fonctionnement.

B. DES PROJETS QUI AVANCENT À UN BON RYTHME MAIS DES DOUTES PERSISTANTS SUR LA CAPACITÉ À TENIR LE CALENDRIER PRÉVISIONNEL

1. Des premières livraisons prévues en 2024 

Le premier marché subséquent (MS 1), signé en août 2023, devait intégrer des opérations sur 17 écoles avec des livraisons devant intervenir au plus tard, d'après le calendrier de l'accord cadre, en avril 2026.

À ce stade, 14 écoles sur 7 sites sont en cours de travaux. 10 d'entre elles (sur 5 sites) devraient être livrées d'ici la fin de l'année 2024 et les 4 autres en 2025.

En revanche, le groupe scolaire de Saint Louis Gare, comprenant 2 écoles qui figuraient initialement dans la liste des 188 écoles, n'a finalement pas été intégré au périmètre de l'accord cadre compte-tenu de l'avancement des travaux de rénovation sous maîtrise d'ouvrage de la ville et a été mis en service au début de l'année 2024. Il en est de même pour l'école Abeilles (extension), restée en maitrise d'ouvrage de la ville.

Ce bon avancement du premier marché subséquent résulte en grande partie du fait que les travaux de 7 sites18(*) avaient déjà été initiés par la ville de Marseille et ont été transférés à la SPEM dans le cadre du premier marché subséquent. En effet, pour ces écoles les marchés ont été passés entre 2020 et début 2023 avec des dates d'ouverture de chantier comprises entre septembre 2022 et octobre 2023.

Il en résulte que si la livraison de 10 écoles d'ici la fin de l'année 2024 représente des travaux sans précédent pour la ville de Marseille, elle doit être mise en perspective des enjeux et d'un lancement des marchés et des travaux finalement bien antérieur à la création de la SPEM, à la signature de l'accord cadre et à celle du premier marché subséquent.

Les dates de livraison sont les suivantes. Les rapporteurs notent quelques écarts mineurs entre le calendrier transmis par la SPEM et celui transmis par la ville, qui peuvent provenir de la date retenue (réception des travaux ou livraison à la ville).

Calendrier prévisionnel de livraison des écoles de la vague 1

Source : commission des finances à partir des éléments transmis par la ville de Marseille et par la SPEM

2. Des doutes concernant le cadencement des vagues successives jusqu'en 2032

De manière plus générale, au-delà des 10 écoles qui devraient être livrées en 2024, 84 opérations sont en phase de travaux, en phase opérationnelle ou en étude :

- 15 écoles sont actuellement en chantier ;

- 33 écoles sont en phase de consultation ;

- 36 entrent en phase d'étude de préfaisabilité.

Pour la vague 2, les procédures d'attribution des marchés sont en cours. Les livraisons devraient intervenir entre l'année 2027 et 2028. Concernant la vague 3, la phase des études préalables est en cours d'organisation et les plannings prévisionnels de livraisons ont vocation à s'établir sur les années 2028 à 2029.

Les rapporteurs spéciaux soulignent que la première vague se déroule jusqu'à présent selon le calendrier annoncé. Ils émettent cependant certains doutes sur la capacité à tenir les échéances fixées pour les prochaines vagues et le respect de leur périmètre dans la mesure où les données communiquées par la SPEM et par la ville présentent certaines divergences. Ainsi, alors que la SPEM a fourni aux rapporteurs spéciaux le graphique suivant sur les différentes vagues avec 29 écoles pour la phase 2, une réponse écrite de la même SPEM précise que « la vague 2 comprend 16 sites19(*). Pour 13 sites les réceptions s'échelonneront entre l'année 2027 et l'année 2028. Pour 3 sites, les plannings sont encore en phase de consolidation (Air Bel, Frais Vallon Nord, Pommier) ».

Répartition des écoles pour les 7 vagues de rénovation

Source : SPEM

La ville, quant à elle, a transmis le graphique suivant comportant uniquement 6 vagues (marchés subséquents) pour 174 écoles et non 188, avec des vagues ne comportant donc pas le même nombre d'écoles par rapport aux éléments communiqués par la SPEM : 17 écoles pour la vague 1, 68 pour la vague 2 et 50 pour la vague 3.

Calendrier simplifié du plan de rénovation des écoles

Source : ville de Marseille

Dans ce contexte, les rapporteurs spéciaux ne peuvent que s'interroger sur la capacité de la SPEM à engager les consultations, lancer les travaux et livrer les équipements pour les 4 vagues suivantes entre 2025 et 2031, d'autant que la phase 4 est la plus importante en termes de nombre d'écoles à rénover (64 écoles dans les documents de la SPEM) et que la société n'a pas encore atteint sa capacité maximum en termes de recrutements (cf. supra).

3. De nombreuses divergences entre les différents documents concernant le périmètre des vagues

Alors que le calendrier simplifié transmis par la ville (cf. supra) précise que 50 écoles sont comprises dans la vague 3, le site internet de la ville mentionne, quant à lui, 42 écoles concernées par cette même vague en cours de démarrage.

Parallèlement, en réponse au questionnaire, la ville de Marseille a également transmis un tableau listant les écoles des trois premières vagues : 14 pour la première, 29 pour la deuxième et 36 pour la troisième.

Liste des écoles concernées par les rénovations
des trois premières vagues du plan

Source : ville de Marseille

De surcroit, un tableau de suivi (cf. annexe 1) transmis par la préfecture liste 46 sites et écoles pour la vague 2,36 sites et écoles pour la vague 3,12 sites et écoles pour la vague 4, 2 sites et écoles pour la vague 5et 4 sites pour la vague 6. La vague 7 n'est pas reprise dans ledit tableau.

Sur la vague 3, le tableau de la préfecture liste un certain nombre d'écoles non reprises dans le tableau de la ville.

Ces données présentées de manière différente (en sites et/ou en écoles) ne permettent pas non plus d'avoir une vision précise du périmètre des vagues successives. De surcroit, les données diffèrent d'une source à l'autre de sorte qu'il est impossible, au regard des documents communiqués, d'avoir une liste stabilisée des écoles concernées par chacune des vagues.

Pour expliquer ces différences la ville a précisé aux rapporteurs spéciaux que « la liste des 188 écoles est à ce jour encore amenée à évoluer » et les écoles à rénover dans les vagues 4 à 7 ne semblent pas encore stabilisées dans la mesure où chaque marché subséquent passé entre la ville de Marseille et la SPEM doit définir les sites et le nombre d'écoles concernées par la vague considérée.

La ville de Marseille ajuste en lien avec l'État les sites retenus au fur et à mesure de l'avancée du programme selon des critères de criticité des sites, d'ampleur de chaque opération et d'équilibre géographique.

Dans ce contexte, et dans la mesure où « les regroupements par vagues ont également été pensés en intégrant une réflexion sur la répartition des enfants par secteur géographique tout au long de la réalisation du plan et notamment les impacts des fermetures provisoires d'écoles en phase travaux », il parait difficilement concevable que la définition précise du périmètre de l'ensemble des vagues n'ait pas été stabilisée en amont des premiers travaux.

Si des modifications en fonction d'éventuelles difficultés et aléas qui pourraient survenir ou d'évolutions démographiques différentes des prévisions paraissent inhérentes à un projet d'une telle ampleur, l'absence d'un document consolidé sur l'ensemble des écoles à rénover durant les 10 prochaines années et leur répartition au sein des 7 vagues envisagées parait plus surprenante.

Dans ce contexte, les rapporteurs spéciaux ne peuvent que recommander d'élaborer un document consolidé et partagé entre les différents acteurs, précisant les sites, les écoles et la nature des travaux envisagés pour chacune des 7 vagues et de procéder à des mises à jour régulière afin de tenir compte des évolutions en cours d'avancement.

Recommandation n° 6 : élaborer un document consolidé et partagé entre les acteurs, précisant les sites, les écoles et la nature des travaux envisagés pour chacune des 7 vagues (SPEM et ville de Marseille).

Recommandation n° 7 : mettre à jour régulièrement les documents listant les écoles à rénover par vague pour tenir compte des aléas ou des nouvelles données démographiques (SPEM et ville de Marseille).

4. La nécessité de travailler en proximité avec la métropole pour éviter d'éventuels blocages

Les relations entre la ville de Marseille et la métropole Aix-Marseille sont, depuis la création de cette dernière, complexes et régulièrement tendues avec des points majeurs et réguliers de désaccords concernant les compétences ou les attributions de compensation.

La chambre régionale des comptes avait d'ailleurs rendu un avis en 2022 faisant plusieurs constats relatifs aux montants des attributions de compensation et à l'absence de dotation de solidarité communautaire.

Le lancement du plan Marseille en grand avait été conditionné, par le Président de la République lui-même, au règlement des problèmes d'organisation et de gouvernance.

Pour ce faire, le Premier ministre avait ensuite annoncé trois nécessaires évolutions institutionnelles : « la simplification de la gouvernance métropolitaine, (...) la clarification de la répartition des compétences entre la métropole et les communes membres, et la révision des (...) relations financières » entre les communes membres et la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

En conséquence, lors de l'examen du projet de loi dit « 3DS » la ministre Jacqueline Gourault avait proposé, dans le texte initial puis par amendement à l'Assemblée nationale, une nouvelle architecture institutionnelle pour la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

Si les relations semblent ainsi apaisées depuis la fin de l'année 2022, les rapporteurs spéciaux appellent les principales instances de gouvernance de la métropole et de la ville à maintenir un dialogue régulier et à développer une réelle coordination pour les investissements nécessitant la mobilisation des crédits de la ville et de la métropole.

En effet, la rénovation et la construction de certaines écoles ne peuvent et ne doivent pas être totalement décorrélées des compétences de la métropole en termes de transports, de gestion et d'entretien de la voirie et des espaces publics ou encore de signalisation. À l'heure où la livraison des premières écoles dépend également des voiries qui les jouxtent, l'intérêt des élèves et de leurs parents doit pouvoir primer sur les dissensions entre la ville et la métropole.

Dans ce contexte, les rapporteurs spéciaux rappellent une des observations du rapport d'Éric Woerth sur la décentralisation : « S'agissant des compétences, la métropole doit se retirer de la gestion de proximité. Tout d'abord, la métropole doit être incitée à la délégation de compétences et à un transfert de certaines d'entre elles vers les communes, grâce à la réduction du nombre de compétences obligatoires. Il s'agit en particulier de compétences relatives à la rénovation urbaine, à la politique de la ville, à la propreté urbaine et à la voirie ».

Cette évolution pourrait être de nature à favoriser l'avancement de certains pans du plan Marseille en grand.

Recommandation n° 8 : renforcer le dialogue et la coordination entre la ville et la métropole pour poursuivre le volet « écoles » du plan Marseille en grand de manière coordonnée (ville de Marseille et métropole Aix-Marseille-Provence).

5. La question de la priorisation des travaux à mener

Le choix des écoles à rénover en priorité a été guidé par un critère principal tenant à la qualité du bâti, et par deux critères annexes tenant à l'urgence de la situation en termes de sécurité et à la répartition géographique des écoles. Il a été établi par la ville de Marseille et validé par la préfecture.

Ainsi, la répartition des écoles au sein des 7 vagues a été opérée en fonction de l'analyse des degrés d'urgence des opérations. Les regroupements par vagues ont également été pensés en intégrant une réflexion sur la répartition des enfants par secteur géographique tout au long de la réalisation du plan et notamment les impacts des fermetures provisoires d'écoles en phase travaux.

Enfin, un travail opéré entre la ville de Marseille et les services de l'État a permis de prioriser certains sites voire d'en ajouter d'autres en raison d'enjeux urbains et sociaux forts notamment liés aux quartiers prioritaires.

C. À DATE, UNE CONSOMMATION FAIBLE DE LA SUBVENTION MAIS COHÉRENTE AVEC LE CALENDRIER DES MARCHÉS SUBSÉQUENTS

1. Une très légère sous consommation en 2023 par rapport aux crédits ouverts

La loi de finances pour 2022 a ouvert 254 millions d'euros en AE et 6 millions d'euros en CP au titre du volet « écoles » du plan Marseille en grand.

En 2022, 1 million d'euros en AE et 0,8 million d'euros en CP, correspondant à une première avance visant à couvrir les dépenses d'amorçage de la société publique des écoles marseillaises (et les premières études prévisionnelles), ont été consommés. En attendant la signature des documents contractuels encadrant la gestion de la subvention, les crédits restants et non consommés au 31 décembre 2022, soit 253 millions d'euros en AE et 5,2 millions d'euros en CP, ont été reportés sur 2023.

À ces crédits, se sont ajoutés ceux ouverts en loi de finances initiale pour 2023, soit 30 millions d'euros de CP. Ainsi, les crédits disponibles en 2023 s'élevaient à 253 millions d'euros en AE et 35,2 millions d'euros en CP.

Au 31 décembre 2023, l'intégralité des AE a été engagée et 30,7 millions d'euros en CP ont été consommés, dont :

- 4 millions d'euros en AE et CP correspondant à 80 % de la seconde avance de 5 millions d'euros destinés aux premières dépenses de la SPEM ;

- 248 millions d'euros en AE et 26,7 millions d'euros en CP correspondant à la signature de la convention de gestion des crédits du plan écoles et au début de réalisation du premier marché subséquent.

Les CP non consommés au 31 décembre 2023, soit 4,5 millions d'euros correspondent d'une part au reliquat des deux avances versées en 2022 et 2023 (0,2 millions d'euros pour la première avance et 1 million d'euros pour la seconde avance) et d'autre part à 3,3 millions d'euros de crédits dédiés au premier marché subséquent. Ces crédits ont été reportés sur 2024.

Au 31 décembre 2023, l'intégralité des AE a été engagée, ainsi que 31,5 millions d'euros de CP, laissant ainsi un reste à payer de 222,5 millions d'euros.

Consommation de la subvention de 254 millions d'euros
au 31 décembre 2023

Source : Commission des finances du Sénat

À l'issu des deux premières années, la consommation des crédits de la subvention exceptionnelle est légèrement inférieure à l'ouverture des crédits avec un taux de consommation qui s'établit à 87,5 %.

La LFI 2024 a ouvert 32,7 millions d'euros de CP.

2. Une nécessaire vigilance sur la consommation à venir de la subvention

L'échéancier prévisionnel jusqu'en 2028 a été transmis par la DGCL :

Échéancier prévisionnel de consommation des CP jusqu'en 2028

(en euros)

MS : marché subséquent

Source : DGCL

À ce stade, ce calendrier n'intègre pas la totalité du 6ème marché subséquent ni le 7ème.

La date de validité de la convention portant attribution par l'État d'une subvention à la SEPM étant fixée à 2032, il est précisé à l'article 2 de ladite convention que, au-delà de cette date, l'opération sera considérée comme terminée et que les demandes de paiements seront déclarées irrecevables. Toutefois, ce délai pourra être prolongé sur demande motivé du bénéficiaire.

Dans ce contexte, les rapporteurs spéciaux se montreront particulièrement vigilants au respect de ce calendrier et à la consommation annuelle de la subvention.

D. UN VOLET PÉDAGOGIQUE TRÈS CONTESTÉ PAR LES SYNDICATS D'ENSEIGNANTS

1. Une expérimentation mise en place dans une école sur cinq

À la rentrée 2022, 59 écoles marseillaises participaient à 41 projets impliquant près de 11 000 élèves et 630 enseignants, soit un élève sur huit de la cité phocéenne. À la fin de l'année 2023, 82 établissements scolaires marseillais étaient engagés dans l'expérimentation « écoles du futur », soit 20 % des écoles de la ville, ce qui représente 14 400 élèves et 950 professeurs. 80 % des projets concernent des écoles situées en zone d'éducation prioritaire.

Carte des écoles innovantes à Marseille

Source : académie Aix-Marseille

2. Une opposition vive en raison du hiatus entre les projets attendus et les réelles priorités

La mise en place des projets a été réalisée dans la précipitation sans réelle préparation, pour répondre aux sollicitations par le rectorat. Dans ce contexte, certaines écoles ont pu ressortir des projets anciens qui avaient été abandonnés faute de moyens.

Aussi, si les crédits alloués sont de bon augure pour relancer certains projets pédagogiques, de nombreux enseignants ont mis en exergue une absence de prise avec les problèmes quotidiens.

En effet, ces projets mobilisent des professeurs dans un contexte de pénurie de moyens humains et de crise des vocations et des recrutements.

Par ailleurs, alors que trop d'enfants en situation de handicap sont privés d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), d'aucun pourrait penser que faire des classes flexibles et rendre plus ludiques les apprentissages n'est pas une priorité.

Enfin, la plupart des syndicats d'enseignants dénoncent le risque d'iniquité entre écoles et la déréglementation induite par la création de « postes à exigences particulières » et évoquent des tensions entre professeurs impliqués et réticents.

Si faute d'évaluation, la qualité des projets et leurs bénéfices n'est, à ce stade, pas remis en cause, force est de constater que la méthode soulève des questions et des difficultés : manque de temps pour présenter des projets, recrutements à la main des directeurs d'établissement sur profil spécifique...

III. UN SUIVI DU VOLET « ÉCOLES » DU PLAN MARSEILLE EN GRAND PERFECTIBLE ET DES BILANS INTERMÉDIAIRES INEXISTANTS MALGRÉ LES DIFFICULTÉS RENCONTRÉES

A. ALORS QUE L'ÉTAT SE SUBSTITUE EN PARTIE À LA VILLE DE MARSEILLE DANS L'EXERCICE D'UNE COMPÉTENCE COMMUNALE, LE SUIVI MIS EN oeUVRE AU NIVEAU MINISTERIEL PARAIT INSUFFISANT

1. Une contribution exceptionnelle de l'État pour l'exercice d'une compétence communale

Les communes bénéficient de la clause de compétence générale leur permettant de régler par délibération toutes les affaires relevant de leur niveau. Les principales compétences exercées relèvent des domaines suivants : urbanisme, logement, environnement, gestion des écoles préélémentaires et élémentaires.

Ainsi, concernant les écoles, l'article L.212-4 du code de l'éducation prévoit que « la commune a la charge des écoles publiques. Elle est propriétaire des locaux et en assure la construction, la reconstruction, l'extension, les grosses réparations, l'équipement et le fonctionnement ».

L'article L.212-5 du même code prévoit, par ailleurs, que la création des écoles publiques est une dépense obligatoire pour les communes, au même titre que les dépenses de rénovation et d'entretien.

Il en résulte que dans le cas du volet « écoles » du plan Marseille en grand, l'État se substitue largement au financement de cette compétence communale dans la mesure où, avec des subventions de 400 millions d'euros pour un total de travaux estimé à environ 850 millions d'euros (entre 845 et 870 millions d'euros selon les documents transmis) la part de financement de l'État serait de 47 %.

Dans ce contexte, il apparait absolument nécessaire pour l'État de mettre en place un suivi fin de l'utilisation des fonds qu'il met à disposition de la ville de Marseille.

2. Un suivi ministériel largement perfectible
a) Un suivi uniquement budgétaire par la DGCL

La DGCL opère un suivi exclusivement budgétaire de consommation de la subvention exceptionnelle de 254 millions d'euros allouée au volet « écoles » du plan Marseille en grand.

En effet, comme évoqué supra, elle n'est pas représentée au conseil d'administration de la SPEM. 

Aussi, la DGCL a essentiellement des échanges avec les services de la préfecture des Bouches-du-Rhône. Dans ce cadre, des points d'avancement sont notamment organisés en amont des conférences budgétaires (mai de chaque année) et des réunions de compte rendu de gestion (phase 1en mai et phase 2 en septembre), pour actualiser les échéanciers de décaissement des crédits de paiement.

En revanche, elle ne suit pas l'avancement des travaux au-delà des besoins nécessaires au versement des avances, acomptes et du solde pour chaque marché subséquent.

b) Un suivi général et peu approfondi par le secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté, parallèlement à une faible implication de la présidence et des services du Premier ministre

Il n'y a pas de suivi spécifique du volet « écoles » par le secrétariat d'État. En effet, si des réunions bilatérales sont organisées chaque semaine entre le directeur de cabinet adjoint et la sous-préfète en charge du suivi du plan, ces dernières visent à faire le point sur l'ensemble des dossiers et les échéances à venir.

Dans ce cadre, un seul document de suivi a été transmis aux rapporteurs spéciaux par le cabinet prenant la forme d'un tableau avec un onglet par domaine du plan Marseille en grand. La rénovation des écoles fait l'objet d'une seule ligne indiquant une échéance à 2031 et un état d'avancement « en cours » sans précision sur le nombre de chantiers en cours, terminés ou en phase de lancement.

D'après les éléments transmis, le volet « écoles » fait également l'objet de réunions mensuelles avec l'Élysée et Matignon pour l'aspect bâtimentaire et pédagogique. Pour autant, aucun document ou compte rendu relatif à ses réunions n'a été communiqué aux rapporteurs spéciaux autres que le tableau susmentionné.

c) Un suivi beaucoup plus fin par la préfecture, la ville et la SPEM

La préfecture préside un comité de suivi interne aux services de l'État pour chaque volet du plan dont le volet « écoles ». Par ailleurs la sous-préfète participe aux conseils d'administration de la SPEM.

Les services préfectoraux tiennent à jour un tableau des mesures du plan (celui transmis par les cabinets de la secrétaire d'État à la ville et à la citoyenneté et du premier ministre) et assurent un suivi budgétaire des crédits consommés.

Pour autant, aucun document de suivi (outils de reporting, notes...) n'a été transmis aux rapporteurs spéciaux.

Seule la ville de Marseille a fourni l'ensemble des comptes rendus depuis 2021 des comités de pilotage internes aux directions de la commune ainsi que les comptes rendus des réunions multilatérales organisées entre la préfecture, la ville, Fininfra, la SPEM et la DDTM.

Organisation de la comitologie pour le suivi du volet « écoles »
du plan Marseille en grand

Source : ville de Marseille

Si les rapporteurs spéciaux ne peuvent que saluer l'implication de la ville de Marseille marquée par une volonté politique forte de mener la rénovation des écoles de la ville à termes, à l'échéance définie de 10 ans, ils regrettent que le suivi au niveau des cabinets ministériels soit si succinct et se borne à définir et/ou rappeler des grandes orientations déjà connues des différents acteurs.

Concernant le suivi de la préfecture, si ce dernier est réel et contribue indéniablement à la cohérence d'ensemble du projet et à la bonne communication de l'ensemble des parties prenantes, il gagnerait à être formalisé avec plus de rigueur.

En conséquence, le suivi du volet « écoles » se caractérise par une comitologie importante qui permet de cadrer le projet et d'en suivre les avancées de manière hebdomadaire avec l'ensemble des acteurs. Ce suivi resserré qui s'explique par les enjeux sans précédent du projet nécessiterait cependant une plus grande formalisation et la réalisation d'indicateurs largement diffusés.

Recommandation n° 9 : Formaliser les documents de suivi du volet « écoles » du plan Marseille en grand et élaborer des indicateurs et outils de reporting partagés entre l'ensemble des acteurs (préfecture et cabinet du secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté).

3. La subvention exceptionnelle de l'État pour la rénovation des écoles marseillaises : un précédent pour d'autres collectivités ?

Alors que le Président de la République dans son discours du 2 septembre 2021 indiquait clairement que les investissements pour l'entretien, la rénovation ou la construction d'écoles « n'est pas de la compétence de l'État » et précisait ne pas vouloir « créer un précédent », le risque est pourtant réel. En effet, s'il est vrai que la situation de la ville de Marseille en termes de bâti scolaire et de sécurité des sites était particulièrement préoccupante au point où « l'apprentissage dans certaines écoles était devenu impossible », force est de constater que celle-ci n'est pas isolée.

Pour les collectivités de petite ou moyenne taille dotées d'un nombre limité d'établissements scolaires, le recours aux dotations d'investissement classiques de type DSIL, DSID ou DETR, éventuellement complétées par le fonds vert constitue souvent une aide suffisante d'autant que la loi n° 2024 du 29 mars 2024 tendant à tenir compte de la capacité contributive des collectivités territoriales dans l'attribution des subventions et dotations destinées aux investissements relatifs à la transition écologique des bâtiments scolaires permet désormais, pour les projets d'investissement ayant pour objet la rénovation énergétique des bâtiments scolaires, une participation minimale du maître d'ouvrage de 10 % du montant total des financements apportés par des personnes publiques contre 20 % dans le droit commun. Cette évolution doit permettre d'aider les collectivités pour lesquelles l'investissement est disproportionné au vu de leur capacité financière.

Pour autant, certains territoires présentent de nombreux établissements scolaires fortement dégradés et pourraient, sur l'exemple de ce qui a été mis en place à Marseille, solliciter une aide exceptionnelle de l'État. Malgré la volonté affichée du Président de la République de ne pas créer de précédent, le risque existe donc bel et bien.

À titre d'exemple, les rapporteurs spéciaux soulignent qu'en Ile-de-France 150 lycées sont considérés comme vétustes, soit 30 % du parc. En Seine-Saint-Denis, élèves et professeurs se sont récemment mobilisés en faisant grève et en diffusant des vidéos pour alerter sur les conditions de travail et d'accueil, évoquant en manque de moyens criant. Certains syndicats enseignants appellent à des budgets beaucoup plus importants pour rénover et améliorer tous les lycées qui méritent de l'être rapidement.

B. DES DIFFICULTÉS RENCONTRÉES DÈS LES PREMIÈRES PHASES DE TRAVAUX QUI N'ONT PAS, POUR AUTANT, CONDUIT À LA MISE EN PLACE DE BILANS INTERMÉDIAIRES

1. Les difficultés rencontrées lors du lancement des premières opérations de rénovation

Les premiers marchés publics lancés par la SPEM à la suite du premier marché subséquent ont rencontré quelques difficultés inhérentes à des opérations d'investissement de grande ampleur. Si certaines difficultés s'expliquent en partie par la situation conjoncturelle caractérisée par un contexte inflationniste et de tensions d'approvisionnement pour certains matériaux, d'autres sont plus classiques dans le cadre de la passation de marchés complexes.

Ainsi, dans le cadre de la première vague de travaux, les problèmes suivants ont été rencontrés :

- des études techniques complémentaires ont été demandées par les soumissionnaires dans le cadre du dialogue compétitif des marchés globaux de performance (MGP) ;

- un tour de négociation complémentaire a été organisé avec les soumissionnaires en dialogue compétitif ;

- l'attribution à une entreprise générale non-française d'un marché global de performance a engendré des difficultés d'appréhension de la réglementation liée aux MGP et globalement à la législation française ;

- des appels d'offres ont été infructueux sur un lot de second oeuvre en marchés allotis ;

- la faillite d'une entreprise sous-traitant sur un lot à large spectre de compétences ;

- des aléas ont été découverts en cours de chantier : cavités ; pollution des sols ;

- la reprise en maitrise d'ouvrage par la ville puis par la SPEM d'un projet de voirie attenant à un groupe scolaire par suite d'une décision de la Métropole ;

- des ajustements de programme demandés par la ville en cours de chantier.

2. Une absence de bilans intermédiaires pourtant nécessaires pour déployer le plus efficacement possible le plan « écoles » au niveau national

Si ces difficultés ne présentent aucun caractère anormal dans le cadre d'un investissement multi opérations sur 109 sites représentant 188 écoles, elles doivent cependant permettre d'anticiper au mieux les prochaines vagues et d'améliorer les procédures.

La ville de Marseille, à cet égard, a d'ailleurs identifié plusieurs pistes d'amélioration :

- optimisation du lancement des vagues par la SPEM : si la SPEM est un vecteur efficient, il pourrait être encore amélioré par la finalisation des recrutements nécessaires afin d'absorber l'activité en rythme de croisière et par la mise en place d'indicateurs renforcés ;

- optimisation des coûts de réalisation par un encadrement fort des programmes dès l'amont ;

- optimisation des frais financiers par la mobilisation des financements avec garantie de l'État afin d'obtenir des taux plus intéressants ;

- amélioration des performances techniques et environnementales ainsi que des clauses d'insertion au fur et à mesure des vagues de travaux.

Pour autant et malgré l'attention portée par la ville et par la SPEM aux retours d'expérience au fur et à mesure de la réalisation des opérations, aucun bilan n'existe à ce jour de manière formalisée afin de mettre en exergue les difficultés rencontrées pour chaque opération, les moyens de les surmonter voire de les éviter lors des prochaines vagues de réalisation.

Dans ce contexte, il apparait indispensable aux rapporteurs spéciaux d'élaborer des bilans intermédiaires par vague et/ou par opérations.

Recommandation n° 10 : élaborer des bilans intermédiaires pour chaque vague de travaux achevée (SPEM et ville de Marseille).

Cette nécessité parait d'autant plus prégnante que le 5 septembre 2023, le Président de la République a annoncé le lancement d'un plan de rénovation des écoles dans le but d'accélérer la rénovation des bâtiments scolaires sur l'ensemble du territoire avec un objectif affiché de 2000 écoles rénovées d'ici la fin 2024 et 40 000 écoles d'ici à 10 ans soit 90 % du bâti scolaire.

Depuis janvier 2023, l'État alloue en moyenne 1 million d'euros par projet avec des financements croisés : dotations d'investissement classiques, fonds vert, le programme EduRénov de la banque des territoires (avec une enveloppe de 2 milliards d'euros de prêts et 50 millions de crédits d'ingénierie), le fonds chaleur de l'agence de la transition écologique (Ademe)...

Dans ce contexte, il ne parait pas envisageable de mobiliser autant de crédits sans faire le lien entre l'expérience du volet « écoles » du plan Marseille en grand et ce plan national de rénovation du bâti scolaire.

Il est donc indispensable de tirer les conséquences et enseignements du projet marseillais afin d'augmenter l'efficience du plan national, ce qui rend d'autant plus nécessaire l'élaboration de bilans intermédiaires.

3. Une absence de réelle évaluation de l'école du futur alors même qu'une généralisation sur l'ensemble du territoire a déjà débuté

Comme évoqué supra, une école marseillaise sur 5 fait l'objet d'une expérimentation de l'école du futur avec le développement de projets pédagogiques innovants.

Pour autant, à ce jour, aucune évaluation objective n'a été mise en place afin d'analyser la pertinence pédagogique de ces dispositifs et de mesurer leur impact sur le climat scolaire, sur l'absentéisme et sur le niveau des apprentissages des fondamentaux.

En effet, à ce jour, l'inspection académique a réalisé une autoévaluation portant sur le ressenti des acteurs en termes de performance de résultats, de climat social et de qualité des liens avec les familles.

De même, alors qu'un des objectifs de « l'école du futur » était de réduire les inégalités et d'améliorer la mixité scolaire dans une ville où la fuite vers le privé représente une solution à la dégradation des conditions d'enseignement dans le public, aucune étude sur le sujet précise n'a été mise en oeuvre.

Si les rapporteurs spéciaux estiment que le caractère récent des différentes expérimentations peut expliquer l'absence d'évaluation formelle et objective à ce stade, ils estiment indispensable de mettre en place ces évaluations le plus rapidement possible afin de procéder aux ajustements nécessaires ou de mettre aux fins aux projets les moins efficaces. Ces évaluations, qui pourraient porter sur les années scolaires 2022-2023 et 2023-2024, devraient mesurer, notamment, l'impact des projets innovants en termes de mixité sociale et d'apprentissage des fondamentaux.

Elles permettront également d'ajuster les moyens dédiés aux expérimentations par rapport aux objectifs à atteindre.

De surcroit, le Président de la République, dans son discours aux recteurs du 25 août 2022, à annoncer la généralisation de l'expérimentation sur tout le territoire, avec la création d'un fonds d'innovation pédagogique de 500 millions d'euros et son élargissement aux collèges et lycées.

L'expérimentation « Marseille école du futur » doit, dans ce contexte, permettre de faire un premier bilan d'autant qu'au 31 août 2023, à la fin de la première année scolaire de déploiement du Conseil national de la refondation (CNR) Éducation, près de 20 000 intentions de concertations ont été signifiées par les écoles et les établissements, qui ont abouti à la validation de 3 093 projets par les instances académiques d'appui territorial.

98 % de ces projets sont ou seront mis en oeuvre dans des écoles et établissements du secteur public, dont 24 % dans l'éducation prioritaire. Près de 300 000 écoliers, plus de 435 000 collégiens, et plus d'un million d'élèves au total sont scolarisés dans les écoles et les établissements dont les projets ont été validés par les commissions académiques.

4. Une reprise de la maintenance à préparer le plus en amont possible

L'article 5 de l'accord cadre prévoit que la SPEM en tant que titulaire des marchés se voit confier, en sus des opérations de construction et de rénovation, des missions liées à la durabilité et à la conservation des écoles et de gros entretien renouvellement. Le détail de ces missions est présenté en annexe de l'accord cadre.

Les calculs relatifs aux dépenses de maintenance ont été établis avec une durabilité de 25 ans après chaque livraison. La ville précise cependant que ces éléments seront à adapter en fonction du portage effectif par la SPEM de l'exploitation maintenance.

Il en résulte qu'à compter de 2 049 pour les premières écoles livrées et de 2 056pour la dernière vague, la ville de Marseille reprendra à sa seule charge la maintenance et le gros entretien et renouvellement pour l'ensemble des 188 écoles rénovées et construites par la SPEM. 

Si la durée de vie de la SPEM de 40 ans est donc compatible avec cet échéancier, les rapporteurs spéciaux s'interrogent sur la sécurité juridique des missions liées à la durabilité dans la mesure où l'accord cadre, qui prévoit ces opérations de maintenance, est d'une durée de 10 ans.

Il parait donc nécessaire de s'assurer que la fin du contrat à la date initialement prévue ne fait pas obstacle à la poursuite des missions de maintenance de la SPEM. 

Au-delà de cette précision juridique, il est indispensable de prévoir dès à présent les conditions de reprise de la maintenance par les services de la ville de Marseille et de s'assurer que la ville disposera, en amont de cette reprise, de l'ensemble des moyens humains et techniques pour y faire face.

À ce jour, la commune a déjà créé, il y a deux ans, un pôle entretien et travaux des écoles et des crèches. Les capacités de ce pôle devront toutefois être adaptées à la livraison des 188 écoles rénovées et/ou construites par la SPEM. 

Recommandation n° 11 : élaborer un plan de reprise progressive de la maintenance des 188 écoles rénovées et construites par la SPEM, prévoyant les coûts y afférents et les moyens humains et techniques nécessaires (ville de Marseille).

CONCLUSION

Aux termes de leurs travaux, les rapporteurs spéciaux font le constat d'une situation particulièrement dégradée du bâti scolaire à Marseille, touchant l'ensemble des établissements. Cet état des lieux partagé par l'ensemble des acteurs, ville, enseignants, élèves et parents d'élèves nécessitait une réponse forte permettant une rénovation massive des établissements présentant pour certains des problèmes de sécurité importants.

Cette situation exceptionnelle a donc poussé le maire de la ville de Marseille, dans l'incapacité de rattraper dans des délais raisonnables l'absence ancienne et récurrente d'entretien des écoles, à solliciter l'aide de l'État qui a, lors de la loi de finances 2022, acté l'ouverture de 254 millions d'euros de subventions pour la rénovation de 188 écoles marseillaises.

Cette intervention de l'État, dans un domaine de compétence relevant exclusivement des communes, nécessite un suivi et un cadrage particulier qui pourraient largement être améliorés. Les rapporteurs spéciaux formulent plusieurs recommandations dans ce sens.

Cependant, en mettant de côté les améliorations possibles en termes de formalisme, force est de constater que les projets de rénovation et de construction font l'objet d'un portage politique fort, d'un investissement de l'ensemble des acteurs (préfecture, ville de Marseille et société publique des écoles marseillaises) et d'une structure juridique et opérationnelle créée ad hoc, la SPEM, permettant de mener ce chantier colossal.

Des doutes persistent toutefois sur la capacité à tenir le calendrier de 10 ans pour rénover et construire 188 écoles. Aussi, une montée en puissance de la SPEM est aujourd'hui nécessaire et des clarifications doivent être apportées sur le plan de financement.

Pour autant, les projets avancent, les premières réalisations devraient être livrées à la rentrée scolaire de septembre 2024 et les établissements livrés répondent aux enjeux actuels de transition écologique.

Ce volet « écoles » du plan Marseille en grand qui montre, pour l'heure, son efficacité doit donc être poursuivi avec un État qui doit tenir ses engagements financiers.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 19 juin 2024 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a entendu une communication de M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial, et Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale, sur le financement du volet « écoles » du plan « Marseille en grand ».

M. Claude Raynal, président. - Nous poursuivons par une communication de Mme Isabelle Briquet et M. Stéphane Sautarel, rapporteurs spéciaux de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », sur le volet « écoles » du plan « Marseille en grand ».

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. - La loi de finances initiale pour 2022 a ouvert 254 millions d'euros de subvention exceptionnelle pour la rénovation des écoles de Marseille. Avec mon collègue Stéphane Sautarel, nous avons décidé de contrôler l'utilisation de ces crédits, ce qui nous a amenés, de manière plus large, à contrôler le financement du volet « écoles » du plan « Marseille en grand ».

Pour bien comprendre les enjeux, il paraît nécessaire de contextualiser l'origine de ce plan.

Le 2 septembre 2021, le Président de la République a annoncé le lancement du plan Marseille en grand, avec pour objectif principal le rattrapage des retards accumulés par la commune dans le développement de services majeurs pour la population. En effet, estimant que la deuxième ville de France cumulait de nombreuses difficultés économiques, sociales, scolaires, sécuritaires, financières et un déficit d'infrastructures publiques, et était traversée par des inégalités fortes, le Président a jugé qu'il était du rôle de l'État de soutenir, d'appuyer et d'accompagner la ville dans une profonde restructuration d'ensemble.

L'objet du présent propos et de notre rapport n'est pas de porter une appréciation sur l'opportunité d'une telle démarche, mais plutôt d'évaluer l'utilisation des crédits dédiés au financement du volet « écoles » du plan.

Ce plan inédit d'un montant annoncé de 5 milliards d'euros s'articule autour de sept axes : les écoles et l'éducation, la sécurité, les mobilités, le logement, l'emploi et l'insertion, la santé et la culture.

Malgré ces montants colossaux, le plan n'a fait l'objet d'aucune contractualisation entre la ville et l'État et n'est matérialisé par aucune feuille de route, déclinée par domaines, par objectifs et par actions, et définissant un calendrier de réalisation précis pour chacun des volets. Il est donc difficile, voire impossible, de dresser un état exhaustif des actions à mener et à suivre.

Plus problématique encore, les crédits alloués par l'État au plan « Marseille en grand » ne sont pas suivis de manière consolidée, de sorte que le montant total de l'effort financier de l'État est non seulement très peu fiable, mais également évolutif dans le temps.

Alors que le montant fréquemment évoqué s'élève à 5 milliards d'euros, l'analyse des réponses reçues durant notre contrôle ne nous a pas permis de reconstituer cette somme ni d'identifier clairement l'origine des crédits.

J'en viens maintenant plus précisément au sujet de notre contrôle : le financement du volet « écoles » de ce plan.

Ce volet vise la rénovation de 188 écoles marseillaises. Il provient d'un constat ancien et largement partagé : le parc scolaire marseillais a accumulé dans le temps une dette d'entretien et de maintenance de plus en plus importante, qui rend le bâti des écoles vétuste, parfois dangereux pour ses usagers, peu adapté au changement climatique, sensible aux variations de température, ne résistant plus aux intempéries et n'ayant pas été adapté à l'évolution urbaine de la ville.

En 2016, le journal Libération titrait : « Écoles à Marseille, la honte de la République ». C'est dire si l'état de dégradation des établissements marseillais était avancé, allant même jusqu'à rendre difficile, voire impossible, l'enseignement dans certains cas.

Consciente de cette situation catastrophique, la nouvelle majorité municipale a décidé de lancer un plan « écoles » ambitieux, visant à rénover l'ensemble des 470 établissements de la ville.

Pour autant, le maire a rapidement été confronté à un principe de réalité et à l'impossibilité de mener seul, dans des délais raisonnables, un projet d'une telle ampleur. Il a donc sollicité le Président de la République. Les annonces de ce dernier sont une réponse positive à cet appel à l'aide, afin de permettre l'aboutissement d'un travail engagé par la ville elle-même.

Il en découle que le plan de la ville a été scindé en deux parties : d'une part, 188 écoles bénéficient de l'aide de l'État pour les travaux de rénovation ou de restructuration les plus lourds, voire pour des constructions nouvelles ; d'autre part, 304 écoles sont rénovées directement par la ville elle-même pour les opérations « plus légères ».

M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. - Pour rénover et réhabiliter les 188 écoles retenues dans le volet « écoles » du plan Marseille en grand, une enveloppe de 254 millions d'euros en autorisations d'engagement a été ouverte sur les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » via la loi de finances initiale pour 2022. Par ailleurs, trois mois après le lancement du plan, le Premier ministre a validé une augmentation de 150 millions d'euros, portant ainsi le montant total de l'enveloppe à 400 millions d'euros.

Ces 150 millions d'euros supplémentaires proviennent de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), à hauteur de 11,7 millions d'euros, de la dotation politique de la ville (DPV), pour 3,15 millions d'euros, et de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), pour 66 millions d'euros.

Il manque donc 65 millions d'euros par rapport aux 400 millions annoncés. À ce stade, personne n'a été en mesure de nous indiquer leur provenance, ce qui est problématique puisque l'équilibre général du financement du projet est basé sur ce montant.

Cette enveloppe budgétaire a été complétée par une garantie de 650 millions d'euros d'emprunts apportée par l'État.

Au-delà du financement, vu l'ampleur et les caractéristiques du volet « écoles » du plan Marseille en grand, la ville et l'État ont décidé de créer une structure spécifique, sous la forme d'une société publique locale d'aménagement d'intérêt national. Cette société, dénommée société publique des écoles marseillaises (Spem), a vocation à assurer la maîtrise d'ouvrage des opérations du plan « écoles », pour construire, réhabiliter et remettre à niveau 188 écoles.

Le système élaboré prend ainsi la forme d'un partenariat public-public, dans lequel la ville confie à la Spem la réalisation des opérations de rénovation et de construction des écoles au moyen de plusieurs contrats, via des marchés subséquents, dans une relation de quasi-régie. La Spem passe ensuite l'ensemble des marchés nécessaires à la réalisation des travaux.

Le recours à une société publique locale d'aménagement d'intérêt national vise en premier lieu un objectif financier puisqu'il permet de faire porter la dette des investissements à une structure autre que la ville de Marseille. Il a également vocation à répondre à un besoin d'ingénierie.

J'en viens au financement. Nos travaux nous ont permis de constater que le coût total du projet serait de 1,8 milliard d'euros alors que les travaux sont estimés à 850 millions d'euros. Le delta se compose des dépenses annexes, notamment celles qui sont relatives aux intérêts d'emprunts, à la maintenance et à l'indexation.

La ville versera donc à la Spem une redevance estimée à 50 millions d'euros annuels pendant vingt-cinq ans, à laquelle s'ajouteront les dépenses de maintenance et les dépenses de la ville pour les 304 écoles dont elle garde la maîtrise d'ouvrage. Cela représente environ 40 millions d'euros d'investissements annuels pendant dix ans.

Au total, nous avons calculé que le coût annuel moyen de la rénovation des écoles marseillaises avoisinerait les 110 millions d'euros, soit 30 % des dépenses d'investissement prévues par la ville dans son plan pluriannuel d'investissement (PPI). Dans ce contexte, il nous semble légitime de poser la question de la soutenabilité d'un tel investissement, alors que la ville présente d'autres ambitions importantes en matière de verdissement et d'accès au logement, à la santé et à la culture.

De surcroît, le plan de financement présente des incohérences qui, à ce stade, ne nous permettent pas d'affirmer que le montant total ne sera pas plus élevé.

Nous avons également des doutes sur le respect du calendrier annoncé. En effet, la Spem n'a pas encore atteint son rythme de croisière et doit encore procéder à des recrutements. Si la première vague de travaux tient les délais, il est important de préciser que de nombreux marchés avaient déjà été passés, avant la création de la société, par la ville qui les lui a transférés, ce qui a contribué à un avancement rapide. Les prochaines vagues de travaux seront encore plus importantes, avec un nombre croissant d'écoles à rénover et à construire.

Toutefois, ne soyons pas trop pessimistes : une dizaine d'écoles sera livrée dès la rentrée de 2024. Nous avons d'ailleurs visité deux d'entre elles, qui présentent des qualités de conception indéniables et prennent en compte le changement climatique.

Ce projet colossal et inédit à l'échelle d'une ville fait l'objet d'un portage politique fort et d'un investissement de l'ensemble des acteurs. Il bénéficie également d'une structure juridique et opérationnelle ad hoc, la Spem, qui montre pour l'instant son efficacité.

Si l'État tient ses engagements financiers, si la ville parvient à se coordonner avec la métropole, alors même que les relations entre ces deux entités sont pour le moins complexes, et si le suivi de l'avancement des travaux est renforcé et formalisé, gageons que ce pari un peu fou pourra devenir une réalité. C'est une nécessité pour les élèves et les enseignants de la ville.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Le travail conduit par les rapporteurs spéciaux nous plonge dans la réalité de la politique de rénovation des bâtiments scolaires et montre qu'il s'agit là d'un vrai sujet. Toutefois, nous avons besoin de davantage de clarification. Qui fait quoi ? Quel est le coût exact du projet ? Ce dispositif est-il duplicable ?

Par ailleurs, je souhaiterais savoir si l'État, dont les fonctions régaliennes sont en tuyaux d'orgue - je pense au financement du ministère de l'intérieur via la DSIL et à l'appui de l'éducation nationale -, a travaillé avec la ville de Marseille.

Quelle stratégie a été employée ? Un travail collégial permettant de déterminer l'évolution démographique selon les quartiers de la ville a-t-il été mené ? La rénovation devrait aussi tenir compte du périmètre de la carte scolaire.

Les questions de fonctionnalité, d'environnement immédiat, d'habitat, de structures associatives et de parcours éducatifs hors temps scolaires ont-elles été intégrées ?

Selon la Caisse des dépôts et consignations, les rénovations de bâtiments scolaires nécessiteraient de contracter des emprunts sur quarante ans : c'est de la folie. Avez-vous davantage d'éléments sur les conditions de financement ?

Enfin, je formulerai une remarque plus personnelle. Ce dispositif a au moins le mérite d'être original et d'exister, mais il conviendrait sans doute de réfléchir, à l'échelle des départements, à une structure ou une coordination portant sur le devenir des écoles partout en France.

L'effondrement démographique est très rapide : au lieu de verser dans le populisme en maintenant les écoles là où il n'y a presque plus d'élèves, tirons la sonnette d'alarme ! Il y va de la réussite des enfants.

M. Thierry Cozic. - Je tiens à saluer la qualité du travail des rapporteurs spéciaux sur ce sujet peu connu. Nous avons attendu d'être au fond du trou pour enfin sortir la tête de l'eau : c'est effarant ! Cela pose la question d'un contrôle sur le territoire.

Le modèle retenu via la Spem a-t-il vocation à être appliqué à d'autres villes ? Existe-t-il une taille critique des villes pouvant être éligibles à ce dispositif ? Par ailleurs, serait-il possible de l'élargir aux autres strates locales que sont les départements et les régions ? Il me semble que ce modèle novateur mérite d'être poursuivi.

M. Bernard Delcros. - Parmi les engagements financiers de l'État, quelle part relève de crédits de droit commun et quelle part relève de crédits exceptionnels ? Le modèle retenu à Marseille est-il spécifique ou peut-il s'étendre à d'autres villes ?

M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. - Avant le renouvellement de la municipalité, l'initiative d'un contrat de partenariat public-privé (PPP) avait été lancée afin de répondre au délabrement du parc scolaire marseillais. Or il n'a jamais abouti.

Le rapporteur général demande des clarifications concernant le rôle de chacun et les conditions de financement. Aujourd'hui, seuls 254 millions d'euros relèvent d'une subvention exceptionnelle. Les autres crédits sont des crédits de droit commun. Je le rappelle, il existe un gap de 65 millions d'euros qui n'est, à ce jour, pas couvert.

La gestion de la TVA, plus particulièrement l'éligibilité à la TVA ou au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), reste une grande inconnue. Ni la ville de Marseille, ni l'administration fiscale, saisie par rescrit, ni la Spem, ni la préfecture des Bouches-du-Rhône, ni les services centraux de l'État n'ont été capables de répondre à nos interrogations.

La direction générale des collectivités locales (DGCL) suit uniquement les engagements financiers mais pas l'avancement des travaux

Il n'existe aucun document contractualisé concernant le pilotage des opérations. Sur le sujet, seul le discours du Président de la République fait foi et nous n'avons pas pu entendre le cabinet du Président. Ainsi, l'opacité demeure.

Sur le volet scolaire, je vous rassure : les échanges que nous avons eus sur place avec le directeur académique des services de l'éducation nationale (Dasen) ont confirmé que les effectifs de la carte scolaire sont bien pris en compte. Il n'est donc pas question de rénover des écoles là où il n'y a pas d'élèves.

La population scolaire marseillaise est stable, mais elle n'est pas répartie de la même manière que par le passé. Il est donc nécessaire de rééquilibrer l'offre d'accueil entre les quartiers.

Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale. - Nous avons pour seule feuille de route le discours du Président de la République ; les choses se construisent donc de façon progressive.

Indéniablement, la préfecture des Bouches-du-Rhône et la ville de Marseille ont conduit un travail en profondeur sur le terrain, en concertation avec l'ensemble des acteurs impliqués. Bien entendu, le scolaire, le périscolaire, l'environnement et le nombre d'élèves ont été pris en compte. En revanche, le suivi réalisé par le ministère est extrêmement perfectible. D'où les recommandations que nous avons formulées.

Il est difficile d'évaluer si ce dispositif peut être appliqué à d'autres villes. Marseille se trouve dans une situation spécifique, car les bâtiments scolaires sont très dégradés, mais le reste du territoire est parsemé d'écoles qui ont de quoi faire aussi pitié.

Nous devons d'abord faire le bilan du modèle propre à Marseille avant de l'étendre à d'autres villes.

M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial. - Il serait intéressant d'étendre ce dispositif, à l'image de l'élargissement de la Société du Grand Paris (SGP) au RER métropolitain. La Spem est amenée à travailler dans l'immédiateté. Aussi, elle n'a pas envisagé la transposition du modèle à d'autres villes. D'où la nécessité d'avoir un retour d'expérience.

Au-delà du portage financier se pose la question de l'ingénierie. En l'occurrence, il nous a été confirmé que la Spem ne travaille pas avec l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), ce qui est un peu ennuyeux.

Enfin, concernant les conditions de financement, notez que les prêts consentis, soit auprès de la Banque des territoires, soit auprès d'une banque locale, s'étalent sur vingt-cinq ans. Parallèlement, un dossier a été monté pour obtenir un financement plus large via la Banque européenne d'investissement (BEI). C'est pourquoi la garantie de l'État est essentielle.

Nous n'en sommes qu'au début des opérations, sachant que nous attendons une dizaine de livraisons d'ici à la fin de l'année sur les 188 écoles concernées.

La commission a adopté les recommandations des rapporteurs spéciaux et autorisé la publication de leur communication sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Cabinet de la secrétaire d'État à la ville et à la citoyenneté

- M. Yannick LLORET, directeur de cabinet adjoint ;

- Mme Chloé N'GUYEN, conseillère chargée du Parlement et de l'International.

Direction générale des collectivités locales (DGCL)

- M. Thomas FAUCONNIER, sous-directeur des finances locales et de l'action économique ;

- M. BLAIS, sous-directeur adjoint des finances locales et de l'action économique ;

- M. Nicolas SALEILLE, adjoint au chef de bureau des concours financiers de l'État.

LISTE DES DÉPLACEMENTS

Mairie de Marseille

- M. Benoit PAYAN, maire de Marseille ;

- M. Pierre-Marie GANOZZI, adjoint au maire en charge du plan écoles ;

- M. Yannick TONDUT, directeur général adjoint "ville de demain" ;

- Mme Léa MARTINOVIC, conseillère éducation du maire de Marseille ;

- Mme Delphine GUISARD, directrice des grands projets de la direction générale adjointe relations extérieures et grands projets (DGAREP) ;

- M. Jérôme BERTRAND, chargé de mission à la direction du secrétariat général.

Préfecture des Bouches-du-Rhône

- M. Christophe MIRMAND, préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur ;

- Mme Virginie AVEROUS, sous-préfète chargée du suivi et de l'animation du plan Marseille en Grand ;

- Mme Adeline CALEDONIEN, responsable du suivi du plan Marseille en Grand à la préfecture ;

- M. Stanislas VARENNES, directeur du service de la coordination interministérielle et de l'appui territorial ;

- M. Dris SEGHIER, chargé de mission projet métropolitain et politiques partenariales ;

- M. Adrien FERRAND, stagiaire auprès de Mme AVÉROUS.

Services déconcentrés de l'État

- M. Jean-Yves BESSOL, directeur académique des services de l'éducation nationale ;

- M. Charles VERGOBBI, adjoint au directeur départemental des territoires et de la mer ;

- Mme Solène JUNGER, adjointe au chef de service, cheffe du pôle renouvellement urbain à la direction départementale des territoires des Bouches-du-Rhône.

Société publique des écoles marseillaises (SPEM)

- M. Vincent BOURJAILLAT, directeur général de la société publique des écoles marseillaises ;

- M. Dominique HUOT DE SAINT ALBIN, secrétaire général ;

- M. Mathieu PROCACCI, directeur de la maitrise d'ouvrage ;

- M. Olivier DAVIDAU, directeur de la programmation et de l'innovation ;

- M. Nicolas NEGREL, directeur financier.

ANNEXE

Tableau des subventions ANRU transmis par la préfecture
des Bouches-du-Rhône

TABLEAU DE MISE EN oeUVRE ET DE SUIVI (TEMIS)

N° de la proposition

Proposition

Acteurs concernés

Calendrier prévisionnel

Support

1

Garantir les 400 millions d'euros annoncés pour le volet « écoles » du plan Marseille en grand, en ouvrant ou fléchant les 65 millions d'euros manquants l'équilibre du projet ayant été construit sur ce montant

Gouvernement

2025

PLF 2025

2

Réaliser un bilan des avantages et inconvénients d'un recours à un partenariat public-public afin d'analyser l'efficacité de ce montage et sa transposabilité à d'autres investissements d'ampleur des collectivités

Gouvernement, société publique des écoles marseillaises (SPEM), ville de Marseille

À mi-parcours de l'accord cadre soit en 2028

Rapport d'un corps d'inspection

3

Élaborer un plan de financement stabilisé incluant l'ensemble des dépenses de travaux, de maintenance et les frais annexes ainsi que l'ensemble des ressources en précisant leur origine

SPEM et ville de Marseille

D'ici la fin de l'année 2024

Rapport ad hoc sur les modalités de financement de la rénovation des 188 écoles

4

Préciser et sécuriser les flux financiers entre la ville et la société publique des écoles marseillaises (SPEM) afférents au paiement de la TVA

SPEM et ville de Marseille

D'ici la fin 2024

Réponse au rescrit fiscal

5

Finaliser rapidement les recrutements nécessaires à la pleine activité de la SPEM pour assurer le lancement des travaux de la vague 2 et des suivantes

SPEM

Premier semestre 2025

 

6

Élaborer un document consolidé et partagé entre les acteurs, précisant les sites, les écoles et la nature des travaux envisagés pour chacune des 7 vagues

SPEM et ville de Marseille

D'ici la fin 2024

Tableurs informatiques communs à la ville et à la SPEM

7

Mettre à jour régulièrement les documents listant les écoles à rénover par vague pour tenir compte des aléas ou des nouvelles données démographiques

SPEM et ville de Marseille

Dès à présent, au moins une fois par an

Tableurs informatiques communs à la ville et à la SPEM

8

Renforcer le dialogue et la coordination entre la ville et la métropole pour poursuivre le volet « écoles » du plan Marseille en grand de manière coordonnée

Ville de Marseille et métropole Aix-Marseille-Provence

Dès à présent

 

9

Formaliser les documents de suivi du volet « écoles » du plan Marseille en grand et élaborer des indicateurs et outils de reporting partagés entre l'ensemble des acteurs

Préfecture et cabinet du secrétariat d'État à la ville et à la citoyenneté

D'ici la fin 2024

Comptes rendus des réunions préfecture-cabinets ministériels

10

Élaborer des bilans intermédiaires pour chaque vague de travaux achevée

SPEM et ville de Marseille

À la fin de chaque marché subséquent

Bilan ad hoc à réaliser

11

Élaborer un plan de reprise progressive de la maintenance des 188 écoles rénovées et construites par la SPEM, prévoyant les coûts y afférents et les moyens humains et techniques nécessaires

Ville de Marseille

Avant la reprise de la maintenance par la ville

Plan ad hoc à

réaliser


* 1 Discours du Président de la République, Emmanuel Macron, prononcé le 2 septembre 2021.

* 2 Discours du Président de la République, Emmanuel Macron, prononcé le 2 septembre 2021.

* 3 Dispositif militaire et de formation professionnelle destiné aux jeunes de 18 à 25 ans les plus en difficulté et éloignés de l'emploi en vue de leur insertion sociale et professionnelle ». Le SMV propose un parcours individualisé de 8 à 12 mois axé d'une part sur l'apprentissage des règles de vie en collectivité et en entreprise et d'autre part sur la formation professionnelle. Les volontaires sont rémunérés et ont la possibilité de passer le permis de conduire.

* 4 Rapport d'information de M. Marc Laménie fait au nom de la commission des finances sur le Service militaire volontaire - octobre 2023 - https://www.senat.fr/rap/r23-034/r23-0341.pdf.

* 5 Mission « flash » sur la contractualisation, communication des députées Stella Dupont et Bénédicte Taurine devant la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l'Assemblée nationale, 2020.

* 6 Instruction du Premier ministre n°6231/SG du 20 novembre 2020 relative à l'élaboration des contrats de relance et de transition écologique.

* 7 Société publique locale d'aménagement d'intérêt national.

* 8 Les Missions d'Intérêt Général et d'Aide à la Contractualisation (MIGAC) sont définies par les articles L. 162-22-13, D. 162-6, D. 162-7 et D. 162-8 du code de la sécurité sociale. Le suivi des financements alloués est assuré par les ARS.

* 9 Le fonds d'intervention régional (FIR) a été créé le 1er mars 2012, en application de l'article 65 de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2012. Il finance des actions et des expérimentations validées par les agences régionales de santé en faveur de : la performance, la qualité, la coordination, la permanence, la prévention, la promotion ainsi que la sécurité sanitaire.

* 10 Cela signifie un objectif de bâtiments à consommation énergétique nette nulle, soit une quantité totale d'énergie utilisée par le bâtiment, calculée sur une base annuelle, à peu près égale à la quantité d'énergie renouvelable créée sur le site.

* 11 L'addition des 188 écoles rénovées et construites par la SPEM et les 304 écoles rénovées par la ville de Marseille aboutit à un total de 492 écoles contre 470 régulièrement affichées par la ville. L'écart provient, d'une part, de nouvelles écoles construites et qui, de fait, n'existent pas encore, parmi les 188 confiées à la SPEM et, d'autre part, par certains sites aujourd'hui comptés comme une école mais prochainement comptés comme deux établissements (maternelle et élémentaire).

* 12 Discours du Président de la République, Emmanuel Macron, le jeudi 2 septembre 2022 à Marseille.

* 13 Les sociétés publiques locales d'aménagement et les sociétés publiques locales d'aménagement d'intérêt national revêtent la forme de sociétés anonymes régies par le livre II du code de commerce. Ces sociétés exercent leurs activités exclusivement pour le compte de leurs actionnaires et sur le territoire des collectivités territoriales et des groupements de collectivités territoriales qui en sont membres. La réalisation de l'objet de ces sociétés concourt à l'exercice d'au moins une compétence de chacune des collectivités territoriales et de chacun des groupements de collectivités territoriales qui en sont actionnaires.

* 14 L'Etat ou l'un de ses établissements publics peut créer, avec au moins une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales, une société publique locale d'aménagement d'intérêt national dont ils détiennent la totalité du capital.

* 15 Fin Infra est un service à compétence nationale rattaché au ministère des finances et de l'économie qui conseille les entités publiques dans la conduite de leurs projets d'investissement. Son activité est définie par le décret n° 2016-522 du 27 avril 2016 en application de l'article 67 de l'ordonnance du 23 juillet 2015.

* 16 Sont soumis aux règles définies au titre II les marchés publics conclus par un pouvoir adjudicateur, y compris lorsqu'il agit en qualité d'entité adjudicatrice, avec une personne morale de droit public ou de droit privé lorsque les conditions suivantes sont réunies :

1° Le pouvoir adjudicateur exerce sur la personne morale concernée un contrôle analogue à celui qu'il exerce sur ses propres services ;

2° La personne morale contrôlée réalise plus de 80 % de son activité dans le cadre des tâches qui lui sont confiées soit par le pouvoir adjudicateur qui la contrôle, soit par d'autres personnes morales que celui-ci contrôle, soit par ce pouvoir adjudicateur et d'autres personnes morales que celui-ci contrôle ;

3° La personne morale contrôlée ne comporte pas de participation directe de capitaux privés au capital, à l'exception des formes de participation de capitaux privés sans capacité de contrôle ou de blocage requises par la loi qui ne permettent pas d'exercer une influence décisive sur la personne morale contrôlée.

* 17 La TVA récupérable est le montant de la taxe sur la valeur ajoutée qu'une entreprise assujettie à la TVA peut récupérer. Après calcul de cette déduction, l'entreprise verse seulement à l'Etat la TVA nette qui est la différence entre la TVA collectée et la TVA déductible.

* 18 Rénovation : Vayssières, Aygalades Oasis, Saint André la Castellane, Bouge, Malpassé les Olivers - Construction neuve : Marceau, Jolie Manon.

* 19 Sans précision sur le nombre d'écoles concernées par site et au total.

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